- Texte visé : Projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés et relatif à l’évolution du dialogue social, n° 1526
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des affaires sociales
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer cet article.
Par cet amendement, le groupe LFI-NFP propose la suppression de ce « contrat de valorisation de l’expérience », qui va encore davantage précariser les travailleurs séniors et créer des effets d’aubaine.
Entre 55 et 61 ans, 1 travailleur sur 5 est ni en emploi ni en retraite selon l’Insee. Une fois complètement montée en charge, la réforme Macron-Borne de 2023 qui a porté l’âge de la retraite à 64 ans va plonger 200 000 séniors dans cette situation de précarité. Et ce sont d’abord les travailleurs pauvres et les plus défavorisés dans la division sociale du travail qui seront touchés. Ainsi, le report de l’âge en 2010 n’a pas allongé la durée en emploi pour 34 % des ouvriers et a augmenté la durée passée en invalidité de 6 mois pour les ouvriers non qualifiés. Avant même la retraite à 64 ans, les ouvriers du gros œuvre de bâtiment passaient déjà 60 % du temps hors-emploi après 50 ans, c’était 52 % pour les serveurs (Institut des politiques publiques, 2025).
Vouloir repousser l’âge de la retraite pour augmenter le taux d’emploi est une maltraitance pour ces travailleurs séniors. Cela favorise le développement d’emplois précaires, mal rémunérés, à temps partiel. Ainsi, la part des travailleurs séniors en CDD a progressé de 25 % entre 2003 et 2020 (DARES, 2024).
Ajoutons que si les séniors rencontrent des difficultés pour rester en emploi ou être embauchés, c’est avant tout du fait des pratiques discriminatoires des employeurs. Les travailleurs séniors comptent pour 17 % des actifs mais seulement 6 % des recrutements. Ils sont plus exposés aux ruptures involontaires de contrat que les autres salariés, dont les licenciements. Cette tendance s’observe aussi à partir d’une comparaison internationale : cela touche 1,9 % des séniors en emploi en France contre 0,8 % en Allemagne.
Pour permettre aux travailleurs séniors qui le souhaitent et qui le peuvent d’occuper un emploi, il faut faire cesser les discriminations de la part des employeurs et donc les contraindre à maintenir en emploi et recruter.
Ce projet de loi vise à leur permettre de recruter sous un contrat précaire, avec un droit unilatéral de mise à la retraite du travailleur qui a atteint la date de la retraite à taux plein. Les travailleurs vont donc perdre la maîtrise de leur fin de carrière, ce qui pénalisera ceux souhaitant obtenir une surcote pour améliorer leur faible pension de retraite.
Cela s’accompagne d’un nouveau cadeau socio-fiscal avec une exonération de contribution sur l’indemnité de mise à la retraite, venant s’ajouter aux plus de 90 milliards d’exonérations de cotisations sociales dont bénéficie déjà le patronat. Le Gouvernement n’a pas daigné présenté une estimation de l’impact budgétaire de la mesure dans l’étude d’impact du projet de loi.
Enfin, la rédaction du présent texte est si permissive qu’un employeur pourra réembaucher sous CDI séniors un employé qui a quitté l’entreprise, y compris sous la forme d’un non renouvellement du contrat ou d’un licenciement, à condition que ce départ date de plus de 6 mois.
La réduction du taux de chômage des séniors passera par l’abrogation de la retraite à 64 ans et, à terme, par le retour à 60 ans. Le taux d’emploi des plus de 60 ans sera alors un non problème.
Pour toutes ces raisons, le groupe LFI-NFP propose l’abrogation de cet article 4 qui propose d’expérimenter la création d’un CDI séniors.