XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023

Première séance du jeudi 01 décembre 2022

Sommaire détaillé
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Première séance du jeudi 01 décembre 2022

Présidence de Mme Naïma Moutchou
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Retraite de base des non-salariés agricoles

    Discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Olivier Marleix, M. Julien Dive et plusieurs de leurs collègues visant à calculer la retraite de base des non-salariés agricoles en fonction de leurs seules vingt-cinq meilleures années de revenus (nos 353, 515).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Dive, rapporteur de la commission des affaires sociales.

    M. Julien Dive, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    Pas moins de 580 euros brut : voilà ce qui sépare chaque mois un agriculteur retraité d’un salarié à la retraite. Pour s’en tenir aux moyennes, le premier, avec une pension de 800 euros par mois, perçoit en un an près de 7 000 euros de moins que le second.

    M. Maxime Minot

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    C’est une honte !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    C’est là un constat d’échec ancien, bien établi, mais d’autant plus terrible : notre système d’assurance vieillesse ne parvient pas à garantir aux agriculteurs à la retraite un niveau de vie digne. Or, parmi les facteurs expliquant la faiblesse des pensions agricoles, on relève le fait que le calcul des droits des agriculteurs se fonde sur l’ensemble de leur carrière,…

    M. Maxime Minot

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    Eh oui !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    …tandis que ceux des salariés et indépendants sont calculés en fonction des vingt-cinq meilleures années de revenus. En dépit de l’engagement réitéré de la profession, l’idée d’un alignement a été laissée, si je puis dire, en friche, repoussée de réforme des retraites en réforme des retraites. Dix ans après le dernier rapport publié à ce sujet par l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), cette proposition de loi déposée par les députés du groupe Les Républicains entend remédier à une injustice qui n’a que trop duré.

    M. Maxime Minot

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    Il est temps !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    En proposant de fonder sur leurs vingt-cinq meilleures années le calcul des pensions de retraite des agriculteurs, nous visons trois objectifs principaux.
    Tout d’abord, il s’agit de limiter les effets sur les droits à pension de la forte variabilité des revenus agricoles, conséquence des fluctuations des prix, des aléas climatiques pour les récoltes, épizootiques pour les cheptels. En écartant les mauvaises années, la réforme permettrait de mettre un terme à la double peine des agriculteurs : une baisse de revenu dans l’immédiat, une baisse de la pension de retraite par la suite.
    Ensuite, le passage à un calcul des retraites agricoles sur la base des vingt-cinq meilleures années rétablirait l’équité entre assurés sociaux : il est injuste que le bénéfice d’une règle appliquée à la quasi-totalité des retraités soit refusé aux agriculteurs, qui cumulent déjà les difficultés tout au long de leur carrière. Par rapport aux autres actifs, en effet, leur charge de travail est particulièrement lourde : neuf agriculteurs sur dix travaillent le week-end, deux sur trois ne partent pas en vacances plus de trois jours consécutifs. S’ajoute à ces conditions de travail contraignantes une situation financière souvent peu enviable au regard de celle des autres non-salariés.
    Enfin, précisément, cette réforme contribuerait à rendre le métier plus attractif. À l’heure actuelle, les salariés ou indépendants qui font le choix courageux de devenir agriculteurs passent d’un régime d’assurance vieillesse où seules leurs meilleures années sont prises en compte à un régime où le montant des pensions est calculé sur l’ensemble de la carrière. L’alignement du second sur le premier constituerait donc, je le répète, un levier d’attractivité et encouragerait ces reconversions.

    M. Maxime Minot

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    Eh oui !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Malgré ces objectifs louables, et dont je ne doute pas qu’ils nous rassemblent tous, la commission des affaires sociales a rejeté ce texte par dix-huit voix contre dix-huit.

    M. Maxime Minot

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    C’est une honte !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Mes chers collègues, il aura manqué une voix pour que la proposition de loi soit adoptée en commission, ce qui nous aurait permis d’envoyer, dès cette étape, un signal fort aux agriculteurs qui suivent nos débats. À défaut, je répondrai point par point aux arguments avancés pour justifier ce rejet.
    Premièrement, le passage aux vingt-cinq meilleures années ne profiterait qu’aux agriculteurs à la carrière ascendante.

    Mme Véronique Louwagie

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    Très bonne remarque !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    D’une part, la même critique pourrait être formulée à l’égard des régimes qui suivent déjà cette règle, à commencer par le régime général ; auquel cas, par souci de cohérence, il conviendrait de la supprimer pour les salariés et indépendants. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.) Nous préférons proposer de mettre fin à une situation inéquitable en alignant par le haut, non par le bas. D’autre part, il est nettement expliqué dans le rapport publié en 2012 par l’Igas que cette règle des vingt-cinq meilleures années est particulièrement bienvenue lorsque les revenus varient fortement au cours de la carrière : « Dès lors, le calcul sur les 25 meilleures années doit être lu comme un dispositif neutralisant davantage les variations de revenus », y est-il écrit en toutes lettres. Or, personne ne conteste le fait que les agriculteurs sont soumis à ces aléas bien davantage que les salariés, voire que les artisans et commerçants.
    La réforme que nous proposons profitera donc également aux agriculteurs à la carrière descendante : je pense à ceux qui, âgés, s’apprêtent à passer la main, à céder leur exploitation, et dont les dernières années de travail sont souvent moins fructueuses que les précédentes. Les lois dites Chassaigne du 3 juillet 2020 et du 17 décembre 2021, adoptées sur ces bancs à l’unanimité, ont permis de revaloriser les pensions agricoles les plus modestes ;…

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Très bonnes lois !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    …en visant à améliorer la retraite des agriculteurs qui n’ont pas bénéficié des lois Chassaigne, notre proposition s’inscrit dans le prolongement de ces travaux, et nous l’assumons.

    Un député du groupe LR

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    Très bien !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Deuxièmement, le texte serait entaché d’incompétence négative, en tant qu’il renvoie à un décret les modalités d’application de la réforme. Au contraire, il s’agit là de se conformer à la répartition des compétences fixée par les articles 34 et 37 de la Constitution. La jurisprudence du Conseil constitutionnel est constante en la matière : la détermination des principes fondamentaux de la sécurité sociale relève de la loi, celle des modalités d’application de ces principes, je le répète, du pouvoir réglementaire, ce qui est le cas de l’essentiel des règles de droit que modifierait la réforme. L’architecture duale du régime de retraite de base des agriculteurs appartient au domaine de la loi ; son mode de calcul et son fonctionnement à points sont prévus par la partie réglementaire du code rural et de la pêche maritime. De même, c’est dans la partie réglementaire du code de la sécurité sociale que figure, pour le régime général, la règle de prise en compte des vingt-cinq meilleures années de revenus. Ce code n’étant a priori pas entaché d’incompétence négative, il ressort avec évidence de ce constat que la proposition de loi ne l’est pas non plus.
    J’ai déjà eu l’occasion de le dire, mais je crois aux vertus pédagogiques de la répétition : nous n’entendons pas revenir sur l’architecture du régime ni sur son fonctionnement à points, non plus que nous ne souhaitons un alignement complet sur le régime général qui ferait perdre au régime des non-salariés agricoles tout caractère spécifique. Cela m’amène à répondre à la troisième et dernière objection soulevée en commission : le système des vingt-cinq meilleures années ne serait pas compatible avec un régime à points. C’est faux ; le rapport déjà cité de l’Igas rappelle que la prise en compte des seules meilleures années de carrière peut être dissociée de la technique de calcul des droits. J’aurai du reste l’occasion de revenir sur ce détail lors de la discussion des articles, puisque j’ai déposé un amendement visant à préciser la rédaction de l’article 1er, afin de dissiper toute ambiguïté relative à nos intentions. Cet amendement prend également en compte les contraintes techniques liées à l’application de la réforme par la Mutualité sociale agricole (MSA), en prévoyant son entrée en vigueur le 1er janvier 2026 – j’y reviendrai également.
    Avant de conclure, je veux réaffirmer que la mesure dont nous entamons l’examen vise à corriger un régime moins-disant. Nous devons adresser un message puissant à ceux qui nous nourrissent, qui garantissent la souveraineté alimentaire de la France. Producteurs bio ou conventionnels, grands exploitants ou maraîchers, viticulteurs ou éleveurs,…

    M. Patrick Hetzel

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    Bravo !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    …ils ont droit à cette reconnaissance.

    Mme Justine Gruet

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    Ils en ont bien besoin !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Je profite d’ailleurs de cette occasion pour rendre hommage aux agriculteurs qui siègent dans cet hémicycle, sur tous les bancs, à commencer par mes collègues Jean-Yves Bony et Jean-Luc Bourgeaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe RE. – Mme Emmanuelle Ménard et M. André Chassaigne applaudissent également.)
    Les auditions de représentants des syndicats et des acteurs de la filière ont révélé un large consensus au sujet de la nécessité de cette réforme. Quoiqu’elle ne touche en apparence qu’un simple paramètre, celle-ci requerrait des évolutions juridiques et techniques : la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA) s’est dite prête à les mener à bien.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    C’est le droit commun !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Ne manque donc que la volonté politique ; c’est cette volonté que le groupe Les Républicains et moi-même entendons marquer par notre proposition de loi. Parce que les raisons qui démontrent le bien-fondé de cette réforme sont nombreuses et que les obstacles ont été levés, nous vous proposons, en adoptant ce texte, de faire calculer sur la base des vingt-cinq meilleures années la retraite des non-salariés agricoles. (« Très bien ! Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN. – Mme Emmanuelle Ménard applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

    M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion

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    Nous commençons cette journée de débats parlementaires par l’examen d’une proposition de loi relative au régime de retraite des non-salariés agricoles. En la matière, les attentes sont fortes et légitimes : après avoir consacré leur carrière à nourrir le pays, les agriculteurs retraités doivent pouvoir vivre dignement. C’est pourquoi j’ai inclus les retraites agricoles dans la concertation que je mène actuellement au sujet de la réforme des retraites. Outre les partenaires sociaux interprofessionnels représentatifs, et en quelque sorte classiques, j’ai souhaité associer la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) à toutes les discussions : nous avons naturellement abordé la question des vingt-cinq meilleures années, qui retient également l’attention du ministre de l’agriculture. Je suis convaincu qu’une meilleure prise en compte des spécificités des métiers agricoles est indispensable à la justice sociale de la réforme des retraites.
    Aussi, avant d’entrer dans le détail de la proposition de loi que vient de présenter M. Dive, j’aimerais la replacer dans son contexte. Encore une fois, l’attention portée aux retraites agricoles ne date pas de cette législature ; réformes et suggestions se succèdent depuis vingt ans en vue d’améliorer la situation des intéressés et de revaloriser les petites pensions, démarches constamment soumises à l’impératif de concilier prise en compte des spécificités agricoles et convergence des régimes. Nous avons su opérer cette conciliation il y a vingt ans, en créant la retraite complémentaire des exploitants agricoles – permettez-moi d’avoir une pensée amicale pour notre ancien collègue Germinal Peiro ; il y a bientôt dix ans, en instaurant la garantie d’une pension minimale pour les chefs d’exploitation agricole, dans le cadre de la réforme conduite par Marisol Touraine ; enfin, dernièrement, par les deux lois dues au président Chassaigne, qui ont revalorisé de manière inédite les pensions des chefs d’exploitation et de leur conjoint, c’est-à-dire la plupart du temps de leur épouse.
    Ces avancées nous ont enseigné que le consensus ne se décrète pas : il se construit. Beaucoup d’entre vous siégeaient déjà sur ces bancs lors de l’examen des futures lois Chassaigne : celles-ci avaient été longuement mûries dès 2016, faisant l’objet d’une concertation avec l’ensemble des syndicats agricoles, discutées avec les représentants des retraités – je pense à l’Association nationale de retraités agricoles de France (Anraf) –, élaborées avec les opérateurs, en premier lieu le réseau de la MSA et les services de l’État. Pas à pas, collectivement, nous avons su préparer et financer ces dispositions finalement soutenues par tous les groupes parlementaires, la majorité, le Gouvernement, et qui ont produit des effets concrets : plus de 330 000 anciens agriculteurs, soit 30 % des retraités de droit direct du régime, ont vu leur pension augmenter de manière significative – en moyenne d’une centaine d’euros par mois.
    Cela signifie-t-il pour autant que nous touchons au but ? Je sais que vous ne le croyez pas ; moi non plus. Additionnant les strates de pension et multipliant les paramètres, le régime de retraite des non-salariés agricoles est devenu extrêmement complexe, comme l’a clairement rappelé Nicolas Turquois lors de l’examen du texte en commission. Cette sédimentation nuit à la lisibilité du système, donc à la confiance qu’il inspire, en particulier aux jeunes agriculteurs ; quelle que soit notre appartenance politique, nous le constatons dans notre circonscription.
    C’est dans ce contexte, monsieur le rapporteur, qu’intervient l’examen de votre proposition de loi visant à étendre aux agriculteurs le principe des vingt-cinq meilleures années. Celui-ci est en apparence consensuel : nous souscrivons à votre logique de justice, à votre souhait de rapprocher les régimes, dans un esprit d’égalité et d’équité. Les débats en commission des affaires sociales, sous la présidence de Fadila Khattabi, ont toutefois permis de soulever un certain nombre de questions : comment instaurer la règle des vingt-cinq meilleures années tout en préservant un système devenu, depuis les lois Chassaigne, très redistributif, ainsi que les droits à pension déjà acquis ? Comment appliquer un mode de calcul par années à un régime à points, combinaison qui n’existe encore nulle part ? Comment financer cette transformation, avec quelles conséquences pour nos agriculteurs ?
    La date de l’entrée en vigueur de la réforme a également suscité de nombreux débats : je me réjouis que les échanges techniques, les indications de la MSA, aient été pris en compte, puisqu’un amendement du rapporteur vise désormais à fixer cette échéance à 2026 et non plus à 2024. Même ainsi prolongé au point que son terme peut sembler lointain, un tel délai reste très ambitieux : il faudra une mobilisation collective pour avancer de manière concrète et efficace.
    Cette proposition de loi a donc soulevé de nombreuses questions, auxquelles je souhaite désormais que nous puissions apporter des réponses. C’est le sens de l’amendement que le rapporteur soumet à la discussion aujourd’hui, et que le Gouvernement soutient : sa nouvelle rédaction résoudra, j’en suis sûr, les interrogations légitimes qui ont été exprimées par les députés de la majorité en commission – je pense notamment à Didier Le Gac et Charlotte Parmentier-Lecocq. Le rapport et la mission qui verront le jour si cette proposition de loi est adoptée par votre assemblée puis par le Sénat devront définir, dans un délai très ambitieux de trois mois, les scénarios permettant d’atteindre l’objectif de transformation. Nous devrons veiller collectivement à ne pas remettre en cause les droits acquis et à ne pas fragiliser les carrières linéaires qui ne bénéficieraient pas de cette mesure.
    Au moment d’engager les débats, je souhaite donc poser, avec le rapporteur comme avec les différents groupes, les bases d’un consensus le plus large possible. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement considère que l’adoption de l’amendement déposé par le rapporteur permettrait l’adoption de la proposition de loi ainsi amendée. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LR.)
    Est-ce de la coconstruction ? Est-ce un travail de conviction partagée ? Est-ce parce que le rapporteur a su convaincre sur l’objectif des vingt-cinq meilleures années, et parce que nous savons aussi entendre les difficultés techniques posées par cet objectif et qu’il nous faudra surmonter ? Je n’en sais rien. Je sais juste que ce texte sera un texte utile, une fois l’amendement du rapporteur adopté, et qu’il est attendu.

    M. Jean-Yves Bony

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    Très bien, monsieur le ministre.

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Marche après marche, réforme après réforme, sachons trouver encore aujourd’hui les chemins du compromis républicain qui a si bien su s’illustrer par le passé en matière de retraites agricoles. Le Gouvernement donnera un avis favorable à l’amendement de M. le rapporteur, ainsi qu’à la proposition de loi ainsi amendée. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR-NUPES et sur plusieurs bancs des groupes RE et RN.)

    M. Stéphane Travert

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    Ça, c’est de la coconstruction !

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    Dans la discussion générale, la parole est à Mme Isabelle Valentin.

    Mme Isabelle Valentin

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    Les retraites agricoles sont un vrai sujet, dont nous discutons déjà depuis plusieurs années. Je remercie mon collègue Julien Dive pour cette proposition de loi tant attendue par le milieu agricole. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Maxime Minot

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    Heureusement qu’on l’a, celui-là !

    Mme Isabelle Valentin

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    Les agriculteurs restent aujourd’hui encore les parents pauvres de notre système d’assurance vieillesse.

    M. Patrick Hetzel

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    Eh oui !

    Mme Isabelle Valentin

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    Parmi les principaux régimes, c’est celui des non-salariés agricoles qui verse les retraites les plus faibles. Le calcul des retraites agricoles est en fait basé sur l’intégralité de la carrière, ce qui constitue bien entendu un non-sens au regard des nombreux aléas auxquels est confronté le monde agricole : sécheresses, gelées, grêle, grippe aviaire, brucellose, salmonelles, et j’en passe.

    M. Maxime Minot

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    Eh oui, il est temps d’en finir avec ce calcul !

    Mme Isabelle Valentin

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    Tous les agriculteurs connaissent effectivement, au cours de leur carrière, de très mauvaises années. Il faut y ajouter les quatre ou cinq années passées en tant qu’aide familial, comptabilisées à revenu zéro, ainsi que la première année d’installation, non prise en compte dans le calcul des retraites. Fin 2020, un agriculteur ayant travaillé toute sa vie et validé l’ensemble de ses droits à la retraite ne touchait qu’une retraite de 880 euros. Cette somme est inférieure au minimum vieillesse, chers collègues, et présente un écart phénoménal – plus de 500 euros par mois – avec celle que percevrait un salarié ayant eu le même parcours.

    M. Maxime Minot

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    Une honte !

    Mme Isabelle Valentin

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    Le calcul sur les vingt-cinq meilleures années est simplement une mesure d’équité et de justice sociale.

    Mme Emmanuelle Anthoine

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    Eh oui !

    Mme Isabelle Valentin

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    La lutte contre la précarité de certains agriculteurs et la reconnaissance de leur travail passe évidemment par une retraite décente.

    M. Maxime Minot

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    Eh oui ! Ils nourrissent le pays, quand même !

    Mme Isabelle Valentin

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    La durée moyenne de travail des agriculteurs est la plus élevée parmi les actifs. Les éleveurs laitiers ont une charge de travail particulièrement lourde, puisqu’ils travaillent en moyenne 61 heures par semaine, parfois beaucoup plus. 90 % des agriculteurs travaillent le week-end et les deux tiers d’entre eux ne partent pas plus de trois jours consécutifs par an. Offrons aujourd’hui des perspectives favorables aux jeunes agriculteurs qui s’installent. La question du renouvellement des générations en agriculture est primordiale, puisque 50 % des actifs agricoles prendront leur retraite d’ici dix ans. À l’heure où la souveraineté alimentaire devient évidemment une priorité pour notre pays, comment pallier le déficit de production annoncé si le métier n’attire plus et s’il n’est pas récompensé à sa juste valeur ?
    Les arguments de la majorité ne nous étonnent pas, puisqu’en 2018, le Gouvernement avait bloqué une proposition de loi visant à porter les retraites à 85 % du Smic au moins, au motif que cette revalorisation serait discutée dans le cadre de la prochaine réforme des retraites.

    Un député du groupe LR

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    À l’époque, ils étaient majoritaires !

    Mme Isabelle Valentin

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    Mais il y a urgence : arrêtons de nous cacher derrière cette réforme qui n’avance pas.

    Mme Emmanuelle Anthoine

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    Elle a raison !

    Mme Isabelle Valentin

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    Fort heureusement, les lois dites Chassaigne 1 et 2 ont marqué un premier pas pour nos agriculteurs ainsi que pour les aidants familiaux et les conjoints collaborateurs. En refusant d’aborder les souffrances du monde agricole de manière globale, le Gouvernement renforce les incompréhensions et les fractures de la société, tout en mettant en jeu la souveraineté alimentaire de notre pays. La proposition de loi du groupe Les Républicains, si elle est votée, constituera en revanche un pas supplémentaire vers la reconnaissance du monde agricole et le respect de ceux qui nous nourrissent.

    Un député du groupe LR

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    Absolument ! Elle a raison !

    Mme Isabelle Valentin

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    Une retraite agricole décente constitue une impérieuse nécessité. L’amendement proposé par le rapporteur est la preuve de notre volonté de conciliation avec les professionnels et les filières ; nous espérons qu’il satisfera l’ensemble des groupes parlementaires ici présents et les retraités agricoles, mais aussi qu’il répondra aux appréhensions que peut rencontrer la MSA pour la mise en place d’une telle mesure.
    Avant d’aborder les débats sur la prochaine réforme des retraites, il y a des corrections à apporter à certains régimes. Plusieurs d’entre vous ont voté contre ce texte en commission, en prétextant notamment que la reconstitution des vingt-cinq meilleures années ne serait pas possible car la MSA manquerait d’historique sur les carrières des agriculteurs. La précocité de la mesure, mais aussi la complexité juridique d’une telle réforme, vous dérangeaient. Je tiens à vous rassurer : la MSA et le monde agricole seront bien entendu capables de retracer les carrières complètes.

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Eh oui, c’est leur travail !

    Mme Isabelle Valentin

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    Les problèmes techniques dont le groupe Renaissance fait état ne nous concernent pas. Un député est là pour voter la loi,…

    M. Maxime Minot

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    Eh oui !

    Mme Isabelle Valentin

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    … pour s’assurer qu’elle est bien appliquée et que les décrets qui en découlent sont rédigés correctement. Aucune problématique technique ne saurait constituer une raison valable pour ne pas voter cette proposition de loi de bon sens et tant attendue par les professionnels. J’ose toutefois espérer que le vote égalitaire – dix-huit pour, dix-huit contre – intervenu en commission des affaires sociales est le début d’une réelle prise de conscience de la représentation nationale quant à la situation précaire du monde agricole et de ses retraités. Nous comprenons qu’une telle réforme soulève des interrogations compte tenu de son ampleur, mais c’est le prix de l’équité. Les agriculteurs sont fatigués d’être traités comme des actifs de seconde zone. Ne l’oublions pas, ce sont eux qui assurent notre souveraineté alimentaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR-NUPES et sur plusieurs bancs des groupes RE, RN et LFI-NUPES.) Rien n’est joué, nous pouvons encore changer les choses aujourd’hui. Ne manquons pas à notre devoir de courage et de volonté politique. Nous devons donner une autre vision de notre agriculture…

    M. Maxime Minot

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    Vous pouvez compter sur nous pour ça !

    Mme Isabelle Valentin

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    … et faire un geste fort envers le monde agricole : éleveurs, viticulteurs, maraîchers, laitiers. Nous devons réparer l’injustice dans le traitement des retraites agricoles, et c’est ce que propose ce texte. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Roger Chudeau applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois.

    M. Nicolas Turquois

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    Vous nous proposez aujourd’hui, monsieur le rapporteur, un texte visant à calculer la retraite des agriculteurs sur leurs vingt-cinq meilleures années. Je vous remercie, car nous sommes aujourd’hui à la confluence des sujets qui me sont chers : l’agriculture et les questions de retraite. Je vous le dis d’emblée : philosophiquement, le groupe Démocrate est favorable au calcul sur les vingt-cinq meilleures années. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LR.) Dans le système général comme dans le système agricole, vingt-cinq années sur une carrière de quarante-deux ans permettent de passer l’éponge sur dix-sept années qui peuvent avoir été marquées par l’absence de revenus pour cause de maladie, de chômage ou d’éducation des enfants, ou bien par des revenus faibles, voire nuls, en raison du climat ou du niveau des cours mondiaux.

    Mme Emmanuelle Anthoine

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    C’est souvent le cas.

    M. Nicolas Turquois

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    Mais philosophiquement, nous sommes aussi attachés à ce que l’on ne vende pas d’illusions à nos concitoyens, en particulier à nos agriculteurs. Je vais donc vous faire part des doutes que j’ai exprimés en commission.
    Ils portent d’abord sur la date de mise en œuvre de la réforme. D’après les statistiques, un agriculteur partant à la retraite en 2026 se sera installé en 1983 ou en 1984. Jusqu’en 1990, les revenus des agriculteurs servant au calcul des cotisations sociales étaient appuyés sur des bases forfaitaires, qui tenaient compte du nombre d’hectares et du nombre d’animaux détenus. Par souci d’équité avec nos concitoyens, comment pourrions-nous retenir des revenus forfaitaires dans le calcul des vingt-cinq meilleures années ?

    Mme Frédérique Meunier

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    Ce serait mieux que rien !

    M. Nicolas Turquois

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    À partir de 1990, s’appuyant sur des revenus réels, la MSA a transformé ceux-ci en points, selon une règle assez complexe que je me permets de vous expliquer. En valeur 2022, entre 0 et 5 000 euros de revenus annuels, on a 23 points. Entre 5 000 et 8 000 euros, on passe progressivement de 23 à 30 points. De 8 000 à 16 000 euros, alors que l’effort contributif va du simple au double – 20 % de 16 000 étant le double de 20 % de 8 000 –, on reste à 30 points. De 16 000 euros jusqu’au plafond de la sécurité sociale, on passe progressivement de 30 à 113 points, et au-delà, on ne cotise que pour la solidarité. Or la MSA explique que jusqu’en 2014, elle n’a le souvenir que des points, et non des revenus qui leur sont associés. Si l’on a 30 points pour l’année 2010, était-ce pour un revenu de 16 000 ou bien de 8 000 euros ? Comment reconstituer les vingt-cinq meilleures années dans ces conditions ?
    Il faut ensuite évoquer l’architecture du système. Aujourd’hui, le système agricole est une fusée à cinq étages : une retraite forfaitaire proportionnelle à la durée ; une retraite proportionnelle par points – celle dont je viens de vous parler, qui n’est pas vraiment proportionnelle, mais progressive ; un complément de retraite – l’équivalent du minimum contributif du régime général, qu’on appelle PMR, pension minimale de référence ; un système de retraite complémentaire par points – qui ne sont pas les mêmes points que ceux évoqués précédemment ; enfin, un complément différentiel, que nous avons récemment revalorisé grâce à notre collègue Chassaigne. Comment transformer ce système à cinq niveaux en système basé sur les vingt-cinq meilleures années ? Je vous invite à réfléchir à cette question en termes de méthode, chers collègues. C’est un vrai sujet. Pour moi, le vrai courage aurait consisté à rapprocher les règles du système de la MSA de celles du système général. Certains ont peur que cela conduise à une remise en cause des caisses de la MSA ; je crois quant à moi que ces dernières ont un avantage spécifique, celui d’être un guichet unique de la protection sociale et de constituer ainsi un relais de proximité avec les élus dans les territoires. Ce n’est pas la complexité des règles qui contribuera au maintien des caisses de la MSA.
    J’ai également un doute s’agissant de l’équité du système. Celui-ci est actuellement très redistributif : ceux dont les revenus dépassent le plafond de la sécurité sociale cotisent pour les autres et ceux qui perçoivent 16 000 euros cotisent pour ceux qui perçoivent 8 000 euros. Cela doit être pris en compte dans le futur système. J’ai un autre doute quant au vecteur juridique : vous évoquez un décret dans votre amendement de réécriture, monsieur le rapporteur, mais aussi les dispositions législatives sur lesquelles le rapport proposé pourrait déboucher. Il me semble que la modification de droits individuels relève de la loi – l’expertise nous le montrera.
    Compte tenu de cet amendement, qui modifie le texte examiné en commission et prévoit un rapport d’évaluation, notre groupe votera ce texte. Mais je suis prêt à parier que la mise en œuvre de celui-ci sera très progressive, qu’elle impliquera de modifier en profondeur le système, qu’il faudra en passer par la loi et qu’un effort financier devra être prévu en matière de cotisations. Il me semblait important de le dire. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de vous être penché sur ce sujet ; votre texte constituera une véritable avancée. Soyons cependant modestes quant au calendrier de sa mise en œuvre et quant à ses modalités. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. Richard Ramos

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    Excellent !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Je dois vous avouer qu’à la première lecture de votre texte et de son exposé des motifs, monsieur le rapporteur, j’ai été saisi par la beauté du geste, admiratif devant cet ovni réglementaire à caractère législatif apparu soudainement dans le ciel de nos campagnes – à moins que les héritiers du Général n’aient voulu tester un nouvel hybride, croisement entre le modernisme de l’ordonnance macronnienne et la rusticité du décret-loi, dont le dernier usage remonte à la IVe République.

