Situation en Irak
(mercredi 08 septembre 2004)

Débats en séance publique - Travaux des commissions ( Affaires étrangères - Défense
 Questions écrites & orales - Questions au Gouvernement

 

Débats en séance publique

 

 

Comptes rendus des travaux de la commission des affaires étrangères 

Mardi 11 mai 2004
(Séance de 11 heures 30)
Audition de M. Michel Barnier, Ministre des Affaires étrangères, sur la situation en Irak et la construction de l'Union européenne

Jeudi 18 décembre 2003
(Séance de 11 heures)
- Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères, sur l'actualité européenne et internationale

Jeudi 2 octobre 2003
(Séance de 11 heures 30)
- Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères


-
Mercredi 17 septembre 2003
(Séance de 15 heures 15)
- Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères, sur les derniers développements en Irak et au Proche-Orient

Mercredi 28 mai 2003
(Séance de 16 heures 15)

- Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères

Mercredi 30 avril 2003
(Séance de 16 heures 15)
- Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères, sur la situation de l'Irak et les conséquences du conflit irakien

Mardi 29 avril 2003
(Séance de 16 heures 30)

- Audition de Son Excellence Sir John Holmes, Ambassadeur de Grande-Bretagne en France

Mercredi 9 avril 2003
(Séance de 11 heures)
- Audition de M. Angelo Gnaedinger, Directeur général du CICR, sur la situation humanitaire en Irak

Mercredi 2 avril 2003
(Séance de 16 heures 30)
- Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères, sur la situation de l'Irak

Mardi 1er avril 2003
(Séance de 16 heures 30)
Audition de M. Gérard Chaliand, spécialiste des conflits, sur la question irakienne

Mercredi 26 mars 2003
(Séance de 10 heures 30)
- Audition de M. André Janier, Ambassadeur, Chef de la section des intérêts français en Irak

Mardi 25 mars 2003
(Séance de 17 heures 15)
- Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères, sur la situation de l'Irak

Mercredi 19 mars 2003
(Séance de 10 heures)
Réunion commune de la commission des affaires étrangères 
et de la commission de la défense nationale et des forces armées
- Audition de Mme Thérèse Delpech, Commissaire pour les affaires irakiennes à la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations unies (CCVINU)

Mardi 11 mars 2003
(Séance de 16 heures 45)
Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères, sur la situation en Irak

Mercredi 29 janvier 2003
(Séance de 17 heures 30)
Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères sur la situation en Côte d'Ivoire et en Irak

Mardi 14 janvier 2003
(Séance de 10 heures 15)
Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères,
 concernant la situation en Irak, en Côte d'Ivoire et en Corée du Nord

Jeudi 3 octobre 2002
(Séance de 9 heures 30)
Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères

Mercredi 18 septembre 2002
(Séance de 16 heures 15)
Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères, sur la situation en Irak

 

 

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COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 67ème jour de séance, 167ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 18 MARS 2003

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

IRAK

M. le Président - J'ai souhaité, en accord avec la Conférence des présidents, que les quatre premières questions portent sur l'Irak et fassent l'objet d'une réponse commune, ce que le Premier ministre a bien voulu accepter (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Alain Bocquet - Nous vivons des jours et des heures d'une gravité exceptionnelle. George Bush a confirmé avec morgue et cynisme, cette nuit, sa volonté de faire la guerre en Irak contre la volonté internationale, en torpillant l'ONU, au mépris de sa charte, du droit, des résolutions du Conseil de sécurité, de l'opinion publique mondiale massivement opposée à cette entreprise militaire d'occupation.

Chacun mesure la responsabilité historique prise par les Etats-Unis - membres permanents du Conseil de sécurité, toujours prompts à en appeler aux valeurs morales - en décidant d'user de la force au nom de la défense de leurs intérêts stratégiques, financiers et pétroliers, au nom de leurs visées hégémoniques. Les Etats-Unis veulent ainsi déstabiliser le monde pour le dominer sur tous les plans. Ils s'érigent en maîtres et gendarmes du monde : c'est inacceptable.

La guerre de George Bush est une aventure illégale et illégitime mais aussi dangereuse, dont on connaît les conséquences, et notamment l'escalade incontrôlable des tensions et du terrorisme. Une telle attitude ouvre la porte à tous les excès. Nous pensons aux destructions, aux souffrances infligées au peuple irakien, déjà victime de la dictature sanglante de Saddam Hussein et de l'embargo. Des enfants, des hommes et des femmes, des vieillards vont périr sous les bombes, dans le fer et le feu.

Nous avons apprécié la ténacité et la fermeté de la France pour éviter, avec d'autres pays, le désastre annoncé et pour que le désarmement de l'Irak se fasse par des voies pacifiques.

La guerre semble imminente ; nous ne pouvons nous y résigner. Nous ne pouvons accepter l'instauration d'un monde unipolaire où régnerait la loi de la jungle et du plus fort. Des millions de personnes attendent de la France la poursuite de son engagement pour faire triompher la voix de la raison et du droit en refusant toute contribution, si minime soit-elle, à l'entreprise guerrière américaine.

Quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre pour enrayer la logique de guerre ? L'ONU a démontré son rôle irremplaçable pour opposer à l'arrogance de la puissance brute la voix des peuples et la recherche de solutions pacifiques. Ne faut-il pas que la question de la paix et de la guerre fasse l'objet d'une réunion exceptionnelle de l'assemblée générale de l'ONU ? Nous proposons qu'une adresse du Parlement français soit transmise à tous les parlements d'Europe et du monde pour peser dans le sens de la paix.

Le refus de la fatalité de la guerre doit s'exprimer avec détermination (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Philippe Douste-Blazy - Le groupe UMP est fier de voir la France s'imposer sur la scène internationale pour défendre la paix et rappeler que l'ordre mondial ne peut exister sans le respect du droit international comme l'a rappelé M. le Président de la République il y a quelques heures (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Malgré les efforts de la diplomatie française, les hostilités sont sur le point d'être déclenchées. Les Français se posent deux questions : quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour prévenir les éventuelles conséquences de ce conflit sur notre sol - menaces terroristes ou tensions entre communautés ? Quelles initiatives entendez-vous prendre pour que l'Union européenne tire les conséquences de cette crise pour son avenir politique ? Un seul devoir s'impose à l'Europe : l'union, dans l'affirmation de ses valeurs universelles (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marc Ayrault - L'ultimatum de M. Bush à l'Irak a fermé la voie d'une issue pacifique à la crise. Combien paieront de leur vie cet aveuglement ?

J'exprime la solidarité des socialistes à l'égard du peuple irakien qui subit le double joug de la guerre et de la dictature ; je salue la noblesse du geste de M. Robin Cook, qui démissionne pour ne pas cautionner cette aventure guerrière ; je salue les millions de personnes qui ont dit non au recours à la force, y compris aux Etats-Unis.

Le Président américain prend la responsabilité de déclencher une guerre hors-la-loi, contre l'avis du Conseil de sécurité de l'ONU. Un coup terrible est porté à la grande idée qui guide la communauté internationale depuis cinquante ans : une sécurité collective fondée sur des règles de droit partagées par tous. Cette guerre porte en elle une onde de choc tragique pour le monde - crise avec le monde arabo-musulman une nouvelle fois soumis à la loi de la guerre, au risque de provoquer un choc des civilisations ; crise de l'ONU réduite au rôle de chambre d'enregistrement impuissante et délégitimée ; crise de l'OTAN, où les alliés n'ont d'autre choix que de se soumettre ou de se démettre ; crise de l'Europe, dont certains dirigeants ont préféré jouer les supplétifs d'une mauvaise cause ; crise de la France, ami loyal et historique que le gouvernement américain ose menacer de représailles. Le Président Bush doit savoir que toute notre nation est meurtrie par cette injuste campagne. Le refus de la guerre n'est pas l'expression d'un seul homme - fût-il Président de la République - mais la voix du peuple français dans son écrasante majorité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Je demande que le Parlement soit informé et consulté à tout instant. Ne nous résignons pas à l'inéluctable ; restons les militants d'un ordre international fondé sur le respect du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Aujourd'hui, la France est écoutée du monde ; qu'elle utilise cette force pour restaurer les pouvoirs de l'ONU et _uvrer à une conférence de paix au Proche et au Moyen-Orient.

Depuis le mois de septembre, nous avons manifesté notre opposition à cette guerre ; nous sommes favorables à l'utilisation du droit de veto et nous nous réjouissons que telle soit la position de la France.

Que la France retrouve l'ambition de construire une Europe maîtresse de son destin, capable de parler d'une même voix ! Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêt pour ces rendez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Philippe Folliot - L'honneur et la grandeur d'une nation se mesurent à sa capacité à être ferme et digne dans des circonstances exceptionnelles.

Derrière le Président de la République se trouve une France rassemblée, symbole du respect du droit international et de la paix. Rien ne saurait justifier qu'un Etat, seul, se comporte comme un empire, au mépris de la communauté internationale et de ses organes représentatifs et puisse engager le monde entier dans une tourmente dont nul, à ce jour, ne peut mesurer les terribles conséquences politiques, stratégiques, économiques, sociales, environnementales et, surtout, humanitaires.

La politique française est juste ; nous la soutenons depuis le premier jour ; fidèles à notre tradition, nous avons vocation à être un maillon indispensable dans la chaîne des peuples et des nations pour rapprocher l'Occident du Moyen-Orient, le Nord du Sud.

Dans quelques semaines ou quelques mois, viendra le temps de la reconstruction. La France s'honorerait à aider le peuple irakien qui, en moins de vingt ans, aura subi trois guerres et un embargo, avec leur cortège de morts, de souffrances et de désolation. Comment et dans quel cadre la France pourra-t-elle jouer le rôle que tous les peuples du monde attendent d'elle dans la paix future, la reconstruction de l'Irak, l'aide à son peuple et le nouvel ordre mondial ?

