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Commission des affaires européennes

mardi 6 avril 2010

17 heures

Compte rendu n° 145

Présidence de M. Pierre Lequiller Président

I. Audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

II. Communication de M. Guy Geoffroy sur l’ouverture de nouvelles négociations avec les Etats-Unis relatives à un accord « Swift » (document E 5214)

III. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPEENNES

Mardi 6 avril 2010

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président de la Commission

La séance est ouverte à 17 heures

I. Audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Le Président Pierre Lequiller. Avant toute chose, je souhaite évoquer la mémoire de notre collègue Arlette Franco, dont le décès, jeudi dernier, a plongé tous les membres de notre commission dans la tristesse. Comme vous le savez, Arlette Franco est décédée à la suite d’une longue et pénible maladie, au cours de laquelle elle a montré un courage exemplaire. Nous étions tous très attachés à notre collègue, dont la gentillesse naturelle, comme le sérieux de ses engagements et de son travail parlementaire, forçaient l’estime et l’admiration.

Maire de Canet-en-Roussillon depuis 1989, elle avait été brillamment réélue en mars 2008, dès le premier tour, avec près de 64 % des suffrages exprimés. En tant que parlementaire, Arlette Franco avait été, dès son élection en juin 2002, puis après sa réélection en 2007, un membre très assidu de notre commission. Elle s’était particulièrement investie dans les questions démographiques – déposant par exemple un rapport intitulé Les perspectives démographiques de l’Europe : assurer notre avenir commun par des politiques coordonnées – ainsi que sur les sujets institutionnels, en prenant part, notamment, à l’opération missi dominici que nous avions organisée en 2004, 2006 et 2007 à propos du projet de constitution européenne et du traité de Lisbonne. Je voulais avoir une pensée émue pour notre collègue, que nous aimions tous beaucoup.

Monsieur le ministre d’Etat, je vous remercie d’avoir accepté de venir nous parler de la politique climatique et des différents dossiers de l’Union européenne en matière d’environnement. Alors que la France poursuit la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement – Gérard Voisin a d’ailleurs déposé au nom de notre commission un rapport d’information sur le projet « Grenelle II » et les politiques européennes dans ce domaine –, quelle peut être la stratégie de l’Union européenne pour relancer les négociations et parvenir à un accord climatique mondial ? Faut-il agir à l’intérieur des Nations unies ou privilégier les processus parallèles ?

Même si l’approche adoptée lors du dernier Conseil européen semble prudente, il est nécessaire de renforcer le rôle moteur de l’Union européenne en matière de lutte contre le changement climatique. La France et le Royaume-Uni ont soutenu le passage de 20 à 30 % de l’objectif de réduction des émissions, mais quelle est la position des autres pays européens ? Comment seront mis en œuvre les financements internationaux de la lutte contre le changement climatique dans les pays en voie de développement ? Enfin, qu’en est-il de l’institution d’une taxe carbone aux frontières de l’Europe ? Telles sont les questions que je souhaitais vous poser pour ouvrir le débat.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. Je me réjouis d’avoir cette occasion d’échanger avec les députés. Sur un sujet à propos duquel personne ne peut prétendre détenir la vérité, je tiens à vous livrer mon opinion profonde, même si je sais qu’elle ne fait pas consensus.

En matière de lutte contre le réchauffement climatique, le monde s’est mis en mouvement il y a une vingtaine d’années. Plus récemment, avec le protocole de Kyoto, les pays européens, les Etats-Unis d’Amérique et leurs alliés, Canada et Japon, se sont lancés dans un processus contraignant, prenant la forme d’un traité, et destiné à maîtriser les émissions de gaz à effet de serre. Ce système a eu une efficacité faible, même s’il s’est révélé utile du point de vue symbolique, car l’idée d’un acte contraignant se heurtait à la souveraineté des Etats. Les Etats-Unis, en particulier, ont refusé la perspective d’être contrôlés par des tiers. De son côté, le Canada a augmenté ses émissions de 26 %. Finalement, dans cette histoire, il n’est plus resté que l’Europe.

La vraie question, s’agissant de la conférence de Copenhague comme des accords à venir, est celle-ci : il faut tout faire pour lutter contre le changement climatique, mais cela doit-il aller jusqu’à l’abandon de la souveraineté nationale, alors que l’économie, le modèle de production, les questions sociales sont en jeu ? L’Europe, elle, y était prête. Non parce qu’elle est plus vertueuse, mais parce que pour faire la paix, elle a construit un modèle qui implique souvent, pour ses membres, d’abandonner une part de leur souveraineté. Mais si de tels abandons sont inhérents à la construction européenne, ils ne sont pas dans la culture de Buenos Aires, de Pékin, de New Delhi, de Washington ou de Brasília. L’idée d’un traité contraignant relève d’une culture monastique ou notariale typiquement européenne. Elle consiste à dire que la réduction des émissions de gaz à effet de serre passe par la signature d’un contrat assorti d’engagements chiffrés, ce qui signifie l’intervention d’experts et l’institution d’un juge autorisé à prononcer des pénalités… Or cette conception n’est pas partagée par les autres cultures. Sous cette forme, elle n’a aucune chance de prospérer dans le reste du monde. Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas maintenir les effets d’un traité contraignant pour ceux qui y prennent déjà part. Mais il ne faut pas espérer voir l’Empire du Milieu accepter d’être contrôlé par des inspecteurs américains ou jugé par un tribunal international comparable à la Cour de justice de La Haye : cela n’a aucun sens.

M. Jérôme Lambert. Le traité de non-prolifération est pourtant un contre-exemple.

M. Jean-Louis Borloo. Je ne nie pas qu’il existe des traités internationaux efficaces sur des sujets bien délimités, comme pour la protection de la couche d’ozone ou dans le domaine nucléaire – même si le TNP ne concerne en réalité que sept ou huit pays. Je dis simplement qu’à l’échelle planétaire, la notion de contrat assorti de pénalités est une fausse bonne idée. Je n’y crois pas.

En revanche, il faut que tous les pays du monde entrent en mouvement. Et il faut que chaque pays puisse s’assurer que les autres pays évoluent dans les mêmes proportions, compte tenu de leur point de départ. Cela nécessite des mécanismes de garantie automatique.

En réalité, ce qui s’est passé à Copenhague, c’est, d’une part, que les professionnels de la négociation climatique se sont montrés réticents à laisser la place aux chefs d’Etat, et, d’autre part, qu’ils ont imaginé pouvoir concilier une rencontre au sommet avec la signature d’un acte de type contractuel. Mais cela n’avait aucun sens, et c’est pourquoi le procès qui a été fait aux chefs d’Etat et de Gouvernement constitue à mes yeux un déni de démocratie. Ces personnalités n’étaient pas convoquées par un juge d’instruction, elles venaient librement. Il était déjà étonnant qu’un Medvedev, un Obama, un Jiabao, un Singh, un Lula puissent se réunir dans la même salle.

Les conséquences de cette inculture sont ravageuses. Que se sont dit en effet les peuples d’Europe ? D’abord, que si le reste du monde ne fait pas d’efforts, eux-mêmes n’ont aucune raison d’en faire. Et ensuite, que si tous ces gens n’ont pas été capables de se mettre d’accord, c’est sans doute que la situation n’est pas si grave. Et voilà comment M. Claude Allègre peut vendre 150 000 exemplaires de son bouquin en un mois ! Ce processus de formatage de la pensée me paraît extrêmement grave.

