- Texte visé : Projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, de simplification de la vie économique, n° 481 rectifié
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi de simplification de la vie économique
- Code concerné : Code de l'environnement
Le deuxième alinéa de l’article L. 541‑10‑4 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase, le mot : « peuvent » est remplacé par le mot : « doivent » ;
2° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée : « Cette mutualisation concerne à minima le financement et le contenu de la communication sur le dispositif de réduction du coût de la réparation pour les consommateurs permis par ce fonds, le nom dudit dispositif, et la mise à disposition d’une plateforme unique de remboursement pour les réparateurs. »
Le présent amendement porte sur le dispositif dit de « bonus réparation ». Il a pour objet de simplifier et de dynamiser son fonctionnement, au bénéfice des consommateurs et des acteurs de la réparation.
L’économie circulaire revêt un potentiel formidable pour notre économie en matière d’emplois, de réindustrialisation, d’indépendance stratégique et de transition écologique. Si les avancées récentes sont louables, en particulier au travers de la loi AGEC, l’économie circulaire souffre encore de trop nombreuses complexités opérationnelles qui grèvent son potentiel.
La loi AGEC a en effet instauré la création d’un fonds réparation dans plusieurs filières REP (Responsabilité Elargie du Producteur), financés par les écocontributions payées par les fabricants, metteurs sur le marché de produits. L’ambition de ce fonds est d’alléger les coûts de la réparation pour les Français, afin de la rendre plus attractive économiquement par rapport à l’achat neuf et au remplacement du produit. Le meilleur déchet est en effet celui que l’on ne produit pas.
Tous les Français qui font réparer leurs objets, vêtements, meubles, bénéficient d’une réduction automatique de leur facture, s’ils font appel à un réparateur labellisé. Ce dispositif est censé être extrêmement simple et incitatif puisqu'il est sans conditions de ressource, et que le consommateur n’a « rien à faire ». En effet, il revient au réparateur labellisé de déduire automatiquement de la facture le montant du bonus, qu’il devra lui-même demander à se faire rembourser auprès des éco-organismes. Or, la mise en œuvre opérationnelle du fonds réparation qui finance ce bonus a été confié aux éco-organismes. Son fonctionnement est si complexe qu’il limite, voire annihile son impact.
Ce dispositif est d’abord trop complexe et coûteux pour les réparateurs qui rechignent à se faire labelliser. Selon une enquête de l’ONG Halte à l’Obsolescence Programmée sur le bonus réparation (janvier 2024), 80% des réparateurs non labellisés ne souhaitaient pas le devenir. Se faire labelliser représente un coût financier non négligeable pour les réparateurs (plusieurs milliers d’euros pour les PME, ETI et grands groupes, quelques centaines d’euros pour les TPE ou entreprises unipersonnelles). Préparer la labellisation pour se mettre en conformité avec le référentiel du label nécessite un temps disproportionné. Pour les entreprises unipersonnelles, qui représentent plus de 80% de la profession, ce temps administratif est un temps non consacré à la réparation et donc à la génération d’un chiffre d’affaires, puisqu’elles n’ont pas ou peu de fonctions support. D’autre part, chaque demande de remboursement effectuée par les réparateurs auprès des éco-organismes représente un coût administratif important (entre 1€ et 5€ par dossier en fonction du niveau d’informatisation de l’entreprise, d’après le collectif des réparateurs de l’institut National de l’Economie Circulaire), et ce coût supporté par le réparateur. Enfin, les réparateurs doivent faire l’avance de trésorerie. Les éco-organismes ont un délai de 15 jours pour rembourser les réparateurs. Pour les entreprises de réparation de grande ou de moyenne taille, les inconvénients de cette avance de trésorerie peuvent être supportés, et contrebalancés par l’effet de volume. En revanche pour les petites entreprises, cette avance de trésorerie peut être un repoussoir.
Ensuite, le dispositif d’incitation est trop peu connu et compris des Français. Il est nécessaire d’harmoniser les noms des dispositifs entre les différentes filières pour ne pas perdre le consommateur : on parle de “Bonus repar” pour les articles de sport et loisirs, de “bonus réparation” pour les équipements électriques et électroniques (EEE), et pour le textile. Il est nécessaire de créer un nom clair, simple, unifié entre les différents bonus dans une logique inter-filières REP. Il est également important de communiquer largement sur ces dispositifs de manière unifiée : la campagne de communication grand public pour promouvoir le bonus réparation EEE a été lancée en mars 2024, celle sur le bonus textile en septembre 2024, celle sur le bonus articles de sport des loisirs en octobre 2024… donnant l’impression aux Français qu’un bonus chassait l’autre, alors que tous ces bonus sont actifs en permanence. Il est d’autre part nécessaire de mutualiser les budgets dédiés à la promotion de la réparation pour toutes les filières REP soumises au fonds réparation, afin d’imaginer une campagne de communication grand public en marque blanche, multi-produits (vêtements, meubles, articles sport et loisirs, IT, électroménagers, jouets…).
Enfin, notons qu’il existe un problème de sous-utilisation chronique du fonds dans certaines filières. Pour prendre l’exemple des EEE, le temps très important de préfiguration du fonctionnement a retardé le lancement du dispositif d’un an (fin 2022), entrainant une utilisation quasiment nulle de l’enveloppe 2022. La première année de fonctionnement du bonus réparation (2023) moins de 6% de l’enveloppe prévue ont été dépensés, obligeant le gouvernement à réunir les parties prenantes pour faire des propositions d’amélioration du dispositif et de simplification de la labellisation. Les modifications apportées par l’arrêté du 10 novembre 2023 ont permis d'accroître l’utilisation du Fonds, mais celle-ci n’atteint que 20% de l’enveloppe prévue à date.
S’il ne peut répondre à tous ces enjeux, l’objectif du présent amendement est double. D’abord de passer d’une possibilité à une obligation de mutualisation du fonds réparation pour les éco-organismes, et ensuite, par principe de réalité, de fixer cette obligation sur un nombre minimal et circonscrit de sujets, à savoir l’unification du financement et du contenu de la communication aux consommateurs, du nom du bonus, et de la plateforme de remboursement prévue pour les réparateurs. C’est une simplification massive qui bénéficiera à notre économie et à nos concitoyens.
Cet amendement a été travaillé avec le collectif EC 2027.