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N
°  3805

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2012 (n° 3775),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 3


AGRICULTURE, PÊCHE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES

POLITIQUES DE L’AGRICULTURE

DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL

Rapporteur spécial : M. Nicolas FORISSIER

Député

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SYNTHÈSE 5

I.– UN BUDGET VERTUEUX, MAIS OFFENSIF POUR L’AGRICULTURE FRANÇAISE 6

A.– UNE GESTION CALCULÉE AU PLUS JUSTE 6

1.– Le strict respect de la programmation triennale dans le présent projet 6

a) Une réduction de 2,5 % sur le programme n° 215 Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture 6

b) Une légère baisse de 0,6 % sur le programme n° 154 Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires 7

c) Une réduction de 2 % des crédits demandés pour le programme n° 149 Forêt 8

2.– Les 22 millions d’efforts supplémentaires exigés au-delà du triennal 8

B.– DES MOYENS NOUVEAUX AU SERVICE DE LA COMPÉTITIVITÉ DE L’AGRICULTURE FRANÇAISE 9

1.– Le financement de l’allègement des charges 10

a) Deux mesures fiscales comme source de financement : la moindre défiscalisation du fioul domestique et la taxe sur les boissons sucrées 10

b) L’extension aux boissons contenant des édulcorants 11

c) Une ébauche de TVA anti-délocalisation ? 12

2.– Vers un allègement de charges sur les salariés permanents en agriculture 12

a) Les propositions du rapport Reynès 12

b) Le contenu de l’article additionnel proposé 13

II.– LES GRANDES ORIENTATIONS DU PROGRAMME N° 154 ÉCONOMIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE DE L’AGRICULTURE, DE LA PÊCHE ET DES TERRITOIRES 14

A.– DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN GÉNÉRALEMENT PRÉSERVÉS 14

1.– Le soutien à l’installation des jeunes agriculteurs 14

2.– Le plan de modernisation des bâtiments d’élevage 15

3.– Le plan de performance énergétique 15

4.– La prime herbagère agro-environnementale (PHAE) 16

5.– La prime nationale supplémentaire à la vache allaitante (PNSVA) 18

B.– LES MESURES PRISES EN FAVEUR DE LA PÊCHE ET DE L’AQUACULTURE 18

1.– Le bilan du plan pour une pêche durable et responsable (PPDR) 18

2.– Les contrats bleus, mesure phare du PPDR 19

3.– Le fonds interprofessionnel pour la filière pêche 20

C.– L’INDISPENSABLE SOUTIEN À L’EXPORT 21

1.– Une perte inquiétante de parts de marché à l’exportation 22

2.– Le dispositif public de promotion agroalimentaire 23

3.– Des performances non négligeables 24

III.– UN MINISTÈRE DE PLUS EN PLUS PERFORMANT 25

A.– UNE VISION DE LONG TERME SUR LA QUALITÉ DE LA GESTION ADMINISTRATIVE 25

1.– La gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC) 25

2.– La modulation des rémunérations 26

a) La prime de fonctions et de résultats (PFR) 26

b) L'indemnité de performance et de fonction (IPF) 27

3.– La fusion des corps de fonctionnaires 27

B.– UN EFFORT CONSTANT DE MISE À NIVEAU PAR LA FORMATION CONTINUE 29

1.– Le rôle de l’Institut national de formation des personnels du ministère de l’agriculture (INFOMA) 29

2.– La certification ISO 9001 de la formation continue 30

IV.– LA POLITIQUE FORESTIÈRE À LA CROISÉE DES CHEMINS 31

A.– LA POURSUITE DES MESURES D’ÉCONOMIE EN 2011 31

1.– Un cadre financier très resserré 31

2.– Un plan de proximité pour renforcer la prévention des risques psychosociaux 33

B.– LES PERSPECTIVES NOUVELLES DE L’ONF 34

1.– Le contrat d’objectifs 2012-2016 34

2.– Le renforcement de la contribution de l’État 35

COMPTE RENDU DE LA COMMISSION ÉLARGIE DU 25 OCTOBRE À 9 HEURES 39

EXAMEN EN COMMISSION 82

Article 48 : Création d’une contribution à la surface aux frais de garderie de l’Office national des forêts (ONF) 83

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 87

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 95

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 11 octobre 2011, 91 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial.

SYNTHÈSE

La mission Agriculture pour 2012 s’inscrit dans le strict respect de la programmation triennale. Comme en 2011, le présent rapport spécial portera sur des crédits évalués dans le projet de loi de finances à environ 3,1 milliards d’euros. Du fait de l’inflation, cette stabilité apparente correspond à une baisse en termes réels. Le budget de l’Agriculture fournit ainsi sa contribution aux efforts de remise en ordre de nos finances publiques.

Depuis le dépôt du présent projet de loi, le Gouvernement a annoncé son intention de réaliser, en accord avec la majorité parlementaire, un milliard d’économies supplémentaires. Les crédits de personnel ne sont pas concernés. Mais le ministère de l’Alimentation, de l’agriculture, de la pêche et des affaires rurales dispose d’autres crédits d’ajustement. Il devrait participer à hauteur de 26 millions d’euros à cet effort complémentaire.

L’adoption de la première partie du présent projet de loi permettra cependant de dégager aussi des moyens supplémentaires pour financer une baisse générale des charges qui pèsent sur les salariés permanents en agriculture. La mesure, chiffrée à 210 millions d’euros, a été annoncée par le président de la République le 11 octobre 2011 à Aubusson. Elle sera financée, et même au-delà des besoins, par le produit de la taxe sur les boissons sucrées finalement affectée pour partie à l’État et créée à ce titre en première partie du présent projet de loi.

Applicable dès 2012, l’allègement des charges qui pèsent sur les exploitants employeurs devrait restaurer la compétitivité de l’agriculture française et soutenir l’activité dans ce secteur. Calquée sur le dispositif Fillon d’allègement des charges, elle serait plus qu’un signal envoyé aux acteurs économiques. Calculée pour réduire d’un euro le coût d’une heure de travail pour un salarié agricole payé au SMIC –à revenu équivalent pour lui, elle produirait un effet significatif sur l’emploi, en particulier dans des secteurs fortement consommateurs de main-d’œuvre comme celui des fruits et légumes, qui a subi les retombées de la crise de la bactérie E. coli de l’été 2011.

L’un des principaux opérateurs du programme, l’Office national des forêts, entame une rénovation profonde de son financement. Une taxe nouvelle, instituée par l’article 48 rattaché à la mission Agriculture, lui apporterait des ressources nouvelles, mais agirait aussi de manière positive sur les choix des différents acteurs économiques –État, communes forestières, Office– intéressés à l’exploitation optimale de la forêt française, qui recèle un fort potentiel. Le Rapporteur spécial approuve cette réforme, mais juge que la loi devrait fixer le montant exact de cette contribution nouvelle, et non seulement indiquer une fourchette de taxation.

Enfin, les chambres d’agriculture ne peuvent supporter un gel de leurs ressources. Le Rapporteur spécial a déposé un amendement visant à augmenter la taxe pour frais de chambres d’agriculture d’un montant de 1,75 %.

I.– UN BUDGET VERTUEUX, MAIS OFFENSIF POUR L’AGRICULTURE FRANÇAISE

La mission Agriculture pour 2012 s’inscrit dans le strict respect de la programmation triennale. Comme en 2010, le présent rapport spécial portera sur des crédits évalués dans le projet de loi de finances à environ 3,1 milliards d’euros. Du fait de l’inflation, cette stabilité apparente correspond à une baisse en termes réels. Le budget de l’Agriculture fournit ainsi sa contribution aux efforts de remise en ordre de nos finances publiques.

Grâce à la création d’une taxe sur les boissons sucrées, de nouvelles marges de manœuvre apparaissent cependant pour 2012, afin de financer un allègement des charges qui pèsent sur les salariés permanents en agriculture.

A.– UNE GESTION CALCULÉE AU PLUS JUSTE

Comme l’indique le projet annuel de performances, le plafond des crédits alloués à la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales en 2 012 s’élève à 3,57 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 3,6 milliards d’euros, dont :

– 2,65 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2,68 milliards d’euros en crédits de paiement hors crédits de personnel ;

– 921 millions d’euros, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, de personnel.

À périmètre constant et hors compte d’affectation spéciale des pensions, le plafond de la mission est inchangé par rapport à l’annuité 2012 prévue dans la loi de programmation des finances publiques 2011-2014. Par rapport à la loi de finances initiale pour 2011, ce plafond, y compris le compte d’affectation spéciale des pensions, est par ailleurs stable en autorisations d’engagement et diminue de 1,5 % en crédits de paiement à périmètre constant.

1.– Le strict respect de la programmation triennale dans le présent projet

a) Une réduction de 2,5 % sur le programme n° 215 Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

Hors mesures de transferts, les crédits proposés respectent strictement les instructions transversales communiquées par le Premier ministre, soit une réduction de 2,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2011. Cette réduction fait suite à la baisse de 5 % de 2011 par rapport à la loi de finances initiale pour 2010.

ÉVOLUTION COMPARATIVE DES CRÉDITS PAR ACTION

(en millions d’euros)

 

Loi de finances initiale pour 2011

Projet de loi de finances pour 2012

Écarts entre 2012 et 2011 (en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action n° 1, Moyens de l’administration centrale

34,34

41,71

55,48

42,86

+ 61,59

+ 2,76

Action n° 2, Statistiques, évaluation et études

5,22

5,77

4,18

4,84

– 19,87

– 16,17

Action n° 3, Moyens des DRAAF, DDEA, DAF

19,23

19,23

21,14

21,14

+ 9,95

+ 9,95

Action n° 4, Moyens communs

33,61

39,17

32,18

36,40

– 4,26

– 7,06

Total du programme n° 215

92,41

105,90

113

2

+ 22,28

– 0,60

Source : réponses au questionnaire budgétaire.

La principale hausse en autorisations d’engagement est constatée sur l’action n° 1 Moyens de l’administration centrale. Elle provient essentiellement de ce que les baux des sites à loyers privés sont réengagés pour trois ans en 2012 : site de Vaugirard, Archives du Mans… Le projet prometteur de Picpus, pour lequel l’architecte Christian de Portzamparc est retenu, a pris un retard d’environ six mois pour des raisons indépendantes de la volonté du ministère.

b) Une légère baisse de 0,6 % sur le programme n° 154 Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires

Le présent projet de loi poursuit l’objectif de mobiliser 300 millions d’euros sur 2011-2013 pour financer des plans stratégiques de développement des filières, dont 120 millions d’euros attendus du produit de la taxe sur le changement d’affectation des terres. Ces plans doivent apporter une réponse aux difficultés structurelles que connaissent les exploitants agricoles, en accompagnant la modernisation indispensable des exploitations et des industries agroalimentaires et en consolidant les filières laitière, bovine et porcine.

Par ailleurs, 507 millions d’euros sont consacrés au dispositif d’exonération des cotisations patronales de sécurité sociale des travailleurs occasionnels du secteur de la production agricole.

Selon les réponses au questionnaire budgétaire, les 350 millions d’euros de crédits en faveur de l'installation des jeunes agriculteurs sont sanctuarisés conformément aux engagements du Président de la République,

Les crédits demandés pour 2012 au titre du programme n° 154 hors pêche sont ainsi en baisse de 0,6 %, soit – 11 millions d’euros en autorisations d'engagement et de 2,5 %, soit – 49 millions d’euros en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2011. Cette baisse correspond à l’application de la norme transversale de diminution des dépenses d’intervention retenue par le Gouvernement sur le triennal 2011-2013.

Les dotations des sous-actions sont en reconduction (FAC) ou en diminution (AGRIDIFF) en application de la norme transversale de diminution des dépenses d’intervention retenue par le Gouvernement sur le triennal 2011-2013. Les dotations d’autres sous-actions sont en reconduction : stages à l’installation, DJA et FICIA.

L’accompagnement financier aux chambres d’agriculture marque également une baisse de six millions d’euros, s’agissant de la dernière année d’accompagnement financier destiné à atténuer le coût d'intégration des missions de service public confiées par la loi aux chambres d'agriculture.

c) Une réduction de 2 % des crédits demandés pour le programme n° 149 Forêt

En 2012, ce programme devrait être doté de 354 millions d’euros en autorisations d’engagement et 362,5 millions d’euros en crédits de paiement. Il comprend un important volume de crédits destinés à la reconstitution des forêts touchées par la tempête Clos du 24 janvier 2009. L’État réaffirme également son soutien à l’Office national des forêts (ONF) par le versement d’un complément de subvention.

Les crédits demandés pour 2012 sont en baisse de 2 %, soit – 6 millions d’euros en autorisation d'engagement, et de 2 %, soit – 9 millions d’euros en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2011. Cette diminution résulte d’une part du transfert de la subvention pour charge de service public de l’Inventaire forestier national (IFN) vers le programme n° 159 dans le cadre de la fusion de l’établissement avec l’Institut national géographique (IGN) et d’autre part, de l’application de la norme transversale de diminution des dépenses d’intervention retenue par le Gouvernement sur le triennal 2011-2013.

2.– Les 22 millions d’efforts supplémentaires exigés au-delà du triennal

Depuis le dépôt du présent projet de loi, le Gouvernement a annoncé son intention de réaliser, en accord avec la majorité parlementaire, un milliard d’économies supplémentaires. Les crédits de personnel ne sont pas concernés. Mais le ministère de l’Alimentation, de l’agriculture, de la pêche et des affaires rurales dispose d’autres crédits d’ajustement. Il devrait participer à hauteur de 26 millions d’euros à cet effort complémentaire.

Sur la présente mission, il est proposé de réduire de 22 millions d’euros le montant des autorisations d’engagements (AE) et des crédits de paiement (CP) de cette mission. Cette minoration se décompose de la manière suivante :

– diminution de 15 millions d’euros des crédits du programme Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires :

● les efforts supplémentaires sur les dispositifs d’intervention portent à hauteur de 7 millions d’euros sur la gestion des crises et des aléas de production, pour 4 millions d’euros sur les actions d’appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles et pour 2,5 millions d’euros sur la gestion durable des pêches et de l’aquaculture ; ces ajustements sont cohérents avec les dernières prévisions des besoins pour l’année 2012 ;

● la contribution du programme au titre de l’effort transversal demandé aux opérateurs de l’État s’élève à 1,5 million d’euros, à travers une minoration des subventions ;

– baisse de 3,1 millions d’euros des crédits du programme Forêt :

● les crédits destinés au développement économique de la filière et à sa gestion durable sont minorés de 2 millions d’euros ; cette réduction peut être absorbée compte tenu des derniers constats sur le rythme d’engagement des opérations de reconstitution des massifs forestiers ;

● la contribution du programme au titre de l’effort transversal demandé aux opérateurs de l’État s’élève à 1,1 million d’euros, à travers une minoration des subventions ;

– minoration de 2,4 millions d’euros des crédits du programme Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation :

● les crédits destinés à la lutte contre les maladies animales et à la protection des animaux sont minorés de 2 millions d’euros ; cet ajustement est compatible avec la montée en charge progressive des visites sanitaires dans les élevages avicoles et porcins, qui démarrent en fin d’année 2011 ;

● la contribution du programme au titre de l’effort transversal demandé aux opérateurs de l’État s’élève à 0,4 million d’euros, à travers une minoration des subventions ;

– minoration de 1,5 million d’euros des crédits du programme Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture résultant de la poursuite de la rationalisation et de la mutualisation des moyens des services supports du ministère.

B.– DES MOYENS NOUVEAUX AU SERVICE DE LA COMPÉTITIVITÉ DE L’AGRICULTURE FRANÇAISE

Notre assemblée a adopté le vendredi 21 octobre 2011 une taxe sur les boissons sucrées, en élargissant son champ aux boissons contenant des édulcorants. Cette mesure de taxation nouvelle constitue à la fois une mesure de rendement et une taxe visant à influer de manière positive sur le comportement des consommateurs.

Le principe d’universalité budgétaire veut que l’ensemble des recettes serve à financer toutes les dépenses confondues, en ne liant pas de manière rigide les premières et les secondes. L’instauration d’une taxe sur les sodas, en dégageant des recettes nouvelles pour le budget de l’État auquel elle devrait être affectée pour moitié, ouvre néanmoins une marge de manœuvre budgétaire qui a permis d’envisager un allègement de charges sur les salariés permanents de l’agriculture, pour un montant d’environ 210 millions d’euros.

Le Gouvernement ayant clairement affiché son intention d’instituer cet allègement de manière effective dès le 1er janvier 2012, nos collègues Charles de Courson, Christian Jacob et Bernard Reynès ont pu, sans tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution, déposer eux-mêmes un amendement visant à financer ce dispositif nouveau. Défendant depuis longtemps déjà l’idée d’un allègement, le Rapporteur spécial a cosigné l’amendement.

L’allègement de charges prévu devrait restaurer, au moins partiellement, la compétitivité de l’agriculture française en face de ses concurrentes d’Europe du Sud.

1.– Le financement de l’allègement des charges

Sous les réserves exposées plus haut relativement au principe d’universalité budgétaire, les deux mesures qui devraient servir à financer l’allègement de charges sur les salariés permanents en agriculture sont la moindre défiscalisation du fioul domestique et l’imposition nouvelle sur les boissons sucrées. Grâce à l’extension de cette dernière aux boissons contenant des édulcorants le vendredi 21 octobre 2011, le financement paraît reposer sur des bases assurées. Certains considèrent qu’il s’agit là d’un embryon de TVA anti-délocalisation.

a) Deux mesures fiscales comme source de financement : la moindre défiscalisation du fioul domestique et la taxe sur les boissons sucrées

Une première partie du financement – 80 millions d’euros – viendrait de l’augmentation, à hauteur de 1,54 euro par hectolitre, de la taxe intérieure de consommation applicable au fioul domestique utilisé comme carburant diesel dans le secteur agricole et celui des bâtiments et travaux publics. Ainsi, comme l’a signalé notre collègue Marc Le Fur en séance publique, « une partie de la recette sera payée par les agriculteurs. » Ils n’étaient à vrai dire pas les seuls bénéficiaires de la mesure de faible taxation du fioul domestique, puisque les transporteurs routiers en profitaient également, et même pour un montant légèrement supérieur au leur.

L’autre partie du financement proviendrait de la taxe nouvelle sur les boissons sucrées, dont l’Assemblée nationale a doublé, le vendredi 21 octobre 2011, le taux. La taxe, qui devait rapporter à l’origine 120 millions d’euros, devrait donc en rapporter 240 millions. Par surcroît, son champ est étendu aux boissons contenant des édulcorants, ce qui permettrait à l’État de percevoir 40 millions d’euros supplémentaires.

L’Assemblée nationale avait déjà adopté il y a quelques années un amendement de notre collègue Yves Bur visant à interdire les distributeurs de produits sucrés dans les écoles. Cette disposition a porté ses fruits puisque, depuis cinq ans, le surpoids recule chez les enfants scolarisés. Espérons que la nouvelle mesure aura des effets aussi tangibles.

b) L’extension aux boissons contenant des édulcorants

Notre collègue Michel Diefenbacher a exposé les trois raisons qui ont conduit la commission des Finances à préconiser une extension de cette taxe aux boissons contenant des édulcorants :

« La première est une raison de cohérence fiscale. Les boissons avec sucres ajoutés et les boissons avec édulcorants sont en réalité des produits très voisins. Ils sont vendus dans les mêmes commerces. Ils sont présentés sur les mêmes gondoles. Ils s’adressent à la même clientèle. Ce ne sont pas des produits de première nécessité, mais ce sont des produits faiblement taxés, puisque le taux de TVA qui leur est appliqué est de 5,5 %. (…)

La deuxième raison, c’est que nous souhaitons sécuriser le financement de l’exonération des charges des agriculteurs. Il nous faut trouver 210 millions. Charles de Courson nous a fait, durant la nuit, un exposé très remarquable, d’où il ressortait que nous avions trouvé 120 millions par le doublement de la taxe sur les boissons sucrées et 80 millions par la limitation de la détaxation du fioul domestique pour les activités professionnelles.

Il nous manque donc 10 millions. Non seulement nous les trouvons sans difficulté en taxant les boissons avec édulcorants, mais de surcroît, en élargissant la base de la taxe, nous pouvons en limiter le taux, et donc l’impact sur les prix de vente. La taxe serait portée, non pas à 7,12 euros par hectolitre, mais à 6,22 euros par hectolitre. L’impact sur les prix serait de l’ordre de trois centimes d’euro pour une canette de trente-trois centilitres : nous sommes ainsi très loin des écarts de prix qui sont d’ores et déjà constatés, dans une même ville, selon les magasins, les quartiers et les conditionnements, écarts que le président Cahuzac avait estimés, au début de nos débats, à quatorze centimes d’euro. On voit donc que l’impact est très faible sur le consommateur.

La troisième raison, et c’est le cœur même de notre débat (…) c’est l’issue incertaine du débat qui est ouvert par les nutritionnistes eux-mêmes sur les avantages et sur les risques des édulcorants. Et tant que ce débat n’est pas clos, il nous semble difficile d’en préjuger l’issue, et donc de traiter différemment les boissons sucrées et les boissons avec édulcorants. »

c) Une ébauche de TVA anti-délocalisation ?

À la suite de notre collègue Marc Le Fur, Mme Valérie Pécresse, ministre du Budget, a quant à elle résumé les enjeux du débat en le plaçant sous le signe de la TVA anti-délocalisation. Elle a ainsi expliqué devant la représentation nationale :

« Nous sommes en train de prendre une mesure de compétitivité du travail agricole en France, par rapport au travail agricole en Allemagne ou en Espagne. Nous proposons une mesure à la fois structurante de fiscalité pour une filière très importante économiquement, et aussi symboliquement, dans le monde à venir.

C’est effectivement une ébauche de ce que pourrait être une TVA anti-délocalisation : faire porter sur la consommation de certains produits une partie du financement de la sécurité sociale agricole. En l’occurrence, il était important de remettre en perspective le dispositif que nous proposons, qui est dans une certaine mesure un dispositif charnière dans la conception du projet de loi de finances. »

2.– Vers un allègement de charges sur les salariés permanents en agriculture

De moins en moins de salariés permanents sont assujettis au régime de protection sociale agricole, puisque leur nombre diminue ces dernières années de 1,8 % en moyenne annuelle. Cette baisse est nettement plus marquée dans le secteur de la production agricole, avec un repli moyen de 2,4 % depuis 2004, soit une baisse de 12 % entre 2004 et 2009. Le secteur de la production agricole comptait ainsi 238 700 travailleurs permanents en 2009 contre 264 800 en 2004.

Lors du soixante-cinquième congrès de la FNSEA, à Saint-Malo le 31 mars 2011, le Premier ministre a annoncé qu’il proposerait « au Parlement de se prononcer sur des mesures concrètes d’allègement des charges sur le travail permanent, dès cet automne ». La mesure envisagée était conçue pour s’appliquer dès le 1er janvier 2012.

a) Les propositions du rapport Reynès

Notre collègue Bernard Reynès a été chargé de réaliser une étude sur les enjeux de la maîtrise du coût de la main-d’œuvre dans le secteur de la production agricole. Il a remis son rapport le 5 juillet 2011. Entre autres hypothèses, le document préconise un allègement des charges sociales patronales dès 2012 pour enrayer la diminution du nombre des emplois permanents et pour favoriser l'embauche. Deux pistes sont envisagées :

– l'exonération des cotisations patronales légales et conventionnelles jusqu'à 1,6 SMIC, sans dégressivité jusqu'à 1,2 SMIC. Le coût de cette mesure est évalué à 523 millions d’euros pour une économie sur l'heure de travail qui varie de 0,98 euro au niveau du SMIC à 1,90 euro à 1,3 SMIC ;

– l'exonération sans dégressivité des cotisations conventionnelles, en complément de la réduction Fillon sur les bas salaires. Son coût est évalué à 383 millions d’euros. Elle diminue le coût de l'heure de travail de 0,98 euro, pour un salarié payé au SMIC, et de 1,28 euro pour 1,3 SMIC ;

Les deux mesures préconisées par ce rapport ramènent l'heure de travail payée au SMIC à 9,32 euros, soit un niveau inférieur à celui du travail saisonnier. Elles s'appliquent à la majorité des salariés de la production puisque 79 % d'entre eux ont une rémunération inférieure ou égale à 1,3 SMIC.

b) Le contenu de l’article additionnel proposé

Le Président de la République a annoncé à Aubusson le 11 octobre 2011 une mesure de soutien exceptionnelle aux exploitants. Reprise par le Gouvernement de manière claire et officielle, cette annonce a permis à certains de nos collègues de déposer un amendement qui aurait autrement contrevenu à l’article 40 de la Constitution, prohibant en règle générale la création d’une charge publique.

La mesure proposée consiste, en complément de l’allégement général sur les bas salaires, à exonérer les entreprises agricoles de leurs autres cotisations légales et conventionnelles de façon à réduire d’un euro le coût de l’heure de travail des salariés permanents au niveau du SMIC.

Cette exonération s’appliquera à tous les salaires compris entre 1 SMIC et 1,4 SMIC. Dégressive, elle sera maximale pour une rémunération annuelle inférieure ou égale à 1,1 SMIC et s'annulera pour une rémunération annuelle supérieure ou égale à 1,4 SMIC.

Le coût de la mesure, pour l’ensemble des employeurs agricoles concernés, est de 210 millions d’euros. Ces cotisations patronales seront prises en charge par l’État, assurant ainsi la neutralité financière de la mesure pour les organismes concernés. Le dispositif sera géré, pour le compte de l’État, par les caisses de mutualité sociale agricoles.

Le dispositif d’exonération des cotisations sera soumis à l’examen de la Commission européenne. Il entrera en vigueur avec la publication de son décret d’application après qu’il aura été reconnu conforme au droit communautaire.

II.– LES GRANDES ORIENTATIONS DU PROGRAMME N° 154 ÉCONOMIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE DE L’AGRICULTURE, DE LA PÊCHE ET DES TERRITOIRES

Conformément à son orientation stratégique, le programme vise à intervenir en synergie avec les fonds communautaires pour favoriser la compétitivité des exploitations et des entreprises, qui sont confrontées à des marchés nationaux et internationaux instables et à la nécessité de s’adapter à des exigences environnementales croissantes et à une demande soutenue en matière de sécurité et de qualité des produits.

A.– DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN GÉNÉRALEMENT PRÉSERVÉS

La mesure d’allègement complémentaire des charges prévues pour 2012 ne saurait occulter les dispositifs de soutien budgétaires prévus dans le présent projet de loi.

1.– Le soutien à l’installation des jeunes agriculteurs

Depuis le 1er janvier 2009, à la demande de la France, le plafond communautaire des aides à l’installation a été revalorisé de 55 000 euros à 70 000 euros. Cela permet aux collectivités territoriales d’apporter un complément de dotation jeunes agriculteurs (DJA), tout en ouvrant un droit maximum d’équivalent subvention pour les prêts bonifiés à chaque jeune qui s’installe.

Ce dispositif est complété par le programme pour l’installation et le développement des initiatives locales (PIDIL), financé sur le fonds d’incitation et de communication en agriculture (FICIA) et destiné à faciliter l’installation de candidats réalisant leur projet hors cadre familial ou sur des structures familiales ayant besoin d’être confortées au plan économique. Les PIDIL comportent : des actions en faveur de la transmission foncière ; une aide à la conclusion de baux et inscription au répertoire départemental à l'installation, destinées à encourager financièrement les agriculteurs cédants et les propriétaires fonciers à louer leurs terres et bâtiments aux jeunes qui s'installent. Ils concourent également au financement des « points info-installation ».

Lors d’un déplacement le 1er juillet 2010 à Brommat (Aveyron), le Président de la République a indiqué qu'un montant de 350 millions d'euros serait sanctuarisé dans le budget 2011 pour financer l'installation des jeunes agriculteurs. Ce budget inclut la dotation budgétaire FEADER au titre du développement rural ainsi que les exonérations fiscales et sociales. Cet engagement se poursuit en 2012, avec des dotations budgétaires identiques à 2011.

Pour 2011, l'utilisation du produit de la taxe sur les terrains nus devenus constructibles est orientée sur le soutien aux projets innovants des jeunes agriculteurs dans le cadre de leur démarche d'installation. Un appel à projet va être lancé au cours du dernier trimestre 2011. Pour rappel, cette taxe ne fait pas l'objet d'une dotation particulière au sein du programme n° 154. En effet, la perception de cette taxe permet d'alimenter un fonds destiné aux jeunes agriculteurs qui est géré par l'Agence de services et de paiement (ASP). Pour l'année 2011, le montant collecté au 31 août 2011 s'élevait à 1,5 million d’euros.

2.– Le plan de modernisation des bâtiments d’élevage

Le plan de modernisation des bâtiments d’élevage (PMBE) constitue, depuis sa création en 2005, un axe important de la politique de soutien aux investissements pour le secteur de l’élevage. Il permet de répondre au besoin structurel de modernisation des bâtiments d’élevage. De 2005 à 2010, ce sont plus de 841 millions d’euros qui ont été mobilisés sur ce dispositif, tous financeurs confondus.

L’aide nationale peut être complétée par les autres financeurs, tels que les collectivités territoriales et les agences de l’eau. Ceux-ci peuvent également intervenir seuls. L’aide peut faire l’objet d’un cofinancement de 50 % par le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) en fonction des choix régionaux (PDRH). Le PMBE est également contractualisé dans le cadre des contrats de plan État-régions pour la période 2007-2013.

L’État subventionne les projets dont le montant des investissements éligibles est supérieur à 15 000 euros hors taxe. Les financeurs autres que l’État peuvent financer de petits investissements de 4 000 à 15 000 euros hors taxes.

3.– Le plan de performance énergétique

Le plan de performance énergétique (PPE), issu des travaux du Grenelle de l'environnement, vise à encourager l’autonomie énergétique des exploitations agricoles et la production d’énergie renouvelable. Il permet de financer à la fois des diagnostics énergétiques et des investissements liés aux économies d'énergie et à la production d'énergie renouvelable. Il a été mis en place en 2009 et a été financé dans le cadre du plan de relance de l’économie en 2009 et 2010. En 2011, la dotation s'est établie à 12 millions d’euros dans le cadre des plans stratégiques d’aides aux filières.