    M. Pierre Cordier

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    C’est trop compliqué pour nous !

    M. André Chassaigne

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    Indéniablement, votre OGM – organisme génétiquement modifié – aurait pu concourir pour le prix de l’innovation politique afin d’être inscrit au catalogue. Heureusement, votre présentation du texte devant la commission des affaires sociales et le contenu de votre excellent rapport m’ont finalement rassuré. Vous avez tenu à rectifier certaines imprécisions, pour ne pas dire occultations. Vous avez également rappelé, à juste titre, à quel point la complexité du régime des non-salariés agricoles et les modalités de calcul de la retraite forfaitaire et de la retraite proportionnelle sont des facteurs limitant le niveau de pension ; c’est d’ailleurs pourquoi la création du régime complémentaire obligatoire (RCO) est venue améliorer au coup par coup un système de retraite qui reste cependant insuffisant pour garantir un niveau de vie digne à l’ensemble des travailleurs de la terre.
    Vous avez aussi rappelé, contrairement à ce qui est affirmé dans l’exposé des motifs, que les avancées des lois dites Chassaigne 1 et 2 ont permis d’améliorer sensiblement la situation des retraités agricoles, actuels comme futurs. Là encore, vous avez raison : alors même que les agriculteurs sont soumis aux mêmes exigences que les autres professions en matière d’âge légal et de durée de cotisation, le niveau moyen des pensions de retraite agricole dans notre pays reste très insuffisant et très en deçà du niveau moyen des autres pensionnés, ce qui n’est pas à la hauteur de la reconnaissance que nous leur devons.
    Votre proposition d’alignement du calcul de la retraite de base des non-salariés agricoles sur la base des vingt-cinq meilleures années apparaît donc comme une mesure de justice, en ce qu’elle ouvre des droits identiques à ceux de la majorité des actifs de notre pays. Elle pose cependant de nombreuses difficultés au regard des incertitudes sur les conditions de son application et des effets de bord qu’elle est susceptible de comporter. Vous l’avez dit vous-même, il est indispensable de pouvoir bénéficier de véritables simulations et de scénarios affinés afin de déterminer les modalités concrètes d’une telle réforme. J’ai été soulagé en découvrant votre réécriture de l’article 1er : si j’avais songé à présenter un amendement similaire afin de remédier aux subtiles imperfections du texte initial, je dois dire que je suis comblé à la lecture du vôtre.
    Une fois ce rapport établi, il conviendra de veiller tout particulièrement aux effets d’une telle réforme sur le niveau des pensions des agriculteurs qui font toute leur carrière au sein d’exploitations familiales et de petite taille, avec des chiffres d’affaires et des revenus particulièrement limités. Vous conviendrez qu’en aucun cas les avancées que vous et nous souhaitons réaliser ne doivent pénaliser les agriculteurs aux revenus les plus modestes, que ce soit dans l’hypothèse d’un système par points, même rénové, ou dans celle d’un système en annuités.
    De même, il faudra veiller scrupuleusement aux conditions exigibles en fonction des différents statuts – chef d’exploitation, collaborateur d’exploitation, années passées en tant que conjoint collaborateur ou aide familial – et nous pouvons compter pour cela sur ce joyau du monde agricole qu’est la MSA. En revanche, je considère qu’un tel engagement ne devrait pas être pris sans débat éclairé devant la représentation nationale et renvoyé à une définition par décret. Êtes-vous d’accord sur ce point, monsieur le rapporteur ?
    J’ajoute qu’au-delà de l’ambition tout à fait honorable du texte, une autre nuance à apporter tient manifestement au fait que cette réforme ne bénéficierait pas aux retraités agricoles qui figurent justement parmi les plus bas niveaux de pension auxquels vous avez fait référence. Enfin, même si nous y sommes confrontés sur tous les textes visant à proposer de nouveaux droits, on ne peut passer outre la question du financement d’une telle réforme. Si les lois Chassaigne 1 et 2 ont finalement pu bénéficier de la levée du gage par le Gouvernement et de la mise à contribution de la solidarité nationale, cette réforme nécessitera de disposer de nouvelles recettes pour le régime. Il faut donc aborder ce sujet sans tabou ; à défaut, en l’absence de chiffrage et de certaines précisions, il est des mains qui pourraient être prises de tremblements au moment de valider votre œuvre législative, ce qui n’est pas souhaitable. Pour leur part, convaincus par la portée révolutionnaire de votre texte et par le soutien bienvenu du Gouvernement, les députés du groupe GDR lèveront la main, voire le poing, pour le voter. (Sourires et applaudissements sur de nombreux bancs.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Paul Christophe.

    M. Paul Christophe

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    Le constat est partagé et tous les chiffres nous l’indiquent : les travailleurs du monde agricole, soit près de 1,3 million de personnes, ont un sort plus précaire que le reste des Français pendant leur retraite. Certes, lors de la précédente législature, de nouvelles avancées ont pu avoir lieu. Depuis 2021, la loi leur garantit notamment un niveau minimum de pension à hauteur de 1 035 euros, soit 85 % du Smic agricole. Si nous pouvons saluer ces progrès récents, portés en grande partie par notre collègue André Chassaigne, il convient de noter que le niveau de pension de retraite moyen reste tout de même très inférieur à la moyenne nationale. Rappelons que la retraite des non-salariés agricoles est calculée sur toute la durée de la vie professionnelle, quand les salariés du régime général et les indépendants, eux, voient le calcul de leurs droits s’effectuer sur les vingt-cinq meilleures années de leur carrière. Cette proposition de loi présentée par le groupe Les Républicains vise donc à corriger cette différence de mode de calcul, et nous soutenons cette intention.
    Cependant, si nous souscrivons à cette proposition sur le fond, nous avons exprimé en commission notre souhait de voir apporter quelques modifications au texte afin de le rendre juridiquement applicable de manière certaine. En effet, l’examen en commission et nos discussions ont démontré la fragilité du texte proposé, avec le risque avéré qu’il se trouve impossible, selon la MSA, de l’appliquer tant juridiquement que techniquement. Vous avez été invité à y remédier, monsieur le rapporteur, car à défaut, nous aurions immanquablement suscité autant de déceptions que d’espoirs.
    Des modifications étaient nécessaires pour que le texte puisse être opérationnel. Aussi, nous saluons les amendements proposés par le rapporteur, qui visent à corriger les points de crispation afin que l’on puisse aboutir à un accord. En supprimant la référence au terme de « revenu » ainsi qu’à l’extension au régime des non-salariés agricoles de la règle applicable dans le régime général, votre amendement exclut une interprétation stricte de l’article 1er qui aurait pu se révéler défavorable au monde agricole en conduisant à devoir aligner le régime des non-salariés sur le régime général. Cette suppression permet de maintenir l’architecture actuelle, donc de diminuer l’adaptation des systèmes d’information des caisses de mutualité sociale agricole.
    Nous soutenons également la proposition d’une entrée en vigueur progressive de ladite réforme au 1er janvier 2026, ce qui permettra d’aboutir à un processus pleinement opérationnel. Le groupe Horizons et apparentés votera donc en faveur de cette proposition de loi, amendée comme je l’ai indiqué. Enfin, nous souhaitons, monsieur le ministre, que les consultations à venir viennent apporter des réponses complémentaires et des dispositifs efficaces pour améliorer de façon consensuelle la retraite de nos agriculteurs. Il est primordial que ceux-ci bénéficient d’une valorisation à la hauteur de l’enjeu vital auquel ils consacrent leur vie professionnelle, à savoir l’alimentation de leurs concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs du groupe LR. – M. André Chassaigne applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie Pochon.

    M. Pierre Cordier

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    On va voir si les écolos aiment les agriculteurs !

    M. Jérémie Iordanoff

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    Oui, nous les aimons !

    M. Erwan Balanant

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    On sait qu’ils n’aiment pas les exploits maritimes, en tout cas !

    Mme Marie Pochon

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    « Moralement, c’était très dur à tenir ». « Je ne pouvais plus rien faire ». « Au début, une fois toutes les factures réglées, il ne restait rien ; ensuite, moins que rien ». « Il ne faut pas décrocher, parce que la vie est belle ». Ce sont là des témoignages d’agriculteurs.
    Nous sommes aujourd’hui appelés à réparer une injustice subie par les paysans depuis bien trop d’années. Fille d’une mère vigneronne comme nombre d’entre vous êtes fils, filles, petits-fils ou petites-filles de celles et ceux qui cultivent nos terres et nourrissent nos familles, je suis convaincue que nous leur devons justice. Depuis trop d’années, l’État faillit à ses obligations vis-à-vis de celles et ceux qui travaillent jour et nuit, qui ne connaissent ni week-ends ni vacances, car ils et elles vivent au gré des saisons, des précipitations, des gels et des épisodes de grêle. Dans un modèle profondément dysfonctionnel où de nombreuses fermes ne survivent qu’avec des subventions, nous importons toujours à bas prix des aliments que nous produisons en France,…

    M. Jean-Yves Bony

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    C’est vrai !

    Mme Marie Pochon

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    …ce qui engendre une pression monstre sur les prix et donc sur les agriculteurs. Nous le disons : oui, rémunérons nos paysans, soutenons-les, payons l’alimentation de qualité à son juste prix, sans quoi notre agriculture s’effondrera et le vivant avec.

    M. Paul Molac

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    Très bien !

    Mme Marie Pochon

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    Ce sont bien elles et eux, en effet, qui assurent aujourd’hui – et assureront demain – notre sécurité alimentaire quand les cours internationaux s’emballent, qui enchaînent comptabilité, cueillette, recrutement de saisonniers, semences, labours, en gardant toujours un ?il inquiet sur les prévisions de la météo agricole.
    Car le changement climatique est là, qui menace notre agriculture et notre autonomie alimentaire. Zoonoses qui se multiplient et ravagent nos modèles sociétaux, sécheresses, vagues de chaleur, inondations, incendies, guerres, famines, vous connaissez le film, puisque vous en écrivez le scénario. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Il est possible que tous les insectes aient disparu de la surface de notre planète dans cent ans et que nous connaissions une augmentation de près de 4 degrés en France d’ici la fin du siècle. Ce bouleversement implique de longues périodes de chaleur extrême à plus de 40 degrés dans les années à venir. Or, à partir de 40 degrés, la croissance des plantes et la pollinisation s’arrêtent. Les paysans sont en première ligne face au changement climatique et notre sécurité alimentaire dépend d’eux. Considérer leur travail, c’est dire que c’est seulement par eux et avec eux que nous pourrons faire face aux défis de ce siècle. Les accompagner, c’est agir.
    Un agriculteur se suicide tous les trois jours : c’est tout simplement la profession au sein de laquelle on observe le plus haut taux de suicide en France. Quand, au bout de bien plus de quarante années de labeur, les agriculteurs peuvent enfin prendre leur retraite, c’est souvent esseulés et déconsidérés. Leurs terres sont convoitées par les investisseurs de tout poil, leurs enfants sont de moins en moins volontaires pour reprendre la ferme, et leurs pensions sont souvent d’un montant ridiculement bas. Faire justice à ce métier qu’on dit essentiel, mais qu’on balaie au gré d’accords de libre-échange négociés sans la représentation nationale, qui nous permettent d’importer en masse pendant que nos paysans perdent pied, c’est assurer l’égalité des droits dans notre pays.

    M. Jean-Yves Bony

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    Très bien !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Il faudrait aussi les protéger face au loup !

    Mme Marie Pochon

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    Les agriculteurs sont désormais les derniers pour lesquels la retraite est calculée sur l’intégralité de la carrière, bonnes et mauvaises année confondues, ce qui est un non-sens total quand on sait que pour les salariés, elle est calculée sur les vingt-cinq meilleures années. C’est une double peine, celle de paysans qui font face de plein fouet à tous les impacts du changement climatique et de la fluctuation des prix pendant leur activité, et qui en font à nouveau les frais lors du calcul de leur retraite.
    La France compte à ce jour 1,3 million de retraités anciens non-salariés du secteur agricole. Selon les données issues des travaux de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), cette iniquité conduit à une différence nette de 930 euros entre les retraites des agriculteurs et celles des retraités au régime général. La pension s’élève à 1 810 euros brut pour un retraité du régime général ayant travaillé toute sa vie et validé l’ensemble de ses droits, et à 880 euros brut pour un agriculteur retraité dans la même situation. Comment vivre avec 880 euros brut par mois, voilà une question de société tout bonnement insolvable…

    M. Pierre Cordier

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    Insoluble, plutôt !

    M. Erwan Balanant

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    Vous voyez, on vous écoute attentivement !

    Mme Marie Pochon

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    …ou insoluble, en effet, car avec ce montant, inférieur de 250 euros au seuil de pauvreté, on ne parle plus de vie, mais de survie.
    Face à l’inflation des prix à la consommation, face à l’augmentation des prix des carburants, il faut enfin redonner aux agriculteurs retraités une juste valorisation d’une vie dédiée au travail de la terre. C’est une urgence pour le renouvellement agricole quand on sait que la moitié des paysans partiront à la retraite d’ici dix ans, c’est une urgence pour notre sécurité alimentaire.
    En 2021, le Président de la République avait estimé impossible de revaloriser les pensions de retraite. Nous, écologistes, voterons en faveur de cette proposition de loi qui rétablit la justice. Conscients de la nécessité d’être vigilants sur la complexité des modalités de calcul des montants entre les différentes formes de retraites agricoles et le besoin de les aligner, nous maintenons notre soutien plein et entier au principe consistant à calculer la pension de retraite des non-salariés agricoles sur la base des vingt-cinq meilleures années, afin que sur ce sujet ô combien important, il n’y ait enfin plus aucun perdant. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES et GDR-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes LR et RN. – M. Paul Molac applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Joël Aviragnet.

    M. Joël Aviragnet

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    Cette proposition de loi se donnait en apparence pour objectif de mettre fin à une injustice criante résidant dans le mode de calcul de la retraite de base des non-salariés agricoles : tous les exploitants agricoles, aides familiaux et collaborateurs voient aujourd’hui leur retraite calculée sur l’ensemble de leur carrière. Ils sont les seuls dans cette situation. Alors que toute leur vie durant, ils travaillent dur pour nourrir notre pays, leurs retraites sont bien plus faibles que la moyenne nationale. Leur pension de retraite moyenne s’établit à 1 150 euros brut, contre 1 500 euros pour la moyenne globale.
    La loi votée sous la précédente législature à l’initiative du président Chassaigne a cependant permis une avancée non négligeable en garantissant un niveau minimum de pension à 1 035 euros, soit 85 % du Smic net agricole. Il nous semble donc de bon sens de calquer le mode de calcul des retraites des salariés non agricoles sur le régime de base, en prenant en compte leurs vingt-cinq meilleures années, quelles que soient les difficultés administratives qui en découlent.
    Les non-salariés agricoles, dont le travail est indispensable à la nation et dont la pénibilité du travail est unanimement reconnue, souffrent de revenus trop bas. Sans une augmentation conséquente de leurs revenus d’activité, leurs pensions de retraite resteront faibles.
    Cette proposition de loi est perfectible. Avec une mesure plus contraignante juridiquement et une entrée en vigueur plus rapide, notre Parlement se montrerait à la hauteur : nous serions vraiment utiles à tous ces citoyens qui travaillent dur, qui méritent notre respect et notre considération. Toutefois, nous préférons un progrès, aussi petit soit-il, à un statu quo défaillant. Le groupe Socialistes et apparentés soutiendra donc cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur quelques bancs des groupes RE et LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Morel-À-L’Huissier.

    M. Pierre Morel-À-L’Huissier

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    Nous avons à nous prononcer sur un texte essentiel pour nombre de nos compatriotes : la France compte 1,3 million de retraités anciens non-salariés agricoles, lesquels bénéficient d’une retraite moyenne de 1 150 euros brut, soit environ 800 euros net, montant bien inférieur à la pension moyenne des autres assurés, qui s’élève à un peu plus de 1 500 euros brut.
    Saluons ici les avancées permises par les deux lois défendues par notre collègue Chassaigne, que je souhaite ici saluer : un vrai député de la montagne, André ! Son combat de longue date a abouti à des résultats qui ont été un soulagement pour nos agriculteurs. La première loi Chassaigne, entrée en vigueur le 1er novembre 2021, visait à assurer aux chefs d’exploitation une revalorisation de leurs pensions de retraite à hauteur de 85 % du Smic agricole – environ 1 045 euros – pour une carrière complète. En décembre 2021, c’est une seconde loi Chassaigne que le Parlement s’est honoré d’adopter : elle concernait cette fois la revalorisation des retraites des conjoints et aides familiaux des exploitants agricoles.
    Néanmoins, la situation des non-salariés agricoles – certains exploitants, aides familiaux et conjoints collaborateurs – restait à améliorer. Nous le constatons tous dans nos circonscriptions. Député d’un département à vocation majoritairement agricole, je continue d’être quotidiennement sollicité par de jeunes retraités se sentant lésés qui ne comprennent pas pourquoi leur pension est si faible.
    Les difficultés que rencontrent nos agriculteurs, tout au long de leur carrière comme au moment de la retraite, contribuent à la désaffection pour le métier. Près de 50 % des actifs pourront faire valoir leurs droits à la retraite dans dix ans. La question du renouvellement des générations et de la transmission des exploitations se pose. Nous devons apporter des garanties à nos jeunes qui souhaitent s’engager dans ces carrières. En 2012, un rapport de l’Igas visant à évaluer le passage à un calcul sur les vingt-cinq meilleures années pour les retraites des non-salariés agricoles estimait que cette modification garantirait une plus grande équité entre les régimes et prémunirait les agriculteurs contre l’effet des mauvaises années.
    N’oublions pas que nos agriculteurs et nos éleveurs sont les derniers à voir leur retraite calculée sur la totalité de leur carrière, alors même qu’ils ont été englobés dans des mouvements de convergence s’agissant d’autres aspects, comme l’allongement de la durée d’assurance de référence en 2003. Ce mode de calcul les expose à subir doublement le coût des mauvaises années, eux qui sont de plus en plus frappés par les effets des aléas climatiques mais aussi des crises géopolitiques, qui rendent chaque année incertaine. Faire reposer le calcul de leur retraite de base sur leurs vingt-cinq meilleures années est une réponse adaptée et sécurisante.
    Les débats en commission n’ont pas permis de trouver un consensus sur le texte initial, mais des amendements vont être débattus en séance et il semblerait, monsieur le préfet, …

    M. Jean-Yves Bony

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    Ça viendra !

    M. Pierre Morel-À-L’Huissier

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    …monsieur le ministre, pardon, que vous y soyez favorable.
    Cette réforme est plus qu’attendue sur le terrain. Alors que la réforme des retraites a été abandonnée lors du précédent quinquennat et que les contours de la future loi ne sont pas encore connus, cette proposition de loi enverrait un signal très positif dont nous ne devons pas nous passer. Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires est conscient du fait que ces dispositions pourront être complétées par une réforme des retraites plus vaste, incluant la question des taux et assiettes de cotisation et visant une plus grande contributivité, mais il votera en faveur de ce texte qui va dans le bon sens.
    Monsieur le ministre, je terminerai en vous demandant de bien vouloir intervenir auprès de vos collègues Fesneau et Béchu au sujet de la prédation du loup. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN.)
    Je ne comprends pas que la France ait voté contre la révision de la convention de Berne il y a quelques jours. C’est inacceptable.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Inacceptable !

    M. Pierre Morel-À-L’Huissier

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    Disons-le : notre pays ne respecte pas les engagements pris en septembre. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, LR et GDR-NUPES et sur quelques bancs des groupes RE et RN.)

    M. Philippe Gosselin

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    C’est vrai !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Didier Le Gac.

    M. Didier Le Gac

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    Cette proposition de loi vise à améliorer le régime de retraite de nos agriculteurs en comblant un manque : leur pension serait désormais calculée sur les vingt-cinq meilleures années de leur carrière. Sous la précédente législature, nous avions adopté à l’unanimité la proposition de loi du président Chassaigne visant à garantir un niveau minimum de pension pour les non-salariés agricoles fixé à 85 % du Smic net, soit 1 035 euros. Concrètement, ce texte de 2020 a permis un gain de 100 euros en moyenne pour plus de 200 000 chefs d’exploitation agricole, ce dont nous pouvons nous réjouir. Le 9 février 2022, nous avons adopté, toujours à l’unanimité, une autre proposition de loi de notre collègue Chassaigne permettant cette fois d’augmenter la pension des conjoints et des aidants familiaux des chefs d’exploitation. Ces derniers touchaient, en moyenne, une pension de 604 euros seulement chaque mois. Plus de 120 000 conjointes d’exploitant agricole ont bénéficié d’une hausse de leur retraite grâce à cette mesure que le secrétaire d’État chargé des retraites avait alors qualifiée de « mesure forte de justice envers de nombreuses femmes qui ont travaillé toute leur vie aux côtés de leur conjoint agriculteur » et de « signe de la reconnaissance du pays pour leur travail ».
    Si j’ai tenu à citer ces lois, c’est pour souligner que notre majorité a toujours regardé d’un œil favorable les textes visant à améliorer la situation matérielle et financière de nos agriculteurs, notamment le montant de leurs pensions.

    M. Emeric Salmon

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    Pas toujours !

    M. Didier Le Gac

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    Le texte que nous examinons contribue de manière considérable à l’amélioration de leurs retraites. Comme le rappelle une organisation syndicale très représentative du monde agricole, cette réforme vise à réparer une injustice, car « les agriculteurs sont les derniers à calculer leur retraite sur la totalité de leur carrière, bonnes et mauvaises années mêlées ».
    Député de la première région agricole de France, la Bretagne,…

    M. Philippe Gosselin

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    La Normandie n’est pas très loin derrière !

    M. Didier Le Gac

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    …je rencontre tous les jours des agriculteurs qui consacrent leur vie à nourrir nos concitoyens et à rendre notre pays autosuffisant sur le plan alimentaire grâce à des produits agricoles de qualité à des prix abordables. Je mesure donc parfaitement ce que la nation doit à leur engagement.
    J’ai lu avec attention le texte de nos collègues LR et j’ai également pris connaissance de l’amendement que M. le rapporteur a déposé depuis l’examen en commission à l’article 1er, appréciant à leur juste valeur les modifications apportées au texte initial. En venant préciser plusieurs points importants, elles rendent la proposition de loi pleinement acceptable aux yeux de notre majorité. D’abord, il est prévu que le Gouvernement remette un rapport au Parlement dans un délai de trois mois afin de préciser les modalités de mise en œuvre techniques spécifiques de ce nouveau dispositif, sur lesquelles a insisté notre collègue Turquois. Ensuite, le report de l’application du nouveau régime de 2024 à 2026 permettra à la MSA de bénéficier du temps indispensable pour reconstituer les vingt-cinq meilleures années de nos agriculteurs.
    Favorable d’emblée à l’esprit de cette proposition de loi, notre groupe avait toutefois émis un avis défavorable lors de son examen la semaine dernière en commission des affaires sociales. En effet, tel qu’il était rédigé, il n’aurait pas pu être appliqué dès 2024. Le danger était de susciter de faux espoirs au sein du monde agricole. Or vous le savez, chers collègues, il y a suffisamment de défiance entre le politique et les citoyens pour que nous ne prenions pas le risque d’alimenter le ressentiment.
    Maintenant que le rapporteur a amendé son texte et qu’un compromis a été trouvé avec le Gouvernement, compromis que nous devons saluer,…

    M. Stéphane Vojetta

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    C’est vrai !

    M. Didier Le Gac

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    … c’est avec enthousiasme que j’exprime devant vous mon souhait de le voir adopté par l’ensemble de notre assemblée.
    À travers ce débat sur les retraites agricoles se posent deux questions majeures pour l’agriculture de notre pays : d’une part, celle de l’attractivité du métier d’agriculteur ; d’autre part, celle du renouvellement des générations alors que 55 % de nos exploitants partiront à la retraite d’ici à 2030.

    M. Erwan Balanant

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    Sans paysans, pas de paysages !

    M. Didier Le Gac

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    Ce texte concernera donc les futurs retraités du monde agricole, mais il s’adresse également à nos jeunes agriculteurs, qui doivent bénéficier de tout notre soutien pour continuer à vivre de leur métier. Le passage au calcul des retraites agricoles sur la base des vingt-cinq meilleures années leur offre des perspectives plus favorables. C’est le minimum qu’on leur doit. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et GDR-NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Serge Muller.

    M. Serge Muller

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    Au Rassemblement national, nous avons toujours souhaité que les agriculteurs puissent bénéficier d’un niveau de vie décent tout au long de leur carrière, et particulièrement lors de leur départ à la retraite. Aujourd’hui, ils subissent les effets d’un régime profondément injuste qu’il convient de corriger. Profondément injuste, puisque le calcul de la pension de retraite prend en compte la totalité de leur carrière, alors qu’il se fonde sur les vingt-cinq meilleures années pour les indépendants et sur les six derniers mois pour les fonctionnaires. Profondément injuste, puisqu’ils sont soumis à des lois qu’ils ne peuvent pas maîtriser : les lois des marchés financiers, mais aussi les lois climatiques, toutes deux aussi imprévisibles que violentes. Profondément injuste, puisque les membres de leur famille, partie intégrante de cette main qui nous nourrit, touchent une retraite inférieure à l’allocation que perçoivent les demandeurs d’asile. Quelle décadence !
    Calculer la retraite des agriculteurs sur leurs vingt-cinq meilleures années renvoie aussi à la question de notre souveraineté. Alors qu’il y a trente ans, notre pays était au deuxième rang mondial pour les exportations, il serait aujourd’hui déficitaire s’il n’y avait pas les exportations de vins et de spiritueux. Cette situation ne risque pas de s’arranger, pour une double raison : 50 % de nos agriculteurs vont partir à la retraite dans dix ans et ce métier n’attire plus.
    Je vous le demande donc : qui prendra le relais dans dix ans pour assurer notre souveraineté alimentaire, pour façonner nos territoires et pour faire vivre nos campagnes ? Leurs enfants ? Je ne le pense pas. Je doute sincèrement qu’ils veuillent connaître le même sort que leurs parents après les avoir vus subir de plein fouet la mondialisation. Des actifs en quête de vocation, peut-être ? Mais qui rêve d’un métier qui réclame soixante heures de travail par semaine pour une retraite très largement inférieure au reste de la population ? Qui rêve d’un métier qui n’offre pas plus de trois jours consécutifs de vacances aux deux tiers de ceux qui l’exercent ? Qui rêve d’un métier qui n’assure qu’une pension de retraite de 800 euros par mois, soit 7 000 euros de moins que les retraités du régime général sur l’année ?
    Mes chers collègues, je vous le demande : qui rêve d’un métier où l’on travaille tous les jours de la semaine, où l’on vous assomme avec des normes produites par la technocratie européenne, où l’on vous expose à la concurrence internationale pour des raisons purement idéologiques ? Mesdames et messieurs les députés de la majorité, je vous en prie, un peu de bon sens ! Ne tombez pas dans la crainte de la réforme qu’ont connue les gouvernements successifs des socialistes et des Républicains.
    Les réformes de petits pas ne fonctionnent pas. Après l’échec d’Egalim 1 et d’Egalim 2 – loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous et loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs –, ne nous proposez pas d’Egalim 3, 8 ou 12. Il nous faut des réformes de fond. Il est grand temps de se réveiller ; il est grand temps de nous écouter ; il est grand temps d’agir au service des agriculteurs de France.
    Il faut en finir avec l’idéologie du libre-échange qui permet l’importation en Europe de produits agricoles à bas coût de piètre qualité mettant nos agriculteurs dans une situation de concurrence exacerbée.