Déjà, à New Delhi, le ministre de l’environnement, M. Jairam Ramesh, a été vivement critiqué par son parlement, lorsqu’il a évoqué une évolution de la position de son pays vers plus de souplesse dans les négociations. Mais quant au Premier ministre, il n’aurait pas tenu huit jours s’il avait accepté de remettre en cause, au nom de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le processus par lequel l’Inde est en train de sortir de la pauvreté. Rappelons que cette dernière n’émet que 1,2 tonne de CO2 par habitant, contre plus de 20 pour les Etats-Unis. Le paradoxe, c’est que les pays où les enjeux environnementaux sont les plus importants sont aussi ceux dont la croissance est la plus forte, ceux qui subissent de la façon la plus violente les conséquences du dérèglement climatique et de la réduction des ressources, et donc ceux qui agissent le plus brutalement pour réduire leurs émissions. Ils ne comprennent pas notre comportement, et en viennent à se demander si notre attitude – notamment celle de la presse, mais celle-ci ne fait que refléter l’opinion des élites occidentales – ne cache pas un refus d’honorer nos engagements en matière de réduction des émissions. C’est ainsi qu’ils interprètent l’affirmation selon laquelle la Conférence de Copenhague est un échec.

Je sais que mes propos ne correspondent pas à l’opinion la plus répandue. Mais telle est ma conviction, après avoir travaillé sur ces sujets à temps plein pendant deux ans, effectué de nombreux tours du monde et rencontré tous les dirigeants. Nous devons mettre en place un système automatique de garanties. La Chine doit mettre en place des quotas d’émissions. Les Etats-Unis doivent donner un prix au carbone. Voilà une véritable négociation à mener, non seulement avec la plus grande puissance économique du monde, mais aussi avec les autres pays. Des systèmes de vérification internationaux doivent permettre de savoir quels sont, dans chaque pays, les moyens mis en place pour faire évoluer le mix énergétique, améliorer la gestion de l’eau, etc. Mais, compte tenu des enjeux, il ne faut pas imaginer pouvoir étendre au monde entier un petit contrat façon protocole de Kyoto… Les chefs d’Etat et de Gouvernement ont déjà indiqué les efforts auxquels leur pays pouvait consentir. Ce serait une erreur de penser qu’ils sont en capacité de faire autrement.

Plutôt que de répéter qu’il n’y a pas eu d’accord politique à Copenhague, il convient donc de le mettre effectivement en œuvre. Car cet accord existe : même si vous n’avez pas lu une ligne à ce sujet dans la presse, le 31 janvier, tous les pays avaient notifié les engagements pris oralement par les participants à la Conférence. Personne ne s’est montré défaillant. Et l’ensemble représente 91 % des émissions mondiales : l’essentiel est donc fait. Les vraies questions sont de savoir comment mettre en œuvre cet accord, comment trouver les financements innovants afin d’assurer la mutation vers un autre bouquet énergétique, comment soutenir les pays les plus vulnérables – les petits Etats insulaires, certains pays d’Afrique, le Bangladesh, le Sud de l’Inde, le Cambodge, qui subissent de plein fouet les dérèglements climatiques mais n’ont pas les moyens de développer des systèmes d’alerte précoce ni de promouvoir les sources d’énergie locales –, comment appliquer le plan « fast start », notamment pour financer la lutte contre la déforestation, etc.

Le problème est que les élites politiques européennes sont tellement désarçonnées par leur incompréhension de ce qui s’est passé à Copenhague qu’il semble ne plus y avoir de véritable pilote des négociations, qu’il s’agisse de l’ONU ou de l’Union européenne. C’est pourquoi nous avons organisé, il y a trois semaines, une réunion à Paris sur le thème du financement de la protection des forêts. Je rappelle qu’à Copenhague, les chefs d’Etat et de Gouvernement s’étaient engagés à faire de cette politique une priorité, et d’y consacrer au moins 20 % des 10 milliards de financements « fast start », car la déforestation représente 20 % des émissions de gaz à effet de serre. Les 67 pays participants ont accepté que la France pilote cette opération, que le secrétariat permanent soit installé à Paris et qu’il puisse commencer à travailler sérieusement.

Le Président Pierre Lequiller s’est demandé s’il fallait agir à l’intérieur ou à l’extérieur de l’ONU. Les deux types de processus sont nécessaires. Mais, s’agissant de décisions politiques prises au niveau des chefs d’Etat et de Gouvernement, autant passer par le système diplomatique actuel et ne pas ajouter de la complexité. Car ce système est très complexe, non seulement parce qu’il fait entrer en jeu 192 pays différents, mais aussi parce que les représentants de certains Etats subissent le joug d’autres pays. Ainsi, parmi les pays qui se sont opposés à l’accord de Copenhague, on retrouve quelques grands producteurs de pétrole, le Venezuela, Cuba. A cet égard, la grande naïveté des commentateurs internationaux m’a stupéfait : ils commentaient leur propre inculture.

Il ne faut pas imaginer que l’on pourra refaire cette conférence : plus jamais on ne réunira 130 chefs d’Etat et de Gouvernement, représentant 95 % des émissions de gaz à effet de serre. Cela n’était jamais arrivé, sur aucun sujet. Et l’on est allé expliquer aux peuples du monde que ce n’était rien !

Le risque est donc l’absence de pilotage, et à ce sujet, je vous le dis honnêtement : heureusement qu’il y a la France. Je ne vois pas qui d’autre pourrait assumer le pilotage sur la forêt, les actions « fast start » ou les financements innovants. Nous disposons pour cela d’alliés puissants, notamment l’Afrique, désormais bien organisée autour du Premier ministre éthiopien, M. Meles Zenawi, et du ministre de l’énergie de la République démocratique du Congo. Notre ambition n’est évidemment pas de renégocier Copenhague, ce qui serait une folie, mais de réussir la mise en musique de la Conférence. Nous devons être à nouveau positifs et optimistes afin d’entraîner les peuples du monde – ou plutôt les peuples de l’Europe sous domination intellectuelle anglo-saxonne, car à part l’Angleterre, le Danemark, la Suède, la France et l’Allemagne, le monde entier a trouvé que cette conférence avait donné de bons résultats.

Tel est mon sentiment sur le processus de négociation internationale. Si nous voulons agir à l’échelle mondiale, nous ne pouvons pas nous permettre de rechercher une solution sans le Brésil, le Mexique, la Corée du Sud ou la Chine. Il faut parvenir à mettre en place des processus à la fois exigeants et acceptables du point de vue de la souveraineté, et instituer un système transparent et s’appliquant à tous, de façon à limiter les problèmes de compétitivité. Nos amis chinois viennent d’ailleurs de m’annoncer qu’ils allaient mettre en place une taxe carbone expérimentale dans les provinces de Pékin, de Tientsin et de Shanghai.

Cela m’amène à la question de la taxe aux frontières, qui est moins une mesure protectionniste qu’une question de fair-play : il s’agit d’inclure le prix du carbone dans tous les produits, qu’ils soient fabriqués localement ou importés. Contrairement à ce qu’ont prétendu certains pays, une telle disposition ne serait pas contraire aux règles de l’OMC. Et si les pays européens y étaient opposés, c’est surtout parce qu’ils n’étaient pas favorables au « paquet énergie climat », qui comprend notamment l’engagement de réduction des émissions de 20 % pris en décembre 2008 sous présidence française. Le paquet énergie climat ayant été adopté à l’unanimité, la plupart des Etats membres sont désormais favorables à la taxe aux frontières. Aux Etats-Unis, la Chambre des représentants a adopté la proposition de loi Waxman, qui contient le même dispositif sous une autre forme. Et je me rends prochainement à Washington afin de coordonner nos efforts. Ainsi, selon toutes vraisemblances, nous devrions disposer au moins de juin – même s’il faudra probablement encore six à huit mois pour le boucler – d’un dispositif commun applicable aux Etats-Unis, dans l’Union européenne et dans trois provinces chinoises.

Par ailleurs, sur notre demande, la Commission européenne doit faire une proposition de révision de la directive sur la taxation de l’énergie, de façon à intégrer le critère des émissions de carbone.

Tout le monde fait preuve de bonne volonté. Tout le monde sait que la compétitivité de demain se trouve là : dans des turbines plus performantes, des centrales à charbon propres, des systèmes de captage et le stockage du carbone. Pensez-vous une seconde que les Chinois sont assez naïfs au point de ne pas comprendre que la compétitivité liée aux bas coûts n’aura qu’un temps ? Leur vrai combat est celui de la performance énergétique, au sens le plus large.

M. Philippe Armand Martin. Il est vrai que réunir au même endroit 130 chefs d’Etat et de gouvernement est un résultat important. Il n’en demeure pas moins que la Conférence de Copenhague, dans la plus extrême confusion, n’a accouché que d’un document non contraignant, et dont la portée demeure bien en deçà des volontés préalablement affichées. S’il affirme la nécessité de limiter à deux degrés le réchauffement par rapport à l’ère préindustrielle, ce texte ne comporte aucun engagement chiffré de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il se contente de prôner la coopération afin de parvenir le plus tôt possible à une décroissance des émissions.

Les objectifs de réduction de CO2 assignés aux pays industrialisés pour l’horizon 2020 devaient être fixés à cette occasion, mais on ne les connaît toujours pas. Aucune date n’est avancée par ailleurs. Qui mettra en place cette coopération ? Dans la mesure où ses membres sont à peu près d’accord entre eux, l’Union européenne ne pourrait-elle pas jouer un rôle de moteur ? En particulier, n’est-elle pas en mesure d’exercer une influence sur les Etats qui continuent de polluer et refusent de limiter leurs émissions, en taxant à ses frontières les produits fabriqués dans ces pays ? La concurrence des pays ne respectant pas les contraintes environnementales représente en effet, pour l’industrie française et européenne, un handicap énorme.

M. Bernard Deflesselles. Le travail que Jérôme Lambert et moi effectuons depuis dix-huit mois au sujet de la directive de décembre 2008 et des négociations climatiques nous permet d’avoir du Sommet de Copenhague une lecture similaire à la vôtre. Mais il est un aspect de la Conférence que l’on passe généralement sous silence, et c’est dommage : il y a eu un accord politique entre 29 pays, dont les Etats-Unis, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, le Japon, l’Australie, la Russie, la Chine, le Brésil, l’Inde et bien sûr la France. Certes, ce texte n’est pas un accord contraignant, au sens où on l’entend aux Nations unies, mais il donne une direction.

Les pays s’étaient engagés à rendre leur feuille de route fin janvier, et la plupart l’ont fait. Mais l’analyse de ces documents montre que les engagements des pays développés portent globalement sur une réduction de 13 à 18 % des émissions, alors que l’objectif des deux degrés nécessite plutôt 25 à 40 %. Nous sommes encore loin du compte.

Désormais, il faut parler de l’avenir. Plusieurs rendez-vous sont pris : Bonn en avril et en juin, Cancun en novembre et décembre. Comment l’Union européenne peut-elle se positionner ? Qu’il s’agisse des fonds « fast start », pour lesquels un financement à hauteur de 2,4 milliards est prévu, ou des projets relatifs au reboisement et à la lutte contre la déforestation, comment la charge sera-t-elle répartie entre les pays de l’Union ?

La conclusion de tout cela, c’est qu’il faut inclure le coût du carbone dans les produits. À ce sujet, les négociations avancent avec les Etats-Unis. Tant mieux si le Congrès va dans cette direction en adoptant le projet Waxman. Et si la Chine s’y met, nous aurons accompli une partie du chemin. Il y a donc lieu d’être optimiste, même s’il est clair que nous ne pourrons jamais parvenir à un accord contraignant associant tous les Etats de la planète.

M. Robert Lecou. Je profite de votre présence, monsieur le ministre, pour aborder un sujet sur lequel je travaille avec mon ami Jean Gaubert, la proposition de règlement sur les biocides. Les ménagères utilisent au quotidien ces produits qui, en détruisant les micro-organismes, contribuent à assurer la sécurité sanitaire. Les produits traités avec des biocides sont également concernés, y compris ceux qui sont fabriqués à l’étranger. Je pense par exemple à ces canapés importés de Chine dont les utilisateurs ont parfois été victimes de graves réactions allergiques.

Le projet de réglementation représente un progrès, mais nous semble comporter certaines insuffisances. Ainsi, des critères d’exclusion sont prévus pour recenser les substances actives qu’il convient a priori d’écarter dans la composition des produits. Mais ne faudrait-il pas compléter les critères sanitaires par des critères environnementaux ?

Par ailleurs, de nombreuses PME françaises ne pourront supporter le coût lié à la constitution des dossiers techniques. Sans remettre en question la prévention des risques sanitaires et environnementaux, ne faudrait-il pas prévoir certaines adaptations et garantir, pour les plus petites entreprises, l’obtention de lettres d’accès aux données relatives aux substances actives qui leur seront procurées par les distributeurs ? On éviterait ainsi les incertitudes liées aux négociations commerciales. Il y va de la survie des PME concernées.

M. Jean-Louis Borloo. Plus l’entreprise est petite, plus il est compliqué pour elle de constituer un dossier et d’acquérir les éléments d’information nécessaires. Sur le troisième sujet, qui concerne la propriété des solutions, un groupe de travail comprenant des professionnels doit nous faire des propositions dans les semaines qui viennent. En ce qui concerne les coûts d’information, une mission a été lancée pour organiser la concertation avec les branches, les chambres de métier et les chambres de commerce, et recenser les points de difficulté avec les directions régionales de l’environnement et de l’aménagement du territoire. Je ne suis donc pas encore en mesure d’apporter une réponse complète sur ce sujet, mais le problème est réel.

D’une manière générale, il existe des points de tension concernant le règlement REACH sur le contrôle des substances chimiques, et il ne faut pas sous-estimer les difficultés qu’entraîne son application pour les entreprises françaises, en particulier pour les petites et moyennes entreprises. Nous travaillons actuellement sur le sujet.

J’en viens aux questions de M. Martin. Contrairement à une idée répandue, chacun des grands pays concernés a notifié à l’ONU les engagements chiffrés pris oralement par les chefs d’Etat et de Gouvernement pendant la Conférence de Copenhague. La plupart l’ont même fait avant le 31 janvier. C’est le cas pour un ensemble de pays représentant plus de 90 % des émissions de gaz à effet de serre. En outre, les deux tiers ont également indiqué les plans qu’ils comptaient mettre en œuvre pour y parvenir.

Pour suivre ces engagements, il nous paraît indispensable de mettre en place une organisation mondiale de l’environnement. Elle ne doit pas être un tribunal, mais plutôt un lieu d’influence, de négociations, de transmission des pratiques. On pourrait même envisager qu’elle ait le droit de présenter des questions préjudicielles par rapport à l’OMC.

En effet, nous devons nous poser la question de savoir quelle est la limite du droit des échanges par rapport à un prix donné. Ainsi, un certain nombre de pays soutiennent la nécessité d’une gestion durable des forêts. Or la gestion durable du Bassin du Congo, par exemple, a un coût très important. Cela implique un travail scientifique très élaboré – de nombreux professionnels français sont d’ailleurs mobilisés en ce sens – et des moyens très importants. Cela coûte bien plus cher que de se contenter d’abattre des arbres, leur faire descendre le fleuve, les charger sur un cargo et les envoyer chez Ikea. Il faut bien que l’organisation du commerce en tienne compte si l’on souhaite que toutes les forêts du monde soient gérées de la même façon.

