- Texte visé : Projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes, n° 529
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Après l’alinéa 6, insérer les huit alinéas suivants :
« a bis) Sont ajoutés sept alinéas ainsi rédigés :
« « II. – Il est institué une commission indépendante de désignation des entités qualifiées. Cette commission est chargée de statuer sur l’habilitation à défendre l’intérêt des consommateurs et des salariés dans des procédures d’actions de groupe intentées en matière environnementale, en matière de discriminations subies au travail ou dans l’obtention d’un stage ou d’un emploi, en matière de produit de santé, de données personnelles et de discriminations en général, et telles que prévues au titre V.
« « III. – La commission mentionnée au II comprend :
« « 1° Deux députés et deux sénateurs ;
« « 2° Un membre du Conseil d’État ;
« « 3° Deux représentants de l’État désignés par le Premier ministre ;
« « 4° Deux personnalités qualifiées issues des organismes associatifs de défense des consommateurs, désignées par le Premier ministre en raison de leur expertise sur ces enjeux ;
« « 5° Deux personnalités qualifiées issues des organismes syndicaux, désignées par le Premier ministre pour leurs missions statutaires de défense des salariés. » »
Par cet amendement, le groupe LFI-NFP propose de protéger contre l'arbitraire la procédure de désignation des entités qualifiées habilitées à porter ou co-porter des actions de groupe telles que prévues et précisées dans une directive européenne, puis la loi de « modernisation de la justice au XXIe siècle. »
Les articles 14 à 19 de ce projet de loi DDADUE portent en effet sur le socle procédural qui pérennise cette possibilité de recours collectif, à l'heure ou les grandes entreprises multinationales sont de plus en plus ingénieuses pour flouer et porter préjudice à des personnes, qui sont parfois leurs propres salariés. Appelées "actions représentatives" par l'Union Européenne, elles avaient à l'époque le mérite d'introduire des notions novatrices comme "la reconnaissance judiciaire des discriminations collectives et systémiques en matière d’emploi" ; elles visent à l'obtention de réparation ou de cessation des infractions collectivement préjudiciables en matière environnementale, en matière de discriminations subies au travail ou dans l’obtention d’un stage ou d’un emploi, en matière de produit de santé, de données personnelles et de discriminations en général.
Seulement voilà : presque dix ans après son officialisation en droit interne, le compte n'y est pas. Ce qui aurait pu être un formidable outil de saisine citoyenne pour des droits collectifs a tourné au mirage, au faire-valoir théorique et inefficace. Ses énormes défauts : la non-rétroactivité de la loi sur des dossiers qui remontent parfois à des décennies, la complexité de la procédure, et la dissuasion de ses résultats : à ce jour, aucune procédure collective n'a abouti ! On pense ici à l'exemple de la CGT, qui avait entrepris une procédure en vue d’obtenir la reconnaissance, la cessation et la réparation de la discrimination syndicale dont s’estimaient victimes ses élu•es et mandaté•es par la voie de l’action de groupe nouvellement créée, dès 2016, à l’endroit de l’entreprise Sanofi. Son sort : frappée d’irrecevabilité car certains faits dataient d’avant la promulgation de la loi, malgré les preuves accablantes.
Plus que l'extension à des procédures transfrontières (telles que prévues aux articles 16 et 18), nous appelons le Gouvernement à faire respecter l'esprit de la directive, ne serait-ce qu'en France, en donnant de vrais pouvoirs aux associations, en ouvrant le plus possible la procédure. Comme le déplorait M. le rapporteur, Philippe Gosselin, avec sa collègue Mme Laurence Vichnievsky, dans un rapport parlementaire en 2020 : il existe un « grand nombre d’obstacles aux recours collectifs. » Massifions-les : il est rare que l’UE propose des modalités de renforcement des protections collectives face aux intérêts du capital
À tout le moins, nous proposons d'abord de rendre plus transparente et représentative la procédure de désignation des entités qualifiées habilitées à instruire les procédures aux côtés des victimes présumées. C'est pourquoi nous voudrions ainsi créer une commission de désignation composée d'un large éventail de personnes légitimes ou compétentes pour statuer sur l'attribution de cette qualification, avant publication au Journal Officiel.