- Texte visé : Texte de la commission sur le projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, de simplification de la vie économique (n°481 rectifié)., n° 1191-A0
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Code concerné : Code des assurances
Le titre II du livre Ier du code des assurances est complété par un chapitre XI ainsi rédigé :
« Chapitre XI
« L’assurance des risques des procédures de péril d’urgence
« Art. L. 12‑11. – Les contrats d’assurance, souscrits par toute personne physique et garantissant les dommages d’incendie ou tout autres dommages à des biens situés en France ouvrent droit à la garantie de l’assuré contre les effets des mise en sécurité avec procédure d’urgence.
« Sont considérés comme les effets des mises en sécurité avec procédures d’urgence, au sens du présent chapitre, et pris en charge par le régime de garantie associé dans les mêmes conditions que pour les sinistres rendant le logement inhabitable, le relogement d’urgence des personnes dont la résidence principale est interdite à l’habitation suite à une décision administrative relevant de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles.
« La garantie ainsi instituée ne peut excepter aucun des biens mentionnés au contrat ni opérer d’autre abattement que ceux qui seront fixés dans les clauses. La garantie est limitée au droit au relogement d’urgence des propriétaires occupants jusqu’à l’adoption d’un arrêté de mainlevée par l’autorité compétente.
« Elle est couverte par une prime ou cotisation additionnelle, individualisée dans l’avis d’échéance du contrat visé à l’article L. 12‑11‑1 et calculée à partir d’un taux unique défini par arrêté pour chaque catégorie de contrat. Ce taux est appliqué au montant de la prime ou cotisation principale ou au montant des capitaux assurés, selon la catégorie de contrat.
« Les contrats mentionnés à l’article L. 12‑11‑1 sont réputés, nonobstant toute disposition contraire, contenir une telle clause. Des clauses types réputées écrites dans ces contrats sont déterminées par arrêté du ministre chargé de l’économie.
« Les dispositions du présent article, qui sont d’ordre public, sont précisées par décret. »
Lundi 13 janvier 2025, le maire de Montmorency a émis un arrêté de péril à l’encontre de deux bâtiments d’habitation en raison d’un glissement de terrain ayant eu lieu deux semaines plus tôt. Près de 143 habitants ont ainsi dû quitter leur logement suite à cette procédure d’urgence. En dépit des élans de solidarité et des aides de la municipalité, certains propriétaires ont été contraints de dormir dans leur voiture par des températures hivernales. Cette situation a mis en évidence un vide juridique concernant les propriétaires occupants, qui se se sont retrouver sans solution de relogement et sans indemnisation adéquate.
Hélas, de tels cas apparaissent fréquemment sur l’ensemble du territoire.Un cas similaire s’est produit à Sarcelles l’année précédente, ou encore à Bordeaux, où, depuis les effondrements de la rue de la Rousselle en 2021, la municipalité a décrété des centaines d’arrêtés de péril, dont 49 procédures de péril imminent sur 62 arrêtés de mise en péril rien qu’à l’été 202. À Toulouse, 35 arrêtés ont été émis en 2024. Cette problématique est loin d’être marginale. À Paris, en 2021, pas moins de 148 immeubles étaient placés sous arrêté de mise en péril, exposant les propriétaires occupants à des risques considérables et les contraignant souvent à quitter leur logement dans l’urgence, sans solution de relogement. Les assurances ne couvrant pas systématiquement ces situations, les propriétaires doivent assumer seuls les coûts liés à l’évacuation et aux travaux nécessaires, les plaçant dans une situation financière précaire.
Cette lacune juridique place les habitants concernés dans une situation de vulnérabilité car ils ne bénéficient pas des mêmes garanties que les victimes de sinistres tels que des incendies ou des catastrophes naturelles. Ces derniers doivent faire face à des charges multiples comme des remboursements de prêts, des charges de logement, des frais de location temporaire sans aucun soutien institutionnel sauf la bonne volonté des municipalités qui n’ont aucune obligation légale en la matière.
Si le changement climatique accroît la fréquence autant que l’intensité des intempéries, la catégorie juridique des « catastrophes naturelles » du code des assurances ne prend pas bien en compte les dommages qui en résultent. En effet, les catastrophes naturelles sont reconnues par arrêté interministériel suite à une « intensité anormale d’un agent naturel » (L. 125‑1 du code des assurances).
Or les catastrophes naturelles liées au changement climatique présentent une nouvelle nature, plus diffuse que l’image véhiculée par la médiatisation des catastrophes naturelles spectaculaires. Dans de nombreux territoires, le Retrait Gonflement des Argiles (RGA) est par exemple responsable de la majorité des fissures et des éboulements de terrain, qui, à terme, peut mener à des effondrements d’habitations.
Dans ce contexte, les maires, garants de la sûreté générale dans leur commune (Art. L. 2122‑27 du code général des collectivités territoriales) font déjà, et devront encore plus à l’avenir faire face à des circonstances qui imposent de prononcer des arrêtés de péril (désormais appelé arrêté de mise en sécurité).
Cette mesure, bien que nécessaire, place donc les propriétaires-occupants de plus en plus fréquemment dans des situations précaires, pour ne pas dire désespérées. En effet, bien que les articles L. 521‑1 et L. 521‑2 du code de la construction et de l’habitation protègent les locataires, les propriétaires ne bénéficient d’aucune garantie assurantielle. Et ce, alors même que les propriétaires sont mis en demeure d’exécuter des travaux et que le maire peut engager les travaux à ses frais.
Cet amendement vise à remédier au vide juridique qui place les propriétaires dans une impasse injuste. Afin de garantir un « droit au relogement d’urgence » pour les propriétaires, il prévoit que, lorsque l’arrêté de mise en sécurité est suivi d’une procédure d’urgence obligeant temporairement les propriétaires occupants à quitter leur logement, leur relogement puisse être pris en charge par les assureurs.
Il s’inscrit dans un contexte de renforcement de la lutte contre l’habitat indigne et de surveillance accrue de la dégradation des bâtiments anciens qui permettent de renforcer le contrôle qui s’exerce à l’encontre des propriétaires négligents. En effet, l’ordonnance n° 2020‑1144 du 16 septembre 2020[1] harmonise et simplifie les polices administratives spéciales en la matière. Plus récemment encore, la loi du 9 avril 2024[2] facilite le financement des travaux de rénovation pour les syndicats de copropriété ; elle autorise les maires à engager des diagnostics structurels des bâtiments et permet désormais aux autorités publiques d’intervenir de manière préventive sur les immeubles jugés indignes. Si les grandes métropoles françaises ont peu à peu créé des organismes spécialisés, le texte prévoit un accompagnement renforcé pour les petites et moyennes communes.
Mais il demeure que le droit au relogement des propriétaires n’est pas assuré lorsque, comme à Montmorency, ceux-ci sont victimes d’une situation dont ils ne sont pas responsables.
Cet amendement ajoute un nouveau chapitre au code des assurances pour encadrer le risque de devoir quitter son logement suite à une procédure d’urgence comprenant deux articles. Il définit cette assurance et précise ses modalités. Il précise les procédures d’urgence telles qu’elles sont définies par le code de la construction et de l’habitation. Comme pour les catastrophes naturelles, les assurances couvrant tout dommage causé à l’habitation incluent automatiquement une garantie en cas d’interdiction temporaire d’habiter suite à une procédure d’urgence. Il contraint les assurances à inclure cette d’inclure cette garantie dans leurs contrats. Cette garantie est précisée : il s’agit d’assurer le relogement du propriétaire jusqu’à la fin de l’interdiction d’habiter.
[1] relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations
[2] visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement.