- Texte visé : Projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, de programmation pour la refondation de Mayotte, n° 1470
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer les alinéas 25 à 63.
Par cet amendement d'appel, les députés du groupe LFI-NFP entendent rappeler que les maux dont souffre Mayotte trouvent leur origine dans une précarité extrême, conséquence directe du délaissement de l’État.
Alors que le projet de loi prétend œuvrer à la refondation de Mayotte, il consacre pas moins de 11 articles à la lutte contre l’immigration, faisant de celle-ci le cœur du texte. En estimant que l'immigration constitue "un facteur majeur de déstabilisation du territoire qui met directement en péril la paix civile et la cohésion sociale", le Gouvernement se jette à bras ouverts dans la xénophobie la plus indécente, en occultant de fait, sa responsabilité dans la pauvreté dans laquelle baignent les mahorais depuis des décennies.
Mayotte est plongée dans un abîme social dont l’immigration ne saurait être tenue pour responsable. Le fait que 77 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté n’est pas une conséquence des flux migratoires. De même, que la moitié de la population survive avec moins de 260 euros par mois ne relève pas d’un supposé poids de l’immigration. Le fait que 21 % des habitants, vivant dans des logements précaires, n’aient pas accès à l’électricité ne peut lui être imputée. Que le territoire ne compte que 260 médecins pour 320 000 habitants n’en est pas davantage le résultat. Et que Mayotte ne dispose que d’un seul centre hospitalier, totalement saturé, relève tout bonnement d’un abandon structurel de l’État.
Tous ces constats sont le résultat d’une seule et même cause : la politique néo-coloniale menée par les gouvernements successifs. À Mayotte, l’État dépense moins par habitant que dans tous les autres départements. Pourtant, face à l’abîme dans laquelle Mayotte est plongée, le Gouvernement choisit de légiférer uniquement contre les migrants. Une réponse aussi injuste qu’indigne, au regard de ce que la France est censée garantir.
Il est par ailleurs nécessaire de rappeler que les migrants à Mayotte vivent dans des conditions absolument indignes. Certains chercheurs, comme Luc Legeard, qualifient même leur situation d’« esclavage moderne ». Exploités, maintenus dans une grande précarité, ils n’ont que très rarement accès à des logements salubres ou à des conditions de vie décentes. On estime que près de 10 000 personnes ont péri ces dernières années en tentant de traverser le bras de mer séparant Anjouan de Mayotte — une mer devenue un véritable cimetière. Dans ce contexte, il est d’autant plus grave — et profondément injuste — de désigner les migrants comme boucs émissaires des difficultés sociales de l’île. Elle s’avère, en outre, totalement inefficace face aux véritables causes structurelles des inégalités à Mayotte.