- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
- Mission visée : Médias, livre et industries culturelles
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes | + | - |
Presse et médias | 0 | 193 848 013 |
Livre et industries culturelles | 0 | 0 |
Réforme des aides à la presse et indépendance des médias(ligne nouvelle) | 193 848 013 | 0 |
TOTAUX | 193 848 013 | 193 848 013 |
SOLDE | 0 |
Par cet amendement d'appel, nous tenons à dénoncer le système actuel des aides à la presse qui ne garantit aucunement le pluralisme indispensable au fonctionnement de notre démocratie.
Dans ce PLF pour 2025, et comme pour les précédents, les aides à la presse constituent une part très conséquente de la mission Médias, livre et industries culturelles : 193,8M cette année contre 195,8M l’an dernier seront consacrés aux aides publiques à la presse, soit une baisse de près de 1% en CP. Cette légère baisse fait suite à celle de -0,36% de l’an dernier par rapport à 2023.
Ces aides sont « presque intégralement ciblées sur la presse dite IPG » c’est-à-dire ciblées sur les quotidiens et magazines dites IPG (pour information politique générale). Or, cette appellation n’est absolument pas un gage de pluralisme tant elle recouvre une réalité large. Ces publications sont notamment regroupées au sein de l’Association de la presse IPG (AIPG devenue APIG en 2018), un syndicat patronal qui compte parmi ses membres les plus grands groupes (Nouvel obs, les Echos, le Monde, groupe Lagardère…). D’ailleurs, un coup d’œil sur les données relatives aux aides à la presse versées en 2023 nous montre l’ampleur du problème : Le groupe Le Monde se taille la part du lion avec 18,99 millions d'euros reçus, tandis que les titres appartenant à LVMH arrivent en deuxième position. Par contraste, le soutien aux médias de proximité (action 05), non professionnels et pour beaucoup citoyens n’est toujours pas revalorisé : La dotation du fonds de soutien aux médias d’information sociale de proximité inscrite au PLF 2025 (1,8 M€) est stable par rapport à la LFI 2024, mais aussi par rapport aux 3 années précédentes. En d’autres termes, elle baisse.
Il s'agit d'une aberration évidente, d'autant plus que les mouvements de concentration des médias ne font qu'accélérer ces dernières années. Le plus célèbre nom est celui de Vincent Bolloré, qui détient le groupe Canal+ (avec C8, CNews et CStar), via Vivendi. Mais les riches patrons se multiplient en réalité derrière chaque grand groupe de presse : Bernard Arnault (qui a d'ailleurs racheté Paris Match au précédent en octobre 2024), famille Dassault, Xavier Niel, etc... Les médias semblent être le nouveau passe-temps des ultra-riches. Les associations les plus reconnues du secteur (Acrimed, Reporters sans frontières...) et des syndicats mettent en garde. Ce phénomène menace tant l'équilibre économique du secteur, que la crédibilité de l'information, en somme, le pluralisme.
Les données relatives aux aides à la presse versées entre 2021 et 2022 (publiées en septembre 2023) nous rappellent que ce phénomène ne date pas de cette année, loin de là. Elles montrent que les médias détenus par Bernard Arnault (Aujourd’hui en France, Le Parisien, Les Échos) sont les plus gâtés et reçoivent plus de 164,1 millions d'euros en « aides individuelles » en 2022. Ceux détenus par Xavier Niel (en particulier Le Monde), raflent près de 10,4 millions d'euros. Tout juste derrière, Le Figaro (groupe Dassault) touche 5,8 millions d'euros d’aides. Le groupe Altice (Patrick Drahi) touche 5,6 millions d'euros pour les seuls deux titres Libération et L’Express. Et la liste continue : Lagardère (Paris Match et le JDD ; 2,2 millions d'euros), Kretinsky (Marianne ; 600 000 euros) et Pinault (Le Point ; 200 000 euros). Le bilan est désolant, sept milliardaires concentrent non seulement les grandes franchises médiatiques, mais également une énorme portion des aides directes à la presse, soit 189 millions d'euros cette année là.
Il est urgent de réviser le système des aides à la presse afin qu'il permette le maintien et la création de titres indépendants. Elles doivent en outre être conditionnées à des mesures d'interdiction de la concentration des titres de presse entre les mains de quelques grands groupes ou milliardaires et la garantie de l'indépendance des rédactions vis-à-vis de ses actionnaires. A cette fin, nous proposons la création d'un nouveau programme intitulé « Réforme des aides à la presse et indépendance des médias ».
Pour respecter les règles de recevabilité financière, nous proposons dans cet amendement d'appel le transfert des crédits de l'action 02 – Aides à la presse du programme 180 « Presse et médias », à hauteur de 193 848 013 d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, vers un nouveau programme intitulé « Réforme des aides à la presse et indépendance des médias », ainsi abondé de 193 848 013 d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.