Aujourd'hui, le droit international cède devant la force, l'ONU est désavouée et l'Europe écartelée. Quelle initiative compte prendre le Gouvernement pour ressouder cette Europe en miettes qui, hélas, ne pèse pas dans les affaires du monde ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre - Je vous remercie, Monsieur le Président, de votre initiative de grouper en début de séance quatre questions ayant trait à la crise irakienne, permettant ainsi d'exprimer l'unité de toute la nation derrière les positions de la France, défendues par le Président de la République et notre diplomatie.

La guerre n'est pas encore déclarée et jusqu'au bout, nous nous battrons pour la paix. En dépit de l'ultimatum de 48 heures adressé par le Président des Etats-Unis, nous continuons et continuerons à affirmer les principes et les convictions qui ont guidé la démarche de la France jusque là. Tel est le message que vient d'adresser il y a quelques heures le Président de la République, tel est aussi le message d'une majorité de nations aujourd'hui dans le monde.

Notre première conviction est que l'ONU, née de la volonté commune, aux termes même de sa Charte, de « préserver les générations futures du fléau de la guerre », doit demeurer le lieu de la légalité internationale et le Conseil de sécurité le seule instance à pouvoir autoriser l'emploi de la force (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Pour nous, il ne saurait y avoir de recours unilatéral à la force sans risque de fragiliser ce lieu de paix, ce lieu de légalité internationale que sont les Nations unies.

Notre deuxième conviction est qu'à l'occasion de la crise irakienne, l'ONU a trouvé, par le biais des inspections, un moyen pertinent de lutte contre le terrorisme et la prolifération. Nous regrettons donc profondément que cette démarche, qui a donné des résultats, ne puisse aller à son terme. Ces inspections, qui ont déjà conduit le dictateur irakien - à l'égard duquel nous n'avons aucune sympathie -, à détruire plus de 70 missiles Al-Samoud, sont la solution alternative à la guerre. C'est pourquoi la France a proposé, propose et continuera de proposer que l'on donne davantage de temps aux inspecteurs pour obtenir le désarmement pacifique de l'Irak.

Notre troisième conviction est que le recours unilatéral à la force par les Etats-Unis n'est pas la bonne réponse aux attentats du 11 septembre 2001, face auxquels nous avons témoigné au peuple américain notre révolte et notre solidarité. Ce qu'il faut combattre aujourd'hui, c'est le terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive. Et cette guerre-là exige l'unité de la communauté internationale et que le Conseil de sécurité soit le lieu de la légalité internationale. A défaut, comment empêcher que des défenseurs de causes diverses, partout dans le monde, se sentant agressés, ne se croient autorisés à user du terrorisme et à menacer le monde ? Or, on le sait, le terrorisme est aujourd'hui beaucoup plus dangereux dans la mesure où les armes sont plus facilement accessibles et où de petites équipes suffisent à conduire des actions terrifiantes. Nous n'avons aucune sympathie, je le redis, pour le régime irakien et souhaitons obtenir le désarmement de l'Irak. Mais la voie unilatérale choisie par les Etats-Unis n'est pas la bonne. Preuve en est d'ailleurs qu'ils n'ont pas réussi à obtenir une majorité aux Nations unies sur cette question.

Comme le Président de la République l'a réaffirmé, nous demeurons les amis et les alliés des Etats-Unis (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP). La France est aujourd'hui en désaccord avec eux sur cette guerre mais ce sont précisément notre amitié avec le peuple irakien, notre gratitude pour le sang américain versé en Europe, qui nous autorisent à leur dire, en toute franchise et sincérité, que cette guerre n'est pas la réponse appropriée à la situation actuelle du monde et qu'il existe une autre solution. Cela, nous le dirons jusqu'à la dernière heure.

J'ai bien entendu les inquiétudes exprimées par MM. Bocquet, Douste-Blazy, Ayrault et Folliot, notamment sur l'avenir des Nations unies. Sachez que nous nous battrons pour faire en sorte que si, hélas, la guerre est lancée sans, voire contre l'avis des Nations unies, la paix, elle, se construise au sein de leur Conseil de sécurité. Nous mettrons toute notre énergie pour que l'OTAN et la construction européenne ne soient pas fragilisées par cette crise mondiale. J'ai personnellement veillé à rester en contact permanent avec l'ensemble des premiers ministres de l'Union européenne, de façon à expliquer nos divergences sur la crise irakienne mais aussi notre foi dans le projet européen. J'espère et je crois aujourd'hui possible un rapprochement entre la position franco-allemande sur l'avenir de l'Europe et la position hispano-britannique. Ni l'Espagne ni le Royaume-Uni ne sont des adversaires de la France, en dépit de la différence de nos points de vue sur l'Irak. N'oublions jamais que ni l'histoire ni la géographie n'ont jamais rendu l'Europe naturelle. C'est la capacité à surmonter les difficultés, à y puiser même des forces nouvelles, qui a donné à la construction européenne tout son sens. Nous le réaffirmerons au Conseil européen dans les prochains jours. Nos engagements en faveur de la paix et en faveur de l'Europe sont d'une égale extrême fermeté. La France est déterminée à s'adresser franchement à ses alliés mais tout autant, à ne pas se tromper d'adversaire. La France n'est pas devenue militante du pacifisme, elle l'est, comme elle l'a toujours été, des droits de l'humanité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 69ème jour de séance, 170ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 20 MARS 2003

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

DÉCLARATION DE M. LE PRÉSIDENT 2

RAPPELS AU RÈGLEMENT 2

La séance est ouverte à neuf heures.