    Mme Anaïs Sabatini

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    Bravo !

    M. Serge Muller

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    Cette situation est insupportable ! Il faut en finir avec les marges abusives que s’octroie la grande distribution, car les agriculteurs sont systématiquement perdants dans les négociations commerciales. Il faut en finir, enfin, avec la stratégie « De la ferme à la fourchette » imposée par l’Europe, qui organise délibérément la réduction drastique de notre production agricole.
    Commençons par privilégier nos agriculteurs. Cela fait trop longtemps qu’ils nous attendent. Vous l’aurez compris, nous sommes favorables à cette proposition de loi, car au Rassemblement national, nous savons remercier la main qui nous nourrit et qui fait notre fierté depuis tant de siècles. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Je ne laisserai pas durer excessivement le suspense : notre position a évolué depuis que vous proposez de modifier le contenu de cette proposition de loi et nous la voterons avec enthousiasme, car elle possède deux qualités essentielles.

    M. Olivier Marleix

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    Bravo !

    M. Hadrien Clouet

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    D’abord, ce texte fixe un objectif : élever le niveau des pensions de retraite de celles et de ceux qui ont tout donné à la collectivité par leur travail. C’est un enjeu de justice sociale qui entraînera, évidemment, un vote favorable. Ensuite, il propose une tactique politique : fixer un cap et des objectifs, puis contraindre le Gouvernement à en discuter les détails et à assurer l’intendance. La méthode a fonctionné, puisque si les macronistes y étaient opposés lors de son examen par la commission des affaires sociales, la pression de l’opinion publique les a obligés à réviser leur position et à réfléchir avec les auteurs de la proposition de loi pour aboutir à ce texte.
    Cela a déjà été rappelé, la situation des travailleuses et des travailleurs de la terre en France est catastrophique : ils travaillent plus que quiconque, mais gagnent moins que tout le monde. Ils passent environ cinquante-quatre heures par semaine au travail ; l’aiguille de l’horloge ne cesse jamais de tourner et les plus chanceux d’entre eux ne prennent parfois que deux ou trois jours de congés par an. Le droit au repos n’existe ainsi qu’à partir du moment où ils quittent le métier et cessent leur carrière professionnelle pour prendre leur retraite, le plus souvent, d’ailleurs, en continuant de travailler.

    M. André Chassaigne

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    C’est vrai !

    M. Hadrien Clouet

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    Dès lors, comment jouir de ce droit au repos, garanti à toutes les Françaises et à tous les Français, lorsqu’on n’a pas d’argent pour chauffer son domicile, réparer son frigo ou aller voir ses petits-enfants ? C’est impossible ! Et pourtant, c’est le destin de la plupart des agriculteurs, notamment des 17 % d’entre eux qui déclarent un revenu soit nul, soit négatif – c’est-à-dire qu’ils travaillent pour s’endetter ! Compte tenu de cette situation, on comprend pourquoi un agriculteur ou une agricultrice qui travaille sans interruption pendant toute sa vie, sans congés, sans week-ends, sans vacances, survit avec une retraite de 880 euros par mois, alors que dans les mêmes conditions d’exercice, c’est-à-dire avec la même quotité de travail, un autre actif toucherait mensuellement 1 000 euros de plus, soit 12 000 euros d’écart à l’année.

    M. Olivier Marleix

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    Très bien !

    M. Hadrien Clouet

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    Profitons de ce moment pour faire œuvre de pédagogie politique et revenir sur les motifs – déjà évoqués auparavant – qui nous conduisent à calculer la retraite agricole sur les vingt-cinq meilleures années plutôt que sur l’ensemble de la carrière. La raison en est que l’activité agricole est par essence variable : il y a les bonnes et les mauvaises années, indépendamment du travail accompli. Avec le dérèglement climatique, cette déconnexion empire : sécheresses, inondations, vents violents, salinisation des sols, grêle sont autant d’événements qui frappent les rendements et amputent le revenu des agriculteurs, limitant ainsi leur capacité contributive et sabrant le niveau des pensions de retraite futures. Dès lors qu’il existe de mauvaises années, de plus en plus nombreuses et récurrentes, il convient de les écarter du calcul de la retraite pour éviter que les agriculteurs et agricultrices soient sacrifiés en raison du dérèglement climatique.
    Si la pauvreté des agriculteurs et des agricultrices est une torture sociale pour eux, qui sont les premiers concernés, c’est également une forme d’abattement moral pour l’ensemble du pays. Ce n’est en effet pas à l’heure de la retraite qu’on se demande comment on va vivre, mais lorsque, au vu de l’expérience des anciens, on voit son propre avenir passer à côté de soi. Or que voient les jeunes qui hésitent à entrer dans l’agriculture ? Ils voient, comme dans un miroir très sombre, se dessiner, quelques années en avance, l’image d’agriculteurs retraités survivant avec quelques centaines d’euros par mois, parfois à la charge de leurs proches ou contraints de compter sur leurs enfants, quand ils ne perdent pas pied faute de revenus ! Comment, dans ces conditions, attirer à l’agriculture, pour assurer notre souveraineté alimentaire et organiser la grande bifurcation écologique du pays, les centaines de milliers de jeunes dont nous avons besoin ? C’est impossible ! Ce qui se joue concerne à la fois la protection sociale des sortants de l’agriculture et la garantie sociale des entrants.
    Votre texte nous rappelle enfin, peut-être malgré vous, le caractère détestable du système de retraite par points qu’Emmanuel Macron a voulu imposer à la France entière en 2020. Les non-salariés agricoles, auxquels il s’applique, se retrouvent désormais sous le seuil de pauvreté après une carrière complète à s’exténuer pour garantir notre alimentation, donc notre survie.

    Une députée du groupe LFI-NUPES

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    Eh oui !

    M. Hadrien Clouet

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    Les retraites par points ne sont ni fiables ni viables ; elles conduisent systématiquement à des rectifications législatives ultérieures, ce qui plaide en faveur d’un système de retraite ordinaire par répartition, à même d’assurer à toutes et à tous, après une vie de travail, un revenu décent. Parce que ce texte est étonnamment social et implicitement anti-macroniste, nous le voterons. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Selon la Mutualité sociale agricole, le montant des retraites agricoles se situe autour de 1 150 euros brut par mois, alors que la moyenne des pensions de retraite en France avoisine 1 500 euros. Avouez que l’écart n’est pas négligeable. Cherchez l’erreur ! Les agriculteurs sont les derniers à voir leur retraite calculée sur l’intégralité de leur carrière et les non-salariés agricoles, eux, sont toujours en dehors des évolutions qu’ont connues les autres régimes de non-salariés, alors qu’ils représentent pas moins de 1,3 million de retraités. Quand on pense que le régime des commerçants et des artisans est aligné, lui, sur le régime général depuis 1973 !
    Cherchez l’erreur encore, quand on sait combien sont aléatoires les récoltes ou les vendanges : sécheresses, inondations, gelées noires ou blanches, grippe aviaire ou peste porcine, voilà ce qu’affronte le monde agricole. Dans mon département de l’Hérault, au cours des dix-sept dernières années, pas moins de trente-et-un événements climatiques ont été qualifiés d’exceptionnels et ont donné lieu à une reconnaissance de l’état de calamité agricole, pour un montant total de 47 millions d’euros de dommages !
    Et l’on s’étonne, et l’on regrette, et l’on s’émeut que meurent nos campagnes, que le métier n’attire plus, que les agriculteurs se suicident ! Doit-on rappeler l’horreur de ces chiffres, qui témoignent de la souffrance profonde de ceux qui nous nourrissent ? 522 suicides par an en moyenne, selon les derniers chiffres, qui datent de 2017. Quelle injustice ! Quelle honte quand on sait que ce sont eux, nos agriculteurs et leurs familles – je pense ici avec tendresse à nos viticulteurs, spécialement à ceux de l’Hérault et du Biterrois –, qui façonnent patiemment, souvent génération après génération, nos paysages et sculptent gratuitement, par amour de la terre, l’harmonie de nos belles provinces !

    Mme Nathalie Serre

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    Bravo !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Ce sont eux qui font de la France un jardin à ciel ouvert admiré de tous.
    Les deux propositions de loi dites Chassaigne 1 et 2 ont apporté des améliorations considérables. Il était temps ! La première prévoyait la revalorisation des pensions de retraite agricoles à hauteur de 85 % du Smic agricole, soit 1 045 euros net. La deuxième effectuait un pas supplémentaire afin de revaloriser les pensions de retraite des conjoints et des aides familiaux, frères, sœurs et enfants, des exploitants agricoles. Mais comme leur application fut longue et laborieuse ! Sans cesse reportée depuis plus de dix ans, une réforme globale et ambitieuse du régime agricole s’impose. Cela est d’autant plus urgent que près de 50 % des actifs agricoles devraient faire valoir leurs droits à la retraite dans dix ans.
    Nonobstant les difficultés d’application évoquées par certains, concernant notamment les modalités de calcul, la proposition de loi que nous examinons fixe un cap. Elle est donc la bienvenue. J’y mettrais cependant un bémol : il est regrettable que ce texte reste incantatoire. C’est bien de viser un objectif, c’est mieux de l’atteindre : repousser l’entrée en vigueur de la réforme de 2024 à 2026 fera de nombreux déçus.
    Au-delà de cette réforme, au-delà des querelles de clochers, c’est le monde agricole français, la ruralité et les agriculteurs qu’il nous faut replacer au centre du village. Selon le rapport d’information sénatorial relatif à la compétitivité de la ferme France, publié le 28 septembre dernier, nous assistons à la lente érosion de notre agriculture. Malgré une balance commerciale encore excédentaire de 8 milliards d’euros en 2021, la France est passée du deuxième au cinquième rang des exportateurs mondiaux de produits agricoles en vingt ans. Nous sommes l’un des seuls grands pays agricoles dont les parts de marché reculent. Plus inquiétant, en trente ans, plus de 57 % des exploitations ont disparu. Les surfaces agricoles utiles se réduisent et les investissements sont en berne, sans compter les difficultés liées à la transmission des terres et des exploitations.
    À l’heure où la guerre en Ukraine nous rappelle cruellement la nécessité d’une souveraineté alimentaire solide et effective, il nous faut renouer avec une agriculture compétitive.

    Mme Nathalie Serre

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    Elle a raison !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Cela doit passer aussi par une politique de protection pour tous ceux qui consacrent leur vie à nous nourrir. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN.)

    Mme la présidente

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    La discussion générale est close.
    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Julien Dive, rapporteur

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    À l’écoute de vos propos, chers collègues, j’ai le sentiment qu’un consensus se dessine, certes malgré quelques nuances – sinon, ce ne serait pas drôle ! Je répondrai néanmoins sur quelques points.
    Tout d’abord, sur la question du décret, soulevée notamment par le président Chassaigne. La proposition de loi vise, vous l’avez compris, à aligner le régime des retraites agricoles sur le régime général, celui des salariés agricoles et celui des travailleurs indépendants en fondant le calcul sur les vingt-cinq années les plus avantageuses. Il ne s’agit pas de remettre en cause l’architecture duale du système, toute modification en la matière relevant du domaine législatif. J’ai compris de l’argumentation de notre collègue Nicolas Turquois qu’il souhaiterait un autre système : cela serait du ressort de la loi. L’amendement no 42 que j’ai déposé à l’article 1er, s’il est adopté, permettra précisément d’obtenir la remise d’un rapport au Parlement détaillant les meilleurs scénarios et leurs déclinaisons possibles. En revanche, l’entrée en vigueur du nouveau mode de calcul relève du domaine réglementaire, donc du décret. Il est vrai que mon amendement fait référence à un décret pris par le Gouvernement ; le sous-amendement de notre collègue Rabault, qui sera examiné tout à l’heure et auquel je donnerai un avis favorable, propose que ce décret soit pris en Conseil d’État – cela me paraît nécessaire, ne serait-ce que pour la partie réglementaire.
    Je veux répondre également à notre collègue Turquois concernant la date d’entrée en vigueur de la réforme. J’ai ici, chers collègues, un article du Paysan breton (M. Didier Le Gac et Mme Graziella Melchior applaudissent)

    M. Erwan Balanant

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    Très bonne revue !

    M. Lionel Royer-Perreaut

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    Bonne lecture !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    …daté du 23 novembre 2015, dont je vous lis un extrait : « Lors d’une séance de questions au Gouvernement, le 22 novembre, Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, a annoncé que la conférence sur les retraites agricoles et leur financement se tiendra le 30 novembre prochain. Fin octobre, à l’Assemblée nationale, il s’est prononcé favorable à un calcul des retraites des agriculteurs sur les vingt-cinq meilleures années de leur carrière ». On voit bien que cette question est débattue depuis de nombreuses années ; la loi de 2010 portant réforme des retraites, dont l’article 91 prévoyait la remise d’un rapport au Parlement et a conduit à la publication du rapport de l’Igas de mars 2012, ainsi que les prises de position des gouvernements successifs, ont créé une réelle attente. Dans votre sous-amendement no 50, vous proposez, monsieur Turquois, de reporter l’entrée en vigueur de la réforme à 2030.

    M. Philippe Gosselin

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    Pourquoi pas à la Saint-Glinglin ?

    M. Vincent Descoeur

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    2050, pendant que vous y êtes !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Ce n’est pas sérieux !

    M. Philippe Gosselin

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    Non, pas sérieux !

    M. Vincent Descoeur

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    Pas respectueux !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Ce n’est pas sérieux, parce que 2030 signifierait un retard de quinze ans par rapport à la position prise en 2015, voire de vingt ans par rapport aux débats sur la réforme des retraites de 2010. Je comprends qu’il ne faille pas vendre d’illusions, vous avez raison sur ce point, mais il ne faut pas non plus exacerber le désespoir et laisser penser qu’on se moquerait des agriculteurs – certains nous regardent depuis chez eux, d’autres sont présents aujourd’hui dans les tribunes. Un report à 2030 serait vécu comme une provocation.
    Je rappelle, de manière synthétique, le fonctionnement du système de retraite des non-salariés agricoles. Il repose sur deux étages, à savoir une partie proportionnelle, l’assurance vieillesse agricole (AVA), dont le montant dépend des cotisations versées tout au long de la carrière et donc du nombre d’années d’exercice, et une partie forfaitaire, l’assurance vieillesse individuelle (AVI), calculée à partir d’un montant forfaitaire multiplié par le nombre de trimestres d’activité. Plus vous cotisez, plus vous validez de points. Vous obtenez ainsi schématiquement une courbe permettant de présenter ce que j’appellerais un plat, c’est-à-dire une tranche de revenus annuels professionnels compris entre 8 400 et 15 600 euros pour laquelle le nombre de points validés – à savoir trente points – ne varie pas. C’est là que réside la véritable injustice. Cela conduit d’ailleurs certains exploitants à faire de l’optimisation fiscale pour ne plus contribuer au régime. Cela fait partie des questions dont nous devrons sans doute débattre – nous avons pu le faire lors des auditions – et la profession est prête à s’y engager ; nous devrions avoir l’occasion d’y revenir lorsque le Gouvernement remettra le rapport au Parlement – si mon amendement est adopté.
    En dehors de cette spécificité duale du régime des non-salariés agricoles, je rappelle que la MSA n’a jamais dit qu’elle n’était pas capable de reconstituer les carrières. Elle dispose d’un historique sur l’ensemble des points cumulés et pourrait le faire, y compris s’il s’agissait de revenir aux vingt-cinq meilleures années. La difficulté consiste davantage dans la reconstitution des revenus qui ont permis d’accumuler ces points.

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Un certain nombre d’agriculteurs ne partiront pas à la retraite avant 2030 ; avec le système que nous proposons, ils pourront continuer à cumuler leurs meilleures années.

    M. Jean-Yves Bony

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    Il faut rendre la carrière plus attractive !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    L’argument selon lequel la MSA ne pourra pas reconstituer les carrières est fallacieux : je ne peux le recevoir.
    M. Muller est le seul à avoir invoqué l’enjeu de la souveraineté alimentaire : il a eu raison de le faire, d’autant que la moitié des agriculteurs prendront leur retraite dans les dix prochaines années.

    M. Philippe Gosselin

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    C’est très important !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Il faut accompagner les agriculteurs qui souhaitent reprendre des exploitations, mais aussi les personnes qui souhaitent opérer une reconversion professionnelle vers le monde agricole. Or la souveraineté agricole et alimentaire est intimement liée à la question des carrières et de la retraite des exploitants. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs des groupes RE et RN.)

    Discussion des articles

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte dont l’Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n’a pas adopté de texte.

    M. Patrick Hetzel

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    C’est bien dommage !

    Article 1er

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dino Cinieri.

    M. Dino Cinieri

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    La proposition de loi défendue par notre collègue Julien Dive, visant à calculer la retraite des non-salariés agricoles sur les vingt-cinq meilleures années de revenus, a été rejetée d’extrême justesse – par dix-huit voix pour et dix-huit voix contre – en commission des affaires sociales le 23 novembre. Il s’agit pourtant d’une mesure de justice sociale, qui dépasse les clivages partisans et qui est très attendue dans les territoires.

    Mme Emmanuelle Anthoine

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    Eh oui !

    M. Dino Cinieri

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    Les agriculteurs sont en effet les derniers à calculer leur retraite sur la totalité de leur carrière, bonnes et mauvaises années mêlées, alors que les salariés la calculent sur leur vingt-cinq meilleures années de revenus, et les fonctionnaires sur leurs six derniers mois. Certains, sur les bancs de la majorité, voulaient encore attendre pour régler cette question, au prétexte qu’une grande réforme des retraites serait bientôt discutée ; mais attendre encore, comme on nous l’impose depuis quinze ans malgré nos demandes récurrentes, équivaudrait à renoncer à un traitement équitable entre les agriculteurs et le reste de la population, en particulier les salariés et les indépendants.
    En retirant les plus mauvaises années du calcul, la présente réforme vise simplement à mettre à niveau les pensions des non-salariés agricoles, dont la moyenne reste inférieure à celle de l’ensemble des retraités. Tous régimes confondus – y compris les régimes complémentaires –, les anciens non-salariés agricoles – chefs d’exploitation, conjoints et aidants familiaux –, bien qu’ils aient exercé une activité agricole sept jours sur sept, perçoivent une pension de 1 150 euros brut mensuels, alors que la moyenne nationale dépasse 1 500 euros brut.
    Les agriculteurs sont fatigués d’être traités comme des actifs de seconde zone. Après la revalorisation des minima de retraite instituée par les lois dites Chassaigne 1 et 2, nous devons donner des perspectives aux jeunes qui s’installent. J’espère que comme pour la déconjugalisation de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), nous voterons à l’unanimité cette mesure de justice sociale pour nos agriculteurs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. José Beaurain applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

    M. Jean-Louis Bricout

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    Au nom du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, ainsi qu’en mon nom personnel, je tiens à saluer l’engagement constant de M. le rapporteur en faveur du monde agricole – samedi encore, nous échangions tous deux avec les éleveurs du département de l’Aisne : ils nous faisaient part de leurs difficultés, notamment de celles qui découlent de la loi Egalim 2 et de la construction des prix. Je salue aussi sa volonté de nous rassembler, au-delà de nos divergences politiques, autour d’une cause que nous partageons tous : la reconnaissance des agriculteurs et du travail de toute une vie qu’ils fournissent – travail souvent éprouvant, synonyme de privations – pour assurer notre souveraineté alimentaire.
    Je veux également saluer le travail qui a été mené, à la suite des réunions de la commission, dans le but de coconstruire un amendement de réécriture ; celui-ci a été expertisé et validé par M. le ministre, que je remercie pour son écoute et sa collaboration. Mes remerciements vont aussi à celles et ceux qui contribuent depuis plus de vingt ans à améliorer et à rendre plus juste le régime des retraites agricoles – je pense en particulier à Germinal Peiro, Marisol Touraine et André Chassaigne.
    Il reste évidemment des obstacles à surmonter pour reconstituer toutes les années d’efforts des agriculteurs et revaloriser leurs pensions. Nous devrons ajuster le dispositif dans le temps, cela a été rappelé, mais tout est possible quand la volonté politique est là et que toutes les volontés politiques convergent vers l’objectif de justice qu’est l’alignement des régimes. Nous voterons donc sans hésitation cette proposition de loi, en témoignage de notre respect pour le monde agricole. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LIOT.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Woerth.

    M. Éric Woerth

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    Je me réjouis que notre assemblée manifeste une unanimité – cela ne nuit pas.

    M. Pierre Cordier

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    Ce n’est pas la première fois !

    M. Éric Woerth

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    Ce n’est en effet pas la première fois, et sans doute pas la dernière – en tout cas en ce qui concerne les retraites. La proposition de loi de M. Dive est un texte important. Nous avions déjà évoqué la question des pensions des non-salariés agricoles en 2010, quand je défendais, en tant que ministre, une réforme des retraites. Nous avions demandé un rapport à l’Igas pour y voir plus clair – M. le rapporteur y a fait référence, et la proposition de loi le mentionne. Nous devons nous efforcer d’actualiser ce rapport, qui a sommeillé pendant une dizaine d’années. De toute évidence, le régime agricole est décalé par rapport à la réalité. Il est de surcroît d’une grande complexité, que ne justifient pas entièrement les spécificités du monde agricole – pour tout dire, il est incompréhensible. Nous devons viser non pas un alignement complet des régimes – ce serait impossible –, mais un alignement passant par la prise en compte des vingt-cinq années les plus avantageuses. L’amendement du  rapporteur précise le dispositif et assure sa faisabilité. Ne sous-estimons pas le travail demandé à la MSA – j’ai entendu les propos de M. le rapporteur à ce sujet –, et faisons en sorte que personne ne sorte perdant de ce chantier.
    Je salue donc ce texte, amendé par le rapporteur ; il me paraît souhaitable de l’adopter avant les discussions plus générales que nous aurons sur la réforme des retraites.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Rancoule.

    M. Julien Rancoule

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    Je tiens à insister sur l’obligation de résultat qui nous incombe. L’article 1er a pour objectif d’étendre aux non-salariés agricoles le calcul de la retraite de base sur les vingt-cinq meilleures années de revenus. Nous n’avons pas le droit d’échouer : c’est un objectif que nous devons obligatoirement atteindre. Les non-salariés agricoles, ce sont les chefs d’exploitation, les aidants familiaux ou encore les conjoints d’agriculteurs qui participent aux travaux quotidiens : ce sont tout simplement nos agriculteurs, nos viticulteurs, nos éleveurs ou encore nos maraîchers.
    Emmanuel Macron avait affirmé en 2020, lors du Salon de l’agriculture, qu’il était impossible de revaloriser les pensions de retraite des agriculteurs : j’invite tous les parlementaires à lui donner tort. Il est de notre responsabilité collective d’avancer dans ce domaine, et de montrer aux Français que l’Assemblée nationale peut changer directement et positivement leur vie. En 2022, comment est-il encore possible que des agriculteurs perçoivent moins de 900 euros net de pension de retraite ? C’est largement en dessous de la moyenne nationale, et il est temps que cela change. N’oublions jamais que les agriculteurs sont ceux qui font vivre la nation : nous leur devons tant – en l’occurrence, nous leur devons de meilleures retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Loïc Kervran.

    M. Loïc Kervran

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    Si certaines interventions ont insisté sur les difficultés du métier d’agriculteur, je tiens à rappeler que c’est un métier magnifique, indispensable, porteur de sens et d’avenir ; c’est un métier de jeunes. Cette proposition de loi ne constitue ni une obole, ni une récompense : c’est une juste et belle décision dont l’Assemblée va s’honorer à l’égard du plus beau des métiers que compte notre nation. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet.

    Mme Danielle Simonnet

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    C’est une victoire idéologique importante et un acte historique que nous nous apprêtons, je l’espère, à accomplir : nos débats montrent en effet que l’idée selon laquelle la retraite doit être un moment de vie digne pour toutes et tous, est en passe de devenir majoritaire dans l’hémicycle. Calculer sur les vingt-cinq meilleures années la retraite des non-salariés agricoles – eux qui ont pu connaître des accidents de parcours, des revenus en dents de scie et de mauvaises récoltes – est une avancée sociale majeure, qui va à rebours de tant de régressions sociales.
    Ayons conscience que nos paysans et nos agriculteurs nous alimentent, que leur travail est essentiel et que la nation tout entière leur doit reconnaissance. Oui, la nation doit sa reconnaissance aux agriculteurs, non seulement parce qu’ils nous nourrissent, mais aussi parce que les mesures qui doivent être prises urgemment pour protéger l’environnement et lutter contre le réchauffement climatique les mettent en première ligne. C’est sur leur travail que repose le respect de la terre et de l’environnement, ainsi que la qualité des aliments que nous mettons dans nos assiettes.

    M. Fabien Di Filippo

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    L’agriculture, ce n’est pas cultiver des tomates sur le toit d’un immeuble !

    Mme Danielle Simonnet

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    Les agriculteurs incarnent un métier d’avenir. La transition de l’ensemble du secteur agricole vers une agriculture paysanne et bio nécessitera bien plus d’hommes et de femmes qu’aujourd’hui, et permettra de créer de nombreux emplois. Nous devons leur garantir une vie digne et la retraite décente qu’ils méritent amplement, eux qui remplissent un rôle si important pour la nation. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 42, qui fait l’objet de quatre sous-amendements, nos 50, 49, 51 et 52.

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Il vise à assurer la faisabilité technique du dispositif prévu par la proposition de loi. Nous proposons ainsi d’inscrire celui-ci après l’article L. 732-24 du code rural et de la pêche maritime, qui définit l’architecture duale du régime de retraite de base des non-salariés des professions agricoles. Ce faisant, nous affirmons que l’objectif de la proposition de loi n’est pas de remettre en cause l’architecture que j’évoquais tout à l’heure – avec l’AVA et l’AVI –, mais de l’assumer et de la faire coïncider avec la prise en compte des vingt-cinq meilleures années.
    Dans sa version actuelle, l’article 1er prévoit d’étendre aux non-salariés agricoles la règle de prise en compte des vingt-cinq meilleures années de revenu. Une lecture stricte de cette disposition aurait pu conduire à interpréter l’article comme une invitation à aligner le régime des non-salariés agricoles sur le régime général, et notamment à abandonner le fonctionnement du régime à points : ce n’est pas mon intention, et ce n’est pas ce que souhaite la profession.
    Comme le démontrait le rapport de l’Igas en 2012, il est tout à fait possible d’envisager à la fois un régime à points – avec une règle de calcul telle qu’elle est prévue – et un régime qui prenne en compte les années les plus avantageuses. Les points acquis seraient ainsi calculés sur les vingt-cinq meilleures années, et le montant de la retraite serait déterminé au prorata de la durée réelle de l’assurance.
    Mon souhait initial était que le dispositif entre en vigueur en 2024 – nous en avions discuté avec les acteurs. Les engagements qui ont été pris en 2010 et 2015, et qui ont été réitérés lors de chaque réforme des retraites, ont suscité une attente. Pour autant, le dispositif ne peut être mis en œuvre qu’avec le concours de la MSA. La commission a auditionné de nombreux acteurs, parmi lesquels des représentants des filières, des syndicats agricoles, les ministères concernés et, bien évidemment, la MSA – en tant que caisse de retraite, elle sera la première concernée par le recouvrement des cotisations et le versement des pensions de retraite. La MSA a expliqué que l’échéance de 2024 était difficilement tenable. Elle utilise en effet un système d’information binaire, qui permet d’une part de recouvrer les cotisations, et d’autre part de verser les pensions. Le nouveau dispositif implique qu’elle mette à jour son système d’information pour s’adapter au nouveau calcul des points et à l’évolution de la partie forfaitaire. Cela demandera un certain temps. J’ai entendu la demande de la MSA de reporter l’échéance, car je ne souhaite pas que le nouveau dispositif soit bâclé.
    La MSA nous a également rappelé qu’il existe deux types de pensionnés : les monopensionnés, qui ont travaillé pendant toute leur carrière en tant que non-salariés agricoles et dont le cas ne présente pas de difficulté majeure, et les polypensionnés, qui ont exercé une activité différente avant de devenir non-salarié agricole : salarié agricole, salarié dans le secteur privé ou encore fonctionnaire.

