- Texte visé : Proposition de loi pour réformer l'accueil des gens du voyage, n° 906
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Après l’alinéa 1, insérer l’alinéas suivant :
« 3° Aux 4° et 6° du I et au 4° du I bis, les mots : « d’une aire permanente d’accueil » sont remplacés par les mots : « des terrains désignés ». »
Par cet amendement d'appel, le groupe LFI-NFP souhaite alerter sur les conditions de vie indignes au sein des aires permanentes d'accueil.
L’appellation de « terrains désignés » correspond à l’expression utilisée par les personnes concernées, c’est-à dire par lesdits gens du voyage, pour désigner ces lieux que les pouvoirs publics leur ont assignés et que ces derniers qualifient d’ « aires d’accueil ».
Contrairement à ce que laisse entendre cette dénomination, les « aires d’accueil » ne ressemblent en rien à des emplacements accueillants pour lesdits gens du voyage. Ce sont, pour la plupart, des lieux souvent hostiles à toute forme d’habitation et ne correspondant pas à des lieux capables d’accueillir des citoyens dans des conditions dignes. Ces lieux se caractérisent par des espaces d’exclusion : des clôtures en barbelés, un environnement vert dégradé, une proximité d’autoroute, de déchetteries, des palissades ou encore du grillage. Par exemple, l’aire d’accueil de Rou/Petit Quevilly implantée en plein site SEVESO, à proximité de l’usine Lubrizol, a connu un incendie majeur en 2019. Cette situation inacceptable illustre la marginalisation des « terrains désignés » attribués auxdits gens du voyage.
L’usage du terme « aire d’accueil » constitue une contradiction en soi, car il sous-entend une politique bienveillante et volontaire d’hospitalité alors même que ces terrains sont conçus pour être isolés, difficiles d’accès, régulièrement éloignés des centres-villes et des services essentiels.
Renommer ces lieux en « terrains désignés », en reprenant l’appellation employée par lesdits gens du voyage eux-mêmes, permettrait également d'alerter sur la réalité de leur relégation spatiale et sociale, et contribuerait à faire avancer la lutte contre l’antitsiganisme, cette forme de racisme extrêmement banalisée. En effet, chaque année, dans son rapport, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) pointe le niveau inquiétant des formes multiples de racisme, d’antisémitisme, de xénophobie et de discrimination. Dans celui de 2023, elle démontre que les Roms restent la minorité la plus stigmatisée : 63% des personnes interrogées ont répondu « tout à fait » ou « plutôt d’accord » avec l’idée que les Roms forment un groupe « à part ».
Nous proposons donc, dans cet amendement d'appel, d'opérer un changement sémantique en renommant les « aires d’accueil » en « terrains désignés » pour alerter sur les conditions de vie sur ces aires et sur les préjugés racistes et discriminants à l'encontre desdits gens du voyage.