- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à faciliter le maintien en rétention des personnes condamnées pour des faits d’une particulière gravité et présentant de forts risques de récidive, n° 1148
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer cet article.
Par cet amendement, les député·es du groupe LFI-NFP proposent la suppression de cet article qui consacre une nouvelle extension du régime dérogatoire rendant suspensif l'appel formé contre une décision mettant fin à la rétention.
Cet élargissement est massif : il vise à inclure l'ensemble des personnes étrangères touchées par une interdiction de territoire français, faisant l'objet d'une décision d'éloignement assorties à des condamnations pour des crimes ou délits punis de cinq ans ou plus d'emprisonnement ou dont le "comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public". La disposition prévoit donc que cette dérogation se base sur un comportement et non une décision de condamnation judiciaire, donc au motif d’éléments uniquement fournis par l’autorité administrative, ce qui est inacceptable dans un État de droit. En effet, une telle extension des pouvoirs du préfet pourrait conduire à une utilisation abusive de la rétention administrative, transformant celle-ci en un outil de gestion de la politique sécuritaire. Si les délais prévus sont excédés, cela ne saurait en aucun cas être imputé aux personnes exerçant leur droit au recours.
Outre sa rédaction dans des termes vagues et imprécis mettant en péril la sécurité juridique des justiciables étrangers, cette mesure constitue une énième tentative d'allonger la durée de la rétention. Nous rappelons que nous sommes opposés à la logique d’enfermements tous azimuts avec des durées de rétention qui se sont considérablement allongées au fil des décennies.De nombreuses études ont démontré les conséquences psychologiques de la rétention administrative, et ce, même lorsqu’elle est de courte durée. Les conditions indignes de cet enfermement, l'accès aux soins qui y presque nul, l’angoisse et le désespoir qu’elles engendrent conduisent souvent à des actes de violence, des tentatives de suicide. Ces dispositions auront donc pour seul effet d'aggraver la violence institutionnelle et la maltraitance des personnes retenues.
Rappelons également que le recours suspensif répond au principe du droit au recours effectif consacré par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et par la Convention européenne des droits de l’homme, qui impose que toute personne a le droit de voir sa situation être examinée par un∙e juge.
Pour l'ensemble de ces motifs, et parce que nous soutenons que toute mesure de durcissement et d'allongement de la rétention est contreproductive, et donc à déplorer, nous demandons la suppression de cet article.