- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2026, n° 1906
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des affaires économiques
- Mission visée : Cohésion des territoires
I. Modifier ainsi les autorisations d'engagement :
| (en euros) | ||
| Programmes | + | - |
| Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables | 0 | 0 |
| Aide à l'accès au logement | 0 | 0 |
| Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat | 0 | 1 106 000 000 |
| Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire | 0 | 0 |
| Politique de la ville | 0 | 0 |
| Interventions territoriales de l'État | 0 | 0 |
| Rénovation énergétique des bâtiments (100% Rénov')(ligne nouvelle) | 300 000 000 | 0 |
| TOTAUX | 300 000 000 | 1 106 000 000 |
| SOLDE | -806 000 000 | |
II. Modifier ainsi les crédits de paiement :
| (en euros) | ||
| Programmes | + | - |
| Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables | 0 | 0 |
| Aide à l'accès au logement | 0 | 0 |
| Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat | 0 | 1 135 000 000 |
| Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire | 0 | 0 |
| Politique de la ville | 0 | 0 |
| Interventions territoriales de l'État | 0 | 0 |
| Rénovation énergétique des bâtiments (100% Rénov')(ligne nouvelle) | 300 000 000 | 0 |
| TOTAUX | 300 000 000 | 1 135 000 000 |
| SOLDE | -835 000 000 | |
Le présent amendement vise à annuler les autorisations d’engagement et crédits de paiement inscrits au titre du dispositif « MaPrimeRénov’ » (contenues au sein de l'action « Réglementation, politique technique et qualité de la construction ») afin de permettre le financement du programme « 100 % Rénov’ », une nouvelle politique nationale de rénovation énergétique globale, simple et ambitieuse, destinée à remplacer un système coûteux et inefficace.
Depuis 2017, la politique gouvernementale en matière de rénovation énergétique s’est illustrée par la multiplication de primes et de chèques, sans cohérence d’ensemble, ni évaluation sérieuse de leurs effets. Le dispositif « MaPrimeRénov’ », censé encourager les ménages à rénover leurs logements, est devenu le symbole d’une gabegie budgétaire : plus de 3 milliards d’euros dépensés chaque année, 10 % de dossiers frauduleux, 44 000 rejets par l’ANAH en 2024 et seulement 350 000 rénovations globales réalisées sur plus de 2,5 millions de logements aidés.
Alors que la France compte 5,8 millions de passoires énergétiques et 12 millions de personnes en précarité énergétique, les résultats obtenus sont marginaux, tandis que les classes moyennes, jugées trop « riches » pour bénéficier d’aides, restent exclues du dispositif. Les malfaçons, la complexité administrative et les arnaques commerciales ont par ailleurs généré une méfiance durable des ménages et une déstabilisation du secteur du bâtiment. Il a par exemple été révélé récemment que sur les près de 1000 établissements contrôlés en 2024 par la DGCCRF, 34% d'entre eux ont fait l'objet de « suites correctives » et les infractions constatées ont donné lieu à « 140 injonctions de mise en conformité, plus de 50 amendes administratives, principalement pour du démarchage téléphonique illicite ». Par ailleurs, « plus de 140 procès-verbaux pénaux pour des pratiques commerciales trompeuses et de démarchage agressif ont été transmis à la justice ».
Face à ce constat d’échec, le dispositif « 100 % Rénov’ » propose de rompre avec la logique de subvention pour instaurer une logique d’investissement rentable et responsable, qui permet aux artisans du bâtiment de vivre de leur travail et non de subventions saupoudrées sans visibilité.
Ce nouveau dispositif repose sur un prêt à taux zéro universel, commercialisé par les établissements de crédit et ouvert à tous les résidents en France, quel que soit leur niveau de revenu, leur statut (propriétaire occupant, bailleur ou copropriétaire) ou la nature du bien. Le prêt est plafonné à 50 % de la valeur vénale du bien avant travaux, et son remboursement est adossé aux économies d’énergie réalisées (en l'espèce, au minimum 50 % des gains produits par les économies d’énergie sont consacrés au remboursement). Le solde éventuel du prêt est recouvré lors de la mutation du bien (par exemple sa vente ou une succession).
Cette architecture financière élimine tout risque pour les finances publiques et garantit un accès équitable à la rénovation. Deux modalités de financement sont envisageables : la création d’un fonds ad hoc par la Banque centrale européenne, qui nécessite une négociation avec nos partenaires mais aurait un coût nul pour l’État ou, à droit constant, un prêt à taux zéro dont les charges d'intérêt seraient compensées par l’État. La seconde option nécessite de mettre en oeuvre une nouvelle politique budgétaire à hauteur de 300 millions d'euros par an, correspondant à la rémunération du service rendu par les établissements de crédit une fois le dispositif monté en charge, qui remplacerait les fonds actuellement affectés à « MaPrimeRénov' ». C'est le sens de cet amendement.
Ce dispositif présente donc plusieurs avantages :
- un coût dix fois inférieur à celui du système actuel ;
- une simplification administrative totale (guichet unique) et la fin du système de « stop and go » lié à l'incertitude de la politique de subventionnement d'une année sur l'autre ;
- une responsabilisation accrue des banques et des entreprises du BTP, qui seront largement associées au déploiement de ce nouvel outil ;
- une rénovation globale de l’ensemble du parc résidentiel à terme ;
- un gain de pouvoir d’achat immédiat pour les ménages (la moitié des économies) et donc une neutralisation de « l'effet rebond » ;
- la création de 170 000 à 250 000 emplois qualifiés dans le cadre d’un contrat de filière national associant les chambres consulaires et les branches professionnelles.
En outre, le plan « 100 % Rénov’ » permettrait de réduire les émissions de CO₂ de 3,9 millions de tonnes par an, soit l'équivalent des émissions de 890 000 véhicules, et de stimuler la souveraineté industrielle par l’usage de matériaux et équipements produits en France.
Ainsi, le présent amendement a pour objet de mettre fin à un dispositif inefficace, dispendieux et générateur de fraudes, pour lui substituer un outil qui est bon pour la planète, bon pour le pouvoir d'achat et bon pour les finances publiques. La France ne peut plus se satisfaire d’une politique du chèque sans lendemain : avec « 100 % Rénov’ », elle se dote enfin d’un instrument crédible et ambitieux de transition énergétique. Il va de soi que cet instrument ne peut se définir que par des dispositions budgétaires : il nécessitera donc des mesures réglementaires ainsi qu'une concertation avec le secteur bancaire et les professionnels du secteur qu'il appartiendra au Gouvernement de mener.
Cet amendement procède au mouvement de crédits suivant, en autorisations d’engagement et crédits de paiement :
- il retire 1 106 000 000 euros en autorisations d'engagement et 1 135 000 000 euros en crédits de paiement sur l’action 4 « Réglementation, politique technique et qualité de la construction » du programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » ;
- il transfère 300 000 000 d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement vers un nouveau programme « Rénovation énergétique des bâtiments (100% Rénov') ».
Ce mouvement permet une économie substantielle à laquelle s'adjoindront des économies de structure au sein de l'ANAH qui sera déchargée du traitement des dossiers, de même qu'il préserve 400 000 000 d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement au bénéfice de la lutte contre l'habitat indigne et de « MaPrimeAdapt' » dans l'attente du déploiement de nouveaux dispositifs moins coûteux et plus efficaces.