Le plan de performance énergétique comprend à ce jour trois volets : un volet régionalisé pour le financement d’équipements liés aux économies d’énergie, deux volets nationaux gérés par appel à candidature pour l’acquisition de bancs d’essais moteurs des engins agricoles et le développement de la méthanisation agricole.

Pour les investissements à l’échelle d’une entreprise agricole, le montant global subventionnable maximum est de 40 000 euros pour les équipements d’économie d’énergie et équipements de production d’énergies renouvelables. Il est porté à 150 000 euros pour une CUMA. Le taux de subvention, tous financeurs confondus, peut atteindre 40 %, voire 50 % pour les jeunes agriculteurs. Une majoration de 10 % est accordée dans les zones défavorisées.

Pour l’année 2012, la dotation demandée est établie à 9 millions d’euros dans le cadre des plans d’aides aux filières sur la période 2011-2013.

4.– La prime herbagère agro-environnementale (PHAE)

La prime herbagère agro-environnementale vise à soutenir la gestion extensive des prairies ainsi que le maintien de l’ouverture des milieux en dynamique de déprise. Ce soutien est attribué à des surfaces particulièrement importantes pour le maintien de la biodiversité. L'intérêt de cette mesure agro-environnementale de maintien de pratiques favorables à l'environnement a retrouvé une légitimité renforcée en raison du bénéfice apporté au titre du stockage de carbone et son effet pour limiter l'impact sur le réchauffement climatique. À ce stade, plus de 3,5 millions d'hectares font l'objet d'une contractualisation essentiellement concentrées en zone défavorisée notamment zone de montagne.

Le bilan de santé a permis de renforcer le soutien des systèmes d'élevage fondés sur la valorisation de l'herbe. Cela se traduit par la mise en place d'une dotation spécifique à l'herbe financée dans le cadre des aides du premier pilier de la PAC. Par ailleurs, la PHAE relevant des nouveaux défis bénéficiera d'un taux de cofinancement FEADER porté à 75 %, contre 55 % actuellement, permettant à soutien égal d'alléger la charge de l'État.

Les contrats étant signés pour une durée de cinq ans, l'année 2012 correspondra au renouvellement des engagements initialement pris en 2007, première année de la programmation actuelle. Afin de faire coïncider la date de sortie de la grande majorité des contrats avec la nouvelle programmation de la PAC 2014-2020, il a été décidé pour la campagne 2012 de proroger de deux ans les contrats sortants de 2007. À cet effet, 17,5 millions d’euros d'autorisations d'engagement sont prévus pour cette opération, sachant que la mesure est co-financée à 75 %. Le montant total des autorisations d’engagement pour la prorogation des contrats se situe ainsi à hauteur de 70 millions d’euros pour les deux années prorogées 2012 et 2013.

Les crédits de paiement de 64 millions d’euros demandés permettent de payer la part nationale de l'ensemble des contrats en cours de validité. Il faut noter que cette mesure agro-environnementale est une mesure de masse touchant plus de 53 000 exploitations spécialisées en herbe dont la situation économique a été particulièrement fragilisée ces dernières années. Le maintien de ce dispositif d'aide est essentiel au maintien de ces élevages qui, de plus, apportent sur le plan environnemental et sociétal, de nombreuses externalités positives.

La gestion de la sécheresse du printemps 2011

La sécheresse qui a touché notre pays dès le printemps a durement frappé nos agriculteurs, et tout particulièrement nos éleveurs, en affectant la production de fourrages. Elle a dangereusement mis à mal leur capacité à nourrir leurs bêtes, emportant le risque de les voir contraints de les abattre.

Afin d’éviter le pire, le Gouvernement, sous l’impulsion du Président de la République, a, dès la mi-mai, tout mis en œuvre pour organiser la solidarité nationale, faciliter l’approvisionnement en fourrage et soulager la trésorerie des éleveurs en indemnisant les victimes de la sécheresse.

À la demande du Gouvernement, les principaux réseaux bancaires partenaires de l’agriculture ont mis en place des dispositifs d’accompagnement des éleveurs victimes de la sécheresse (prêts de trésorerie à des taux préférentiels, différés de remboursement d’échéances…). Se sont ajoutés à cette démarche un aménagement des prêts contractés par les éleveurs dans le cadre du plan de soutien exceptionnel à l’agriculture d’octobre 2009, un allègement de la taxe sur le foncier non bâti, le versement anticipé de 75 % de l’indemnité compensatoire d’handicap naturel le 15 septembre (400 millions d’euros), ainsi que le versement anticipé de certaines aides de la PAC.

Au 17 octobre 2011, 3,7 milliards d’euros ont ainsi été versés par anticipation aux agriculteurs.

À ce jour, le montant de l’indemnisation des pertes au titre des calamités agricoles est estimé à environ 300 millions d’euros. Le montant définitif ne pourra être connu qu’après la réalisation des bilans définitifs, qui seront soumis au Comité national de l’assurance en agriculture (CNAA) le 15 décembre 2011.

Ces indemnisations seront en particulier financées par la mobilisation de la trésorerie du Fonds national de gestion des risques en agriculture à hauteur de 100 millions d’euros (pour payer les acomptes) et par la réserve de précaution des programmes de la mission disponible à la fin de 2011, pour 100 millions d’euros à 120 millions d’euros, en fonction du schéma de fin de gestion 2011.

5.– La prime nationale supplémentaire à la vache allaitante (PNSVA)

La prime nationale supplémentaire à la vache allaitante complète l’une des dernières primes animales encore couplées après la réforme de la PAC de 2003. La réglementation communautaire prévoit la possibilité de versement par les États membres d’un complément national de la prime financée sur le budget de l’Union européenne (PMTVA). Le choix du maintien de cette mesure couplée participait d’une politique volontariste en faveur du secteur de la viande afin d’éviter l’érosion de la production française et de maintenir une filière agroalimentaire dynamique.

À l’issue du bilan de santé de la PAC, ce supplément national sera versé dans les mêmes conditions que les années précédentes, en complément des 75 % de la PMTVA qui restent couplés, d’où une reconduction de la dotation.

B.– LES MESURES PRISES EN FAVEUR DE LA PÊCHE ET DE L’AQUACULTURE

1.– Le bilan du plan pour une pêche durable et responsable (PPDR)

En réponse à la hausse brutale du prix du pétrole entamée en 2007 et aux mouvements des pêcheurs de l’automne 2007 poursuivis en 2008, un Plan pour une pêche durable et responsable (PPDR) a été annoncé le 16 janvier 2008. Ce plan comprenait quinze mesures regroupées en quatre chapitres :

– optimiser la ressource halieutique ;

– renforcer l’attractivité du secteur de la pêche ;

– favoriser un développement économique durable de la pêche française ;

– renforcer la sécurité des pêcheurs.

Si ce plan a été annoncé dans le contexte d’une hausse du prix du gazole, il allait au-delà de ce seul aspect économique et visait à apporter une réponse durable aux défis auxquels la pêche française est confrontée : le défi écologique (nécessité d’assurer une gestion durable de la ressource halieutique et de contribuer à la qualité des écosystèmes marins) ; défi social (le métier de pêcheur est de moins en moins attractif et reste très dangereux) ; défi économique (forte dépendance au cours du pétrole et mondialisation du marché des produits de la mer).

Plus de 300 millions d’euros, essentiellement des crédits nationaux, complétés de crédits communautaires, ont contribué au financement de ce plan dont 2010 aura été la troisième et dernière année.

Toutes les mesures du plan ont été engagées et ont bien progressé. Parmi ces mesures, on peut relever entre autres :

– la réforme de l’organisation professionnelle, notamment avec le vote de dispositions dans le cadre de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche ;

– l’apport d’un soutien financier exceptionnel à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER), pour renforcer son expertise halieutique et favoriser les partenariats scientifiques-pêcheurs, ainsi qu’à l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et au Muséum national d’histoire naturelle ;

– le développement de plusieurs actions pour améliorer l’efficience énergétique des navires et réduire leur consommation de carburant, notamment le lancement de deux appels à projets de recherche et développement ;

– la mise en œuvre de « contrats bleus » ;

– les plans de sortie de flotte et le Plan de sauvetage et de restructuration (PSR) : 70 navires ont été aidés dans le cadre de plans de restructuration (avec un total d’aides de 13 millions d’euros) ; ces plans se sont achevés à la fin de l’année 2010, conformément aux conditions posées par la Commission européenne dans sa validation du PSR ;

– le lancement de plusieurs travaux afin d’améliorer l’organisation du marché, la commercialisation et la valorisation des produits de la pêche ;

– la mise au point et l’expérimentation à grande échelle d’une balise individuelle pour le sauvetage des marins en mer.

2.– Les contrats bleus, mesure phare du PPDR

Démarche très innovante dans la filière pêche, les contrats bleus ont été mis en place dans le cadre du plan pour une pêche durable et responsable (PPDR) dès le printemps 2008. Ils ont été conçus et bâtis à partir d’une idée et avec la coopération très active des professionnels. Tout en étant mis en œuvre par les armateurs et leurs équipages, les contrats bleus sont portés par des structures collectives, qui sont chargées du montage des projets, du pilotage et du contrôle des mesures.

Les engagements pris par chaque armateur adhérant à un contrat bleu doivent se traduire par des pratiques de pêche plus contraignantes que ce qu’impose la réglementation (communautaire et nationale) et allant au-delà de ses pratiques antérieures. Les mesures pouvant s’inscrire dans les contrats bleus répondent à plusieurs enjeux : compléter et renforcer les partenariats entre les pêcheurs et les scientifiques, contribuer à la préservation de l’environnement marin, améliorer les pratiques en vue d’accroître la durabilité de la pêche, responsabiliser les professionnels en les formant.

Les mesures des contrats bleus ont été validées par la Commission européenne, à l’exception de deux mesures mises en œuvre tout au début des contrats bleus, en 2008. La Commission, plutôt circonspecte au départ, est maintenant convaincue de l’intérêt de la démarche des contrats bleus et de son caractère novateur. Le dispositif a été présenté aux autres États membres lors du comité du Fonds européen pour la pêche de novembre 2010.

Compte tenu du grand intérêt de la démarche pour la filière, le ministre de l’Agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire a décidé de reconduire les contrats bleus jusqu’en 2013.

Au 1er semestre 2010, les contrats bleus s’appuient sur les mesures validées précédemment et sont financés à partir des parts d’enveloppe non consommées en 2009. Pour le second semestre, un nouvel appel à projets a permis de recueillir les propositions des cinq structures collectives connues pour 838 navires. L’enveloppe globale est de 15,8 millions d’euros.

Pour les années 2011-2013, l’enveloppe annuelle est de 12,5 millions d’euros. Ce ne sont pas moins de 630 navires qui se sont portés candidats.

L’action de l’Office de développement de l’économie agricole des départements d’outre-mer

L’ODEADOM oriente ses crédits vers les opérateurs, les investissements et, dans une moindre mesure, la recherche et développement pour les secteurs « animaux », divers « végétaux », « banane » et « canne à sucre et rhum ». Ces aides sont ciblées vers les organisations de producteurs et vers l’investissement en vue de favoriser la diversification animale, végétale, le secteur de la banane et celui de la canne à sucre. L’Office finance principalement :

– des aides aux organisations de producteurs : 2,1 millions d’euros ;

– des investissements : 2 millions d’euros ;

– des aides à la recherche et au développement, à l’assistance technique, au logo des Régions ultrapériphériques (RUP), à l’élevage et à la qualité… : 2 millions d’euros.

3.– Le fonds interprofessionnel pour la filière pêche

À la suite d’une rencontre le 2 février 2011 avec les principaux représentants de la filière pêche, le ministre de l’Agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire a mis en place un groupe de travail national sur le maintien de la compétitivité des entreprises de pêche, dans un contexte de prix du gazole structurellement élevé. Onze réunions avec les représentants de la production (comité national, coopération maritime, armateurs hauturiers, organisations de producteurs) et de la distribution (mareyeurs, grande distribution) se sont tenues.

Le groupe de travail a approfondi la réflexion sur des mécanismes permettant aux entreprises de pêche d’améliorer leur compétitivité et d’obtenir une visibilité suffisante en stabilisant au mieux leurs coûts de production. Les possibilités de lissage des prix du carburant et de report des charges sur les prix de vente ont été étudiées. Des solutions existent (notamment dans le secteur des transports) mais demandent des délais importants pour être mises en œuvre. Elles ont donc été écartées temporairement.

Le groupe a poursuivi ses travaux vers la création d’un fonds permettant d’inciter les entreprises de pêche à réaliser des actions vertueuses mais peu mises en œuvre dans le contexte actuel (risque de perte de revenus sans soutien financier). Les actions ciblent : les économies d’énergie (optimisation des chaluts et des panneaux, utilisation d’économètre) ; la réduction des impacts sur le milieu marin (engins sélectifs, fermetures de zones décidées par les professionnels, diagnostics énergétique et environnemental) ; des campagnes au niveau de la filière des produits de la mer afin d’améliorer la valeur des produits débarqués (campagne de promotion, démarches collectives) ; la constitution d’une interprofession.

Un rapport a été remis au ministre par les représentants professionnels acteurs du groupe du travail, le 18 avril 2011. Ces représentants ont été reçus le 11 mai 2011 par le Président de la République. Ce même jour, onze enseignes de la grande distribution ont signé un engagement à verser à France Filière Pêche (FFP), dès 2012 et pour les cinq prochaines années, de 30 à 35 millions d’euros/an. Les enseignes se sont également engagées à verser une avance de 10 millions d’euros sur la contribution de 2012 avant la fin de l’année 2011.

Un premier panel d’actions a été élaboré au cours des travaux du groupe, celles-ci pourraient donc être mises en œuvre rapidement. Pour ce faire, une révision des statuts de FFP et la refonte de sa gouvernance permettant d’assurer les nouvelles missions en termes d’économie d’énergie et de pêche durable a été adoptée le 9 septembre, l’objectif est que FFP soit opérationnel dès l’automne.

C.– L’INDISPENSABLE SOUTIEN À L’EXPORT

Alors que la tendance générale est à favoriser l’agriculture de proximité, le Rapporteur spécial, sans mettre en cause les mérites de cette approche, tient à souligner que la France doit être plus ambitieuse pour son agriculture, qui peut représenter un véritable atout pour doper ses exportations.

1.– Une perte inquiétante de parts de marché à l’exportation

En 2010, l'excédent commercial agroalimentaire a augmenté de 2 milliards d’euros par rapport à 2009. Cet excédent 2010 s'élève à 8,2 milliards et révèle un retour à la normale de nos échanges commerciaux, sans toutefois retrouver les niveaux atteints en 2007-2008 lors de la précédente flambée des prix du secteur agricole. Cette hausse des exportations agroalimentaires contribue toujours à réduire sensiblement le déficit de la balance commerciale française. Après la récession de 2009, la France a bénéficié à la fois de la reprise économique chez la plupart de ses partenaires, plus marquée dans les pays tiers, de la hausse des prix et des faibles disponibilités en produits agricoles à la suite d’aléas climatiques nombreux.

Si nos principaux débouchés restent dans l’Union européenne, ce sont les pays tiers qui tirent la progression. Leur poids dans notre excédent dépasse 40 % en 2010 contre 20 % en moyenne de 2005 à 2009. Sur l’Union européenne, l’excédent dépasse 3,9 milliards d’euros. Avec les pays tiers, l’excédent atteint près de 4,3 milliards d’euros. Il s'explique par des ventes record de blé tendre, de vins et alcools, ainsi qu’à un moindre niveau de produits laitiers et produits alimentaires divers, respectivement + 55 %, + 31 %, + 28 %, et + 18 %.

Le premier semestre 2011 enregistre un excédent de 5,3 milliards d’euros, en hausse de 72 % par rapport aux six premiers mois de 2010, grâce principalement à l’excédent en céréales (+ 60 %), principalement de fortes exportations de blé tendre vers les pays tiers, boissons (+ 14 %) et à un moindre niveau, en produits laitiers (+ 10 %). Parallèlement, les secteurs déficitaires pris dans leur ensemble aggravent peu leur déficit (+ 1 %).

Jusqu'en 2004, la France était le deuxième (ex-æquo avec les Pays Bas) exportateur mondial de produits alimentaires transformés. Aujourd'hui, elle se situe à la quatrième place pour les exportations agroalimentaires (produits bruts et transformés) derrière les États-Unis, l’Allemagne, et les Pays-Bas. En 2010, la France a continué de perdre des parts de marché par rapport à l'Allemagne, pourtant soumis d'une part à des conditions de concurrence globalement identiques, y compris en matière de taux de change, et d'autre part ne bénéficiant pas des avantages comparatifs liés à notre diversité géographique (climat, ensoleillement, température...) et à la diversité de nos ressources naturelles. Face à cette perte de compétitivité internationale, il est impératif de réagir vigoureusement en valorisant nos avantages qui se concrétisent par des potentiels de production agricoles supérieurs en France par rapport à l’Allemagne et aux Pays-Bas.

Le soutien de l’État à la promotion agroalimentaire à l’export est donc un instrument de politique essentiel à côté des mesures structurelles en faveur de la compétitivité des entreprises. Les crédits publics d'appui à la promotion constituent un outil privilégié de pilotage et d’orientation de l'offre française sur les marchés internationaux dans cet environnement de plus en plus concurrentiel. Ils permettent de valoriser le modèle alimentaire français basé sur la qualité, la diversité et la sécurité sanitaire et d’ouvrir et de sécuriser ses débouchés.

Cette politique d’aide s’inscrit dans le respect des lignes directrices agricoles de l’Union européenne relatives aux aides d'État et dans le cadre général de l'OMC, la promotion étant non assujettie aux disciplines de réduction, ce qui explique que cet instrument de politique agricole soit largement utilisé par les autres grands exportateurs agroalimentaires. Pour faire face à une compétition mondiale toujours plus vive et défendre les parts de marchés de la France, il est légitime et opportun que les crédits de l’état soient significativement mobilisés sur la promotion et l’appui à l’exportation.

2.– Le dispositif public de promotion agroalimentaire

Le dispositif général de promotion agroalimentaire s'inscrit dans un cadre stratégique, le plan d’orientation export agroalimentaire (POEAA), révisé en 2010 et effectif depuis janvier 2011. Pour mieux utiliser les moyens publics consacrés à la promotion export, ce plan propose des priorités géographiques et sectorielles avec des couples « pays x produits », sur lesquels sont concentrés les crédits publics d'appui à la promotion.

Le Rapporteur spécial approuve pleinement la définition de priorités. Il regrette cependant que la définition de ces pays cibles serve parfois de simple moyen d’ajustement pour des crédits budgétaires insuffisants.

Au sein des services économiques des ambassades, les conseillers et attachés pour les affaires agricoles et leurs adjoints œuvrent à la promotion de l’agriculture française dans quatorze pays. Les agents en charge du secteur agricole dans les services économiques des autres pays font de même, ainsi que neuf autres conseillers issus du ministère de l’Agriculture dans les représentations permanentes auprès de la Commission Européenne, de la FAO, de l’OMC et de l'OCDE.

Le niveau régalien est complété par un dispositif public de promotion à l'export agroalimentaire coordonné par le ministère de l’Agriculture (y compris FranceAgriMer) et le ministère des Finances, au sein du Comité technique export pour le développement des ventes de produits et techniques agricoles et agroalimentaires. Le comité réunit ces organismes et les trois partenaires techniques, Adepta, Sopexa et Ubifrance, ainsi que les chambres de commerce et d’industrie. Il coordonne l'ensemble des actions réalisées pour un soutien global de l'État avoisinant 49 millions d’euros par an au total dont près de 29 millions d’euros pour le ministère de l’Agriculture, y compris les crédits mobilisés via FranceAgriMer.

Les crédits d’appui et de promotion export financés sur le budget de FranceAgriMer se sont élevés à 12,4 millions d’euros en 2010. Cela correspond à la part de financement public national des actions de promotion et n'inclut donc pas les cofinancements provenant des partenaires professionnels ni de la Commission européenne.

Le soutien de l'État à la promotion des exportations agroalimentaires passe également par les crédits que le ministère des Finances verse à Ubifrance et à l'agence française pour le développement international des entreprises, en complément des ressources propres dégagées par cet établissement public auprès de ses clients. La part de ces crédits bénéficiant à la filière agroalimentaire est évaluée par Ubifrance à 20 millions d’euros en 2010, dont 4,1 millions d’euros destinés aux soutiens directs accordés aux entreprises.

La Commission européenne finance également des programmes communautaires de promotion transversale à hauteur de 50 millions d’euros par an pour l’ensemble des pays de l’Union Européenne. En 2011, la France a bénéficié d’un apport d’environ 10 millions d’euros. Ces soutiens financiers importants en provenance de l’Union européenne sont conditionnés à des cofinancements provenant des organisations professionnelles bénéficiaires. Des crédits promotion dédiés à la filière vin sont également prévus dans l’organisation commune de marché des vins pour la campagne 2009-2013.

3.– Des performances non négligeables

En 2010, le soutien national à la promotion des exportations agroalimentaires aura permis de financer ou de cofinancer des actions de promotion et plus la participation de milliers d'entreprises à ces actions. Ces fonds publics ont permis de :

– mener une centaine d'opérations visant à améliorer l'information et la connaissance des marchés, dont une quinzaine de veilles périodiques multi pays, 20 stands images France, ateliers d’information, 40 guides-répertoires et des interventions d'experts auprès des professionnels (souvent en région), etc.,

– conduire plus de 370 actions de mise en relation des entreprises françaises avec les acteurs économiques étrangers (contre 308 en 2009), dont notamment :

– 115 pavillons France sur des salons internationaux (126 en 2009) ;

– « 24H Expos » dans 39 villes ;

– 40 rencontres d'acheteurs en France ;

– conduire une centaine d'actions collectives de promotion des produits français en direction des décideurs, prescripteurs ou consommateurs comme les apéritifs à la française, les semaines françaises en grande distribution, les campagnes presse… Elles étaient seulement 87 en 2009.

III.– UN MINISTÈRE DE PLUS EN PLUS PERFORMANT

Comme l’a souligné devant le Rapporteur spécial le secrétaire général du ministère de l’Agriculture, la révision générale des politiques publiques oblige à élaborer des solutions innovantes, qui dessinent les contours du ministère de demain.

A.– UNE VISION DE LONG TERME SUR LA QUALITÉ DE LA GESTION ADMINISTRATIVE

La révision générale des politiques publiques a conduit à une restructuration ministérielle, qui a rapproché les métiers, en pariant sur une efficience accrue grâce à une refonte du système de rémunération.

1.– La gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC)

Depuis 2009, le ministère de l’Agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire a développé une gestion prévisionnelle de ses ressources humaines. Dans ce domaine comme dans d’autres, le ministère a été un ministère pilote. La direction générale de la modernisation de l'État a coordonné l’expérience au niveau interministériel, en mettant d’abord en place des plateformes régionales de gestion des ressources humaines.

Au cours de l’année 2011, l’opération Emplois métiers horizon 2012 (EMH 2012) s’est ensuite donné pour objectif de répondre aux besoins spécifiques du ministère de l’Agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire. Elle a pour fin de permettre aux agents d’adapter en permanence leurs compétences aux missions des services. Cela suppose un suivi régulier des compétences détenues par les agents en poste dans les différentes structures.

Dans chaque région, des enquêtes ont été conduites au plus près du terrain. Elles ont permis de connaître plus précisément les métiers exercés par les agents au sein de la communauté de travail formée par les personnels de chaque direction départementale interministérielle et de chaque direction régionale de l’Alimentation, de l’agriculture et des forêts. Sur cette base, le ministère a pu développer son dispositif propre.

Le projet EMH 2012 s'appuie sur la structure du répertoire ministériel des métiers (RMM), dont les filières d’emplois et les emplois types sont eux-mêmes arrimés au nouveau répertoire interministériel des métiers de l’État (RIME). Le recueil des informations concernant le positionnement de chaque agent dans une « famille de métiers du répertoire des métiers du ministère » a permis de recueillir une « photographie » de la communauté de travail du ministère au 1er janvier 2011 et d’apporter une connaissance approfondie des métiers exercés en son sein.

Ces données servent de point de départ pour réaliser des projections de population pour 2012 et 2013. Ce point constitue pour le projet une nouvelle étape importante, qui a été annoncée dès le début de l’année 2011. Elle permettra de constituer le socle des travaux de modélisation offrant le moyen de réaliser les projections de l’évolution des populations à court et moyen terme.

Dans cette nouvelle phase, le projet EMH 2012 a pour vocation de fournir aux responsables des ressources humaines du ministère les informations utiles pour anticiper les besoins et les évolutions à venir des communautés de travail. L’outil a pour vocation d’être mis à disposition de chaque direction régionale de l’Alimentation, de l’agriculture et des forêts. Il leur permettra un ajustement des données au niveau local avec des informations individuelles et statistiques recueillies au plus près du terrain et en étroite concertation avec les directions départementales interministérielles.

2.– La modulation des rémunérations

Toute peine mérite salaire. Cet adage simple paraît avoir inspiré la mise en place d’une modulation des rémunérations au sein du personnel du ministère de l’Agriculture.

a) La prime de fonctions et de résultats (PFR)

La prime de fonctions et de résultats (PFR) a été mise en place au niveau interministériel par un décret daté du 22 décembre 2008.

Cette prime a vocation à se substituer aux régimes indemnitaires précédents. Le ministère chargé de l’agriculture a mis en œuvre la PFR dès l’année 2009 dans la filière administrative, pour le corps des attachés et les statuts d’emploi de chef de mission et de secrétaire général des établissements d’enseignement supérieur. En 2010, la PFR a été étendue aux statuts d’emploi en administration centrale, aux administrateurs civils et aux secrétaires administratifs. Ce sont donc 2 500 agents supplémentaires qui ont bénéficié du versement de la PFR en 2010. Les fondements de la PFR sont identiques pour l’ensemble de la fonction publique de l’État. Elle est constituée, pour mémoire, par l’addition :

– d'une première part, liée aux fonctions exercées par l'agent, appelée à rester stable pendant toute la durée d'occupation d'un poste ;

– d’une seconde part, liée aux résultats individuels de l’agent, appelée à évoluer chaque année en fonction de l’évaluation de la performance de l’agent, au regard des objectifs qui lui ont été fixés préalablement lors de l’entretien d’évaluation.

En se substituant à l’ensemble des régimes indemnitaires existants pour les corps concernés au ministère de l’Agriculture, elle permet d’établir un régime unique pour ces agents, quel que soit leur secteur d’affectation et constitue ainsi l’outil d’harmonisation des régimes indemnitaires entre les différents secteurs. Au-delà de cette simplification, elle permet un parcours de carrière et de vraies mobilités intersectorielles, puisque toutes les fonctions se retrouvent affectées d’un coefficient correspondant à la première part de la PFR.

b) L'indemnité de performance et de fonction (IPF)

Par décret n° 2009-1106 du 10 septembre 2009, le corps des ingénieurs des ponts et chaussées (IPC) et le corps des ingénieurs du génie rural, des eaux et des forêts (IGREF) ont été fusionnés, formant ainsi le corps des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts (IPEF) relevant conjointement du ministère chargé du développement durable et du ministère chargé de l'agriculture.

 Un régime indemnitaire spécifique pour ce corps est mis en place par le décret n° 2010-1705 du 30 décembre 2010 relatif à l'indemnité de performance et de fonctions allouée aux ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts. En effet, les principales primes allouées, jusqu'ici, aux IPC et aux IGREF reposent sur des textes qui combinent l'appartenance à un corps et à un secteur d'affectation. Or, les IPEF ex-IPC et les IPEF ex-IGREF peuvent travailler dans les mêmes services, notamment les directions départementales des territoires, structures pour lesquelles l'harmonisation des régimes indemnitaires devient prioritaire.

L'indemnité de performance et de fonctions (IPF) répond aussi à un objectif de simplification et de clarification des primes servies aux agents. En se substituant aux diverses primes existantes et en distinguant une part liée aux fonctions exercées et une part liée à la performance, elle contribue à donner du sens et de la lisibilité au régime indemnitaire. Il s'agit d'un outil simple et pragmatique mis à disposition des responsables pour faciliter l'exercice de leurs responsabilités managériales.

Au 1er janvier 2015 au plus tard, l'ensemble des agents du corps des IPEF aura intégré ce nouveau régime indemnitaire.

3.– La fusion des corps de fonctionnaires

La diversité des missions assurées par le ministère de l’Agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de la pêche (MAAPRAT) s'est traduite logiquement par l'existence de multiples statuts particuliers, couvrant les nombreuses filières d'emploi (administrative, ouvrière, technique, enseignement technique, enseignement supérieur), auxquels il faut ajouter ceux des établissements publics sous tutelle disposant de corps propres de fonctionnaires : Office national des forêts ; établissement public national des produits de l’agriculture et de la mer ; Institut français du cheval et de l’équitation ; Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

Le ministère a engagé depuis longtemps une politique de fusion de corps par niveau et par filière. Dans ce cadre, ont été fusionnés les quatre corps de techniciens en 1996, les corps d'ingénieur du génie rural, des eaux et des forêts (IGREF) et des ingénieurs d'agronomie en 2002 et les trois corps d'ingénieurs des travaux en 2006.

Par ailleurs, conformément aux orientations définies dans la stratégie ministérielle de réforme en 2003, a été réalisée en 2006 la fusion des corps administratifs de même niveau, répartis sur les trois secteurs du ministère : enseignement, services déconcentrés et administration centrale. Étaient concernés les trois corps d'agents administratifs, les trois corps d'adjoints administratifs, les trois corps de secrétaires administratifs, et les trois corps d'attachés.

Les accords du 25 janvier 2006 ont ensuite introduit une nouvelle logique de fusion par filière pour la catégorie C, qui s’est traduite par le regroupement des corps d'agents et des corps d'adjoints pour constituer, dans chaque filière, un corps unique de catégorie C à quatre grades.

Plus récemment, dans le cadre des décisions prises par le Conseil de modernisation des politiques publiques, le corps des IGREF a été fusionné en 2009 avec le corps des ingénieurs des ponts et chaussées (IPC), pour créer le nouveau corps à gestion interministérielle des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts.

