Première séance du mardi 19 mars 2024
- Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet
- 1. Questions au Gouvernement
- Reconnaissance des agents de la fonction publique
- Soins palliatifs
- Lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur
- Lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur
- Plan contre le narcotrafic à Marseille
- Reprise du site Ascometal
- Situation des finances publiques
- Accidents du travail
- Proposition de loi « bien vieillir »
- Situation des infirmiers libéraux
- Création de groupes de niveau au collège
- Parcoursup
- Menaces contre la principale d’un collège de la Côte-d’Or
- Politique de sécurité
- Mesures d’économies budgétaires
- Décès du jeune Wanys
- Programmation pluriannuelle de l’énergie
- Emploi des seniors
- 2. Gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection - Application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution
- 3. Rénovation de l’habitat dégradé
- 4. Mesures relatives au grand âge et à l’autonomie
- 5. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Questions au Gouvernement
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Reconnaissance des agents de la fonction publique
Mme la présidente
La parole est à M. Christophe Bex.
M. Christophe Bex
Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, vous ressassez que la France est championne du monde des prélèvements obligatoires.
M. Jean-René Cazeneuve et M. Patrick Hetzel
C’est vrai !
M. Christophe Bex
Or rien n’a jamais été gratuit ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Les services publics et la protection sociale sont financés par ceux qui en bénéficient. En réalité, qui paye et dans quelle proportion par rapport à son revenu et à son patrimoine ? Et où va l’argent collecté ? Votre politique détourne les contributions au bénéfice de quelques-uns et au détriment du plus grand nombre. (Mêmes mouvements.)
En cette année olympique, vous battez tous les records. Félicitations pour les 250 milliards volés aux collectivités locales depuis 2012 ! (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. Frédéric Mathieu
Bien dit !
M. Christophe Bex
Félicitations pour les 153 milliards gagnés par les entreprises du CAC40, pour les 98 milliards reversés aux actionnaires, pour les 100 milliards de fraude fiscale, pour les 22 milliards versés aux services médicaux privés et pour les 9 milliards versés à l’éducation privée ! (« Bravo ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. Maxime Minot
Parlez-en à Ruffin !
M. Christophe Bex
Vous me direz que l’argent, il n’y en a pas. Cela fait des années que vous êtes au pouvoir et vous n’y connaissez toujours rien, pas plus que vous ne maîtrisiez le calcul de la surface d’un hectare quand vous étiez ministre de l’agriculture il y a quinze ans ! (« Excellent ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) J’ai travaillé quarante années au service du public et je peux témoigner de l’évolution des salaires de la catégorie C : elle est de 80 euros après vingt ans de service, soit 4 euros par année, le tiers d’une baguette de pain par mois. Les agents de la fonction publique méritent de la considération et de la reconnaissance ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
À l’occasion des quatre-vingts ans de la signature du programme du Conseil national de la Résistance (CNR), la fonction publique manifeste. Quelle est votre réponse ? Soyez honnête et annoncez votre volonté de détruire le programme du CNR ! Changez le titre de votre livre et intitulez-le Les jours malheureux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES, dont plusieurs députés se lèvent. – Mme Cécile Untermaier et M. Boris Vallaud applaudissent aussi.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Patrick Hetzel
Et de la dette !
M. Maxime Minot
Il a fini d’écrire son bouquin ! (Sourires.)
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Ce n’est plus La France insoumise, c’est La France inconsciente ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – « Oh ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Frédéric Mathieu applaudit ironiquement.)
M. Maxime Minot
Ce n’est pas étonnant que tu ne vendes pas beaucoup de bouquins !
M. Bruno Le Maire, ministre
Inconsciente de la réalité de nos finances publiques et du modèle social français. Vous parlez d’inégalités, mais je vous rappelle que la Fondation Jean-Jaurès, qui ne peut être soupçonnée de droitisme débordant, a elle-même indiqué que la nation développée dans laquelle les écarts de revenus étaient les plus réduits par la redistribution fiscale était la France. Ces écarts sont de un à dix-huit avant redistribution ; ils sont de un à trois après.
M. Jean-René Cazeneuve et M. Laurent Croizier
Eh oui !
M. Bruno Le Maire, ministre
Aucune nation ne redistribue autant que la France aux plus modestes et aux plus fragiles. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations continues sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous nous dites que le taux d’imposition n’est pas suffisamment élevé, mais le taux marginal d’imposition de notre pays est le plus élevé de tous les pays développés : il approche les 60 % !
M. Grégoire de Fournas
Quelle honte !
M. Bruno Le Maire, ministre
Vous nous dites que certains ne paient pas assez pour les autres,…
M. Christophe Bex
Regardez-moi quand vous me répondez !
M. Bruno Le Maire, ministre
…mais 70 % de l’impôt sur le revenu est payé par 10 % des contribuables !
M. Christophe Bex
Et l’ISF ?
M. Bruno Le Maire, ministre
Alors oui, il est temps, après avoir protégé les Français pendant la crise du covid, sans votre soutien (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI-NUPES), après les avoir protégés pendant la crise inflationniste, sans votre soutien, après avoir récompensé le travail en instaurant une exonération des heures supplémentaires, pour lesquelles vous voulez rétablir la fiscalité – les mesures d’austérité sur le travail, c’est La France insoumise qui les promet ! –, après toutes ces décisions,…
M. Maxime Minot
Que vous avez fait voter avec des 49.3 !
M. Bruno Le Maire, ministre
…nous rétablissons fermement, calmement et sereinement les comptes publics. La France insoumise est la France irresponsable. Nous sommes la majorité de la responsabilité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem. – M. Laurent Marcangeli applaudit également.)
M. Pierre Cordier
Tu ne seras jamais Président de la République !
M. Benjamin Lucas
Rends l’ISF, Le Maire !
Soins palliatifs
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Juvin.
M. Philippe Juvin
Ma question s’adresse à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Aujourd’hui, seul un Français sur deux nécessitant des soins palliatifs y a accès. Si l’on veut que chacun puisse en bénéficier, il faudrait donc doubler l’offre actuelle. On nous annonce un plan de 1 milliard d’euros sur dix ans. Ce chiffre semble impressionnant, mais il ne représente que 6 % d’augmentation du budget actuel des soins palliatifs, inflation comprise.
Ma question est simple : comment, avec un budget en hausse de seulement 6 %, comptez-vous doubler l’offre de soins palliatifs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. Patrick Hetzel
Excellent !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités
Vous soulignez à juste titre l’importance des soins palliatifs dans notre pays. Aujourd’hui, nous possédons un peu plus de 140 unités de soins palliatifs et 420 équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP).
M. Patrick Hetzel
C’est insuffisant !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Oui, c’est insuffisant. Jusqu’à vendredi dernier, vingt et un départements ne possédaient pas de services de soins palliatifs. J’ai annoncé ce jour-là, lors d’un déplacement en Corrèze, la création d’un service de soins palliatifs à l’hôpital de Brive-la-Gaillarde. Il reste donc vingt départements qui n’en disposent pas. Voilà le premier sujet sur lequel nous devons travailler.
Le deuxième est l’organisation concrète d’une filière. Vous êtes professeur des universités et praticien hospitalier, monsieur Juvin ; vous savez donc que cette discipline n’est pas organisée. Elle ne compte actuellement aucun professeur des universités, aucun chef de clinique, aucun assistant chef de clinique.
M. Fabrice Brun
Que faites-vous depuis sept ans ?
Mme Catherine Vautrin, ministre
Pour créer une culture des soins d’accompagnement en fin de vie, nous devons travailler en lien avec la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Sylvie Retailleau, dans le cadre du prochain plan d’organisation de la filière, et prévoir des enseignements universitaires. Les moyens ne sont pas la seule question : l’enseignement des soins palliatifs est indispensable ; or seules quelques heures de cours leur sont aujourd’hui consacrées dans les dix ans que durent les études médicales.
M. Fabrice Brun
Comment luttez-vous contre les déserts médicaux ?
Mme Catherine Vautrin, ministre
Quant aux moyens, il faut des maisons d’accompagnement et davantage d’unités de soins palliatifs, notamment des équipes mobiles reliées au réseau d’hospitalisation à domicile. On peut évidemment se concentrer sur les chiffres, mais la véritable question est notre capacité à travailler sur les quinze mesures du rapport du professeur Franck Chauvin…
M. Thibault Bazin
Il faut des moyens !
