- Texte visé : Proposition de loi portant accélération de la rénovation énergétique des logements, n° 516
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des affaires économiques
Après le dixième alinéa de l’article 6 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86‑1290 du 23 décembre 1986, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2021‑1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En vue de contribuer à l’atteinte des niveaux de performance énergétique prévus aux troisième à neuvième alinéas du présent article, l’État se fixe pour objectif de permettre aux ménages les plus modestes de bénéficier d’un reste à charge zéro lorsqu’ils réalisent une rénovation énergétique performante définie au 17° bis de l’article L. 111‑1 du code de la construction et de l’habitation. »
Par cet amendement nous souhaitons instaurer un réel reste à charge zéro pour les ménages les plus modestes réalisant une rénovation thermique performante.
Notre pays comptait toujours 6,6 millions de passoires thermiques (logements classés G ou F) au 1er janvier 2023.
Le rapport d’I4CE de février 2022 soulignait que « pour les ménages qui envisagent de réaliser des rénovations globales, les aides publiques ne couvrent qu’une faible part du coût total des travaux (20 à 40 % du coût total sur les simulations réalisées), pour financer le reste à charge, un apport personnel important est nécessaire par le ménage. Ce dernier renonce la plupart du temps aux travaux ».
Le Haut Conseil pour le climat souligne également que « le nombre actuel de rénovations complètes dans le bâtiment résidentiel est très éloigné de celui inscrit dans la stratégie nationale bas carbone 2 ». Et ce, alors que le secteur du bâtiment est responsable de 18% des émissions de gaz à effet de serre de notre pays.
L'ONU a averti mercredi 5 juin qu'elle considérait à 80% probable que le seuil de +1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels (1850-1900) soit temporairement franchi dès la période 2024-2028. Nous nous approchons dangereusement des limites fixées dans l'accord de Paris de 2015, signé par quasiment tous les pays de la planète. "Derrière ces statistiques se cache une sombre réalité, nous sommes loin d'atteindre les objectifs fixés dans l'accord de Paris", a déclaré Mme Barrett, secrétaire générale adjoint de l'Organisation météorologique mondiale (OMM) des Nations unies, qui souligne pourtant que "les dépassements temporaires ne signifient pas que l'objectif de 1,5°C est définitivement inatteignable", invitant à une action renforcée.
Dans le même temps, 12 millions de personnes en France souffrent de précarité énergétique, la part des Français ayant eu froid dans l'année explose - 30% déclarent souffrir du froid dans leur logement (contre 14% en 2020 !) - et 55% des Français ont souffert de la chaleur dans leur logement pendant au moins 24h en 2023 - c’est 4 points de plus qu’en 2020. Les plus précaires sont ceux qui subissent le plus ces phénomènes.
La présente proposition n'est pas assez ambitieuse et derrière l'objectif affichée d'instaurer un "zéro reste à charge" pour les bénéficiaires de MaPrimeRenov' elle ne fait en réalité que prévoir une avance remboursable, qui doit comme son nom l'indique être remboursée, soit sous la forme d'un prêt à taux zéro ou lors de la vente du bien immobilier. De telles dispositifs, qui existent déjà, ne sont pas attractifs. Ils pèseront sur les finances des ménages modestes qui s'endetteront ou devront accepter une perte de valeur de leur logement. Cela ne résoud pas la question du reste à charge qui n'est que différé.
Il convient de se fixer des objectifs de long terme cohérents avec nos engagements internationaux. Et de mettre, en face de ces objectifs, les moyens adéquats, notamment en instaurant un reste à charge zéro pour les ménages les plus modestes qui réalisent une rénovation thermique globale. Cette proposition réellement attractive permettra d'avancer plus efficacement dans la rénovation globale des logements afin d'une part de déployer les moyens nécessaires pour réaliser nos objectifs face à l'urgence climatique, d'autre part de faire diminuer la précarité energétique.