- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus, n° 561
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des affaires économiques
Dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les effets de cette réforme sur les conditions de travail des télévendeurs et téléprospecteurs. Le rapport évalue la pénibilité de ces métiers et notamment les facteurs de risques professionnels, y compris psychosociaux, qui leur sont spécifiques. Il détermine pour chacun de ces métiers les seuils d’exposition permettant d’évaluer objectivement les contraintes subies par les professionnels concernés.
Par cet amendement, le groupe LFI-NFP souhaite demander un rapport au Gouvernement sur les effets de cette réforme sur les conditions de travail des télévendeurs et téléprospecteurs. Ce rapport évalue précisément la pénibilité de ces métiers et notamment les facteurs de risques professionnels, y compris psychosociaux, qui leur sont spécifiques.
Selon l’INSEE en 2019, le secteur comptait 27 300 salariés en équivalent temps plein, dont 16 800 standardistes, téléphonistes, vendeurs par correspondance ou télévendeurs présents dans près de 360 établissements. L'institut notait déjà le taux particulièrement importante du recours à la sous-traitance (29 %, contre 13 % pour les activités de soutien), notamment vers des pays à moindres coûts salariaux.
Les conditions de travail dans le télémarketing sont particulièrement alarmantes. Les travailleurs et travailleuses sont soumis.es à de stricts objectifs de performance imposés par l'entreprise et à une surveillance constante et particulièrement oppressante. La dictature du chiffre (dans le secteur des assurances notamment, les agents sont payés en fonction des rendez-vous qu’ils arrivent à obtenir) ainsi que les obligations heure après heure de reporting mènent à une cadence infernale. Dans certains centres, on dénombre une centaine d’appels par jour.
Cette cadence couplée aux autres facteurs (absence d’autonomie, travail en « multitâches », bruit ambiant excessif…) a de fortes conséquences sur la santé des travailleurs : fatigue, stress, anxiété, troubles du sommeil, épuisement nerveux… Elle renforce aussi le caractère répétitif des gestes, qui est un facteur de pénibilité avec de fortes conséquences sur la santé. Couplés à des postes de travail souvent inadaptés et exigus, des gestes répétés favorisent les troubles musculosquelettiques.
Ces troubles touchent principalement les femmes. (« Les femmes encourent plus de risque de TMS (54 %) que les hommes (46 %). Les risques sont trois fois plus importants dans les catégories les plus confrontées à la précarité, employées et ouvrières » (Haut Conseil à l’égalité, 2020). Justement, le secteur est justement fortement féminisé (en 2019, selon l’Insee, 69 % des salarié.es des centres d’appel sont des femmes, souvent de moins de 30 ans).
Ces salariés sont aussi majoritairement composés de populations qui sont parmi les plus concernées par les risques socio-économiques. Les femmes, donc, mais aussi une forte sur-représentation de jeunes adultes (la moitié de ces postes étant occupés par des moins de 35 ans).
Ces emplois sont d'autant plus précaires que l'épuisement physique, nerveux et émotionnel auquel ils conduisent génèrent un très fort turn-over et donc une forte insécurité de l'emploi. Et ce pour un salaire horaire brut moyen inférieur à celui de l'ensemble des activités de soutien aux entreprises, et qui excède à peine le Smic.
Les risques psychosociaux associés à ces conditions de travail sont connus et documentés. En 2021 encore, la Cour de cassation, reconnaissait un système de harcèlement moral mis en place par l'une de ces entreprises. Le salarié plaignant, qui avait bien spécifié que ces méthodes étaient généralisées, faisait état de notations constantes, de "briefs" s'apparentant à de véritables entretiens disciplinaires, d'un chronométrage systématique des temps de pause, d'injures et de menaces...
Face à ces constats, il est nécessaire d'évaluer plus précisément les conditions de travail dans ce secteur. Cela le sera d'autant plus dans un délai de deux ans après la promulgation de cette proposition de loi qui, nous l'espérons, marquera le début de la fin pour ce secteur inutile et intrusif pour les consommateurs et aliénant et opressant pour les travailleurs ou, tout du moins, un plus grand respect du droit du travail.