- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
I. – L’article 38 sexdecies E du code général des impôts est abrogé.
Cet amendement du groupe LFI-NFP vise à supprimer le régime d’amortissement dégressif pour les matériels et équipements utilisés par les entreprises agricoles, dans la mesure où cette niche fiscale est inutile et incite au suréquipement.
La France est la championne des charges de mécanisation. Les machines représentent 30 à 40 % des charges des exploitations. Elles sont donc une part considérable de la dette des exploitations, et participent largement aux faillites. Cette technicisation permanente de l’agriculture est en lien direct avec une autre dynamique : l’agrandissement des surfaces, de plus 25 % en 10 ans ! On sait par ailleurs que les émissions de GES de la consommation d’énergie du secteur agricole ont augmenté de 5 % entre 2019 et 2020, avant les aides du plan de résilience.
La course au surinvestissement est encouragée par la fiscalité : instauré par la loi Macron de 2015, le suramortissement permet de bénéficier d’une déduction exceptionnelle de 40 % de la valeur du bien, et a été élargi aux matériel agricole en 2018. Cet amortissement dégressif est un artifice comptable dont l’objectif est de gonfler une charge à très court terme en vue de réduire l’assiette fiscale puis sociale. Les amortissements d’achat de machines viennent en déduction du résultat imposable sur 5 ans en linéaire. Les tracteurs peuvent eux être amortis en mode dégressif. L’art. 355‑39 du CGI exonère de la TVA les matériels agricoles ainsi que les pièces de rechange. Les charges de fonctionnement sont déductibles sans limitation, et la TVA est récupérable. Par ailleurs, les taux pratiqués les premières années sont sans rapport avec la dépréciation réelle du bien à amortir.
Ce dispositif constitue ainsi une niche fiscale et sociale qui, sous couvert de réduire l’imposition des exploitations, fragilise structurellement l’agriculture, dégrade l’environnement et la protection sociale des paysan-nes. La Cour des Comptes alerte d’ailleurs sur cette tendance dans son rapport sur la politique d’installation des nouveaux agriculteurs et de transmission des exploitations agricoles.
Si nous voulons renouer avec une agriculture paysanne et respectueuse de la biodiversité, cette dangereuse incitation au suréquipement doit être supprimée. C’est donc dans une perspective de transition écologique et sociale de nos modèles agricoles que nous présentons cet amendement travaillé avec la Confédération paysanne.