- Texte visé : Projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, de simplification de la vie économique, n° 481 rectifié
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi de simplification de la vie économique
Supprimer cet article.
Par cet amendement, les député.es du groupe LFI-NFP proposent de supprimer l'article 24 bis.
Cet article s'inspire directement d'une disposition analogue, applicable aux baux d'habitation, introduite par l'abjecte loi Kasbarian-Bergé. Il réduira la marge d’appréciation du juge, dans le but de faciliter les expulsions de locataires partis à un bail commercial en impossibilité de payer le loyer ou de recouvrer leur dette.
Actuellement, en cas de mise en oeuvre par voie d'exécution forcée de la clause résolutoire (dont la mise en oeuvre entraîne la résiliation automatique du contrat en cas de non-respect de certaines conditions par l'une des parties, contrairement à la clause de résiliation qui permet aux parties de mettre fin au contrat selon des conditions spécifiques définies à l'avance), le juge judiciaire dispose d'un pouvoir souverain pour accorder ou refuser des délais de paiement et la suspension de la clause résolutoire. Celui-ci statue alors en tenant compte de la situation du preneur débiteur et des besoins du bailleur créancier.
Or, cet article limite les cas dans lesquels le juge peut octroyer un délai de paiement au preneur et une suspension des effets de la clause résolutoire pour non-paiement des loyers : ceux-ci pourront être accordés seulement si le preneur est en capacité de régler la dette locative et à la reprise du versement intégral du loyer courant avant la date de la première audience. Il s'agit bien de réduire la marge de manoeuvre du juge et notamment celle de tenir compte de la situation du locataire, de ses difficultés...
En outre, remplacer la mention des clauses de résiliation au bail commercial par celles des clauses résolutoires revient concrètement à dessaisir le juge de sa compétence pour suspendre provisoirement la réalisation et les effets des clauses de résiliation ! Le juge civil a actuellement compétence pour, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, dans les cas où la résiliation n’a pas déjà été constatée. Si, à l'issue de cette décision le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge, la clause résolutoire ne peut pas jouer. De ce fait la proposition du gouvernement ne donne plus possibilité au preneur de saisir le juge en cas de résiliation du bail, mais de passer directement au stade du déclenchement de la clause résolutoire.
Une telle disposition sera nécessairement au détriment des petits commerçants en difficulté financière. Alors que ces derniers font déjà face à la concurrence déloyale du secteur du e-commerce et au déploiement, continuellement encouragé par les pouvoirs publics, des zones commerciales périphériques, il est impensable de faciliter leur expulsion. Nous assistons actuellement à une explosion des faillites dans le commerce de proximité, touchant les très petites entreprises (TPE), les petites et moyennes entreprises (PME) mais aussi les entreprises de taille intermédiaire (ETI) : on en dénombrait 12 000 au printemps 2024. Cet article est donc une nouvelle preuve, s'il en fallait, que ce projet de loi visant prétendument à protéger les plus petites entreprises est une vaste fumisterie.