Mme Catherine Vautrin, ministre
…et à trouver des réponses pour 2024, 2025 et 2026. Tel est le sens de l’engagement du Gouvernement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – M. Cyrille Isaac-Sibille applaudit aussi.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Juvin.
M. Philippe Juvin
Vous n’avez pas répondu sur l’insuffisance des moyens financiers. (Mme Émilie Bonnivard applaudit.) Le compte n’y est pas. (« Eh non ! » sur les bancs du groupe LR.) J’alerte solennellement sur le sous-financement des soins palliatifs et je pose une question dont chacun doit mesurer la gravité : existe-t-il un risque, demain, de suicides assistés par défaut d’accès aux soins palliatifs ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)
M. Jean-Yves Bony
Elle est là la question !
M. Patrick Hetzel
Il a raison !
M. Philippe Juvin
Ce n’est pas une petite question, d’autant que les soins palliatifs ne sont pas les seuls à devoir être financés. (Mme Charlotte Parmentier-Lecocq applaudit.) Je pense à la psychiatrie : voyez combien il est difficile de trouver un psychiatre aujourd’hui. Or on sait que les malades du cancer en fin de vie se suicident deux à quatre fois plus souvent quand ils n’ont pas de psychiatre. Là encore, c’est le suicide par défaut de moyens.
Et il y a la question sociale, qui est immense. Quand on ne peut pas se payer un ordinateur à commande oculaire et un fauteuil adapté à 25 000 euros, quand les conditions de logement sont misérables, les conditions matérielles rendent la vie trop dure et pèsent inévitablement sur la décision. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
On évoque souvent la fraternité, mais sa véritable traduction ne devrait-elle pas être le développement des soins palliatifs et de la psychiatrie, l’amélioration des conditions matérielles et la lutte contre l’isolement ? Il faut prévenir le suicide en se souciant de ses causes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs des groupes RN et LFI-NUPES.)
M. Patrick Hetzel
Très juste !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Catherine Vautrin, ministre
Nous pouvons nous accorder sur un point : les maisons d’accompagnement apportent des réponses concrètes et l’objectif est de les développer. Jamais, dans notre pays, il n’a été question de parler d’aide à mourir sans un plan d’accompagnement des soins palliatifs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
M. Gabriel Attal, Premier ministre
Très juste !
M. Grégoire de Fournas
Il n’y a pas de plan !
Lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur
Mme la présidente
La parole est à M. Jérémie Patrier-Leitus.
M. Jérémie Patrier-Leitus
Le 2 juin 1941, le régime de Vichy promulgue le statut des Juifs et limite l’accès des étudiants juifs aux universités. Quatre-vingts ans après, nous pensions que ces faits appartenaient aux heures les plus sombres de notre histoire. Quatre-vingts ans après, nous pensions que la bête immonde de l’antisémitisme était gavée de sang après la Shoah. Et pourtant, elle renaît. Le poison de l’antisémitisme vient pourrir notre société – on dirait que ce que je raconte n’intéresse pas certains de nos collègues. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Il se déverse même au cœur de nos universités.
Mardi dernier, à Sciences Po Paris, institution prestigieuse qui forme depuis le XIXe siècle les dirigeants de notre pays et dans laquelle j’enseigne depuis plus de sept ans, une soixantaine d’individus ont envahi et bloqué l’amphithéâtre Émile Boutmy qu’ils se sont empressés de renommer « amphithéâtre Gaza ». Parce que de confession juive, des élèves ont été pris à partie par des émeutiers de pacotille (« C’est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES),…
Mme Clémence Guetté
Menteur !
M. Jérémie Patrier-Leitus
…des dictateurs du dimanche, des insurgés en mal de révolution. « Ne la laissez pas entrer, c’est une sioniste », a-t-on entendu.
Mme Sophia Chikirou
Une factieuse !
M. Jérémie Patrier-Leitus
À d’autres étudiants qui avaient réussi à entrer, on a demandé de dire « La Palestine vaincra ! » sous peine d’être expulsés de la salle.
En mai 1968, dans les amphis, c’était « sous les pavés la plage » ; aujourd’hui, c’est la haine, la haine du sioniste, la haine du Juif. (Applaudissements prolongés sur les bancs des groupes HOR et RE, ainsi que sur quelques bancs des groupes RN, LR et Dem.)
Ces faits sont graves. Ils sont une meurtrissure pour notre pays, une blessure pour notre République, et demandent une réponse implacable. Je veux, à cet égard, vous remercier, monsieur le Premier ministre, de vous être rendu le jour même à Sciences Po Paris. Malheureusement, les stigmatisations et les ostracisations dont sont victimes les étudiants juifs ne s’arrêtent pas aux murs de cet établissement : 91 % des étudiants juifs disent avoir déjà été victimes d’un acte antisémite au cours de leurs études.
Monsieur le Premier ministre, quelles mesures votre gouvernement compte-t-il prendre pour lutter contre cette dérive ? (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR, RE et LR.)
M. Meyer Habib
Bravo !
Mme la présidente
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Gabriel Attal, Premier ministre
Liberté, Égalité, Fraternité : la devise de la République française fonde les valeurs républicaines qui doivent être respectées partout et toujours (Applaudissements sur quelques bancs des groupes HOR et RE), notamment dans les établissements de l’enseignement supérieur, où l’on forme notre jeunesse. Pas une fac, pas une école ne peut être au-dessus des lois ; pas une fac, pas une école ne peut les appliquer à la carte (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et LR) : je le dis ici très clairement.
Vous l’avez rappelé, avec Sylvie Retailleau, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, je me suis rendu à Sciences Po Paris et j’ai annoncé plusieurs mesures : tout d’abord, le déclenchement par le Gouvernement de l’article 40 du code de procédure pénale pour faire la lumière sur le déroulement des faits ; ensuite, la nomination d’un administrateur provisoire, dont la feuille de route sera extrêmement claire – faire respecter les principes républicains à Sciences Po Paris – ; enfin, le recrutement de la future direction sur la base de cette feuille de route.
M. Meyer Habib
À Lyon, c’est pareil !
M. Gabriel Attal, Premier ministre
Mais vous l’avez souligné, l’enjeu est beaucoup plus large. Depuis des années, à Sciences Po Paris comme dans d’autres établissements, les débordements scandaleux se sont multipliés du fait d’une minorité agissante et dangereuse.
Je le dis ici : je n’accepterai jamais qu’une fac ou une école devienne, en France, la voie d’eau par laquelle déferlera une idéologie nord-américaine qui, sous couvert d’une certaine modernité, prône l’intolérance, le refus du débat, et bride la liberté d’expression et les opinions contradictoires. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem, et sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Thomas Ménagé applaudit aussi.) Nous serons collectivement intraitables.
L’autonomie de l’enseignement supérieur, ce n’est pas et ce ne sera jamais, une autonomie des valeurs républicaines. Avec la ministre Sylvie Retailleau, nous ne lâcherons rien, nous serons mobilisés, nous serons intraitables (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES) contre toutes les dérives, notamment les dérives antisémites que vous avez évoquées. Dès qu’il faudra réaffirmer nos principes républicains, nous le ferons. Nous continuerons à placer la lutte contre ceux qui en veulent à nos principes républicains…
Mme Caroline Parmentier
Tu parles !
M. Gabriel Attal, Premier ministre
…au cœur des contrats que nous signerons avec les universités et les écoles,…
Mme Caroline Parmentier
Sept ans pour rien !
M. Gabriel Attal, Premier ministre
…afin que le financement public, l’argent des Français, contribue systématiquement au respect de nos valeurs et de nos principes républicains. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.)
Mme Caroline Parmentier
Plus personne ne vous croit !
M. Gabriel Attal, Premier ministre
L’enseignement supérieur doit donner le goût du débat, de la réflexion, jamais celui de la haine ou de la discrimination. Nous serons intraitables sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem, ainsi que sur quelques bancs des groupes LR et HOR.)
M. Laurent Croizier
Bravo !
Lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Odoul.