    M. Vincent Descoeur

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    C’est vrai !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Leur cas pose davantage de difficultés à la MSA.
    Lors des auditions, celle-ci nous a clairement indiqué qu’elle pourrait appliquer le nouveau mode de calcul en 2025 pour les monopensionnés et en 2026 pour les polypensionnés. Sauf qu’à y regarder de plus près, les polypensionnés représentent 92 % des non-salariés agricoles.

    M. Jean-Yves Bony

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    Eh oui !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Il aurait été inéquitable, voire inconstitutionnel – cela reste à vérifier –, de fixer deux dates distinctes d’entrée en vigueur pour les monopensionnés et pour les polypensionnés. C’est pourquoi, tenant compte des attentes de la MSA et des acteurs, nous avons choisi la date unique du 1er janvier 2026.
    Néanmoins, qui peut le plus peut le moins : si la MSA est prête avant cette date, il ne faudra pas qu’elle se prive d’anticiper l’entrée en vigueur du dispositif !
    Lors de l’examen du texte en commission, plusieurs d’entre vous ont regretté l’absence d’une simulation permettant d’évaluer les effets de la réforme. Je pense notamment à Yannick Monnet, du groupe GDR-NUPES. Nous avons demandé à la MSA de nous fournir des éléments chiffrés, que nous n’avons malheureusement pas obtenus dans le temps imparti.
    Comme je le rappelais lors de la discussion générale, l’essentiel des mesures nécessaires à l’application de la réforme relèvent du domaine réglementaire. Le Parlement doit être informé des choix du Gouvernement en la matière.
    C’est pourquoi nous proposons au Gouvernement de remettre au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi, un rapport présentant le détail des scénarios envisagés et des paramètres retenus pour son application, l’évaluation quantitative de ses conséquences sur les cotisations et prestations des non-salariés agricoles, ainsi que des propositions de mesures visant à renforcer les dispositifs de redistribution et à améliorer la lisibilité du régime de retraites tout en respectant sa spécificité et en garantissant le niveau des pensions. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Anne Le Hénanff applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois, pour soutenir le sous-amendement no 50.

    M. Nicolas Turquois

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    Avant de le présenter, je tiens à saluer l’intervention de Loïc Kervran. En tant qu’agriculteur, je vous assure que j’en ai marre d’entendre toujours parler de ma profession comme d’un métier pénible et sombre. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem, RE et HOR.)
    C’est un métier qui demande certes des efforts particuliers, mais si on veut susciter des vocations, il faut montrer que de nombreux agriculteurs vivent honnêtement de leur travail,…

    M. Philippe Gosselin

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    Bien évidemment ! Personne ne dit le contraire !

    M. Nicolas Turquois

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    …exercent une activité passionnante, produisent de l’alimentation, vendent des produits de qualité… C’est un très beau métier, bien différent du servage moderne décrit par certains !

    M. Philippe Gosselin

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    Personne n’a rien dit de tel ! Qui ici a tenu de tels propos ?

    M. Nicolas Turquois

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    Présentons l’agriculture comme une activité valorisante ; nous attirerons ainsi de jeunes agriculteurs pleins d’ambition.
    J’ai déposé trois sous-amendements d’appel, visant à alerter sur divers sujets. Je les retirerai tout à l’heure.

    Mme Véronique Louwagie

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    Retirez-les dès maintenant !

    M. Nicolas Turquois

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    Le sous-amendement no 50 tend à reporter à 2030 l’entrée en vigueur de la mesure.
    Monsieur Chassaigne, vous avez été l’auteur de dispositions louables. Vous reconnaîtrez toutefois, je pense, que si certains agriculteurs nous en ont remerciés, d’autres se sont plaints de n’avoir pas pu en bénéficier.

    Mme Valérie Rabault

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    C’est votre faute !

    M. Nicolas Turquois

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    En effet, la complexité du système a causé des malentendus : les retraités agricoles n’ont pas compris que le dispositif concernait uniquement les personnes ayant exercé une activité agricole pendant toute leur carrière et ayant liquidé leur pension.

    M. Vincent Descoeur

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    C’est vous qui en avez exclu certains !

    M. Nicolas Turquois

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    En proposant la date de 2030, je souhaite surtout vous alerter sur le fait qu’en 2026, le système actuel ne permettra pas de connaître les revenus des vingt-cinq meilleures années des agriculteurs.
    Je rappelle à ceux qui étaient absents lors de la discussion générale – je ne vous en tiens pas rigueur – que jusqu’en 1990, les revenus des agriculteurs étaient calculés sur une base forfaitaire. Or on ne peut pas inclure un revenu forfaitaire dans le calcul des vingt-cinq meilleures années !
    En outre, la MSA ne dispose pas des informations relatives aux revenus perçus par les agriculteurs entre 1990 et 2014.
    Par conséquent, en 2026, nous connaîtrons au mieux douze ans de revenus, sauf si des dispositions particulières permettent d’obtenir ces informations différemment, en interrogeant par exemple le fisc ou les centres de comptabilité.

    M. Philippe Gosselin

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    C’est l’objet de la proposition de loi !

    M. Nicolas Turquois

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    Je retirerai ce sous-amendement, mais je l’ai défendu pour alerter sur le fait qu’il sera possible, en 2026, de considérer tout au plus trente-huit années de carrière sur quarante – ou trente-sept, comme le suggérait M. le rapporteur lors de la discussion générale. En tout cas, nous serons incapables de calculer la retraite sur la base des vingt-cinq meilleures années.

    Mme la présidente

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    Souhaitez-vous ajouter quelques mots pour soutenir les sous-amendements nos 51 et 52 ?

    M. Nicolas Turquois

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    Le taux de cotisation des agriculteurs est légèrement inférieur à celui du régime général. Le sous-amendement no 52 vise à alerter sur ce sujet. En effet, pour se constituer des droits à la retraite, les agriculteurs ont besoin de verser des cotisations d’assurance vieillesse plus élevées. Ce sera certes un effort collectif pour le milieu agricole, mais il me semble qu’il faut tendre vers un tel système.
    Enfin, le sous-amendement no 51 tend à expertiser la faisabilité de la reconstitution des revenus non enregistrés par la MSA. Peut-être me manque-t-il certains éléments, mais je suis très surpris qu’on envisage d’appliquer la réforme uniquement par décret : au vu de sa complexité, il me semble qu’elle exigera certains aménagements légaux, ce qui allongera nécessairement les délais d’application. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles une entrée en vigueur en 2026 paraît précoce.
    En tout cas, il faut travailler dès à présent à reconstituer les revenus antérieurs à 2014, qui n’ont pas été enregistrés.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir le sous-amendement no 49.

    Mme Valérie Rabault

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    Le groupe Socialistes et apparentés avait déposé plusieurs amendements, rédigés notamment par Joël Aviragnet, qui ont été jugés irrecevables au motif qu’il s’agissait de cavaliers législatifs. Je profiterai donc de cette intervention pour rappeler plusieurs choses.
    Le sous-amendement vise à compléter l’alinéa 4 par les mots « en Conseil d’État ». En effet, l’application des deux lois Chassaigne a souffert de décrets dysfonctionnels dont il a ensuite fallu rectifier les erreurs. Il importe que le décret d’application du présent texte soit clair et efficace ; c’est pourquoi nous proposons qu’il soit pris en Conseil d’État.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Très bien !

    M. Jean-Yves Bony

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    Parfait !

    Mme Valérie Rabault

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    Je tiens à répondre à M. Turquois. Les retraites agricoles ont toujours été revalorisées par la gauche : par Lionel Jospin en 2001, par François Hollande en 2012 et par les deux lois Chassaigne votées sous le précédent quinquennat. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    M. Inaki Echaniz

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    Eh oui !

    M. Philippe Gosselin

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    Votées à l’unanimité, je le rappelle !

    Mme Valérie Rabault

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    Vous vous étonnez aujourd’hui que les polypensionnés ne bénéficient pas de la revalorisation prévue par la loi Chassaigne ; mais cher collègue, c’est vous qui avez déposé un amendement pour les en exclure ! C’est vous, députés de la majorité, qui avez écarté les polypensionnés de ce dispositif ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES, LR, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)
    Je prends l’exemple de mon département : le Tarn-et-Garonne compte 11 076 retraités agricoles qui ont été chefs d’exploitation. Seuls 481, soit 4,3 %, ont eu droit à la revalorisation Chassaigne. Pourquoi ? Parce que vous en avez écarté les polypensionnés ou encore les élus, notamment les maires. Je pourrais vous citer toute la liste des trous que vous avez percés dans la loi Chassaigne.

    M. Vincent Descoeur

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    Ils font semblant de le découvrir !

    Mme Valérie Rabault

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    Bien sûr, nous avons voté cette loi, car une avancée minime vaut mieux que le statu quo. Mais vous ne pouvez pas vous étonner de ses défauts : relisez donc l’amendement que vous aviez déposé ! (Protestations sur quelques bancs des groupes RE et Dem.) Vous aurez beau protester, cela ne change rien au fait que vous avez amputé la loi Chassaigne : regardez la réalité en face ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LR, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

    M. Maxime Minot

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    Merci !

    Mme la présidente

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    M. Turquois vient de défendre les sous-amendements nos 51 et 52.
    Quel est l’avis de la commission sur ces quatre sous-amendements ?

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Favorable au sous-amendement de Mme Rabault, qui précise utilement l’amendement no 42.
    Monsieur Turquois, vous êtes bien sûr libre de retirer vos sous-amendements, mais je suis favorable au sous-amendement no 52, qui complète la demande de rapport.
    En revanche, avis défavorable sur les deux autres sous-amendements. Je suis en désaccord avec vous : je suis convaincu qu’il sera possible de reconstituer les revenus des vingt-cinq meilleures années de carrière dès 2026.
    En effet, la MSA conserve l’historique de l’ensemble des points. Il est vrai qu’elle ne conserve que sept à dix ans les données concernant la manière dont sont constitués les points, ce qui s’explique par le fonctionnement de son système d’information : en écrasant certaines données, elle évite de l’alourdir. Pour autant, la MSA est parfaitement capable de sélectionner les vingt-cinq meilleures années grâce aux points, et cela dès 2026 : elle n’a jamais indiqué le contraire.
    Le rapport du Gouvernement identifiera les meilleurs scénarios et nous indiquera s’il vaut mieux appliquer le dispositif dès 2026 à l’ensemble des retraités agricoles – bien sûr, cette option a ma préférence –…

    M. Fabien Di Filippo

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    M. le rapporteur a raison !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    …ou s’il est préférable, comme cela a été envisagé avec l’ensemble des acteurs, de prendre d’abord en compte trente-sept années et de les réduire progressivement à vingt-cinq années jusqu’en 2030, afin d’éviter à la MSA des difficultés financières. Ce second scénario pourrait se révéler nécessaire, mais si le premier est applicable, ne nous en privons pas !

    M. Sylvain Maillard

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    Il a raison !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Par ailleurs, je tiens à rappeler que les premiers acteurs engagés dans une réforme de cette nature sont les agriculteurs eux-mêmes, leurs représentants, la MSA ; or ils ne s’opposent pas à une entrée en vigueur en 2026. Je vous demande de retirer votre sous-amendement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Lors de l’examen du texte en commission, M. Turquois avait exprimé des interrogations quant à l’applicabilité de cette proposition de loi. Les sous-amendements qu’il a déposés servent également à souligner les inquiétudes qui subsistent, que nous aurons trois ans pour apaiser si le texte est amendé et adopté dans la version proposée par M. le rapporteur.
    Je demande donc le retrait du sous-amendement no 50 : en coopération avec la MSA, nous ferons tout notre possible pour tenir l’objectif d’une entrée en vigueur en 2026.
    Je vous demande également de retirer le sous-amendement no 51. Vous avez opportunément souligné une difficulté existante ; toutefois, je ne crois pas que l’adoption de votre sous-amendement la résoudrait. Au contraire, l’amendement de M. le rapporteur permet d’y répondre.
    Avis favorable sur le sous-amendement no 52, qui permettra d’apporter une précision utile à la demande de rapport.
    Enfin, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée nationale quant au sous-amendement no 49 de Mme Rabault. Le Gouvernement et une partie de la majorité ont exprimé en commission leurs doutes quant à la possibilité d’une application par décret. Le rapport que remettra le Gouvernement éclaircira ces doutes : peut-être conclura-t-il qu’un décret est suffisant, peut-être recommandera-t-il la voie législative.

    Mme la présidente

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    Plusieurs députés ont demandé la parole. Je rappelle que si cet amendement de réécriture est adopté, les amendements nos 45 et 23 tomberont. Je donnerai donc la parole à un orateur par groupe souhaitant s’exprimer.
    La parole est à M. Nicolas Turquois. Retirez-vous tout ou partie de vos sous-amendements, cher collègue ?

    M. Nicolas Turquois

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    Je retire les sous-amendements nos 50 et 51. Qu’on ne se méprenne pas sur mon intention : je suis favorable au calcul de la retraite sur la base des vingt-cinq meilleures années. Attention toutefois à ne pas donner de faux espoirs aux agriculteurs ! Ils retiendront que l’ensemble de leur carrière sera valorisé dès 2026 ; pourtant, certaines données manqueront. Comme je le rappelais, les revenus forfaitaires ne sauraient être comptabilisés au sein d’une carrière.
    Bien sûr, mon objectif n’est pas de repousser jusqu’à 2030 la mise en œuvre de cette réforme, mais de rappeler la nécessité de faire preuve de la plus grande vigilance.
    Je maintiens le sous-amendement no 52.

    (Les sous-amendements nos 50 et 51 sont retirés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pascal Lavergne.

    M. Pascal Lavergne

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    Je tiens d’abord à remercier M. le rapporteur d’avoir déposé cet amendement. (M. Philippe Gosselin applaudit.) Il permettra de mettre les aspects techniques de la réforme en cohérence avec le message politique qu’elle adresse au monde agricole, rappelé plusieurs fois lors de la discussion générale.
    Je remercie également M. le ministre d’avoir participé à la construction de ce texte, afin qu’il soit à la fois applicable et porteur de sens.
    Je rejoins les propos tenus lors de la discussion générale : l’agriculture est au cœur de toutes les crises. Ainsi, lors de la crise sanitaire, elle a démontré à nouveau qu’elle était essentielle à l’alimentation de la population. Elle est également au cœur de la crise climatique, puisque l’eau est indispensable à la vie des plantes.
    Elle est, enfin, au cœur de la crise énergétique puisque les terres sont d’ores et déjà l’enjeu d’une concurrence entre la production de denrées alimentaires, d’une part, et la production de matières premières destinées aux méthaniseurs, par exemple, ou les installations photovoltaïques, d’autre part. N’oublions pas, à cet égard, que l’agriculture a pour mission de nourrir la population, et qu’il est essentiel de se nourrir pour vivre !
    Cependant, le renouvellement des générations n’est pas assuré alors que nous devons relever le défi de la souveraineté alimentaire. Nous adressons donc un message politique au monde agricole : nous lui disons que nous ne l’abandonnons pas,…

    M. Patrick Hetzel

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    Il est temps de le dire !

    M. Pascal Lavergne

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    …que nous reconnaissons son travail et que nous nous engageons en faveur d’une revalorisation de l’agriculture pour qu’elle attire les nouvelles générations.

    M. Patrick Hetzel

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    On attend les actes !

    M. Pascal Lavergne

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    C’est indispensable : l’enjeu est de nature géopolitique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Luc Bourgeaux.

    M. Jean-Luc Bourgeaux

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    Ce matin, je suis un peu gêné, car en tant qu’agriculteur, j’ai le sentiment de demander l’aumône. Or pourquoi sommes-nous dans cette situation ? Pourquoi discutons-nous aussi souvent de la question des retraites agricoles ? Parce que ce système de retraite n’était pas bon : M. Turquois l’a dit, chaque agriculteur se voyait attribuer des points dont le nombre était calculé par tranches. Si, par chance, il avait fonctionné comme l’Ircantec, par exemple, le nombre de points aurait correspondu aux revenus, alors que dans ce système par tranches, vous pouviez vous voir attribuer trente points, que vous cotisiez à la MSA à hauteur de 4 000 euros ou de 8 000 euros.
    C’est bien là tout le problème : si nous avions eu un système à points classique, les retraites agricoles seraient beaucoup plus importantes. Si elles sont si faibles, ce n’est donc pas, comme certains le disent, parce que nous avons peu cotisé.
    Aussi, puisque le texte va être adopté, je tiens à tous vous remercier de réparer l’injustice que nous subissons, nous, les agriculteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Je souhaite revenir rapidement sur quelques points.
    Premièrement, j’ai la conviction que le rapport du Gouvernement conclura à la nécessité d’une intervention législative. En effet, les retraites agricoles sont ainsi construites qu’un simple décret ne suffira pas pour acter la décision que nous allons prendre aujourd’hui de façon, je l’espère, unanime.
    Deuxièmement, l’esprit des premières lois consacrées à cette question n’a pas été respecté. De fait, lorsque nous avons adopté les fameuses propositions de loi Chassaigne 1 et 2, nous étions persuadés, en particulier pour la première d’entre elles, que le fait d’avoir fait une carrière complète dans l’agriculture et 17,5 années en tant que chef d’exploitation ouvrait droit, en l’absence d’autre pension, à une retraite équivalente à 85 % du SMIC.

    Mme Valérie Rabault

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    Exactement !

    M. Vincent Descoeur

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    C’était l’objectif, en effet !

    M. Patrick Hetzel

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    C’est juste !

    M. André Chassaigne

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    C’est ce que nous avions tous en tête : aucun d’entre nous, j’en suis persuadé, ne pensait qu’il n’en serait pas ainsi. Or, la retraite agricole est construite de telle façon que le montant de la pension des agriculteurs qui remplissent ces deux critères n’atteint pas 85 % du SMIC, car celle-ci est calculée au prorata d’autres éléments constitutifs de la retraite – il faudra y revenir.
    Troisièmement, on nous a en effet imposé le fameux écrêtement au moment du vote sur ma première proposition de loi. Or, il a des conséquences terribles. On a pu remédier à l’une d’entre elles, grâce au Gouvernement, dans le cadre de la loi portant mesures d’urgence pour le pouvoir d’achat. En effet, un retraité paysan qui était maire ne pouvait pas bénéficier de l’augmentation de sa retraite agricole parce qu’il cotisait à l’Ircantec.

    M. Vincent Descoeur

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    Scandaleux !

    M. André Chassaigne

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    On a mis fin à cette situation au mois de juillet, grâce à un amendement que j’avais déposé. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Au mois de septembre,…

    Mme la présidente

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    Merci, monsieur Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    …nous sommes parvenus à faire adopter la même disposition pour les élus agricoles qui siègent dans les chambres d’agriculture ou les MSA.

    Mme la présidente

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    Merci !

    M. André Chassaigne

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    Il faut que petit à petit, on détricote tout cela. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LR et Écolo-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

    M. Jean-Louis Bricout

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    Bien entendu, nous soutiendrons l’amendement de réécriture de l’article, car il s’agit de la seule solution raisonnable et responsable. Il est en effet nécessaire d’expertiser le système d’information et d’évaluer le dispositif pour éviter les écueils éventuels. Ce faisant, nous épargnerons des déceptions au monde agricole, qui ne le mérite certainement pas.
    Par ailleurs, je souscris aux propos de M. Chassaigne. Il faut se méfier des amendements de dernière minute et de la manière dont les décrets d’application sont rédigés ou appliqués, car ils nous jouent parfois de vilains tours.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Sauf sur celui, excellent, de Mme Rabault, le groupe LFI-NUPES s’abstiendra sur les sous-amendements, notamment sur celui qui vise à reporter l’application de la mesure dans le temps. En effet, cela fait plus de dix ans que nous disposons de rapports d’information de nature à éclairer nos décisions.

    M. Patrick Hetzel

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    C’est vrai !

    M. Hadrien Clouet

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    Prévoir un an pour réaliser les simulations nécessaires, cela nous paraît d’autant plus suffisant que le régime de retraite des salariés est né dans des conditions bien pires : en 1946, il n’était pas possible de reconstituer les carrières et l’informatique n’existait pas. Nous sommes donc convaincus qu’il est possible d’avancer l’entrée en vigueur de la mesure. Nous nous sommes tous accordés, et c’est heureux, sur la reconnaissance d’un principe de dignité pour les travailleurs et les travailleuses agricoles non salariés. Dès lors, il nous semble que l’on ne peut pas se permettre de fixer un échéancier aussi lâche : prévoir une année entière avant l’entrée en vigueur, c’est se donner 364 jours de trop.
    Pour conclure, j’ai entendu dire qu’il était « difficilement possible » que cette mesure entre en application en 2024. Dans cette formule, il y a deux mots : « difficilement », mais aussi « possible »… (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Frédéric Cabrolier.

    M. Frédéric Cabrolier

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    Le groupe RN s’abstiendra sur l’amendement no 42 du rapporteur, qui tend notamment à repousser la date d’entrée en vigueur de la proposition de loi. Puisque mon amendement no 45 risque de tomber, je rappelle que nous sommes quant à nous favorables à une obligation de résultat plutôt qu’à une obligation de moyens.
    Je reviendrai sur trois points qui nous paraissent essentiels.
    Premièrement, comme l’a dit Mme Ménard, les agriculteurs sont les premiers écologistes : ce sont eux qui entretiennent les campagnes. Deuxièmement, ils sont les garants d’une alimentation saine et de la souveraineté alimentaire que nous appelons de nos vœux. Enfin, par cette proposition de loi, non seulement nous réparons une véritable injustice sociale, mais nous adressons un message de soutien moral à nos agriculteurs, qui en ont bien besoin.
    Nous nous abstiendrons sur l’amendement no 42, mais nous voterons bien entendu la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Valérie Rabault.

    Mme Valérie Rabault

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    Tout d’abord, lorsque nous parlons d’une pension équivalente à 85 % du Smic net, n’oublions pas d’en retrancher la contribution sociale généralisée (CSG), qui est prélevée après coup. C’est ce type d’éléments qui peuvent être ajoutés dans les décrets d’application : il faut donc y être très attentif si nous voulons que la mesure telle qu’elle est appliquée corresponde à celle qui a été adoptée par le Parlement.
    Par ailleurs, je profite de la présence de M. le ministre pour lui soumettre une question qui me tient à cœur. Les retraités agricoles ne reçoivent plus du tout de la MSA un état de leurs éléments de retraite sous forme papier. Or, celle-ci prélève notamment sur la pension le forfait dû sur les boîtes de médicaments, de sorte que cette pension est parfois amputée de 50 euros. Des agriculteurs âgés parfois de 85 ans ou de 90 ans et qui n’ont pas internet chez eux sont ainsi dans l’incapacité de savoir exactement quel est l’état de leur retraite et à quoi correspond le montant qui est versé sur leur compte. Il serait donc important qu’ils puissent recevoir s’ils le souhaitent, au moins une fois par trimestre, un état de leur retraite sous forme papier. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    (Les sous-amendements nos 49 et 52, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

    (L’amendement no 42, sous-amendé, est adopté.
    En conséquence, l’article 1er est ainsi rédigé et les amendements nos 45 et 23 tombent.)

    Article 2

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, inscrit sur l’article.

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Monsieur le ministre, je le dis solennellement, ce texte revêt une importance majeure pour nos agriculteurs, qui sont les derniers dont le montant de la retraite est calculé sur l’intégralité de leur carrière. C’est un non-sens total ! Aussi, je me permets d’insister sur la portée symbolique de notre vote et sur son importance ; j’espère que la proposition de loi sera adoptée à l’unanimité. Les agriculteurs nous regardent. En leur accordant cette mesure juste et équitable, nous reconnaîtrons leur travail qui, rappelons-le, permet de nourrir la planète.
    Cette proposition de loi tient compte d’enjeux financiers importants pour nos agriculteurs tout en contribuant à long terme au nécessaire renforcement de l’attractivité des métiers agricoles. Soyons donc unis pour l’adopter. Les agriculteurs comptent sur nous ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement de suppression no 53.

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Je précise, pour rassurer tout le monde, qu’il s’agit de supprimer l’article de gage.
    Madame Rabault, il est possible pour les assurés de recevoir un relevé sous forme papier : ils doivent le demander directement au conseiller de la MSA chargé de leur dossier.

    Mme Valérie Rabault

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    Merci.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Favorable, évidemment.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Gosselin.

    M. Philippe Gosselin

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    Avant de répondre – sans doute un peu tardivement – à M. Turquois, je veux remercier le ministre de lever le gage. Le groupe Les Républicains est évidemment sensible à cette approche positive du Gouvernement.
    M. Turquois a tendance à faire un pas en avant, un pas en arrière. Si certaines questions techniques se posent, la représentation nationale exprime ici sa volonté ; elle envoie un message. (M. Antoine Léaument applaudit.) Si nous devons prendre en compte les difficultés techniques, elles ne doivent pas nous conduire à renoncer.

    M. Patrick Hetzel

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    Très bien !

    M. Philippe Gosselin

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    Par ailleurs, même si vous avez retiré ce sous-amendement, proposer de reporter l’entrée en vigueur de la proposition de loi à 2030, c’est se moquer du monde ! Pourquoi ne pas attendre 2050 ou la génération suivante ?

    M. Éric Bothorel

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    Allons !

    M. Philippe Gosselin

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    Le message que nous adressons au monde agricole est un message de confiance et de soutien. Il est grand temps de refonder, à l’instar du lien armée-nation, le pacte entre la nation et le monde agricole, qui est chamboulé. Ce pacte est essentiel non seulement pour les agriculteurs, mais aussi pour notre souveraineté alimentaire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Antoine Léaument applaudit aussi.) Certes, monsieur Balanant, les agriculteurs font le paysage de nos campagnes, mais c’est l’assiette qui compte avant tout : ils nourrissent les hommes et les femmes, dans l’intérêt de l’humanité. (M. Antoine Léaument applaudit.) C’est aussi cela, la passion qui anime le monde agricole. C’est pourquoi, avec Julien Dive et les membres du groupe LR, nous nous efforçons de le défendre ce matin, à vos côtés et, je l’espère, de manière unanime ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR-NUPES. – M. Antoine Léaument applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Charlotte Parmentier-Lecocq.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq

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    Je veux saluer l’engagement du ministre et du Gouvernement dont témoigne la levée de gage. La majorité a en effet la volonté de soutenir nos agriculteurs et de consentir un effort afin que nos agriculteurs aient des retraites justes. Nous avions lancé une alerte en commission car nous ne voulions pas qu’on donne de faux espoirs aux agriculteurs. Je remercie le rapporteur d’avoir accompli un travail de réécriture approfondi afin de permettre au Gouvernement et à la majorité de soutenir ce texte qui est maintenant beaucoup plus viable qu’il ne l’était dans sa première version. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    (L’amendement no 53 est adopté. En conséquence, l’article 2 est supprimé.)

    Titre

    Mme la présidente

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    Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par les groupes Renaissance et Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 43.

