- Texte visé : Projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, de simplification de la vie économique, n° 481 rectifié
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi de simplification de la vie économique
Supprimer cet article.
Par cet amendement, les député.es du groupe LFI-NFP proposent de supprimer l'article 12.
Cet article vise à accélérer le traitement de contentieux devant les juridictions administratives et notamment le traitement des requêtes et des référés, l’organisation des enquêtes publiques et l’exécution des décisions juridictionnelles des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel. Un écran de fumée face au manque structurel de moyens.
D'une part, l’article ouvre plus largement la possibilité pour les magistrats administratifs d’exercer les fonctions de juges des référés. Pour ce faire, il supprime la condition d’avoir atteint le grade de premier conseiller (obtenu au terme de six ans d’activité) actuellement prévue par l’art L.511-2 du code de justice administrative. La condition d’ancienneté de 2 ans demeure.
La suppression de la condition de grade est présentée comme permettant de faire face à l’augmentation du nombre d’affaires enregistrées par les TA en matière de référés (+41,7% entre 2019 et 2023). Cette mesure table sur une augmentation, à l’échelle du pays, de près de 11,3% du nombre de magistrats pourvant exercer ces fonctions. Or, il ne s'agit ni plus ni moins que de permettre une nouvelle fois au gouvernement de noyer le poisson quant au manque de moyens de la justice administrative. L'avis du Syndicat de la juridiction administrative (SJA) est sans appel : ce dispositif a été jugé comme un “palliatif insuffisant à la hausse tendancielle du contentieux que connaissent les juridictions administrative”.
D'autre part, cet article élargit considérablement les missions que peuvent exercer les magistrats honoraires au sein des tribunaux administratifs. Or, comme les magistrats à titre temporaire, le statut des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles engendre une forte dissymétrie avec les magistrats professionnels qui fragilise leur indépeendance et crée une collégialité fictive. Leur disponibilité étant très variable, cela ne peut constituer un modèle pérenne. Ces magistrats sont en effet peu nombreux et inégalement répartis sur le territoire national puisqu’ils choisissent leur juridiction d’affectation en fonction de leur domiciliation. Alors qu'il ne peut s'agir d'une solution pérenne, cet article ne prévoit aucun encadrement dans le temps de ce recours accru aux magistrats honoraires dans les tribunaux administratifs.
Ainsi, l’ensemble de cet article révèle une gestion comptable et précaire de la pénurie de fonctionnaires, ici, de magistrats. Pour rappel, en 2022, la France ne comptait que 11,2 magistrats pour 100 000 habitants, contre une médiane de 17,6 pour les pays membres du Conseil de l’Europe.
Face à la hausse du recours en contentieux administratif et au surmenage des juridictions, nous demandons une réelle augmentation des effectifs, a minima le double de magistrats déjà en poste.En 10 ans, le nombre des entrées devant les 42 tribunaux administratifs a augmenté de 46% ; le nombre de magistrats, calculés en effectif réel moyen, n’a progressé que de 4%. La LOPJ pour 2023-2025 avait pour objectif le recrutement de 10 000 postes d’ici la fin 2027 dont 1500 magistrats et 1500 greffiers, soit en moyenne 300 ETP de magistrats et 300 de greffiers par an. Or, le PLF pour 2025 prévoit 125 ETP de magistrats et 145 pour les greffiers soit la moitié de ce que la LOPJ prévoyait.