M. Julien Odoul
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. Il y a douze ans, jour pour jour, le 19 mars 2012, le terroriste islamiste Mohamed Merah semait la mort et l’horreur à l’école juive Ozar Hatorah de Toulouse. N’oublions jamais les victimes innocentes de cet attentat ignoble (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Meyer Habib applaudit aussi) : Gabriel Sandler, 4 ans, Arié Sandler, 5 ans, Myriam Monsonego, 7 ans, Jonathan Sandler, 30 ans.
Douze ans après, le cancer de l’antisémitisme contamine les plus grandes écoles et les universités.
Mme Clémence Guetté
Vous mélangez tout !
M. Julien Odoul
Fondée pour éveiller les consciences et former les élites, Sciences Po Paris s’est transformée en centre de recrutement islamo-gauchiste.
M. Meyer Habib
Absolument !
M. Julien Odoul
Après le Hidjab Day et la promotion du voile islamique en 2016, après la soumission à l’idéologie wokiste, Sciences Po Paris dérive vers l’antisémitisme. (M. Fabien Roussel s’exclame.) Depuis le 7 octobre 2023, des étudiants de Sciences Po distribuent des tracts où les terroristes du Hamas sont présentés comme des résistants. Le 5 mars, Rima Hassan, militante pro-Hamas et candidate LFI aux élections européennes, a été reçue en grande pompe pour une conférence. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Nathalie Oziol s’exclame.) Le 12 mars, un nouveau cap a été franchi avec l’occupation d’un amphithéâtre rebaptisé « Gaza » par une soixantaine de militants fanatisés, scandant leur haine d’Israël. Selon l’Union des étudiants juifs de France, plusieurs étudiants ont été menacés et insultés parce qu’ils étaient juifs.
Pour le leader de l’extrême gauche islamiste, Jean-Luc Mélenchon, c’est un simple incident. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Meyer Habib applaudit aussi.)
Mme Sophia Chikirou
Caricature !
M. Julien Odoul
Les étudiants juifs ont peur de cette montée de la haine. Ils craignent aussi vos ambiguïtés et vos lâchetés. Monsieur le Premier ministre, au-delà de l’enquête administrative et de vos coups de menton, êtes-vous prêt à rompre vos liens avec le Qatar, devenu le banquier de votre gouvernement, qui finance, soutient et héberge le groupe terroriste et antisémite du Hamas ? (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Meyer Habib applaudit aussi.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche
Je reprends les propos du Premier ministre : oui, l’antisémitisme est un « poison ». L’antisémitisme, quels que soient ses masques, est un fléau. Notre ligne est claire, c’est la tolérance zéro. (Mme Caroline Parmentier s’exclame.)
L’université fait partie intégrante de la société. Elle partage ses forces et ses lumières, mais elle doit aussi affronter ses tensions et ses maux les plus sombres.
Vous m’avez interrogée, en particulier, sur les événements survenus à Sciences Po Paris. Comme à chaque fois, ma méthode, c’est l’objectivation des faits. (Exclamations sur les bancs du groupe RN. – M. Julien Odoul mime des mouvements de brasse.) C’est tout le sens du signalement au procureur de la République, en application de l’article 40 du code de procédure pénale, que Gabriel Attal et moi avons effectué, afin que la justice soit saisie et fasse son travail.
Nous nous sommes rendus sur place. En effet, l’amphithéâtre a fait l’objet d’un envahissement sauvage et le cadre qui permet un débat serein n’a manifestement pas été respecté. Toute cette assemblée connaît notre entière mobilisation en faveur de la lutte contre l’antisémitisme. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Monsieur le député, ne comptez pas sur moi pour participer au blanchiment du parti des héritiers de Pétain (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, Dem et GDR-NUPES – Vives exclamations sur les bancs du groupe RN), des gudards et des identitaires.
M. Fabien Roussel
Très bien
M. Jean-Philippe Tanguy
Quelle honte !
M. Thomas Ménagé
Faites votre travail !
Mme Sylvie Retailleau, ministre
Je ne fermerai pas plus les yeux sur les agissements des groupes communautaristes qui défient la République et ses principes. (Brouhaha.)
Mme la présidente
Un peu de silence !
Mme Sylvie Retailleau, ministre
Je souhaite continuer à suivre cette ligne : tolérance zéro contre l’antisémitisme, la haine de l’autre et toutes les discriminations.
Monsieur le député, ne faites pas offense à vos collègues en leur mentant : Sciences Po Paris n’est pas une zone interdite pour le Rassemblement national, puisque votre collègue, Sébastien Chenu, y donne une conférence ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE, M. Guillaume Gouffier Valente et Mme Stella Dupont s’étant levés, et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, Dem et HOR. – M. André Chassaigne applaudit aussi. – Protestations sur les bancs du groupe RN.)
M. Jean-Philippe Tanguy
Bonne à rien !
M. Erwan Balanant
C’est honteux ce qu’il vient de dire ! (M. Christophe Blanchet désigne du doigt le banc de M. Jean-Philippe Tanguy.)
Plan contre le narcotrafic à Marseille
Mme la présidente
La parole est à M. Lionel Royer-Perreaut.
M. Lionel Royer-Perreaut
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. Yoda et DZ Mafia sont deux clans, deux organisations criminelles qui se partagent le juteux marché des narcotrafics à Marseille.
Ce matin, le Président de la République, le ministre de l’intérieur et le garde des sceaux se sont rendus à La Castellane, dans la cité phocéenne, pour lancer l’opération Place nette XXL. Après le renforcement des effectifs de police, de justice et de douane dans le cadre du plan Marseille en grand, après les innombrables opérations de pilonnage des lieux de trafics, cette opération de grande envergure vient consolider et conforter la guerre sans merci que l’État et le Gouvernement livrent à ces clans criminels. Jamais, jamais, aucun gouvernement n’aura déployé autant de moyens pour lutter contre ces organisations tentaculaires.
L’année 2023 a été particulièrement meurtrière : quarante-neuf personnes, ont été assassinées, parmi lesquelles quatre innocents. (M. Sébastien Delogu s’exclame.) En cet instant, je pense à Socayna, qui habitait dans la cité de Saint-This, située dans ma circonscription, qui est morte dans sa chambre alors qu’elle étudiait tranquillement. La réalité, c’est que ces trafics gangrènent tout Marseille, et pas seulement les quartiers nord. De l’Ouest à l’Est, du Sud au Nord, ces deux clans font régner la terreur et assignent à résidence des milliers d’habitants. Des tirs ont retenti ce week-end, en plein après-midi, à la Cayolle, et, la semaine dernière, à Château Saint-Loup ; à chaque fois, à deux pas d’une école.
M. Fabien Roussel
Que fait Macron ? Qu’il envoie des troupes !
M. Lionel Royer-Perreaut
Sans parler de ces noyaux villageois, tels La Capelette ou Saint-Loup, qui voient se multiplier des commerces dont la seule utilité est de blanchir l’argent sale. Ces derniers jours, les magistrats marseillais ont vivement réagi à la tournure que prenaient ces événements et à leur généralisation sur le territoire national.
Aussi, monsieur le Premier ministre, pouvez-vous indiquer à la représentation nationale l’esprit de ces opérations Place nette, les résultats déjà observés et ceux attendus ? Les Marseillais, tous les Marseillais, ont besoin d’être rassurés. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
Mme la présidente
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Gabriel Attal, Premier ministre
Vous le savez bien, vous qui, au quotidien, êtes auprès des Marseillais, des jeunes, des familles, des femmes et des hommes des quartiers : la drogue est la mère de tous les vices.
M. Maxime Minot
Allô ? Ce n’est pas du tout téléphoné !
M. Gabriel Attal, Premier ministre
Elle détruit des familles entières, elle corrompt notre jeunesse, elle broie des vies. Elle est le berceau de toutes les délinquances, de la violence, du trafic d’armes, des règlements de comptes. Le trafic de drogue est une gangrène pour notre pays. Il ravage des quartiers, des villes, parfois même des villages. (M. Sébastien Delogu s’exclame.) Quand on emprunte la voie du trafic de drogue, il y a souvent la mort au bout du chemin.