Enfin, dans le cadre des nouvelles orientations fixées en la matière par la direction générale de l’administration et de la fonction publique en 2009, confirmées par le conseil de modernisation des politiques publiques du 30 juin 2010, le ministère de l’agriculture poursuit son effort de rationalisation et de simplification de l’architecture statutaire :

– un décret opérant la fusion des corps des attachés, secrétaires administratifs et adjoints administratifs des établissements publics FranceAgriMer et Agence de services et de paiement avec les corps homologues du MAAPRAT a été publié ;

– à l’occasion de la mise en place du nouvel espace statutaire de la catégorie B, le corps des techniciens supérieurs des services et celui des contrôleurs sanitaires ont été fusionnés en 2011 et, dans le secteur de l’enseignement, les travaux sont en cours concernant la fusion des trois corps de technicien de l’enseignement agricole, de technicien de laboratoire et de technicien de formation et de recherche (cette dernière étant complétée par la fusion des corps de catégorie C d’adjoint technique de laboratoire et d’adjoint technique de formation recherche) ;

– une réflexion interministérielle est engagée concernant la fusion des ingénieurs de l’agriculture et de l’environnement avec les corps homologues du ministère chargé de l’écologie et du développement durable, et en particulier celui des ingénieurs des travaux publics de l’État.

Au final, le nombre de corps gérés par le ministère, qui est passé de 71 en 1990 à 30 en 2009, pourrait s’établir à 26 à la fin de 2011, une fois intervenues les fusions engagées ou envisagées.

B.– UN EFFORT CONSTANT DE MISE À NIVEAU PAR LA FORMATION CONTINUE

Jamais la formation continue n’a été touchée par les nombreuses coupes qui ont affecté le budget du ministère. À l’heure où il connaît des réformes profondes, le personnel doit en effet s’adapter et l’administration doit lui fournir les moyens pour cela.

1.– Le rôle de l’Institut national de formation des personnels du ministère de l’agriculture (INFOMA)

L'Institut national de la formation des personnels du ministère de l'agriculture (INFOMA) est chargé de la formation initiale en deux ans des agents des corps de techniciens supérieurs des services du MAAPRAT dans les trois spécialités suivantes : forêt, agriculture et vétérinaire. L’année 2011 est la dernière année où un recrutement pour une scolarité en deux ans a lieu.

L’INFOMA a vocation à assurer, par ailleurs, la formation d'adaptation à l'emploi des contrôleurs sanitaires des services vétérinaires dans le respect du règlement (CE) n° 854/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, ainsi qu'une grande variété d'actions de formation continue à destination des agents du ministère, tous corps confondus, notamment dans les domaines de la PAC (équipement informatique des salles de l'INFOMA sur le site de Nancy) et du contrôle sanitaire (présence des abattoirs à Corbas).

Le décret n° 2011-489 du 4 mai 2011 portant statut particulier du corps des techniciens supérieurs du ministère chargé de l'agriculture modifie de façon importante les modalités de recrutement et de formation dans ce corps par rapport aux deux corps précédents qui étaient ceux des techniciens supérieurs des services et des contrôleurs sanitaires. Dès l’année 2012 des agents seront recrutés au premier grade de ce nouveau corps, celui des techniciens et dans au moins deux des trois spécialités qui sont :

– Vétérinaire et alimentaire ;

– Techniques et économie agricoles ;

– Forêts et territoires ruraux.

Les agents recrutés dans ce grade de technicien se verront proposer une formation individualisée incluant des périodes de scolarité à l'INFOMA ainsi que des formations à distance.

L’INFOMA établit et tient à jour des référentiels de formation qui comportent un descriptif synthétique des activités des personnels concernés. Ces informations sont recueillies auprès de l’Observatoire des missions et des métiers, des directions d’administration centrale du ministère, de l’encadrement et des personnels des services concernés.

Selon le tableau de financement transmis, la situation financière de l’INFOMA est saine au regard de la capacité d’autofinancement générée et du montant du fonds de roulement qui est de 172 000 €.

2.– La certification ISO 9001 de la formation continue

Pour parachever la démarche ministérielle, la gestion de la formation continue se soumet elle-même aux règles de qualité à l’application desquelles elle prépare.

Le dispositif d’évaluation de la performance mis en place pour INFOMA porte essentiellement sur des objectifs d'efficience. Ces objectifs sont cohérents d'une part avec les objectifs fixés à l'INFOMA et d'autre part avec ceux du programme. En effet, il s'agit d'une part d'optimiser les moyens de fonctionnement de l'institut et, d'autre part, d'optimiser la formation initiale et la formation continue dont cet opérateur a la charge pour le compte du ministère.

SUIVI DE LA PERFORMANCE DE L’INFOMA

OBJECTIFS

Indicateurs du programme 215

Indicateurs de l'opérateur

Développer une politique informatique optimisant les relations avec l'usager

Taux de pénétration des télé procédures

Coût de la connexion à la base de données GALATEE

Optimiser la gestion RH et accompagner les agents dans l’évolution de leurs missions

Gérant/géré

Coût de la journée stagiaire

Coût de formation par élève

ÊTRE une administration exemplaire

Dépense de fonctionnement Dépense énergétique

Dépense papier

Coût par agent

Source : réponses au questionnaire

Les indicateurs ainsi mobilisés (coût par agent, coût de la journée stagiaire et coût élève) s'inscrivent dans une démarche qualité plus générale mise en place dans le cadre de la norme ISO 9001. Cette norme internationale de qualité dans la gestion administrative repose sur un principe simple : toute l’activité est régie par des règles écrites connues de tous ; symétriquement, l’activité quotidienne des services est systématiquement documentée par écrit.

IV.– LA POLITIQUE FORESTIÈRE À LA CROISÉE DES CHEMINS

Les crédits du programme n° 149 Forêt visent d’une part à produire plus et mieux valoriser la ressource bois, d’autre part à gérer durablement les forêts et mieux préserver la biodiversité, et adapter les forêts françaises en anticipant le changement climatique.

En 2012, ce programme doté de 354 millions d’euros en autorisations d’engagement et 362,5 millions d’euros en crédits de paiement comprend un important volume de crédits destinés à la reconstitution des forêts touchées par la tempête Klaus du 24 janvier 2009. L’État réaffirme également son soutien à l’Office national des forêts (ONF) par le versement d’un complément de subvention.

Les crédits demandés pour 2012 au titre du programme n° 149 sont en baisse de 2 % (6 millions d’euros) en autorisations d'engagement et de 2 % (9 millions d’euros) en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2011. Cette diminution résulte d’une part du transfert de la subvention pour charge de service public de l’Inventaire forestier national (IFN) vers le programme n° 159 dans le cadre de la fusion de l’établissement avec l’Institut national géographique (IGN) et d’autre part, de l’application de la norme transversale de diminution des dépenses d’intervention retenue par le Gouvernement sur le triennal 2011-2013.

L’ONF, principal opérateur du programme, retrouve des perspectives avec la signature d’un contrat d’objectifs 2012-2016. Pour la première fois, l’État n’est pas le seul cocontractant. Les communes forestières y sont également parties prenantes.

A.– LA POURSUITE DES MESURES D’ÉCONOMIE EN 2011

1.– Un cadre financier très resserré

Le budget de 2011 a été construit à l'équilibre, soit 782 millions d’euros en dépenses et en recettes, avec comme priorité d'accompagner la sortie de la crise. Cet équilibre n'a pu être atteint sans des mesures d'économies mises en œuvre dès 2010, mais aussi grâce au maintien de l'effort de l'État qui alloue à l'Office une subvention exceptionnelle de 26 millions d’euros, au-delà du versement compensateur (120,4 millions d’euros hors taxes) et de la contribution au financement des pensions civiles (23,7 millions d’euros hors taxes).

Les frais de garderie (22,5 millions d’euros) sont en hausse par rapport à 2010. Leur évolution est corrélée avec celle des ventes de bois des collectivités de l'année précédente qui a été stimulée par l'amélioration du marché de bois et par la décision d'augmenter le volume de bois mobilisé dans ces forêts.

Ce budget a été élaboré dans une perspective de reprise du marché du bois, se traduisant par la prévision d'une progression du chiffre d'affaires bois, soit une augmentation de 26 millions d’euros par rapport au budget de programme 2010.

S'agissant plus particulièrement des dépenses de personnel, 482,7 millions d’euros inscrites au budget 2011, elles se décomposent en :

– 358,9 millions d’euros au titre des personnels fonctionnaires et assimilés ;

– 115,2 millions d’euros au titre des ouvriers forestiers et emplois tuilés ;

– 8,6 millions d’euros pour les autres catégories de personnel.

En ce qui concerne les fonctionnaires, il convient de noter que l'ONF est confronté à la hausse importante des cotisations dues au titre des pensions civiles. Entre 2006 et 2011, l'Office a ainsi dû faire face à un doublement de la charge des pensions civiles qui sont passées de 48,3 millions d’euros en 2006 à 97,5 millions d’euros en 2011.

Le tableau de financement 2011 retrace les opérations d'emplois et de ressources en capital à hauteur de 81,8 millions d’euros. Les investissements se décomposent en :

– investissements en forêts (39,6 millions d’euros) ;

– investissements physiques sur les biens de l'ONF (38,6 millions d’euros) ;

– investissements financiers (3,6 millions d’euros).

Cette répartition pourra être revue afin d'augmenter la part des investissements en forêt et ainsi accompagner l'effort de desserte des massifs à exploiter, et accélérer le renouvellement des peuplements.

La capacité d'autofinancement est prévue à hauteur de 25,6 millions d’euros. Compte tenu des cessions d'actifs envisagées (8 millions d’euros), des remboursements de prêts (2,3 millions d’euros), des subventions d'investissement (4,6 millions d’euros) et de l'utilisation de prêts (41 millions d’euros), l'équilibre du tableau de financement serait atteint sans prélèvement ni apport sur le fonds de roulement.

BUDGET PRÉVISIONNEL 2011 DE L’OPÉRATEUR

(en milliers d’euros)

Compte de résultat

     

Charges

Compte financier
2010 (1)

Budget prévisionnel 2011

Produits

Compte financier
2010 (1)

Budget prévisionnel 2011

Personnel

467 173

482 700

Ressources de l’État

185 363

205 404

Fonctionnement

265 156

299 330

– subventions de l’État

168 952

182 904

Intervention

   

– ressources fiscales

16 411

22 500

     

Autres subventions

35 650

39 100

     

Ressources propres et autres

496 656

537 526

Total des charges

732 329

782 030

Total des produits

717 669

782 030

Résultat : bénéfice

   

Résultat : perte

14 660

 

Total : équilibre du CR

732 329

782 030

Total : équilibre du CR

732 329

782 030

(1) voté

TABLEAU DE FINANCEMENT ABRÉGÉ

(en milliers d’euros)

Emplois

Compte financier
2010 (1)

Budget prévisionnel 2011

Ressources

Compte financier
2010 (1)

Budget prévisionnel 2011

Insuffisance d'autofinancement

0

 

Capacité d'autofinancement

13 684

25 590

Investissements

95 688

81 790

Ressources de l'État

   
     

Autres subv. d'investissement et dotations

5 285

4 900

     

Autres ressources

38 285

51 300

Total des emplois

95 688

81 790

Total des ressources

57 254

81 790

Apport au fonds de roulement

   

Prélèvement sur le fonds de roulement

38 434

 

2.– Un plan de proximité pour renforcer la prévention des risques psychosociaux

Le directeur général de l'Office national des forêts (ONF), M. Pascal Viné, a fait part au Rapporteur spécial de la profonde tristesse de l'ensemble des personnels de l'ONF à la suite du suicide de six de leurs collègues depuis le début de l’année.

Les agents de l’ONF sont souvent amenés à passer plusieurs jours d’affilée seuls dans la forêt. Cette spécificité du métier forestier aggrave les risques psycho-sociaux au sein de l’Office. Le directeur général a pris la mesure de la situation, en réunissant en juillet 2011 le comité central d'hygiène et de sécurité de l’établissement.

Cette réunion comportait dans son ordre du jour des points relatifs à la prévention des risques psychosociaux, compte tenu de l'importance de cet enjeu au sein de l'établissement. Le plan de prévention des risques psycho-sociaux, présenté le 11 janvier 2011, a été  complété, à la suite des travaux conduits au cours de ces derniers mois, par un dispositif de proximité reposant notamment sur :

– le doublement du réseau des assistantes sociales ;

– le renforcement des cellules sociales territoriales associant la direction territoriale des ressources humaines, les assistantes de service social, le médecin de prévention et des représentants des personnels du Comité d'hygiène et de sécurité territorial.

Ce dispositif de proximité vise à mieux détecter les difficultés et accompagner les personnels de terrain de l'ONF.

Par ailleurs, un audit socio-organisationnel a été élaboré conjointement avec les organisations syndicales afin d'évaluer les conditions de travail et le fonctionnement de l'organisation de l'Office. L'appel d'offres relatif à l'audit sera lancé fin juillet. Les recommandations qui en découleront permettront de disposer des éléments nécessaires pour identifier les causes du malaise social au sein de l'ONF.

L'ensemble de ces actions liées aux risques psychosociaux a été intégré dans le cadre du projet de contrat d'objectifs État-ONF 2012-2016.

B.– LES PERSPECTIVES NOUVELLES DE L’ONF

1.– Le contrat d’objectifs 2012-2016

L'ONF est placé sous la tutelle des ministres chargés de la forêt et de l'environnement. L’État et l’ONF ont signé un premier contrat d'objectifs pour la période 2001-2006 reposant sur des engagements réciproques.

Le contrat pour 2007-2011, signé le 24 juin 2006, a confirmé les grands axes des missions de l’ONF et les engagements de l’État permettant de conforter la gestion durable des forêts publiques.

À partir de 2012, un nouveau contrat d'objectifs et de performance sera mis en œuvre entre l'ONF, l'État, et la fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR). Ce contrat, approuvé par le conseil d'administration du 20 juillet 2011, couvrira la période 2012-2016. Il confirmera les trois grandes missions confiées à l'office, que ce soit en métropole ou dans les départements d'outre-mer, à savoir :

– la gestion durable et multifonctionnelle des forêts domaniales et communales ;

– la mise en œuvre de missions d'intérêt général confiées à l'État ou les collectivités à l'ONF ;

– la réalisation de prestations de services, en cohérence avec les compétences et les savoir-faire développés au sein de l'ONF.

L’ONF, en sa qualité d’établissement public industriel et commercial, poursuivra sa recherche de gains de productivité en optimisant ses recettes et en maîtrisant ses charges. Le suivi d'exécution du contrat sera assuré par un ensemble d'indicateurs.

2.– Le renforcement de la contribution de l’État

Dans le cadre de la préparation du nouveau contrat d'objectifs 2012-2016, l'État s'est mobilisé pour faire face aux difficultés financières de l’Office national des forêts. Ainsi, le Gouvernement a prévu de maintenir le montant du versement compensateur à 120,4 millions d’euros hors taxes, soit le même niveau que lors du précédent contrat. Par ailleurs, l'État s'est engagé à attribuer une dotation complémentaire de 46 millions d’euros à l'office, et à financer à coûts complets l'ensemble des missions d’intérêt général. Au total le montant de l'effort de l'État en 2012, hors missions d’intérêt général, est de plus de 166 millions d’euros.

CONTRIBUTIONS DE L’ÉTAT EN 2011-2012

 

 

2011(1)

2012 (2)

Écart
2012/2011

Mission/Programme

Action (nomenclature 2012)

Intitulé subvention

CP en €

CP en €

(données PAP)

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

153 538 378

186 492 741

32 954 363

149-Forêts

PGM 149

153 317 378

186 272 741

32 955 363

Action n° 12 : Développement économique de la filière et gestion durable

Arboretum des Barres (AE = CP)

275 341

275 341

0

Gestion des vergers à graines de l'ÉTAT

162 037

162 000

– 37

Action n° 11 : Gestion des forêts publiques et protection de la forêt

Versement compensateur (AE = CP)

120 400 000

120 400 000

0

Participation de l'État au financement de l'augmentation du taux de cotisation des pensions civiles des personnels fonctionnaires de l'ONF

18 700 000

0

– 18 700 000

Contribution d'équilibre (hors 26 m€ inscrits LFR 2010 & BP 2011) (AE = CP)

5 000 000

46 000 000

41 000 000

Missions d'Intérêt Général (MIG) : DFCI, RTM, Dunes, DAF-DOM (1)

8 580 000

19 235 400

10 655 400

 

RENECOFOR (réseau national de suivi à long terme des écosystèmes forestiers)

200 000

200 000

0

206-Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation

PGM 206

221 000

220 000

– 1 000

Action n° 01 : Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale

Santé des forêts (AE = CP)

221 000

220 000

– 1 000

Écologie, développement et aménagement durables

3 622 500

9 712 500

6 090 000

113-Urbanisme, paysages, eau et biodiversité

PGM 113

2 272 500

4 362 500

2 090 000

Action n° 07 : Gestion des milieux et biodiversité

AE = CP

Missions d'Intérêt Général (MIG) DOM

822 500

522 500

– 300 000

Observatoire minier en Guyane (1)

120 000

120 000

0

Bande littorale (1)

60 000

60 000

0

Gestion de 5 réserves naturelles nationales DOM (1) (2)

260 000

342 500

82 500

Zone des "50 pas géométriques" affectée au CELRL

382 500

0

– 382 500

Gestion des domaines présidentiels de Marly et Rambouillet

950 000

900 000

– 50 000

Missions d'Intérêt Général (MIG) Biodiversité

500 000

2 940 000

2 440 000

Extension et gestion du réseau des réserves biologiques

300 000

2 230 000

1 930 000

Plans nationaux d'actions (PNA)

 

360 000

360 000

Actions biodiversité littoral

 

150 000

150 000

RENECOFOR

200 000

200 000

0

181-Prévention des risques

PGM 181

1 350 000

5 350 000

4 000 000

Action n° 10 : Prévention des risques naturels et hydrauliques

Connaissance et surveillance sur les risques naturels : base de données "risques en montagne"

1 350 000

1 350 000

0

MIG Prévention des risques naturels

0

4 000 000

4 000 000

TOTAL

157 160 878

196 205 241

39 044 363

(1) (source : PAP du LFI 2011 + CA ONF) (2) (source : PAP du PLF 2012)

En parallèle, il est prévu que les frais de garderie versés par les communes forestières comprennent, à compter de 2012, un versement fixe par hectare en plus du pourcentage de l’ensemble des produits forestiers (bois, chasse, concessions…) de l’année n-1. Cet effort financier des communes forestières est mis en regard de celui de l'État. Il s'accompagnera de l'engagement souscrit par la fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR) dans le contrat d'objectifs, d'augmenter significativement la collecte de bois dans les forêts communales.

Tel est l’objet de l’article 48 rattaché à la présente mission.

*

* *

Le présent rapport spécial porte sur les crédits de la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales (à l’exclusion du programme n° 206 Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation (1)), ainsi que sur les crédits du compte d’affectation spéciale Développement agricole et rural, qui constitue, pour des raisons tenant à la loi organique relative aux lois de finances, une mission séparée.

COMPTE RENDU DE LA COMMISSION ÉLARGIE
DU 25 OCTOBRE À 9 HEURES

(Application de l’article 120, alinéa 2, du Règlement)

M. le président Jérôme Cahuzac. Monsieur le ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche , de la ruralité et de l’aménagement du territoire, je suis heureux, avec M. Serge Poignant, président de la Commission des affaires économiques, de vous accueillir. Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » pour 2012.

Comme vous le savez, la procédure de la commission élargie est destinée à permettre de privilégier les échanges entre les ministres et les députés et, pour cela, de donner toute la place, non pas aux exposés mais aux questions et, naturellement, aux réponses que vous y apporterez.

Cette année, les débats seront chronométrés afin de respecter la durée préalablement arrêtée par la conférence des présidents. Pour la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », le temps de parole total a été fixé à trois heures trente. Je rappelle à nos collègues que le temps de parole des rapporteurs a également été limité à cinq minutes pour poser leurs questions, et celui des autres députés à deux minutes. Les auteurs de questions disposeront le cas échéant d'un droit de suite en cas de réponse incomplète.

M. le président Serge Poignant. Le caractère stratégique et géopolitique de l’agriculture s’est imposé cette année au cœur du paysage européen et mondial. Comme les autres, monsieur le ministre, votre ministère est soumis à l’obligation de réduction de la dépense publique. De quelles marges de manœuvre disposez-vous pour accompagner les mutations qui s’imposent ?

M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial pour les politiques de l’agriculture et le développement agricole et rural. Avec 3,1 milliards d’euros, le budget de la mission « Agriculture » pour 2012 est, comme le montre le rapport spécial, d’une très grande stabilité. Du fait de l'inflation, cependant, cette stabilité équivaut à une baisse. Les efforts réalisés ces dernières années font néanmoins du ministère de l’agriculture un modèle en matière de respect de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et de réorganisation.

Je poserai six questions précises.

Tout d’abord, depuis le dépôt du présent projet de loi de finances, il a été décidé de réaliser 1 milliard d’euros d’économies supplémentaires. La part du ministère de l’agriculture dans ces économies sera de 26 millions d’euros au total, dont 22 millions d’euros pour la mission « Agriculture » – la politique des territoires et l’enseignement scolaire y contribuant respectivement pour 3 millions et 1 million d’euros.

Comment comptez-vous répartir les 22 millions d'euros sur un budget déjà calculé au plus serré ? Compte tenu des efforts déjà réalisés ces dernières années, des économies sont-elles encore possibles ? Le ministère de l’agriculture ne sera-t-il pas amené à abandonner certaines missions au profit de nouvelles ?

En deuxième lieu, notre assemblée a adopté une taxe sur les boissons sucrées qui a permis de dégager une marge de manœuvre nécessaire pour financer la baisse générale des charges sur les salariés permanents en agriculture. Cette mesure, chiffrée à 210 millions d'euros, a été annoncée par le Président de la République à Aubusson en octobre dernier et sera applicable en 2012 – un amendement sera d’ailleurs déposé en ce sens après la présente réunion.

Vos services ont-ils déjà chiffré les retombées potentielles, en termes d'activité et d'emploi, de cette mesure très importante pour notre compétitivité ? Pensez-vous que cela suffira à combler l’écart de compétitivité de notre pays, en particulier dans le secteur des fruits et légumes, avec les pays d'Europe du Sud et l’Allemagne ? Pouvez-vous nous donner des précisions encourageantes quant à cette mesure offensive qui est dans le budget de votre ministère le principal point de différence par rapport à l’année dernière ?

En troisième lieu, nous devons adopter un taux d’augmentation de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti, couramment appelée « taxe pour frais de chambres d'agriculture ». Les chambres d’agriculture ont demandé cette année un effort particulier car elles doivent continuer à assumer des transferts de charges et de fonctions à la demande de l’État. Elles doivent aussi réaliser des efforts qui supposent des investissements supplémentaires temporaires dans le cadre de la RGPP (révision générale des politiques publiques) – car, pour économiser à terme, il faut d’abord investir. Elles doivent encore organiser leurs élections l’année prochaine. Tout le monde s’accorde sur une augmentation de 0,45 %, mais quel taux le ministère et Bercy souhaitent-ils atteindre ? J’ai moi-même proposé 1,75 % alors que les chambres d’agriculture demandaient 2,25 % ? Quel est votre sentiment ?

En quatrième lieu, alors que le budget prévoit une subvention supplémentaire de 46 millions d’euros pour l’ONF (Office national des forêts), j’ai pour ma part calculé un montant de 39 millions d’euros. Pourriez-vous nous donner des précisions à cet égard ?

Je souhaiterais également connaître votre sentiment sur le montant de 2 euros par hectare prévu dans le cadre des efforts réalisés en partenariat avec la Fédération des communes forestières, au titre d’un contrat d’objectifs signé avec l’ONF, qui permet d’augmenter significativement la collecte de bois dans les forêts communales. Ce budget, qui représente un tournant, rend à l’ONF des perspectives et de la stabilité, mais il appelle quelques précisions.

Où en sont, par ailleurs, les négociations entre la France et ses partenaires, ainsi qu’entre les pays européens et la Commission européenne, sur la préparation de la nouvelle PAC (politique agricole commune), pour laquelle la Commission a formulé des propositions. Il importe de répondre à l’incertitude et aux inquiétudes du monde professionnel.

Pour ce qui concerne enfin l’industrie agroalimentaire, on observe chaque année un tassement des crédits et une dégradation de notre solde commercial et de notre position d’exportation, alors que notre pays était champion voilà encore quelques années. Comment le Gouvernement entend-il réagir face à cette évolution négative – notamment par rapport à l’Allemagne, qui nous a largement dépassés ?

M. Philippe Vigier, rapporteur spécial pour la sécurité alimentaire. Au cours des dix dernières années, la nutrition et l'alimentation sont devenues un enjeu de santé publique majeur. À la suite de nombreuses crises sanitaires, la traçabilité des aliments est devenue une exigence partagée. Les crédits demandés s'élèvent à 494 millions d'euros, ce qui correspond à 0,13 % des dépenses de l'État. C'est le prix à payer pour une alimentation sûre et saine.

Guidé par la révision générale des politiques publiques, cet approfondissement du mouvement engagé vers un État plus efficient est indispensable et il faut demeurer intransigeant. La Direction générale de l'alimentation s'emploie avec efficacité à concilier les compressions de personnel avec l'accroissement du volume de ses missions. Des coupes supplémentaires ne risquent-elles pas d'entamer l'exercice de ses fonctions régaliennes ?

De fait, l’épidémie due à la bactérie Escherichia coli O104 : H4, qui s'est répandue en Allemagne et en France en mai et en juin 2011, a provoqué près de cinquante décès en Allemagne et touché plusieurs milliers de personnes. En France, cette crise a été gérée avec sang-froid et professionnalisme et il importe d’en tirer des enseignements.

D'abord, la dimension européenne de l'événement a fait prendre conscience à nos concitoyens du degré d'interpénétration qui existe entre les circuits alimentaires nationaux à l'intérieur de l'Union européenne, mais aussi par-delà ses frontières communes. Les premiers soupçons se sont en effet portés en Allemagne sur des importations espagnoles et une piste égyptienne serait aujourd’hui privilégiée.

Je voudrais attirer une fois de plus votre attention sur le problème des importations en provenance de pays tiers à l'Union européenne, sur lequel j'ai déjà insisté l'année dernière. La surveillance des frontières extérieures dans le domaine de la sécurité alimentaire ne me paraît pas avoir encore atteint le niveau optimal. Aucun de nos concitoyens ne veut d'une Europe à la carte dans ce domaine. Il est urgent que l'Union européenne impose une harmonisation des critères de contrôle à l'importation aux frontières. Les producteurs français sont soumis à des obligations très strictes. Il faut maintenant qu’il en aille de même pour les importations.

Comment l'ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) peut-elle peser au sein du réseau des agences sanitaires européennes pour que le même niveau d’exigence soit toujours respecté ?

L'autre leçon de la crise de l'Escherichia coli porte sur la nature des produits alimentaires pouvant être à l'origine des crises sanitaires. Contrairement à certaines idées reçues répandues chez les consommateurs, des végétaux, en l'occurrence très certainement des graines germées, peuvent être aussi à l'origine d'intoxications alimentaires très graves. Il faut regretter à ce sujet que les mêmes services ne soient pas toujours compétents pour contrôler les denrées alimentaires, selon qu'elles sont d'origine animale ou végétale.

Alors qu'au début du mois, les débats sur le projet de loi de protection du consommateur ont laissé émerger dans notre assemblée l'idée que la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) ne remplissait peut-être plus toujours l'ensemble de ses attributions correctement, ne faudrait-il pas la décharger partiellement et confier à la Direction générale de l'alimentation la surveillance de l'ensemble de la chaîne alimentaire, de la fourche à la fourchette, c'est-à-dire de la production à la commercialisation, qu'il s'agisse d'aliments d'origine végétale ou d’origine animale ? Une direction unique de la sécurité alimentaire devrait voir le jour et garantirait une organisation centralisée et plus efficiente du contrôle des denrées alimentaires. C'est une proposition que j'avais déjà formulée l'an dernier, mais ce projet me semble plus que jamais d'actualité.

Enfin, il me semble que l'ANSES ne pourrait qu'éclairer le législateur lors de l'examen de textes tels que la récente proposition de loi visant à la suspension de la fabrication, de l'importation, de l'exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A.

Ne pensez-vous pas que les assemblées parlementaires devraient pouvoir saisir l'ANSES, comme elles saisissent la Cour des comptes, pour les assister dans l'exercice de leur fonction financière ?

Enfin, j'ai abordé dans mon rapport l’opération « Un fruit à la récré », dont l'importance peut paraître anecdotique, mais qui révèle en réalité un vrai blocage dans l'application des textes dès que la coopération ne joue pas pleinement au niveau interministériel. Il s'agit d'assurer, avec les collectivités territoriales volontaires, la distribution de fruits dans les écoles et les centres de loisirs associés à l'école, avec un accompagnement pédagogique. Ce programme de distribution, mis en place à titre expérimental depuis la rentrée de 2008, puis étendu à l'ensemble du primaire en 2009, a été généralisé en 2010 à tous les collèges et lycées. En revanche, la collation du matin est supprimée dans de nombreuses écoles. Les dernières mesures de lutte contre l'obésité requerraient pourtant d'agir contre le grignotage, et cela peut sembler remettre en cause l'opération.

À quel niveau, monsieur le ministre, vos services peuvent-ils coopérer le plus efficacement avec ceux de l'éducation nationale pour que le bon sens l'emporte dans l'application des textes ? Ceux-ci doivent en effet, me semble-t-il, pouvoir supporter des adaptations dans la pratique, ainsi qu'une prise en compte des spécificités locales.

M. Francis Saint-Léger, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques. Les crédits en faveur de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2012 affichent, avec 3,5 milliards d'euros, une grande stabilité, respectant en cela les plafonds du budget triennal portant sur la période 2011-2013. Il faut saluer le fait qu'en ces temps difficiles le Gouvernement donne les moyens à l'agriculture française de relever le défi agricole mondial qui l'attend.

