- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le tableau du quatrième alinéa de de l’article 777 est ainsi rédigé :
FRACTION DE PART NETTE TAXABLE | TARIF applicable ( %) |
N’excédant pas 80 000 € | 2,5 |
Comprise entre 80 000 € et 126 200 € | 6,5 |
Comprise entre 126 200 € et 180 000 € | 9 |
Comprise entre 180 000 € et 228 700 € | 24 |
Comprise entre 228 700 € et 329 000 € | 30 |
Comprise entre 329 000 € et 429 600 € | 36,2 |
Comprise entre 429 600 € et 674 800 € | 40 |
Comprise entre 674 800 € et 902 838 € | 47 |
Comprise entre 902 838 € et 1 266 000 € | 54 |
Comprise entre 1 266 000 € et 1 630 000 € | 62 |
Comprise entre 1 630 000 € et 2 340 000 € | 69 |
Comprise entre 2 340 000 € et 2 925 000 € | 76 |
Comprise entre 2 925 000 € et 4 095 000 € | 80 |
Comprise entre 4 095 000 € et 5 265 000 € | 85 |
Comprise entre 5 265 000 € et 10 530 000 € | 90 |
Comprise entre 10 530 000 € et 12 000 000 € | 95 |
Au-delà de 12 000 000 € | 100 |
2° Au premier alinéa de l’article 779, le montant : « 100 000 €» est remplacé par le montant« 120 000 €».
3° Au deuxième alinéa de l’article 784, les mots : « à l’exception de celles passées depuis plus de quinze ans, » sont supprimés.
II. – La perte de recettes pour l’État résultant du II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Par cet amendement, les députés LFI-NFP proposent de réformer l’impôt sur l’héritage pour le rendre plus progressif en ciblant les plus hauts patrimoines et instaurer un héritage maximum.
Comme le démontre une étude du Conseil d’Analyse Économique (CAE) , l’héritage est un facteur de plus en plus déterminant dans la Constitution du patrimoine dans les pays industrialisés, ce qui se traduit par un fort accroissement des inégalités. Le patrimoine hérité est en effet le plus inégalement réparti, puisque que 40 % des Français n’héritent de rien, pendant que les 0,1 % les plus riches héritent en moyenne de 12,6 millions d’euros, 180 fois l’héritage médian.et ne paient, en moyenne, que 10 % d’impôt dessus.
Le patrimoine a désormais une place démesurée dans la répartition des richesses dans notre pays. En effet, le CAE montre qu’aujourd’hui 60 % des patrimoines sont issus de l’héritage, contre 35 % au début des années 1970. Par ailleurs, selon France stratégie dans son rapport de 2017 « Peut-on éviter une société d’héritiers ? », les sommes transmises par succession et donation équivalent à environ 19 % du revenu disponible net des ménages en 2015 contre seulement 8 % en 1980.
Si, comme l’a rappelé Charles de Courson lors de nos précédents débats sur le sujet, l’envolée des prix de l’immobilier ces dernières décennies joue certainement derrière les chiffres du CAE, il est central de rappeler que ce décrochage des prix de l’immobilier par rapport aux revenus du travail crée une barrière forte pour la capacité à devenir primo-accédant des ménages actifs. Il est hautement préférable que chacune et chacun puisse posséder son logement plutôt que ces logements se concentrent entre les mains de quelques grandes fortunes afin que tous leur doivent redevance pour disposer d’un toit sous lequel vivre. Par ailleurs, l’immobilier ne représente que la moitié du patrimoine hérité, les actifs financiers représentent d’ores et déjà 40 % des héritages, une part importante, concentrée sur les plus gros patrimoines, et qui tend à s’accroître avec le temps.
Ces chiffres signent le retour à une société d’héritiers, ou la naissance octroie le droit, ou rend impossible l’accès à certains biens, comme un logement à Paris. Plus largement, cette concentration des patrimoines via l’héritage remet directement en cause la capacité à s’émanciper matériellement par le travail et le mérite tant mis en avant.7 des 9 Français∙es devenu∙es milliardaires en 2024 sont des super-héritiers. Le meilleur moyen de promouvoir la méritocratie, c’est de redistribuer l’héritage !
En dépit de taux théoriques plutôt élevés et d’un barème progressif, le système de taxation français est grevé par des dispositifs d’exonération nombreux, qui permettent d’échapper en bonne partie aux taux théoriques. Résultat : les 0,1 % les plus riches dont l’héritage moyen est de 13 millions d’euros ne paie en réalité que 10 % de droits de succession, alors que le taux marginal est de 45 % au-delà de 1,8 million d’euros. Plus on monte en haut de la distribution, plus le taux effectif s’éloigne du taux théorique.
Près de 60 % des Français se montrent favorables à une taxation plus forte des héritages les plus élevés (sondage réalisé par Verian pour Oxfam France).Nous proposons donc de renforcer la progressivité du barème, d’instaurer un héritage maximum à 12 millions d’euros, et de renforcer l’abattement unique a 120 000 par enfant et par parent.