Interdire l’importation et l’exportation des trophées de chasse d’espèces protégées : adoption d'une proposition de loi

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Commission du développement durable : Interdire l’importation et l’exportation des trophées de chasse d’espèces protégées

Mercredi 24 janvier 2024, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné puis adopté la proposition de loi de la rapporteure Sandra Regol (Ecolo-NUPES, Bas-Rhin) visant à interdire l’importation et l’exportation de trophée de chasse d’espèces protégées.

La chasse aux trophées est une pratique récréative consistant à poursuivre et abattre un animal pour obtenir tout ou partie de son corps à des fins d’exhibition.

La rapporteure précise que la France est le sixième importateur de trophées de chasse européen avec pas moins de 752 trophées appartenant à 36 espèces différentes importés entre 2014 et 2018. Elle se classe comme premier d’Europe en ce qui concerne les léopards, guépards et lynx d’Eurasie.

Elle s’appuie sur l’étude de l’organisation Human Society International/Europe qui pointait en 2021 l’impact « particulièrement négatif » de la chasse aux trophées pour la survie des espèces.

La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (dite Convention de Washington ou Cites) règlemente le passage des frontières pour plus de 40 900 espèces animales et végétales inscrites dans ses annexes. Elle a été transposée en droit européen par le règlement CE n°338/97 du 9 décembre 1996 qui prévoit des niveaux de protection différents selon les espèces en fonction de leur classement en annexe A, B, C ou D, qui dépend du degré de menace pesant sur elle.

Aujourd’hui, toutes les espèces inscrites à la Cites sont inscrites dans l’une des quatre annexes, ce qui représente plus de 6 100 espèces animales et 32 300 espèces végétales.

L’annexe A du règlement regroupe les espèces les plus menacées. Elle inclut les espèces inscrites à l’annexe I de la Cites et certaines espèces de l’annexe II et III de la même convention, auxquelles l’Union européenne souhaite accorder un statut de protection plus élevé. Pour ces animaux et plantes, les échanges commerciaux de spécimens sont strictement interdits.

Les annexes B et C répertorient les espèces de l’annexe II et III de la Cites. Les spécimens d’une espèce figurant aux annexes B et C peuvent faire l’objet de commerce s’ils ont été obtenus légalement et si le volume des échanges ne porte pas préjudice aux populations sauvages.

L’annexe D comporte des espèces non inscrites à la Cites pour lesquelles l’Union européenne assure une surveillance des volumes d’importation.

Quelques exemples d’espèces :

Annexe

Espèces

Annexe A

Condor des Andes, bison des forêts, yack sauvage, rhinocéros (sauf les rhinocéros blanc du sud inscrits à l’annexe B), tapirs, éléphant d’Asie et d’Afrique (sauf les populations u Botswana, de la Namibie, de l’Afrique du Sud et du Zimbabwe inscrites à l’annexe B), guépard, panda, orang-outan…

Annexe B

Cygne à col noir, hippopotame nain, morse, hyène brune, pangolin, ours, loutre…

Annexe C

Sarcelle d’hiver, buffle d’Asie, fouine, belette de Sibérie, bongo…

 

Le règlement européen introduit une dérogation pour les spécimens morts, et notamment les trophées de chasse, qui font partie des bagages personnels d’un voyageurs ou importés ultérieurement.

Aussi l’importation de ces trophées est autorisée sous réserve, pour les spécimens appartenant à l’annexe A, de l’obtention d’un certificat d’exportation émis par le pays tiers et d’un permis d’importation émis par l’État membre de l’Union. L’importation de trophées des animaux relevant de l’annexe B ne nécessite pas de permis d’importation, à l’exception depuis 2015 du lion, de l’ours polaire, de l’éléphant d’Afrique, du rhinocéros blanc du Sud, de l’hippopotame, de l’argali, et depuis 2021 des mouflons du Kazakhstan, de Mongolie, de Chine, de Tien Shan, de Marco Polo et de Severtzov.

En France, l’article L. 415-3 du code de l’environnement punit, depuis 2016, de trois ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende l’absence de permis ou de certificat requis par la réglementation.

La France a, par ailleurs, pris des mesures plus strictes en vue de limiter l’importation de trophée de chasse. Ainsi, elle a interdit, de facto, l’importation de trophées de lions en 2015 par décision de la ministre de l’Environnement. En outre, l’article 26 de la loi du 18 juillet 2023 a donné de nouvelles prérogatives aux agents des douanes désormais autorisés à effectuer des « coup d’achats » sur les trophées de chasse alors qu’ils n’étaient autorisés que pour les stupéfiants et le tabac.

L’article unique de la proposition de loi visait, initialement, à interdire en punissant de trois ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende, l’importation, l’exportation ou la réexportation de tout ou partie d’un animal appartenant aux annexes A, B et C du règlement européen du 9 novembre 1996 ainsi que la promotion, la propagande ou la publicité de la chasse d’un de ces animaux.

En commission, les députés ont adopté l’amendement CD34. Celui-ci limite, d’une part, le périmètre de l’infraction à l’importation des trophées de chasse, entendu comme une partie d’un animal ou un produit obtenu d’un animal d’une espèce non domestique prélevée dans son milieu naturel ou dans un enclos au cours d’un acte de chasse, que l’animal ait été élevé en captivité ou non. Il limite, d’autre part, les espèces visées à celles appartenant aux annexes A et B du règlement européen.

Les députés ont, par ailleurs, réduit l’amende punissant la promotion ou publicité de la chasse de l’une de ces mêmes espèces de 150 000 euros à 75 000 euros d’amende. La peine d’emprisonnement reste inchangée (CD36).

La proposition de loi est examinée en séance publique le 31 janvier 2024 dans le cadre de la journée « transpartisane ».

 

Voir le dossier législatif

Consulter le document faisant état de l'avancement des travaux (EAT)

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