- Texte visé : Proposition de loi visant à instaurer une participation des détenus aux frais d'incarcération, n° 1409
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Rédiger ainsi le titre de la proposition de loi :
"visant à obliger les personnes détenues à payer pour les conditions de détention indignes engendrées par une surpopulation carcérale record"
Par cet amendement, les député.es du groupe LFI-NFP proposent de nommer cette proposition de loi conformément à son objet réel : obliger les personnes détenues à payer pour les conditions de détention indignes qu'elles subissent, conditions elles-mêmes engendrées par une surpopulation carcérale record.
Ce texte de pure démagogie carcérale, porté par l'extrême-droite et soutenu par un gouvernement incapable d'assumer ses propres errances budgétaires est une nouvelle diversion. Il constitue un nouvel aveu d'échec de la politique austéritaire macroniste qui fait la part belle au populisme carcéral plutôt qu'aux investissements nécessaires à l'amélioration des conditions de détention.
L'Observatoire national des prisons le rappelle : le budget de l’administration pénitentiaire est grevé par un poste de dépense principal : l’accroissement du parc carcéral. Les dépenses liées au remboursement des coûts d’investissement de constructions passées ou le lancement de nouvelles sont faramineuses, au détriment du développement des alternatives et des aménagements de peine, ou encore des activités en prison.
La dette que cette politique génère depuis des dizaines d’années a passé le cap des cinq milliards en 2024.
Ce texte vise à demander aux personnes détenues et à leurs familles de financer ces choix budgétaires désastreux qui, loin de remédier à la surpopulation carcérale, n'a fait que l'alimenter. En effet, la construction tous azimuts de nouvelles places de prison n'a jamais permis de réduire la surpopulation carcérale puisqu’elle s’est accompagnée d’une hausse du nombre de détenus. Et d'autant plus lorsque cette politique est accompagnée par une politique d'extension de procédures de jugement expéditives et liberticides telles que la généralisation des comparutions immédiates, qui multiplient par huit la probabilité d’être condamné à une peine de prison ferme par rapport à une procédure de jugement classique.
Pour tout résultat, la France est devenue championne de la densité carcérale. En mai 2025, les prisons françaises comptaient 83 681 détenus (soit 6000 personnes de plus en un an) pour un total de 62 570 places opérationnelles, soit une densité carcérale de 133,7%. Ce taux va jusqu’à 200% dans au moins 18 quartiers de détention. C'est la 13ème fois sur les 19 derniers mois que notre pays bat son propre record en la matière.
Il en résulte une aggravation des conditions de détention indignes auxquelles sont condamnées les personnes détenues, incompatibles avec la jouissance des droits humains. C'est ce qu'a souvent rappelé la Cour européenne des droits de l'Homme qui a plusieurs fois condamné notre pays pour violation de l’article 3 de la Convention relative aux peines et traitements inhumains et dégradants.
Les conditions d’encellulement sont en effet déplorables : l’OIP note que des personnes détenues s’entassent à 2 ou 3 dans des cellules de 9m2 environ, et que plus de 4 490 personnes dorment sur un matelas à même le sol en mars 2025. C'est presque mille personnes de plus qu' en octobre 2024. En outre, selon la Contrôleure Générale des Lieux de Privation de Liberté, dans un rapport publié en avril 2024, ni l’hygiène ni l’intimité ne sont assurées dans nos prisons (absence de cloisons pour le coin sanitaire, insalubrité des douches collectives, cellules non chauffées en hiver ou suffocantes en été…). L’accès aux soins et à l’accompagnement est de plus en plus rare. Ce cocktail a conduit à une dégradation alarmante de la santé mentale des détenus : 8 hommes détenus sur 10 et plus de 7 femmes sur 10 présentent au moins un trouble psychiatrique, la grande majorité en cumulant plusieurs (troubles anxieux, dépressions, troubles bipolaires, psychoses…).
Pour toutes ces raisons, nous proposons d'accoler à cette proposition de loi un titre moins hypocrite.