- Texte visé : Proposition de loi visant à protéger durablement la qualité de l'eau potable, n° 766
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Supprimer les alinéas 2 à 5.
L’alinéa 3 vise à réglementer l’ensemble des « installations, travaux, activités, dépôts, ouvrages, aménagements ou occupations du sol de nature à nuire directement ou indirectement à la qualité des eaux » et à leur imposer un « programme d’actions obligatoires ».
L’idée peut paraître séduisante, car tout décideur politique et tout parlementaire souhaite naturellement préserver la qualité de notre eau potable.
Une autre réalité apparaît à l’étude de cette proposition.
Premièrement, il doit être rappelé que la directive (UE) 2020/2184, transposée par l’ordonnance n° 2022-1611 du 22 décembre 2022 prévoit un renforcement de la sécurisation de la qualité de l’eau potable avec la mise en œuvre des Plans de gestion de la sécurité sanitaire des eaux (PGSSE), qui consistent en une approche globale visant à garantir en permanence la sécurité sanitaire de l’approvisionnement en eau destinée à la consommation humaine (EDCH)… Un travail normatif considérable est en cours afin d’atteindre les objectifs et la présente proposition de loi viendrait donc réduire à néant une grande partie de ces travaux, retardant d’autant la mise en œuvre des mesures de protection, voire de restauration, de nos captages.
Deuxièmement, cette réglementation et les « actions obligatoires » ne seraient plus ciblées aux Aires d’Alimentation de Captage des seuls points de prélèvement sensibles, mais à toutes les aires d’alimentation des captages, c’est-à-dire à toute zone pouvant être définie comme « surface sur laquelle l’eau qui s’infiltre ou ruisselle alimente le ou les captages ». C’est-à-dire potentiellement l’ensemble du territoire…
Or les auditions ont montré que les études géologiques pour définir les Aires d’Alimentation de Captage sont complexes et coûteuses, qu’il y a donc une nécessaire hiérarchisation et planification de ces études et des plans d’action qui en découlent. Il s’agit donc de terminer les travaux concernant les captages prioritaires, puis ceux qui sont devenus sensibles.
Par ailleurs, les obligations créées par cette proposition ne prennent pas plus en compte les disparités géographiques, nature des aires, des nappes, des usages, etc. Elle met au même niveau une commune rurale de vaste superficie et les grandes agglomérations, alors que leurs enjeux, les risques et les conséquences, et aussi les moyens financiers diffèrent. Cette proposition de loi est donc irréalisable.
Quant à l’alinéa 4, il cible spécifiquement les agriculteurs : la possibilité qu’ils soient tous concernés – donc fautifs – n’est plus une possibilité ou une éventualité, mais devient une certitude…
L’alinéa 4 supprime aussi la méthodologie prévue à l’article L114-1 du code rural et de la pêche maritime, mais sans la remplacer… Ainsi, les contours des « programmes d’actions obligatoires » deviendront tellement flous, les obligations qu’ils impliquent et leurs tenants et aboutissants seront tellement incertains qu’il sera dès lors possible d’interdire arbitrairement toute activité agricole qui ne serait pas labellisée biologique, voire potentiellement toute activité humaine.
L’application du principe de précaution valant aussi en matière d’incertitude juridique, les alinéas 2 à 5 doivent donc être supprimés.