    M. Julien Dive, rapporteur

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    Il s’agit simplement d’un amendement rédactionnel qui vise à faire coïncider le titre de cette proposition de loi avec le contenu qui est, après l’adoption de l’amendement de réécriture de l’article 1er, celui de la proposition de loi.
    Je rappelle que nous voulons que cette proposition de loi entre en vigueur non seulement pour les agriculteurs qui viennent de commencer leur activité, mais plus généralement pour ceux qui l’exercent déjà. Elle doit s’appliquer à l’ensemble des chefs d’exploitation agricole et de leurs conjoints collaborateurs. Comme on l’a dit lors de la discussion générale et au cours des débats en commission et en séance, nous voulons ainsi réparer une forme d’iniquité entre ce régime et d’autres, et ainsi réenchanter cette profession et redonner envie à ceux qui le souhaitent de devenir agriculteurs et d’exercer ce beau métier qui nous nourrit et qui garantira la souveraineté alimentaire de la France.
    L’objectif est aussi de préserver ce régime, mais il s’agit d’un autre débat que nous aurons lorsque le rapport sera rendu.
    Je tiens à remercier le président du groupe Les Républicains, Olivier Marleix, pour avoir été rapidement convaincu de la nécessité d’inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour de notre niche parlementaire. Mes remerciements vont également à M. le ministre pour avoir été sensible au travail mené sur la rédaction de l’amendement no 42, qui a été adopté, ainsi qu’aux députés qui sont intervenus, apportant chacun leur éclairage particulier et témoignant de leur attention pour l’enjeu des retraites agricoles. Je remercie également Antoine Papalia, l’administrateur de l’Assemblée nationale qui m’a accompagné tout au long de cet exercice. Il est important de rappeler que le travail parlementaire est aussi mené grâce à ces femmes et ces hommes de l’ombre qui nous accompagnent au quotidien.

    M. Patrick Hetzel

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    Très bien !

    M. Julien Dive, rapporteur

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    La proposition de loi que nous allons voter n’est pas un point d’arrivée, mais un point d’étape, car nous avons encore beaucoup à faire pour les retraites de nos agriculteurs. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem et HOR. – M. Thomas Ménagé applaudit également.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    L’amendement no 43 vise à donner à la proposition de loi un titre cohérent avec sa nouvelle rédaction. L’avis du Gouvernement est donc favorable.
    Je remercie également tous les députés pour la préparation de ce débat et pour leurs interventions, ainsi que M. le rapporteur pour la qualité de nos échanges, leur franchise et leur caractère constructif. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem, et sur quelques bancs du groupe LR.)

    M. Philippe Gosselin

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    C’est de bon augure !

    (L’amendement no 43 est adopté.)

    Explications de vote

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Isabelle Valentin.

    Mme Isabelle Valentin (LR)

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    Nous sommes très satisfaits des propos tenus par l’ensemble des groupes politiques dans cet hémicycle. C’est une avancée indéniable et cela marque une reconnaissance envers le monde agricole qui, comme cela a été souligné, en a vraiment besoin. Pas à pas, loi après loi, nous arriverons à un régime plus équitable et plus équilibré.
    Ne l’oublions pas, les agriculteurs jouent un rôle majeur dans notre pays. Ils assurent notre souveraineté alimentaire et font vivre l’économie de nos territoires. Il aura fallu une crise majeure pour que les Français se rendent compte de l’ultradépendance alimentaire de notre pays.
    Non, les agriculteurs ne sont pas des actifs de seconde zone, mais bien des passionnés qui exercent leur métier avec leur cœur et dont nous devons tous être très fiers. Nous devons être fiers de nos appellations d’origine protégée, de toutes nos productions agricoles, des produits de qualité que nous avons en France. Ce texte devrait être voté à l’unanimité. Merci pour les agriculteurs et pour le monde agricole. (Applaudissements et « Très bien ! » sur les bancs du groupe LR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois.

    M. Nicolas Turquois (Dem)

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    Le groupe Dem votera sans réserve la proposition de loi déposée par Julien Dive.

    M. Patrick Hetzel

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    Ah ! Enfin !

    M. Nicolas Turquois (Dem)

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    Certains ont vu dans mes propos un bémol,…

    M. Maxime Minot

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    Eh oui !

    M. Nicolas Turquois

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    …ce que je conteste absolument. Cher Philippe Gosselin, vous avez dit que ce texte avait une portée symbolique, mais nous, nous voulons qu’il ait une portée effective.

    M. Philippe Gosselin

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    Ce n’est pas sérieux !

    M. Nicolas Turquois

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    Il nous semblait donc important de souligner les difficultés auxquelles nous faisons face.
    M. Jean-Luc Bourgeaux l’a également rappelé : la constitution actuelle du système de retraites agricoles fait qu’il y aura des problèmes techniques importants. Quand bon nombre de nos concitoyens reprochent aux députés d’être déconnectés de la réalité, il est important de pointer aussi les difficultés auxquelles nous sommes confrontés.

    M. Philippe Gosselin

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    On ne va pas sans cesse s’abriter derrière des difficultés, sinon on ne fait jamais rien ! Quand on a une volonté politique, il faut l’affirmer !

    M. Nicolas Turquois

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    Merci à M. le rapporteur d’avoir déposé cette proposition de loi qui constitue une avancée sur ce sujet. Soyons modestes en ce qui concerne nos capacités à appliquer ces dispositions à très court terme. Toutefois, c’est un chemin sur lequel nous devons absolument nous engager.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hervé Saulignac.

    M. Hervé Saulignac (SOC)

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    À mon tour, je remercie M. le rapporteur et l’ensemble des collègues qui ont œuvré pour ce texte que nous voterons, bien entendu.
    À chaque fois que nous atténuons une injustice, nous faisons œuvre utile. Nos agriculteurs sont notre avenir, notre fierté, notre identité. J’ai d’ailleurs beaucoup de mal à dire « agriculteur », car chez moi, on ne dit pas « agriculteur », mais – et ce terme n’a rien de péjoratif dans ma bouche – « paysan ».
    L’attachement à nos agriculteurs ne doit pas être seulement un sentiment d’affection. On doit en donner des preuves car chacun sait que l’amour n’a de sens que par les preuves qu’on en donne et non simplement par les mots. Gardons-nous cependant de toute forme de triomphalisme. Les longues discussions sur les lois Chassaigne ont terriblement déçu bon nombre d’agriculteurs.

    M. Patrick Hetzel

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    Eh oui !

    M. Hervé Saulignac

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    Ce métier est noble. Le monde agricole nous attend aussi au sujet de bien d’autres défis. Nous devrons donc de nouveau débattre dans cet hémicycle pour répondre aux attentes de ceux qui exercent cette profession difficile – c’est une réalité, même si ce n’est pas le seul aspect de ce métier.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Paul Christophe.

    M. Paul Christophe (HOR)

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    Je salue à mon tour les travaux menés par M. le rapporteur qui a inscrit ce sujet si important à notre ordre du jour. Je remercie également M. le ministre qui a bien voulu accompagner cette proposition de loi en levant le gage. Comme l’a rappelé M. le rapporteur, il s’agit d’un point d’étape. Réfléchir sur les vingt-cinq meilleures années a du sens, mais on n’a pas encore complètement répondu aux attentes bien légitimes des agriculteurs et nous avons rendez-vous dans les mois qui viennent pour faire fructifier cette idée.
    Calculer la retraite sur les vingt-cinq meilleures années, c’est bien, mais encore faut-il que les revenus soient en adéquation avec les attentes et les mérites que nous avons tous unanimement reconnus aux agriculteurs. On a parlé d’Egalim 1 et d’Egalim 2, mais on voit bien que la question n’est pas résolue. Nous aurons donc le plaisir de nous retrouver pour travailler sur ces sujets. Remerciant encore le rapporteur, je me réjouis d’avance pour le vote à l’unanimité de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs des groupes LR et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie Pochon.

    Mme Marie Pochon (Écolo-NUPES)

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    Nous voterons sans surprise en faveur de cette avancée. En effet, les écarts de pension entre le régime des non-salariés agricoles et l’ensemble des régimes de retraite n’ont cessé de croître au fil des années. Sachant que près de la moitié de nos agriculteurs pourront faire valoir leur droit à la retraite dans dix ans, ce sujet de l’alignement des règles de calcul des pensions agricoles sur la base des vingt-cinq meilleures années est un sujet ancien qui a toujours été repoussé lors de l’examen des différentes réformes des retraites.
    Il est temps d’agir en faveur de l’égalité et c’est le cap que nous fixons. Les agriculteurs attendent une revalorisation de leur retraite et une juste reconnaissance de leur travail, ce qui permettra également d’ouvrir des perspectives favorables aux jeunes générations qui souhaitent s’installer. La nation se doit d’accorder aux agriculteurs retraités une juste valorisation d’une vie dédiée. C’est une question de justice sociale. Pour cette raison, nous voterons cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne (GDR-NUPES)

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    Je veux insister sur un point qui nous réunit tous : au sujet des retraites agricoles, nous faisons toujours un travail de coconstruction, ce qui a une importante portée symbolique.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    C’est vrai !

    M. André Chassaigne

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    Je veux remercier le groupe Les Républicains qui pose aujourd’hui une pierre supplémentaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Je veux aussi saluer l’action du rapporteur qui a accompli un travail fouillé qui apparaît dans son rapport, faisant preuve d’ouverture d’esprit pour prendre en considération les réticences qui se sont exprimées lors du travail en commission.

    M. Patrick Hetzel

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    Merci de le dire.

    M. André Chassaigne

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    Nous construisons ces marches ensemble année après année. (M. Maxime Minot et M. Philippe Gosselin applaudissent.) Je sais que, sur tous les bancs, de nombreux députés élus dans des circonscriptions rurales, sont très investis. Je salue ceux qui avaient apporté leur aide lors de la législature précédente, et en particulier les députés auvergnats du Cantal ou de la Haute-Loire, mais bien d’autres aussi.

    M. Erwan Balanant

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    Oui, nous aussi !

    M. André Chassaigne

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    Nous devons continuer, car il y a encore du chemin à parcourir, des évolutions à accomplir, des verrous à faire sauter. Nous n’y arriverons que dans la mesure où nous travaillons ensemble dans l’intérêt général pour le bien des agriculteurs retraités. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, RE, LFI-NUPES, LR, Dem, SOC, HOR, Écolo-NUPES et LIOT.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Morel-À-L’Huissier.

    M. Pierre Morel-À-L’Huissier (LIOT)

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    Le groupe LIOT est évidemment favorable à ce texte. Nous sommes très heureux de cette initiative parlementaire. Nous souhaitons simplement que le rapport et le décret soient conformes aux orientations que nous fixons pour nos agriculteurs. Merci de ce qu’on fait aujourd’hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Didier Le Gac.

    M. Didier Le Gac (RE)

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    À l’issue de ces débats en commission puis en séance publique, je voudrais remercier les députés du groupe Les Républicains d’avoir, dans le cadre de leur niche parlementaire, appelé l’attention de la représentation nationale sur les inégalités existant en matière de droit à la retraite touchant les agriculteurs. Je remercie le rapporteur d’avoir, en amendant ce texte, permis qu’il entre en vigueur dans des délais à la fois réalistes et raisonnables. Tout cela a permis d’aboutir à un texte consensuel que nous pouvons tous adopter. Je souhaite enfin remercier le Gouvernement, et en particulier Olivier Dussopt, ministre du plein emploi, pour s’être investi en faveur de ce texte et pour avoir travaillé à trouver des solutions pour rendre ce texte acceptable pour tous.
    Nous l’avons dit, nous sommes un grand pays agricole. Nous devons nous montrer reconnaissants à l’égard de ces femmes et de ces hommes qui s’engagent au quotidien et sans relâche pour une agriculture de qualité proposée à des prix abordables, bref, pour assurer la souveraineté alimentaire. C’est pourquoi le groupe Renaissance votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Serge Muller.

    M. Serge Muller (RN)

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    Considérés comme des actifs de seconde zone, les agriculteurs vivent depuis plus de vingt ans au rythme des promesses d’évolution formulées dans différents projets de réforme. Il est temps de réparer l’injustice dont souffrent les retraités agricoles et d’offrir des perspectives favorables aux jeunes agriculteurs qui s’installent. C’est d’autant plus important à l’heure où l’agriculture française vit un défi démographique sans précédent, puisque 50 % des actifs agricoles pourront faire valoir leurs droits à la retraite d’ici dix ans. Je voudrais également vous remercier pour cette coconstruction qui fait chaud au cœur. Je suis fier de faire partie de la commission des affaires sociales et de porter la voix des agriculteurs. Je pense notamment aux agriculteurs de mon territoire, la Dordogne, dont je suis très fier et qui est très chère à mon cœur. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bex.

    M. Christophe Bex (LFI-NUPES)

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    Belle unanimité autour de ce texte ! Comme on l’a dit, la paysannerie est au cœur de nos crises, mais aussi au cœur de nos vies. On mange trois fois par jour, l’alimentation fait partie de notre quotidien ; et derrière l’alimentation, il y a des hommes et des femmes, des paysans et des paysannes qui produisent chaque jour. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) On a dit beaucoup de choses, et je voudrais apporter une touche d’optimisme : s’il est vrai qu’il y a de moins en moins de paysans dans notre pays, contrairement à ce qu’on dit, de nombreux jeunes souhaitent s’installer et devenir paysans, afin de retrouver du sens dans leur vie et de produire des aliments de bonne qualité pour nourrir notre population. Le problème est tout simplement celui de la répartition de la terre : il faut lutter contre la concentration des territoires, contre le productivisme et les normes.
    Si la prise en compte des vingt-cinq années les plus avantageuses dans le calcul de la retraite des paysans est une nécessité, ce n’est qu’un premier pas : il faut valoriser leur métier et revaloriser leurs rémunérations. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Produire une alimentation saine et avoir une paysannerie de qualité nécessite des millions de bras (M. Éric Bothorel s’exclame) : le besoin est immense ! Je terminerai avec cette petite phrase : première, deuxième, troisième génération, nous sommes tous des enfants et petits-enfants de paysans ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

    Vote sur l’ensemble

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        238
            Nombre de suffrages exprimés                238
            Majorité absolue                        120
                    Pour l’adoption                238
                    Contre                0

    (La proposition de loi est adoptée à l’unanimité. – Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent longuement. – « Bravo Julien ! » sur les bancs du groupe LR.)

    2. Expulsion des étrangers en cas de menace grave pour l’ordre public

    Discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Olivier Marleix et plusieurs de ses collègues visant à assouplir les conditions d’expulsion des étrangers constituant une menace grave pour l’ordre public (nos 354, 510).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Mansour Kamardine, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

    M. Mansour Kamardine, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Déposée par notre collègue Olivier Marleix et plus de soixante cosignataires, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à élargir les catégories d’étrangers pouvant faire l’objet d’une expulsion pour menace grave à l’ordre public.
    Commençons par quelques mots au sujet du lien statistique qui existe aujourd’hui entre la présence d’étrangers sur notre sol et l’insécurité : j’en sais le caractère éruptif, mais je suis convaincu qu’il nous appartient de prendre la juste mesure du phénomène pour légiférer efficacement sur ce thème. Ainsi, dans le cadre de mon rapport, j’ai tenu à présenter quelques chiffres. Pour rappel, si la population étrangère représente 7,7 % de la population totale vivant en France, 27 % des mis en cause en matière d’atteinte à la personne humaine et aux biens, et 56 % de ceux impliqués dans des vols ou violences dans les transports en commun en 2021 – chiffre qui atteint 70 % en Île-de-France – sont des étrangers. C’est également le cas de 16 % des personnes condamnées et de 25 % des personnes détenues sur l’ensemble du territoire – ces chiffres s’élèvent à 37 % pour l’Île-de-France et 52 % pour Mayotte.
    La proposition de loi dont nous débattons ce matin vise donc à apporter une première réponse à cet état de fait : sans rien céder de la tradition d’accueil qui honore notre pays, elle tend à renforcer le dispositif d’expulsion pour menace grave à l’ordre public, en donnant davantage de marges de manœuvre à l’autorité administrative.
    Les mesures d’expulsion sont en effet entourées d’un certain nombre d’obligations procédurales qui reconnaissent à l’étranger des garanties substantielles en matière de transmission d’informations et de respect du principe du contradictoire avec l’autorité administrative. Les articles L. 631-2 et L. 631-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), que la proposition de loi suggère de faire évoluer, prévoient un système de protection pour certains étrangers : le niveau de menace pouvant déclencher leur expulsion doit être supérieur à celui de la « menace grave à l’ordre public ». Ainsi, pour les catégories d’étrangers mentionnées à l’article L. 631-2, la décision d’expulsion doit constituer une « nécessité impérieuse pour la sûreté de l’État ou la sécurité publique […] », et pour les catégories d’étrangers mentionnées à l’article L. 631-3, la décision d’expulsion ne peut être prise qu’en cas de « comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l’État, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes ».
    La proposition de loi dont nous débutons l’examen tend à mettre fin à l’ensemble de ces protections, sauf dans deux cas : en application de l’article L. 631-2, et sous certaines conditions, si l’étranger est père ou mère d’un enfant français mineur, résidant en France ; en application de l’article L. 631-3, si l’état de santé de l’étranger qui réside habituellement en France le justifie, ou s’il réside habituellement en France depuis qu’il a atteint au plus l’âge de 13 ans.
    Les régimes de protection prévus par ces deux articles obèrent de façon excessive les marges de manœuvre de l’autorité administrative. Cette analyse m’a été confirmée par les préfets et les directions centrales du ministère de l’intérieur entendus lors des auditions – je tiens d’ailleurs à saluer leur disponibilité. Si j’ai conscience que ce seul dispositif ne permettra pas de régler la totalité des difficultés en la matière, j’ai acquis la conviction, au terme de mes travaux, que ce texte permettrait de faire un pas en avant significatif, en déverrouillant le dispositif de l’expulsion pour menace grave à l’ordre public.
    Je sais les tensions et clivages qui nous traversent sur le thème de la proposition de loi et je forme le vœu que nous parvenions à avoir un débat raisonné et constructif.
    Mes chers collègues, ce texte propose de revenir à la législation de 2003 – ni plus, ni moins. En 2003, j’avais voté en faveur du renforcement de la protection accordée à des étrangers délinquants, en entravant leur expulsion : avec le recul, je le regrette sincèrement, car les faits et l’évolution de la situation montrent que cela a amplifié l’insécurité dont est victime la population – tous les chiffres le montrent !
    Pour ce qui me concerne, la question n’a rien d’idéologique : avec cette proposition de loi, je me borne, comme l’ensemble du groupe LR, à être pragmatique. Nous avons un problème de traitement des menaces graves à l’ordre public commises par des délinquants et des criminels – nous accordons à certains étrangers des protections qui entravent le respect d’un principe essentiel : le droit de vivre en sécurité et dans la sérénité ; nous entendons y remédier.
    À mes collègues de la droite, je veux dire que notre texte ne concerne pas l’immigration, mais bien la sécurité de l’ensemble des populations qui vivent dans notre beau pays. La question en débat n’est pas de savoir s’il faut agir pour ou contre l’immigration – nous aurons d’autres occasions de légiférer sur ce sujet –, mais bien de savoir comment améliorer la sécurité au quotidien des habitants, qu’ils soient Français ou ressortissants étrangers vivant régulièrement en France. Chaque chose en son temps ! Je vous propose donc de nous concentrer sur un sujet en particulier : améliorer nos capacités à écarter les étrangers constituant une menace grave.
    À mes collègues de la gauche, je veux dire que notre texte ne stigmatise pas les étrangers, non plus qu’il ne sous-estime leur rôle dans notre société et ne porte atteinte à leur dignité et à leur honneur : il concerne uniquement des délinquants et des criminels.

    MM. Patrick Hetzel et Philippe Gosselin

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    Très bien !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Je ne veux et ne peux imaginer qu’avec vos amendements, vous vous fassiez les protecteurs de criminels qui accablent les habitants de notre pays, dont je rappelle que 8 % sont des étrangers en situation régulière, l’immense majorité participant pleinement à notre société. Français et étrangers vivant en France – y compris en situation irrégulière –, nous avons tous droit à la sécurité !
    Aujourd’hui, notre législation protège de l’expulsion, en raison de ses liens familiaux, un criminel qui frapperait quotidiennement sa femme et exercerait une prédation sexuelle sur ses propres enfants ! Voilà ce que protègent les amendements de suppression déposés par des députés de la NUPES ! Aujourd’hui, dans un département comme Mayotte, la population, française comme étrangère, se terre pour échapper à la barbarie d’étrangers inexpulsables en raison des protections excessives que notre droit leur accorde. Ce serait forfaiture que de ne pas agir maintenant ! Les Français nous regardent, les habitants de la France nous regardent ; les Mahorais nous regardent.
    Pour ceux qui s’apprêteraient à voter les amendements de suppression, je rappelle que cela conduira à protéger des criminels au détriment des braves gens, Français comme étrangers. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Philippe Gosselin

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    Il a raison !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    À mes collègues des groupes Renaissance, Horizon et Démocrate, je veux rappeler un engagement pris par Emmanuel Macron lors de la campagne pour l’élection présidentielle de 2022. C’est écrit, noir sur blanc, dans le programme présidentiel : « Expulsion des étrangers qui troublent l’ordre public. » On ne peut être plus clair ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
    Je vous rappelle également l’engagement du Président de la République de « réformer en profondeur les règles, nos lois, pour simplifier les procédures d’expulsion ». Il y a encore cinq semaines, le 18 octobre, le ministre de l’intérieur affirmait lors de son audition devant la commission des lois : « Nous proposerons la suppression de l’interdiction de la double peine et de tous les empêchements d’expulsion. Nous estimons le nombre des personnes que nous pourrions expulser à 4 000 personnes par an, si nous n’avions pas dans notre droit ces règles visant l’arrivée avant 13 ans sur le territoire national ou concernant les personnes mariées à un Français ».

    M. Fabien Di Filippo

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    Intéressant ! Bon argument !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Là encore, on ne peut être plus clair !

    M. Patrick Hetzel

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    Exactement !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    C’est exactement l’objet de la proposition dont nous allons discuter. Je n’imagine pas un seul instant, chers collègues, que vous vous opposiez à la volonté du Président de la République et que vous entraviez les orientations du Gouvernement. Avec son texte, le groupe LR entend donc vous aider à tenir vos propres engagements : ne manquez pas de loyauté envers vos propres promesses en adoptant des amendements qui tendent à supprimer ou dénaturer le texte.
    Mes chers collègues, cette proposition de loi n’est pas un acte de défiance à l’égard des étrangers, mais simplement l’expression d’une volonté de donner à l’État et à son administration les moyens de mieux protéger les populations se trouvant en France. C’est la raison pour laquelle je veux inviter chacun des membres de la représentation nationale à effectuer une mission transpartisane à Mayotte – monsieur Mendes, c’est une main que je vous tends : vous pourrez y constater par vous-mêmes les affres et les malheurs que peut produire une violence barbare, concomitante à une protection statutaire accordée au nom d’un humanisme détourné.

    M. Philippe Gosselin

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    C’est un vrai problème.

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    À l’instar de ceux qui nous ont précédés sur tous ces bancs, j’invite le Gouvernement à s’associer à notre initiative. En dehors de toute posture ou manœuvre, nous vous proposons sereinement de conforter la sécurité publique en écartant du territoire national des délinquants et des criminels étrangers qui représentent une menace grave à l’ordre public. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Philippe Lottiaux applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.

    M. Aurélien Pradié

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    Attention dans les escaliers, Mme Cayeux est derrière vous !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

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    Cher Occitan, le sujet est sérieux !
    Vous savez que M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer, que j’ai l’honneur de représenter, est particulièrement investi dans l’application des mesures d’expulsion du territoire français, objet de la proposition de loi visant à assouplir les conditions d’expulsion des étrangers constituant une menace grave pour l’ordre public, déposée par le groupe Les Républicains, et que l’Assemblée nationale examine aujourd’hui.
    Sans aucune intention polémique, mais uniquement dans un souci de vérité et de responsabilité vis-à-vis de nos compatriotes, il convient de rappeler que s’il serait faux de réduire la délinquance aux seuls étrangers, leur part dans la délinquance enregistrée a progressé au cours des dernières années, en particulier dans les grandes villes. Une réalité que l’on constate également dans nos prisons : 25 % des détenus sont de nationalité étrangère, alors même qu’ils ne représentent que 7,7 % de la population résidant en France, tandis que 18 % sont des ressortissants de pays tiers, soit le double de leur représentation dans la population totale. Entre 2017 et 2022, cette part est passée de 28 % à 40 % pour les seuls faits de cambriolages élucidés par la police et la gendarmerie, et de 25 % à 35 % pour les vols violents sans arme.
    À Paris, la moitié des actes de délinquance sont le fait d’étrangers. Refuser de le voir, ce serait nier le réel.

    M. Fabien Di Filippo

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    Dans ce cas, il faut voter le texte !

    Mme Christine Arrighi

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    Ce que vous dites est honteux !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Le ministre de l’intérieur a fait de l’éloignement des étrangers délinquants une priorité : 700 étrangers radicalisés ont été expulsés du territoire français depuis 2017, et 3 500 étrangers constituant une menace pour l’ordre public ont fait l’objet d’un éloignement depuis 2020 ; 88 000 titres de séjour ont été retirés ou refusés pour des motifs d’ordre public, en application de la circulaire du 29 septembre 2020 du ministère de l’intérieur.
    En août et encore récemment, le 17 novembre dernier, le ministre de l’intérieur et des outre-mer a donné des instructions très claires aux préfets. Depuis le mois d’août, les étrangers constituant une menace pour l’ordre public représentent 90 % du public placé en rétention, le but étant de maximiser les chances de procéder à leur éloignement ; cela produit des résultats concrets. Les étrangers ayant fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) seront systématiquement inscrits au fichier des personnes recherchées, ce qui permettra aux policiers, aux gendarmes et aux douaniers de connaître sur-le-champ la situation administrative d’un étranger sous OQTF en cas de contrôle d’identité sur la voie publique ; ainsi, la mesure d’éloignement pourra être immédiatement exécutée.
    Depuis 2017, le Gouvernement a déjà fait beaucoup pour lutter contre l’immigration irrégulière. La loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, dite « asile et immigration », a notamment permis de porter le délai de la retenue pour vérification du droit au séjour de seize à vingt-quatre heures, et d’allonger la durée de placement en centre de rétention administrative jusqu’à quatre-vingt-dix jours. Cette politique a produit des résultats et entraîné une forte progression des éloignements entre 2017 et 2019, ce qui nous permet de faire mieux que nos voisins européens.

    M. Laurent Jacobelli

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    Ce n’est pas sérieux !

    M. Fabien Di Filippo

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    C’est un argument marketing !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    En 2021, nous avons ainsi procédé à 11 630 éloignements, contre 10 785 pour l’Allemagne et 3 230 pour l’Espagne. Depuis le début de l’année 2022, les éloignements sont en hausse de 20 %.
    Nous allons donner aux services de l’État les moyens d’être encore plus efficaces, afin d’accroître le nombre de reconduites. La loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi) introduit ainsi des moyens inédits pour l’extension du nombre de places en CRA – centre de rétention administrative : la discussion parlementaire a permis de fixer un objectif de 3 000 places à l’horizon 2027. Le ministre de l’intérieur a également annoncé la création de nouveaux locaux de rétention administrative, qui permettront à nos policiers et à nos gendarmes de procéder plus facilement à des éloignements sur l’ensemble du territoire.
    Messieurs les députés, votre proposition de loi prévoit d’assouplir les conditions d’expulsion des étrangers constituant une menace grave contre l’ordre public. Plus précisément, l’article unique du texte a pour objet de supprimer certaines protections existantes, qui empêchent dans certains cas bien définis l’expulsion d’un étranger. En l’état actuel du droit, plus la protection est importante, plus le comportement justifiant l’expulsion doit être grave.
    Si l’étranger est sous le coup d’une protection relative, l’expulsion ne peut être acceptée qu’au nom d’une nécessité impérieuse pour la sûreté de l’État ou pour la sécurité publique. D’autres catégories d’étrangers font l’objet d’une protection « quasi absolue » : dans ce cas, l’expulsion ne peut être justifiée que pour des motifs relatifs à l’atteinte aux intérêts fondamentaux de l’État, au terrorisme ou à la provocation à la haine, à la violence ou à la discrimination. C’est dans ce cadre qu’a été prise la décision contre l’imam Iquioussen, cet été, compte tenu des propos antisémites et contraires à l’égalité entre les femmes et les hommes qu’il a proférés à de nombreuses reprises.
    Les protections que vous proposez de supprimer concernent les étrangers mariés avec un conjoint français depuis plus de trois ans, les étrangers qui résident régulièrement en France depuis plus de dix ans et les titulaires d’une rente d’accident du travail ou d’invalidité de plus de 20 %. Il me semble nécessaire de rappeler ici que ces protections peuvent être levées en cas de condamnation à une peine d’emprisonnement supérieure à cinq ans.
    Ces protections n’ont aucune base constitutionnelle ou conventionnelle en soi ; elles sont la traduction par le législateur de solutions jurisprudentielles pouvant être modifiées par la loi. La décision du Conseil d’État dans l’affaire Iquioussen que je viens d’évoquer nous a notamment montré que le juge administratif procède désormais à cette analyse in concreto, en mettant en balance la défense de l’ordre public et la protection du droit à la vie privée et familiale.
    Que les choses soient claires, nous pensons qu’il est temps de revoir ce régime de protection. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LR.)