Un certain nombre de priorités retenues par le ministre de l'agriculture contribuent à soutenir le revenu des agriculteurs. En contrepartie, puisque nous évoluons dans un cadre budgétaire contraint, les principales dépenses de fonctionnement de l'administration et des établissements publics subissent une réduction de 7,5 % par rapport à 2010, conformément à l'objectif de maîtrise des dépenses publiques décidé par le Gouvernement.

Ces priorités illustrent la nécessité d'apporter des solutions à la situation économique compliquée de certaines filières, mais aussi celle de renforcer la compétitivité de l'agriculture française. Je citerai seulement deux exemples qui me tiennent particulièrement à cœur : le maintien des plans stratégiques de développement des filières, avec 60 millions d'euros en 2012, qui permettent notamment de financer la modernisation des bâtiments d'élevage, et la stabilité des compléments nationaux aux soutiens communautaires, avec 17 millions d'euros pour la prime herbagère agroenvironnementale, 248 millions d'euros pour les indemnités compensatoires de handicaps naturels et 165 millions d'euros pour la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante.

Je pourrais aussi évoquer l'importance de la sanctuarisation des crédits en faveur de l'installation des jeunes agriculteurs, avec 167 millions d'euros, auxquels s'ajoutent les retours communautaires pour atteindre un total de 350 millions d'euros, ou de la reconduction des mesures d'exonération des cotisations patronales de sécurité sociale des travailleurs occasionnels du secteur agricole, pour un montant de 490 millions d'euros.

Vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre, ce budget est très fortement consacré à des allégements de charges destinés à surmonter la crise et à renforcer la compétitivité de nos agriculteurs face à la concurrence européenne et mondiale.

Conformément à l'engagement pris par le Premier ministre voici quelques jours lors du congrès de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles), à Saint-Malo, les cotisations sociales sur les salariés permanents des exploitations agricoles vont être réduites de 210 millions d'euros afin d’« améliorer leur compétitivité ». Cette mesure sera financée par une taxe sur les sodas et une réduction de l'avantage fiscal sur le fioul domestique. Pouvez-vous nous présenter plus avant l'économie de ce dispositif très attendu par nos agriculteurs ?

Nous avons par ailleurs eu connaissance, après la publication du projet annuel de performance, d'un « rabot » de 22 millions d'euros sur le budget de la mission. Nous avons sous les yeux la répartition des différents postes affectés, mais je souhaiterais connaître les raisons qui vous ont conduit à réduire ces dépenses plutôt que d'autres.

La sécheresse de ce printemps et de cet été a durement touché les exploitants agricoles, notamment les éleveurs, qui manquent de fourrage pour leurs bêtes. Dans des départements comme le mien, la Lozère, cela représente parfois plus de 50 % de pertes par exploitation. Plusieurs mesures ont été annoncées par le Président de la République et par vous-même pour leur venir en aide et l'ensemble des services de l'État se sont mobilisés. Ces dispositions se sont traduites en propre par une dotation de 200 millions d'euros du Fonds national de gestion des risques en agriculture pour permettre le versement d'une avance aux agriculteurs, par l’aménagement des échéances de prêts contractés par les éleveurs ou par le dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti pour les agriculteurs situés dans les zones sinistrées.

Il fallait avant tout gérer l'urgence, et vous l’avez fait. Malgré ces dispositions, certains agriculteurs dont les exploitations ont été touchées par cette sécheresse sont dans une situation extrêmement difficile. À l'heure actuelle, seul le versement d'une aide rapide et à la hauteur des pertes subies permettra de sauver ces exploitations. Que pouvez-vous nous en dire ?

Plus largement, plusieurs études parues récemment s'accordent sur le fait que des événements climatiques tels que celui que nous avons connu cette année sont amenés à se répéter. En une décennie, certaines régions ont connu sept années de sécheresse. Celle-ci n’est plus un événement exceptionnel, mais elle devient un fait ordinaire. Quelles mesures, notamment budgétaires, peuvent-elles être prises afin de prévenir ces crises plutôt que de les subir ? Ne pourraient-elles pas s'inscrire par exemple dans des mesures liées aux handicaps naturels, qui prévoient déjà les zones sèches ?

Pourriez-vous en outre nous éclairer sur les raisons qui ont présidé à la décision de consentir cette année un effort exceptionnel de 46 millions d’euros en faveur de l’Office national des forêts ?

Enfin, malgré les efforts que vous avez déployés afin d'assurer la pérennité du Programme européen d'aide aux plus démunis, les discussions semblent aujourd'hui dans l'impasse. Si aucune solution européenne ne pouvait être trouvée, quel serait l'impact de la renationalisation de ce dispositif sur le budget français ?

M. le président Jérôme Cahuzac. La France, qui était numéro un en termes de compétitivité de l’industrie agroalimentaire, se classe désormais au troisième rang, derrière l’Allemagne et les Pays-Bas. Quelles sont les perspectives en la matière, maintenant qu’une mesure semble devoir être adoptée ?

Cette mesure étant financée par une taxe supplémentaire et par des modifications de la fiscalité du fioul domestique, les agriculteurs pourraient être amenés à payer davantage de charges pour le carburant. Avez-vous estimé la part que représenterait cette charge, qui pèsera dans le sens inverse de la taxe instaurée sur les sodas justement pour alléger les charges ?

L'allégement des charges sur les salariés permanents devrait soutenir l'activité des exploitations, mais qu'en est-il des 630 000 actifs familiaux qui composent 71 % de la main-d'œuvre des exploitations professionnelles ? Cet allégement permettra-t-il l’embauche et soulagera-t-il les agriculteurs, dont le travail est très difficile ? Cette mesure est-elle suffisante ?

M. Bruno Le Maire, ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. J’ai grand plaisir à vous présenter ce budget, qui me donne aussi l’occasion d’évoquer avec vous la situation agricole française et de répondre à des questions essentielles pour nos concitoyens et pour le monde agricole.

Monsieur Poignant, je suis profondément convaincu que l’avenir de l’agriculture ne se jouera pas sur l’augmentation ou la baisse du budget du ministère de l’agriculture. Il faut certes maintenir des crédits pour assurer les fonctions essentielles du ministère, mais la clé est dans la modernisation des exploitations, dans les gains de compétitivité, dans l’innovation en matière d’agroalimentaire, dans la défense du budget de la politique agricole commune, vitale pour nos exploitations et sur laquelle nous avons eu gain de cause après deux ans de bataille, ainsi que dans la maîtrise de la spéculation sur les matières premières à l’échelle mondiale – à laquelle nous nous employons dans le cadre du G20.

Ne laissons pas croire aux paysans français que c’est sur les crédits du ministère que se joueront leur compétitivité et leur capacité à réussir demain ! Nous sommes entrés dans un monde totalement nouveau sur le plan économique et européen, mais aussi au niveau agricole. S’il est une chose que je retiens de cette année de la négociation de la PAC et de la négociation du G20 avec le Brésil, l’Inde et la Chine, c’est qu’il nous faut ouvrir les yeux sur la réalité du monde. L’agriculture mondiale est devenue un enjeu de puissance majeur. Nous avons à cet égard tous les atouts pour réussir, et pour réussir beaucoup mieux que les autres, mais cela suppose de prendre certaines décisions économiques courageuses. Ces décisions commencent à apparaître dans ce budget.

Monsieur Forissier, le coup de rabot demandé par le Premier ministre sur l’ensemble des budgets des ministères, représente pour la mission « Agriculture », comme vous l’avez indiqué, 22 millions d’euros. J’ai décidé de faire porter 15 millions d’euros de ces économies sur le programme « Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires », qui est celui qui permet de réaliser le plus facilement des économies de fonctionnement, ne serait-ce que par la modernisation de certains outils, comme la télédéclaration de la PAC, qui progresse plus rapidement que prévu. 3,1 millions d’euros sont également prévus sur les crédits « Forêt », en particulier parce que certains crédits prévus à la suite de la tempête Klaus ne pourront pas être dépensés l’année prochaine. Enfin, 2,4 millions d’euros d’économies sont également prévus sur le programme « Sécurité et qualité sanitaire de l’alimentation ». Ces économies résultent des états généraux du sanitaire que nous avons réunis voilà un peu plus d’un an et qui ont conclu à la possibilité de transférer aux agriculteurs une partie des responsabilités vétérinaires – certains des actes les plus simples –, déchargeant ainsi les services publics. Cette mesure ne remet pas en cause la qualité de la sécurité sanitaire en France.

En ce qui concerne le coût du travail, évoqué également par le président Cahuzac et par M. Saint-Léger, il me semble que nous devons tous prendre un peu de recul. Notre principal concurrent en Europe est l’Allemagne – elle l’est désormais dans le domaine de l’agriculture comme elle l’a été auparavant pour les services et pour l’industrie. La réunification allemande, le remembrement des exploitations et l’ouverture de l’agriculture de l’Allemagne de l’Est ont en effet donné à ce pays un poids agricole considérable par rapport à la situation antérieure.

La compétitivité agricole allemande tient à la fois à la taille des exploitations, à un mode de production très différent du nôtre, en raison de cette très grande taille, et à des coûts de production plus faibles, du fait que le secteur agricole allemand n’applique pas de salaire minimum et qu’il embauche massivement des salariés venus des pays de l’Est. Le coût horaire du travail dans l’agriculture est ainsi compris entre 6 et 8 euros en Allemagne, alors qu’il était en France de l’ordre de 12,30 euros – avant les décisions que nous avons prises en la matière depuis 2009.

Je rappelle en outre que, dans l’économie agricole, le coût du travail représente une part considérable du coût de production final. À la différence de l’industrie hautement qualifiée, où il représente 12 % ou 14 % du coût final, le coût du travail compte pour 60 % pour une pomme et pour 55 % pour un cochon. Notre capacité à faire varier le coût du travail a donc une incidence directe sur la compétitivité de notre agriculture dans son ensemble.

Nous avons commencé par exonérer totalement de charges le coût du travail occasionnel, afin de permettre aux exploitations produisant des fruits et légumes – qui sont les plus menacées du fait de la difficulté d’assurer la qualité et d’organiser la production, et auxquelles plusieurs d’entre vous sont très attachés – de combler l’écart de compétitivité.

Comme je l’ai toujours indiqué, l’exonération totale de charges sur le seul travail occasionnel ne suffira pas ; l’exonération devra aussi concerner le travail permanent, comme l’ont demandé Jean Dionis du Séjour et Bernard Reynès à qui nous avons confié une mission. Pour rattraper le retard de compétitivité, notre objectif est la réduction du coût du travail permanent dans l’agriculture française, au 1er janvier 2012, de 1 euro au niveau du SMIC. Cela est conforme à l’engagement pris par le Premier ministre au congrès de la FNSEA à Saint-Malo.

L’objectif est d’exonérer l’ensemble des cotisations conventionnelles, les cotisations légales dues au titre du fonctionnement du service de santé et de sécurité au travail, la contribution de solidarité et la cotisation due au titre du Fonds national d’aide au logement. Cette exonération s’appliquera à un maximum de vingt salariés par entreprise. Elle sera complète pour les salariés rémunérés jusqu’à 1,1 SMIC, puis dégressive, pour s’annuler à partir de 1,4 SMIC. C’est une mesure importante qui devra permettre, là encore, de rattraper le défaut de compétitivité de l’agriculture française. Elle coûtera 210 millions en année pleine et, comme vous l’avez décidé, elle sera financée par le doublement de la taxe sur les boissons sucrées créé par l’article 46 du projet de loi de finances pour 2012 et par un relèvement de la taxe intérieure de consommation prévue par l’article 265 du code des douanes, applicable au gazole utilisé comme carburant diesel. En réponse à la remarque du président Cahuzac, je précise que le coût supplémentaire lié à l’augmentation de cette dernière taxe sera, pour une exploitation moyenne, de l’ordre de 90 euros par an. J’estime que c’est minime et que cela ne posera aucun problème aux exploitations agricoles françaises. Le bénéfice d’une telle mesure, en termes de compétitivité, sera largement supérieur à son incidence sur les coûts de production d’une exploitation moyenne.

Cela dit, la bataille de la compétitivité ne se livre pas seulement sur un dossier. Nous ne pourrons la gagner uniquement en réduisant le coût du travail, même si cette réduction est une obligation. Il faut aussi innover, structurer les filières, moderniser les exploitations, valoriser les produits et monter en gamme. C’est en effet avec des produits de qualité que nous pourrons faire la différence par rapport à nos voisins, aux Allemands notamment. C’est donc une bataille de tous les instants et qui ne doit pas être livrée uniquement par les agriculteurs. L’ensemble de la filière doit en effet faire des efforts en matière de compétitivité. Je pense non seulement aux industriels de l’agroalimentaire et aux PME, notamment, qui ne sont pas suffisamment performantes et sont trop atomisées dans ce secteur, mais aussi à la distribution, qui ne peut s’exonérer de ces efforts de compétitivité et systématiquement tordre le cou des paysans en leur payant moins bien leurs produits parce qu’ils n’auraient pas eux-mêmes consenti les efforts de compétitivité nécessaires pour que leur modèle économique soit plus rentable.

Enfin, il n’est pas question non plus de faire du dumping social. Toute la difficulté est d’arriver à gagner en compétitivité sans pour autant nous rallier à un modèle qui ne serait pas le nôtre. Il n’est pas question d’avoir, en France, des personnels qui travaillent dans les abattoirs pour 6 ou 7 euros de l’heure, comme c’est le cas en Allemagne. L’objectif est d’amener les Allemands à réfléchir à un système différent pour l’organisation de leur production. Chacun doit faire un pas vers l’autre.

Quant à la taxe pour frais de chambres d’agriculture, j’estime que l’augmentation de 1,5 % est suffisante. On ne peut en effet demander à l’État de réduire ses dépenses de fonctionnement, voire certaines de ses dépenses d’investissement, et laisser les taxes augmenter de façon déraisonnable pour certains organismes consulaires, chambres ou autres. Avec cette augmentation de 1,5 %, les chambres seront en mesure de financer l’organisation de leurs élections et d’exercer les responsabilités qui sont les leurs. Je rappelle aussi que cette taxe est financée par une augmentation de la contribution additionnelle à la TFNB (taxe foncière sur le non-bâti), ce qui a une incidence sur la compétitivité des agriculteurs.

S’agissant de l’ONF, nous allons consacrer 46 millions de plus à son fonctionnement avec un objectif stratégique : le développement de la filière bois. Je suis en effet persuadé que cette filière peut être une source importante d’emplois et de création de richesses. Il faut donc réorganiser l’ONF et le soutenir sur le plan budgétaire comme nous le faisons. S’agissant de la contribution demandée aux communes forestières, je précise que la taxe additionnelle sera de 2 euros à l’hectare alors que, selon les documents initiaux, elle devait être comprise entre 2 et 4 euros.

Quant à la négociation de la politique agricole commune, nous avons progressé par étapes. En 2009, la Commission européenne avait proposé une baisse de 30 à 40 % du budget de la politique agricole commune. Nous nous sommes battus, sur la base d’une position commune franco-allemande, pour que ce budget soit maintenu, et il l’est désormais à l’euro près dans le document de travail de la Commission. C’est, pour nous Français, une victoire majeure. Je suis le premier à dire que les paysans doivent pouvoir vivre de leurs prix, mais ils leur faut aussi des primes étant donné tout ce qu’on leur demande en matière de respect des règles environnementales ou sanitaires.

Au cours du dernier Conseil des ministres de l’agriculture, nous avons ouvert la discussion sur plusieurs sujets, au premier rang desquels se trouve le verdissement de la PAC. J’ai toujours dit que j’étais favorable à celui-ci, et je le répète, mais verdissement doit rimer avec simplification. Or, il nous est aujourd’hui proposé une complexification de la PAC qui n’est pas acceptable. Ensuite, le verdissement doit être incitatif et rémunérateur pour les paysans : il ne doit pas les stigmatiser comme c’est le cas aujourd’hui. Enfin – troisième point de divergence avec la Commission –, il nous paraît excessif que 30 % des aides dépendent du verdissement. Il faudrait revenir à un taux plus raisonnable.

J’aurai l’occasion de reparler de la convergence nationale et européenne des aides.

La question du solde commercial est majeure, car la richesse de notre pays, la création d’emplois dépendent de notre capacité à aller chercher des parts de marché à l’exportation. Or, la balance commerciale extérieure française accuse un déficit de plus de 70 milliards d’euros en 2011 alors que celle de l’Allemagne est excédentaire de plus de 100 milliards d’euros. Mais ce tableau plutôt sombre recèle un élément positif : l’excédent commercial de l’industrie agroalimentaire – plus 18 % sur les sept premiers mois de 2011. En 2011, nous allons probablement revenir au niveau de 2009, c’est-à-dire regagner les places que nous avions perdues. Prendre des parts de marché à l’exportation a toujours été une priorité pour moi. Je rappelle qu’ en 2011 nous avons repris la place de premier exportateur mondial de vins en valeur, alors que nous avions été relégués à la troisième position. Le seul solde commercial extérieur qui soit à peu près rassurant est celui de l’industrie agroalimentaire. Cela dit, monsieur Cahuzac, je ne m’en contente pas et je pense que, sur le long terme, nous devons être plus offensifs en ce domaine. Nous avons ainsi mis en place un plan de compétitivité, qui n’a pas encore donné tous ses résultats, pour réorganiser les PME, les filières, permettre une prospection plus offensive à l’exportation.

S’agissant des crédits de la sécurité sanitaire, monsieur Vigier, des économies sont réalisées à partir des résultats des états généraux du sanitaire qui doivent nous permettre de transférer certaines responsabilités directement aux opérateurs agricoles.

Sur la crise de l’E. coli, j’ai fait, au précédent conseil des ministres de l’agriculture, des propositions pour une meilleure surveillance sanitaire européenne, s’agissant notamment du croisement des données épidémiologiques humaines avec la traçabilité des aliments fruits et légumes qui n’existe pas aujourd’hui, ce qui explique que nous ayons mis autant de temps à retrouver l’origine de la bactérie.

L’opération « Un fruit à la récré » n’est pas anecdotique : c’est un sujet majeur. Comment fait-on pour garantir que, en France, nous ayons la meilleure alimentation au monde ? Certes, on peut toujours faire mieux, mais nous sommes, parmi les pays développés, celui qui a le moins de problèmes d’obésité. C’est une bataille à la fois sanitaire et culturelle : sanitaire parce que, améliorer la qualité nutritionnelle des aliments, c’est allonger l’espérance de vie ; culturelle parce que c’est la diversité des produits, leur connaissance, le goût qui sont en cause. Sans reprendre l’ensemble des dispositifs créés depuis deux ans, je rappellerai que nous avons pris le décret sur les règles nutritionnelles dans les cantines, qui sont maintenant obligatoires alors qu’elles ne l’étaient pas auparavant – tous les enfants vont donc manger mieux, plus équilibré, moins sucré, moins salé, moins gras. Nous avons également pris le décret sur les circuits courts : pour la première fois, les collectivités locales seront exonérées du seul critère de prix et pourront choisir le critère de la proximité de la production pour passer commande d’un produit alimentaire. En Normandie, par exemple, une collectivité locale pourra donc choisir les pommes normandes même si elles sont légèrement plus chères que les pommes chiliennes. Cette remise en cause du droit de la concurrence européen n’a pas été une bataille facile à livrer.

Toutes les opérations du genre « Un fruit à la récré » n’ont qu’un objectif : faire en sorte que la France reste le pays où l’on mange le mieux au monde, avec la plus grande sécurité sanitaire et la meilleure qualité gustative possible !

Oui, monsieur Saint-Léger, j’ai fait le maximum pour maintenir l’ensemble des dispositifs : prime à la vache allaitante, indemnité compensatrice de handicap naturel ou prime herbagère agroenvironnementale. Ce n’est pas par clientélisme, pour faire plaisir aux uns ou aux autres : simplement, cela correspond à une vision de long terme de l’agriculture française. Si nous voulons conserver une agriculture diversifiée, avec des productions présentes partout sur le territoire, notamment dans les zones de montagne, les agriculteurs doivent toucher ces primes. Il ne s’agit pas de subventions : en effet, cela coûte plus cher de produire dans ces zones. Les modalités de production à l’herbe seront toujours plus coûteuses que celles des exploitations industrielles. Et ces « externalités positives » – pour employer une expression barbare –, il faut bien les payer d’une façon ou d’une autre, et elles ne le seront pas exclusivement par le prix.

C’est une bataille politique majeure que nous livrons à l’échelle européenne. Certains États européens voudraient nous faire croire qu’il suffirait de s’aligner sur le prix. Dans une exploitation argentine de 5 000 hectares, où les conditions de production et les règles sanitaires sont différentes de ce qu’elles sont en Europe, le prix du kilogramme de viande serait alors 50 centimes d’euro moins cher que dans le Massif central, les Vosges ou les Pyrénées. Cela signifierait la fin pure et simple des exploitations d’élevage dans certaines zones en France, ce qui serait une erreur stratégique majeure.

En matière d’élevage, nous sommes le premier producteur européen. Ce secteur représente des dizaines de milliers d’emplois et une création de richesses majeure pour notre pays. Il faut donc maintenir les aides, parallèlement au relèvement des prix !

Pour ce qui est de la sécheresse, nous avons déjà versé, le 15 septembre, un acompte de 100 millions d’euros au titre de l’indemnisation des calamités agricoles. Le solde sera versé début 2012, conformément à l’engagement que j’ai pris devant les éleveurs de Saône-et-Loire. Nous avons également versé par anticipation 3,7 milliards d’euros des aides de la PACS, ce qui soulage la trésorerie des éleveurs. Nous avons aidé au transport des fourrages et garanti la gratuité des péages pour celui-ci. Mais, comme je l’ai dit très clairement aux éleveurs, je ne mettrai pas un euro sur des mesures d’indemnisation supplémentaires immédiates, allégements de trésorerie ou autres, parce que je n’ai pas cet argent et parce que ce n’est pas une solution.

Je me suis battu pour ouvrir des parts de marché à l’exportation pour les éleveurs français en Turquie, en Russie, en Amérique centrale et en Afrique du Nord. Résultat : le prix payé à l’éleveur pour un kilogramme de viande en France a augmenté de 30 centimes d’euro en huit mois, soit la plus forte augmentation enregistrée depuis huit ans. Donc, c’est la bonne stratégie ! Ce qui fera la richesse de nos éleveurs, viticulteurs et producteurs de fruits, c’est leur capacité à s’organiser pour prendre des parts de marché à l’exportation et à vendre des produits qui soient les meilleurs au monde.

M. Charles de Courson. En Champagne, cela fait deux siècles que nous le faisons !

M. Bruno Le Maire, ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. Et cela ne vaut pas simplement pour le Champagne, qui obéit à des règles très particulières.

Enfin, les discussions sur le PEAD (Programme européen d’aide aux plus démunis) sont dans l’impasse et les raisons de ce blocage sont politiquement intéressantes. Le PEAD a été créé en 1987 par Jacques Delors et Coluche sur la base de la redistribution des stocks alimentaires excédentaires européens. Comme nous avons réussi à réunir les stocks excédentaires, nous avons transformé cette aide matérielle en aide financière. Depuis des années, certains États s’opposent à cette aide financière pour les associations caritatives comme les Restos du cœur ou les banques alimentaires au motif que de telles actions devraient relever exclusivement de la solidarité nationale. Ils ont donc déposé un recours auprès de la Cour de justice européenne qui a estimé que les crédits que nous avions votés – 500 millions d’euros par an – étaient illégaux et que nous devions trouver une nouvelle base légale pour ce programme.

La Commission a donc proposé une nouvelle base légale pour pouvoir maintenir ces crédits sur les deux dernières années – 2012 et 2013 –, mais cette base légale est refusée par une minorité de blocage composée de l’Allemagne, de la Grande-Bretagne, de la Suède, du Danemark et de la République tchèque. J’essaie de casser cette minorité de blocage depuis plusieurs mois mais je ne vous cache pas que je me heurte à un mur en dépit du soutien de vingt et un États européens sur vingt-sept, de la Commission européenne et de son président, ainsi que de 85 % des parlementaires européens. Je ne conçois pas que l’on puisse, en pleine crise économique et, pour certains pays, en pleine crise sociale, arrêter de financer les associations caritatives qui délivrent des repas à ceux qui n’ont pas de quoi s’en payer un par jour. Je trouve cela scandaleux et je suis révolté que les pays de l’Union européenne ne parviennent pas à trouver un compromis sur ce point. Je me suis rendu trois fois à Berlin où j’ai négocié avec mon homologue allemand. Je suis allé au Danemark, en République tchèque, dans tous les pays de la minorité de blocage. Je suis intervenu devant tous leurs parlements pour expliquer notre position, mais certains États européens estiment désormais que c’est le « chacun pour soi » ! Nous avons jusqu’au 31 décembre pour trouver une solution, mais je ne me résignerai jamais à ce que l’Europe soit celle du « chacun pour soi » : ce doit plutôt être l’Europe de la solidarité !

M. le président Serge Poignant. Mes chers collègues, vous êtes très nombreux à vouloir intervenir et je vous demande de limiter votre intervention à deux minutes, faute de quoi nous ne pourrons terminer l’examen de ce budget dans la matinée.

Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir affirmé votre volontarisme pour notre agriculture française s’agissant de la sécurité alimentaire comme de la diminution du coût du travail.

En ce qui concerne le PEAD, je tiens à souligner que, à part l’Italie, les autres pays ne semblent pas se préoccuper beaucoup du problème. Nous avons donc beaucoup à faire ensemble pour les convaincre de la nécessité de cette action.

M. Bruno Le Maire, ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. Je vais vous raconter une anecdote. Au bout de deux heures de discussion sur le PEAD, l’un de mes homologues a fait cette remarque lapidaire qui en dit long sur l’état d’esprit européen aujourd’hui : « À chacun ses pauvres ! » Moi, j’estime qu’il ne sert à rien de construire l’Europe si c’est pour en arriver là ! Le jour où de vraies crises sociales éclateront un peu partout en Europe, cela sera, pour tous, la crise politique européenne. Je trouve irresponsable que nous n’arrivions pas à trouver un compromis pour maintenir ce programme sur deux années. Nous allons donc continuer à discuter pour essayer d’obtenir gain de cause.

Quant au coût du travail, j’ai fait une erreur : quand je dis que cela représente de 50 à 60 % du coût de production des filières, je pense évidemment aux filières des fruits et légumes, pas aux filières d’élevage, pour lesquelles c’est le coût de l’alimentation qui représente ce montant, notamment l’alimentation porcine.

M. Jean Gaubert. Si j’ai bien compris, monsieur le président, les orateurs ne disposent que de deux minutes de temps de parole !

M. André Chassaigne. C’est inacceptable ! Ce doit être cinq minutes !

M. le président Jérôme Cahuzac. Je vous renvoie aux règles fixées par le président de l’Assemblée nationale, qui a la responsabilité d’organiser ce type de débats, sous le contrôle de la conférence des présidents. Á ma connaissance, le temps de parole des orateurs est fixé à deux minutes, mais nous allons vérifier, et il sera, le cas échéant, allongé.

M. Louis Guédon. Monsieur le ministre, le budget que vous nous présentez est fondé sur une politique forte. Il s’inscrit dans le cadre de l’exigence de maîtrise des dépenses publiques. Plusieurs mesures visent à renforcer la compétitivité de l’agriculture française : la maîtrise des coûts de production, l’investissement en faveur de la modernisation des élevages, les dispositifs de soutien à l’installation des jeunes agriculteurs, le respect de l’environnement, le développement de la forêt.

J’aborderai plus particulièrement le volet de la pêche. L’indispensable modernisation de la pêche impose deux programmes : les « navires du futur » et l’organisation de la filière. J’ai constaté, grâce à la mission que m’a confiée M. le Premier ministre, combien ces deux projets étaient attendus, le premier pour assurer la sécurité des équipages et l’efficacité dans le respect de la ressource, le second pour pérenniser le marché.

La réorganisation de la filière impose, à travers l’association France Filière Pêche, une restructuration de toute l’interprofession. Quelles seront les modalités de participation de l’État pour satisfaire cet impératif ?

Les programmes du milieu agricole ou de la pêche sont parfois cofinancés par l’Union européenne. Le groupe d’études de la mer que je préside vient, conjointement à son homologue du Sénat, d’auditionner Mme Damanaki, commissaire européenne chargée des affaires maritimes et de la pêche, dont le point de vue s’oppose au nôtre. Cette audition nous consterne, car elle laisserait penser que la protection du poisson prévaudrait sur celle de nos marins.

La profession, par le biais du Conseil d’orientation scientifique et technique, assure le renouvellement des espèces. Respectueuse des droits de pêche, la filière attend un avenir pour ses marins, des navires sécurisés et adaptés, une vision économique du marché de la pêche française.

Le Français consomme de plus en plus de poissons : sa consommation est passée de 28 à 35 kilogrammes en dix ans. L’arrêt de la pêche française ne protège pas la ressource, le poisson pêché et importé constituant 80 % de notre consommation. Comment les crédits s’articuleront-ils avec ceux de Bruxelles, nos positions étant contradictoires – nous l’avons vu avec l’atteinte du rendement maximum durable, avec l’interdiction totale des rejets et, surtout, avec les quotas transférables ?

M. le président Jérôme Cahuzac. Avant de poursuivre, je vais vous donner lecture du relevé de décisions pris sous la présidence de Bernard Accoyer :

« Le principe de ces commissions élargies est conservé.

« Il est demandé au ministre de renoncer à toute intervention liminaire.

« L’intervention des rapporteurs est limitée à cinq minutes. Pour les autres orateurs, elle est de deux minutes. Et il sera fixé une durée globale au débat pour permettre au ministre de mieux s’organiser.

« Pour autant, il va de soi que c’est la liberté des présidents de séance que d’accorder un temps de parole plus important, le cas échéant, aux présidents de groupe. »

Je vous indique simplement que, outre les représentants de chaque groupe, quarante orateurs sont inscrits. Si Charles de Courson, que je remercie de bien vouloir me remplacer pendant la Conférence des présidents, l’estime possible, il peut naturellement aller jusqu’à accorder cinq minutes aux porte-parole des groupes, mais la durée du débat étant limitée à trois heures trente, je crains que tous les inscrits ne puissent s’exprimer.

