Dérives des influenceurs : adoption d'une proposition de loi

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Commission des affaires économiques : Coût de la vie dans les départements et régions d’Outre-mer ; Dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux ; Soutien à l’export et à l’attractivité des investissements étrangers en France

Mercredi 1er février 2023, la commission des Affaires économiques a examiné puis adopté, à l’unanimité, la proposition de loi visant à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux.

 

La proposition de loi sera examinée en séance publique le jeudi 9 février dans le cadre de la journée réservée au groupe Socialistes et apparentés.

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Le rapporteur Arthur Delaporte (SOC, Calvados) a présenté devant la commission les contours de la sphère des influenceurs qui restent encore « trop peu documentés ».  Ce phénomène « récent » et « massif » procède directement de l’émergence des réseaux sociaux a-t-il expliqué. Les influenceurs sont des personnalités dont l’activité consiste à produire des contenus numériques destinés à un public cible (leurs « followers » ou « communauté »). Ces contenus visent en général à promouvoir des services, produits ou pratiques en collaboration parfois avec des annonceurs. Ils tirent des revenus de cette activité via les plateformes où ils diffusent leur contenu et grâce aux contrats qu’ils passent avec des annonceurs.

 

Arthur Delaporte explique qu’il y aurait 15 000 influenceurs en France avec de fortes disparités en terme d’audience. Si un peu moins de la moitié d’entre eux (44 %) disposent d’une audience de 1 000 à 5 000 abonnés, seulement 0,3 % disposent de plus d’un million d’abonnés. Il explique que la « force de frappe » des influenceurs dépend de leur nombre d’abonnés mais aussi du « lien affectif » qu’ils arrivent à nouer avec leur communauté. Ainsi 50 % des abonnés seraient susceptibles d’effectuer un acte d’achat sur recommandation d’un influenceur.

 

Il rappelle dans son rapport que cet impact est « d’autant plus puissant » que l’audience est constituée d’un public mineur ou de jeunes adultes (40 % des abonnés auraient entre 15 et 24 ans et 25 % entre 25 et 34 ans d’après une étude de Médiamétrie). Cette influence est particulièrement « néfaste » lorsque les produits ou services proposés relèvent de l’escroquerie. Le rapporteur cite par exemple la publicité clandestine, la vente de formations hasardeuses parfois financées par le CPF, le « drop shipping » frauduleux, la vente de faux voyages, la promotion de traitements miracle contre le cancer ou le « copy trading ».

 

Arthur Delaporte s’alarme des conséquences de ces messages sur les publics à risque. Il évoque « la hausse des admissions à l’hôpital de patients mineurs ou jeunes ayant suivi des régimes préconisés » par les influenceurs, la hausse des opérations de chirurgie esthétique, dont la publicité est pourtant interdite en France, ou encore les témoignages de tentatives de suicides ou de profonde détresse psychologique de victimes de placements financiers à risques.

 

L’article unique de la proposition de loi crée au sein du code de la consommation une définition juridique de l’influenceur et renforce la régulation de la publicité en ligne et des pratiques de « dropshipping ».

 

La proposition de loi propose une première définition juridique de l’influenceur comme étant une « personne physique ou morale qui fait la promotion directement ou indirectement de produits, actes ou prestations contre rémunération, y compris lorsque celle‑ci est constituée par des avantages en nature, de manière active par un moyen de communication électronique et qui, par son statut, sa position ou son exposition médiatique dispose d’une audience pouvant influencer la consommation du public exerce l’activité d’influenceur ».

 

L’article unique propose également une interdiction absolue de publicité par les influenceurs de certains produits et services.

 

En commission, les députés ont précisé le champ de cette interdiction en visant l’ensemble des produits pharmaceutiques, des dispositifs médicaux et des actes de chirurgie dont ceux de chirurgie esthétique, à l’exception des produits cosmétiques et du relai des campagnes de santé du Gouvernement (amendement CE22 du rapporteur). L’interdiction a été étendue en commission aux produits et services financiers présentant des risques importants de perte pour les consommateurs et les placements et investissements dans des actifs numériques (les offres notamment de « livrets de cryptos ») et NFT (jetons non fongibles) (amendement CE21 du rapporteur) ainsi qu’aux jeux d’argent et de hasard, aux paris sportifs et aux boissons alcoolisées (amendement CE20 du rapporteur sous-amendé par les CE31, CE32 et CE33 de Stéphane Vojetta, RE).

 

L’article encadre, par ailleurs, la publicité relative aux formations professionnelles en imposant une information explicite du consommateur par un bandeau visible sur l’image durant l’intégralité de la promotion que celles-ci sont réservées aux personnes majeures.

 

Le non-respect de ces dispositions est sanctionné par une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende.