- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Au chapitre VII du titre II de la première partie du livre premier du code général des impôts, il est inséré un article 302 bis K bis ainsi rédigé :
« Art. 302 bis K bis I. – À compter du 1er janvier 2025, une contribution additionnelle, dénommée taxe de solidarité sur les billets d’avion, est due par les entreprises de transport aérien public.
II. – La taxe est assise sur le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqués en France, quelles que soient les conditions tarifaires accordées par le transporteur, à l’exception :
a) Des personnels dont la présence à bord est directement liée au vol considéré, notamment les membres de l’équipage assurant le vol, les agents de sûreté ou de police, les accompagnateurs de fret ;
b) Des passagers, du fret du courrier reprenant leur vol après un atterrissage forcé en raison d’incidents techniques, de conditions atmosphériques défavorables ou de cas de force majeure.
La taxe est exigible pour chaque vol commercial, à l’exception des vols entre les départements ou collectivités d’outre-mer et la France métropolitaine ainsi qu’entre ces mêmes départements ou collectivités d’outre-mer.
Pour la perception de la taxe, les évacuations sanitaires d’urgence ne sont pas considérées comme des vols commerciaux de transport aérien public.
III. – 1. Le tarif de la taxe, perçue en fonction de la destination finale, et de la catégorie de chaque passager, selon le tableau suivant :
Destination finale du passager | Passager voyageant dans un jet privé dit « aviation d’affaire » | Passager pouvant bénéficier, sans supplément de prix, de services à bord auxquels l’ensemble des passagers ne peut accéder gratuitement | Autre passager |
Destination à moins de 1 000 km | 120 € | 60 € | 10 € |
Destination à plus de 1 000 km et moins de 2 200 km
| 360 € | 180 € | 30 € |
Destination à plus de 2 200 km | 1200 € | 400 € | 60 € |
2. Le tarif de la taxe est de 50 € par tonne de courrier ou de fret embarquée.
À compter de l’année 2026, ces tarifs sont revalorisés chaque année dans une proportion égale au taux prévisionnel de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac associé au projet de loi de finances de l’année. Ces tarifs annuels entrent en vigueur pour les vols effectués à compter du 1er avril de l’année.
IV. – 1. Les entreprises de transport aérien déclarent, au plus tard le dernier jour de chaque mois, conformément au modèle prescrit par l’administration de l’aviation civile, le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqués le mois précédent pour les vols effectués au départ de la France.
2. Ces déclarations sont adressées par voie électronique aux comptables du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Concomitamment, les redevables acquittent cette contribution de solidarité par télépaiement.
3. Les déclarations mentionnées au 1. Et au 2. sont contrôlées par les services de la direction générale de l’aviation civile. À cette fin, les agents assermentés peuvent examiner sur place les documents utiles.
4. À défaut de déclaration dans les délais, il est procédé à la taxation d’office sur la base des capacités d’emport offertes par les types d’aéronefs utilisés pour l’ensemble des vols du mois au départ de chaque aérodrome et exprimées comme suit :
a) nombre total de sièges offerts pour les avions passagers ;
b) nombre total de sièges offerts au titre du trafic passagers et charge maximale offerte pour le trafic de fret et de courrier pour les avions emportant à la fois des passagers, du fret ou du courrier ;
c) charge marchande totale pour les avions cargos.
5. En cas de manquement aux obligations déclaratives la taxation d’office prévue au 4. est appliquée, majorée d’un intérêt de retard prévu à l’article 1727 du présent code.
6. En cas de déclaration frauduleuse constatée par les services de la direction générale de l’aviation civile, le montant de cinq fois la taxation d’office prévue au 4. est appliqué.
V. – Sous réserve des dispositions qui précèdent, le recouvrement de la taxe est assuré par les agents comptables du budget annexe « contrôle et exploitation aériens » selon les procédures, sûretés, garanties et sanctions applicables en matière de taxes sur le chiffre d’affaires.
Le contentieux est suivi par la direction générale de l’aviation civile. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées comme en matière de taxes sur le chiffre d’affaires.
Cet amendement des députés LFI-NFP vise à fixer des niveaux de taxe sur les billets d’avion cohérents avec les engagements pris par la France de réduire ses émissions de gaz à effet de serre dans le cadre des Accords de Paris.
Les émissions du secteur aérien ont augmenté de 85 % entre 1990 et 2019 en France (ADEME). Avec 24,2 millions de tonnes de CO2, cela représente 5,3 % des émissions globales françaises. Sans aucune politique d’envergure, elles seraient amenées à tripler en Europe d’ici 2050. Cette croissance des émissions aériennes est incompatible avec la neutralité carbone désirée par la France d’ici 2050 : il nous faut diviser par six les émissions de gaz à effet de serre du territoire. La décarbonation du secteur aérien joue ainsi un rôle phare dans l’atteinte de cet objectif. Or, notre fiscalité aujourd’hui ne permet pas de limiter certains comportements néfastes pour l’environnement, en premier lieu l’utilisation de jets privés.
L’idée provient de la Convention citoyenne pour le climat. A l’inverse d’une reprise « sans filtre » à laquelle il s’était engagé, Emmanuel Macron a supprimé par ordonnances et par décrets les dispositions insuffisantes de la taxe sur le transport aérien qui existait depuis 2006 présente à l’article 302 bis K du CGI. Déjà vidé de son contenu, cet article doit même être abrogé dès le premier janvier 2025.
Le montant de cette contribution est de 10 euros pour chaque vol de moins de 1 000 kilomètres, de 30 euros pour chaque vol de moins de 2200 kilomètres et de 60 euros pour chaque vol au-delà. Cette contribution est portée à 120, 360 et 1200 euros lorsque le passager voyage à bord d’un jet privé, qui relève d’un choix de confort de toute façon très onéreux. En augmentant mécaniquement le prix des billets d’avion, cette taxe viendra réduire la distorsion de fiscalité qui profite aujourd’hui au secteur aérien, et favoriser l’adoption de modes de transport moins carbonés, en premier lieu le train.
La hausse du montant des taxes est estimée à 4,2 milliards d’euros, elle pourra être affectée à l’investissement dans le ferroviaire et les transports en commun. Une partie de ces recettes peut également financer l’accompagnement des salariés du secteur via des dispositifs publics de formation et de transition professionnelles.
Parce que nos émissions de gaz à effet de serre ne réduiront pas sans une politique ambitieuse et courageuse, nous appelons donc à désinciter fiscalement les modes de transport les plus polluants. Il s’agit du seul chemin qui vient à la fois réduire notre dette budgétaire, et, beaucoup plus important, notre dette climatique.
Cet amendement a été rédigé avec le concours du Réseau Action Climat.