Je précise à M. Gaubert, que je ne fais là que traduire la décision de la Conférence des présidents.

(M. Charles de Courson, vice-président de la Commission des finances, et M. Jean Gaubert, vice-président de la Commission des affaires économiques, remplacent respectivement M. le président Jérôme Cahuzac et M. le président Serge Poignant.)

M. Germinal Peiro. Monsieur le ministre, alors que nous examinons le dernier budget de l’agriculture de la législature, je voudrais vous dire, au nom du groupe socialiste, combien nous avons apprécié votre travail, votre engagement, votre sincérité et votre écoute. Cela étant, nous n’avons pas partagé vos orientations en matière de politique agricole.

Au cours des dix dernières années, notre pays a perdu 26 % de ses exploitations agricoles. L’INRA (Institut national de la recherche agronomique) prévoit que l’hémorragie sera pire encore : en 2020, il ne restera selon elle que 260 000 exploitations agricoles contre 326 000 aujourd’hui. La politique menée depuis dix ans ne va donc pas dans le bon sens. Elle pousse à la concentration des exploitations, à la destruction des emplois sur nos territoires et à l’affaiblissement de l’agriculture française puisque nous sommes passés du premier au troisième rang des pays exportateurs.

Certes, ce n’est pas directement de votre responsabilité, mais au cours de ces dernières années, la France a entériné la fin définitive des quotas laitiers. Elle a voté la disparition de la réglementation des droits de plantation en matière viticole – votre prédécesseur, Michel Barnier, a signé au nom de la France.

En matière laitière, nous voulons nous faire l’écho des producteurs qui se savent condamnés pour une grande part. Là encore, les chiffres de l’INRA sont édifiants : on passerait de 90 000 à 40 000 exploitations laitières en quelques années. Je peux même affirmer sans caricaturer que le Sud est condamné. C’est inacceptable.

De la même façon, la déréglementation des droits de plantation en matière viticole entraînera des catastrophes dans peu de temps.

Un mot sur l’absurdité du dossier de la tabaculture : chaque fois que nous augmentons le prix des cigarettes, quelques centaines de millions vont dans les caisses de l’État, une centaine dans les poches des industriels, quelques dizaines de millions dans celles des distributeurs, mais il n’y a rien pour les producteurs. L’Europe, qui ne produit aujourd’hui que 25 % du tabac qu’elle consomme, devra importer 100 % de sa consommation demain. Il ne nous restera que les fumeurs et les chômeurs.

Depuis cinq ans, l’enseignement agricole a été extrêmement maltraité.

Vous avez placé le budget sous le signe de la diminution du coût du travail, mais cette mesure est-elle euro-compatible ? Non, aviez-vous répondu à nos collègues du Nouveau Centre.

Enfin, je regrette que, pendant ces cinq ans, nous n’ayons pas pu appliquer la loi que nous avions votée à l’unanimité en 2002. Elle consistait à créer un régime complémentaire obligatoire de retraite pour les agriculteurs, et à porter à 75 % du SMIC la retraite des chefs d’exploitation. La MSA nous a indiqué que nous n’en étions qu’à 71 %.

M. Jean Dionis du Séjour. Je m’associe assez largement à l’analyse du ministre. Pour les centristes, la solution est, non pas dans le protectionnisme, mais dans la compétitivité de l’agriculture française alors que la mondialisation ne fera que s’accroître.

Oui, monsieur le ministre, la compétitivité est multifactorielle : énergie, organisation commerciale, innovation dans l’industrie agroalimentaire. Mais, pour nous, la priorité absolue reste le coût du travail. Tel était le sens de la proposition de loi que Charles de Courson et moi-même avons présentée le 14 avril 2010. Elle a engendré un débat de fond dont vous vous êtes pleinement saisi. Vous avez ainsi nommé Bernard Reynès parlementaire en mission et, au final, la démarche a débouché sur un ensemble d’exonérations d’un montant de 210 millions d’euros.

L’ensemble des exonérations sur le travail saisonnier s’élève à 491 millions d’euros, ce qui est considérable. Il faut y ajouter, en outre, l’exonération partielle des charges permanentes de 210 millions d’euros. Nous saluons ce bilan et votre action en ce domaine, monsieur le ministre.

Cela étant, le coût du travail permanent restera de l’ordre de 11,50 euros de l’heure contre de 6 à 8 euros en Allemagne. La transformation structurelle du financement de la sécurité sociale est donc pour nous une priorité politique absolue. Il faut remplacer les charges pesant sur le travail par des charges sur la TVA ou la CSG. Quelle est la bonne stratégie à moyen et à long terme pour le ministre de l’agriculture ?

En ce qui concerne l’eau, Germinal Peiro vient de condamner les départements du Sud. Je ne me résoudrai jamais pour ma part à un tel verdict. Les états généraux de l’agriculture dans mon département ont montré que l’eau était devenu un facteur limitant dans les filières d’avenir, et pas seulement pour les grandes cultures. Je pense par exemple à la filière de la noisette, devenue très porteuse. Certes, il faut être économe de la ressource, mais il faut aussi créer des ressources nouvelles grâce aux retenues d’eau collinaires et sur les rivières moyennes. Or je n’ai pas noté d’évolution des crédits budgétaires concernant le soutien à la création de ressources nouvelles. Quelle est la réalité de votre budget sur ce point important ?

M. André Chassaigne. Monsieur le ministre, je salue moi aussi votre écoute, votre disponibilité et votre pugnacité. Mais je constate qu’une fois encore, vous nous présentez un budget lourdement amputé : une diminution de 1,5 % en crédits de paiement à périmètre constant.

Vous vous félicitez d’avoir tenu le cap des coupes budgétaires décidées dans le cadre de la programmation 2011-2014. En 2012, il y aura donc 71 millions d’euros en moins pour les agriculteurs, les pêcheurs, les forestiers, qui vivent pourtant tous de plus en plus mal, quand ils n’ont pas cessé d’exercer leur activité depuis l’année dernière. La clé n’est pas dans les crédits, venez-vous de nous expliquer.

Le contraste est grand entre vos propos et la réalité de l’agriculture dans notre pays. Selon le dernier recensement général agricole, la France a perdu 26 % de ses exploitations entre 2000 et 2010, et 22 % des emplois liés au secteur. Elle compte désormais moins de 500 000 exploitations. À ce rythme, qui ne cesse de s’accélérer, le rêve des libéraux de voir une France avec 100 000 agrimanagers, spécialisés et aptes à concourir sur les marchés mondiaux, est désormais à portée de main – une quinzaine d’année.

C’est bien vers cet objectif que vous vous tournez en réaffirmant dans la présentation budgétaire que « ce budget doit permettre aux agriculteurs français de se moderniser, d’investir et de gagner en compétitivité ». Enfermé dans l’obsession de la seule compétitivité, vous n’avez pas un mot sur leurs difficultés ni sur la disparition, chaque année, de milliers d’exploitations familiales.

Ainsi, le programme 154 « Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires » perd à lui seul 44 millions d’euros par rapport à la loi de finances précédente avec, comble du comble, une diminution de 11 millions d’euros de crédits sur l’action « Gestion des crises et des aléas de la production ». C’est un joli pied de nez aux centaines de milliers d’agriculteurs de notre pays qui ont dû faire face cette année à une sécheresse dramatique ! C’est un drôle de symbole pour les producteurs de fruits et légumes menacés de disparition faute de décisions politiques courageuses en matière de prix !

Que dire également du recul – mais c’est devenu une habitude – des crédits du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », alors que nous vivons désormais au rythme des « scandales » sanitaires, et que la crise dite « du concombre » avec la bactérie E.coli a plongé sans raison toute une filière dans le désarroi ? N’est-il pas indispensable de renforcer les moyens dans ce domaine, notamment pour éviter toute peur panique injustifiée de nature à fragiliser des producteurs déjà à bout de souffle ?

Je ne rentrerai pas dans le détail des actions des différents programmes pour vous dire que ce budget, plus encore que les précédents, n’est vraiment pas à la hauteur de la situation de la France agricole.

Sur le principal besoin des agriculteurs, à savoir la question des prix et des revenus, vous vous refusez toujours à prendre les mesures indispensables à la survie des exploitations. Pourtant, certaines d’entre elles n’auraient aucune incidence budgétaire, tel l’encadrement des prix et des marges à travers l’application d’un coefficient multiplicateur. C’est une urgence et vous aurez, à cet égard, à vous prononcer sur ma proposition de loi dont nous discuterons le 1er décembre prochain.

Monsieur le ministre, face au libéralisme, vous avez fait le choix du renoncement et vous abandonnez ainsi les paysans. On peut pourtant refuser cette chronique d’une mort annoncée de notre agriculture et de ceux qui la font vivre. Il faut pour cela s’attaquer à la question centrale de la répartition de la valeur ajoutée et de la rémunération du travail paysan. Vous avez choisi une autre voie en vous entêtant dans la seule recherche de la compétitivité et dans la sauvegarde du « grisbi » de la grande distribution. Allez-vous enfin prendre le virage nécessaire ?

Le débat sur l’agriculture est plus que jamais un débat de société, un débat sur la place de l’humain dans cette société.

M. Robert Lecou. Monsieur le ministre, vous avez en charge un département ministériel fondamental. L’agriculture, c’est produire pour nourrir l’homme, c’est encore, au XXIsiècle, être capable de produire pour lutter contre la faim dans le monde. En France, c’est un secteur important pour notre économie et le maintien de nos territoires. Sans nos agriculteurs, que serait notre balance commerciale, qui souffre mais qui, heureusement, bénéficie de l’excédent du secteur agroalimentaire ? Que seraient nos paysages ?

Je complèterai cette introduction en vous remerciant pour votre ténacité à défendre l’agriculture française, le maintien du budget de la PAC et la réduction du coût du travail. J’appuie également votre engagement visant à maintenir le régime des droits de plantation, indispensable pour préserver la viticulture familiale et de qualité qui caractérise la France.

Je relèverai enfin que la France a réussi à imposer l’agenda du G20 s’agissant notamment de la lutte contre la volatilité du prix des matières premières agricoles.

Je terminerai par deux questions :

Comment accompagnerez-vous la lutte contre la sécheresse ? Les agriculteurs demandent qu’on leur facilite la vie et qu’on allège les réglementations particulièrement pour la création de retenues collinaires.

Les conchyliculteurs souffrent de la mortalité précoce des naissains. Quel accompagnement ce budget permettra-t-il ?

M. Jean Gaubert, vice-président de la Commission des affaires économiques. Ma première question portera sur le différentiel du coût du travail entre la France et l’Allemagne.

Dans certains Länder, on est à 4 euros l’heure dans des conditions de travail indignes de l’Union européenne. On m’a ainsi rapporté hier qu’il existait dans le Palatinat de véritables camps de Roumains entourés de barbelés – accords de Schengen obligent – desquels on ne laissait sortir les gens que pour aller travailler, et qu’à l’abattoir de Rheda, c’était Zola revisité par les Allemands. La crise financière interdit de dire un certain nombre de choses, mais de telles pratiques sont inadmissibles. Nous finirons tous par payer cette course à la main-d’œuvre moins chère.

En outre, le système de diminution du coût du travail que vous mettez en place a ses limites. Ainsi, des agriculteurs légumiers que j’ai récemment rencontrés et qui paient au-dessus de 1,4 SMIC leurs salariés permanents ne pourront pas en bénéficier. Vous allez donc instaurer une nouvelle trappe à bas salaires. Certes, il y a urgence. Mais les employés qualifiés seront les premières victimes du sytème.

Par ailleurs, vous avez peu évoqué les dernières propositions du commissaire européen à l’agriculture, qui ont été vivement attaquées par le syndicat majoritaire en France. Quelle est votre première analyse ?

M. François Rochebloine. Monsieur le ministre, pour affronter les changements en profondeur qui affectent la vie des agriculteurs et, au-delà, des territoires ruraux, la formation est essentielle.

Dans ce cadre, comptez-vous garantir la nécessaire originalité des classes de quatrième et troisième de l’enseignement agricole ?

Comptez-vous développer dans les territoires, au plus près des besoins recensés, des formations supérieures en prolongement de la réforme du baccalauréat professionnel agricole ?

Envisagez-vous de favoriser le développement des formations de services à la personne pour l’ensemble du territoire, et pas seulement les espaces ruraux ?

Compte tenu de ces différents sujets de préoccupation, comment concevez-vous la participation des (MFR) Maisons familiales rurales à cette mission de formation professionnelle tout à fait essentielle pour l’avenir de la jeunesse et le développement local ?

Je tiens à souligner toute la pertinence de l’offre de formation de ce réseau particulièrement bien implanté dans un grand nombre de régions et l’intérêt que l’on peut retirer d’un partage d’expérience avec les MFR pour atteindre les objectifs que je viens de citer.

M. Jean-Pierre Decool. Les crises agricoles ont malheureusement marqué une nouvelle fois l’année – sécheresse, crise des producteurs de fruits et légumes – dans un contexte international des plus difficiles. Je vous remercie donc, monsieur le ministre, pour votre action tendant à mettre fin aux distorsions de concurrence avec nos voisins, notamment en répondant aux demandes d’allégement du coût du travail de la profession.

Mes questions porteront aujourd’hui sur l’enseignement agricole qui a toujours montré son excellence dans la formation des futurs professionnels de l’agriculture et du monde rural, ainsi que dans l’accueil de jeunes en voie de déscolarisation. La part des effectifs d’élèves, d’apprentis, d’étudiants et d’adultes en formation agricole ne cesse de croître. L’enseignement agricole valorise brillamment la participation à l’animation et au développement des territoires. La politique de formation, d’insertion et d’innovation prépare ces jeunes à relever les défis majeurs de demain en matière d’agriculture, d’alimentation, de développement durable et d’aménagement du territoire.

Par ailleurs, ces filières ont cette qualité propre de n’engendrer que très peu d’inactivité, grâce à une adéquation remarquable entre les offres de formation et les attentes des professionnels.

Néanmoins, les communautés éducatives s’inquiètent grandement des conditions dans lesquelles se préparent les prochaines rentrées. L’enseignement agricole n’a pas été épargné ces derniers temps par les réductions de postes, et celles prévues en 2012 pourraient poser de graves difficultés de gestion aux établissements. Dans le privé, chaque enseignant étant devant des élèves, supprimer des postes revient à supprimer des classes.

Face aux différentes inquiétudes ressenties, il est capital, monsieur le ministre, que vous puissiez assurer à l’enseignement agricole que le budget de 2012 leur permettra de poursuivre qualitativement leurs missions.

Mme Frédérique Massat. S’agissant de la forêt, l’article 48 du projet de loi de finances prévoit la création d’une nouvelle taxe comprise entre 2 et 4 euros. Certes, vous venez de nous dire qu’elle serait fixée à 2 euros. C’est néanmoins une révolution pour les communes forestières notamment lorsqu’elles ont des forêts vacantes sur leur territoire. Dans l’Ariège, par exemple, un tiers des 40 000 hectares de surface de communes forestières est constitué d’espaces vacants. Or les communes concernées seront taxées comme celles qui pourront vendre leur bois. Que vont-elles devenir ? Il s’agit souvent de petites communes, qui connaissent d’importantes difficultés. Ne risquent-elles pas de sortir du régime forestier et, donc, de déstructurer les services de l’ONF sur le terrain ? Cette mesure va remettre en cause le principe de solidarité entre les communes forestières et la péréquation prévue par l’ancien système.

Par ailleurs, le contrat d’objectifs 2012-2016 conclu entre l’État et l’ONF prévoit, à terme, la suppression de 700 postes. Pouvez-vous nous en dire plus ? Compte tenu du malaise qui règne à l’ONF et alors que vingt-six forestiers se sont suicidés ces cinq dernières années, dont quatre cet été, pouvez-vous nous apporter quelques précisions sur les mesures sociales prévues dans le contrat ?

S’agissant de la filière « bio », le crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique a été divisé par deux. Le budget passe de 32 millions d’euros pour 2011 à 18 millions pour 2012 avec 9 255 demandes prévues contre 8 400 l’an dernier. À cela s’ajoute la diminution de la dotation au fonds Avenir Bio géré par l’Agence Bio, qui passe de 3 millions à 2,9 millions d’euros. Pourquoi un tel revirement, monsieur le ministre ?

Enfin, nous ne voyons aucune ligne en faveur des circuits courts. Pourquoi ?

M. Charles de Courson, vice-président de la Commission des finances. Hier après-midi, dans le cadre du vote de la première partie de la loi de finances, une enveloppe de 210 millions d’euros a été ouverte sur le budget de l’agriculture pour permettre le vote d’un amendement visant à baisser d’un euro de l’heure le coût des salaires des salariés en CDI dans la limite de vingt salariés par entreprise et de 1,4 SMIC. Avec mes collègues Reynès, Dionis du Séjour, Poignant et Remiller, entre autres, nous en présenterons un ce matin. Pouvez-vous confirmer, monsieur le ministre, que cette mesure, élaborée en étroite concertation avec la Commission européenne et vous-même, est compatible avec le droit communautaire ?

S’agissant des biocarburants, le coût estimé de la mesure d’exonération plafonnée de TIC (taxe intérieure de consommation) sur les biocarburants est de 250 millions d’euros pour 2012, soit 30 % de moins qu’en 2010, où elle atteignait 366 millions. En outre, cela ne tient pas compte des recettes de TGAP et de TVA supplémentaires qui réduisent ce coût de moitié et qui l’annulent, voire l’inversent, sur la partie bioéthanol. Certaines dispositions prendront cependant fin en 2013. Ces agréments seront-ils renouvelés ? Plus largement, quelle est la politique du Gouvernement à moyen terme en la matière ?

Mme Annick Le Loch. Les crédits dévolus au secteur de la pêche sont en diminution de 1,2 % en autorisations d’engagement, diminution que vous expliquez par la fin de l’attribution des crédits nécessaires à la mise en place de journaux de bord électroniques et aux plans de sortie de flotte. Les 58 millions prévus en autorisations d’engagement permettront-ils de relever les défis de la pêche, de l’aquaculture, de la conchyliculture – je pense au renouvellement et à la modernisation de la flottille, à la sécurité à bord, à la formation aux métiers, à l’attractivité du secteur, à la valorisation des produits de la mer, à la mortalité des naissains d’huîtres, bref, à la vitalité de nos économies littorales ? Je n’en suis pas certaine.

Pour 2012, 11 millions sont consacrés à un plan de sortie de flotte contre 12 millions en 2011. Il s’agit d’adapter la capacité de pêche à la ressource sur des stocks sensibles. Lesquels ?

De même, 11 millions sont affectés à la casse des navires et 600 000 euros seulement sont destinés à aider la flottille à se moderniser. C’est bien peu de choses au regard des besoins d’une flottille dont la moyenne d’âge est supérieure à vingt ans, qui doit être remise aux normes, qui doit parvenir à faire des économies d’énergie et à attirer les jeunes.

Je note que 10 millions sont réservés aux contrats bleus. Est-il exact, monsieur le ministre, qu’aucun versement n’aurait encore été effectué au titre de 2010 ?

La profession regrette aussi le manque de soutien aux structures professionnelles. La réforme se met en place dans le cadre de la loi de modernisation de l’agriculture, mais la question de leur financement n’a pas été abordée. Je pense notamment aux comités régionaux des pêches, et plus particulièrement au comité régional de Bretagne, qui se trouvent écartés de tout financement public. Or leurs missions ne cessent d’augmenter. Je pense ainsi à la demande de gardes-jurés dans les 12 milles pour contrôler les prélèvements de la ressource.

L’an dernier, vous aviez annoncé l’affectation de 20 millions d’euros au programme « Navire du futur » dans le cadre de l’appel à projets de l’ADEME et au titre du grand emprunt. Où en sommes-nous ?

Enfin, l’avenir de la pêche et de l’ostréiculture dépendra beaucoup de la PCP (politique commune de la pêche). Or, dans sa forme actuelle, le projet de réforme proposé par la Commission européenne est totalement inacceptable : il ne prépare en rien un avenir durable pour la pêche et les activités maritimes françaises. Quand aurons-nous l’occasion d’en parler ?

(M. le président Serge Poignant remplace M. Jean-Gaubert, vice-président de la Commission des affaires économiques.)

M. Yannick Favennec. Je souhaite relayer les attentes des retraités agricoles, anciens chefs d’exploitation, dont la situation financière est souvent précaire.

Monsieur le ministre, vous menez depuis plusieurs années une politique volontariste de revalorisation des pensions, qui s’est traduite par la création, en 2009, d’un minimum de pension pour les retraités du régime non salarié agricole. Toutefois, la moitié des chefs d’exploitation justifiant d’une carrière complète perçoivent moins de 68 euros de retraite par mois. À ce montant de pension peu élevé, il convient d’ajouter les augmentations de leurs dépenses de santé ou d’énergie.

Une des solutions qui permettrait d’augmenter la retraite des non-salariés agricoles serait de modifier son mode de calcul, et de prendre en compte, comme cela se fait pour les salariés du régime général, les vingt-cinq meilleures années.

Cette mesure d’équité permettrait d’atténuer les aléas de revenus qui impactent fortement le montant de la retraite, mais également de simplifier le système de calcul, puisque la pension serait proportionnelle au niveau de contribution, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Je sais que vous vous êtes montré ouvert à cette demande légitime du monde agricole, et la dernière loi portant réforme des retraites à prévu l’élaboration d’une étude sur la faisabilité de l’application de la règle des vingt-cinq meilleures années.

Monsieur le ministre, êtes-vous en mesure de porter à la connaissance de la représentation nationale les conclusions de cette étude ainsi que les orientations qu’elles vous inspirent ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Les crédits du plan de modernisation des bâtiments d’élevage (PMBE) sont fondamentaux pour l’avenir de nos territoires ruraux. Cette politique se concrétise par des appels à projets. Je vous épargne l’historique des problèmes rencontrés par certains jeunes agriculteurs ou exploitants, mais je constate que les délais d’instruction des dossiers sont longs, difficilement explicables, et qu’ils peuvent remettre en cause une installation. Compte tenu des engagements à prendre et des commandes à passer lors de la constitution d’un cheptel, il arrive qu’après un refus lors d’un premier appel à projets, on peine à réinstruire un dossier, ce qui est la source de vraies difficultés. Pourrait-on simplifier l’instruction de ce dispositif ?

Je salue le contrat d’objectifs et de performance entre l’État, l’ONF et la Fédération nationale des communes forestières. Il était nécessaire. Néanmoins, comment améliorer la compétitivité de la filière bois, notamment dans le secteur de la transformation du bois et des scieries ? Cette filière a bénéficié des allégements de charges sociales sur les heures supplémentaires. Cela va poser un réel problème sur nos territoires qui sont en concurrence avec des scieries européennes, voire suisses pour ce qui concerne le Jura.

Je salue pour finir votre implication après ces deux années de bataille dans la négociation de la PAC.

Mme Marie-Lou Marcel. Les crédits de paiement de l’action 12 – « Gestion des crises et des aléas de production » – avaient enregistré un recul l’an passé. Les crises ont conduit à les faire passer de 43 à 58 millions d’euros. Mais pour 2012, seuls 37 millions sont inscrits.

En ce qui concerne la sécheresse, les attentes sont fortes. La quasi-totalité de mon département de l’Aveyron est reconnue au titre des calamités. Il semble que le système retenu – informations et suivi objectif des prairies (ISOP) – ne soit pas adapté aux zones d’altitude. Le problème des estives est également posé, car elles ne sont pas répertoriées. La demande des agriculteurs porte sur la trésorerie et l’aide au transport pour l’approvisionnement en paille. Quelle réponse pouvez-vous leur apporter alors que les crédits de paiement sont insuffisants ?

Ma deuxième question concerne le plan de performance énergétique. Vous avez dit qu’en dehors des aides, la clé était la modernisation des exploitations. Or ce programme est en baisse constante, avec 12 millions d’euros en 2011 et 9 millions en 2013. Comment justifiez-vous cette baisse, en contradiction avec l’objectif du Grenelle, comme avec vos affirmations ?

Je souhaite également vous interroger sur les signes officiels de qualité. Aucune enveloppe n’étant consacrée au développement et à la promotion de ces produits, quelle est votre volonté en la matière ?

Je regrette enfin la réduction drastique des moyens de l’enseignement agricole – 280 postes en moins – dont chacun connaît l’excellence.

M. Jean-Marie Binetruy. Je salue ce budget. Il faut reconnaître que malgré un printemps peu favorable du fait de la sécheresse, l’année 2011 aura été globalement bonne, voire très bonne pour les céréaliers et les éleveurs de ma région – les témoignages que j’ai recueillis lors des comices agricoles en attestent.

Vous ne serez pas surpris qu’à la suite de Mme Dalloz, j’évoque à mon tour le PMBE. Dans ma région, on enregistre à peu près une installation pour un départ. Le nombre de dossiers est donc très important, et seuls la moitié peuvent être étudiés. La chambre d’agriculture de mon département suggère donc d’instaurer un plafonnement pour répondre à l’ensemble des demandes. J’évoquerai pour ma part quelques dossiers de mise aux normes portés par de jeunes agriculteurs qui risquent de ne pas être retenus pour des questions de délais – difficiles à tenir dans le cadre d’une installation – et qui faisaient jusque-là l’objet d’une certaine tolérance de l’administration. Les installations sont primordiales pour nos régions : il faut continuer de les soutenir !

M. Jacques Remiller. S’agissant de la réduction du coût du travail, je voudrais, au nom de la filière fruits et légumes, vous remercier, monsieur le ministre, pour avoir été à notre écoute et saluer le travail accompli par notre collègue Bernard Reynès.

Je vous poserai deux questions complémentaires : quelles autres mesures prenez-vous, en particulier pour aider les arboriculteurs à lutter contre la sharka ? Quelles informations pouvez-vous nous donner sur la répartition des 210 millions d’euros entre les différentes filières agricoles ?

(M. Yves Censi, vice-président de la Commission des finances, remplace M. Charles de Courson.)

Mme Sylvia Pinel. Insensible à l’effondrement des prix, la grande distribution continue de réaliser des marges très confortables – entre 30 % et 50 % – sur le dos des agriculteurs. Dès lors, ne faudrait-il pas limiter le pouvoir des grands intermédiaires et des distributeurs face aux producteurs en réformant les conditions des marchés français et du rôle des intermédiaires, en instaurant un contrôle des marges contrôlé chaque année par le Parlement et en mettant en place une taxation spécifique sur les surprofits de certaines entreprises, qui abusent de leur position aux dépens des producteurs et des consommateurs ?

Vous avez par ailleurs annoncé le 7 septembre un plan d’aide de 25 millions d’euros pour les producteurs de fruits et légumes, qui se trouvent confrontés à une grave crise. Si l’on peut saluer l’initiative, ce plan demeure insuffisant : tout d’abord, il pèse peu face aux pertes réelles des producteurs ; ensuite, il est très partiel puisque les aides d’urgence ne concernent que les exploitations spécialisées pour au moins 50 % dans la pêche-nectarine, le concombre ou la tomate. Pourquoi écarter les exploitations spécialisées dans la pomme, la prune ou le chasselas, nombreuses dans mon département du Tarn-et-Garonne, qui connaissent elles aussi de grandes difficultés ? Quelles solutions leur proposez-vous ?

Seule une vraie politique nationale de la gestion de l’eau permettrait d’apporter une solution durable aux crises successives de la sécheresse. Il y a urgence en matière d’irrigation, où les agriculteurs attendent du concret. Lors de sa visite à Lauzerte en mars dernier, où vous l’accompagniez, le Président de la République s’est engagé sur le sujet. Où en est-on ?

Enfin, quelle sera l’attitude de la France face au refus du Conseil européen de reconduire le programme européen d’aide aux plus démunis (PEAD)?

M. Philippe Armand Martin. La diminution du nombre des agriculteurs, que l’on explique par une urbanisation accrue et une crise des vocations, trouve aussi son origine dans la difficulté des jeunes à accéder à la reprise des exploitations familiales. Dans une situation budgétaire contrainte, vous avez su inscrire 167 millions d’euros au budget, lesquels seront complétés par des avantages fiscaux et des crédits européens. Des efforts supplémentaires doivent néanmoins être entrepris si nous ne voulons pas que la désertification de nos campagnes s’amplifie.

J’insiste plus particulièrement sur les mesures en faveur de la transmission des exploitations agricoles et viticoles. Il s’agit là d’un véritable enjeu pour nos campagnes. Pour prendre un exemple, le modèle champenois – qui repose essentiellement sur des exploitations familiales, où le vigneron est à la fois l’exploitant et le propriétaire du foncier – est aujourd’hui en recul, pour de multiples raisons. Dans ce contexte, l’installation de jeunes vignerons dans notre région se heurte à des difficultés certaines. Aussi vous demanderai-je de nous préciser les avantages fiscaux et les crédits européens qui seront mis en œuvre pour favoriser l’installation des jeunes agriculteurs et viticulteurs. Si le foncier a une certaine valeur ; la libéralisation des droits de plantation aboutira à un effondrement, non seulement de celle-ci, mais aussi du produit. Quelles avancées avez-vous obtenues ces derniers jours de vos homologues européens sur le dossier de la régulation des droits de plantation ?

Je vous félicite enfin pour la mesure sur le coût du travail agricole. Sur le fond, c’est une bonne décision, même si je regrette que certaines exploitations n’en bénéficient pas, tout en payant la taxe.

M. Michel Grall. Depuis 2008, une violente crise frappe le monde ostréicole. Elle se manifeste par des taux de mortalité très élevés des naissains – jusqu’à 90 %. Vous avez toujours été aux côtés de la filière ostréicole, et je vous remercie d’avoir su mobiliser les aides de l’État à travers des aides directes, des allégements de charges, ou encore l’exonération des redevances d’occupation du domaine public maritime.

Dans le budget de 2012, ce sont 2 millions d’euros qui sont prévus pour le programme de recherche relatif à la sélection génétique des huîtres. Ce programme en cours vise à identifier des souches résistantes aux agents pathogènes. Il est accompagné de travaux sur les pratiques culturales et le lien entre qualité de l’eau et comportement de l’huître. Pouvez-vous nous éclairer sur l’état d’avancement de ces recherches sur la sélection génétique ?

