- Texte visé : Projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024, n° 1285
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport détaillant, pour chaque année depuis 2017 :
1° L’évolution du solde structurel, du solde conjoncturel et du solde des mesures ponctuelles et temporaires ;
2° Les mesures ayant contribué à la dégradation du solde structurel, notamment les baisses de prélèvements obligatoires et les réformes ayant réduit les recettes publiques ;
3° Une évaluation de l’impact budgétaire de ces baisses de prélèvements obligatoires sur le solde structurel, en distinguant les effets directs (baisse de recettes) et indirects (absence d’effet de relance sur l’activité).
Par cet amendement, le groupe LFI–NFP profite de cette demande de rapport pour interpeller sur l’origine réelle de la dégradation des finances publiques, afin de sortir du brouillard idéologique entretenu par le Gouvernement et de rétablir une vérité comptable : les déficits ne sont pas causés par trop de dépenses, mais par trop de cadeaux fiscaux.
Depuis plusieurs années, le Gouvernement insiste sur la nécessité de redresser les comptes publics et de ramener le déficit sous la barre des 3 % du PIB. Pourtant, comme le montre le projet de loi d’approbation des comptes 2024, la situation budgétaire s’est fortement dégradée, en particulier le solde structurel, qui reflète l’état des finances publiques indépendamment des aléas conjoncturels ou des mesures exceptionnelles.
Le projet de loi d’approbation des comptes 2024 le dit lui-même :
« Cette dégradation du solde structurel résulte d’un dynamisme des recettes des prélèvements obligatoires moindre que l’activité en valeur après des années de dynamisme beaucoup plus marqué que l’activité. »
Autrement dit, ce sont les baisses d’impôts décidées depuis 2017 qui ont creusé les déficits. Ce que le Gouvernement appelle pudiquement « moindres recettes » n’est autre qu’un désarmement fiscal volontaire : impôt sur les sociétés, CVAE, taxe d’habitation, impôt sur la fortune, flat tax... En cumulé, ces choix représentent au minimum plus de 70 milliards d’euros de recettes annuelles perdues, selon plusieurs estimations.
Cette année encore, nous constatons une baisse de 22,8 milliards d’euros des recettes fiscales, bien loin du fantasme du ruissellement :
– 14,6 Md€ pour l’impôt sur les sociétés (baisse des bénéfices imposables : −3,9 % au lieu de +4 % prévus)
– 5,4 Md€ pour l’impôt sur le revenu
– 4 Md€ pour la TVA en raison d’une moindre consommation des ménages face à l’inflation.
En parallèle, les services publics sont étranglés, l’investissement est gelé, la bifurcation écologique est sacrifiée et le Gouvernement prétend que « nous vivrions au-dessus de nos moyens ».
Il est indispensable de sortir du discours d’apparente « neutralité comptable » et de replacer les décisions fiscales dans un cadre de responsabilité politique. La Cour des comptes, dans ses rapports successifs, a plusieurs fois signalé l’incohérence entre la trajectoire des dépenses et celle des recettes. Dans la continuité de la commission d’enquête présidée par le président de la commission des finances, Éric Coquerel, nous rappelons que cette situation budgétaire a été artificiellement creusée pour justifier une austérité qui frappe les plus fragiles, pendant que les plus riches bénéficient d’un régime fiscal à la carte.
Cette vérité permet d’engager un débat enfin honnête : la politique fiscale est un choix politique, pas une fatalité technique. Et le choix fait depuis 2017 est clair : donner aux plus riches et faire payer les autres.