    M. Philippe Gosselin

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    Allons-y, c’est le moment !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Dans des cas trop nombreux, ce régime trop rigide ne permet pas au juge de se prononcer sur les expulsions d’étrangers définitivement condamnés pour des faits très graves, qui ne peuvent ainsi pas être mises à exécution.
    Nous pensons toutefois que cette question mérite d’être traitée dans sa globalité. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LR.)

    M. Philippe Gosselin

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    Allons-y, c’est la première étape ! Que le Gouvernement s’empare du sujet !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    C’est la raison pour laquelle nous organiserons dès la semaine prochaine un débat sur l’immigration au Parlement, à l’Assemblée nationale le 6 décembre puis au Sénat le 13 décembre.

    M. Éric Pauget

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    Tant mieux !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Ce débat s’inscrit dans la préparation d’un projet de loi relatif à l’asile et à l’immigration, qui, conformément à la demande du Président de la République, sera présenté au Conseil des ministres au tout début de l’année 2023.

    M. Éric Pauget

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    Attention au précipice, on va tomber !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Le ministre de l’intérieur et des outre-mer et le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion ont déjà commencé à consulter les groupes parlementaires pour préparer ce texte. Nous pensons que les dispositions que vous proposez de réformer méritent de faire partie de cette réflexion plus large, déjà bien entamée, qui s’inscrit dans les engagements pris par le président de la République pendant sa campagne,…

    M. Laurent Jacobelli

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    Quand est-ce qu’on arrête de discuter ?

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    …et nous comptons sur vous pour y participer de façon constructive.

    M. Olivier Marleix

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    C’est bien ce que nous faisons ce matin !

    M. Philippe Gosselin

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    Nous sommes prêts à vous suivre !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Vous l’avez compris, la question que vous soulevez aujourd’hui est au cœur des préoccupations du Gouvernement, comme il l’est pour nos concitoyens. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, seule madame la secrétaire d’État a la parole.

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    La maîtrise des flux migratoires et la protection de l’ordre public sont autant d’enjeux fondamentaux pour notre avenir, pour l’avenir de notre pays. Nous continuerons à agir en ce sens, en y employant des moyens à la hauteur des attentes légitimes des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    Dans la discussion générale, la parole est à M. Éric Pauget.

    M. Éric Pauget

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    « L’obligation de [quitter le territoire] est aujourd’hui effectivement théorique, au sens où nous avons encore beaucoup de difficultés sur le plan juridique […] avant la mise en place du retour effectif. »

    M. Philippe Gosselin

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    C’est peu de le dire !

    M. Éric Pauget

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    C’est par ces mots alarmants que le directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration dressait la semaine dernière le terrible bilan de notre politique d’expulsion des étrangers en situation irrégulière.
    Osons le dire clairement : oui, notre pays est dépassé par les défis migratoires. Pire encore, il ne respecte même plus son propre droit, paralysé par l’ajout constant de barrières normatives aux expulsions, l’empêchant au passage de faire appliquer ses propres décisions de justice.

    M. Laurent Jacobelli

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    Oui, voilà !

    M. Éric Pauget

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    Imbroglio juridictionnel, délais dépassés, manque de magistrats, décisions de libération forcées, fugues et désorganisation de l’administration : la crise des migrants de l’Ocean Viking a révélé toute l’impuissance du Gouvernement à gérer la crise migratoire. Où sont les 44 mineurs isolés ?

    M. Philippe Gosselin

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    Disparus !

    M. Éric Pauget

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    Où sont les 66 autres personnes qui ont reçu l’autorisation d’entrer sur le territoire pour demander l’asile ?

    M. Philippe Gosselin

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    Disparus !

    M. Éric Pauget

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    Et surtout, où sont passés les 123 clandestins qui s’étaient vus refuser l’entrée sur le territoire ? Voilà comment un fiasco migratoire a permis de libérer une centaine de personnes qui devaient pourtant faire l’objet prochainement d’une obligation de quitter le territoire français.
    Si l’efficacité de ces mesures pourrait nous amener à nous interroger, leur faible taux d’exécution doit nous alerter car la meilleure mesure n’est pas celle qui est prononcée, mais plutôt celle que l’on exécute. Le respect de cette règle simple doit redevenir l’un des principes cardinaux qui guideront notre politique migratoire, car il y va de sa réussite, de notre sécurité et, surtout, de la crédibilité de la France.

    M. Philippe Gosselin

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    Eh oui !

    M. Éric Pauget

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    Or les derniers chiffres du ministère de l’intérieur sont alarmants. Sur l’année 2021, 5,6 % seulement des 120 000 OQTF prononcées par la France auraient été exécutées. C’est dix fois moins que l’Allemagne, qui a expulsé 53 % des personnes ayant reçu une obligation de quitter son territoire.

    Mme Christine Arrighi

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    Mais elle a accueilli 1 million de réfugiés !

    M. Éric Pauget

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    Il y a un peu plus d’un mois, nous alertions la représentation nationale sur les dysfonctionnements de notre justice, suite au meurtre dramatique de la jeune Lola, tuée par une clandestine qui faisait pourtant l’objet d’une OQTF. Ce drame ne se serait jamais produit si la décision d’expulsion avait été exécutée. Quelques jours plus tard, une femme était violée à l’hôpital Cochin par un clandestin sous le coup de trois OQTF. La semaine dernière, en commission, je vous faisais part de l’agression d’un étudiant maralpin de 18 ans, tailladé au visage – pour un collier – par un étranger qui devait lui aussi quitter la France depuis le mois d’août.

    Mme Christine Arrighi

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    Vous devriez rejoindre le Rassemblement national ! (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Ce sont des discours du Rassemblement national !

    M. Philippe Gosselin

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    Ce n’est pas nécessaire pour défendre la France ! On n’est pas chez les Bisounours !

    Mme Naïma Moutchou

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    Chers collègues, pas d’interpellations ; seul l’orateur a la parole !

    M. Éric Pauget

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    Ce week-end, enfin, c’est un homme de 74 ans qui a perdu la vie, poignardé mortellement par un étranger visé par une obligation de quitter le territoire français. Là encore, si la décision de justice avait été exécutée, cela ne serait pas arrivé. Faut-il encore évoquer Laura et Mauranne, assassinées sur le parvis de la gare Saint-Charles par un terroriste étranger qui faisait lui aussi l’objet d’une mesure d’expulsion du territoire, ou du prêtre Olivier Maire, tué en Vendée par un Rwandais visé par trois arrêtés de reconduite à la frontière ?

    Mme Christine Arrighi

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    Ah, mais ce n’est pas possible !

    Mme Andrée Taurinya

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    Mais c’est abject !

    M. Maxime Minot

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    C’est vous qui êtes abjects !

    M. Philippe Gosselin

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    Ce n’est pas une vue de l’esprit, madame ! La réalité est terrible et cruelle ; ouvrez les yeux, collègues de gauche !

    M. Franck Allisio

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    D’extrême gauche !

    M. Éric Pauget

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    Nous le savons bien, tous seraient encore là si ces expulsions avaient été exécutées : la non-exécution des OQTF est un scandale qui tue. Mais combien de Français devront encore perdre la vie avant que nous réagissions ?
    À l’évidence, l’immigration incontrôlée représente un véritable défi pour le bon fonctionnement de nos tribunaux, où plus de 40 % des affaires enregistrées concernent le contentieux des étrangers. De plus, 40 % des personnes inscrites au sein du fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions terroristes sont de nationalité étrangère, et pas moins de 779 291 personnes faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire seraient toujours présentes en France. Quand allons-nous reprendre le contrôle de cette bombe à retardement ?
    Trop de catégories de personnes font encore exception aux mesures d’expulsion du territoire national. C’est pourquoi nous devons faire évoluer notre législation en ce qui concerne les étrangers protégés, comme l’Allemagne l’a fait, afin de faciliter l’expulsion des criminels de nationalité étrangère.

    M. Philippe Gosselin

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    Eh oui !

    M. Éric Pauget

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    En effet, malgré les gages de fermeté que le Président de la République tente de donner pour essayer de masquer l’échec de sa politique migratoire, près de huit Français sur dix estiment que le Gouvernement échoue à maîtriser l’immigration, d’après un sondage dévoilé la semaine dernière par l’institut CSA.
    Chers collègues, si la France est une chance, elle doit aussi se mériter. (MM. Éric Ciotti et Philippe Gosselin applaudissent.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Très bien !

    M. Éric Pauget

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    Vous l’aurez compris, ce texte n’est pas un réquisitoire à charge contre les étrangers (« Oh, non, évidemment ! » sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES),…

    M. Hadrien Clouet

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    Bien sûr que c’est une charge contre les étrangers !

    M. Éric Pauget

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    …mais un mémoire en défense des Français, afin de les protéger. Il ne remet pas en cause les fondements de notre pays, qui est historiquement une terre d’accueil, mais il vous invite à lever les protections qui s’appliquent automatiquement aux étrangers représentant une menace grave à l’ordre public.

    M. Philippe Gosselin

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    C’est bien le sujet !

    M. Éric Pauget

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    Il faut de la lucidité et du courage ; il faut raison garder. C’est pourquoi la présente proposition de loi vise à empêcher qu’un étranger puisse demeurer sur notre territoire s’il agresse, s’il tue ou s’il fait l’objet d’une décision d’éloignement,…

    M. Pierre Cordier

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    Bien sûr !

    M. Éric Pauget

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    …y compris s’il réside régulièrement sur le territoire national depuis plusieurs années ou encore s’il est marié à une personne de nationalité française.
    Au rythme actuel des expulsions, il nous faudra 200 ans pour renvoyer tous les clandestins faisant l’objet d’une OQTF dans leur pays d’origine. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.)

    M. Hadrien Clouet

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    Et combien ça coûte ? Ça coûte des milliards !

    M. Éric Pauget

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    C’est pourquoi nous vous invitons à voter ce texte courageux… (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    Mme Christine Arrighi

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    Sûrement pas !

    M. Éric Pauget

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    …défendu par les Républicains et notre collègue Mansour Kamardine,…

    M. Fabien Di Filippo

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    Bravo, monsieur Kamardine ! Voilà un homme courageux !

    M. Philippe Gosselin

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    Je peux vous dire qu’à Mayotte, ce n’est pas drôle tous les jours…

    M. Éric Pauget

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    …qui vous propose de renforcer les dispositions d’éloignement des étrangers, dès lors qu’ils pourraient représenter une menace grave pour notre pays et pour nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.)

    M. Andy Kerbrat

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    Vous voulez juste pourrir la vie des gens !

    Mme la présidente

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    Je vous demanderai, chers collègues, de bien vouloir vous écouter les uns les autres ; à la fin, chaque groupe aura pu exprimer sa position.
    La parole est à Mme Mathilde Desjonquères.

    Mme Mathilde Desjonquères

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    Les questions migratoires suscitent beaucoup d’interrogations quant à l’équilibre qu’il convient de trouver entre la construction de nouvelles solidarités et la préservation des valeurs universelles que nous chérissons. Comment faire respecter les droits de l’homme, en particulier celui de circuler librement et celui tendant à respecter la vie privée et familiale, tout en satisfaisant au droit – tout aussi légitime – des peuples à disposer d’eux-mêmes, qui suppose que chacun d’entre eux puisse décider souverainement des conditions d’entrée ou de séjour sur son sol ?
    En l’état, le texte présenté ne répond pas, selon nous, à cette exigence d’équilibre, tant sur le fond que sur la forme.

    M. Laurent Jacobelli

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    Ben voyons !

    Mme Mathilde Desjonquères

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    Sur la forme, la politique d’asile et d’immigration de la France est un sujet beaucoup trop important pour être abordé sans le recul nécessaire ou en réaction à des événements d’actualité.
    C’est pourquoi l’analyse effectuée et les discussions futures doivent se faire en rang organisé.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Il est urgent de ne rien faire, c’est bien cela ?

    Mme Mathilde Desjonquères

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    Le débat qui s’ouvrira le 6 décembre prochain le permettra, et dans un climat que nous espérons digne et apaisé.
    À cette occasion, je souhaite rappeler tout ce qui a été fait grâce à la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie. Ce texte a permis des avancées considérables pour accélérer le traitement des demandes d’asile, rééquilibrer la prise en charge des demandeurs d’asile sur tout le territoire, ou encore doter l’administration de nouveaux instruments en vue d’une meilleure exécution des mesures d’éloignement prononcées par les préfets. Je veux ici saluer tout le travail qui avait été mené par Marielle de Sarnez dans le cadre de ce projet de loi, lorsqu’elle était présidente de la commission des affaires étrangères.

    M. Pierre Cordier

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    Très grande présidente !

    Mme Mathilde Desjonquères

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    Plus de quatre ans après l’adoption de cette loi, il apparaît nécessaire de lancer un acte II de la politique d’immigration de la France. Si la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui participe aux réflexions menées, elle nous semble trop précoce et disproportionnée. Les débats en commission des lois n’ont pas suffi à nous convaincre de la pertinence du dispositif.
    Cette proposition de loi vise à lever certaines protections législatives contre l’éloignement pour motif d’ordre public, et plus précisément à supprimer les protections contre les décisions d’expulsion des étrangers mariés avec un conjoint français depuis plus de trois ans, des étrangers qui résident régulièrement en France depuis plus de dix ans, et des titulaires d’une rente d’accident du travail ou d’invalidité de plus de 20 %. Cette proposition ne remet toutefois pas en cause la protection des mineurs, ni celle des étrangers arrivés en France avant l’âge de 13 ans.
    Certes, lever les protections contre l’éloignement pour motif d’ordre public est l’un des objectifs de la majorité.

    M. Laurent Jacobelli

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    Ah bon ?

    Mme Mathilde Desjonquères

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    Cependant, notre politique doit être efficiente, pertinente et proportionnée. En l’état, nos réserves demeurent. D’abord, la suppression de protections pour certaines catégories de personnes semble présenter des risques juridiques tenant à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), lequel interdit d’expulser un étranger quand cette mesure a pour effet de porter une atteinte excessive au respect de la vie privée et familiale.
    Sur ce point, en émettant en commission des avis de sagesse sur des amendements proposant de durcir le texte, vous laissez à penser que votre texte ne serait pas suffisamment proportionné et respectueux des textes européens.
    Ensuite, votre proposition de loi semble conduire à de possibles difficultés procédurales. En effet, les suppressions envisagées impliqueraient que ces personnes soient, d’une part, difficilement expulsables pour les raisons précédemment évoquées et, d’autre part, ne pourraient pas bénéficier d’un titre de séjour compte tenu de leur délinquance.
    En outre, votre texte entend également supprimer la protection concernant les étrangers titulaires d’une rente d’accident du travail. Cette disposition va à l’encontre de l’esprit du prochain projet de loi que nous aurons à examiner, qui prévoit la création d’un titre de séjour pour les métiers en tension. Dans ces métiers, les accidents du travail peuvent survenir, et la mesure que vous proposez constituerait une double peine pour les titulaires de ce titre de séjour.

    M. Laurent Jacobelli

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    Un terroriste peut rester s’il est cuisinier ?

    Mme Mathilde Desjonquères

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    Nous sommes d’autant plus réservés à l’égard de cette suppression qu’il ne nous semble pas opérant d’éloigner des personnes en situation de vulnérabilité. En tout état de cause, le texte proposé ne simplifierait pas le contentieux de l’éloignement, bien au contraire : il le complexifierait et jetterait la suspicion sur des situations de vie qui sont bien plus compliquées que celles décrites ici.
    En somme, une réflexion globale et un travail législatif de fond doivent être menés loin de la précipitation et des polémiques, et nous y participerons.

    M. Fabien Di Filippo

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    Des polémiques !

    Mme Mathilde Desjonquères

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    Pour toutes ces raisons, les députés du groupe Démocrate ne voteront ni pour ce texte ni pour tous les amendements qui s’y grefferont opportunément. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Quelle honte !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hervé Saulignac.

    M. Hervé Saulignac

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    À chaque fait divers sordide arrive une proposition de loi, qui promet de châtier l’étranger délinquant ou criminel et même de l’éloigner avant qu’il ne passe à l’acte.
    Comment ne pas rappeler ici que depuis 1980, nous avons examiné vingt-huit lois sur l’immigration et des dizaines de circulaires des ministres successifs de l’intérieur, prétendant toujours accroître des mesures de répression. Pour quel résultat ?
    Les procédures d’éloignement, d’expulsion et de contrôle se sont multipliées, au point que les experts en droit des étrangers parlent désormais de « système industriel ». Y a-t-il quelqu’un ici pour croire sincèrement que ce nouveau texte réglerait le problème qu’il prétend soulever : éloigner ces étrangers comme s’ils étaient l’essentiel de la violence dans ce pays ?

    M. Maxime Minot

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    Eh bien, oui !

    M. Hervé Saulignac

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    À cet égard, j’indique ici que selon l’Insee, 82 % des personnes mises en cause par la police et la gendarmerie se sont déclarées françaises. (M. Laurent Jacobelli s’exclame.)
    Le groupe LR n’est évidemment pas le seul à surfer sur ces sujets. Ainsi, au printemps prochain, nous aurons à examiner un nouveau texte sur l’immigration, le vingt-neuvième en quarante ans. Il a déjà fait l’objet de plusieurs communications, occasions pour le ministre de l’intérieur de se réjouir qu’à « la demande du Président de la République, depuis deux ans, 3 000 étrangers délinquants ont été expulsés ». Cette déclaration prouve au moins que des dispositions existent et qu’elles sont appliquées.

    M. Fabien Di Filippo

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    Vous avez vraiment des œillères !

    M. Hervé Saulignac

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    Le ministre de l’intérieur indique d’ailleurs qu’il veut aller plus loin et procéder à des changements législatifs concernant les procédures d’expulsion. « Quand un policier va interpeller un étranger en situation irrégulière, il pourra le mettre en centre de rétention administrative pendant trois mois pour trouver le moyen de l’expulser dans son pays », annonce-t-il. Vous le voyez, chers collègues du groupe LR, si d’aventure votre proposition de loi n’était pas adoptée, vous aurez tout loisir d’y revenir par des amendements au projet de loi sur l’asile et l’immigration, dans quelques semaines.
    En attendant, la proposition de loi que vous nous soumettez reprend donc une marotte bien connue, s’agissant de l’expulsion de certains étrangers, pas aussi facilement expulsables que vous le souhaiteriez. Ce qui est quand même assez surprenant, cette fois-ci, c’est que les députés Les Républicains proposent de revenir sur un aménagement législatif qu’avait engagé un ministre de l’intérieur que je croyais cher à leur cœur : Nicolas Sarkozy. (Mme Christine Arrighi et M. Inaki Echaniz applaudissent.) Les insuffisances de la double peine que vous dénoncez sont en effet issues de la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, dite loi Sarkozy.
    Dans l’exposé des motifs de cette proposition de loi, vous amalgamez allègrement les mesures d’expulsion et les mesures d’éloignement, qui ne sont pourtant pas de même nature. Vous passez également sous silence l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. À cet égard, j’en profite pour rappeler que la France a été condamnée à plusieurs reprises au titre de cet article, pour des mesures d’expulsion, la Cour relevant des atteintes disproportionnées par rapport au but légitime visé. Les juges font donc leur travail, parfois avec zèle, puisque la loi rend possible des expulsions si un juge constate la nécessité impérieuse pour la sûreté de l’État ou la sécurité publique.
    Sous prétexte de faits divers tragiques, qui vous permettent d’établir un lien entre immigration et insécurité, vous affirmez qu’il faut aller plus loin et vous laissez croire qu’un assouplissement des conditions d’expulsion améliorerait considérablement l’ordre public. C’est évidemment faux. Au fond, ce qui vous pose problème, c’est le fait que ce soit au juge de décider si, oui ou non, une personne étrangère représente une menace pour notre société et si son expulsion constitue une réponse proportionnée.

    M. Yoann Gillet

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    C’est aussi aux Français de le décider !

    M. Hervé Saulignac

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    Vous avez besoin, dans un contexte propre à votre famille politique et que personne n’ignore ici, d’envoyer un message, quitte à vous asseoir sur quelques principes fondamentaux du droit. Vous n’avez pas hésité non plus à instrumentaliser des chiffres auxquels on peut faire dire beaucoup de choses, s’agissant notamment du taux de condamnation des personnes étrangères.
    Or la Cimade documente avec rigueur les ressorts de la surreprésentation des personnes étrangères parmi celles condamnées ou incarcérées. Elle s’explique par plusieurs facteurs, tels que les traitements différenciés dont les étrangers font l’objet avec des taux d’incarcération largement supérieurs à ceux des délinquants de nationalité française pour des délits identiques…

    Mme Christine Arrighi

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    Eh oui !

    M. Hervé Saulignac

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    …ou bien encore par l’existence d’infractions qui ne peuvent être commises que par des personnes étrangères, comme le refus de rendez-vous au consulat ou de monter dans un avion.

    M. Andy Kerbrat

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    Mais oui ! Leurs chiffres sont fallacieux !

    M. Laurent Jacobelli

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    Mais quelle honte de dire cela ! C’est vraiment la logique de l’excuse !

    Mme Anne-Laure Babault

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    Allez voir à Barbès !

    M. Hervé Saulignac

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    Ainsi, nous croyons qu’un texte, qui crée de toutes pièces un sujet fallacieux pour pouvoir se justifier, n’a aucune chance de créer de la justice ou du progrès. Dès lors, il n’a aucune chance de recevoir notre soutien. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback.

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    La proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui vise à supprimer la quasi-totalité des protections dont bénéficient les étrangers contre l’expulsion.
    Or notre droit constitutionnel et nos engagements européens recherchent un équilibre subtil mais fondamental : préserver le droit originel des États à contrôler leurs frontières et à maintenir l’ordre public sur leur territoire, tout en assurant à chacune et chacun le droit au respect de sa vie privée et familiale.
    Ainsi, un étranger qui résiderait régulièrement en France depuis plus de dix ans, et qui serait parent d’un enfant français mineur résidant sur le territoire, ne pourrait faire l’objet d’une décision d’expulsion. Mais, fort heureusement, ce ne sera pas le cas si cet individu contrevient aux valeurs essentielles de notre République ou aux intérêts fondamentaux de l’État. Notre arsenal juridique est perfectible certes, mais pas hors-sol.
    Ces protections ne s’appliquent pas, en effet, si l’expulsion constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l’État ou la sécurité publique. Rappelons que ce dispositif cohabite avec celui applicable en cas de condamnation pénale d’un étranger. Les juges peuvent prononcer des peines complémentaires d’expulsion, lesquelles doivent être spécialement motivées au regard de la gravité de l’infraction et de la situation personnelle et familiale de l’étranger.
    Nous retrouvons ici le principe de proportionnalité qui caractérise l’équilibre de notre droit. La question de l’expulsion est donc cruciale pour aujourd’hui et pour demain, pour la perception de notre État de droit dans l’opinion publique.
    Le groupe Horizons et apparentés défendra toujours la fermeté. La France ne doit pas protéger les étrangers qui contreviennent à nos valeurs, qui perturbent l’ordre public, qui menacent notre sécurité. En matière d’immigration, au vu des bouleversements géopolitiques, climatiques et sociaux, il faut se dire que de très grosses difficultés sont à venir. Nous serons donc au rendez-vous des travaux sur le projet de loi relatif à l’asile et l’immigration, préparé par le Gouvernement qui, nous n’en doutons pas, cherchera un point d’équilibre entre humanité et fermeté.
    Cette fermeté ne tient pas seulement aux possibilités ou contraintes que contient notre droit. Elle tient aussi et surtout à l’exécution réelle des obligations de quitter le territoire qui sont délivrées. Monsieur le rapporteur, nous partageons deux de vos constats : notre droit est perfectible, et peut être amélioré pour s’assurer de l’effectivité et de la fermeté de notre politique d’expulsion ; la situation de Mayotte nécessite une attention et un traitement sur mesure parce qu’elle est particulière.
    Cependant, la fermeté ne saurait être dissociée de la rigueur juridique et du respect de nos engagements constitutionnels et européens. Rappelons que la législation relative à l’expulsion des étrangers trouve son point d’équilibre entre l’absolue nécessité de maintenir l’ordre public sur le territoire et le droit à la vie privée et familiale de chacune et de chacun.
    Ce que vous nous proposez aujourd’hui vise purement et simplement à supprimer l’application de toutes ces protections sur l’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin. La protection ne s’appliquerait plus qu’à deux profils d’étranger : celui qui est père ou mère d’un enfant français mineur résidant en France, et qui contribue effectivement à l’entretien et à l’éducation de cet enfant ; celui qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis qu’il a atteint au plus l’âge de 13 ans.
    Oui, ces dispositions doivent être adaptées aux enjeux d’aujourd’hui et de demain, pour s’assurer que toute personne qui enfreint les règles élémentaires fondant notre contrat social puisse être facilement expulsée. Il est certes urgent d’agir – vous avez d’ailleurs rappelé les engagements pris dans ce domaine par le Président de la République. Mais il est aussi absolument nécessaire de construire un projet cohérent qui respecte nos valeurs et nos engagements.
    Or, en l’état, votre proposition de loi nous semble malheureusement contraire à ces engagements qui, je le rappelle, découlent tant des traités européens que de notre Constitution. Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Horizons et apparentés votera contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RE et Écolo-NUPES. – M. Andy Kerbrat applaudit également.)

    M. Maxime Minot

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    Oh, c’est dommage !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Aurélien Taché.

    M. Aurélien Taché

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    Une fois encore, nous avons à étudier une proposition de loi qui s’inscrit dans la logique d’acharnement et de restrictions à l’égard des immigrés. Eh oui, chers collègues, depuis le début des années 1980, comme l’a rappelé M. Saulignac, ce ne sont pas moins de vingt-neuf lois qui ont été consacrées à ce sujet sans qu’aucun problème n’ait été réglé.
    Et que dire de la portée politique de votre loi, tant celle-ci est caricaturale et montre à quel point votre formation politique, qui était un parti de gouvernement, n’est plus que l’antichambre du Rassemblement national ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Christine Arrighi

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    Eh oui !

    M. Aurélien Taché

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    Voilà le groupe Les Républicains pris au piège entre M. Darmanin, et son projet de loi, qu’il n’arrive pas à inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, et l’extrême droite, qui a fait de la haine des étrangers son fonds de commerce depuis tant d’années !
    Je note d’ailleurs que vos amis du Rassemblement national proposent une modification du titre de votre texte pour en faire tout simplement une « proposition de loi visant à assouplir les conditions d’expulsion des étrangers ». Cet aveu marquant montre, si c’était encore nécessaire, à quel point les digues entre l’extrême droite et votre parti ont sauté.
    Nous comprenons évidemment l’objectif de votre proposition de loi : vous cherchez tant bien que mal à faire un lien entre insécurité et immigration dans notre pays. Pourtant, les faits sont têtus : si les étrangers représentent environ 7 % des habitants et 16 % des personnes condamnées, vous oubliez de dire que 90 % de ces condamnations sont motivées par des faux en écriture ou du travail dissimulé, par exemple, c’est-à-dire par des infractions liées à leur statut et à la clandestinité que vous essayez sciemment d’organiser.

    M. Fabien Di Filippo

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    En 2017, M. Taché était encore socialiste !

    M. Aurélien Taché

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    Pour en revenir plus précisément à votre proposition de loi, vous prévoyez de supprimer plusieurs exceptions prévues par le Ceseda, qui protègent certaines catégories de personnes d’une expulsion administrative : les étrangers mariés depuis au moins trois ans à un conjoint français, les étrangers résidant régulièrement en France depuis vingt ans, ou encore les étrangers arrivés en France avant l’âge de 13 ans. Je rappelle que des dérogations existent déjà : si une personne est condamnée à une peine d’emprisonnement ferme d’au moins cinq ans, elle peut être expulsée. Je rappelle en outre que ces protections ne s’appliquent pas aux étrangers dont le comportement peut être qualifié de terroriste ou constitue des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée. Il est donc évident que votre loi est un énième texte de circonstance, destiné à satisfaire votre électorat le plus radicalisé.

    M. Maxime Minot

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    Oh là là !

    M. Aurélien Taché

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    Cessez de vouloir faire du chiffre pour rassurer à tout prix l’extrême droite et calmer vos paniques morales. Prétendre expulser des étrangers en situation régulière présents depuis plus de vingt ans sur notre territoire reviendrait à remettre totalement en cause les droits humains sur lesquels la démocratie française est fondée.

    M. Maxime Minot

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    Ben voyons !

    M. Laurent Jacobelli

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    La sécurité n’est-elle pas aussi un droit humain ?

    M. Aurélien Taché

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    Les personnes que vous visez doivent certes purger leur peine, mais que faites-vous de la vie qu’elles ont construite en France ? Êtes-vous à ce point inhumains que vous seriez prêts à briser les vies de familles entières, à couper des liens entre un parent et ses enfants, ou à traiter un enfant qui a grandi sur notre sol différemment d’un petit Français, tout cela pour continuer à nourrir le ferment de la division ?

    M. Laurent Jacobelli

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    Quelle honte !

    M. Aurélien Taché

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    La réponse, à lire votre texte, est malheureusement oui.
    Au-delà de l’absurdité de votre proposition, il faut souligner l’inefficacité des politiques restrictives en matière d’immigration. D’un point de vue économique, en effet, le signal envoyé par une politique française répressive à laquelle s’ajoute une communication xénophobe récurrente influence négativement les stratégies d’immigration des migrants les plus qualifiés. Ensuite, il serait temps d’admettre que l’immigration a toujours été un phénomène constitutif de nos sociétés.

    M. Emeric Salmon

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    Jamais !

    M. Aurélien Taché

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    Selon les chiffres disponibles pour l’année 2021, 7 millions d’immigrés vivent en France, soit 10 % de la population totale. Parmi eux, 2,5 millions, soit 36 %, ont acquis la nationalité française et sont donc français.
    La véritable solution réside dans une politique d’intégration.

    M. Emeric Salmon

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    D’assimilation !

    M. Aurélien Taché

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    J’ai rendu en 2018 un rapport contenant soixante-douze propositions pour une politique ambitieuse d’intégration des étrangers arrivant en France.

    M. Erwan Balanant

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    Très bon rapport !

    M. Aurélien Taché

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    Il faisait état d’un constat unanime parmi les acteurs de terrain : l’insertion linguistique, économique et sociale des personnes que nous accueillons est insuffisante. Il importe de défendre une conception républicaine de l’intégration, laquelle doit être prise en charge par l’État. Une politique d’intégration ambitieuse doit construire les étapes du parcours, prévoir un nombre d’heures de cours de français suffisant, offrir une orientation professionnelle et vers le logement adaptée et organiser des échanges avec les Français,…

    M. Laurent Jacobelli

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    Mais où vivez-vous ?

    M. Aurélien Taché

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    …afin que ceux qui arrivent puissent découvrir notre pays autrement qu’à travers son carcan administratif et sa police. Comment se fait-il qu’un demandeur d’asile ne puisse pas apprendre le français ou travailler dès son arrivée en France, et qu’il ne fréquente, pendant ses deux premières années de présence, que des travailleurs sociaux et des fonctionnaires des préfectures – préfectures dans lesquelles il doit sans cesse se rendre, en ayant le plus souvent passé la nuit sur le parvis pour avoir une chance que son cas soit étudié ?

    Un député du groupe RN

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    Pauvre petit malheureux !

    M. Aurélien Taché

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    Si nous nous donnions les moyens d’une vraie politique d’intégration, nous renforcerions notre grande et belle nation. C’est à la République de se donner les moyens de former des citoyens. C’est d’ailleurs bien ce que les étrangers souhaitent dans leur immense majorité. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES et GDR-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Soumya Bourouaha.

    Mme Soumya Bourouaha

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    Nous aurions pu évoquer aujourd’hui des questions qui intéressent vraiment nos concitoyennes et nos concitoyens,…

    M. Frédéric Boccaletti

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    Mais ça les intéresse !

    Mme Soumya Bourouaha

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    …comme la hausse des prix des produits alimentaires, l’augmentation des prix de l’énergie, les difficultés à se loger et les dépenses sur lesquelles ils doivent rogner chaque jour pour tenir leur budget. Nous aurions pu parler des coupures de courant qui se profilent, mais aussi d’environnement et d’écologie, alors que notre planète brûle et que 2022 est l’année la plus chaude jamais mesurée en France. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.)

    M. Pierre Cordier

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    Vivement la niche des communistes, alors ! (Sourires sur les bancs du groupe LR.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous auriez mieux fait de ne pas venir, si cela ne vous intéresse pas !

    Mme Soumya Bourouaha

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    Nous aurions pu parler du manque de soignants dans les hôpitaux, de la médecine pédiatrique qui s’effondre, des déserts médicaux qui s’étendent toujours davantage, ou de la colère des médecins et des biologistes, qui sont aujourd’hui en grève. Malheureusement, nous ne parlons pas de tout cela. Visiblement, dans cet hémicycle, nous n’avons pas tous la même appréciation des urgences de notre pays.

    Plusieurs députés des groupes RN et LR

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    Heureusement !

    Mme Frédérique Meunier

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    Nous ne sommes pas dans le même groupe !

    Mme Soumya Bourouaha

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    L’article unique de la proposition de loi que vous présentez vise à supprimer la protection aujourd’hui accordée par notre droit à certaines catégories de ressortissants étrangers menacés d’expulsion par les autorités françaises. Définie dans les articles L. 631-1 et suivants du Ceseda, l’expulsion est une mesure administrative visant à éloigner un ressortissant étranger du territoire. Elle est prononcée dans des situations liées à la protection de l’ordre public ou en cas d’atteinte à la sûreté de l’État. La décision d’expulsion est prise par le préfet ou par le ministre de l’intérieur. La personne de nationalité étrangère soumise à cette mesure peut être renvoyée de force dans son pays d’origine ou dans un autre pays. La procédure est donc exceptionnelle : elle est encadrée et doit être justifiée.
    La proposition de loi que nous examinons remet en cause les garanties prévues par ces articles. Nous l’affirmons clairement : c’est un texte d’affichage, inscrit dans l’agenda politique d’un parti qui tente de redéfinir sa ligne toujours plus à droite.

    M. Hervé Saulignac

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    Ça, c’est sûr !

    Mme Soumya Bourouaha

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    Cette proposition de loi n’a qu’une boussole : créer un trait d’union entre délinquance et immigration.

    M. Laurent Jacobelli et M. Emeric Salmon

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    Exactement !

    Mme Soumya Bourouaha

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    C’est malheureusement une ritournelle connue sur les bancs de cette majorité qui, de son côté, prépare le terrain pour le prochain projet de loi sur l’immigration prévu au printemps.

    M. Pierre Cordier

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    Allez sur le terrain !

    Mme Soumya Bourouaha

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    Cette ritournelle consiste à répéter ad nauseam que l’immigration représente un risque accru pour la sûreté nationale.

    M. Emeric Salmon

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    Eh bien, c’est vrai !

    Mme Soumya Bourouaha

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    La proposition de loi, en instrumentalisant les chiffres du ministère de la justice, cible précisément, dans son exposé des motifs, les étrangers venant d’Afrique, prétextant que les détenus et délinquants seraient en majorité issus de ce continent – une manière polie de stigmatiser les personnes présentant un taux de mélanine trop élevé. (M. Jean-François Coulomme applaudit. – Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.) Rappelons que ces chiffres, répétés à l’envi par toute la droite réactionnaire, ne précisent pas quel est le statut administratif des étrangers concernés – c’est-à-dire s’ils sont présents sur notre territoire en situation régulière ou irrégulière –, ni s’ils sont en détention provisoire, c’est-à-dire présumés innocents et en attente de jugement.
    Vous soulignez que le droit applicable en matière d’expulsion des étrangers pour un motif d’ordre public se caractérise par sa grande complexité, tant sur le fond que s’agissant de la procédure contentieuse d’examen des recours. Nous partageons pleinement ce constat : vingt et une lois ont été votées depuis 1990, complexifiant toujours davantage le droit des étrangers, sans que des bilans précis et détaillés n’aient permis d’évaluer l’efficacité des mesures adoptées.

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous ne défendez donc jamais les Français ?

    Mme Soumya Bourouaha

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    Avec cette proposition de loi, et sans avoir dressé le bilan des dispositifs existants, vous prétendez complexifier encore le mille-feuilles des lois qui se superposent. L’arsenal législatif actuel, en l’occurrence les articles L. 631-1 et suivants du Ceseda, permet déjà à l’autorité administrative d’expulser les délinquants étrangers. Ce texte est donc inutile, car les catégories dites protégées ne sont pas totalement à l’abri d’une expulsion du territoire : la mesure reste possible et elle est proportionnée à la menace que la personne étrangère représente. La protection est déjà largement contournée par l’autorité administrative en cas de besoin, par exemple au motif d’une atteinte à la sécurité publique.
    Pour toutes ces raisons, le groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES votera résolument contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Étonnant !

    M. Frédéric Boccaletti

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    Très surprenant, comme décision !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

    M. Jean-Louis Bricout

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    De cette proposition de loi se dégage un parfum électoraliste : le groupe Les Républicains prépare son congrès. Dans ce contexte, le mot-clé est « expulser ».

    M. Maxime Minot

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    La bonne blague !

    M. Pierre Cordier

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    Vivement la niche LIOT, alors !

    M. Jean-Louis Bricout

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    Avec ce texte, vous soufflez sur les braises et vous reprenez – sans trop vous en cacher, d’ailleurs – les positions habituellement défendues à l’extrême droite de cet hémicycle. Je le dis d’emblée, sans créer de faux suspense : le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires ne souhaite pas rejoindre le chemin que vous voulez dessiner pour notre pays.
    Sur le fond, je dois avouer être assez surpris de constater que le groupe Les Républicains est prêt à revenir en partie sur un régime d’expulsion qu’il a lui-même forgé et révisé.

    Mme Sandra Regol

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    Eh oui !

    M. Jean-Louis Bricout

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    Vouloir préserver l’ordre public est un objectif que nous partageons tous,…

    M. Laurent Jacobelli

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    Ah !

    M. Jean-Louis Bricout

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    …mais qui ne doit pas nous conduire à manquer d’humanité ni à oublier les droits fondamentaux que notre nation s’est d’ailleurs toujours honorée à défendre et à respecter. Il est des étrangers qui entretiennent des relations privilégiées avec la France. Je refuse de voir la spécificité de leurs situations effacée d’un trait de plume par le législateur. Lorsqu’on prétend bouleverser un cadre juridique qui existe depuis plusieurs décennies, il est bon de chercher, d’abord, à connaître l’intention initiale du législateur. Pourquoi la France a-t-elle décidé d’accorder un statut particulier de protection à certains étrangers ? Pourquoi l’Assemblée a-t-elle fait le choix d’accorder une protection relative à ces étrangers et une protection quasi absolue dans certains cas ? La réponse est simple : nous avons souhaité trouver un juste équilibre, permettant à la fois la sauvegarde de l’ordre public et le respect de nos droits fondamentaux.
    L’équilibre, c’est justement ce qui manque à votre proposition. Où est l’équilibre dans les critères d’expulsion que vous proposez ? Par les éléments de langage que vous employez, vous laissez entendre que la justice souffre d’un certain laxisme. La réalité est tout autre : ce n’est pas ce texte qui va apporter de la fermeté, car celle-ci est déjà appliquée avec raison par les administrations compétentes, sous le regard des magistrats. Pour rappel, le principe est que tous les étrangers qui provoquent un trouble grave à l’ordre public peuvent faire l’objet d’une expulsion administrative.

    M. Frédéric Boccaletti

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    « Peuvent », pas « doivent » !

    M. Jean-Louis Bricout

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    C’est ce principe qui guide l’action publique en la matière et qui est déjà en vigueur. L’expulsion reste possible pour tous les cas les plus graves, comme les atteintes aux intérêts de la nation, la trahison, l’espionnage ou encore les actes de terrorisme. Par ailleurs, je rappelle que l’expulsion n’est qu’une mesure administrative : en parallèle, la justice pénale se saisit des faits et traite de la même manière tous les étrangers. Un étranger qui trouble l’ordre public sera donc frappé par les sanctions pénales correspondantes, dont la gravité sera à la hauteur des actes commis. Voilà la réalité du cadre actuel. Je réfute donc la thèse d’un laxisme qui mettrait en danger les Français.
    Enfin, les dispositions que vous entendez supprimer sont des boucliers juridiques qui préservent directement les droits fondamentaux. Il est dans la nature même de notre État de droit de garantir le respect de ces droits humains pour toutes les personnes présentes sur notre territoire, indépendamment de leur nationalité.

    M. Emeric Salmon

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    Même pour les violeurs et les assassins ?

    M. Jean-Louis Bricout

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    Ce texte, s’il était adopté, serait d’ailleurs jugé contraire à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en particulier à son article 8, car il porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale.
    Pour toutes ces raisons, une très grande majorité des élus du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Ludovic Mendes.

    M. Ludovic Mendes

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    Derrière moi se dressent, de part et d’autre d’une tapisserie de la manufacture des Gobelins, deux statues de Pradier – non pas d’Aurélien Pradié, mais de James, soyons clairs : La Liberté et L’Ordre public. Si certains sur ces bancs aiment à regarder l’une ou l’autre, rares sont ceux qui observent les deux à la fois.

    M. Olivier Marleix

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    Bien sûr, il n’y a que vous qui en soyez capables…

    M. Ludovic Mendes

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    Pourtant, une conciliation doit s’opérer entre, d’un côté, la maîtrise des flux migratoires et la protection de l’ordre public et, de l’autre, le respect de la vie familiale et de la liberté individuelle.
    Venons-en au fond. La présente proposition de loi vise à lever certaines protections législatives contre l’éloignement pour motif d’ordre public. En l’état de notre droit positif, la mesure d’expulsion permet, contrairement à l’OQTF, d’expulser un étranger lorsque sa présence en France constitue une menace grave pour l’ordre public, même lorsqu’il se trouve en situation régulière. Le retrait préalable du titre de séjour n’est donc pas nécessaire. Seul le ministre de l’intérieur – dans certains cas d’urgence pour les étrangers protégés – ou les préfets peuvent décider d’une expulsion entrant dans ce cadre. Toutefois, des réserves de niveau légal, qui ne découlent ni d’obligations constitutionnelles ni d’exigences conventionnelles, bénéficient notamment à l’étranger entré en France avant l’âge de 13 ans, à l’étranger résidant en France depuis plus de dix ans, ou encore à l’étranger marié à un conjoint français depuis plus de trois ans.
    La proposition de loi vise à faire évoluer ce cadre – c’est peu de le dire – en mettant fin à l’ensemble de ces protections, à l’exception de trois d’entre elles : pour l’étranger père ou mère d’un enfant français mineur résidant en France, sous certaines conditions ; pour l’étranger qui justifie résider habituellement en France depuis qu’il a atteint l’âge de 13 ans au plus ; pour celui qui réside habituellement en France, si son état de santé le justifie. Le texte ne remet pas en cause la protection des mineurs ni celle des étrangers arrivés en France avant l’âge de 13 ans. Néanmoins, votre collègue Éric Ciotti, que vous soutenez en cosignant ses amendements, veut y remédier. Nous ne pouvons pas l’accepter.
    En outre, M. Ciotti,…

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Il vous hante !

    M. Ludovic Mendes

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    …dans sa grande bonté, souhaite expulser des familles entières. En effet, selon lui, si un membre de la famille commet une faute, toute la famille doit être expulsée. Vous êtes tellement généreux, mesdames et messieurs les Républicains ! Mais si M. Ciotti avait été jugé responsable de toutes les fautes commises par ses pairs, il aurait dû être expulsé du monde politique français depuis bien longtemps. (Protestations sur les bancs du groupe LR.)
    Nous devons être fiers que la République protège chaque individu qui se trouve sur son territoire. Là est notre force. Néanmoins, je pense que nous serions tous d’accord, sauf peut-être certains sur ma gauche, pour dire que toute personne – qu’elle soit française ou étrangère – qui ne respecte pas la République doit être jugée car nous sommes dans un État de droit.
    S’agissant des étrangers présents sur notre sol et qui enfreignent la loi, il nous faut nuancer notre appréciation. Par exemple, le simple voleur d’oranges ne doit pas, bien évidemment, se voir raccompagné à la frontière.

    M. Laurent Jacobelli

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    Eh bien si !

    M. Ludovic Mendes

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    Nous vous rejoignons sur le fait que les dispositions en vigueur ne sont pas toujours opérantes. Le phénomène des « ni-ni », ces étrangers ni expulsables, ni régularisables, représente ainsi un trou dans la raquette. Ni expulsables d’abord car ils sont entrés en France avant l’âge de 13 ans, y résident depuis plus de dix ans ou sont mariés à un conjoint français depuis plus de trois ans – bref, des verrous législatifs, qu’on appelle « réserves », font obstacle à leur expulsion. Ni régularisables ensuite car, s’ils poussent l’incivilité jusqu’à la délinquance, on ne peut leur délivrer de titre de séjour.
    Monsieur le rapporteur, cher Mansour Kamardine, eu égard aux futurs travaux de notre assemblée sur la question migratoire et à l’état perfectible de notre droit en vigueur, il est évident qu’une disposition de nature comparable, quoique assortie – je le dis et le répète – de préalables garde-fous, a une place assez naturelle dans le projet de loi que prépare le ministre de l’intérieur.

    M. Olivier Marleix

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    On ne comprend pas ce que vous voulez faire !

    M. Ludovic Mendes

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    Travaillons ensemble mais dans le sens d’un assouplissement bien plus proportionné de ces réserves législatives d’ordre public, lesquelles pourraient être conditionnées, en toute hypothèse, à des quanta de peine, sous le contrôle d’un juge et sans remise en cause du droit à la vie privée et familiale.
    De surcroît, vous conviendrez avec nous qu’on ne peut faire évoluer le cadre législatif de notre politique migratoire dans l’espace réduit d’une niche parlementaire, surtout en dissociant les mesures d’expulsion en cas de menace grave pour l’ordre public et le volet portant sur les obligations de quitter le territoire national.
    Pour ces raisons, nous n’apporterons pas notre soutien à ce texte. (Mme Andrée Taurinya applaudit.) Nous rejetterons les amendements qui s’y greffent opportunément. De même, nous jugeons préférable de voter les amendements de suppression, pour ne donner de gage ni à l’obstruction de métier de La France insoumise ni au silencieux contre-projet du Rassemblement national visant à permettre l’expulsion d’un étranger quel que soit le degré de gravité de la menace qu’il représente.
    Nous poursuivons notre réflexion sur ces points, notamment dans le cadre d’un groupe de travail interne.

    M. Pierre Cordier

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    Ils adorent les groupes de travail !

    M. Ludovic Mendes

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    Monsieur le rapporteur, vous qui m’avez interpellé tout à l’heure, sachez que nous sommes prêts à constituer une délégation pour vous accompagner à Mayotte et ainsi faire connaître la réalité du terrain. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Jacobelli.

    M. Laurent Jacobelli

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    Dès lors qu’un débat porte sur l’immigration, on le voit bien, il est passionné voire passionnel…

    Mme Christine Arrighi

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    Obsessionnel, plutôt !

    M. Laurent Jacobelli

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    … mais il est essentiel car il touche à la sécurité et à l’intégrité de notre pays et de ses habitants.
    C’est pour cela qu’au-delà des passions, je voudrais être factuel en revenant aux chiffres qui, eux, sont indiscutables. Dans les transports d’Île-de-France, 93 % des vols et 61 % des agressions sexuelles sont le fait d’étrangers.

    M. Frédéric Cabrolier

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    Eh oui !

    M. Erwan Balanant

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    C’est faux pour les agressions sexuelles ! J’ai les chiffres sous les yeux !

    M. Laurent Jacobelli

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    Ce n’est pas un phénomène anecdotique car si les étrangers représentent 7,7 % de la population, ils commettent 19 % des actes de délinquance. Un détenu sur quatre dans nos prisons est un étranger.
    Vous niez l’évidence mais il y a bien un lien entre immigration et insécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Cela saute aux yeux des Français et du Rassemblement national depuis longtemps tandis que certains sont toujours dans le déni.
    Je tiens à dire aux donneurs de leçons de la NUPES que nous n’avons pas à en recevoir de leur part. Vous avez envoyé une députée de la nation NUPES dans un centre de rétention administrative pour empêcher l’expulsion d’un multirécidiviste ivoirien, islamiste radicalisé, condamné pour sa participation à l’élaboration d’un crime. S’agit-il là de vos leçons de morale ? (Mêmes mouvements.)

    Plusieurs députés du groupe RN

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    Eh oui !

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous voulez garder à tout prix les étrangers qui menacent les Français. Soyons clairs : nous voulons généraliser, faciliter et accélérer l’expulsion de ceux qui mettent nos vies en danger. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
    J’entends aussi les beaux discours rassurants – quoique parfois un peu cacophoniques – du Gouvernement et de M. Darmanin. Ils exécuteront « toutes les OQTF », assure le ministre, qui précise également – en nous parlant, au passage, comme à des enfants de 5 ans : « On doit désormais être méchant avec les méchants et gentil avec les gentils. »
    Mais qui peut le croire ? L’homme qui a laissé filer l’imam Iquioussen, qui a laissé 230 migrants débarqués de l’Ocean Viking disparaître dans la nature, qui a fait passer le nombre d’OQTF exécutées sous la barre des 10 %, n’est pas – c’est une évidence – l’homme de la situation. Soit il ment, soit il est débordé. Dans les deux cas, c’est grave.
    Nous, députés du Rassemblement national, défendons avec Marine Le Pen une ligne claire. Pour mettre fin au chaos migratoire que vous avez instauré, nous proposons depuis des années de soumettre au peuple un référendum afin de demander enfin leur avis aux Français et de permettre de graver dans la Constitution l’obligation pour un étranger de respecter nos lois sous peine d’expulsion. (Mêmes mouvements.) Vous n’aurez pas le courage de proposer ce référendum parce que vous savez que le peuple français nous donnerait raison.

    M. Frédéric Cabrolier

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    Eh oui !

    M. Laurent Jacobelli

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    En attendant, il nous est donné d’étudier cette proposition de loi des Républicains. Nous ne sommes pas naïfs, elle ne réglera pas les causes profondes de la délinquance étrangère en France. Elle a cependant, reconnaissons-le, le mérite d’aller dans le bon sens en amorçant un débat sur le sujet fondamental de l’expulsion des étrangers qui menacent notre sécurité.
    Car c’est bien d’eux que nous parlons ici. J’ai entendu vos amalgames selon lesquels nous voulions expulser tous les étrangers. Non, ni cette proposition de loi ni nos amendements ne visent les étrangers vivant paisiblement et légalement sur notre territoire ou les Français d’origine étrangère. Non, elle vise clairement les étrangers représentant une menace pour la sécurité de nos concitoyens.
    Un étranger est par définition un invité chez nous. Si fueris Romae, Romano vivito more : si tu es à Rome, vis comme les Romains. J’ajouterais : et respecte leurs lois. Si un étranger viole notre droit, menace notre sécurité, nos valeurs et nos vies, alors il doit partir. Or nous en sommes très loin. Les crimes odieux évoqués par certains orateurs en sont la preuve. Comment pouvons-nous tolérer qu’un Jordanien au casier judiciaire long comme le bras puisse violer en plein hôpital public une femme inconsciente ? Mais que faisait-il encore en France ? Il n’aurait pas dû se trouver encore ici, il doit partir.

    M. Pierre Cordier

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    Il faut aussi le juger !

    M. Laurent Jacobelli

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    C’est du bon sens. C’est ainsi que fonctionnent tous les pays du monde en dehors de l’Union européenne. N’en déplaise à la gauche radicale et à l’extrême centre de cet hémicycle ou même à Bruxelles, il faut réagir. Cette proposition de loi, avec nos amendements, pourrait représenter une première marche vers le retour à l’ordre républicain et à la sécurité.
    Certains s’abriteront derrière une fausse humanité de salon – en réalité un électoralisme communautariste – pour ne pas voter ce texte.

    M. Jean-François Coulomme

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    Les étrangers ne votent pas, vous savez !

    M. Laurent Jacobelli

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    D’autres auront le verbe haut mais la main molle au moment du vote – je vous regarde, mesdames et messieurs de la majorité –, faisant du laxisme leur seule colonne vertébrale. Nous prendrons nos responsabilités. Pour la sécurité et pour les Français, le groupe Rassemblement nationale votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Sandra Regol

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    Nous voterons pour le respect du droit. Vous devriez essayer !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Andrée Taurinya.

    Mme Andrée Taurinya

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    Pour quelle raison faudrait-il « assouplir les conditions d’expulsion des étrangers constituant une menace grave pour l’ordre public ? »

    M. Olivier Marleix

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    On n’expulse plus personne !

    Mme Andrée Taurinya

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    La question mérite d’être posée puisque pas moins de vingt et une lois ont déjà été votées depuis 1986, encadrant de manière de plus en plus stricte les titres de séjour et élargissant le champ des OQTF. Par ailleurs, une ordonnance de décembre 2020 permet déjà aux préfets de procéder à de telles expulsions.

    M. Olivier Marleix

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    Regardez le droit et les chiffres !

    Mme Andrée Taurinya

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    La raison est-elle à chercher du côté de la complaisance envers une extrême droite dont le discours raciste est assumé jusque dans l’hémicycle ?

    Mme Julie Lechanteux

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    Les insultes ne sont pas autorisées dans l’hémicycle !

    Mme Andrée Taurinya

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    Ou du côté de la volonté de trouver des boucs émissaires afin d’éviter les sujets de fond ? Ou bien encore faut-il considérer ces deux facteurs à la fois ?
    Le 9 juillet dernier, M. Darmanin annonçait vouloir rendre possible l’expulsion de « tout étranger » ayant commis « un acte grave ». Le député Ciotti en a profité pour déposer le 20 septembre une proposition de loi « visant à faciliter l’expulsion des étrangers causant des troubles à l’ordre public », un texte qui ressemble à s’y méprendre à celui que nous examinons aujourd’hui.

    M. Olivier Marleix

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    Cela fait cinq ans que nous déposons le même texte !

    Mme Andrée Taurinya

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    Notre droite républicaine suit le mouvement de l’exécutif en se mettant à la remorque de l’extrême droite. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) À la fin, nous savons tous qui sortira renforcé de ces opérations de communication politique.

    M. Laurent Jacobelli

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    Les Français !

    M. François Piquemal

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    Elle a raison !

    Mme Andrée Taurinya

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    Sur le fond, contrairement à ce que semble croire le rapporteur, faciliter les conditions d’expulsion des étrangers n’aura aucun effet sur le taux d’exécution des OQTF, sur lequel une bonne partie de l’hémicycle fantasme. Si celui-ci est bas, c’est parce que la France émet un nombre déraisonnable de mesures d’éloignement par rapport à ses voisins européens. Les chiffres le montrent. Ce n’est pas moi qui l’affirme mais le sénateur LR François-Noël Buffet dont le rapport d’information atteste que leur nombre a doublé au cours de ces dix dernières années.
    Pourtant, notre pays n’a pas été submergé, comme on le prétend, par une vague migratoire.