DÉCLARATION DE M. LE PRÉSIDENT

M. le Président - Une guerre illégitime et dangereuse vient de commencer. Dans ces conditions, vous comprendrez que je suspende la séance afin de montrer combien l'ensemble de la représentation nationale désapprouve ces événements et manifeste sa grande inquiétude à leur égard.

La séance est suspendue. Elle est reprise à 9 heures 15 sous la présidence de M. Le Garrec

PRÉSIDENCE de M. Jean LE GARREC
vice-président

RAPPELS AU RÈGLEMENT

M. Alain Bocquet - Je me félicite que M. le président ait suspendu la séance en raison du déclenchement de la guerre en Irak - à l'Irak - par George Bush. Bafouant cyniquement le droit international, les Etats-Unis ont commencé cette nuit à bombarder Bagdad. Leur président annonce une guerre plus longue et sans doute plus meurtrière que prévu. Des innocents, des enfants, des femmes, des vieillards vont mourir sous un déluge de feu. C'est une « sale guerre » qui commence, et une telle cruauté est insupportable. Cette guerre illégale, illégitime doit être stoppée dans les meilleurs délais et tout doit être mis en oeuvre pour arrêter le bras meurtrier de George Bush.

Si nous nous sommes félicités de l'action de la France en faveur de la paix, il faut poursuivre notre effort par exemple en prenant l'initiative d'une réunion exceptionnelle de l'assemblée générale des Nations unies et en réunissant en urgence notre assemblée, comme l'a proposé le président Debré en Conférence des présidents.

M. Hervé Mariton - Lorsque les armes parlent, c'est toujours un moment de tristesse. Le Président de la République et le Gouvernement n'ont pas voulu s'engager dans ce combat-là, et le groupe UMP soutient ce choix. L'exécutif a cependant toujours rappelé quelles étaient nos alliances. Nous écouterons le Gouvernement pour la suite des événements.

A titre personnel, j'estime que si la guerre est toujours la plus mauvaise des solutions, si elle signe l'échec de la diplomatie, il faut, dès lors, que les Américains et leurs alliés ont décidé de s'engager, souhaiter qu'ils gagnent et qu'ils gagnent vite. Lorsque Saddam Hussein ne sera plus au pouvoir, la communauté internationale n'aura pas fait un pas en arrière, mais un pas en avant.

M. René Dosière - Au moment où nous reprenons la discussion d'un texte qui vise à diminuer le nombre de morts sur nos routes, débute une guerre qui va faire un nombre bien plus considérable de morts. Nous ne pouvons pas ne pas penser au malheureux peuple irakien, déjà victime de la terreur d'un dictateur et qui va subir cette guerre déclenchée hors la loi internationale.

Le groupe socialiste souhaite que le peuple français qui, derrière le Gouvernement et le Président de la République, s'est déjà déclaré hostile à cette guerre, continue à faire pression pour qu'elle se termine dans les plus brefs délais.

M. le Président - Je vous indique que M. Debré prend contact avec le Premier ministre pour examiner les initiatives qui pourraient être prises.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer - C'est en effet au moment où l'Assemblée nationale s'efforce, à travers le débat sur la sécurité routière, de sauver des vies et d'éviter des blessés, qu'hélas, à quelques heures d'avion d'ici, un pays est la cible des tirs et des frappes.

Cette guerre qui commence bafoue les règles internationales. Bien entendu, le Gouvernement s'associe pleinement à l'initiative du Président Debré et aux déclarations qui viennent d'être faites. Le Président de la République a cherché, avec le soutien du Gouvernement et de l'ensemble de la représentation nationale, à empêcher cette guerre. La France a tout fait pour cela. Elle peut avoir la tête haute, mais elle est triste que les armes se fassent entendre aujourd'hui.

M. le Président - Je remercie le Président Debré, vous-même, Monsieur le ministre, ainsi que les intervenants des groupes, d'avoir su trouver les mots qu'il fallait prononcer en ce moment grave, difficile et douloureux.

 

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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 70ème jour de séance, 173ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 25 MARS 2003

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

EXTRAIT

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

POLITIQUE EUROPÉENNE
DE DÉFENSE ET DE SÉCURITÉ 2

GUERRE EN IRAK 4

CONFÉRENCE INTERNATIONALE POUR LA PAIX AU MOYEN-ORIENT 5

LUTTE CONTRE D'ÉVENTUELS ATTENTATS SUR LE SOL NATIONAL 6

POLITIQUE EXTÉRIEURE ET DE SÉCURITÉ EUROPÉENNE 8

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

POLITIQUE EUROPÉENNE DE DÉFENSE ET DE SÉCURITÉ

M. Laurent Fabius - Alors que se poursuit la si meurtrière guerre en Irak, dont chacun souhaite qu'elle soit la plus courte possible, il est de notre responsabilité politique de créer les conditions futures d'une paix mondiale durable. Il faudra, pour cela, réorienter les relations internationales en privilégiant la solidarité et le droit mais il faudra aussi, et c'est capital, construire une défense européenne unie.