Cette organisation mondiale pourrait voir le jour dans trois ans, soit vingt ans après le Sommet de Rio. Sous la forme que j’ai indiquée – c’est-à-dire celle d’une organisation souple de pilotage, d’une puissance d’influence et non d’un tribunal –, elle ne rencontre plus beaucoup de résistances. Mais ce que nous disent nos interlocuteurs, c’est qu’il ne faut pas mêler la création de l’OME, qui relève d’un sujet plus vaste, avec les suites de Copenhague. En effet, si une telle organisation était chargée du suivi des engagements pris pendant la Conférence, cela reviendrait à sortir du système onusien des COP. Il y a eu suffisamment de malentendus comme cela.

L’Europe est-elle en situation de pousser les choses ? L’Union européenne est probablement l’organisation la plus concernée et la plus capable en ce domaine, mais elle n’est pas homogène. Pour aborder de tels sujets, la durée d’une présidence tournante paraît extrêmement courte. Quant à la présidence permanente, elle doit trouver ses marques. Ce qui peut faire bouger les choses, c’est un accord entre la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, susceptible d’entraîner les autres Etats membres.

J’ai ici un document indiquant la position de chaque membre de l’Union sur le mécanisme d’inclusion carbone – MIC –, c’est-à-dire la taxe carbone aux frontières. Sur ce sujet, la France était complètement isolée il y a un an. Aujourd’hui, en Allemagne, la chancelière est plus convaincue que certains ministères techniques ; l’Autriche, la Belgique, l’Estonie, la Finlande, la Grèce, la Hongrie, l’Irlande, l’Italie, la Lituanie, le Luxembourg, la Pologne, la République tchèque, la Roumanie sont favorables ou plutôt favorables à cette idée ; en Bulgarie et au Portugal, son examen est en cours ; l’Espagne adopte une position d’attente ; le Royaume-Uni, d’abord hostile, ne s’est pas opposé à la rédaction des conclusions du Conseil européen que nous avons proposée ; la Slovénie juge le débat prématuré. Quant aux Pays-Bas, ils sont encore réservés. Seul le Danemark est vraiment opposé à ce mécanisme. Nous sommes donc proches d’un résultat sur ce sujet. D’ailleurs, à partir du moment où l’Europe adopte le paquet énergie-climat, une telle évolution est logique. Je n’ai donc pas d’inquiétude quant à la réussite de cette initiative ; ce qui me tracasse, c’est de faire en sorte que les Chinois s’y rallient. De toute façon, le véritable objectif, c’est d’aboutir à un marché mondial du carbone. Dans ce cas, une taxe carbone deviendrait inutile.

M. Deflesselles a évoqué l’accord politique à 29. Il faut rappeler à ce sujet que les organisateurs de la conférence n’avaient pas prévu la moindre réunion de chefs d’Etat et de Gouvernement, mais seulement un dîner avec la famille royale ! Il a fallu que les présidents brésilien et français protestent vivement pour qu’à 23 heures, dans une salle plus petite que celle où nous nous trouvons, une telle réunion ait lieu. Chaque sous-continent, région ou organisation a donc désigné ses représentants, si bien que les 29 présents représentaient en fait l’ensemble des pays participant à la conférence. Ainsi, Mme Angela Merkel et M. Nicolas Sarkozy parlaient pour les 27 pays de l’Union, MM. Meles Zenawi et Jacob Zuma pour l’ensemble de l’Afrique, etc.

Vous avez indiqué que la somme des engagements notifiés au 31 janvier correspondait à une réduction de 18 % des émissions, alors qu’il faudrait entre 25 et 40 %. C’est vrai pour les pays industrialisés, mais les pays émergents vont plutôt plus loin. Et si on avait laissé s’appliquer la formule Business as usual, on aurait une augmentation de 30 % ! L’inversion de tendance est donc acquise.

En ce qui concerne le financement de 2,4 milliards, la clé de répartition est fixée. Mais cela ne signifie pas que les chèques soient remplis…

M. Jérôme Lambert. Le système économique mondial privilégie le profit à court terme par rapport à la gestion à long terme. Or, le changement climatique et ses conséquences n’échappent malheureusement pas à cette logique. Les bons sentiments ne suffisent pas : il faut trouver la bonne méthode, qui remette en cause les fondamentaux des règles des échanges et du développement économiques. Nous sommes encore loin du compte.

Peu de temps encore avant la réunion de Copenhague, vous affirmiez que vous fondiez de grands espoirs sur celle-ci. Or, faute d’avoir réglé avant le sommet bon nombre de difficultés, Copenhague a été un immense espoir déçu.

Vous expliquez l’absence d’accord contraignant par le fait qu’un tel accord aurait risqué d’empiéter sur la souveraineté des Etats. Cependant, il conviendrait de mettre en place un organisme assurant un contrôle.

M. Jean-Louis Borloo. Plutôt un suivi qu’un contrôle.

M. Jérôme Lambert. Comment établir des règles en matière de taxe carbone aux frontières si l’on ignore la situation chez ses voisins ? Un minimum de contrôle s’impose. Or, le refus d’un tel contrôle est précisément l’une des raisons de l’échec de Copenhague.

Tous les Etats ont certes rendu leur feuille de route, mais le total est loin de ce qu’on aurait pu espérer pour atteindre l’objectif d’une limitation de l’augmentation des températures à 2 degrés. En vous réjouissant qu’une certaine dynamique ait été engagée à Copenhague, vous faites preuve d’un bel optimisme. N’oublions pas cependant que les engagements pris à Kyoto, bien que contraignants, n’étaient pas assortis de sanctions, ce qui en a considérablement réduit la portée. Les engagements de Copenhague, quant à eux, ne sont pas même contraignants : espérons que les bonnes intentions affichées par les Etats-Unis, la Chine ou l’Inde s’accompagneront des moyens correspondants, comme c’est le cas pour notre pays – mais peu de véritables résultats ont été obtenus au cours des quinze dernières années. La compétition économique est une réalité du monde où nous vivons, et le réchauffement climatique n’arrangera rien. Évitez donc de dédramatiser trop béatement l’échec de Copenhague, en prétendant qu’il était prévu.

M. Philippe Tourtelier. Monsieur le ministre d’Etat, votre conclusion m’inspire une remarque liminaire. Qu’ils aient ou non signé, tous les pays savent que, face au réchauffement climatique, l’innovation est essentielle et qu’il importe d’avoir une longueur d’avance – à condition toutefois que l’opinion publique continue à croire que le réchauffement climatique est d’origine anthropique. Les climatosceptiques jouent à cet égard un rôle très dangereux : les partisans de l’enseignement de leurs doctrines dans les écoles sont aussi ceux qui demandent l’enseignement du créationnisme. De telles campagnes risquent de déstabiliser la perception de la science et de l’expertise nécessaire, par exemple pour l’application du principe de précaution.

Pour ce qui est de Copenhague, votre explication culturelle est partiellement vraie. Il existe cependant, sur d’autres sujets, des traités contraignants et je partage les inquiétudes de M. Jérôme Lambert quant aux mécanismes de contrôle.

Il ne me semble pas pertinent d’opposer, à propos de Copenhague, l’ONU et les chefs d’Etat, car l’ONU est précisément la représentation de ces derniers. Si donc les groupes de travail de l’ONU n’ont pas abouti, c’est parce qu’ils n’avaient pas reçu de mandats politiques assez forts. Pourquoi les chefs d’Etat ne se sont-ils pas assurés qu’ils auraient leur rôle à Copenhague ? Nous avons assisté à une confrontation brutale, qui s’est terminée comme on sait : la barre avait été placée très haut et la montagne a accouché d’une souris.

Si Copenhague est un échec pour nous, c’en est un aussi pour les pays africains, qui se sont battus pour conserver le protocole de Kyoto, qui est le seul contraignant. Il s’agit même d’un recul. De fait, alors que la Chine s’était déclarée disposée à faire un effort sur l’intensité énergétique de son développement et que M. Obama était prêt à envisager des mesures à l’horizon 2030, toutes ces avancées ont disparu à Copenhague, en raison probablement des dysfonctionnements que j’ai exposés. Les étapes intermédiaires ayant disparu, ne sont restées que quelques notions, comme la limite de 2 degrés ou la question des forêts.

