- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
- Mission visée : Médias, livre et industries culturelles
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport visant à évaluer l’opportunité pour les finances publiques et l’équilibre budgétaire d’établir un Plan de protection de la profession de journaliste exerçant sur le territoire national et à l’étranger. Le rapport analyse entre autres l’état de la protection dans son ensemble, notamment en matière de sécurité et de liberté d’exercice des journalistes, mais aussi des acteurs connexes au travail de journalisme comme les sources et les lanceurs d’alerte.
Par cet amendement, nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport visant à évaluer l’opportunité pour les finances publiques d’établir un Plan de protection de la profession de journaliste exerçant sur le territoire national et à l’étranger. Le rapport analyse entre autres l’état de la protection dans son ensemble, notamment en matière de sécurité et de liberté d’exercice des journalistes, mais aussi des acteurs connexes au travail de journalisme comme les sources et lanceurs d’alerte.
Il s’agit de réfléchir collectivement à des solutions concrètes aux risques et menaces qui pèsent aujourd’hui sur la profession. En effet, à l’heure où les influences sur les médias se multiplient et où leur indépendance est questionnée, les conditions d’exercice de la profession sont de plus en plus alarmantes.
Le droit du travail est en danger. En raison d’une fragilisation de son financement, le travail journalistique s’exerce dans des conditions de travail de plus en plus délétères et contraintes par les logiques commerciales de ceux qui concentrent les rédactions. La profession est particulièrement précaire. Côté formations, celles-ci consistent principalement à formater les étudiants aux dysfonctionnements actuels du secteur. L’information est sacrifiée, et l’exercice des journalistes est menacé. En mars 2022, un rapport de cabinet d’expertise (ISAST) détaille sur les risques psychosociaux à France Bleu, qui fait état de « charges de travail trop importantes, [de] dépassements horaires pouvant être considérés comme du travail dissimulé », de management inadapté, de « pressions », de « perte de sens au travail ». Il ne s’agit que d’un exemple parmi tant (trop) d’autres. En septembre 2024, plusieurs médias ont révélé que ce problème touche aussi les journalistes travaillant pour Quotidien, qui font état de situations de « burn-out, management défaillant, situations de harcèlement ».
Le projet de fusion de l’audiovisuel public, porté par Rachida Dati avant que la dissolution de l’Assemblée nationale n’interrompe ce funeste projet, a remis ces inquiétudes, répétées maintes fois par les associations professionnelles du secteur, sur la table concernant les salariés de l’audiovisuel public. Selon la SNJ-CGT en mai 2024, si elle était mise en place, cette réforme « conduirait inévitablement à une remise en cause des différents accords d’entreprises existants, à des suppressions de postes sans aucune garantie de redéploiement sur les contenus, précariserait encore davantage les professionnel·les, sans parler des réorganisations structurelles du travail, sources de risques psychosociaux et conduisant généralement à la détérioration des conditions de travail ».
Le droit au secret des sources est lui aussi régulièrement menacé : l’arrestation d’Ariane Lavrilleux a montré de manière exemplaire que ce principe, pourtant pierre angulaire de la liberté de la presse, est loin d’être garanti. Cette journaliste d’investigation a réalisé la série « Egypt Papers » pour le média Disclose. Après une perquisition de dix heures de son domicile par la DGSI, des policiers et un juge d’instruction, la journalistes a été placée en garde à vue. Récemment, en juin 2024, une journaliste de Blast a également fait face à une telle violation, doublée d’une tentative grossière d’intimidation. Celle-ci suivait une action menée au siège de l’entreprise d’armement Exxelia - dans le viseur de la justice pour complicité de crimes de guerre - quand elle a été interpellée pour « participation à un groupement en vue de commettre des dégradations » et « dégradations volontaires en réunion ». La protection du secret des sources figure d’ailleurs parmi les recommandations issues des États généraux de la presse (EGI), commandés par Emmanuel Macron lui-même.
De façon générale, la Plateforme pour la sécurité des journalistes, qui dépend du Conseil de l’Europe, qui recense les atteintes et préoccupations concernant la liberté des médias et la sécurité des journalistes dans les États membres, nous renseigne sur l’ampleur du problème. En octobre 2024, le site recense 133 alertes actives pour la France. Attaques de dénigrement, cyberattaques, mais aussi harcèlement à caractère raciste ou sexuel par exemple, menaces de mort, violences policières et physiques en général, sont autant de cas à déplorer, que cela soit sur le sol français ou étranger.
Nous souhaitons que le cadre de protection du statut de journaliste soit renforcé et garanti dans toutes les dimensions précitées.