Une des leçons qu'apportent les tragiques événements en cours, c'est qu'aucun pays, aussi puissant soit-il, ne peut assurer à lui seul une sécurité globale, légitime et efficace. Dans ces conditions, si l'on veut, comme c'est le cas s'agissant du détestable régime de Saddam Hussein, parvenir à un désarmement pacifique, il faut à la fois permettre à l'ONU de contrôler ce désarmement et disposer de la force militaire indispensable. Or, cette force militaire, l'Europe n'en dispose pas. De plus, si l'on ne veut pas que les pays qui appartenaient à l'ancienne Union soviétique se tournent systématiquement vers le bouclier américain, il ne faut pas leur intimer le silence mais leur proposer une défense européenne crédible (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

L'Union européenne a progressé, et elle a su se doter d'une monnaie unique utile. Il nous faut maintenant bâtir une Europe scientifique, technique et sociale et, en même temps, faire de l'Europe de la défense notre objectif résolu. Il y faut une volonté politique farouche de la France, de l'Allemagne et de leurs partenaires - y compris, si possible, de la Grande-Bretagne. Il faut donc des projets concrets, chiffrés et, nous l'espérons, débattus au Parlement.

Monsieur le Premier ministre, si vous partagez cette ambition, qu'entendez-vous faire en faveur de la défense européenne unie ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre - Nous partageons cette conviction et, comme vous, nous sommes frappés par les horreurs de cette guerre, déjà trop meurtrière et que nous souhaitons rapide. Tout au long de la crise irakienne, les Européens convaincus auront été des Européens déçus. Malgré cela, nous avons veillé à toujours maintenir des contacts avec tous les pays du continent, pour éviter que le projet européen ne soit victime de la guerre en Irak. Des événements qui se sont succédé, nous avons retiré une part de satisfaction : que, derrière la France, les peuples d'Europe soient descendus dans la rue pour clamer que la vision française d'un monde multipolaire est aussi la leur.

Notre projet européen impose des efforts, et à notre pays en premier lieu, car nous ne pourrions convaincre nos partenaires du bien-fondé de notre approche en laissant notre défense considérablement affaiblie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). C'est pourquoi nous avons mis, par la loi de programmation militaire, des moyens au service de notre crédibilité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Ce redressement était nécessaire : il signifie que, lorsque nous parlons de la paix, ce n'est pas par pacifisme (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains), mais avec l'idée que la force doit être mise au service du droit (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

S'agissant de la construction de l'Europe de la défense, le Gouvernement français a attaché une grande importance à l'accord conclu à Athènes, le 15 mars, par les ministres de la défense de l'Union. Je sais qu'en cette matière, le scepticisme prévaut, car l'élaboration d'une politique commune est difficile. Pourtant, nous progressons par étapes. C'est ainsi que des forces européennes vont se substituer à celles de l'OTAN en Macédoine, et c'est ainsi qu'en dépit des circonstances, la coopération relative au porte-avions britannique est réelle (« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe UMP).

Tout cela est difficile à mener à bien, je l'ai dit, mais nous devons veiller à ce que l'Europe contribue efficacement à l'équilibre des relations internationales, cette Europe qui est au centre de la vision française d'un monde multipolaire. Une politique européenne de sécurité et de défense commune est indispensable ; il y faudra du temps, mais elle adviendra si l'initiative franco-allemande, ouverte à tous nos partenaires, y compris l'Espagne, y compris la Grande-Bretagne est adoptée de par une volonté commune (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

GUERRE EN IRAK

M. Jean-Pierre Brard - (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste) Les Etats-Unis se livrent à une agression caractérisée et, grâce au général Franks, nous savons maintenant que la guerre était préparée depuis un an, qui vise à l'appropriation des richesses pétrolières de l'Irak, au risque de mettre le feu à toute la planète.

Par la voix du Président de la République et par celle du ministre des affaires étrangères, la France a exprimé clairement sa position. Ayant eu, au cours des dernières semaines, plus de temps que d'habitude pour regarder la télévision (Sourires), je tiens à souligner qu'en entendant M. de Villepin porter la parole de la France, j'ai été, comme bien d'autres, et quelles que soient nos origines ou nos convictions, fier d'être Français (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et sur de nombreux bancs du groupe UMP).

Il faut aujourd'hui stopper l'agression anglo-américaine, empêcher que les B52, engins de mort assimilables à des armes de destruction massive, continuent à tuer autant d'innocents, arrêter la guerre et rétablir le droit international.

Monsieur le Premier ministre, que comptez-vous faire pour rétablir l'ONU dans ses prérogatives, en commençant par provoquer une assemblée générale de l'institution ? Interdirez-vous le survol de notre territoire par les B52 qui tuent des innocents en Irak et menacent la sécurité de la population française ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP) Fermerez-vous nos ports aux navires qui participeraient à l'agression ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste)

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères - La guerre est maintenant là, avec son visage hideux, son cortège de souffrances et de victimes. Chacun connaît ici la position de la France sur ce conflit. Face au terrible régime de Saddam Hussein, nous avons jusqu'au bout plaidé pour un désarmement pacifique de l'Irak et mis en garde contre les conséquences de cette guerre.

Dans les circonstances actuelles, que veut la France ? Tout d'abord, que la guerre soit la plus courte et la moins meurtrière possible. Ensuite, que les pays voisins s'abstiennent de toute implication dans le conflit, ce qui embraserait la région. Enfin, que les événements ne conduisent pas à une radicalisation des esprits et à une flambée du terrorisme.

Il existe néanmoins, comme l'a souligné le Président de la République, des usages entre alliés que nous devons respecter, parmi lesquels le droit de survol (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Maxime Gremetz - Pas pour les hors-la-loi ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. le Ministre - Aucun membre de l'OTAN, quelle que soit sa position sur le conflit irakien lui-même, n'a remis en question cet usage.

Que peut faire aujourd'hui la France ? Tout d'abord, répondre à l'urgence humanitaire, en prenant part aux discussions en cours à l'ONU sur l'adaptation de la résolution pétrole contre nourriture et en aidant les organisations spécialisées de l'ONU comme les organisations non gouvernementales - j'étais hier même à Genève devant la commission des droits de l'homme de l'ONU et rencontrais le président du Comité international de la Croix-Rouge. Ensuite, rétablir le plus rapidement possible la pleine souveraineté de l'Irak sur son territoire, ce qui exige le respect de son intégrité territoriale ainsi que son unité, et implique que les Nations unies jouent un rôle central dans la reconstruction du pays (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

CONFÉRENCE INTERNATIONALE POUR LA PAIX AU MOYEN-ORIENT

M. Renaud Donnedieu de Vabres - L'Assemblée nationale suit, heure par heure, en liaison parfaite avec le Gouvernement (Dénégations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains), l'évolution de l'intervention américaine et britannique en Irak. Comme nos concitoyens, nous sommes inquiets de l'évolution du conflit sur le terrain, laquelle était, hélas, prévisible, et de ses répercussions au niveau mondial.

La lutte contre le terrorisme et la réouverture d'un processus de paix crédible entre Israéliens et Palestiniens sont deux impératifs qui peuvent rassembler les Européens, et au-delà bien d'autres peuples et tous les citoyens du monde choqués par les attentats du 11 septembre et par les massacres quotidiens commis en Israël et en Palestine.

Vous avez eu raison de relancer le principe d'une Conférence de paix pour le Moyen-Orient. La feuille de route établie par le « Quartet » constitué de l'Union Européenne, de l'ONU, des Etats-Unis et de la Russie n'est pas une simple précaution de dernière heure. Cette voie vers la paix est une exigence morale et politique. Monsieur le ministre des affaires étrangères, pensez-vous possible de rassembler les gouvernements européens pour la mettre en _uvre ? Ces gouvernements seraient alors soutenus par l'Europe des citoyens (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères - La France n'a cessé de le dire ces derniers mois : le Moyen-Orient n'avait pas besoin d'une nouvelle guerre. Région déjà fragilisée par de nombreux conflits - dont se nourrit le terrorisme -, où les fractures politiques, religieuses, ethniques et culturelles sont nombreuses, s'y expriment la frustration des peuples ainsi qu'un profond sentiment d'injustice devant toute politique de deux poids deux mesures.

D'où la conviction de la France que de la solution du conflit israélo-palestinien, urgente nécessité, dépend la stabilité de la région tout entière. Une chance est à saisir. L'objectif, partagé par la grande majorité des Etats, est de parvenir à la création d'un Etat palestinien viable et démocratique, aux côtés d'un Etat d'Israël vivant en sécurité. La méthode est connue : nous demandons la publication immédiate et la mise en _uvre de la feuille de route du « Quartet », dont la première phase consiste en la tenue d'une conférence internationale. Les circonstances le permettent, depuis la constitution d'un nouveau gouvernement israélien et la nomination d'Abou Mazen comme Premier ministre de l'Autorité palestinienne.