Le pragmatisme s’impose. J’en viens donc à mes questions.

Premièrement, l’Union européenne est apparue très divisée – la France a d’ailleurs pu, quel que soit le bien-fondé de sa démarche, apparaître comme faisant cavalier seul auprès du Brésil et de l’Afrique du Sud. Au moment où l’Europe doit parler d’une seule voix, peut-on encore avoir de telles initiatives sans passer par elle ?

Deuxième question : après que l’Europe a perdu sa crédibilité en ne se montrant pas capable, dans l’année qui a précédé Copenhague, de mettre sur la table les fonds promis, qu’adviendra-t-il des sommes promises cette fois-ci ? S’agira-t-il, pour la France, de fonds recyclés ou de nouvelles sommes ?

Ma troisième question porte sur la gouvernance. Face à l’absence de pilotage que vous évoquez – entre l’inefficacité de l’ONU, le bilatéralisme naissant du G2 et des solutions peu satisfaisantes telles que le G20, qui se déroule hors ONU –, un système de représentation des régions au sein de l’ONU serait-il envisageable ? J’ajoute à ce propos que vous avez raison pour ce qui concerne l’OME.

Enfin, alors que la France a bien négocié le paquet énergie-climat, qui prévoit que les énergies renouvelables doivent représenter 20 % de la consommation finale de l’Europe – et 23 % de celle de la France – en 2020, il est désormais certain que, faute d’une production suffisante d’électricité éolienne terrestre, qui devrait être de 1 300 mégawatts par an au lieu des 1 000 prévus, notre pays ne pourra atteindre l’objectif. De fait, la mission d’information sur l’énergie éolienne vient de rendre un rapport très orienté et des amendements au projet Grenelle II ont été présentés qui, loin d’accélérer le développement de l’éolien terrestre, le feront régresser. Quelles seront les conséquences de cette situation sur la crédibilité de la France ?

Mme Marietta Karamanli. L’objectif de 23 % d’énergies renouvelables d’ici 2020 tient-il compte du nucléaire ? De fait, dans une réponse que vous avez faite récemment à l’une de mes questions, vous vous êtes référé à la directive européenne sur le système d’échange de quotas d’émissions pour déclarer que le nucléaire n’était pas considéré comme émetteur de CO2. Si tel est le cas, quelles sont les coopérations mises en œuvre au niveau communautaire pour résoudre la question des déchets ?

Par ailleurs, alors que les pays développés sont les principaux émetteurs de gaz à effet de serre et que les pays en voie de développement en sont les victimes, quelles initiatives la France est-elle prête à soutenir au niveau de la Commission européenne et du Conseil de l’Union européenne pour apporter une aide aux pays pauvres dans ce domaine ?

M. Gérard Voisin. Vous avez évoqué une confrontation entre chefs d’Etat qui aurait indisposé les scientifiques…

M. Jean-Louis Borloo. Si grande que soit mon admiration pour le travail admirable des négociateurs, qui sont de véritables professionnels et participent chaque année à une CoP et à neuf rendez-vous autour du monde, il vient toujours un moment où la mutation dépend des chefs d’Etat. Ce deuil indispensable des experts a été mal géré à Copenhague. Leur travail sera cependant à nouveau nécessaire après la décision des chefs d’Etat. Certaines décisions doivent se prendre à un certain niveau. C’est crucial.

M. Gérard Voisin. M. Philippe Tourtelier déclarait tout à l’heure que les climatosceptiques qui veulent enseigner leur scepticisme dans les écoles américaines jouent un rôle dangereux. Il me semble toutefois que les spécialistes, qui restent beaucoup entre eux, ont peut-être besoin d’une provocation pour corriger certaines exagérations.

Ma question sera plus terre-à-terre. Alors que le droit communautaire européen influe sur plus de 90 % de la législation française et que l’écologie et le développement durable se sont traduits par une économie globale nouvelle, il importe de réfléchir aux conséquences de cette véritable révolution pour les entreprises françaises – c’est d’ailleurs le sens du rapport dont m’a chargé le Président sur la voiture électrique en Europe. Les Français sauront-ils entrer dans le concret de cette économie nouvelle qui peut créer nombre de métiers et d’emplois nouveaux ? Une réflexion est-elle engagée au niveau interministériel en ce sens ?

M. Jean Gaubert. Je reviendrai brièvement sur le règlement biocide évoqué par M. Lecou, en soulignant quelques points que les services locaux n’ont peut-être pas très bien intégré.

Tout d’abord, les entreprises concernées sont en général de petites entreprises. Ensuite, la non-dangerosité d’un produit va souvent de pair avec son inefficacité – au point que l’application du principe de précaution pourrait en venir un jour à bannir le savon, au motif qu’il tue des organismes vivants !

Par ailleurs, la méthode de négociation pose question. Il arrive trop souvent que les responsables français passent peu de temps à Bruxelles, pensant pouvoir régler les problèmes plus tard, à l’échelle française. Gardons-nous de nous trouver dans la même situation que lors de l’adoption – sous un gouvernement socialiste – de la réglementation sur les produits bio : la France n’ayant pas fait valoir sa position lors des négociations à Bruxelles, la réglementation française se trouve être plus contraignante que celle des autres pays européens, ce qui est un handicap commercial réel face aux producteurs de pays où de moindres contraintes se traduisent par une production moins coûteuse. Ainsi, dans le cas des biocides, nous pourrions nous trouver dans l’incapacité de contraindre les producteurs d’autres pays à ne pas utiliser des produits interdits en France.

M. Christophe Caresche. Comment s’explique le refus de la Commission européenne d’autoriser la France à anticiper la mise aux enchères des quotas d’émissions, alors que cette disposition figurait dans la directive ? De fait, cette possibilité aurait réglé le problème de la censure de la taxe carbone par le Conseil constitutionnel.

Par ailleurs, après y avoir été plutôt favorable, je suis aujourd’hui plus sceptique quant au bien-fondé de la taxe carbone aux frontières de l’Europe. La France n’est-elle pas isolée sur cette question ?

M. Jean-Louis Borloo. La question a déjà été évoquée.

M. Christophe Caresche. Ce mécanisme, qui aura un impact sur certains pays en développement, n’est-il pas contradictoire avec les objectifs de la France dans la négociation internationale ? Il n’est pas choquant d’agiter l’idée d’une telle taxe pour faire avancer la négociation, mais il n’est pas sûr qu’il faille la mettre en œuvre.

En troisième lieu, l’Europe ayant fait après Kyoto le choix d’un marché d’émissions, ne faudrait-il pas privilégier cette formule au niveau international ?

M. Michel Delebarre. Il faut avancer à la fois au niveau européen et à celui des Nations Unies car, s’il doit y avoir un organisme de suivi, il ne se limitera pas à l’échelle européenne. Un tel organisme de suivi n’a pas forcément besoin d’être contraignant.

Par ailleurs, la France ne pourra pas suivre seule certains dossiers – comme celui de la déforestation –, qui doivent être pris en charge à l’échelle européenne. Il conviendrait de demander au président permanent du Conseil européen de prendre en charge la question climatique comme une vraie responsabilité européenne. Or, cet enjeu n’est pas souligné comme prioritaire dans le document UE 2020 de M. Barroso. Je crains que l’on ne continue à discuter de l’avenir économique de l’Union européenne sans que la mise en œuvre de ces dispositifs soit considérée comme une priorité.

M. Jean-Louis Borloo. Je ne me sens pas défenseur d’un processus que la France aurait engagé. Ce serait du reste faire trop d’honneur à la France que de la considérer comme l’alpha et l’oméga de Copenhague. En revanche, je m’efforce de m’ouvrir et d’échanger autant que possible.

Du reste, nous avions parfaitement pressenti et analysé ce qui s’est produit. En présentant à la Commission des affaires économiques et du développement durable, qui était alors compétente en la matière, le plan « justice-climat », j’ai rappelé que la France, qui avait négocié le paquet énergie-climat européen, était bien placée pour savoir combien cette négociation entre 27 partenaires ayant la même culture et les mêmes procédures avait été difficile. Compte tenu de ces difficultés, il n’y avait pas une chance sur un milliard d’obtenir un accord de même nature à Copenhague. Or, le plan « justice-climat » français correspond exactement à la décision politique de Copenhague.

J’avais alors déclaré, en des termes qui ont fait ricaner certains qu’il faudrait que les « tauliers », c’est-à-dire les chefs d’Etat et de gouvernement, soient présents à Copenhague. De fait, c’est bien la France qui les y a fait venir – non que nous soyons plus malins que les autres, mais, je le répète, nous avions assez souffert pour obtenir un accord à 27 pour savoir que nous ne pourrions pas en obtenir un semblable à 130.

Le plan « justice-climat » propose même un tableau des propositions d’engagements notifiées. Il prévoit que les pays qui peuvent revenir en annexe 1 doivent le faire, et que, pour les autres, il n’est pas dramatique qu’ils ne le puissent pas. Ainsi, même si les Etats-Unis n’intègrent pas l’annexe 1, ils doivent pouvoir accélérer le mouvement d’ici 2030. Quant à la Chine, elle devrait pouvoir réduire son intensité carbone. Nous étions convaincus qu’un plan tel que « justice-climat » était nécessaire pour les pays les plus vulnérables. C’est le sens des 10 milliards prévus au titre du « Fast Start » et des 100 milliards promis à terme. Bien avant Copenhague, donc, nous étions conscients de toutes ces questions.

En revanche, la position américaine a été mal évaluée. Nous espérions que Barack Obama, participant en personne à la conférence, apporterait en cadeau de bienvenue un engagement à réduire de 21 % ou 22 % les émissions de CO2 de son pays, au lieu des 17 % prévus. Pour tout le reste, les résultats correspondent parfaitement à ce qui figurait dans le plan « justice-climat ».

Il n’est pas juste de dire, comme le fait M. Tourtelier, que les résultats sont inférieurs aux attentes. Cette idée est le résultat d’une opération de désinformation extravagante. Nous sommes en guerre – une guerre qui mobilise chaque mois des centaines de millions de dollars et dans laquelle nous sommes manipulés comme des gamins ! Or, les pays ont formulé des engagements – je pense par exemple à l’Australie, à la Biélorussie (–10 %), au Canada (passant de + 26 % à –17%), à la Croatie, aux Etats-Unis (de –17 % à –42 % en 2030).

M. Philippe Tourtelier. Quelle crédibilité ont-ils ?

M. Jean-Louis Borloo. Celle d’Etats souverains qui décident d’engager leurs peuples ! N’allons pas dire, en tout cas, que nous attendions autre chose : relisez le plan « justice-climat ». J’ai assez dit qu’il n’y aurait pas d’accord de type européen à 192.

Il reste vrai que les enjeux économiques de cette guerre sont considérables et que nous sommes d’une naïveté stupéfiante, face à des groupes d’Etat – je pense en particulier au G77 – qui, à bien des égards jouent un rôle ne correspondant pas à la réalité. Dans cette guerre, nous avons été manipulés. L’opération est fabuleusement bien montée. Pour réussir à expliquer pendant cinq jours aux délégués, dans le hall de la conférence, que les discussions entre MM. Obama et Medvedev ne représentaient rien, il fallait mettre en œuvre de gros moyens et avoir prévu le coup depuis très longtemps. Je le répète : relisez attentivement le plan « justice-climat » et gardez-vous de la désinformation.

Dans cette guerre, les « climatocyniques » jouent leur rôle : regardez donc qui a dit quoi, et quand. Une réduction de la production énergétique mondiale a des conséquences financières et géopolitiques très directes – c’est même le plus grand bouleversement qui soit. Une telle décision ne peut pas être prise au niveau des négociateurs, mais seulement à celui des chefs d’Etat et de gouvernement.

Pour ce qui est du suivi, n’essayons pas de faire croire que nous pourrions avoir un traité instituant une cour de justice. Voyons plutôt quels mécanismes automatiques et vérifiables peuvent être mis en place. Le partage transparent de l’information est un moteur d’influence majeur – même si se posent par ailleurs des problèmes liés aux brevets.

L’Europe ne s’est pas montrée divisée, malgré des différences d’ordre culturel – nos amis du Nord de l’Europe étant par exemple moins exigeants vis-à-vis des Etats-Unis, dont l’engagement nous semblait relativement faible. Sur cette question, les positions des pays européens sont complexes, avec une Europe du Sud qui ne se montre pas très intéressée et ne bloque jamais les décisions, une Europe de l’Est en transition, angoissée mais consciente de la chance qui lui est offerte, et une Europe du Nord donneuse de leçons, bien que le pays hôte de la réunion ait lui-même dérapé de plus de 20 % par rapport aux objectifs de Kyoto.

Dès lors qu’on admet qu’il est extraordinaire que les chefs d’Etat se soient déplacés et aient confirmé leurs déclarations, il n’y a pas lieu de présenter Copenhague comme un échec. Réunir 130 chefs d’Etat sur cette question est bien un succès, malgré le lavage de cerveau auquel nous sommes soumis depuis des mois. Du reste, même s’il existait un doute, nous aurions tout intérêt à considérer qu’il s’agit d’un succès, faute de quoi il serait difficile de justifier que l’on consacre les 10 milliards de dollars du « Fast Start » à des engagements qui n’existent pas – ce qui autoriserait certains à ne rien faire en attendant la conférence de Cancun. Comment demander des fonds à des Etats que l’on traite d’incapables ?

M. Jérôme Lambert. Il faut dire la vérité !

M. Jean-Louis Borloo. Je ne fais que ça – mais je comprends qu’elle ne soit pas populaire.

M. Jérôme Lambert. La réduction de 17 % à laquelle s’engagent les Etats-Unis est très insuffisante, car si l’on prend l’année de référence du protocole de Kyoto, 1990, elle ne représente qu’une réduction de 4 %.

M. Jean-Louis Borloo. Mon propos n’était pas de défendre les chiffres, mais de signaler à M. Tourtelier, qui déplore la disparition d’engagements chiffrés à Copenhague en décembre 2009, que ces chiffres ont été notifiés officiellement le 31 janvier 2010 – et qu’ils étaient parfois même supérieurs à nos prévisions. Quand le monde se met en mouvement, on peut choisir d’applaudir et d’emmener les autres avec soi, ou de regretter que ce ne soit pas assez bien – et c’est alors la victoire de ceux qui ne veulent pas avancer.

M. Philippe Tourtelier. Il faut mettre de l’argent sur la table !

M. Jean-Louis Borloo. Pour ce qui concerne l’éolien, je tiens d’abord à souligner que l’idée que, pour atteindre un taux de 23 % de production d’énergie à partir de sources renouvelables, il faudrait 10 % d’électricité éolienne, est contredite par la programmation pluriannuelle des investissements de production d’électricité (PPI). La production qui progresse le plus en France est la biomasse, pour laquelle les deux premiers appels d’offres ont été remplis à 100 % et qui donnera lieu prochainement à un troisième appel d’offres. Je vous communiquerai les chiffres exacts de ce développement au cours des deux dernières années. Personne plus que moi ne souhaite développer l’éolien – lequel a d’ailleurs progressé de 82 % l’année dernière –, mais il est indispensable d’encadrer ce développement, sans quoi il ne se fera pas.

