Mercredi 27 mars, la commission des affaires économiques a examiné, puis adopté, une proposition de loi visant à instaurer de nouveaux objectifs de programmation énergétique pour répondre concrètement à l’urgence climatique. Ce texte sera débattu en séance publique jeudi 4 avril, dans le cadre de la journée réservée au groupe Écologiste-NUPES. La députée Julie Laernoes (Ecolo-NUPES, Loire-Atlantique) en est la rapporteure.
Les députés ont examiné 83 amendements en commission et en ont adopté 23.
La rapporteure explique que depuis la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV), les articles L. 100-1 à L. 100-4 du code de l’énergie définissent les grandes orientations de la politique énergétique nationale et ses principaux objectifs chiffrés (article L. 100-4).
Toutefois, elle précise que jusqu’en 2019, aucun mécanisme n’était prévu pour réinterroger périodiquement ces cibles bien qu’elles aient été définies à des horizons plus ou moins lointains (souvent une échéance en 2030, soit une quinzaine d’années plus tard à l’époque, et une échéance en 2050), et ce, quels que soient les évolutions climatiques mondiales et nationales et les progrès réellement obtenus par l’action publique.
En 2019, à l’initiative des députés, la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat a été enrichie d’un article 2, devenu l’article L. 100-1-A du code de l’énergie, qui introduit le principe de la détermination par la loi tous les cinq ans, des « objectifs et [des] priorités d’action de la politique énergétique nationale pour répondre à l’urgence écologique et climatique ».
L’article L. 100-1 A du code de l’énergie dispose que cette loi quinquennale décline chaque grand objectif (réduction des émissions de gaz à effet de serre, réduction de la consommation énergétique finale, réduction de la consommation énergétique primaire fossile, développement des énergies renouvelables, etc.) pour deux ou trois périodes successives de cinq ans. Il exige par ailleurs que la programmation pluriannuelle de l’énergie, la stratégie nationale « bas-carbone » et les budgets carbone soient compatibles avec ces objectifs.
La première loi quinquennale, dite loi de programmation énergie-climat (LPEC), devait être adoptée avant le 1er juillet 2023. Julie Laernoes regrette que « cette échéance soit passée depuis près de neuf mois sans que la LPEC n’ait encore fait l’objet d’un débat au Parlement ». Elle explique que « au-delà du fait que le pays ne peut rester légalement encore longtemps sans cette programmation énergétique […], l’adoption de cette loi constitue aussi un impératif climatique, économique et de souveraineté ». Elle précise que les objectifs définis à l’article L. 104 du code de l’énergie sont « devenus obsolètes » du fait de « l’indispensable relèvement de l’ambition climatique » et alors que l’Union européenne a « fermement renforcé ses exigences ». En effet, en publiant le paquet « Fit for 55 » le 14 juillet 2021, l’Union européenne a relevé son objectif de réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990 de 40 % à 55 %, sans que la France n’ait encore aligné les trajectoires de sa stratégie pour l’énergie et le climat souligne la rapporteure.
Elle explique, en outre, que l’absence de programmation actualisée et confirmée bride les investisseurs potentiels et les porteurs de projets des filières des énergies renouvelables, de la rénovation énergétique, de la maîtrise des consommations dans leurs perspectives de développement ainsi que les gestionnaires des réseaux de gaz et d’électricité sur leurs besoins d’adaptation et de financement. Elle ajoute qu’elle freine également la mobilisation des collectivités territoriales. En effet, l’article L. 141-5-1 du code de l’énergie prévoit que les objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables sont établis pour contribuer aux objectifs de la loi quinquennale et de la programmation pluriannuelle de l’énergie qui en découlera.
L’article 1er propose d’inscrire dans la loi les engagements internationaux et européens de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de renforcer les grands objectifs opérationnels en matière énergétique, qu’il s’agisse de réduction des consommations d’énergie ou de développement des énergies renouvelables.
En commission, les députés ont reporté l’échéance de l’adoption de la première loi de programmation énergétique du 1er juillet 2023 au 1er juillet 2025 (CE17). Ils ont, par ailleurs, remplacé l’objectif de diminution d’au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre par l’objectif d’au moins 50 % (identiques CE76 et CE95, sous-amendés par le CE107). Ils ont introduit un jalon supplémentaire à la trajectoire d’atteinte de la neutralité carbone de 40 % en 2040 (CE59) et remplacé l’objectif de réduction de la consommation primaire des énergies fossiles d’au moins 50 % par l’objectif d’environ 40 % (CE78).
Les députés ont également remplacé les objectifs de développement des énergies renouvelables par un objectif d’augmentation de la part des énergies décarbonées (identiques CE79 et CE98) et ont réintroduit des objectifs en termes de capacité nucléaire. Ainsi, les députés ont fixé l’objectif de maintenir en fonctionnement les installations de production d’électricité d’origine nucléaire existantes et introduit l’objectif d’engager 10 GWe de nouvelles capacités d’ici 2026 (CE85). Ils ont également ajouté l’objectif d’assurer la disponibilité d’installations permettant le retraitement et la revalorisation des combustibles nucléaires usés (CE86). Enfin, les députés ont « conforté le choix durable du nucléaire » dans le mix énergétique et imposé un niveau de capacités nucléaires installées d’au moins 63 GW « sous réserve des dispositions relatives à la sûreté nucléaire » (CE71). Julie Laernoes remarque dans son rapport que « plus des deux-tiers des modifications apportées sont directement issues du projet de loi dit de ‘‘souveraineté énergétique’’ présenté en décembre par le Gouvernement, puis retiré en janvier ».
L’article 2 propose d’inscrire dans la loi l’interdiction de l’exploitation de toute installation de production d’électricité à partir de charbon située sur le territoire de France métropolitaine à partir du 1er janvier 2027.
Les députés ont demandé, par amendement, un rapport au Gouvernement sur la possibilité d’appliquer aux salariés des entreprises sous-traitantes des exploitants des centrales à charbon des mêmes mesures d’accompagnement sociales que celles prévues par les salariés de ces exploitations (CE50).
L’article 3 prévoit d’accélérer l’arrêt de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures et du charbon en France.
Les députés ont supprimé l’article en commission (identiques CE11 et CE83).