Monsieur le député, je connais votre détermination, votre implication. Devant vous, comme devant toute la représentation nationale, j’en fais le serment, avec le Président de la République et le ministre de l’intérieur : nous ne faiblirons jamais, nous ne renoncerons jamais, nous n’aurons jamais la main qui tremble. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) La lutte contre les trafiquants est une priorité ; c’est même un devoir national.
Nous mènerons cette bataille sans compter, à Marseille, comme sur tout le territoire. Nous nous attaquerons à tous les réseaux, de la base jusqu’au sommet. (M. Sébastien Delogu s’exclame.) Nous nous attaquerons un à un à tous les points de deal.
Avec vous et, je l’espère, toute la représentation nationale, je veux rendre hommage aux forces de l’ordre qui se battent au quotidien et accomplissent un travail absolument exceptionnel (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR, et sur plusieurs bancs des groupes LR. – M. Roger Chudeau applaudit aussi), et aux magistrats qui dirigent les enquêtes et qui n’abandonnent jamais rien. (M. Sébastien Delogu s’exclame.)
Ce matin, nous avons décidé de frapper un grand coup. Nous avons donné un grand coup de pied aux trafics de drogue à Marseille, en menant une opération XXL, qui est préparée depuis des mois, après un travail d’enquête exceptionnel, accompli sous l’autorité du parquet. L’opération menée dans tous les quartiers – une cité de votre circonscription est d’ailleurs concernée –, et pas seulement dans les quartiers nord, avec le déploiement de 900 policiers et gendarmes, des moyens aériens et l’appui du Raid – recherche assistance intervention dissuasion –, était d’une telle ampleur que le Président de la République a choisi de s’y rendre et de venir saluer le travail de tous ceux qui y ont contribué. Comme il l’a annoncé tout à l’heure, elle a conduit à plus de quatre-vingts interpellations et à une soixantaine de gardes à vue.
M. Pierre Cordier
Gérald Darmanin, sors de ce corps !
M. Gabriel Attal, Premier ministre
Faire place nette, c’est dégager le terrain, c’est affirmer la loi et l’ordre partout, c’est aussi rester sur le terrain pour éviter que les points de deal ne soient réinstallés à peine la police partie – pendant trois semaines, les moyens policiers resteront engagés. (MM. Sylvain Maillard et Didier Parakian applaudissent.)
M. Emeric Salmon
Donc, dans trois semaines, c’est terminé ?
M. Gabriel Attal, Premier ministre
Mais tout n’a pas commencé ce matin, loin de là. La lutte contre les trafics, c’est évidemment un marathon. Elle dépend, à long terme, de notre capacité à ne jamais baisser la garde. À Marseille, le pilonnage des points de deal, qui est réalisé depuis des années, a des résultats : démantèlement définitif de soixante-dix points de deal, record des saisies – 7 tonnes de cannabis, par exemple – et du nombre d’interpellations de trafiquants en 2023, qui s’est élevé à 2 350. C’est le résultat de notre stratégie et de notre détermination. C’est le fruit des moyens exceptionnels déployés à Marseille, notamment grâce au plan Marseille en grand, annoncé par le Président de la République. Je le rappelle, 450 policiers supplémentaires y ont été affectés en trois ans, trois compagnies de CRS sont déployées chaque jour, 50 magistrats et près de 100 greffiers supplémentaires y ont pris leurs fonctions en sept ans.
Je sais que vous partagez mon objectif : ne jamais laisser les trafiquants dormir tranquille. La loi se rappellera toujours à eux ; qu’ils sachent que la République viendra toujours les chercher. Nous continuerons, ce n’est qu’un début. D’autres opérations seront menées, que ce soit à Marseille ou ailleurs en France. Nous agirons sur tous les fronts. Je veux que nous tapions au porte-monnaie des dealers ; il y a des traces de sang sur l’argent de la drogue. Nous renforcerons notre action, nous bloquerons les avoirs des trafiquants, comme je m’y suis engagé dans ma déclaration de politique générale.
En matière de lutte contre les stupéfiants, face aux donneurs de leçons qui n’ont jamais rien tenté ni rien fait en la matière (Applaudissements sur les bancs du groupe RE) ; face aux défaitistes qui nous expliquent à longueur de journée qu’on n’y arrivera jamais, et qui méprisent en permanence le travail de nos forces de l’ordre ; face aux laxistes qui croient encore que la consommation de drogue est bien pardonnable, qu’elle est festive…
M. Fabien Di Filippo
Il y en a quelques-uns dans votre majorité !
M. Gabriel Attal, Premier ministre
…et que la lutte contre les trafics serait une question de morale, Gérald Darmanin, Éric Dupond-Moretti et moi avons un devoir vis-à-vis de ces habitants, dont la vie est gâchée par les trafics, et de ces familles qui ont perdu un enfant ou un proche dans un règlement de compte. Ce devoir, c’est de faire respecter partout la loi et l’ordre, de ne jamais céder un millimètre aux trafiquants. Alors, cage d’escalier par cage d’escalier, point de deal par point de deal, nous combattrons les trafiquants et le trafic de drogue. Oui, cela prendra du temps. Oui, il faudra encore fournir des efforts. Mais non, nous ne renoncerons jamais. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE, M. Didier Parakian s’étant levé, ainsi que sur les bancs des groupes Dem et HOR.)
Reprise du site Ascometal
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Dharréville.
M. Pierre Dharréville
Monsieur le Premier ministre, il faudra renforcer le service public, notamment celui de la police et la justice, au-delà de Marseille. Or on ne peut que s’inquiéter des annonces budgétaires.
Ce n’est pas la première fois qu’Ascometal fait les frais du Monopoly industriel. Jeudi 14 mars, Swisssteel annonçait de façon scandaleuse et irresponsable à ses actionnaires son désengagement et le risque d’une réorganisation judiciaire. Je veux faire résonner ici la colère et l’inquiétude des salariés.
Voici quelques mois, le groupe Swisssteel avait déjà déclaré qu’il souhaitait se séparer du site de Fos-sur-Mer, qu’il avait un repreneur pour celui d’Hagondange, et qu’il conserverait celui de Dunkerque. Dans ce contexte, l’État confirmait l’allocation d’aides au groupe, qui s’engageait à soutenir les sites et à trouver des repreneurs. Or il y a des pistes, mais aucune n’a pour l’heure abouti.
Cette annonce intempestive place l’ensemble des sites dans des situations de grande fragilité. Le site de Fos-sur-Mer est un fleuron industriel qui produit de façon décarbonée des aciers spéciaux uniques en Europe, grâce à des savoir-faire d’excellence. À l’heure de la décarbonation et de la nouvelle industrialisation qui se profilent sur notre territoire, il a toute sa place pour répondre à des besoins réels. Derrière lui, c’est toute une série de fournisseurs et de cotraitants, ainsi que leurs salariés, qui sont concernés. Le recours à la procédure judiciaire conduirait à des ruptures de continuité gravement préjudiciables.
Il convient donc de tout faire pour l’éviter et sécuriser les capacités de production ainsi que la filière du tissu. Swisssteel ne peut se dédouaner de ses responsabilités. La puissance publique doit également engager la sienne pour garantir l’avenir de la filière et placer les entreprises sous sa protection en envisageant, le cas échéant, une nationalisation temporaire, le temps de permettre aux projets actuels de pérennisation d’aboutir. Les salariés veulent qu’Ascometal vive. Les organisations syndicales souhaitent vous rencontrer en urgence. Quelles dispositions envisagez-vous pour préserver notre outil industriel ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et Écolo-NUPES.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’industrie et de l’énergie
Nous sommes évidemment aussi sensibles que vous à la situation du groupe Ascometal, dont l’actionnaire, Swisssteel, avait repris l’ensemble des cinq sites français il y a cinq ans. Les Dunes, avec 180 salariés, Hagondange avec 600 salariés, les deux sites de Moselle et Meurthe-et-Moselle – connus sous le nom de Marcus – qui comptent 120 salariés, ainsi que le site de Fos-sur-Mer, que vous connaissez bien, qui en compte 380, risquent en effet d’être vendus. Des repreneurs ont témoigné de marques d’intérêt à l’égard de ces sites qui ont, vous l’avez rappelé, des atouts indéniables.