M. Philippe Tourtelier. Il est déjà très encadré. Il faut huit ans pour monter un dossier !

M. Jean-Louis Borloo. C’est là un débat que nous aurons prochainement.

Après avoir privilégié les installations les plus faciles à mettre en œuvre, le niveau de recours est aujourd’hui trop important. Il est fréquent que des installations soient hors service, faute de cohérence dans l’implantation. On peut certes, comme pour l’électricité photovoltaïque, débattre du calibrage, qui peut sans doute être ajusté, mais pas de la philosophie générale.

Pour ce qui est des énergies renouvelables, nous disposerons vers le 2 ou 3 mai d’un point plus précis sur la puissance installée et les demandes de raccordement. Le problème est celui de la surchauffe : le développement est bien plus rapide que prévu, ce qui induit des problèmes de formation, de contre-performance et de malfaçons – sans parler des aspects financiers, sur lesquels le président et le rapporteur général de la Commission des finances auraient certainement bien des choses à dire.

Monsieur Voisin, le système de bonus-malus écologique a déclenché une appréciation chez les constructeurs automobiles du « mass market », français et autres, et il est apparu, comme le montre du reste votre rapport, qu’il fallait mener toutes les évolutions de front, sous peine d’échec. Cela suppose donc un programme d’infrastructures de 300 millions d’euros, notamment pour l’implantation dans les principales collectivités territoriales, sous dix-huit mois, de points recharge munis des prises qui ont fait l’objet d’un accord avec l’Espagne, l’Allemagne, la Belgique et la Suisse – et bientôt, je l’espère, avec tous les autres pays européens –, le développement, par sécurité, d’une double filière de batteries reposant sur les technologies ions et polymères, le développement des filières professionnelles et le bonus à 5 000 euros. Il s’agit là d’un système cohérent, et cela d’autant plus que l’énergie produite en France est globalement moins carbonée qu’ailleurs. La stratégie électrique de notre pays est pragmatique et elle avance. Votre rapport, monsieur Voisin, est donc un atout qu’il nous faut étudier d’un point de vue très pratique.

Monsieur Caresche, la taxe aux frontières vise à répondre aux disparités de taxation des émissions de carbone liées à la production d’énergie. Les Etats opposés à la directive européenne sur le prix du carbone – soit, au moment de la décision, 26 sur 27, compte tenu des intérêts des industries de chaque pays – sont aujourd’hui de moins en moins hostiles à une taxe carbone aux frontières, quatre pays conservant une position ambiguë – dont le Danemark, qui y est plutôt opposé.

Ce mécanisme a vocation a être mis en place, puis démonté. L’important est que la Chine l’adopte. Je précise à ce propos que M. Zhenhua m’a indiqué lundi dernier que trois expérimentations étaient en cours dans trois provinces chinoises, à Pékin, Tianjin et Shanghai, et je ne désespère pas de voir se mettre en place à la fin de l’année ou au début de l’année prochaine un marché mondial du carbone ou, à tout le moins, trois marchés – l’un américain, l’autre pour une partie de la Chine et le troisième pour l’Europe.

Le mécanisme de taxe aux frontières n’est donc pas un objectif en soi : la réussite serait de pouvoir l’éviter. Si, en revanche, on ne montre pas sa détermination à le faire, il ne se passera rien et l’on ne fera que s’attirer des reproches.

M. Christophe Caresche. Quelle est la position de la Commission européenne sur le refus des quotas ?

M. Jean-Louis Borloo. Un premier élément de réponse, qui dépasse le cadre européen, tient à ce que, l’attribution de quotas étant par nature imparfaite, certains pays, du fait de l’effondrement de leur production industrielle, disposent d’une grande quantité de quotas excédentaires, ce que l’on a dénommé l’« air chaud ». A Copenhague, tout le monde craignait que cette question soit introduite dans la discussion, notamment par les Russes. Il n’est donc pas question de toucher à ces quotas – qui, du reste, seront caducs à la fin du processus de Kyoto. Cette question est très sensible.

La deuxième raison est qu’il n’est peut-être pas indispensable d’imposer la modification d’un système qui doit prendre fin dans deux ans – sans compter qu’une directive sur l’électricité carbonée doit prochainement être adoptée.

Monsieur Delebarre, la forêt pose un énorme problème. Les règles de comptabilisation des émissions prévues par le protocole de Kyoto ne sont pas satisfaisantes car elles conduisent à minorer les émissions des Etats ayant des politiques peu protectrices des forêts. Ainsi la Suède et le Danemark ont procédé à des calculs forfaitaires et si on recalculait aujourd’hui leurs émissions réelles, le chiffre bondirait de 12 %. Pour la France, à l’inverse, du fait de la reforestation historique des trente dernières années, ce chiffre serait aujourd’hui inférieur de 8 %. L’Autriche est dans le même cas que la Suède et le Danemark, le vrai leader dans ce domaine – et notre meilleur allié – étant la Norvège. Ces situations différentes expliquent la difficulté d’arriver à une position unique de l’Union européenne sur cette question.

M. Michel Delebarre. Il ne faut pas que l’Europe puisse tirer argument du fait que la France s’active pour ne pas bouger. Il faut pouvoir obliger la présidence et la Commission européennes à avancer à la suite de Copenhague, pour éviter une situation préjudiciable à la crédibilité de l’Europe.

M. Jean-Louis Borloo. C’est vrai. À force d’être devant, on risque de disparaître.

M. Michel Delebarre. Ou de se retrouver tout seul, ce qui n’est pas bon pour la crédibilité de l’Europe.

M. Jean-Louis Borloo. Madame Karamanli, je vous confirme que le nucléaire n’est pas inclus dans les secteurs émetteurs de CO2.

Mme Marietta Karamanli. Quelle sera la réflexion de la France sur le traitement des déchets nucléaires ? Quelle aide apporterons-nous aux pays en voie de développement ?

M. Jean-Louis Borloo. Il existe une politique des déchets, qui fait l’objet de critiques de la part des antinucléaires et d’un contrôle exigeant de la part de ceux qui considèrent que, compte tenu du contexte, le nucléaire est un savoir-faire utile, ou de ceux qui sont ouvertement partisans de cette technologie. La gestion des déchets est indispensable et elle est assez bien contrôlée en France.

Quant aux autres pays, la France ne se mêle pas de la gestion de leurs déchets, à moins bien sûr qu’ils ne lui demandent une assistance dans le cadre de contrats.

Pour ce qui est du financement, j’insiste une fois de plus sur le fait qu’on ne peut pas à la fois mépriser l’argent mis sur la table par les 130 chefs d’Etat qui se sont réunis à Copenhague et leur en demander plus. C’est une question de cohérence. Sur proposition française – le plan « justice-climat » –, les chefs d’Etat ont prévu un financement de 10 milliards de dollars par an, pour atteindre 100 milliards en 2020, sous forme notamment de financements innovants.

Nous avons proposé une étude sur les financements innovants, dont les bénéficiaires sont définis. Une grande avancée de Copenhague a consisté à distinguer les grands pays émergents, qui ne seront pas bénéficiaires de ces financements, et les pays réellement pauvres et vulnérables. C’est là une véritable révolution géopolitique. Ce travail, confié à M. Meles Zenawi, Premier ministre éthiopien, et au Premier ministre britannique, M. Gordon Brown, est en cours. La France, qui y participe, propose un prélèvement sur les transactions financières. D’autres Etats souhaitent une formule mixte entre les transactions financières et le transport maritime. Une prochaine réunion est prévue pour le 31 mai. M. Jean-Pierre Landau, brillant auteur d’un rapport de 2004 sur les financements innovants, reste associé à ces travaux.

