- Texte visé : Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, n° 1907
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Supprimer les alinéas 5 à 16.
Cet amendement des députés socialistes et apparentés vise à supprimer le coup de rabot sur l'exonération dite "LODEOM".
Plus de 50 000 établissements ultramarins, regroupant plus de 316 000 salariés, dont 90 % de petites entreprises, bénéficient des exonérations de cotisations sociales spécifiques aux Outre-mer (LODEOM).
Ces dispositifs, hérités de politiques de soutien à l’emploi et au développement économique, constituent un levier essentiel pour l’attractivité et la compétitivité des territoires ultramarins, et un outil indispensable pour rompre avec l’économie de « comptoir ».
À la suite de la mission d’évaluation menée en 2024 par l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), le Gouvernement a annoncé son intention de raboter de 343 millions d’euros ces exonérations, notamment en concentrant les exonérations sur les bas salaires.
Ainsi, l’article 9, alinéas 13 et 14 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 (PLFSS26) porte le coup de rabot sur les barèmes compétitivité et compétitivité renforcée au-delà des recommandations des inspections (point de sortie à 2,5 SMIC), illustrant une approche technique et déconnectée des réalités économiques ultramarines.
Leur projet est le suivant :
- Barème compétitivité : le seuil d’exonération totale passerait de 1,3 SMIC à 1,2 SMIC et le point de sortie évoluerait de 2,2 SMIC à 1,6 SMIC ;
- Barème compétitivité renforcée : le seuil d’exonération totale passerait de 2 SMIC à 1,5 SMIC et le point de sortie évoluerait de 2,7 SMIC à 1,9 SMIC.
- Barème « innovation et croissance » : suppression de ce barème spécifique.
Face à ces mesures d’économies qui étaient annoncées par le Gouvernement, Christian Baptiste, le rapporteur spécial des crédits de la mission Outre-mer, et plus largement les députés socialistes et apparentés ont choisi de porter la voix du terrain.
Il s’est rendu en Guadeloupe, Martinique, Guyane et La Réunion, rencontrant élus, administrations, représentants consulaires et entreprises bénéficiaires de la LODEOM. Les plus de 130 acteurs économiques et institutionnels auditionnés se sont prononcés contre ce rabot, dénonçant une mesure qui mettrait en péril le tissu économique local, constitué majoritairement de petites entreprises, garantes de l’emploi et de la vitalité économique des territoires dits d’outre-mer.
Les entreprises ont également insisté sur la nécessité de maintenir le bénéfice des exonérations pour les cadres, qui jouent un rôle crucial dans l’attractivité des territoires et dans le maintien et le retour des jeunes diplômés ultramarins.
La position du rapporteur et des signataires de cet amendement est claire : les territoires dits d’outre-mer doivent se libérer de l’économie de “comptoir” et pouvoir se développer pleinement, sans subir des mesures d’austérité aveugles et déstabilisantes.
Cette opposition au rabot brutal ne signifie pas pour autant un refus de réforme, bien au contraire : plusieurs axes d’amélioration sont urgents et incontournables :
- Simplifier et rendre lisibles les régimes et barèmes pour les entreprises et pour l’administration.
- Corriger les erreurs et fraudes constatées dans les déclarations d’éligibilité aux différents barèmes.
- Garantir le respect des obligations légales et sociales, alors que 18,5 % des établissements ne sont pas à jour ou inscrits dans un plan d’apurement.
- Renforcer les contrôles administratifs, afin d’assurer l’application effective de ces obligations et protéger l’argent public.
Les signataires de cet amendement estiment que l’État doit promouvoir la vertu dans l’utilisation des fonds publics : le strict respect de l’obligation légale pourrait générer près de 300 millions d’euros d’économies, montant proche du rabot envisagé par le Gouvernement, sans pénaliser les entreprises ultramarines.
Par ailleurs, ils dénoncent les mesures réglementaires conçues pour rendre cette obligation difficilement applicable et proposent, conformément à la recommandation n° 8 du rapport du rapporteur spécial, une suspension des poursuites assortie d’un plan d’apurement exceptionnel de trois à cinq ans, inspiré des délais accordés lors de redressements judiciaires, garantissant sécurité juridique et responsabilité économique.
Cet amendement est à la fois un acte de justice économique et sociale et un signal politique fort : les territoires dits d’outre-mer ne doivent plus subir des décisions centralisées et exclusivement guidée par une logique d’économie budgétaire, mais être accompagnés dans leur développement, leur attractivité et leur souveraineté économique.