Ici comme ailleurs, nous suivons la situation de près pour que les marques d’intérêt se concrétisent. Une doctrine s’est en effet imposée en la matière : lorsqu’un site industriel est vendu, nous cherchons, tout d’abord, à nous assurer que s’offre à lui des perspectives d’affaires crédibles ; ensuite, que ceux qui envisagent de le reprendre soient eux-mêmes crédibles. Lorsque ces deux conditions sont réunies, l’État est prêt à s’engager. (Mme Clémence Guetté s’exclame.)
En l’occurrence, nous sommes d’accord, les sites bénéficient de perspectives et de repreneurs crédibles. Nous tomberons également d’accord sur le fait que l’actionnaire Swisssteel, qui se retire de France, doit s’engager publiquement à procéder avec soin – je lui ai demandé de le faire et le lui rappellerai dans les heures qui viennent. Notre désaccord portera sans doute sur les solutions envisagées – notamment sur la nationalisation, solution de dernier carat, selon moi –…
M. Fabien Roussel
Vous n’y êtes donc pas fermé…
M. Roland Lescure, ministre délégué
…mais on doit pouvoir faire plus et faire mieux. Je suis convaincu que ce sera le cas.
Il y a quelques mois, un de vos collègues, M. Fabien Roussel, m’interrogeait à propos de l’entreprise Valdunes. Je lui avais alors indiqué que nous ferions tout pour trouver un repreneur crédible sur la base de perspectives crédibles, et que nous pourrions alors engager les moyens de l’État. C’est en train d’arriver.
M. Fabien Roussel
C’est vrai.
M. Roland Lescure, ministre délégué
Gardons espoir. À Dunes comme à Valdunes, à Fos-sur-Mer comme à Hagondange, nous ferons tout pour donner des perspectives à Ascometal. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Dharréville.
M. Pierre Dharréville
Nous comptons sur votre détermination et vous pouvez compter sur la nôtre. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR-NUPES et Écolo-NUPES.)
Situation des finances publiques
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Monsieur le ministre de l’économie, la France de 2024 n’est plus celle de 2017.
M. Maxime Minot
Tu as été au pouvoir pourtant !
M. Philippe Vigier
Le chômage a profondément diminué, la réindustrialisation est une réalité, l’économie a été sauvée pendant le covid grâce au « quoi qu’il en coûte ». Nul ne peut contester non plus que, avec 3 000 milliards d’euros de dette, notre modèle social est fracturé, tout comme notre capacité à relever les défis de demain. Il est selon nous évident qu’il faut passer de l’État-providence à un État juste et efficace, aux finances publiques assainies.
Vous avez poussé un cri, il y a quelques jours, pour expliquer que le niveau de la dette publique était insoutenable ; nous le partageons d’autant plus que nous combattons en ce sens depuis plus de quinze ans. Cependant, cela ne signifie pas qu’il faille donner à l’aveugle un coup de rabot aux dépenses publiques. Un État efficace et juste doit aussi faire en sorte que la valeur soit mieux partagée, que le pouvoir d’achat augmente et que les feuilles de paie soient plus conséquentes. Il doit également lutter avec plus d’acharnement contre toutes les dérives fiscales, les fraudes et, bien sûr, les spéculations. Il doit réorganiser notre système de santé autour de la prévention, car 1 euro dépensé en prévention permet d’économiser 10 euros de soins curatifs. Un État efficace et juste responsabilise tous les acteurs et libère les énergies. Avec 3 000 milliards d’euros de dette, on ne peut plus faire comme avant ! Il faut dire la vérité aux Français : êtes-vous prêt à bâtir pour les Françaises et les Français, avec les parlementaires, les collectivités et les partenaires sociaux, un nouveau modèle social protecteur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Pierre Cordier
Et de la dette !
M. Maxime Minot
Il écrit aussi des romans !
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Je vous remercie, monsieur le député, ainsi que le groupe Démocrate et la majorité, pour votre lucidité et l’engagement dont vous témoignez pour rétablir l’équilibre des finances publiques : je sais que cela fait partie de votre ADN.
Un député du groupe LFI-NUPES
Rends l’ISF !
M. Bruno Le Maire, ministre
Je rappellerai très brièvement ce qui s’est passé depuis 2017. Jusqu’à 2019, cette même majorité, seule et sans le soutien de qui que ce soit, a rétabli les finances publiques, est revenue sous les 3 % de déficit et a diminué la dette. (Vives protestations sur les bancs du groupe LR.)
M. Pierre-Henri Dumont
C’est une blague !
M. Raphaël Schellenberger
Ce n’est pas possible d’entendre ça ! Il faut le mettre à la questure, pas au ministère de l’économie !
M. Bruno Le Maire, ministre
Nous avons ensuite été confrontés à deux crises majeures : le covid, crise économique la plus grave depuis 1929, puis la crise inflationniste la plus grave depuis les années 1970. Nous avons protégé les Français et instauré, sous l’autorité du Président de la République, le « quoi qu’il en coûte ». (Brouhaha.) Il s’agissait de décisions justes, nécessaires, et protectrices : elles ont sauvé des entreprises, des salariés et l’économie française. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Alors que nous revenons à la normale, j’appelle à la prise de conscience collective : nous devons couper dans un certain nombre de dépenses afin de revenir sous les 3 % de déficit public en 2027 et rétablir l’équilibre des finances publiques d’ici une dizaine d’années.
M. Sébastien Jumel
Il faut écrire un livre !
M. Bruno Le Maire, ministre
J’appelle donc toutes les forces politiques, de la majorité comme de l’opposition, à me retrouver au ministère de l’économie et des finances, avec le ministre délégué aux comptes publics Thomas Cazenave, pour examiner les économies possibles et nécessaires : faites-moi des propositions ! Arrêtez de me proposer des dépenses supplémentaires ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Protestations et bruit sur les bancs des groupes RN et LFI-NUPES.)
M. Patrick Hetzel
Vous avez rejeté nos propositions !
M. Bruno Le Maire, ministre
Le slogan « je dépense donc je suis » est trop répandu dans la classe politique française. Il doit être remplacé par celui-ci : « j’économise, donc je suis, donc je protège ! » (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem. – Hourvari.)
Accidents du travail
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophia Chikirou.
Mme Sophia Chikirou
Un échafaudage s’effondre à Montreuil : un ouvrier meurt. Un pont s’effondre à Toulouse sur le chantier de la ligne B : un ouvrier meurt. Un tracteur se retourne en Creuse : un jeune agriculteur de 17 ans meurt. Les accidents du travail qui blessent, mutilent, handicapent à vie ou tuent s’établissent à environ 800 000 cas par an, selon les propres chiffres de l’Assurance maladie. La France est le pays européen qui connaît le plus d’accidents par travailleur.
Madame la ministre du travail, votre gouvernement a une grande responsabilité dans chacun de ces drames. Depuis 2017, vous avez méticuleusement saccagé les protections des travailleurs, à tel point qu’un collectif de familles – Stop à la mort au travail – s’est constitué en 2023 pour dire stop à l’indifférence (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES) ; il manifestait sous vos fenêtres le 4 mars dernier. La semaine dernière, les assises nationales de la sécurité et de la santé au travail ont rassemblé plus de 500 personnes. Le 25 avril prochain, nous serons des milliers, en France et en Europe, à manifester pour dénoncer la dégradation des conditions de travail.
Vous semblez ne rien entendre. Vous n’entendez ni les syndicats des travailleurs, ni les victimes, ni leurs familles. Je me fais donc l’écho de leurs revendications : ils veulent le retour des CHSCT – les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (Applaudissements prolongés et de plus en plus vifs sur les bancs du groupe LFI-NUPES) ; ils veulent davantage d’inspecteurs du travail ; des contrôles dans les secteurs de la sous-traitance et de l’intérim ; la prise en charge des frais de justice et l’accompagnement psychologique des familles de victimes ; le renforcement des sanctions contre les employeurs. Allez-vous oui ou non répondre à leurs revendications ? Comptez-vous rétablir les 100 postes d’inspecteurs du travail prévus en 2024 que Bruno Le Maire a choisi de supprimer ? (« Bravo » et vifs applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES, dont les députés se lèvent. – Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et Écolo-NUPES.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités
Je crois que nous pouvons nous retrouver sur un point : chaque accident du travail est un drame. Personne, dans cet hémicycle, ne dira le contraire. Voyons les chiffres : en 2021, 645 morts au travail ; en 2022, 738 morts. L’augmentation est incontestable. Je préciserai toutefois deux choses importantes, afin de bien considérer la situation dans son ensemble : la population salariée a augmenté et les malaises sont désormais considérés comme des accidents du travail, ce qui n’était pas le cas auparavant. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
Les inspecteurs du travail mènent les enquêtes, analysent les causes des accidents et, grâce à ces retours d’expérience, permettent d’éviter que ces situations ne se reproduisent. (Mme Ségolène Amiot s’exclame.) Je souligne l’importance de leur travail.
