- Texte visé : Projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, de simplification de la vie économique, n° 481 rectifié
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi de simplification de la vie économique
Supprimer cet article.
Par cet amendement, les député.es du groupe LFI-NFP proposent de supprimer l'article 10.
Créé en 2023 par transposition de la directive européenne dite "CSRD", cet audit, conduit par un organisme tiers indépendant ou un commissaire aux comptes, permet de collecter des éléments de preuve sur les informations publiées par l’entreprise en matière de reporting extra financier. Celles-ci sont en effet tenues de produire un rapport annuel sur leurs pratiques d’achat, de production et d’investissement relatives à leurs risques et impacts matériels en lien avec les questions sociales (conditions de travail sur toute la chaine de valeur, égalité de traitement, respect des droits impacts sur les consommateurs…) environnementales (pollution, biodiversité, climat, eau...) et de gouvernance.
En cas d'entrave à la conduite de cet audit, le chef d'une entreprise concernée par le champ de cette obligation encourt une peine maximale d’emprisonnement de cinq ans et une amende de 75 000 euros. Cet article supprime, entre autres, ce délit d'entrave.
Pour le moment, seules sont concernées par ces obligations les entreprises côtées qui affichent un bilan total de 25 millions d'euros ; un chiffre d'affaires net de 50 millions d'euros ;un effectif moyen de 250 salariés au cours de l'exercice. Seront prochainement concernées par l'obligation toutes les grandes entreprises, qu’elles soient cotées en bourse ou non, de même que les entreprises non européennes qui réalisent une activité conséquente dans l’UE (un chiffre d’affaires supérieur à 150 millions d’euros). Les PME cotées seront également soumises à ces obligations, même si elles bénéficieront d’un délai supplémentaire pour s’y conformer.
Cet article a le mérite d'être explicite quant au projet réel du gouvernement et de la droite sous prétexte de "simplifier" l'économie : sous couvert de favoriser les TPE, il s'agit d'introduire de nouveaux cadeaux aux grandes entreprises. De fait, ni les TPE ni les microentreprises ne sont concernées directement par l'obligation de reporting créée par la directive CSRD. Les plus gros pollueurs peuvent être sereins : ils pourront désormais refuser à l’auditeur la communication, sur place, de toutes les pièces utiles à l’exercice de sa mission. D'ailleurs, l'étude d'impact du gouvernement est explicite : cet article découle d'une demande des entreprises.
Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’Etat a pointé l’insuffisance de l’étude d’impact du gouvernement à l’appui de la suppression du délit d'entrave à l'audit de durabilité, rappelant que la création de celui-ci est très récente. Trop pour être remis en cause.
Alors que cette directive est en ce moment-même considérablement fragilisée au niveau européen, via notamment la proposition par la Commission du paquet "omnibus" qui vise à une dérégulation tous azimuts de l'activité des grandes entreprises et à l'ouverture de nouvelles brèches dans les droits sociaux et de l'environnement, et du climat il est plus que jamais nécessaire de protéger notre cadre national en la matière. Concernant la directive CSRD, elle réduit le nombre d’entreprises couvertes de 80 à 85 % et supprime les normes sectorielles, qui permettent de cibler en priorité les secteurs les plus polluants tels que le secteur extractif. Cela signifie que certaines informations essentielles pour orienter les financements vers la transition climatique juste seront perdues. Nous refusons que la France s'inscrive dans ce pas.