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Permettez-moi de revenir sur la contribution supplémentaire annuelle de 2 euros à l’hectare dont les communes devront s’acquitter pour participer aux frais de garderie de l’ONF. Cette taxe aura pour effet d’augmenter les déficits de la gestion forestière des forêts, en particulier des forêts de montagne, c’est-à-dire celles qui sont les moins productives. Or compte tenu des difficultés liées aux contraintes physiques et au relief, les coûts d’exploitation des forêts en zone de montagne sont supérieurs à ceux constatés en plaine.

Les communes de montagne en régime forestier seront-elles taxées de la même manière que les autres, ou prévoyez-vous une modulation ? Ne faudrait-il pas, au contraire, mettre en place des aides pour diminuer ces coûts d’exploitation, par exemple en favorisant la desserte forestière ?

Ma deuxième série de questions concerne les jeunes agriculteurs. On nous explique en page 34 du « bleu » budgétaire de 2012 que 250 000 exploitants ont bénéficié de la DJA (dotation d’installation aux jeunes agriculteurs) depuis 1973, phrase qui figure également à la page 27 du « bleu » de 2008. En cinq ans, il n’y aurait donc eu aucune évolution ? Que signifie une telle présentation ? Seules 13 300 installations nouvelles ont été enregistrées en 2009, soit une baisse de 17 % par rapport à 2008. Quelles mesures spécifiques comptez-vous prendre en faveur de l’installation des jeunes ?

S’agissant enfin de l’agriculture de montagne, le montant des aides spécifiques à la mécanisation reste modeste, alors que les besoins des exploitants en montagne sont réels. Quelles mesures prendrez-vous pour leur permettre d’y recourir, comme ils le souhaitent, plusieurs fois au cours d’une même période quinquennale, tout en étant éligibles tous les dix ans au renouvellement de leur parc de matériel ?

M. Joseph Bossé. Une fois encore, l’agriculture française a été durement frappée par la sécheresse au printemps dernier. Des mesures exceptionnelles ont été prises pour venir en aide aux exploitations sinistrées. Dans le cadre du programme 154 – « Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires » – l’action 12 regroupe les soutiens financiers prévus pour accompagner les exploitations touchées par les crises ou les calamités agricoles.

Avec les aléas du changement climatique, les épisodes de sécheresse sont devenus récurrents. Il est donc préférable d’adapter notre agriculture, voire d’anticiper ces situations.

Nous devons rendre notre agriculture plus compétitive et lui permettre de relever les défis de demain que sont notamment la sécurité alimentaire, la sécurité de l’approvisionnement, la protection de l’environnement et les mutations démographiques.

Au printemps dernier, 58 départements – dont le Maine-et-Loire – ont fait l’objet de mesures restrictives limitant l’usage de l’eau, qui ont impacté durablement les cultures fourragères.

Le stockage des eaux hivernales apparaît comme une solution adaptée pour pallier les problèmes d’approvisionnement en eau, maintenir le niveau des nappes phréatiques et assurer l’irrigation des cultures en période de sécheresse. Le 9 juin dernier, le Président de la République, en déplacement en Charente, a annoncé la mise en place d’une politique de stockage de l’eau, par le biais de la création ou du rétablissement d’ouvrages de gestion de l’eau sur cinq ans, afin de prévenir les prochaines sécheresses. Où en est ce projet ?

Par ailleurs, le plan d’action pour la filière fruits et légumes que vous avez présenté le 7 septembre ne concerne que les pêches et les nectarines. Proposerez-vous des mesures pour soutenir les autres filières maraîchères impactées par le manque d’eau ?

M. Jean-Marie Morisset. La France a connu en début d’année des températures élevées et des déficits de précipitations importants. Cette situation n’a pas été sans conséquence sur la gestion des exploitations, tout particulièrement pour les éleveurs. Une réponse conjoncturelle lui a été apportée avec un plan de soutien exceptionnel, de même qu’une réponse européenne dans le cadre du bilan de santé de la PAC. Une réponse structurelle est par ailleurs prévue, avec la mise en place de plans de développement.

Nous devons cependant préparer l’avenir et anticiper le risque de sécheresses récurrentes pour faire face au réchauffement climatique. Parmi les orientations prioritaires figure le développement des investissements en matière de retenues d’eau et de retenues collinaires. Stocker l’eau lorsqu’elle tombe en hiver pour pouvoir l’utiliser en été en cas de besoin paraît de bon sens. Un plan d’investissement et de création de retenues a été annoncé. Où en est-on ? Quelles seront les lignes budgétaires sollicitées ? Est-il prévu une contractualisation avec les collectivités locales ?

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Je sais vos contraintes, vos efforts et vos grandes qualités, monsieur le ministre ; mais je déplore un budget en stagnation, voire en baisse comme l’ont relevé les rapporteurs Nicolas Forissier et Philippe Vigier.

En ce qui concerne la PHAE (prime herbagère agroenvironnementale) et le renouvellement ou la prolongation des contrats sortants de 2010, 2011 et 2012, quid des nouveaux installés en 2012 ?

S’agissant des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), le classement de certaines zones à plus fort handicap n’entraînera t-il pas – à budget constant – une baisse pour les autres zones ?

D’autre part, pourquoi une baisse du budget de l’assurance récolte ?

Quelles sont les recettes attendues de la taxe sur les terrains agricoles ? Quelle utilisation en ferez-vous, notamment pour l’installation ?

Permettez-moi une observation sur l’inadaptation de la réponse des pouvoirs publics à la sécheresse. On a connu un feuilleton inacceptable sur le transport SNCF, totalement inadapté, et sur le transport militaire, avec des porte-chars chargés de huit boules ! J’ai bien noté que vous aviez débloqué 100 millions d’euros, et que vous attendiez début 2012 pour débloquer le reliquat. C’est tard : je crains qu’un certain nombre d’exploitations ne puissent attendre. Des demandes avaient été faites sur le soutien à l’année blanche, et une solidarité exigée entre les différentes régions agricoles. Les prêts bonifiés ne sont plus une réponse adaptée. Je souhaite donc qu’un effort supplémentaire soit réalisé dès à présent.

Le Président de la République avait parlé de réserves collinaires. C’est un processus délicat compte tenu des obligations réglementaires. Nous essayerons de travailler à faire adapter cette réglementation dans le cadre de la mission sur les problèmes liés aux normes en milieu rural qui m’a été confiée.

M. Bruno Le Maire, ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. S’agissant de la pêche, monsieur Guédon, ma priorité est de financer le plan sur les navires du futur. Cela nous permettra d’avoir des bateaux qui consomment moins de carburant, sachant que le coût de celui-ci représente aujourd’hui près de 40 % du coût final du poisson pêché, ce qui est très excessif, et d’améliorer le confort et la sécurité des marins – tous ceux qui ont participé un jour à une campagne de pêche savent à quel point leurs conditions de vie sont difficiles, voire dangereuses.

Ce sont 20 millions d’euros du grand emprunt qui sont consacrés à ce projet : c’est un signe de notre volonté de continuer à développer une flottille plus performante et plus sûre.

La consommation de poisson augmente. Si c’est heureux pour la qualité de notre alimentation, je ne me résigne pas à ce que 80 % du poisson consommé en France soient importés. La solution réside dans le maintien d’une flotte de pêche performante et dans le développement de l’aquaculture dans des conditions plus respectueuses de l’environnement qu’elles ne le sont dans certains pays asiatiques. On rejoint ici la question du développement de nos propres filières.

Nous avons lancé avec l’INRA des programmes de développement de l’aquaculture, avec une consommation de farines de poisson bien moindre que ce qui se pratique dans d’autres pays. Tout cela est très prometteur et mérite d’être développé. Je recommande à cet égard à tous les amoureux du Pays basque la visite de la station de l’INRA à Saint-Pée-sur-Nivelle, qui a développé un programme très intéressant sur l’engraissement des salmonidés.

Sur la politique commune de la pêche, je vous confirme que je ne suis pas d’accord avec les premières orientations fixées par Mme Damanaki : certaines sont pour nous de vraies lignes rouges. Je suis ainsi fermement opposé à l’idée de quotas individuels transférables, qui marqueraient une victoire de la pêche industrielle sur la pêche artisanale. Les pêcheurs artisans vendraient en effet leurs quotas aux industriels, et on aboutirait à une concentration de la pêche très éloignée du modèle français. Je suis également opposé à l’idée d’arriver à zéro rejet dans des délais aussi réduits que ceux indiqués par la Commission : les contraintes techniques et matérielles ne nous le permettront pas.

Les pêcheurs font de leur mieux. Ils ont fait des efforts sur la sélection et la limitation des rejets, mais on ne peut pas leur demander l’impossible !

En ce qui concerne le rendement maximum durable, écoutons la voix des pêcheurs et des scientifiques, et pas seulement celle de personnes qui n’ont pas nécessairement compétence pour le définir ! Bref, veillons à ne pas céder à l’idéologie en matière de pêche européenne.

Si nous voulons vraiment que la pêche soit compatible avec le reste de l’environnement, nous devons aussi tenir compte des contraintes matérielles et économiques des pêcheurs. Sinon, nous tuerons l’ensemble des activités de pêche en Europe, sans pour autant avancer sur la préservation de la ressource.

Je suis sensible à votre compliment, monsieur Peiro. Je ne sais qui défendra le budget de l’agriculture l’an prochain, mais je souhaite qu’il soit l’occasion de dépasser les clivages partisans : sauver et renforcer notre agriculture est une priorité stratégique nationale. La Chine, l’Inde, le Brésil, l’Argentine, les États-Unis l’ont compris, et la France également. Malheureusement, il subsiste encore en Europe un courant pour qui se fournir en produits agricoles auprès de pays qui produisent moins cher est la meilleure solution. C’est à mon avis une erreur historique.

Beaucoup d’entre vous ont évoqué l’évolution de la sociologie agricole. C’est un bouleversement considérable pour notre nation que de voir la population active agricole se réduire à 987 000 actifs, alors qu’elle représentait encore la majorité de la population au début du vingtième siècle. Cela ne signifie pas que l’agriculture soit sur la voie du déclin. Jamais nous n’avons eu autant besoin des agriculteurs, jamais nous n’avons eu autant besoin de productions agricoles. Nous ne savons pas comment nourrir la planète : qui nous dit que dans dix, quinze ou vingt ans, nous ne serons pas dans la situation de ne plus pouvoir nourrir notre population, faute d’avoir pris les bonnes décisions ?

Je rappelle que les deux seuls secteurs dont la balance commerciale est excédentaire sont l’aéronautique et l’agroalimentaire. Dans un monde où il faut prendre des parts de marché et profiter de la croissance des pays émergents, renoncer à l’agriculture serait une hérésie, et je me réjouis qu’il existe un consensus à cet égard.

Le rajeunissement et la féminisation de la population agricole constituent par ailleurs des signes positifs, tout comme la forte augmentation du niveau de qualification moyen des agriculteurs. Ce sont autant de signes d’espoir pour la profession agricole. Bref, l’agriculture est un secteur d’avenir !

Je tiens à redire à quel point je suis opposé à un modèle agricole qui aboutirait à la concentration dans un nombre limité de points du territoire d’exploitations de taille industrielle. Nous devons conserver la diversité de nos exploitations et leur présence partout sur le territoire. Cela suppose le maintien d’un certain nombre d’aides comme la PHAE ou les ICHN.

J’insiste sur un dernier élément : nous sommes tous responsables. Si nous n’ouvrons pas un vrai débat sur la question de l’utilisation du foncier en France, nous créerons des difficultés majeures à tous les agriculteurs, notamment aux jeunes qui s’installent.

J’ai mis en place une taxe, ainsi qu’un observatoire des terres agricoles. Nous avons commencé à ouvrir le débat. La question de l’utilisation des terres agricoles est une question majeure, qui se pose à l’échelle planétaire quand les Chinois achètent des dizaines de milliers d’hectares de terres agricoles en Afrique, mais aussi chez nous, quand nous autorisons la construction de lotissements sur les terres les plus fertiles ou l’implantation de grandes surfaces sur les terres arables les meilleures, parce que nous estimons que la terre agricole ne vaut rien.

J’en viens à la PAC et à la question des quotas. Si j’ai accepté de renoncer aux quotas laitiers, c’est pour deux raisons très simples.

La première est qu’il est difficile, voire impossible, d’expliquer à de petits pays comme le Danemark ou les Pays-Bas, qui sont d’importants producteurs de lait, que la quantité de lait qu’ils ont le droit de produire dépend de leur population. Cela reviendrait à dire à la Suède qu’elle ne peut produire que peu de voitures parce que sa population est peu nombreuse ! Un pays produit s’il est capable de produire, de vendre et de rémunérer ses producteurs. C’est une question de justice européenne.

La deuxième raison est stratégique. Renoncer aux quotas laitiers en faveur de la régulation du marché est l’un des points qui m’ont permis d’obtenir un accord avec l’Allemagne sur le maintien du budget de la PAC. J’ai estimé – et je l’assume – que c’était là une priorité absolue. Faut-il rappeler qu’à mon arrivée, la proposition de la Commission était de baisser ce budget de 30 % à 40 % ? Pendant toute l’année 2009-2010, mon obsession a été de remporter cette victoire. Pour cela, il a fallu faire des concessions.

Enfin, la régulation agricole figure dans le projet de PAC 2014-2020. Introduite à la demande de la France, elle constitue un renversement complet de perspective. Ce que propose la Commission reste à ce jour insuffisant. Je souhaite un renforcement des outils d’intervention en cas de crise. Je demande aussi une nouvelle fois le maintien des droits de plantation, ainsi que le maintien des quotas sucriers jusqu’en 2020.

S’agissant de la tabaculture, je rappelle que neuf millions d’euros ont été dégagés pour l’aide à la qualité du tabac. Ce n’est pas un dossier facile car les aides à l’hectare ont été très importantes. Je crois néanmoins essentiel de se battre pour maintenir une activité tabacole dans notre pays. Là encore, ne cédons pas à l’idéologie. Ce serait un mauvais calcul que de condamner la culture du tabac au motif que celui-ci est nocif si on devait dans le même temps en importer et, partant, laisser détruire des emplois dans le secteur en France.

En ce qui concerne la retraite obligatoire des agriculteurs, on peut toujours dire qu’il faudrait faire plus. Il n’en reste pas moins que nous avons au cours de la législature consacré 130 millions d’euros à la revalorisation des petites retraites.

Monsieur Dionis du Séjour, je sais et je salue l’énergie avec laquelle vous avez défendu l’amélioration de la compétitivité de l’agriculture française par la réduction du coût du travail. Je n’ignore pas que le Lot-et-Garonne –Agen m’est chère à moi aussi – fait partie des régions les plus concernées par ce sujet. Pour les producteurs de noisettes, de pruneaux, de pêches nectarines, la réduction du coût du travail est vitale. Nous allons y procéder. Mais il convient de s’assurer auprès de la Commission européenne de l’eurocompatibilité de la mesure. Bernard Reynès s’est déjà rendu, avec plusieurs d’entre vous, à Bruxelles pour avoir un premier éclairage sur le sujet. Je formulerai de nouveau la demande à la Commission et j’ai bon espoir que nous obtiendrons son feu vert, à tout le moins un nihil obstat. En aucun cas, nous ne prendrons de mesure susceptible d’être ultérieurement sanctionnée. Je le dis d’autant plus librement que je suis le ministre de l’agriculture qui a « hérité » du plus d’aides illégales octroyées par ses prédécesseurs. Je ne suivrai pas cette voie. Accorder aux paysans français des aides illégales, c’est leur mentir et les placer dans des difficultés insurmontables lorsque, quelques années plus tard, elles doivent être récupérées.

Pour le reste, je refuse catégoriquement d’engager l’agriculture française dans la voie du dumping social et d’une réduction des coûts qui aboutirait à payer les salariés à un tarif tout simplement indigne. Il faut gagner la bataille de la compétitivité. Cela exige un effort sur le coût du travail. Mais, sur ce point, je rejoins totalement votre analyse, monsieur Gaubert : nous n’avons pas à nous aligner sur des pratiques sociales attentatoires à l’honneur même des salariés. Deux autres batailles essentielles doivent aussi être livrées, que nous sommes d’ailleurs en train de gagner. Celle tout d’abord de la qualité, de la diversité et de la valorisation de nos produits. Nos viticulteurs et nos éleveurs l’ont engagée – la filière des agneaux de France s’est ainsi relevée grâce à une stratégie de qualité et de différenciation. Celle ensuite de l’exportation, où il nous faut gagner des parts de marché.

S’agissant des retenues collinaires, sujet que plusieurs d’entre vous ont abordé, il faut savoir ce que l’on veut. Soit on cède à l’idéologie de la décroissance totale en imposant toujours davantage de normes et de règles, à notre agriculture comme à notre industrie d’ailleurs, beaucoup plus strictes que celles en vigueur chez nos voisins européens, et il faut alors assumer la mort de nos entreprises industrielles, de nos exploitations agricoles et des paysans qui ne pourront pas lutter à armes égales. Je suis, pour ma part, totalement opposé à ce qu’on continue d’édicter des règles aussi strictes et d’accorder des droits de recours aussi larges alors qu’on a besoin des retenues collinaires. Nous nous apprêtons à simplifier les dispositifs : chacun prendra ses responsabilités au moment du vote. Si on entend maintenir l’agriculture, notamment dans le Sud, il faut des retenues et une simplification administrative massive s’impose – c’est la position que je défends. Si on refuse les retenues, au motif qu’elles peuvent poser des problèmes dans la gestion de l’eau, il faut accepter que les exploitations mettent la clé sous la porte. Il n’y a pas d’autre alternative. Et de grâce, ne laissons pas croire qu’on pourrait avoir le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la crémière en sus ! On ne pourra pas maintenir l’agriculture avec des règles administratives ultra-compliquées et une protection de l’eau dix fois plus poussée que dans les autres pays européens. (Plusieurs commissaires du groupe de l’UMP applaudissent). Nous engageons 120 millions d’euros sur cinq ans pour ces retenues collinaires, dont 15 millions au titre du Fonds européen agricole pour le développement rural – FEADER – et 75 millions au titre des agences de l’eau. La bataille ne se jouera donc pas sur les moyens financiers mais bien sur la simplification administrative.

Monsieur Chassaigne, vous dites qu’on a renoncé face au libéralisme. Je rêve que vous m’accompagniez un jour à Berlin. Vous y constateriez que je suis considéré par nos amis allemands comme un dangereux gauchiste souhaitant faire intervenir l’État partout et instaurer de la régulation là où il faudrait laisser jouer le marché, et que, pour eux, la France est décidément incorrigible. Ce que vous qualifiez de libéralisme est perçu outre-Rhin comme une intolérable régulation des marchés. Il faut que nous parvenions à nous accorder avec l’Allemagne, notre principal partenaire, sur ce que l’on entend par libéralisation, régulation et organisation du marché. Pour ma part, je suis favorable à une économie de marché régulée. Cela signifie lutter contre la spéculation financière – inacceptable – sur les marchés agricoles, et c’est ce que nous faisons à l’échelle du G 20. C’est aussi conserver des capacités d’intervention en cas de crise, y compris économique. Il faut que la Commission européenne puisse intervenir sur les marchés pour faire remonter les prix et éviter que certains paysans ne se retrouvent en très grande difficulté. Ce dernier point reste difficile à faire valoir auprès de nos partenaires allemands. C’est enfin s’assurer du respect du principe de réciprocité. Les normes que nous imposons aux paysans européens, qu’il s’agisse d’environnement, de bien-être animal ou de droits sociaux, doivent être appliquées de la même façon par les Argentins, les Brésiliens, les Chinois, les Indiens et, bien sûr, les Américains. Si tel n’est pas le cas, des tarifs douaniers doivent compenser la différence. Voilà la position qui me fait passer pour un gauchiste auprès de 26 États sur 27 dans l’Union, et disant cela j’exagère à peine !

Monsieur Lecou, je vous redis mon opposition totale à la libéralisation des droits de plantation. Cette mesure a été décidée fin 2008 au niveau européen dans un contexte particulier – c’est d’ailleurs pourquoi je ne jette la pierre à personne – mais ce serait une erreur pour tous nos viticulteurs. Dans votre région où ceux-ci ont fait des efforts considérables d’arrachage de plants et de montée en gamme des vins, on ne peut décemment, après dix années d’efforts en matière de recherche de la qualité et de structuration de l’offre, leur expliquer qu’on va laisser « pisser la vigne » partout en France et en Europe.

Je vous répondrai tout à l’heure sur le sujet de la conchyliculture, abordé par plusieurs orateurs.

Monsieur Gaubert, comme je l’ai déjà dit, je partage votre analyse sur le coût du travail. J’ai entamé des discussions avec nos partenaires allemands sur le sujet : je serai demain à Berlin, comme presque chaque semaine en ce moment. Je m’entretiendrai avec mon homologue allemande et j’interviendrai devant la Konrad Adenauer Stiftung pour expliquer qu’il n’y aura d’entente possible entre nos deux pays que si chacun fait un pas vers l’autre. Ma conviction profonde est qu’aucun modèle national ne peut à lui seul convenir dans une perspective européenne et que c’est de l’addition équilibrée des avantages respectifs des différents modèles nationaux que naîtra le modèle économique européen de demain. Pendant des années, la France a voulu imposer le sien à l’Europe. Elle n’y est pas parvenue. Certaines de nos idées ont certes progressé, mais d’autres ont été rejetées. Ce n’est pas pour adopter maintenant le modèle allemand, qui a certes ses vertus mais aussi ses défauts. L’Allemagne a certes mieux réussi que la France dans la mondialisation, a gagné en compétitivité et accru ses parts de marché à l’exportation, mais elle compte aussi beaucoup plus de travailleurs pauvres. Les conditions sociales y sont plus difficiles pour un certain nombre et il n’y existe pas de salaire minimum. Notre pays doit faire un gros effort pour renforcer sa compétitivité, exporter davantage et réussir la mondialisation. Il en a les moyens. Pour autant, ce que nous avons réussi à mettre en place en matière de salaire minimum et de protection des salariés mérite d’être défendu. C’est sur cette voie étroite qu’il faut trouver un chemin. Je ne vous cache pas que c’est difficile aujourd’hui car la crise conduit au raidissement des positions de chacun et à un repli sur soi qui n’est bien évidemment pas porteur pour l’Europe.

Des propositions de la Commission, je retiens trois points clés. Je mets de côté le budget global, si ce n’est pour dire qu’il faudra se battre sans relâche pour que nul ne réintroduise de possibilité de baisse de ce budget, qui fera inévitablement l’objet de convoitises.

Le verdissement des aides tout d’abord. Il est excessif que 30 % du total de ces aides en dépendent. Il faut revenir à un taux plus raisonnable : sinon nos agriculteurs n’y arriveront pas. Deuxième difficulté : l’attribution de ces aides est subordonnée au respect simultané de trois critères, chacun extrêmement compliqué. En résultera une ingénierie technocratique incompréhensible pour les paysans et ingérable pour les administrations nationales. Au lieu de simplifier, on va complexifier. S’il y a bien un point sur lequel les 27 sont d’accord, c’est qu’il reste beaucoup à faire pour simplifier ce verdissement !

La convergence ensuite, avec tout d’abord la convergence européenne. La France s’est la première déclarée prête à renoncer aux références historiques pour parvenir à une répartition plus équitable des aides européennes. Il est en effet difficilement imaginable que l’aide moyenne à l’hectare puisse demeurer de 350 euros en France contre seulement 110 en Hongrie. Nous sommes en revanche totalement opposés à un montant unique – flat rate – d’aide à l’hectare pour l’ensemble des pays. Ce serait profondément injuste : en effet, un euro dans l’agriculture ne représente pas la même chose en France qu’en Pologne ou en Hongrie. Rapprochement oui, égalisation non. Il y a ensuite la convergence des aides entre les différentes filières à l’échelle nationale. Je suis prêt à l’engager mais le délai donné de cinq ans n’est pas tenable. Il faut se donner plus de temps. À vouloir aller trop vite, on risque de finir dans le fossé !

Enfin, dernier point : la régulation. Il n’a pas été simple d’inclure ce sujet dans la négociation. Nous avons réussi, mais les instruments proposés demeurent très insuffisants.

Monsieur Rochebloine, votre question sur l’enseignement agricole rejoint celle de M. Decool. S’il y a bien 280 équivalents temps plein supprimés, les réformes engagées, notamment celle du baccalauréat professionnel, doivent permettre d’absorber cette diminution. L’enseignement agricole, public et privé, demeure une priorité. Dans les réductions d’effectifs que mon ministère, comme tous les autres, a dû programmer, j’ai veillé à le préserver. Comme vous l’avez dit tous deux, les maisons familiales rurales – j’en ai encore visité une il y a peu – constituent un remarquable outil : l’alternance y fonctionne très bien, avec 85 % des élèves trouvant un emploi à la sortie. C’est un modèle à suivre.

Madame Massat, si on demande une cotisation de deux euros à l’hectare aux communes forestières, c’est dans l’objectif d’exploiter davantage la ressource bois. Pour cela, les communes forestières, comme l’État, doivent se mobiliser. Je comprends bien que dans votre département, l’utilisation du bois est moins rentable que dans d’autres, mais toutes les communes forestières doivent faire un effort. L’État ne s’en dispense pas lui-même qui alloue 46 millions d’euros à l’Office national des forêts. Nos forêts, qui occupent un tiers du territoire national, sont sous-utilisées alors même qu’il existe des opportunités exceptionnelles d’utilisation de cette matière première, pour la construction comme pour le chauffage. Autant faire appel à nos propres ressources plutôt que de continuer comme aujourd’hui à importer massivement du bois !

S’agissant du « bio », nous avons augmenté le plafond de 2 000 à 2 500 euros dans la loi de finances rectificative, pour répondre aux attentes et permettre aux exploitations « bio », y compris les plus petites d’entre elles, de continuer de bénéficier de ce soutien.

Vous regrettez qu’il n’y ait pas de soutien financier pour les circuits courts. La meilleure manière d’aider leur développement est de permettre aux collectivités locales de s’exonérer de la contrainte de prix dans les appels d’offres. Nous avons réussi à l’obtenir après un an de négociations avec la DGCCRF et le commissaire européen à la concurrence, M. Almunia, qu’il a fallu convaincre de la priorité à donner à l’approvisionnement de proximité. Le niveau a été fixé à 10 %. Je souhaiterais, pour ma part, qu’on aille beaucoup plus loin dans les années à venir et que cet approvisionnement devienne la règle, alors qu’aujourd’hui les produits qui composent les assiettes de nos enfants ont en moyenne parcouru deux mille kilomètres, ce qui est absurde.

Monsieur de Courson, j’ai déjà répondu sur le sujet de l’eurocompatibilité. Je n’ai pas le feu vert définitif mais Bernard Reynès a beaucoup fait avancer les choses en se rendant avec vous à Bruxelles. Nous allons poursuivre le travail avec la Commission. Les garde-fous que nous avons mis en place devraient la rassurer. S’agissant de la défiscalisation partielle des biocarburants, j’ai demandé au ministre des finances le renouvellement des agréments. J’attends sa réponse.

Madame Le Loch, je redis que l’une des priorités pour la pêche est le renouvellement de la flotille. Vingt millions d’euros y sont réservés et un appel à projets a été lancé pour des bateaux de nouvelle génération. Nous espérons que les premiers projets de modernisation pourront commencer à partir de mars prochain. Je ne reviens pas sur la réforme de la politique commune de la pêche – PCP. La discussion est très difficile. Je ne suis pas d’accord avec la philosophie globale de cette réforme. On donne en effet le sentiment d’avoir renoncé à une pêche européenne. Or, ma priorité va au maintien et même au développement des activités de pêche en France comme dans les autres pays européens, de façon que l’approvisionnement soit d’abord national. Va-t-on une nouvelle fois transformer la France et l’Europe en parcs d’attractions pendant qu’on importera massivement le poisson en provenance de pays dont on ne contrôlera ni les capacités ni les modalités de capture ? Si tel devait être le cas, personne ne serait gagnant.

Monsieur Favennec, pour ce qui est du calcul des retraites agricoles sur les vingt-cinq meilleures années, un rapport est en préparation sur le sujet. J’en attends les conclusions avant de me prononcer. Il était en effet apparu lors du débat sur les retraites que cela pouvait présenter des avantages, mais aussi de très lourds inconvénients pour une partie du monde agricole.

Madame Dalloz, je suis prêt à simplifier les règles et à raccourcir les délais d’instruction des demandes d’aide à la modernisation des bâtiments agricoles. Dès lors que, de toute façon, nous n’avons plus les moyens budgétaires d’augmenter ces aides – nous les maintenons seulement –, c’est la simplification des procédures qui entretiendra la dynamique. C’est vrai pour les bâtiments d’élevage comme pour les retenues collinaires ou le verdissement. Simplifier massivement nombre des règles administratives actuellement en vigueur dans l’agriculture ferait immédiatement gagner en compétitivité, sans que cela ne coûte un euro au budget de l’État, donc aux contribuables.

Madame Marcel, nous avons maintenu une enveloppe de 9 millions d’euros en 2013 pour le plan de performance énergétique. Nous avons aligné le tarif de rachat du biogaz sur celui pratiqué en Allemagne. Cela devrait favoriser le développement de la méthanisation dans notre pays, où l’on dénombre à peine une vingtaine d’exploitations la pratiquant, contre plus de 4 000 outre-Rhin. C’est une source de revenu direct pour les agriculteurs en même temps que cela contribue à la préservation de l’environnement.

Monsieur Binetruy, l’installation des jeunes agriculteurs demeure une priorité pour le Gouvernement. L’intégralité de l’enveloppe a été maintenue, soit 350 millions d’euros si on additionne crédits européens et crédits nationaux. Au-delà, comme chacun d’entre nous peut le constater sur le terrain, la clé de l’installation des jeunes, c’est le prix du foncier. L’action des maires et des conseillers généraux pour que le foncier demeure accessible est donc de la plus grande importance.

Monsieur Remiller, je ne reviens pas sur le coût du travail.

S’agissant de la sharka, voilà près dix ans que l’on cherchait à lancer un plan national de lutte contre ce virus. Un accord a pu être trouvé au printemps dernier et un plan enfin lancé, financé à 65 % par l’État et 35 % par les professionnels.