    M. Laurent Jacobelli

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    Je ne sais pas où vous vivez !

    Mme Andrée Taurinya

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    Écoutez les chiffres. Les régions d’Europe qui ont connu les plus fortes hausses relatives de populations immigrées depuis l’an 2000 sont : l’Europe du Sud, avec une augmentation de 181 % ; les pays nordiques, de 121 % ; l’Allemagne et l’Autriche, de 75 %. Dans ce tableau européen, la France occupe une position très inférieure à la moyenne, avec une hausse de seulement 36 % d’immigrés en vingt ans – je dis bien en vingt ans.

    Mme Christine Arrighi

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    Enfin ! Voilà les vrais chiffres !

    M. Laurent Jacobelli

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    Évidemment, vu le niveau d’où nous partons…

    Mme Andrée Taurinya

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    Par ailleurs, le rapporteur s’étonne qu’un quart des personnes détenues en France soient étrangères. Voici un peu de sociologie de la délinquance pour comprendre cette surreprésentation. Premièrement, la déviance est traditionnellement le fait d’hommes jeunes et célibataires, profil majoritaire au sein de la population immigrée. Deuxièmement, la sélectivité pénale, observée dans les statistiques, cible les plus pauvres en les définissant comme population punissable, les populations immigrées étant les plus précarisées.

    M. Fabien Di Filippo

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    Toujours l’excuse sociale !

    Mme Andrée Taurinya

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    Enfin, je me demande de quelle menace grave ce texte voudrait nous protéger. Sans grande surprise, je n’ai rien lu, dans ce texte, à propos de la délinquance en col blanc,…

    M. Laurent Jacobelli

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    Ce n’est pas le sujet !

    Mme Andrée Taurinya

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    …qu’il s’agisse d’individus soupçonnés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale, de titulaires de visas dorés ou de dirigeants d’entreprises étrangères coupables de fraude fiscale contre notre pays.

    M. Fabien Di Filippo

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    Il fallait en parler la semaine dernière pendant votre niche parlementaire !

    Mme Andrée Taurinya

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    En revanche, le texte propose sans complexe d’expulser un travailleur immigré devenu invalide sur notre sol à la suite d’un accident du travail.
    Il y a quelques semaines, l’enceinte du Palais-Bourbon a été souillée par le racisme. Excepté le Rassemblement national, tous les groupes politiques ont fait front à cette occasion, même le groupe LR.

    M. Laurent Jacobelli

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    Diffamation !

    Mme Andrée Taurinya

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    Et voilà que l’on nous propose un texte qui, dans son exposé des motifs, prête aux personnes étrangères issues de l’immigration africaine le gène de la délinquance.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Quelle bêtise !

    Mme Andrée Taurinya

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    Une odeur nauséabonde se dégage de ce texte (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe LR), celle de la dérive inquiétante de la droite vers l’extrême droite, de cette droite qui se cherche en période de congrès tout en étant incapable de se situer dans l’opposition parlementaire quand la responsabilité du Gouvernement est mise en cause.

    Mme Christine Arrighi

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    Ils ne savent plus où ils habitent !

    Mme Andrée Taurinya

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    Cette dérive sécuritaire, ici dans sa variante xénophobe, constitue une menace grave pour notre pays puisqu’elle stigmatise une partie de la population.

    M. Laurent Jacobelli

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    C’est une honte !

    M. Pierre Cordier

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    Vous ne pouvez pas dire cela devant M. Kamardine !

    M. Laurent Jacobelli

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    Les familles des victimes vous entendent !

    M. Fabien Di Filippo

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    Nous parlons de sujets graves !

    M. Laurent Jacobelli

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    Ça suffit ! C’est terminé !

    Mme la présidente

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    Madame la députée, je vous remercie.

    Mme Andrée Taurinya

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    Ce texte sème le désordre public en jouant sur la peur, en montant une partie de la population… (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES. – Exclamations sur les bancs des groupes LR et RN. – Plusieurs députés du groupe RN font claquer leur pupitre.)

    Mme la présidente

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    Madame la députée, le temps imparti, qui est de cinq minutes pour tout le monde, est largement écoulé.
    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    « La violence est devenue systémique et ne cesse de s’amplifier. » Ce constat est celui d’un spécialiste : l’ancien préfet de police de Paris, Didier Lallement. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Sandra Regol

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    En effet, un vrai spécialiste de la violence !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Malheureusement, cette violence est – au moins en partie – directement liée, selon ses propres termes, à « une population délinquante qui est nourrie par une immigration chaotique. À Paris, un délit sur deux est commis par un étranger, dont beaucoup sont en situation irrégulière. Ils sont à l’origine de 95 % des vols à la tire. »

    M. Erwan Balanant

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    Ce n’est pas vrai !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Un constat que seuls ceux qui ne veulent pas voir ne voient pas.

    Mme Sandra Regol

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    Le sens de la réalité vous caractérise !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Ce fut longtemps le cas du Gouvernement, même s’il semble sorti enfin de sa cécité. Selon les propres mots de Gérald Darmanin, « il serait idiot de ne pas dire qui il y a une part importante de la délinquance qui vient de personnes immigrées ».

    M. Laurent Jacobelli

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    Eh oui !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il a également indiqué que « 48 % des gens interpellés pour des actes de délinquance à Paris, 55 % à Marseille et 39 % à Lyon sont des étrangers ».

    M. Andy Kerbrat

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    Mais ce n’est pas vrai !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il a évidemment raison d’ajouter : « Bien sûr que l’étranger n’est pas par nature un délinquant. Mais il est évident que nous avons un problème de délinquance étrangère. » Il a même déclaré qu’« un étranger qui commet un acte de délinquance grave doit être expulsé très vite parce qu’il crache sur le sol qui l’accueille ». Le bon sens même… Plus encore, Gérald Darmanin a affirmé cet été vouloir « mener une lutte plus intraitable que jamais contre les délinquants étrangers ».

    M. Olivier Marleix

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    Baratin !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    On ne peut que souscrire à de tels propos quand on sait qu’en juin 2022, sur un total de 70 867 détenus dans les prisons françaises, 18 114 étaient des ressortissants étrangers, soit près de 26 %. M. Darmanin a lui-même précisé en juillet dernier que, depuis deux ans, 2 751 étrangers délinquants ont été expulsés, dont 770 comme responsables de trafic de stupéfiants et 900 pour violences conjugales. Voilà des chiffres qui inquiètent autant qu’ils interpellent parce que les étrangers en prison sont évidemment trop nombreux, mais aussi parce que trop peu de délinquants étrangers sont expulsés de France.
    Et que dire de ces associations – financées par l’État ! – qui gèrent les logements d’urgence et qui refusent de mettre à la rue les déboutés du droit d’asile, eux-mêmes refusant de quitter le territoire national ? Une mécanique infernale ! Pendant ce temps, certains des véritables demandeurs d’asile errent dans les rues, vont de squat en squat, glissent dans une misère qui a le goût et l’odeur de la drogue, et qui mute inévitablement en une violence intolérable, inacceptable.
    Qu’ils soient en situation régulière ou irrégulière, je le dis très clairement : les étrangers qui commettent des délits ou des crimes n’ont rien à faire en France ! Rien !
    Dès lors, il faut faire sauter les obstacles législatifs et administratifs qui permettent aux délinquants étrangers de rester dans notre pays. La proposition de loi que nous examinons maintenant va très exactement dans ce sens puisqu’elle a pour objet de redessiner les frontières entre les trois régimes d’expulsion afin d’assouplir les conditions d’expulsion des étrangers représentant une menace grave pour l’ordre public en augmentant le champ des catégories d’étrangers concernés : je pense aux étrangers titulaires d’une rente d’accident du travail, à ceux qui sont mariés à un conjoint français depuis plus de trois ans ou encore aux personnes résidant régulièrement en France depuis plus de dix ans. Notons en revanche que, sauf dans certains cas, n’est pas visé par cette proposition de loi l’étranger père ou mère d’un enfant français mineur résidant en France, ni l’étranger dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale inexistante dans son pays.
    Le nombre de personnes que nous pourrions expulser est estimé à 4 000 par an si nous n’avions pas dans notre droit ces règles excluant les personnes arrivées avant 13 ans sur le territoire national et celles mariées à un Français. Ce texte est une avancée non négligeable puisque, je le rappelle, ce n’est aujourd’hui guère plus d’un étranger sur vingt devant quitter le territoire qui est effectivement amené à partir. C’est pour cette raison que je voterai ce texte, même si je reste persuadée qu’il aurait été utile, par exemple, de prévoir aussi le rétablissement du délit de séjour illégal. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La discussion générale est close.
    Monsieur Maillard… ?

    M. Sylvain Maillard

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    Je demande une suspension de séance de cinq minutes, madame la présidente.

    Mme la présidente

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    La suspension est de droit.

    M. Olivier Marleix

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    C’est une manœuvre dilatoire !

    M. Fabien Di Filippo

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    Il manque des troupes dans la majorité !

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à douze heures quarante.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.
    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Je voudrais faire quelques observations, après avoir écouté les uns les autres.
    Madame la ministre déléguée, j’ai noté avec beaucoup d’intérêt que vous partagez la même analyse que nous sur la situation.

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Mais pas la solution.

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Les chiffres que nous avons donnés sont les bons puisqu’ils m’ont été communiqués par les administrations placées sous l’autorité du ministre de l’intérieur. Mais je suis surpris de vous entendre nous dire, malgré ce constat, qu’il est urgent d’attendre un projet de loi qui viendra…

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Demain.

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Acceptons-en l’augure. Il a déjà été repoussé deux fois. Pendant ce temps, il y a des citoyens qui sont en grande souffrance.
    J’ai entendu aussi que nous ne pouvions pas réformer sur la base d’un fait d’actualité. Mais nous proposons cette réforme sur la base de faits vécus. Des faits divers dramatiques et très violents sont le lot quotidien sur le territoire national – je n’égrènerai pas les faits dont il s’agit et qui ont d’ailleurs été souvent rappelés dans la discussion générale.
    Monsieur Saulignac, je vous confirme que nous portons dans nos cœurs le président Nicolas Sarkozy. Mais, dans la vie publique, le courage des responsables politiques, quand ils se sont trompés dans leur décision, c’est de le reconnaître et de revenir dessus. Vous évoquez la loi de 2003. Vous n’étiez pas encore parmi nous, mais moi j’ai en effet voté ce texte. Mais après presque vingt ans d’application de ses dispositions, je me rends compte qu’elles posent un problème. Les représentants des grandes administrations que j’ai auditionnés – le préfet de Guyane, le préfet de police de Paris, au-dessus de tout soupçon…

    M. Ugo Bernalicis

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    Oh si ! On le soupçonne très fortement !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Vous avez tort de vous exciter comme cela, les amis. Ce serait sympa de vous calmer…

    M. Ugo Bernalicis

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    On est soupçonneux !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    …parce que si le sujet est difficile, nos compatriotes souffrent.

    Mme la présidente

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    Mes chers collègues, pas d’interpellations, s’il vous plaît. Et seul M. le rapporteur a la parole.

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Oui, il y a des difficultés ; oui, il faut évoluer ; oui, il faut adapter notre législation par rapport aux circonstances du moment.

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Enfin, je veux dire à M. Taché qu’il n’y a pas d’acharnement contre les étrangers. Dès que l’on parle d’insécurité ou d’immigration, il y a un problème. Vous ne voulez pas qu’on aborde ces sujets qui nous concernent. Pourtant, on peut facilement et tranquillement traiter de l’insécurité ; nous devons même en parler car nos compatriotes en souffrent.
    Vous vous étonnez que nous fassions le lien entre insécurité et immigration, mais nous pouvons le lire dans les chiffres de l’administration que l’on ne peut pas accuser d’être extrémiste. Elle constate qu’elle n’est pas en mesure de reconduire à la frontière plus de 70 % des personnes qui devraient l’être parce que ces dernières bénéficient de protections – en particulier celles de l’article L. 631-3 du Ceseda, qui concerne notamment les jeunes installés en France avant l’âge de 13 ans. Puisque l’administration a les mains liées, puisqu’elle ne peut pas agir, il faut donc assouplir les règles : c’est l’objet du texte. Je rappelle son intitulé : proposition de loi visant à assouplir les conditions d’expulsion des étrangers constituant une menace grave pour l’ordre public. C’est bien « assouplir » et non « annuler ». Je ne vois pas en quoi cela justifie les réactions hystériques que j’ai pu entendre ici ou là.
    Certains ont aussi affirmé que nous n’agissions que pour satisfaire nos électeurs. Non ! Une fois élu, j’agis pour l’ensemble des citoyens de la République. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.) C’est de cela qu’il s’agit. Agissons dans l’intérêt de tous les citoyens, y compris les étrangers…

    Mme Émilie Bonnivard

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    Bien sûr !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Quand on protège toutes les populations qui se trouvent en France, nous protégeons aussi les clandestins. Notre but consiste à protéger tout le monde : voilà un point sur lequel nous pouvons nous retrouver. Il est donc inutile de s’exciter.
    Pour conclure, j’ai relevé que Mme Bourouaha affirmait que nous visions les personnes dont le taux de mélanine était très élevé. Elle n’a manifestement pas regardé le rapporteur. (Sourires et applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Excellent !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Elle se serait rendu compte qu’il a lui-même un très fort taux de mélanine.

    Mme Christine Arrighi

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    Cela ne vous donne aucune légitimité pour défendre les positions du Rassemblement national !

    Un député du groupe Dem

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    Le rapporteur a aussi des cheveux blancs ! (Sourires.)

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Ah, les marques du temps !
    Madame Taurinya, à chaque fois que, du côté droit de l’hémicycle, nous abordons la question qui nous occupe aujourd’hui, j’entends dire que nous glissons vers le Rassemblement national. J’ai commencé à militer il y a une quarantaine d’années au sein de la formation politique à laquelle j’appartiens toujours. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)

    M. Pierre Cordier

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    Bravo !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Sachez que, dès 1985, à l’époque de Jacques Chirac, nous avons commencé à parler d’immigration. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.) Prétendre que nous glissons vers le RN parce que nous parlons d’immigration, c’est méconnaître l’histoire de la France et celle de LR, qui est aujourd’hui l’histoire de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Monsieur Mendes, vous nous tendez la main pour que nous travaillions ensemble. Eh bien, travaillons ensemble maintenant sur la proposition de loi : je vous demande de la voter avec nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Ludovic Mendes

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    Travailler ensemble oui, voter la proposition de loi non !

    Discussion des articles

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant l’article unique de la proposition de loi dans le texte dont l’Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n’a pas adopté de texte.

    Article unique

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Olivier Marleix.

    M. Olivier Marleix

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    Je crois très sincèrement qu’il n’y a pas une once de racisme chez nos compatriotes (Rires sur les bancs du groupe LFI-NUPES) ; je suis convaincu qu’il n’y a pas une once de xénophobie chez les Français. Toute notre histoire raconte cela. Il y a en revanche, chez nos compatriotes, la volonté farouche que ceux que nous autorisons à venir séjourner en France respectent les lois de la République et l’autorité de l’État qui les accueille. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)
    Aujourd’hui, ça n’est pas le cas. Tous les chiffres ont été rappelés : 25 % des détenus sont des ressortissants étrangers, 50 % des faits de délinquance générale commis à Paris le sont par des étrangers. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Andy Kerbrat

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    Mais c’est faux ! C’est une manipulation des chiffres !

    M. Olivier Marleix

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    Retrouver une capacité d’expulser, c’est défendre notre cohésion nationale mise à mal. Si vous ne le voyez pas, mes chers collègues, c’est grave. (Mêmes mouvements.)
    Madame la ministre déléguée, avec ce texte, nous avons voulu prendre le Gouvernement et la majorité au mot, puisque depuis des mois, voire des années, vous nous annoncez que vous allez revenir à la fermeté. La réalité c’est que vous n’êtes pas au rendez-vous ; vous n’êtes même pas au rendez-vous de la promesse de fermeté du Président de la République lors de sa rapide campagne présidentielle.
    Il faut maintenant passer à l’action, mais vous en êtes incapables. Vous nous renvoyez à un texte sur l’immigration dont le dépôt et l’examen ont déjà été repoussés à deux reprises : il a été annoncé pour un Conseil des ministres du mois de septembre, puis pour le mois de décembre avant que l’on nous explique que ça serait qu’en mars. En réalité, vous êtes incapables de passer de la communication à l’action. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons aux amendements.
    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 117 et 138, tendant à supprimer l’article unique.
    La parole est à M. Inaki Echaniz, pour soutenir l’amendement no 117.

    M. Inaki Echaniz

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    Il vise à supprimer l’article unique et à conserver en l’état les cas peu nombreux, énumérés par la loi, rendant plus difficile l’expulsion de personnes étrangères séjournant régulièrement en France et ayant commis une infraction. Ces exceptions concernent notamment les parents d’enfants français, les personnes mariées avec un conjoint de nationalité française, ou les résidents réguliers en France depuis plus de dix ans dont la vie est donc en France. Les exceptions actuelles sont aussi fondées sur des critères de vulnérabilité. Elles concernent par exemple les étrangers victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle dont le taux d’incapacité est élevé.
    Ces exceptions dont le nombre est limité n’empêchent pas l’expulsion des personnes concernées ; elles laissent le soin au juge de la prononcer s’il en constate par exemple la « nécessité impérieuse pour la sûreté de l’État ou la sécurité publique ». La suppression des dispositions existantes n’est donc pas justifiée puisque les personnes concernées restent de fait expulsables en l’état actuel de la loi.
    Loin d’être un moyen pour lutter efficacement contre la délinquance, qu’elle soit le fait d’une personne de nationalité française ou étrangère, les dispositions de l’article unique sont de plus manifestement contraires à la Convention européenne des droits de l’homme, qui en son article 8 entérine le droit au respect de la vie privée et familiale. En ce sens, les dispositions d’un tel article sont non seulement le reflet d’une rhétorique dangereuse, amalgamant sans cesse délinquance et étrangers – rhétorique dommageable pour notre modèle républicain –, mais aussi contraires à des normes qui sont des supports de la protection de l’intégration des étrangers. (Protestations sur les bancs du groupe LR.)
    Elle signe aussi le retour du Front national avec celui des Républicains, main dans la main. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
    Madame la présidente, nous avons déposé une demande de scrutin public sur notre amendement de suppression.

    Mme la présidente

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    En effet, monsieur le député. J’informe l’Assemblée que, sur les amendements nos 117 et 138, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, le groupe Les Républicains, et le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 138.

    Mme Sandra Regol

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    Il tend à supprimer l’article unique de cette « proposition de loi » – je place ce terme entre guillemets parce que l’on comprend bien que son dépôt a un sous-texte. Certains membres du groupe LR visent d’autres enjeux que celui de la proposition de loi, enjeux peut-être davantage liés au prochain congrès pour lequel il faudrait démontrer que la droite dure trouve toujours une oreille attentive. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES et GDR-NUPES. – Mme Anne-Laure Blin proteste.) On trouve toujours des gens chez vous pour chasser sur les terres de l’extrême droite et reprendre ses valeurs.
    Le problème, c’est que nous connaissons bien cette série multidiffusée, si bien que je peux même spoiler l’épisode final de cette course à l’échalote avec l’extrême droite : ça finit très mal pour la démocratie. (Mmes Soumya Bourouaha et Marie Pochon applaudissent.)
    En l’état actuel du droit, un migrant qui n’a pas encore obtenu l’asile ou qui est temporairement en situation irrégulière peut recevoir une OQTF qui l’oblige à quitter le pays par ses propres moyens dans un délai de trente jours – c’est la loi. Il est cependant nécessaire que son pays d’origine le reconnaisse comme un ressortissant – ce qui est parfois compliqué, et de cela, nous pourrions parler. Pour ne citer qu’un exemple, l’Algérie a délivré entre janvier et juillet 2021 un total de 31 laissez-passer consulaires alors que 7 731 OQTF étaient prononcées. Nous pourrions peut-être travailler sur ce sujet en bonne intelligence (Exclamations sur les bancs du groupe LR), sans vociférations pour tenter d’obtenir un progrès du côté des pays concernés. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)
    Votre proposition de loi renie l’histoire de notre République ; elle renie les droits de l’homme ; elle renie les Lumières. (Mêmes mouvements.) Elle renie ce qui fait le ferment et la fierté de notre démocratie : un pays ouvert sur l’Europe, sur l’extérieur, sur le monde (Exclamations sur les bancs du groupe LR), un pays dans lequel, je le rappelle, on peut entrer comme un immigré en s’appelant Sarkozy et faire une grande carrière jusqu’à devenir président de la République… (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES.)

    M. Hadrien Clouet

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    Ils n’aiment pas la République !

    Mme la présidente

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    Merci, madame Regol !

    Mme Sandra Regol

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    Je finis, madame la présidente !

    Mme la présidente

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    Désolé, le temps qui vous était imparti est écoulé. Vous pourrez reprendre la parole.

    M. Antoine Léaument

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    Bravo, madame Regol !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur les amendements de suppression ?

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Avis défavorable : la commission a rejeté les amendements de suppression. Aux arguments exposés en commission, j’ajoute qu’il ne suffit pas d’affirmer à haute et intelligible voix, comme s’il s’agissait d’une vérité, que la proposition de loi est contraire à la CEDH. Un mensonge répété des milliers de fois reste un mensonge (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES).

    M. Inaki Echaniz

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    C’est vous qui mentez !

    Mme Christine Arrighi

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    Évidemment, vous détenez la vérité !

    M. Mansour Kamardine, rapporteur

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    Le Conseil d’État a affirmé à plusieurs reprises que les protections dont nous parlons ne relevaient pas de la protection constitutionnelle et que le législateur avait parfaitement la possibilité d’y toucher. Il a aussi précisé qu’elles ne relevaient pas non plus de la CEDH. Par conséquent, il est possible de réformer le dispositif en vigueur. On comprend que vous puissiez être en désaccord avec les orientations proposées, mais vous ne pouvez pas dire qu’elles sont contraires à la CEDH.
    Par ailleurs, vous nous reprochez systématiquement d’aller vers le Rassemblement national. Chers collègues de la France insoumise, quand vous déposez des motions de censure et que le RN vote avec vous, vous êtes bien contents. (Applaudissements continus sur les bancs du groupe LR. – Exclamations continues sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES) Vous ne soustrayez pas leurs voix ; vous les comptez. Quand il vote avec nous en revanche cela voudrait dire que nous fonctionnons avec eux. Ça suffit ! Il y en a assez de ces outrances à l’égard des collègues qui ne demandent qu’à s’exprimer. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Je l’ai dit au début de l’examen du texte, la volonté du Gouvernement est de présenter au premier trimestre 2023 un projet de loi qui portera sur l’ensemble des sujets migratoires, dont les expulsions. Ce projet de loi comprendra des dispositions révisant les protections pour les expulsions. Une telle révision nécessite une réflexion approfondie afin que le nouveau cadre soit conforme à la Constitution comme à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
    Il a été décidé que ces sujets feraient l’objet de discussions avec les présidents de groupes parlementaires, les représentants de la société civile, avant un débat au Parlement qui aura lieu dès la semaine prochaine. Aussi le Gouvernement qui souhaite poursuivre la réflexion entamée sur ce sujet complexe considère-t-il que la présente proposition de loi est prématurée, moins pour les raisons invoquées dans vos amendements que pour des raisons de calendrier.

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous refusez le débat ! C’est l’influence de la NUPES !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Les débats qui doivent avoir lieu le 6 décembre à l’Assemblée puis le 13 décembre au Sénat ont été annoncés dès le mois de septembre. Vous êtes donc au courant depuis deux mois, mais vous proposez aujourd’hui d’examiner un texte sur un sujet qui, selon nous, mérite mieux. Il mérite un travail parlementaire approfondi. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
    Monsieur Marleix, vous voulez nous prendre au mot, mais quel mot ? La réalité, c’est que vous faites fi de la volonté du Gouvernement de conduire le débat le plus apaisé possible autour du projet de loi sur l’asile et l’immigration qui sera présenté par le ministre de l’intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin.

    M. Stéphane Viry

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    Nous n’avons pas confiance !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Pourquoi profitez-vous de votre niche pour inscrire ce texte sur un sujet complexe à la veille des débats prévus les 6 et 13 décembre ?

    M. Patrick Hetzel

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    C’est le principe de l’initiative parlementaire !

    M. Hadrien Clouet

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    C’est en vue de leur congrès !

    Mme Dominique Faure, ministre déléguée

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    Vous savez qu’il s’agit d’un sujet complexe. Mesdames et messieurs les députés du groupe Les Républicains, n’avez-vous pas prévu un congrès du parti très prochainement, début décembre ? Laissez donc travailler le Parlement ! (Protestations sur les bancs du groupe LR.)
    J’émets, au nom du Gouvernement, un avis favorable à ces amendements de suppression. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    M. Patrick Hetzel

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    Vous muselez le débat !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Ciotti.

    Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES

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    Non, on vote !

    M. Éric Ciotti

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    Je veux m’adresser à nos collègues de la majorité, mais je ne suis pas sûr que cela change grand-chose. En effet, vous avez déjà orienté leur vote, madame la ministre déléguée : je ne doute pas qu’ils suivront l’avis favorable que vous venez d’émettre sur ces amendements de suppression défendus par la NUPES !
    Chers collègues de la majorité, c’est une question essentielle qui se pose ; elle relève du bon sens. Il s’agit simplement de dire qu’un étranger qui commet un crime ou un délit sur le territoire de la République n’y a plus sa place. Pour votre part, vous préférez vous ranger du côté de la NUPES, qui manifeste depuis tout à l’heure sa volonté de ne pas débattre. (Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem, LFI-NUPES et SOC.) Je conçois que ce soit le dessein de nos collègues d’extrême gauche, animés par le souci de déconstruire notre nation et notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN. – Mme Emmanuelle Ménard applaudit également.) Mais vous, les députés de la majorité, vous faites preuve d’une profonde contradiction en leur apportant votre soutien ! (Protestations sur les bancs des groupes RE et Dem.)
    Nous n’en pouvons plus d’entendre le Président de la République se contenter de dire que 50 % des individus mis en cause dans les actes de délinquance à Paris sont des étrangers ! Le ministre de l’intérieur, M. Darmanin, qui s’appuie sur les chiffres du service statistique ministériel de la sécurité intérieure, tient exactement le même discours. Et vous, que faites-vous ? Vous refusez le débat ! (Exclamations sur les bancs des groupes RE et SOC.)

    Plusieurs députés du groupe LR

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    Eh oui !

    M. Éric Ciotti

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    Comme l’a souligné Olivier Marleix, il y a une contradiction flagrante entre vos paroles, votre communication et vos actes.

    M. Inaki Echaniz

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    Merci ! Passons au vote !

    M. Éric Ciotti

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    Si vous votez ces amendements de suppression, vous enverrez un signal aux délinquants étrangers qui mettent en péril la cohésion de notre nation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Vives protestations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

    Mme Marie Pochon

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    C’est vous qui parlez de délinquance ?

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 117 et 138.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        181
            Nombre de suffrages exprimés                181
            Majorité absolue                        91
                    Pour l’adoption                120
                    Contre                61

    (Les amendements identiques nos 117 et 138 sont adoptés ; en conséquence, l’article unique est supprimé.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et SOC. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    M. Patrick Hetzel

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    Bravo ! Décidément, vous avez muselé le débat !

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Suite de la discussion de la proposition de loi visant à assouplir les conditions d’expulsion des étrangers constituant une menace grave pour l’ordre public ;
    Discussion de la proposition de loi portant création d’une juridiction spécialisée dans l’expulsion des étrangers délinquants ;
    Discussion de la proposition de loi portant création d’une juridiction spécialisée aux violences intrafamiliales.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à treize heures cinq.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra