- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, visant à sortir la France du piège du narcotrafic, n° 907
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Supprimer cet article.
Par cet amendement, les députés du groupe LFI-NFP visent à supprimer l'article qui prévoit de mettre en œuvre l'activation des objets "fixes" afin de capter le son et les images au sein des lieux privés, comme les appareils embarqués au sein des véhicules ou des objets de domotique.
L'activation à distance des appareils connectés est particulièrement attentatoire aux libertés, et notamment au droit à la vie privée. Le caractère massif des données collectées ne peut en soi être considéré comme proportionné, ce qui est pourtant un critère sine qua non de la constitutionnalité d'une atteinte à la vie privée. L'actuel article 706-96 du code de procédure pénale circonscrit la captation de son et d'images à un lieu donné et nécessite une action concrète de mise sur écoute d'un lieu précis. À l'inverse, l’activation à distance d’un appareil connecté ne permet pas de limiter à un lieu, mais élargit à des zones qui pourraient ne pas concerner les besoins de l’enquête (la chambre à coucher par exemple). Dès lors, cette mesure entraîne un risque de surveillance disproportionnée, captant des informations intimes sans lien direct avec l’enquête. Une telle extension des pouvoirs d’investigation remet en cause le principe de nécessité et de proportionnalité qui doit encadrer toute atteinte aux libertés fondamentales.
Lors de la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice de 2023, le Gouvernement avait tenté d’intégrer aux techniques d’enquête cette activation des appareils électroniques. L’Observatoire des libertés numériques (OLN) dont sont membres de nombreuses associations et syndicats (Le CECIL, Creis-Terminal, Globenet, La Ligue des Droits de l’Homme, La Quadrature du Net, Le Syndicat des Avocats de France, Le Syndicat de la Magistrature), avait alerté en 2023 dans une tribune sur le risque d’un recours à de telles techniques d’enquêtes judiciaires : « Si ce texte était définitivement adopté, cela démultiplierait dangereusement les possibilités d’intrusion policière, en transformant tous nos outils informatiques en potentiels espions […]. Au regard de la place croissante des outils numériques dans nos vies, accepter le principe même qu’ils soient transformés en auxiliaires de police sans que l’on ne soit au courant pose un problème grave dans nos sociétés. Il s’agit d’un pas de plus vers une dérive totalitaire qui s’accompagne au demeurant d’un risque élevé d’autocensure pour toutes les personnes qui auront – de plus en plus légitimement – peur d’être enregistrées par un assistant vocal, que leurs trajets soient pistés, et même que la police puisse accéder aux enregistrements de leurs vies – par exemple si elles ont le malheur de passer nues devant la caméra de leur téléphone ou de leur ordinateur ».
Le tout technologique est une illusion et nous nous positionnons à rebours de ces techniques, liberticides et qui n'ont jamais prouvé leur efficacité. Nous souhaitons un renseignement et des moyens d'enquête tournés vers le travail humain et de terrain.