Les pays européens, unis sur les principes quant à l'avenir de cette région, dont ils sont les partenaires naturels de par l'histoire, la géographie et la culture, doivent avancer avec détermination, en concertation étroite avec nos amis américains, pour créer les conditions indispensables d'une percée politique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

LUTTE CONTRE D'ÉVENTUELS ATTENTATS SUR LE SOL NATIONAL

M. Alfred Trassy-Paillogues - Monsieur le ministre de l'intérieur, depuis le déclenchement du conflit en Irak, il est essentiel, plus encore que par le passé, de garantir la protection de nos concitoyens et de les rassurer, d'autant que des tensions croissantes se manifestent entre communautés. D'après un récent sondage, un Français sur deux s'inquiète des conséquences éventuelles de cette guerre et 46 % d'entre eux craignent une reprise des attentats. Face à cette menace, il convient, sans fébrilité mais avec détermination, de prendre les mesures nécessaires. Après l'ouverture du centre opérationnel Beauvau la semaine dernière, quelle organisation a mis en place le Gouvernement pour parer à toute éventualité ? En un mot, Monsieur le ministre, pouvez-vous rassurer nos concitoyens et nous-mêmes à ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - La première priorité fixée par le Premier ministre aux préfets, qu'il a réunis la semaine dernière, est d'empêcher tout dérapage entre communautés. A cet égard, je tiens à rendre hommage aux organisateurs des nombreuses manifestations qui ont eu lieu ces jours derniers et qui, pour l'essentiel, se sont déroulées dans le calme. Cela n'a pas été le cas dans tous les pays.

Je veux cependant exprimer l'émotion du Gouvernement devant les agressions inadmissibles dont certains jeunes ont été victimes du seul fait qu'ils étaient juifs. Nous ne pouvons tolérer de tels comportements (Applaudissements sur tous les bancs). Cette guerre n'est pas la nôtre, et qu'il s'agisse des musulmans de France ou des juifs de France, chacun a le droit de prier, de croire, de vivre son appartenance comme il pense devoir le faire : telle est la leçon de la République.

D'autre part les préfets ont reçu tous les propriétaires, publics ou privés, de locaux accueillant du public, pour les inviter à opérer des contrôles aléatoires. La SNCF et la RATP ont renforcé leurs mesures de sécurité. La police et la gendarmerie assurent la protection de deux mille sites. Enfin le nombre des militaires affectés à la sécurité intérieure a été doublé, en accord avec Mme Alliot-Marie, pour s'établir à huit cents (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

POLITIQUE ÉCONOMIQUE DU GOUVERNEMENT

M. François Huwart - (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Vous avez récemment déclaré, Monsieur le ministre de l'économie, que l'essentiel des conséquences économiques négatives de la crise irakienne était derrière nous. Je comprends qu'il ne soit pas dans votre rôle de faire profession de pessimisme, mais est-ce si sûr ? Après avoir remonté, les Bourses fléchissent à nouveau dans la perspective d'un conflit peut-être plus long que prévu. Mais surtout, au-delà de ces éléments dramatiques mais conjoncturels, les Français sont durablement inquiets des conséquences de votre politique - et c'est pourquoi sans doute vous avez le plaisir de me revoir dans cet hémicycle... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) Ils sont inquiets de la situation sociale, de la baisse des prévisions de croissance, du creusement des déficits publics, des plans sociaux en cascade, de la situation très dégradée des entreprises, et ils me l'ont dit pendant la campagne électorale. Leur inquiétude est encore accrue par le manque de lisibilité de votre politique. La « pente » leur paraît plus forte qu'il y a dix mois, et la « route » qui devait être droite, ne leur apparaît plus bien. C'est la confiance qui manque, et sans elle, sans une forte politique de l'emploi et une forte politique de solidarité, il n'y a pas de croissance. Que comptez-vous faire pour redonner confiance aux Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste ; vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP) La confiance ne se décrète pas. Elle est le résultat d'un environnement dans lequel les acteurs économiques voient que l'avenir leur appartient, qu'il se bâtit par les initiatives individuelles. L'objectif d'un Gouvernement, quel qu'il soit, est de créer les conditions pour que ces acteurs, personnes et entreprises, aient envie de voir l'avenir positivement.

Tel est bien le but de notre politique, et il demeure quelle que soit la conjoncture. Nous avons aujourd'hui des difficultés conjoncturelles, comme tous les pays du monde (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Mais nous avons une politique : elle consiste à établir les conditions les plus favorables pour que les problèmes soient résolus par l'initiative économique. A partir de ces idées, nous avons bâti, loi après loi et budget après budget, les éléments grâce auxquels la France, progressivement, saura résoudre ses problèmes et sortir par le haut de ses difficultés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

POLITIQUE EXTÉRIEURE ET DE SÉCURITÉ EUROPÉENNE

M. Alain Marty - Malheureusement, Madame la ministre des affaires européennes, la guerre d'Irak est déclenchée. Nous sommes nombreux ici à déplorer cette action unilatérale, hors du droit international ; et nous sommes nombreux à soutenir l'action exemplaire du Président de la République, qui a su faire entendre la voix singulière de la France et de notre diplomatie. J'ai une pensée pour toutes les victimes de ce conflit qui était évitable.

De cette crise, l'Europe sort affaiblie et divisée. Pourtant elle ne peut se permettre d'être seulement un espace économique. Il faudra, demain, créer très vite une Europe capable de défendre sa sécurité et ses intérêts partout dans le monde. Mais ces idées ne sont pas partagées par tous. Les pays européens sont-ils aujourd'hui capables d'évoluer vers une diplomatie et une politique de défense communes ? Ne faut-il pas l'établir avec les quinze membres actuels dès avant 2004 ? Un tel projet est important non seulement pour l'Europe mais pour l'équilibre mondial et la paix (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes - Il est vrai que la guerre d'Irak a divisé l'Europe : certains ont voulu le recours à la force quand d'autres, dont notre pays, auraient souhaité que fût mise au premier plan la responsabilité collective de la communauté internationale - même si tous avaient le même but : le désarmement de l'Irak.

Est-ce la fin du projet politique européen ? Certainement pas, et peut-être même faut-il dire : au contraire. L'Europe a déjà connu des crises profondes mais n'a jamais cessé de progresser. Personne ne souhaite que nous fassions marche arrière. Des travaux sont en cours, et tout d'abord la Convention, dont la présidence grecque a proposé d'entendre le président dès avril.

Nous constatons d'autre part l'émergence d'une véritable opinion publique européenne, qui réclame plus d'Europe, et non pas moins.

Surtout, le Conseil européen, réuni les 20 et 21 mars à Bruxelles, est parvenu, quelles que soient les divergences qui subsistent, à une déclaration commune, associant non seulement les Quinze, mais aussi les futurs membres. Cette déclaration affirme des principes essentiels pour l'avenir : intégrité territoriale et souveraineté de l'Irak, primauté des Nations unies, renforcement de la PESC.

Nous célébrons aujourd'hui le 46e anniversaire du traité de Rome : j'ai réuni ce matin les neuf anciens commissaires européens français et nous nous sommes accordés pour que la France porte haut ce message - car si l'Europe existe, notre pays en est un des principaux bâtisseurs (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

 

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 74ème jour de séance, 182ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 1ER AVRIL 2003

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

AIDE HUMANITAIRE EN IRAK 4

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

AIDE HUMANITAIRE EN IRAK

M. Paul Quilès - Comme on pouvait le craindre, et contrairement aux prévisions américaines, la guerre d'Irak inflige de graves violences à la population civile. Déjà victime des bombardements aériens et des affrontements terrestres, elle doit endurer d'autres souffrances, au premier rang desquelles la malnutrition. Avant la guerre, 60 % de la population irakienne recevait de la nourriture dans le cadre du programme « pétrole contre nourriture » et 600 000 personnes particulièrement vulnérables - enfants, femmes et personnes âgées - bénéficiaient de compléments alimentaires. Or, cette aide indispensable se trouve remise en question même si, dans les zones épargnées par le conflit, il semble que le gouvernement irakien procède encore à quelques distributions. Une pénurie de médicaments risque également de s'installer, sans parler des épidémies qui pourraient survenir par suite du manque d'eau potable. C'est d'ailleurs ce qui se serait passé à Bassorah si le CICR n'était pas parvenu, avec l'accord des belligérants, à rétablir partiellement le traitement de l'eau.

Monsieur le ministre des affaires étrangères, ne serait-il pas souhaitable d'obtenir du Conseil de sécurité le vote d'une résolution demandant aux belligérants d'accepter des trêves de façon que des organismes comme le CICR puissent distribuer des vivres et des médicaments, dans des conditions de sécurité acceptables ? La population irakienne, qui a déjà tant souffert au cours des dernières années, ne peut être abandonnée à son triste sort. Refusant la guerre voulue par M. Bush, l'ONU n'a pas pour autant perdu sa raison d'être. A défaut de pouvoir apporter immédiatement la paix, qu'elle permette au moins d'alléger les souffrances des peuples (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et quelques bancs du groupe UDF).

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères - Vous l'avez dit, derrière les affres de la guerre, se profile une urgence humanitaire. La résolution 1472 du Conseil de sécurité, proposée par l'Allemagne avec le parrainage de la France, rappelle aux parties concernées leurs obligations en matière de droit international humanitaire et appelle la communauté internationale à fournir une aide humanitaire immédiate à la population irakienne.

Sur le terrain, il apparaît que le nombre de réfugiés est moins important que prévu, le risque étant celui de déplacements de population à l'intérieur du pays. Les populations civiles restent largement dans les villes, avec des conditions d'approvisionnement qui s'aggravent.

Pour faire face aux premières urgences, le Gouvernement a débloqué 10 millions pour contribuer à des opérations déjà bouclées par les ONG et la Croix-Rouge. Selon l'évolution de la situation, nous envisageons la possibilité d'ouvrir des crédits supplémentaires.

Dans le cadre de l'Union européenne, nous appuyons la mobilisation, au-delà des 21 millions déjà prévus par le bureau humanitaire européen, de 79 millions de la réserve d'urgence. Acheminer l'aide jusqu'aux populations concernées n'est pas simple. Nous y travaillons. Des trêves peuvent ainsi s'envisager, ou des couloirs humanitaires. Il y faut l'accord préalable des belligérants. Nous allons nous efforcer de l'obtenir, avec les Nations unies, qui sont la seule organisation légitime et capable d'apporter concrètement une aide efficace (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe socialiste).

 

 


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