Madame Pinel, vous avez évoqué les marges de la grande distribution. Je souhaite que le nouvel Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires puisse faire la transparence totale sur les marges dans toutes les filières agricoles. C’est le meilleur moyen de restaurer davantage d’équité. Les grands distributeurs ont par ailleurs signé un accord sur la répercussion de l’augmentation des coûts de production. Je les ai rappelés à l’ordre il y a quelques jours sur le sujet. Cet accord doit maintenant être respecté.

Vous avez également appelé notre attention sur la menace planant sur le programme européen d’aide aux plus démunis. Je me bats pour que soit maintenue l’intégralité des crédits de ce programme, ou du moins la plus large partie, en 2012 et 2013. Mais, comme le Premier ministre l’a déjà indiqué, si d’aventure nous n’obtenions pas gain de cause, l’État français compenserait à l’euro près les crédits manquants pour les associations comme les Restos du cœur ou les banques alimentaires, ce qui ferait 72 millions d’euros à trouver. La suppression de ces crédits européens constituerait une défaite politique pour l’Europe tout entière. D’une part, il serait incohérent de charger la barque des budgets nationaux au moment où on demande aux États de faire des économies, et ce alors même que les sommes en question sont disponibles sur le budget européen. D’autre part, si la France peut parvenir à trouver une telle somme, il n’est pas certain que l’Espagne, par exemple, trouve, elle, les 105 millions qui lui seraient nécessaires. Soit on se moque de ce qui arrive dans chaque pays et on laisse faire, mais ce « chacun pour soi » n’est pas ma conception de l’Europe. Soit on se sent directement concernés par ce qui se passe en Espagne, en Italie, en Grèce ou en Allemagne, et solidaires avec l’ensemble des pays européens, et il serait alors plus sage de maintenir ces crédits.

Monsieur Philippe-Armand Martin, un mot sur le foncier. C’est une question prioritaire. La taxe mise en place devrait rapporter 2,5 millions d’euros dès la première année puis son produit monter progressivement en puissance.

La libéralisation des droits de plantation constituerait une faute politique majeure, tant pour la qualité des produits, notamment ceux issus de votre région, que pour notre capacité à exporter.

Monsieur Grall, je vais vous répondre un peu plus longuement sur la conchyliculture. Le sujet me tient en effet à cœur, parce que je le trouve emblématique du choix qui s’offre pour notre agriculture. On peut accepter de ne conserver que les très grandes exploitations, de production bovine, porcine, céréalière ou de fruits et légumes, et condamner toutes les exploitations plus petites ou spécifiques. Qu’on ne compte pas sur moi pour s’engager dans cette voie. On peut aussi se battre pour préserver chaque filière, même celles qui ne représentent pas beaucoup d’emplois parce qu’on considère que sont en jeu notre intérêt économique mais aussi l’identité de nos territoires. Si on fait ce choix-là, et vous aurez compris que c’est le mien, il faut dégager les moyens nécessaires pour la conchyliculture. Nous l’avons fait et je l’assume pleinement car je n’imagine pas la France sans la production des huîtres de Marennes Oléron, de l’étang de Thau et tant d’autres encore. Cela fait partie de notre culture, comme les parcs à huîtres font partie de nos paysages côtiers. Au motif qu’une maladie frappe les élevages, on ne va pas baisser les bras et se résigner à importer nos huîtres. Avec le maintien de cette activité, il en va aussi de la qualité de nos paysages et de toute une vie locale. Deux pistes ont été explorées. Celle de l’importation de naissains japonais a été abandonnée car, introduisant dans nos parcs de nouveaux agents pathogènes exotiques, elle créait plus de problèmes qu’elle n’en résolvait. La deuxième piste était celle d’une sélection génétique permettant d’obtenir des huîtres plus résistantes. Cela a permis de réduire la surmortalité des juvéniles de moins d’un an, de 10 % à 20 % dès la première année et sans doute de 50 % l’année prochaine. Il vaut donc la peine de poursuivre dans cette voie. Depuis 2008, le secteur de la conchyliculture a bénéficié de trois fois 40 millions d’euros sous forme d’exonérations ou d’allégements de charges et d’exonérations de redevance domaniale. Nous avons aidé le secteur à passer un cap difficile et une solution commence à se dessiner qui permettra de limiter les pertes économiques pour les conchyliculteurs.

Madame Robin-Rodrigo, je redis que la taxe forestière de deux euros l’hectare ne sera pas modulée, l’objectif étant de relancer l’exploitation, sous l’effort conjugué des communes forestières et de l’État.

Monsieur Bossé, je pense avoir déjà répondu sur l’irrigation et le stockage des eaux hivernales. Pour ce qui est de l’aide aux secteurs des fruits et légumes ayant beaucoup souffert, nous avons donné la priorité aux pêches nectarines, aux tomates et aux concombres. Il n’est pas exclu que l’aide puisse être étendue à d’autres productions mais pour l’heure, nous nous concentrons sur celles qui ont été les plus touchées par la crise.

Monsieur Morisset, j’ai déjà répondu sur les retenues collinaires.

Monsieur Pierre Morel-à-l’Huissier, je souhaite souligner l’effort considérable consenti pour maintenir l’intégralité des primes pour les éleveurs installés dans des zones difficiles ou qui s’engagent dans des modes de production plus respectueux de l’environnement : nous avons maintenu l’intégralité de la prime herbagère agro-environnementale et je vous confirme que les nouveaux contrats 2012 en bénéficieront également. Nous maintenons aussi l’intégralité de l’indemnité compensatrice de handicap naturel et l’intégralité de la prime à la vache allaitante.

Toutefois, comme je l’ai dit aux éleveurs, il n’y aura pas de mesure du type « année blanche ». Une telle mesure coûterait entre 500 à 700 millions au budget de l’État et ce serait de l’argent donné à fonds perdus. Cela a été fait pendant de très nombreuses années, sans que l’on pense ni aux exportations, ni à la restructuration de la filière, ni au GIE Export. J’ai choisi un autre cap, que j’assume : je maintiens l’intégralité des aides nationales et européennes spécifiques à la filière, l’intégralité des aides pour l’élevage en zone de montagne parce que je considère qu’il faut aider ces zones. Mais je me refuse aux aides de trésorerie, qui consistent à puiser dans le budget de l’État à fonds perdus sans que suive aucune restructuration de la filière. Je n’aide qu’en cas de crise grave, comme en 2009 ; pour le reste, je demande à la filière de se structurer.

Cette politique a commencé de porter ses fruits. Qu’est-ce qui a amélioré les revenus des producteurs depuis quelques mois sinon l’augmentation des prix, elle-même due à l’ouverture des marchés, que j’ai réussi à obtenir depuis plus d’un an, après des heures de discussion avec les responsables russes, turcs, kazakhs et de plusieurs pays d’Afrique du Nord ? C’est ce que demandent les éleveurs.

Puis, s’agissant de la trésorerie, je souhaite que les banques fassent davantage. Pourquoi l’État devrait-il prendre à sa charge tout problème de trésorerie, d’étalement ou de restructuration de la dette des éleveurs ? Il suffit ! Je réunirai prochainement les banques pour leur demander de participer à l’effort collectif. Je pense d’ailleurs que les éleveurs sont d’accord avec cette stratégie : ils ont compris que l’année blanche n’est pas la bonne solution et que les banques doivent jouer leur rôle.

Autre élément capital : la question des règles relatives au retournement des prairies et à la gestion des prairies permanentes. Plutôt que de verser des fonds publics sur les comptes de fonctionnement des exploitations, la meilleure aide, et la plus efficace, que l’État peut apporter aux éleveurs de votre région, c’est de simplifier les règles en vigueur, qui leur coûtent cher.

M. le président Serge Poignant. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour vos réponses précises à cette première série de questions. Elles traduisent votre engagement en faveur de notre agriculture et de notre pêche.

M. Yves Censi, vice-président de la Commission des finances. L’examen des crédits de la mission interministérielle de l’enseignement agricole aura lieu mercredi soir. Aussi vous poserai-je aujourd’hui deux questions à ce sujet. En premier lieu, le programme 143 avait suscité l’année dernière de nombreux débats relatifs aux défaillances de la coordination entre le ministère de l’agriculture et celui de l’Éducation nationale. Avez-vous pu l’améliorer ?

Par ailleurs, le financement des remplacements « temps plein » dans l’enseignement agricole privé pose problème, l’État ne les remboursant qu’au-delà du 90ème jour d’absence. La question suscite des tensions dans de nombreux établissements. Il faut améliorer le financement de ces remplacements en réduisant le délai de carence à une période raisonnable. J’aimerais, monsieur le ministre, une réponse précise à cette question.

M. Gérard Menuel. Monsieur le ministre, je salue votre engagement et votre action à la tête de ce ministère et je me félicite que dans ce budget contraint par la nécessaire maîtrise de la dépense publique, le choix fort ait été fait d’alléger, à hauteur de 210 millions d’euros, les charges pesant sur les salaires de l’effectif agricole permanent. Pour ce qui est toutefois du soutien à la filière des biocarburants, le projet de budget donne un signal négatif. Les crédits diminuent de plus de 10 % passant de 280 à 250 millions d’euros. Si cette baisse devait se poursuivre, la pérennisation de la filière pourrait être menacée. Qu’en est-il par ailleurs des agréments au-delà de 2013 ?

D’autre part, la fixation dans le projet de loi de finances de la taxe pour frais de chambre d’agriculture prévue par le code rural est une modalité devenue inadaptée. Ce dispositif, parce qu’il comporte un taux pivot et un taux maximal, ne favorise pas une gestion rationnelle et responsable des chambres d’agriculture, mon expérience d’ancien président de chambre me permet d’en témoigner. La plupart des chambres ne fixent pas le taux en fonction de leurs besoins ou de leurs programmes : elles choisissent d’office le taux maximal autorisé. De plus, parce que l’augmentation permise est calculée en pourcentage, les chambres qui ont été les moins vertueuses par le passé bénéficient de ressources fiscales plus importantes que leurs homologues. Quel est votre sentiment à ce sujet ?

Mme Marianne Dubois. La France, grâce à son climat, ses sols et ses hommes, a la chance extraordinaire d’avoir une agriculture très performante. Pourtant, l’excédent commercial agricole et agro-alimentaire diminue depuis trois ans. Cette perte de compétitivité s’explique par des distorsions de concurrence. Ainsi, l’Allemagne, qui est désormais notre principal concurrent, est très en avance sur nous dans le domaine des bioénergies et singulièrement de la méthanisation. Ce procédé y est très répandu et, semble-t-il, facile à mettre en œuvre – six mois suffisent à monter une unité de méthanisation. Ne devrions-nous pas favoriser cette filière ? Si vous en êtes d’accord, quelles mesures comptez-vous prendre pour que cette source d’énergie soit développée ?

Mme Corinne Erhel. Mes questions porteront en premier lieu sur l’évolution des financements alloués au programme national pour l’alimentation. Si l’axe « Mieux manger en situation précaire » voit ses crédits augmenter, d’autres actions subissent des baisses : moins 52 % pour l’axe « Prendre de bonnes habitudes alimentaires dans le cadre scolaire et périscolaire » ; moins 68 % pour l’axe « Mieux manger dans les établissements de santé » ; moins 49% pour l’axe « Améliorer la santé des seniors ». Cette baisse des crédits ne laisse pas d’inquiéter.

Dans un autre domaine, la crise de l’E. coli a eu de graves conséquences pour les légumiers français, bretons en particulier, et le scepticisme règne sur le montant réel de l’indemnisation qu’ils percevront. Dans ce contexte difficile et pour favoriser la compétitivité de ce secteur, il serait indispensable d’alimenter en gaz naturel les exploitations légumières non raccordées au réseau à ce jour ; quelle est votre position à ce sujet ? Du reste, sachant que les coûts énergétiques peuvent représenter jusqu’au tiers du coût de production des légumes, la hausse de 60 % en cinq ans du prix du gaz n’est pas le moindre des paradoxes. Quelles solutions préconisez-vous ?

M. Jean Proriol. Dans un budget général pour 2012 très contraint, le budget de l’agriculture doit beaucoup à l’engagement du Président de la République et aussi, monsieur le ministre, à votre implication personnelle en faveur de la sauvegarde de l’agriculture française, ce compris au niveau européen. Deux exceptions toutefois dans ce budget : l’enveloppe destinée aux bâtiments d’élevage est réduite, et les crédits d’accompagnement sont en forte baisse alors qu’il y a une grande diversité des porteurs de projets.

J’aimerais savoir quelle place peut encore espérer l’élevage en zone de montagne dans la réforme de la politique agricole commune.

Par ailleurs, l’élevage bovin a été durement frappé ces dernières années : chute des prix, mévente, décapitalisation des cheptels avec perte... Pourtant, on assiste au glissement des élevages de production laitière vers la production de viande bovine. C’est l’abandon d’une activité certes astreignante mais qui fournit des revenus mensuels. Qu’en pensez-vous ? Est-ce là une tendance affirmée ? Alors que de plus grandes exploitations se créent en Europe et en Afrique du Nord, l’exportation de viande bovine peut-elle être une perspective d’avenir ?

M. Didier Quentin. En ma qualité de député de Marennes-Oléron, je reviens sur la situation des conchyliculteurs, que la mortalité massive des naissains a plongé dans une crise sans précédent. Depuis 2008, le Gouvernement n’a pas ménagé ses efforts pour soutenir, la profession, mais le phénomène perdure. Aussi les ostréiculteurs demandent-ils la reconduction en 2012 de l’exonération des cotisations patronales et salariales de la mutualité sociale agricole et de l’Établissement national des invalides de la marine ; le remboursement des redevances domaniales ; la prise en charge des intérêts d’emprunts par le fonds d’allégement des charges ; le réaménagement des échéances des emprunts et l’extension du dispositif de prêts bonifiés.

Par ailleurs, le Fonds national de gestion des risques en agriculture a fixé les nouveaux taux de la contribution additionnelle applicable aux exploitations conchylicoles à un niveau tel que les cotisations d’assurance s’envolent, au point d’avoir triplé ces dernières semaines. Je vous serais reconnaissant de me faire savoir si vous envisagez de revoir ces taux. J’ajoute que la référence au chiffre d’affaires dans la fixation de ces taux provoque de fortes inégalités entre les allocataires d’indemnités pour calamités agricoles selon l’activité de l’entreprise. Une concertation devrait se tenir dans les plus brefs délais à ce sujet pour définir un mode de calcul spécifique à la profession.

Une situation exceptionnelle appelle des réponses exceptionnelles. Quelles mesures entendez-vous prendre, monsieur le ministre, en faveur des conchyliculteurs ?

M. Gérard Charasse. En dépit de votre écoute, réelle, monsieur le ministre, votre projet de budget suscite de multiples interrogations, notamment au regard de la situation très difficiles de nos éleveurs, déjà rappelée et que je constate dans l’Allier. Plus généralement, l’agriculture française est confrontée à un défi crucial : il lui faut assurer l’avenir et pour cela disposer d’une filière d’enseignement agricole utile aux élèves et à notre pays. Or le projet de budget prévoit la baisse des crédits alloués à l’enseignement supérieur à périmètre constant, et la suppression de 280 postes cette année, après que 145 l’ont été l’an dernier. Le lycée agricole de Lapalisse est l’un de ceux qui subissent les effets de cette paupérisation.

Avec des effectifs d’élèves en hausse et des postes supprimés, comment comptez-vous installer le double flux et ouvrir les sections et les classes promises par certaines directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt ? Comment pourra-t-on maintenir un service public d’enseignement agricole étant donné la place qu’y occupe le premier groupe de filières professionnelles désormais entièrement rénovées mais auquel l’administration a refusé l’ouverture de filières de certificats d’aptitude professionnelle agricole tout en concédant cette autorisation à l’enseignement privé ?

Enfin, quand va-t-on « déprécariser » ce secteur ? Les 300 postes proposés à cet effet sont bien loin de suffire à résorber l’effectif des contractuels précaires –5 000 dans le secondaire et cent dans l’enseignement supérieur.

Mme Brigitte Barèges. L’irrigation est un sujet majeur en Midi-Pyrénées. Vous le savez, puisqu’il a été évoqué en votre présence devant le président de la République en Tarn-et-Garonne. Grâce à lui et à vous, les normes relatives aux réserves en eau en Midi-Pyrénées ont été simplifiées ; je vous en remercie. Le protocole d’accord qui va bientôt être signé avec le préfet de région prévoit de confier la création et la gestion de ces réserves aux chambres d’agriculture ; je vous en remercie vivement. Par ailleurs, l’État s’est engagé à financer à 70% la constitution de ces réserves. Quelle part des deux milliards d’euros du budget des agences de l’eau y sera consacrée ? Je souhaiterais que Mme Sylvie Pinel, députée PRG de Tarn-et-Garonne et membre de la majorité régionale présidée par M. Martin Malvy – par ailleurs président de l’agence de l’eau Adour-Garonne –, incite celui-ci à financer les 30 % restants.

Pour favoriser le partenariat entre les établissements publics fonciers et les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural, j’ai cosigné avec M. Michel Diefenbacher un amendement tendant à créer un fonds alimenté par le produit de la taxe spéciale d’équipement et destiné à être mis à la disposition des SAFER ; a-t-il une chance de prospérer ?

Enfin, j’ai cosigné les amendements du groupe d'études sur les fruits et les légumes qui portent sur l’allègement du coût du travail agricole. Étant donné l’élargissement de l’assiette de la taxe sur les boissons sucrées, ces amendements pourront-ils prospérer ?

M. Guénhaël Huet. Ce projet de budget, avec près de 5,5 milliards de crédits, constitue une excellente synthèse entre l’objectif d’une politique agricole forte et l’indispensable maîtrise des finances publiques. Je salue l’effort accompli pour réduire le coût, notamment salarial et social, du travail agricole. La crise estivale de la filière fruits et légumes a de nouveau montré que notre agriculture est confrontée à une concurrence particulièrement forte des pays du Sud de l’Union européenne et à celle de nombreux pays extra-communautaires. Cette situation vaut pour toutes les productions, animales et végétales. Les 491 millions d’euros consacrés à l’exonération des charges patronales pour l’embauche de travailleurs occasionnels et les 210 millions consacrés à la même exonération pour le travail permanent constituent des progrès très significatifs. Mais ces mesures n’auront de portée que si elles sont pérennisées. Quels engagements pouvez-vous prendre à cet égard ?

Pouvez-vous faire un bilan d’étape de la contractualisation prévue dans la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche ? Le concept est séduisant, mais il ne faudrait pas que, du fait de l’inégalité économique et juridique des co-contractants, la contractualisation ait pour conséquence d’aliéner davantage encore le sort des producteurs au secteur de la transformation.

M. Louis-Joseph Manscour. La préservation des terres agricoles demeure un problème préoccupant en Outre-mer. Chaque année, la seule Martinique perd 1 000 hectares de ses terres agricoles et pas moins de deux exploitations agricoles mettent la clé sous le paillasson chaque jour. Dans le même temps, les jeunes agriculteurs réclament des terres pour pouvoir travailler. Ils craignent, que, sans mesures contraignantes, nos terres agricoles, déjà insuffisantes, ne soient livrées aux spéculateurs fonciers, ce qui serait fort dommageable pour l'économie domienne et martiniquaise en particulier.

Face à cette situation critique, ils se sont dernièrement mobilisés pour manifester leur inquiétude et se sont entretenus avec le directeur de la DAAF pour obtenir des renseignements sur l’installation de la commission chargée du classement des terres agricoles. Il leur a été répondu que le décret d'application créant cette instance n'est pas promulgué. Dans un territoire caractérisé par un fort taux d'importation de produits alimentaires, tout doit être mis en oeuvre pour favoriser une plus grande autosuffisance.

Monsieur le ministre, compte tenu de la situation difficile dans laquelle se trouvent les jeunes agriculteurs, en Martinique et en Outre-mer, et avec tous les désagréments que l’on connaît – pollution au chlordécone, intempéries...– il est urgent d'agir. Pourriez-vous nous indiquer quand ce texte, qui aura pour effet, vous le savez, de protéger cette activité économique ô combien importante pour nos territoires, sera promulgué ?

M. Jean-Claude Bouchet. Ce projet de budget est un budget de crise. On ne saurait en effet considérer la crise agricole comme terminée – la diminution du nombre d’exploitations le montre. Monsieur le ministre, je salue votre connaissance parfaite des sujets dont vous avez la responsabilité, votre dynamisme, votre motivation et votre travail acharné pour défendre notre agriculture au plan européen. Le projet que vous nous avez présenté traduit la volonté constante du Gouvernement de conserver à notre agriculture une place privilégiée. Dans un contexte financier très difficile, nous considérons tous que les agriculteurs doivent être justement rémunérés pour un travail qui, au delà de l’autosuffisance alimentaire, est essentiel pour notre commerce extérieur et pour l’entretien et l’aménagement de notre territoire.

Aussi, je souhaite appeler votre attention sur la situation dramatique des arboriculteurs du Sud du Vaucluse et du Nord des Bouches-du-Rhône. Ils ne comprennent pas devoir vendre 10 centimes un kilo de pommes quand il leur en coûte 40 centimes à la récolte. Nos agriculteurs qui, il y a quelques années encore, travaillaient avec deux ans de trésorerie d’avance doivent désormais survivre avec un trou de deux ans de trésorerie.

Notre travail conjoint visant à mettre en place la dotation au titre de l’exonération des charges patronales pour l’embauche de travailleurs occasionnels et celui portant sur l’allégement des charges sur le travail agricole permanent constituent un grand bond en avant, et la mesure a rencontré un écho très favorable ; mais encore faut-il que les exploitants ne soient pas contraints de déposer le bilan en cette fin d’année 2011. C’est pourquoi j’ai évoqué avec vous la possibilité d’une mesure d’exemption semblable à celle à laquelle les pouvoirs publics espagnols, italiens, néerlandais et allemands semblent recourir régulièrement afin de rendre possibles, dans le cadre européen, les aides destinées à compenser des pertes dues à des aléas climatiques. Une enveloppe à cette fin pourrait-elle être intégrée dans ce projet de budget ?

Mme Catherine Vautrin. Monsieur le ministre, j’apprécie votre mobilisation sur les droits de plantation.

Dans le programme 154, des mesures agro-environnementales sont prévues, avec des crédits qui aideront les exploitants à se diriger vers une agriculture plus respectueuse de l’environnement. Chacun connaît l’impact de la réforme de 2008 et la nécessité de tenir jusqu’en 2015. Vous avez, dès cet été, accordé 8 millions d’euros à la filière, ce qui n’est pas négligeable, mais pour passer le cap d’ici à 2015 et préserver les emplois agricoles, d’autres outils spécifiques sont nécessaires. Plusieurs de mes collègues vous ont parlé de l’aménagement du régime de déduction des cotisations sociales payées par anticipation. Pour aider les exploitants à prendre une décision éclairée, permettre la déduction de l’à-valoir au titre d’un exercice si les cotisations correspondantes sont versées au plus tard à la date de dépôt de déclaration serait un progrès incontestable. Pour éviter toute utilisation abusive du dispositif, la déduction devrait n’être possible qu’en cas de résultat imposable et dans la limite de 20 %. Le dispositif ainsi cadré aiderait considérablement nos agriculteurs.

Enfin, vous l’avez dit à juste titre, nous devons partager une vision à long terme de l’agriculture française. Se pose donc la question de la transmission des terres agricoles. Ne faut-il pas considérer les exploitants agricoles comme des entrepreneurs à part entière et, pour cela, leur appliquer le dispositif qui vaut pour les autres entrepreneurs et qui consiste à distinguer patrimoine personnel et patrimoine professionnel ? La question ne peut évidemment être réglée au détour de l’examen du projet de budget mais une réflexion globale devrait s’engager à ce sujet.

M. Daniel Fasquelle. Votre engagement en faveur de l’agriculture a été souligné ; il ne se dément pas pour la pêche, et je tiens à vous dire mon inquiétude à propos du projet de réforme de le politique commune des pêches. J’ai participé la semaine dernière à Bruxelles à une réunion au cours de laquelle Mme Maria Damanaki, commissaire européenne aux affaires maritimes et à la pêche, a présenté sa politique aux parlementaires nationaux . Elle ne m’a pas paru très à l’écoute sur les sujets tels que les rejets ou le rendement maximum durable. Le projet de PCP doit évoluer, tout comme les quotas individuels transférables. Nous sommes à la croisée des chemins : le même volume de pêche peut être atteint avec de gros bateaux emmenant peu d’hommes ou avec une vaste flottille de petits bateaux avec beaucoup d’hommes à bord. Il faut évidemment privilégier la seconde solution. Le projet de nouvelle PCP contient certes des dispositions favorables à la pêche artisanale mais le problème tient à ce qu’elle y est très mal définie : on se limite à parler de bateaux de moins de 12 mètres. Si l’on reste là, aucun des pêcheurs de ma circonscription ne pourra bénéficier de ces dispositions.

On note par ailleurs la volonté de protéger la pêche côtière, mais la segmentation opérée me semble très dangereuse. Quel est votre position à ce sujet ?

Enfin, le projet de PCP ne dit rien du navire de pêche du futur. J’ai remis au Gouvernement un rapport à ce sujet qui me semble extrêmement important et je maintiens qu’il faut stimuler la recherche et l’innovation. Je me félicite que le dispositif ISF-PME ait évolué la semaine dernière. Reste la question des normes, de la jauge et des aides éventuelles à la construction de navires, aides ciblées sur l’achat de moteurs économes en carburant, une meilleure sécurité ou de meilleures conditions de vie à bord.

Mme Josette Pons. La filière bois-énergie n’est pas assez bien organisée pour répondre à une demande croissante. C’est notamment le cas dans mon département, où la forêt appartient à 80 % à des propriétaires privés et où la production ne suffit pas à satisfaire la demande de plaquettes et de granulés.

Pourrait-on envisager des mesures incitatives afin de développer l’industrie de transformation du bois et d’encourager les propriétaires forestiers privés qui souhaitent le développement économique de leur patrimoine ? Il s’agirait de pousser les propriétaires à exploiter et à reboiser leurs parcelles et de pérenniser la démarche de ceux qui le font déjà.

M. Michel Heinrich. Le morcellement de la propriété forestière française handicape lourdement la gestion forestière et la mobilisation des bois. Rappelons que la surface moyenne par propriétaire est de 3 hectares en France, contre 15 en moyenne en Europe.

Afin de résoudre ce problème et d’atteindre les objectifs du Grenelle de l’environnement – qui vise à accroître la récolte de 20 millions de mètres cube d’ici à 2020 –, les organismes de la forêt privée ont œuvré en faveur du regroupement foncier ; d’importants efforts ont été consentis pour développer les outils de regroupement. Depuis dix ans, ces actions connaissent un grand succès.

Mais ce travail a été remis en cause par le décret du 17 février 2011 relatif à l’augmentation des rémunérations des notaires, qui, en réévaluant les frais dits de notaire, les a rendus disproportionnés par rapport au prix d’achat des parcelles, surtout des petites parcelles. Ainsi, les frais d’acte ont globalement doublé et atteignent 232 à 514 euros pour des parcelles d’une valeur de 150 à 200 euros.

De ce fait, les propriétaires renoncent massivement à leurs projets d’acquisition, selon les associations qui les représentent. Un pan entier de la politique de regroupement foncier est mis à bas, à l’opposé des préconisations du Grenelle. Serait-il possible de réduire ces frais, notamment pour les petites parcelles ?

M. Patrice Martin-Lalande. Merci, monsieur le ministre, de votre mobilisation pour la réforme des droits de plantation, comme sur de nombreux autres fronts en matière d’agriculture.

Lors de l’examen des crédits de la mission « Agriculture » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, je vous avais interrogé sur les moyens que le Gouvernement comptait employer pour accélérer la recherche sur l’esca et les « maladies du bois », lesquelles affectent gravement notre viticulture. Vous m’aviez alors confirmé que l’effort de recherche sur la maladie du bois serait poursuivi.

Permettez-moi de vous poser trois nouvelles questions à ce sujet.

Premièrement, par quels moyens la loi de finances pour 2012 développera-t-elle le financement de la recherche au niveau national ?

Ensuite, quelle action le Gouvernement a-t-il menée pour obtenir au niveau européen un effort financier supplémentaire en faveur de cette recherche et une meilleure coordination des programmes nationaux de recherche ?

Enfin, dans le cadre de la double présidence française du G20 et du G8, comment s’emploiera-t-on à mieux organiser au plan international la coordination des moyens de recherche ? Ces deux derniers points sont essentiels si l’on veut gagner la course qui nous oppose à ces maladies dévastatrices.

Je me réjouis par ailleurs que l’Assemblée nationale ait voté dans la nuit de jeudi à vendredi le maintien du taux réduit de TVA sur les activités équestres, en adoptant l’amendement que j’ai cosigné avec Jean-François Lamour, Marie-Hélène Thoraval et plusieurs autres collègues. Je pense que vous y êtes également favorable, monsieur le ministre.

M. Yves Censi, vice-président de la Commission des finances. Monsieur le ministre, avant de vous donner la parole pour répondre à nouveau aux orateurs, j’aimerais vous demander pour ma part quelques précisions sur ce que vous attendez des banques, dont vous avez évoqué tout à l’heure la mise à contribution, à propos notamment du report d’annuités.

M. Bruno Le Maire, ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. Je commencerai par répondre à cette dernière question.

En ce qui concerne les filières d’élevage, bovin ou porcin, notre stratégie est très claire. Premièrement, maintenir toutes les aides européennes aux pratiques d’élevage à la française, notamment les aides aux zones de montagne et à l’herbe, auxquelles s’ajoutent les contrats PHAE dont j’ai parlé tout à l’heure en réponse à la question de Pierre Morel-A-L’Huissier.

Deuxièmement, conquérir des parts de marché à l’exportation : la consommation de viande bovine dans le monde est en train d’exploser ; pourquoi laisserions-nous ces marchés aux Brésiliens ou aux Argentins alors que nous avons les moyens de les prendre ? Les responsables que j’ai rencontrés en Turquie et en Russie m’ont assuré que notre viande bovine était de loin la meilleure.

Enfin, plusieurs d’entre vous l’ont souligné, les éleveurs ont été confrontés à de très graves difficultés financières qui les ont plongés dans la détresse, en particulier l’année dernière. Nous avons donc lancé des plans de soutien incluant des aides à la trésorerie. Simplement, je ne peux pas faire plus. C’est aux banques de faire des efforts, en matière de délais de paiement, de restructuration des remboursements des emprunts ou de taux. Nous sauvons les banques ; que les banques aident à leur tour l’économie réelle. Pourquoi le budget de l’État serait-il systématiquement mis à contribution ?

Mme Marie-Christine Dalloz. et Mme Catherine Vautrin. Très juste !

M. Bruno Le Maire, ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. Monsieur de Courson, nous continuons de défendre la fiscalité applicable aux biocarburants. Je l’ai dit, nous avons adressé la demande de renouvellement des agréments au ministère de l’économie et des finances, dont nous attendons la réponse. Je souhaite personnellement que l’on ne revienne pas sur la défiscalisation votée, prévue jusqu’en 2013, ni sur les montants de 14 euros l’hectolitre pour l’éthanol et de 8 euros l’hectolitre pour le biogazole. Rien n’est pire en effet, j’en suis convaincu, que ces modifications incessantes de la fiscalité pour les investisseurs et les industriels, dont elles perturbent les calculs d’investissement et de rentabilité.

Monsieur Censi, je salue votre défense sans relâche de notre enseignement agricole : c’est un combat légitime. J’ai signé avec Luc Chatel le 8 septembre dernier une convention de partenariat qui doit permettre de tirer profit de nos complémentarités au sein de la mission « Enseignement scolaire » : il est temps de mettre fin au débat qui n’a cessé d’opposer nos deux ministères et qui n’est guère constructif. Cette convention devrait déboucher fin 2011 sur un plan d’action dont les deux axes principaux seront la carte des formations et la mutualisation des moyens.

En ce qui concerne les remplacements, tous les représentants d’établissements privés que j’ai rencontrés m’ont fait part des difficultés financières auxquelles ils sont confrontés du fait du non-remboursement des frais de remplacement des enseignants à partir du quatre-vingt-onzième jour d’absence. Comme vous me le demandez, monsieur Censi, je débloquerai donc une enveloppe particulière sur les moyens du programme afin d’améliorer la gestion financière du remplacement des enseignants du privé temps plein.

Madame Dubois, au lieu de nous couvrir la tête de cendres – contrairement à nos partenaires –, nous devrions nous réjouir de ce que nous avons réussi à faire au cours de l’année écoulée. Nous sommes redevenus les premiers exportateurs mondiaux de vin en valeur, alors que nous avions notablement régressé dans ce domaine au cours des dernières années. Dans le secteur de l’industrie agro-alimentaire, notre excédent commercial a augmenté de 18 % au cours des six premiers mois de l’année : c’est un très beau résultat ! Voilà qui montre que nous avons les moyens de gagner la bataille des parts de marché à l’exportation.

Oui, je crois à la méthanisation. L’objectif visé est de mille installations au cours des prochains mois, afin de rattraper le retard que nous avons pris sur l’Allemagne. À ceux qui critiquent notre politique de soutien à l’amélioration de la performance énergétique des exploitations, je rappelle que l’alignement du tarif de rachat du biogaz sur le tarif allemand coûtera 600 millions d’euros : il s’agit d’une aide massive.

Madame Erhel, je salue l’organisation des légumiers de Bretagne, qui pourrait servir de modèle à bien des secteurs en France : elle montre qu’il est possible de mettre ses produits sur le marché dans les meilleures conditions possibles, qui assurent la meilleure rémunération possible aux producteurs.

Sans ouvrir un débat sur la politique énergétique française, le problème du prix du gaz confirme qu’il faut préserver une filière nucléaire afin de maintenir les tarifs de l’électricité à un niveau peu élevé. Car le jour où nous serons entièrement dépendants de l’approvisionnement en gaz de la Russie ou de l’Algérie, je crains que le contribuable et les exploitants agricoles ne le paient au prix fort.

Enfin, la question du raccordement au gaz naturel mérite d’être étudiée, et j’examinerai volontiers les propositions concrètes que vous pourriez me soumettre sur ce point.

Monsieur Proriol, je vous ai répondu à propos des bâtiments d’élevage. Je l’ai dit au congrès de l’association nationale des élus de la montagne, nous devons maintenir les aides spécifiques aux zones de montagne. Sur les zones défavorisées simples, en particulier, nous devons obtenir de la Commission qu’elle modifie ses propositions de zonage.

En ce qui concerne la répartition entre élevage et production laitière, je rappelle que nous avons débloqué 40 millions d’euros d’aide à la collecte du lait de montagne dans le cadre du bilan de santé de la PAC porté par mon prédécesseur, Michel Barnier.

Je le répète, je suis convaincu que les deux filières ont un avenir en France. Il n’est pas nécessaire d’être un grand économiste pour constater que la production de viande bovine est l’un des seuls secteurs où la demande explose. Si les Européens se demandent s’ils ne devraient pas manger moins de viande, les pays en développement, soucieux d’améliorer la qualité nutritionnelle de leur alimentation, veulent au contraire en consommer. Les marchés existent donc ; il faut les prendre, et, pour cela, structurer les filières.

J’ai bon espoir que nous parvenions début novembre à un accord définitif sur la constitution d’un groupement pour l’exportation de la viande bovine française, ce qui permettra, pour la première fois dans l’histoire de notre élevage, de structurer nos exportations de viande bovine. Nous ne devons plus connaître la situation proprement ubuesque à laquelle j’ai été confronté lorsqu’il a été impossible de trouver les deux mille bêtes que nous étions tenus de fournir à la Russie aux termes d’un premier contrat !

Quant à la filière laitière, qui s’est fortement restructurée au cours des derniers mois, elle repose sur une qualité de fabrication et de collecte unique au monde. Comme le disait un penseur célèbre, « quand je m’examine, je m’inquiète, quand je me compare, je me rassure » : la Chine ou le Brésil ne sont pas près de nous concurrencer en ce qui concerne la collecte du lait, la structuration des filières, la maîtrise de la chaîne du froid et la qualité sanitaire des produits. La tâche leur sera moins facile que dans certains secteurs industriels où ils sont parvenus à nous rattraper. Nous avons de très bons producteurs et une production très diversifiée, des commodities – poudre ou sérum – au lait à très haute valeur ajoutée produit dans les circonscriptions de Jean-Marie Binetruy, où je me suis rendu il y a peu, ou de Marie-Christine Dalloz. Dans ce domaine aussi, soyons fiers de nous : notre industrie laitière est la plus performante au monde. Le monde nous envie Sodiaal, Lactalis, Danone et nos grandes coopératives laitières : les Italiens ne se réjouissent guère du rachat de Parmalat par Lactalis, qui conforte notre position mondiale.

Je confirme à Didier Quentin que nous maintiendrons les aides à la conchyliculture à leur niveau actuel et, surtout, que nous tiendrons les promesses faites aux conchyliculteurs pour lutter contre la surmortalité des juvéniles. Tous les engagements contractés auprès d’eux ont été honorés, et ils le savent. Il y a deux ans, il n’était pas facile de venir discuter avec eux dans votre département !

M. Didier Quentin. Vous y êtes le bienvenu !

M. Bruno Le Maire, ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. Aujourd’hui, de nouvelles perspectives s’offrent à eux ; j e m’en réjouis, car ils le méritent.

Je crois avoir répondu à M. Charasse à propos des éleveurs et de l’enseignement. En ce qui concerne la déprécarisation, nous allons procéder à quatre à cinq cents titularisations dès 2012. Mais les collectivités régionales ont leur part de responsabilité dans les chiffres que vous avez cités : en la matière, chacun doit faire un effort.

Je vous l’ai dit, madame Barèges, à propos des retenues collinaires et de la gestion de l’eau, l’essentiel est à mes yeux la simplification, notamment par la délégation aux chambres de l’agriculture de la maîtrise d’ouvrage. Le financement sera de 15 millions d’euros pour le FEADER et de 75 millions pour les agences de l’eau. La simplification des règles comme des recours doit être la plus poussée possible.

En ce qui concerne enfin l’élargissement de l’assiette de la taxe sur les sodas, ma préoccupation est d’honorer mes engagements ; or j’ai promis aux agriculteurs un euro d’allégement de charges sur le travail permanent au 1er janvier 2012. Je n’ai pas l’habitude de m’engager à la légère. Quant à l’extension aux boissons édulcorées de la taxe sur les sodas, que vous avez votée, c’est aux parlementaires et au ministre de la santé qu’il appartient d’en évaluer l’opportunité.

Monsieur Huet, 83 des 93 articles de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche sont déjà appliqués : le bilan est satisfaisant. Quant aux contrats, leur conclusion demande du temps, car il s’agit d’une pratique nouvelle. Mais contrairement à ce que je lis ici ou là, notamment dans la filière laitière, la situation progresse bien.

Pourquoi constate-t-on ponctuellement des blocages ? Nous avons obtenu une modification du droit européen de la concurrence qui permettra aux producteurs de lait de se regrouper en bien plus grand nombre afin de bénéficier d’un rapport de forces favorable lorsqu’ils négocieront les contrats avec les industriels. De nombreux producteurs attendent donc l’adoption de cette disposition européenne pour négocier. Pour ma part, tout en reportant le délai, qui était initialement fixé à la fin septembre, je les ai incités à progresser dans la négociation, afin d’éviter de donner à la Commission l’impression que nous revenons sur le dispositif. Celui-ci fonctionne, il progresse, et il représente une solution d’avenir.

Cela vaut des filières, mais aussi des contrats interfilières. Dans la filière de l’élevage, par exemple, le bénéfice d’une augmentation du prix payé au producteur pour chaque kilogramme de viande sera perdu si le coût de l’alimentation continue d’augmenter de 10, 15 ou 20 % par an, pesant d’autant sur le coût de production. La contractualisation interfilières est donc indispensable pour sécuriser le coût de production, et en particulier le coût de l’alimentation pour les filières animales.

Monsieur Manscour, la question des terres agricoles est encore plus importante outre-mer qu’en métropole. Un décret qui devrait vous satisfaire est en cours d’examen par les collectivités locales concernées ; je ne saurais trop vous conseiller de l’étudier sans tarder afin qu’il soit transmis pour examen et signé au plus vite. Aux termes de ce décret, dans les départements d’outre-mer, l’avis rendu par les autorités administratives n’est pas consultatif, comme en métropole, mais conforme : les autorités soucieuses d’éviter un déclassement des terres agricoles auront bien plus de pouvoir pour le faire. C’est le meilleur moyen de préserver les terres agricoles dans les DOM et d’y développer l’autonomie de production, ce que nous souhaitons tous.

Monsieur Bouchet, je suis disposé à étudier une amélioration de la compensation des aléas climatiques. Je sais que vous avez beaucoup étudié ce sujet, et je vous propose que nous continuions de travailler sur l’aspect technique avec mes services. Cela étant, nous avons déjà beaucoup dépensé et beaucoup fait pour les producteurs de fruits et légumes concernés. Nous en avons parlé lors de ma récente visite dans votre circonscription.

Mme Vautrin m’a demandé si la transmission des terres agricoles pourrait être comptabilisée comme celle d’un patrimoine entrepreneurial plutôt que familial. C’est une question importante qui mérite d’être étudiée, même si nous ne pourrons le faire dans le cadre du présent projet de loi de finances. Un rapport pourrait lui être consacré. Le problème est que la valeur des terres agricoles varie considérablement d’une région à l’autre : elle n’est pas du tout comparable dans votre circonscription et dans le Centre, par exemple.

Monsieur Fasquelle, la proposition de réforme de la politique commune des pêches présentée par Maria Damanaki ne convient pas au gouvernement français, et ce pour plusieurs raisons fondamentales.

Premièrement, l’instauration des quotas individuels transférables ferait disparaître la pêche artisanale au profit des grandes pêches industrielles. Le dispositif reconduit la logique de baisse systématique du prix au détriment de la qualité et des emplois.

Deuxièmement, la proposition fixe à 2015 l’objectif d’atteinte du rendement maximum durable pour l’ensemble des stocks alors que c’est la date de 2020 qui a été arrêtée lors de la conférence internationale de Nagoya. Or, si l’échéance est avancée de cinq ans, les pêcheurs ne disposeront pas de stocks suffisants pour vivre et pour rentabiliser leur navire de pêche.

Troisièmement, les mesures relatives aux concessions transférables ne vont pas dans le bon sens.

Le combat sera donc difficile, mais nous ne sommes pas seuls. Vous avez trouvé, monsieur Fasquelle, que Maria Damanaki n’était « pas très à l’écoute » : je reconnais bien là votre sens de la litote !

En ce qui concerne l’organisation de la filière bois, madame Pons, monsieur Heinrich, nous avons tout fait pour encourager les propriétaires fonciers privés à se regrouper. Il faut en effet lutter à tout prix contre l’émiettement des parcelles et nous efforcer d’accroître la surface moyenne par propriétaire. Des progrès sont en cours. Je suis tout à fait d’accord pour accélérer l’organisation de la filière et le regroupement forestier. Quant au problème de l’augmentation des frais de notaire, je vous avoue que je n’en étais pas conscient. Je suis tout à fait disposé à en parler avec les notaires : pourquoi cette augmentation au moment même où l’on cherche à hâter le regroupement des parcelles ?

Monsieur Martin-Lalande, je sais combien l’esca vous préoccupe ; vous avez beaucoup travaillé sur cette maladie de la vigne qui expose bien des viticulteurs français à de grandes difficultés. Nous avons accordé des budgets de recherche importants à l’INRA et à l’institut de la vigne et du vin – 500 000 à 1 million d’euros selon les années. En outre, nous organiserons le 8 décembre prochain un colloque national sur les maladies de la vigne et en particulier sur l’esca, afin de faire le point sur l’état d’avancement des recherches et d’identifier les besoins complémentaires de manière à accélérer les travaux dans ce domaine. Naturellement, vous êtes cordialement invité à ce colloque, monsieur Martin-Lalande.

M. Yves Censi, vice-président de la Commission des finances. Merci, monsieur le ministre.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Monsieur Bruno Le Maire, ministre de l’Agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire, sur les crédits de la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales, et le budget annexe Développement agricole et rural, lors de la commission élargie (voir compte rendu analytique officiel de la réunion du 25 octobre 2011 à 9 heures) sur la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales, la commission des Finances examine les crédits de cette mission et du budget annexe.

Article 32 : Crédits du budget généralÉtat B

M. Yves Censi, Président. Sur les crédits de la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales, nous sommes saisis d’un amendement, n° II-4, du Gouvernement.

M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial sur les crédits des politiques de l’agriculture et du compte d’affectation spéciale Développement agricole et rural. L’amendement a pour objet d’abaisser le plafond des crédits de la mission demandés dans le présent projet de loi, au titre de la mise en œuvre du plan d’économies supplémentaires d’un milliard d’euros annoncé par le Premier ministre le 24 août 2011. Le ministère de l’Agriculture contribue à cet effort à hauteur de 26 millions d’euros, et la mission proprement dite à hauteur de 22 millions d’euros.

L’amendement est adopté.

Conformément à l’avis favorable de MM. Nicolas Forissier et Philippe Vigier, rapporteurs spéciaux, la Commission adopte les crédits de la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales, ainsi modifiés.

La Commission, suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, adopte ensuite les crédits du compte spécial Développement agricole et rural.

Article 48
Création d’une contribution à la surface aux frais de garderie de l’Office national des forêts (ONF)

Texte du projet de loi :

L'article 92 de la loi de finances pour 1979 (n° 78-1239 du 29 décembre 1978) est modifié comme suit :

1° Au premier alinéa :

a) Les mots : « collectivités locales » sont remplacés par les mots : « collectivités territoriales » ;

b) Les mots : « hors taxe » sont ajoutés après les mots : « 12  % du montant » ;

c) Les mots : « , déduction faite des frais d’abattage et de façonnage des bois » sont supprimés.

2° Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les produits des forêts mentionnés au premier alinéa sont tous les produits des forêts relevant du régime forestier, y compris ceux issus de la chasse, de la pêche et des conventions ou concessions de toute nature liées à l’utilisation ou à l’occupation de ces forêts. Pour les produits de ventes de bois, le montant est diminué des ristournes consenties aux acheteurs dans le cas de paiement comptant et, lorsqu’il s’agit de bois vendus façonnés, des frais d’abattage et de façonnage hors taxe ».

« À compter du 1er janvier 2012, les personnes morales mentionnées au premier alinéa dont les forêts relèvent du régime forestier acquittent en outre au bénéfice de l’Office national des forêts une contribution annuelle comprise entre 2 et 4 € par hectare de forêt. Le montant de cette contribution est fixé par arrêté conjoint du ministre chargé de l’agriculture et du ministre chargé du budget ».

Exposé des motifs du projet de loi :

Le présent article a pour objectif :

– d’élever au niveau législatif la définition de l'assiette des produits de la forêt pris en compte dans le calcul des frais de garderie. Les dispositions qui figurent dans le décret n° 96-933 du 16 octobre 1996 sont ainsi reprises à l'identique ;

– de rééquilibrer le financement du régime forestier des forêts des collectivités, en augmentant la part contributive des collectivités, en particulier des communes.

À l’heure actuelle, la contribution des communes couvre en moyenne environ 15 % du coût du régime forestier. En outre, le système de frais de garderie, calculés uniquement sur les ventes de bois, conduit à ce que les communes qui vendent peu de bois contribuent peu au financement des missions de surveillance ou de suivi des aménagements forestiers.

C'est pourquoi il est proposé d'instaurer une contribution supplémentaire annuelle à l'hectare, d'un montant compris entre 2 €ha et 4 €ha. Pour 2012, ce montant sera fixé à 2 €ha. Acquittée par l'ensemble des propriétaires bénéficiant du régime forestier, soit une assiette de 2,8 millions d'hectares, cette contribution aura ainsi un rendement de 5,6 m€ en 2012. Ce montant pourrait être réévalué pour les années suivantes, en fonction de l'atteinte des objectifs de mobilisation du bois en forêt communale fixés dans le cadre du contrat d’objectifs et de performance conclu entre l’État, l’Office national des forêts et la Fédération nationale des communes forestières.

Observations et décision de la Commission :

Il revient au législateur de fixer un taux précis, en l’occurrence deux euros, et non une fourchette entre deux et quatre euros.

La nouvelle taxation ne constitue pas seulement une ressource nouvelle de l’ONF. Elle se définit aussi comme un mécanisme de prix qui permet l’allocation optimale des ressources.

Expert national de la gestion forestière, l’Office a pu sembler par le passé ne plaider que pour lui lorsqu’il suggérait des coupes. La forêt française est au contraire sous-exploitée. La nouvelle taxation devrait permettre à toutes les parties prenantes d’en prendre conscience.

M. Yves Censi, Président. Je suis saisi de deux amendements, n° II-7 et n° II-8, du Gouvernement. Quel est l’avis du rapporteur spécial ?

M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial. L’amendement n° II-7 élève au rang législatif la définition de l’assiette des frais de garderie, qui a fait l’objet de plusieurs contentieux. L’amendement n° II-8 fixe à deux euros par hectare la contribution à la surface, au lieu d’ouvrir au pouvoir réglementaire la possibilité de fixer ce niveau à un montant compris dans une fourchette de deux à quatre euros. Je suis favorable aux deux amendements.

M. Charles de Courson. Quand j’ai été élu en 1993, les frais de garderie s’établissaient à 7 %. Nous sommes maintenant sur le chemin des 20 %. Je rappelle qu’il s’agit de rémunérer les services rendus par l’ONF et que les opérateurs privés, pour des tâches analogues, se contentent de 5 % à 6%, soit très sensiblement moins. Faut-il dès lors instituer une contribution supplémentaire de deux euros ? Est-elle au demeurant conforme à la réglementation européenne, si elle doit être considérée comme une rémunération pour services rendus, et non comme une contribution ? Un hectare de forêt bien exploité rapporte tout au plus cent euros l’an. Il ne me semble pas raisonnable de grever ce rendement modeste de 2 % supplémentaires. Je suis donc défavorable à l’amendement n° CF-8.

M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial. Dans le cadre de la préparation de mon rapport spécial, j’ai entendu le directeur général de l’ONF, M. Pascal Viné, qui a exposé comment la réforme de financement de l’office s’inscrit dans une stratégie d’ensemble de l’établissement. L’institution de cette taxe nouvelle a du reste fait l’objet d’une concertation avec les communes forestières ; le président de leur fédération nationale la soutient expressément. Si les communes paient certes deux euros par hectare, l’ONF développe de son côté la production, dans une logique gagnant-gagnant. Cela pourrait doper les exportations françaises de bois. Quant au parallèle tracé entre l’opérateur public et des entreprises privés, il induit en erreur. L’ONF intervient en effet souvent sur des forêts peu accessibles qui ne rapportent pas cent euros l’an par hectare. L’établissement a déjà été strictement restructuré selon les lignes directrices de la révision générale des politiques publiques. L’État consent quant à lui un effort de 46 millions d’euros, ou plutôt 39 millions d’euros comme je l’analyse dans mon rapport. En contrepartie, l’établissement s’est engagé à une gestion très rigoureuse. L’institution de la taxe s’inscrit donc dans une logique prudente ; son taux me semble modéré.

La Commission adopte successivement les deux amendements n° II-7 et n° II-8 du Gouvernement, puis l’article 48 rattaché, ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 48 : Allègement des charges pesant sur les salariés permanents dans le secteur agricole

M. Yves Censi, Président. Nous sommes saisis des amendements n° II-3 du Gouvernement et n° II-CF-35 de M. Charles de Courson, portant article additionnel après l’article 48.

M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial. Ces deux amendements en discussion commune se confortent, puisque l’amendement n° II-CF-35, que j’ai cosigné, n’aurait pu être déposé si le dépôt concomitant de l’amendement du Gouvernement n’en avait pas assuré la recevabilité. L’amendement a pour objet de prévoir l’allègement de charges sur les salariés permanents en agriculture dont il a été question au cours de la réunion de commission élargie tenue à l’instant.

M. Charles de Courson. À la commission des Affaires économiques, nos collègues socialistes se sont abstenus sur ce dispositif, en dénonçant le danger d’une « trappe à bas salaires ». Peu de nos concitoyens auront cependant à perdre à sa mise en œuvre, hormis ceux qui n’ont aucun salarié permanent, ou ceux qui les rémunèrent à plus de 1,6 SMIC. Cela concerne tout au plus un cinquième des salariés permanents dans l’agriculture, dont le niveau de salaire atteste la capacité financière de leurs employeurs. L’argument sur l’euro-compatibilité ne tient pas davantage. Les parlementaires auteurs de l’amendement ont fait une démarche spéciale et exceptionnelle auprès de la Direction générale de l’agriculture de la Commission européenne. Il me semble difficile d’en attendre plus.

L’amendement n° II-CF-35 est adopté. Par suite, l’amendement n° II-3 tombe.

Article additionnel après l’article 48, rattaché : Fixation du plafond d’augmentation de la taxe pour frais de chambres d’agriculture

M. Yves Censi, Président. Nous sommes saisis des amendements n° II-6 du Gouvernement et n° II-CF-104 du rapporteur spécial, portant article additionnel après l’article 48. Ils sont en discussion commune.

M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial. J’avais proposé de relever le plafond d’augmentation de la taxe pour frais de chambres d’agriculture de 1,75 %, mais, au vu des explications données par le ministre, je me range à son avis, et à l’amendement du Gouvernement qui prévoit une hausse de 1,5 % du plafond. À l’heure où l’obligation de faire des économies s’impose à tous les échelons de la vie publique, ses arguments doivent être entendus.

L’amendement n° II-CF-104 est retiré.

M. Charles de Courson. L’assiette de la taxe additionnelle au foncier non bâti est réévaluée chaque année. Il aurait été bon d’en connaître le montant pour 2012 avant de se prononcer sur le plafond d’augmentation de ce taux. Je sous-amende l’amendement n° II-6 au taux de 1,75 %.

M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial. C’était aussi ma position. Je viens de vous expliquer pour quelles raisons j’y ai renoncé. Je rappelle que le ministère du Budget aurait préféré qu’il n’y ait pas d’augmentation du tout.

M. Jean-Marie Binetruy. Je pense moi aussi que le niveau raisonnable se situe à 1,5 %.

L’amendement n° II-6 du Gouvernement est adopté.

*

* *

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Article additionnel après l’article 48

Amendement n° CF-35 présenté par Charles de Courson, Gilles Carrez, Jean-Marie Binetruy, Bernard Carayon, Jean-Yves Cousin, Michel Diefenbacher, Nicolas Forissier, Louis Giscard D'estaing, Arlette Grosskost, Pascale Gruny, Jean-François Mancel, Hervé Mariton, Nicolas Perruchot, Camille de Rocca Serra, Philippe Vigier,

Après l’article 48, insérer l’article suivant :

I.– Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’article L. 741-4-1 est abrogé ;

2° L’article L. 741-15-1 est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. L. 741-15-1.- I.- Les employeurs relevant du régime de protection sociale des professions agricoles sont exonérés du paiement de la part patronale des cotisations et contributions mentionnées au II dans la limite de vingt salariés agricoles employés en contrat à durée indéterminée par entreprise.

Pour les employeurs appartenant à un groupe tenu de constituer un comité de groupe en application du I de l’article L. 2331-1 du code du travail, la limite de vingt salariés s’apprécie au niveau du groupe.

« II.– Les cotisations exonérées en application du I sont les suivantes :

« 1° La contribution prévue au 1° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles ;

« 2° La cotisation due au titre du fonctionnement du service de santé et de sécurité au travail prévue au deuxième alinéa de l'article L. 717-2 du présent code ;

« 3° La cotisation de la retraite complémentaire obligatoire des salariés versée aux institutions de retraite complémentaire mentionnées au I de l'article L. 727-2 du présent code ;

« 4° La cotisation due au titre du fonds national d’aide au logement prévue au 1° de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale ;

« 5° La cotisation versée à l'Association pour la gestion du fonds de financement, rendue obligatoire, en application des articles L. 911-3 et L. 911-4 du code de la sécurité sociale, par l'arrêté du 14 mars 2011 portant extension et élargissement de l'accord national interprofessionnel du 25 novembre 2010 portant prorogation de l'accord du 23 mars 2009 sur les régimes complémentaires de retraite AGIRC et ARRCO ;

« 6° La cotisation due au titre de l’assurance contre le risque de non paiement des salaires prévue à l’article L. 3253-18 du code du travail ;

« 7° La contribution due au titre de l’assurance chômage prévue à l’article L. 5422-9 du code du travail ;

« 8° La participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue prévue à l'article L. 6331-1 du code du travail ;

« 9° La cotisation versée à l'Association nationale pour l'emploi et la formation en agriculture, rendue obligatoire, en application de l'article L. 2261-15 du code du travail, par l'arrêté du 15 septembre 2006 portant extension d'un avenant à l'accord collectif national de travail sur l'emploi dans les exploitations et entreprises agricoles ;

« 10° La cotisation versée au conseil des études, recherches et prospectives pour la gestion prévisionnelle des emplois en agriculture et son développement, dénommé PROVEA, rendue obligatoire, en application de l'article L. 2261-15 du code du travail, par l'arrêté du 28 octobre 2002 portant extension d'un accord collectif national de travail sur les saisonniers, sur diverses dispositions sur les contrats à durée déterminée et sur l'organisation de la gestion prévisionnelle de l'emploi en agriculture ;

« 11° La cotisation versée à l'Association pour le financement de la négociation collective en agriculture, rendue obligatoire, en application de l'article L. 2261-15 du code du travail, par l'arrêté du 26 mars 1992 portant extension d'un accord national relatif à l'organisation de la négociation collective en agriculture.

« III.– L’exonération mentionnée au I est calculée chaque année civile, pour chaque salarié dans la limite d’effectifs mentionnée au I. Son montant est égal au produit de la rémunération annuelle, telle que définie à l'article L. 741-10, par un coefficient. Ce coefficient est déterminé par application d’une formule fixée par décret. Il est fonction du rapport entre la rémunération du salarié et le salaire minimum de croissance lesquels sont appréciés selon les modalités prévues au III de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. Ce coefficient est maximal pour les rémunérations inférieures ou égales au Smic majoré de 10%. Il est dégressif à compter de ce niveau de rémunérations puis devient nul pour les rémunérations égales au Smic majoré de 40%.

« IV.– Cette exonération est cumulable avec le bénéfice de la réduction dégressive de cotisations prévue à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ainsi qu'avec la déduction forfaitaire prévue à l'article L. 241-18 du même code.

« V.– Les caisses de mutualité sociale agricole versent à leurs attributaires, pour le compte de l’État, les sommes correspondant aux cotisations et contributions exonérées en application des dispositions des I à III.

« VI.– Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret. ».

II.– Le 1er alinéa du VI de l’article L. 241-13 est complété par les mots suivants : « et avec l’exonération prévue à l’article L. 741-15-1 du code rural et de la pêche maritime.

III.– Les dispositions du présent article s’appliquent aux cotisations dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2012..

IV.– Les dispositions du présent article s’appliqueront dès lors que la Commission européenne aura confirmé que cette mesure est compatible avec l'article 107.1 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Article additionnel après l’article 48

Amendement n° CF-104 présenté par M. Nicolas Forissier

Après l’article 48, insérer l’article suivant :

« L'augmentation maximale du produit de la taxe mentionnée à l'article L. 514-1 du code rural et de la pêche maritime est fixée, pour 2012, à 1,75 %. »

ANNEXE

LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Ministère de l’Alimentation, de l’agriculture et de la pêche

M. Jean-Marie Aurand, secrétaire général ;

M. Christian Ligeard, directeur des affaires financières ;

Mme Sylvie Terraillot, chef de la mission des Affaires Générales ;

Mme Élodie Lematte, chef du bureau du budget et des opérateurs.

Office national des forêts (ONF)

M. Pascal Viné, directeur général ;

M. Patrick Soulé, directeur financier.

© Assemblée nationale

1 () Voir le rapport spécial de M. Philippe Vigier, rapport n° 3775, annexe n° 4.