- Texte visé : Proposition de loi visant à protéger les mineurs isolés et à lutter contre le sans-abrisme, n° 2021 rectifié
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Code concerné : Code de l'action sociale et des familles
Le IV de l’article L. 221‑2‑4 du code de l’action sociale et des famille est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La reconnaissance de la majorité d’une personne se déclarant mineure et privée temporairement ou définitivement de la protection de sa famille ne peut intervenir qu’après que le président du conseil départemental a engagé et mené à leur terme l’ensemble des démarches de reconstitution de l’état civil prévues par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur, y compris en liaison avec les autorités consulaires du pays d’origine de la personne concernée, aux fins de vérifier son identité et sa situation civile. »
Le présent amendement vise à garantir l’effectivité de la reconstitution de l’état civil, qui constitue une obligation légale pour les départements à l’égard des personnes étrangères se présentant comme mineures.
Les dispositions législatives, notamment l’article 8, alinéa 2, de la Convention internationale des droits de l’enfant, dont la France est signataire, dispose que : « si un enfant est illégalement privé des éléments constitutifs de son identité ou de certains d’entre eux, les États parties doivent lui accorder une assistance et une protection appropriées, pour que son identité soit rétablie aussi rapidement que possible ». Pourtant, de nombreux départements se soustraient à cette exigence et n’engagent pas systématiquement les démarches nécessaires auprès des autorités consulaires pour vérifier ou compléter les éléments d’état civil, au mépris de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Dans certains départements, la présentation de documents d’état civil suffit à faire reconnaître la minorité du jeune, tandis que dans d’autres, ces documents sont ignorés, entraînant des décisions arbitraires et inégales. Or, les démarches auprès des consulats sont souvent complexes, en particulier lorsque l’état civil est déficient ou inexistant, rendant indispensable un accompagnement effectif des enfants. Les premiers éléments de preuve documentaire présentés par les mineurs non accompagnés ne sont souvent pas considérés comme élément central de l’évaluation, alors qu’un document valide devrait suffire à garantir la protection, conformément aux recommandations du Comité des droits de l’enfant des Nations Unies. Le système actuel, qui considère ces documents comme un simple élément parmi d’autres, entraîne des rejets injustifiés.
En violation persistante des obligations légales, dès 2020, la Cour des comptes alertait sur « des conditions d’évaluation de la minorité trop hétérogènes qui soulèvent la question de l’égalité d’accès au droit ». Cinq ans plus tard, ces conditions demeurent non harmonisées. Comme l’ont montré l’Association d’accès aux droits des jeunes et d’accompagnement vers la majorité et Utopia 56 dans un rapport publié en juillet 2025, le respect des droits fondamentaux des enfants dépend largement du département dans lequel ils demandent protection. Les données révèlent une inégalité territoriale préoccupante : en 2017, le taux de reconnaissance de minorité varie entre 9 et 100 % selon les départements.
Le présent amendement prévoit que la reconnaissance de la majorité d’une personne se présentant comme mineure ne pourra intervenir que si le département a préalablement engagé toutes les démarches de reconstitution de l’état civil prévues par la loi. Cette disposition garantit que la minorité des enfants ne puisse être contestée avant que l’administration n’ait vérifié leur identité et leur situation civile.