Un député du groupe LFI-NUPES
Ce n’est pas assez !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Pour discuter avec les Dreets – les directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités –, je sais combien les inspecteurs du travail ont besoin d’être soutenus, notamment lorsqu’ils sont jetés en pâture, comme cela a pu arriver lors de certaines manifestations, il y a quelques mois. (Mme Clémence Guetté s’exclame.) Je tiens à redire l’attachement du Gouvernement à leur travail. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Ségolène Amiot
Rendez les CHSCT et les inspecteurs !
Mme Catherine Vautrin, ministre
C’est un sujet trop grave pour qu’on en parle autrement que dans le calme !
Il faut également pouvoir sensibiliser, d’abord l’ensemble des salariés : les jeunes dans les centres de formation d’apprentis (CFA), les travailleurs détachés, les travailleurs de certaines branches en particulier – des travaux sur cordes ou du transport routier de marchandises, par exemple. De ce point de vue, la mobilisation du 28 avril, date de la journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail, est utile. Ensuite, les entreprises sont responsables et doivent donc s’engager à promouvoir la prévention des accidents du travail : c’est la première condition du respect de chacun des salariés. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophia Chikirou.
Mme Sophia Chikirou
Les inspecteurs du travail étaient 2 100 en 2011, ils sont moins de 1 800 actuellement ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo-NUPES.) Bruno Le Maire supprime les 100 postes qui étaient prévus cette année ! Ne faites pas semblant de vous intéresser aux inspecteurs du travail ! (Mêmes mouvements.)
Proposition de loi « bien vieillir »
Mme la présidente
La parole est à Mme Annie Vidal.
Mme Annie Vidal
Madame la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées, vous étiez dans un Ehpad de ma circonscription vendredi dernier, où vous avez entendu les résidents, leurs familles, et les professionnels. Je vous en remercie beaucoup. Vous avez également évoqué la proposition de loi portant diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie qui, après un parcours législatif ponctué de rebondissements et une commission mixte paritaire (CMP) conclusive, sera soumise au vote de l’Assemblée en fin de journée.
Face à la transition démographique qui est la nôtre – pour mémoire, les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans dès 2030 –, ce texte constitue une étape dans la construction de la société du bien vieillir et de la longévité. Défendu avec conviction par ma collègue Laurence Cristol et moi-même, avec votre soutien, il vise à inscrire dans la loi des mesures concrètes pour améliorer le quotidien de nos aînés, de leurs proches et des professionnels qui les accompagnent, posant ainsi les bases d’une réforme à venir à la hauteur des enjeux.
Toutefois, il reste encore beaucoup à faire,…
M. Jérôme Guedj
Eh oui !
Mme Annie Vidal
…et la situation financière préoccupante des Ehpad vient témoigner de l’urgence de la poursuite et de l’amplification de nos actions. Si les établissements publics sont confrontés à un déficit cumulé inédit, les opérateurs privés ne sont pas épargnés. Quant aux services à domicile, ils connaissent eux aussi des difficultés structurelles.
M. Boris Vallaud
Et donc ?
Mme Annie Vidal
Aussi, madame la ministre, pourriez-vous indiquer, devant la représentation nationale, quelles seront les prochaines étapes ?
M. Jérôme Guedj
Ah ?
Mme Annie Vidal
Quelle suite sera donnée à cette proposition de loi ? Quelles mesures votre gouvernement prendra-t-il pour défendre une politique durable du grand âge et de l’autonomie, et permettre ainsi à chacun de vieillir selon ses choix : à domicile, en Ehpad, ou en habitat inclusif ?
M. Jérôme Guedj
La loi « grand âge » ou rien !
M. Boris Vallaud
La loi « grand âge » !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées
Permettez-moi de saluer le travail que vous avez mené avec votre collègue Laurence Cristol. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.) Vous l’avez dit, le défi démographique posé par le grand âge est considérable. Pour s’y préparer, nous nous sommes pleinement mobilisés, au moyen de politiques publiques volontaristes. Je me permets de les rappeler, car « gâteau avalé, gâteau oublié ». (Sourires.) Nous avons créé les services publics départementaux de l’autonomie, renforcé les contrôles des Ehpad (Brouhaha) – là non plus, je ne jette pas d’anathème aux professionnels qui travaillent –, ou encore soutenu l’habitat intermédiaire et le maintien à domicile, sans oublier les nombreuses mesures pour rendre le secteur plus attractif.
Nous y avons mis les moyens, en instituant la cinquième branche,…
M. Jérôme Guedj
Elle est vide !
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée
…que tant d’élus avaient promise et que ce gouvernement a créée.
M. Jean-Yves Bony
Il n’y a jamais eu autant d’Ehpad en déficit !
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée
Rien que cette année, 2,6 milliards d’euros supplémentaires y sont alloués ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) La hausse se poursuivra puisque son budget atteindra 45 milliards en 2027, contre 40 milliards actuellement.
La proposition de loi portant diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie s’inscrit dans le prolongement de notre action en apportant une réponse concrète aux attentes des personnes âgées.
M. Jérôme Guedj
Et la loi « grand âge » ! C’est un engagement d’Élisabeth Borne !
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée
À celles et ceux qui s’inquiètent et estiment que ce n’est pas suffisant, je réponds que nous débattrons bien, ensemble – nous nous y sommes engagées, Catherine Vautrin et moi –, de la stratégie, de la gouvernance et, bien entendu, du financement.
M. Boris Vallaud
Et alors ?
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée
Nous souhaitons débattre avec vous et nous prendrons les mesures nécessaires, y compris les mesures de nature législative. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
M. Jérôme Guedj
Et la loi « grand âge », engagement d’Élisabeth Borne ?
Situation des infirmiers libéraux
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric Boccaletti.
M. Frédéric Boccaletti
Madame la ministre du travail, de la santé et des solidarités, notre système de santé repose sur un pilier public, formé notamment de nos hôpitaux, et un pilier privé, composé des professionnels de santé libéraux.
Le collectif des infirmiers libéraux en colère organise aujourd’hui des rassemblements en province, et ils seront nombreux à manifester, le 4 avril, devant les portes de votre ministère. Le 15 mars, Frédéric Valletoux a déclaré dans « Les grandes gueules » qu’il fallait en finir avec le misérabilisme des infirmiers libéraux. Il a ajouté, de façon provocatrice, que leur revenu moyen est de 4 000 euros, sous-entendant qu’ils seraient plutôt privilégiés.
M. Jean-Yves Bony et M. Fabrice Brun
C’est une honte !
M. Frédéric Boccaletti
Il a cependant omis d’évoquer le nombre hebdomadaire des jours travaillés et le nombre mensuel des heures effectuées, qui atteint bien souvent 360, ainsi que la vie de famille sacrifiée et les vacances rarissimes. Les infirmiers libéraux ont été ignorés par le Ségur. Or en réalité, contrairement à ce qu’affirme M. Valletoux, certains d’entre eux, en zone rurale, n’arrivent pas à se verser un salaire mensuel de plus de 1 400 euros.
La dernière revalorisation des actes médicaux est intervenue il y a quinze ans. Les frais kilométriques sont inchangés depuis 2011. Quant à l’indemnité forfaitaire de déplacement, elle vient, enfin, d’être augmentée, mais passe péniblement de 2,50 euros à 2,75 euros le trajet. Cela reste moins que les kinés, qui perçoivent 4 euros, et que les médecins, qui touchent 10 euros. Victimes de l’inflation, de la hausse du prix de l’essence et de l’entretien de leur véhicule, ils supportent des charges de fonctionnement qui ont explosé.
En quinze ans, les infirmiers libéraux ont perdu 21 % de leur pouvoir d’achat. Ils ont besoin d’une reconnaissance financière, mais aussi de la reconnaissance de la pénibilité de leur travail. Leur espérance de vie est amputée de sept ans par rapport à celle de la population générale.
Prenez la mesure du désespoir de nos infirmiers libéraux. Les conséquences de votre mépris sont terribles pour les Français, qui, en plus de ne pas avoir de médecins, n’auront bientôt plus d’infirmiers. Quelles sont vos solutions face au désespoir de nos infirmiers libéraux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention
Ni dans les propos qui ont été tenus ni dans la politique qui est menée, il n’y a de mépris pour les infirmières et les infirmiers…
M. Jean-Yves Bony
C’est ce qu’ils ont ressenti !
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué
…qui, on le sait, jouent un rôle majeur dans le système de santé. Au contraire, la majorité œuvre, depuis 2017, à la reconnaissance de la place qu’occupe cette profession.
Elle a ainsi créé le bilan de soins infirmiers, qui a permis aux infirmiers et aux infirmières d’être accompagnés par un effort de plus de 700 millions d’euros depuis 2020.
Il n’y a pas de mépris lorsque – et vous avez eu l’honnêteté de le rappeler – nous augmentons l’indemnité forfaitaire de déplacement de 10 %. (M. Frédéric Boccaletti fait signe que c’est peu.)
M. Vincent Descoeur et M. Jean-Yves Bony
Elle ne l’avait pas été depuis quinze ans !
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué
Il n’y a pas de mépris lorsque je reçois, dans les jours suivant ma prise de fonctions, les trois syndicats d’infirmiers libéraux afin de discuter de leurs attentes et de leurs revendications.
Il n’y a pas de mépris lorsque j’ai diligenté, à leur demande, une enquête de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) afin d’évaluer la pénibilité de leur métier. Ils réclamaient une telle enquête depuis des années ; elle est en cours, et fera office de juge de paix. En tout cas, les organisations des infirmières et des infirmiers ont salué cette décision.
Il n’y a pas de mépris lorsque nous lançons le chantier de l’attractivité ou lorsque la majorité crée, comme elle l’a fait au mois de décembre dernier dans cet hémicycle, le statut d’infirmier référent, auquel nous allons donner du contenu avec les organisations syndicales.
Il n’y a pas non plus de mépris lorsque la majorité crée le statut d’infirmier en pratique avancée, auquel les décrets d’application, qui seront publiés dans les prochaines semaines, donneront, là aussi, un contenu concret.
N’essayez donc pas de travestir la réalité. Les infirmières et les infirmiers ont un rôle essentiel dans notre système de santé. Il faut les accompagner dans la mutation de leur métier, aux côtés des médecins et des autres soignants qui prennent en charge la santé des Français. Je m’y attelle, avec l’ensemble du Gouvernement. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes HOR et RE.)
M. Jean-Yves Bony
Il faut revaloriser le métier !
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric Boccaletti.
M. Frédéric Boccaletti
Je l’affirme : il y a du mépris lorsque vous ne dites rien sur la revalorisation des actes médicaux ou lorsque vous vous gargarisez d’avoir porté de 2,5 à 2,75 euros le montant de l’indemnité forfaitaire de déplacement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Création de groupes de niveau au collège
Mme la présidente
La parole est à M. Benjamin Lucas.
M. Benjamin Lucas
Monsieur le Premier ministre de l’éducation nationale, ma question, simple et brève, s’inspire d’un sujet de philosophie régulièrement soumis aux candidats au baccalauréat : peut-on avoir raison tout seul ?
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement
Vous avez trois heures !
M. Jérôme Guedj
On n’a pas le droit de tricher !
M. Laurent Croizier
Ridicule, comme d’habitude !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Nicole Belloubet, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse
Non, je ne pense pas que nous puissions avoir raison tout seul. (Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)
M. Jérôme Guedj
Et pourtant !
Mme la présidente
La parole est à M. Benjamin Lucas.
M. Benjamin Lucas
Pourtant, monsieur le Premier ministre de l’éducation nationale, c’est seul que vous avez acté par décret, le 16 mars dernier, l’installation de groupes de niveau en français et en mathématiques au collège. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES et SOC.)
C’est seul que vous bouleversez brutalement la nature de notre système éducatif, sans même lui donner les moyens suffisants.
C’est seul que vous mettez fin au collège unique.
C’est seul que vous abandonnez l’objectif d’apprendre ensemble avec l’hétérogénéité comme principe d’émulation et de coopération pédagogique. (Mêmes mouvements.)
C’est seul que vous refusez d’appréhender les inégalités de naissance pour mieux les combattre et faire société ensemble, au profit d’une vision intrinsèquement inégalitaire qui présente les élèves les plus en difficulté comme des freins à la réussite de ceux qui ont plus de facilités.
C’est seul que vous accentuez le séparatisme scolaire et l’assignation à résidence sociale des enfants issus des classes populaires.
C’est seul, et contre tous !
Contre les chercheurs, les comparaisons internationales et les études, qui montrent que l’homogénéité n’est pas vertueuse en matière d’éducation.
Contre l’ensemble des organisations professionnelles des personnels de l’éducation nationale.
Contre le Conseil supérieur de l’éducation, unanime pour rejeter la réforme qui ne dit pas son nom.
Contre les enseignants, mobilisés aujourd’hui dans tout le pays et à qui je veux rendre hommage. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES et SOC.)
Et contre le Parlement, qui n’est pas même appelé à discuter de ce bouleversement majeur.
Monsieur le Premier ministre, en démocratie, on n’a jamais raison seul contre tous. Puisque vous affirmez que l’éducation relève du domaine régalien, saisissez le Parlement d’une loi de programmation, comme cela a été le cas pour la sécurité, la justice ou la défense, et permettez que les représentants de la nation puissent faire entendre la voix d’une République attachée à son école et à son principe d’égalité ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES et SOC, et sur quelques bancs du groupe GDR-NUPES.)
M. Jérôme Guedj
Excellent ! Bravo !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
M. Jérôme Guedj
L’oral de rattrapage !
Mme Nicole Belloubet, ministre
Non, nous ne sommes pas seuls.
M. Jérôme Guedj
Vous êtes deux !
Mme Nicole Belloubet, ministre
Nous ne sommes pas seuls à souhaiter la réussite de tous nos élèves. M. le Président de la République, M. le Premier ministre, moi-même, et vous tous, nous souhaitons qu’ils réussissent.
M. Jérôme Guedj
Pas comme ça !
Mme Nicole Belloubet, ministre
C’est la raison pour laquelle Gabriel Attal a, en son temps, décidé d’un choc des savoirs.
M. Laurent Croizier
Et il a raison !
Mme Nicole Belloubet, ministre
C’est un plan d’ensemble que, j’ai déjà eu l’occasion de le dire devant vous, j’appliquerai ; les textes ont paru récemment ou commencent à paraître.
Quant à l’installation de groupes, au collège, en français et en maths, c’est-à-dire dans les enseignements fondamentaux, elle est précisément destinée à lutter contre les inégalités scolaires.
Mme Cyrielle Chatelain
C’est faux !
Mme Andrée Taurinya
Vous mentez !
Mme Nicole Belloubet, ministre
Je vais préciser mon propos. En effet, dans ces deux matières fondamentales, nous allons constituer des groupes en évaluant le niveau des élèves et en appréciant, à partir de là, leurs besoins spécifiques en fonction des compétences attendues. Les groupes ainsi formés n’ont qu’un seul but : améliorer la réussite scolaire des plus faibles et des meilleurs. Pour cela, nous avons évidemment besoin, dans le cadre de ces groupes, de réduire l’hétérogénéité lorsqu’elle est trop grande et ses effets. Il nous faut adapter à chacun de nos élèves les rythmes d’apprentissage afin de répondre à leurs besoins spécifiques.
M. Gabriel Attal, Premier ministre
Eh oui !
Mme Nicole Belloubet, ministre
Je dois ajouter que, comme ni le Premier ministre ni moi-même ne souhaitons le tri social et l’assignation scolaire définitive (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES), nous avons prévu des temps de brassage en classe entière qui permettront aux élèves de changer de groupe.
M. Benjamin Lucas
Ce n’est pas sérieux !
Mme Nicole Belloubet, ministre
Grâce à la souplesse ainsi donnée dans chaque établissement scolaire…
Mme la présidente
Merci, madame la ministre.
Mme Nicole Belloubet, ministre
…à l’aide et au contrôle, que j’effectuerai, de ces éléments,…
Mme Anna Pic
Avec quels moyens ?
Mme Nicole Belloubet, ministre
…nous obtiendrons les résultats souhaités. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.)
Parcoursup
Mme la présidente
La parole est à M. Mickaël Bouloux.
M. Mickaël Bouloux
Tout d’abord, madame la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées, nous n’avons pas compris votre réponse à la question de Mme Vidal. Nous attendons un calendrier, en 2024, concernant la loi « grand âge », comme l’a promis l’ancienne Première ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Benjamin Lucas applaudit également.)
Madame la ministre de l’éducation nationale, au lendemain de la clôture des vœux sur Parcoursup, pouvez-vous affirmer que chaque lycéenne et chaque lycéen pourra poursuivre ses études à la rentrée ? Dans les tribunes du public se trouvent vingt-cinq lycéens venus de ma circonscription (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC), avec qui j’ai réfléchi à cette question et qui attendent votre réponse.
L’année dernière, près de 16 % des candidats sont restés sans affectation après la phase principale. Comment se préparer à la rentrée quand on se retrouve sans option ? Comment encaisser le refus d’une formation pour laquelle on est fait ?
Depuis 2018, force est de constater que ce système creuse les inégalités entre nos jeunes et entre nos territoires et qu’il suscite, chez nos enfants et leurs parents, inquiétude et anxiété. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) L’année dernière, Luc, 17 ans, s’est vu refuser une formation en sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps). Issu d’une famille endettée et modeste, il n’a pas pu partir dans une école privée ; il a laissé son rêve derrière lui, et s’est mis à travailler.
Une gestion néolibérale et désincarnée de l’avenir de nos enfants : voilà ce qu’a instauré cette plateforme sous l’ère Macron ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.) Lorsque chaque classe dispose d’une seule heure pour essayer d’y voir clair dans les 23 000 formations proposées, comment peut-on aiguiller les trente-cinq élèves qui la composent et qui ont des ambitions différentes ?
J’apporte d’ailleurs mon soutien aux enseignants qui sont en grève aujourd’hui (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES), notamment pour demander plus de moyens. Quant aux lycéens, ils demandent un système humain et adapté, pour choisir leur orientation.
Madame la ministre, quand allez-vous comprendre qu’il y a urgence à replacer l’humain au cœur du processus ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse…
Pardon, la parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.
M. Pierre Cordier
C’est blanc bonnet et bonnet blanc !
Mme Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche
Puisque Mme Belloubet et moi travaillons ensemble et qu’il existe un continuum entre le lycée et l’enseignement supérieur, vous comprendrez que je réponde à la question de M. Bouloux.
Cette année, 148 bacheliers se sont retrouvés sans affectation à l’issue de la procédure de Parcoursup ; nous continuons à suivre leur situation pour leur proposer des solutions. L’accompagnement des familles et des élèves ne cesse de s’améliorer chaque année, dans la transparence, pour diminuer leur stress. Comme vous, nous sommes conscients que cette amélioration doit se poursuivre.
C’est pourquoi nous travaillons, avec Nicole Belloubet et le ministère de l’éducation nationale, à améliorer l’orientation de nos élèves dès la seconde, voire dès le collège en fonction du métier qu’ils souhaitent exercer. Il s’agit de leur indiquer les parcours qu’ils doivent suivre et de construire avec eux leur projet professionnel.
Croyez-moi, les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur partagent votre volonté que tous les élèves soient accompagnés vers l’enseignement supérieur et la réussite. Nous continuerons d’y travailler – avec vous, si vous le voulez bien. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Mme la présidente
La parole est à M. Mickaël Bouloux.
M. Mickaël Bouloux
La jeunesse a droit à l’émancipation, au bonheur et aux études supérieures. Elle a le droit de ne pas être anxieuse pendant toute une année ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Benjamin Lucas applaudit également.)
M. Laurent Croizier
Une fois que vous avez dit cela, que se passe-t-il ?
Menaces contre la principale d’un collège de la Côte-d’Or
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Frei.
M. Philippe Frei
Vendredi dernier, au collège Édouard-Herriot de Chenôve, dans ma circonscription, un drame a été évité de justesse. Un élève de 15 ans porteur d’une lettre mentionnant les attentats de novembre 2015 a été interpellé après avoir menacé avec un couteau la principale de l’établissement. Je me suis immédiatement rendu sur place pour soutenir la communauté éducative et les élèves. J’ai vu des professeurs choqués, des élèves terrorisés, des familles apeurées.
Une cellule psychologique, installée dans le collège dès le lendemain du drame, a permis à un grand nombre d’entre eux de s’exprimer, tant l’émotion suscitée par cet acte inqualifiable était forte. J’y étais présent, avec la ministre Fadila Khattabi.
Je veux saluer le sang-froid et le courage exceptionnels dont a fait preuve Mme la principale. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem, SOC et HOR.) Poursuivie par son agresseur, elle est parvenue à quitter son bureau et à déclencher l’alarme anti-intrusion, permettant ainsi aux élèves et aux professeurs de se confiner immédiatement. Sans ce réflexe, et l’intervention rapide des forces de l’ordre, le pire aurait pu se produire.
Madame la ministre, je connais votre engagement à faire de la sécurité des écoles une priorité absolue. Toutefois, j’ai la conviction qu’il faut aller plus loin. Beaucoup a déjà été fait. Depuis 2002, un plan particulier de mise en sûreté a été instauré dans les établissements scolaires. Depuis 2017, 10 millions d’euros ont été investis dans la sécurisation des bâtiments publics, notamment des écoles.
De nombreuses pistes existent pour concilier un niveau de sûreté adéquat et un climat d’apprentissage serein, telles que la généralisation des alarmes anti-intrusion, l’amélioration de la prise en charge médico-sociale des élèves difficiles, et le renforcement de la formation des équipes éducatives. Quelles mesures complémentaires le Gouvernement entend-il prendre pour renforcer la sécurité de nos écoles ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Nicole Belloubet, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse
Je me suis effectivement rendue, lundi, dans le collège concerné. L’équipe éducative – vous avez raison de le souligner – était encore sous le choc, en particulier la principale, qui a fait preuve d’un sang-froid remarquable, et les enseignants qui se trouvaient le plus à proximité du drame. Comme la principale l’a souligné, et comme j’ai pu le constater sur place, si nous avons évité un drame plus grave encore, cela n’est pas simplement le fait des circonstances, mais le résultat d’un travail approfondi réalisé en amont. Ce travail est celui des services publics de l’État – et je tiens à remercier tous ceux qui ont joué leur rôle –, qu’il s’agisse de la police, intervenue avec un sang-froid admirable, de la justice, présente très tôt, ou de la médecine et des services du rectorat. Ils ont remarquablement fonctionné.
Vous l’avez dit, un plan particulier de mise en sûreté avait été établi et répété auparavant ; les collectivités territoriales avaient investi dans des boutons de sûreté et d’autres mécanismes ; enfin, un plan de formation des chefs d’établissement et des équipes éducatives avait été instauré. Tous ces éléments ont permis que cet incident, très grave, ne débouche pas sur le pire.
Nous souhaitons aller plus loin, en développant un nouveau plan particulier de mise en sûreté, que mes services ont commencé à élaborer. Sous l’impulsion du Premier ministre, nous allons travailler, avec le ministre de l’intérieur et le ministre de la justice notamment, pour le préciser et le doter de mesures complémentaires. J’aurai l’occasion de vous en faire part dans les prochains jours. C’est essentiel pour éviter des drames ultérieurs. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Politique de sécurité
Mme la présidente
La parole est à M. Michaël Taverne.
M. Michaël Taverne