J’ai la certitude absolue qu’il y aura une nouvelle donne financière mondiale. D’ici là, il importe de mettre en place des mécanismes concrets mettant en œuvre les engagements politiques de Copenhague. Sur les 10 milliards de dollars prévus pour le financement « fast start », la part de l’Europe est de 2,4 milliards, soit environ 280 millions pour la France. Je précise qu’il ne s’agira pas de fonds recyclés, malgré la tendance naturelle des donateurs en ce sens. A cet égard, je ne cesse de répéter qu’en présentant Copenhague comme un échec, le risque est de repousser la mise en œuvre de ces financements. Restons donc vigilants.

Le Président Pierre Lequiller. Ce débat a été d’une grande qualité. Monsieur le ministre d’Etat, je vous remercie pour vos réponses passionnées et passionnantes.

II. Communication de M. Guy Geoffroy sur l’ouverture de nouvelles négociations avec les Etats-Unis relatives à un accord « Swift » (document E 5214)

Le Président Pierre Lequiller. En l’absence de notre collègue Guy Geoffroy retenu par la séance publique, je vais vous présenter la proposition de résolution qu’il nous suggère d’adopter sur l’ouverture de nouvelles négociations avec les Etats-Unis relatives à un accord « Swift ».

Il constate que le projet de mandat confié à la Commission européenne prévoit un accord non limité en durée. Aussi vous propose-t-il de demander que la durée de cet accord soit limité à cinq ans, pour permettre d’ici là à l'Union européenne de mettre en place, dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, un système européen de contrôle des transferts financiers, équivalent à celui créé par les Etats-Unis.

Puis la Commission a adopté la proposition de résolution suivante :

« L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la recommandation de la Commission au Conseil visant à autoriser l'ouverture de négociations en vue d'un accord entre l'Union européenne et les Etats-Unis d'Amérique destiné à mettre à la disposition du département du Trésor des Etats-Unis des données de messagerie financière dans le cadre de la prévention du terrorisme et du financement du terrorisme ainsi que de la lutte contre ces phénomènes (SEC (2010) 315 final/no E 5214),

1. Se félicite des améliorations apportées par le projet de mandat de négociation visant à la conclusion d’un nouvel accord « SWIFT », tenant compte des avis précédemment exprimés à ce propos, notamment par le Parlement européen ;

2. Constate, en particulier, l’existence d’avancées essentielles en ce qui concerne la possibilité de recours devant la justice américaine offerte aux non résidents ;

3. Estime toutefois que les dispositions de cette recommandation permettant à l’Union européenne de se doter d’un éventuel programme d’identification et de suivi des financements destinés au terrorisme (TFTP) et d’engager une coopération avec les Etats-Unis sur une base de réciprocité doivent impérativement et rapidement être mises en œuvre ;

4. Considère que l’examen périodique par le Parlement européen du bilan de cet accord ne constitue pas une garantie suffisante, le Parlement européen ne disposant pas de la compétence de dénonciation d’un accord qui ne serait pas exécuté sur une base de réciprocité ;

5. Demande par conséquent que le futur accord soit conclu pour une durée maximale de cinq ans. »

Puis la Commission a approuvé ce texte, sous réserve des termes de la proposition de résolution.

III. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Point B

La Commission a approuvé les textes ci-dessous.

Ø Energie

- proposition de décision du Conseil adressant à la Commission des directives pour la négociation d'un accord de coopération dans le domaine des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire entre la Communauté européenne de l'énergie atomique (Euratom) et le gouvernement de l'Australie (document E 5204).

Ø Environnement

- recommandation de la Commission au Conseil autorisant la Commission à participer, au nom de l'UE, aux négociations des parties contractantes à la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination en ce qui concerne les questions liées à « l'amendement portant interdiction » apporté à la Convention de Bâle et adopté par la décision III/I (document E 5200).

Ø Espace de liberté, de sécurité et de justice

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'une agence pour la gestion opérationnelle des systèmes d'information à grande échelle dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice (document E 4560) ;

- initiative pour une directive du Parlement européen et du Conseil relative à la décision de protection européenne (document E 5020) ;

- projet de décision du Conseil sur l'application à la République de Bulgarie et à la Roumanie des dispositions de l'acquis de Schengen relatives au système d'information Schengen (document E 5158) ;

- budget d'installation et de fonctionnement du C.SIS pour 2010 et tableau pluriannuel des dépenses d'installation autorisées du C.SIS (situation au 31 décembre 2008) (document E 5208).

Ø Recherche

- proposition de décision du Conseil concernant la conclusion, par la Commission, de l'accord entre la Communauté européenne de l'énergie atomique (Euratom) et le ministère de l'énergie des Etats-Unis d'Amérique (USDOE) dans le domaine de la recherche et du développement en matière de sécurité nucléaire (document E 5211).

Textes « actés »

Aucune observation n’ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :

Ø Agriculture

- projet de Règlement de la Commission portant modification de l'annexe II du règlement (CE) no 854/2004 du Parlement européen et du Conseil fixant les règles spécifiques d'organisation des contrôles officiels concernant les produits d'origine animale destinés à la consommation humaine (document E 5171) ;

- projet de directive de la Commission modifiant la directive 2008/60/CE établissant des critères de pureté spécifiques pour les édulcorants (document E 5172) ;

- projet de règlement de la Commission du modifiant l'annexe III du règlement (CE) no 853/2004 du Parlement européen et du Conseil fixant des règles spécifiques d'hygiène applicables aux denrées alimentaires d'origine animale (texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (document E 5173) ;

- projet de décision de la Commission modifiant la décision 2004/452/CE établissant la liste des organismes dont les chercheurs peuvent être autorisés à accéder à des données confidentielles à des fins scientifiques (texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (document E 5174).

Ø Energie

- proposition de règlement du Conseil concernant la communication à la Commission des projets d'investissement relatifs à des infrastructures énergétiques dans la Communauté européenne, et abrogeant le règlement (CE) no 736/96 (document E 4642).

Ø Questions budgétaires

- projet de budget rectificatif no 1 au budget général 2010 - Etat des recettes et des dépenses par section - Section I – Parlement (document E 5203-1) ;

- projet de budget rectificatif no 2 au budget général 2010 - Etat des recettes et des dépenses par section - Section III - Commission - Section VI - Comité économique et social européen - Section VII - Comité des régions (document E 5203-2).

Accords tacites

En application de la procédure adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), et 28 janvier 2009 (projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines nominations), celle-ci a approuvé tacitement les documents suivants :

- décision du Conseil portant nomination d’un membre autrichien du Comité économique et social européen (document E 5205) ;

- décision du Conseil portant nomination d’un membre polonais et d’un suppléant polonais du Comité des régions (document E 5206) ;

- décision du Conseil portant nomination d’un membre grec et d’un suppléant grec du Comité des régions (document E 5207) ;

- décision du Conseil portant nomination de neuf membres de la Cour des comptes (document E 5209) ;

- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1001/2008 imposant un droit antidumping définitif sur les importations de certains accessoires de tuyauterie, en fer ou en acier, originaires, entre autres, de Malaisie (document E 5213).

La séance est levée à 18 h 45

Membres présents ou excusés

Commission des affaires européennes

Réunion du mardi 6 avril 2010 à 17 heures

Présents. - M. François Calvet, M. Christophe Caresche, M. Bernard Deflesselles, M. Lucien Degauchy, M. Michel Delebarre, M. Jean Gaubert, M. Hervé Gaymard, Mme Anne Grommerch, M. Régis Juanico, Mme Marietta Karamanli, M. Jérôme Lambert, M. Robert Lecou, M. Pierre Lequiller, M. Lionnel Luca, M. Thierry Mariani, M. Philippe Armand Martin, M. Jacques Myard, M. Didier Quentin, Mme Valérie Rosso-Debord, M. Philippe Tourtelier, M. Gérard Voisin

Excusés. - M. Pierre Bourguignon, M. Michel Diefenbacher, M. Daniel Fasquelle, M. Michel Herbillon, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. Francis Vercamer