- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l’énergie, n° 463
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des affaires économiques
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Rédiger ainsi l’alinéa 7 :
« 5° quater De construire huit nouveaux réacteurs électronucléaires de grande puissance d’ici 2050 pour une capacité de production installée de 13 gigawatts, sous réserve des capacités industrielles et financières d’Électricité de France ; ».
Le présent amendement de repli des députés Socialistes et apparentés vise à préciser notre conception du lancement d’un nouveau programme électronucléaire.
Le constat regrettable que nous faisons aujourd’hui est que le retard pris dans le développement des énergies renouvelables depuis dix ans et l’insuffisante maturité des technologies précitées ne permettent pas de nous en assurer. Dès lors, le lancement d’un nouveau programme électronucléaire de transition apparaît nécessaire afin de prévenir la survenue de « l’effet falaise » que constitue le calendrier de sortie du nucléaire historique et de maintenir un socle de capacités de production pilotable et robuste suffisant pour assurer la sécurité d’approvisionnement et la stabilité du réseau.
Le calibrage de ce nouveau programme électronucléaire doit impérativement être crédible et pertinent et ne pas relever d’une approche mystique du génie atomique.
Il doit être crédible au regard des capacités industrielles, humaines et financières d’EDF. En effet, comme le rapport Folz en avait fait la démonstration, la politique du stop and go en matière nucléaire depuis 15 ans a considérablement affaibli la filière et entraîné une perte de compétences et de savoirs-faire dont la reconstitution sera longue. EDF aborde ce défi en étant en outre financièrement affaiblie par une dette importante (54,3 milliards d’euros fin 2023), dans un contexte de taux d’intérêts élevés et avec d’importants investissements à consentir sur le parc existant. Or, en février 2025, la Cour des comptes estimait à 79,9 milliards d’euros le coût de réalisation des trois premières paires d’EPR 2 déjà annoncées par le Président de la République.
Il doit être pertinent sur le prix afin que notre mix électrique soit celui qui permette d’offrir le prix le plus bas à nos concitoyens et le prix le plus compétitif à nos entreprises. Or, le prix du mégawattheure produit par un EPR 2 (125 € sur la base d’un seuil minimal de rentabilité de 4 %) est près de 50 % supérieur en moyenne à celui produit par les sources renouvelables et le double de celui du nucléaire historique (60,70 €), largement amorti.
Dès lors, le format pertinent pour un nouveau programme est le plus petit nombre de nouveaux réacteurs qui permette d’apporter les avantages du nucléaire à notre mix (stabilité, prévisibilité, pilotabilité), en laissant les renouvelables former le gros du prix final avec le nucléaire historique plus récent. Cette sobriété relative revêt également un enjeu en matière d’anticipation de la production puis de l’entreposage et du stockage de déchets radioactifs.
Ce faisant, il nous apparaît que la cible de 8 nouveaux réacteurs électronucléaires soit 13,2 gigawatts de capacités nouvelles, correspondant pour l’essentiel au scenario que RTE avait désigné comme « N1 », est celle qui correspond le mieux à ce cahier des charges.
S’agissant des petits réacteurs (small modular reactors ou SMR), cette technologie n’est pas réellement nouvelle puisqu’elle équipe depuis plus de 40 ans nos sous-marins et porte-avions à propulsion nucléaire avec les réacteurs à eau pressurisée K48, K15 et demain K22. Cependant, le rôle et les conditions d’exploitation en matière de sûreté et de sécurité de ces réacteurs militaires sont manifestement évidentes.
Or, il n’existe aujourd’hui aucune doctrine d’emploi pour de tels réacteurs. S’agit-il de renforcer les capacités de production du réseau au travers de chaudières de moindre puissance mais aussi plus rapides et moins couteuses à construire a priori, sur des centrales nucléaires existantes ? Ou s’agit-il de sources d’énergie permettant d’alimenter d’importantes plateformes industrielles électro-intensives (acier, pétrochimie et demain hydrogène bas-carbone). Dans le second cas, le plus probable, les enjeux de sûreté et de sécurité nucléaires propres à une installation nucléaire de base apparaissent difficiles à réconcilier avec la structuration des plateformes industrielles existantes. Les technologies retenues (eau pressurisée, sels fondus, métal liquide, etc.) supposeront par ailleurs des standards différents. En toute hypothèse, tout est à inventer avant de poser la question du nombre de SMR à produire.
Nous excluons donc toute cible quantifiée s’agissant du développement des SMR dans l’attente de l’évaluation de leur pertinence économique et industrielle et de la définition d’un cadre d’emploi.