- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2026, n° 1906
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
- Mission visée : Travail, emploi et administration des ministères sociaux
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
| (en euros) | ||
| Programmes | + | - |
| Accès et retour à l'emploi | 19 800 000 | 0 |
| Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi | 0 | 19 800 000 |
| Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail | 0 | 0 |
| Soutien des ministères sociaux | 0 | 0 |
| TOTAUX | 19 800 000 | 19 800 000 |
| SOLDE | 0 | |
Cet amendement vise à permettre à la solution “ Territoires zéro chômeur de longue durée ” (TZCLD) de poursuivre son action, dont les effets positifs bénéficient à de nombreux territoires, dans un contexte de hausse du chômage (+1,6 % au troisième trimestre 2025 par rapport au deuxième trimestre) et alors que la France doit produire davantage pour redresser ses comptes publics.
L’expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée, qui vise à mettre en œuvre le droit à l’emploi dans les territoires et à supprimer la privation durable d’emploi, se déploie dans le cadre de la loi n° 2020-1577 du 14 décembre 2020. Depuis 2021, les dix premiers territoires expérimentateurs (2016-2021) ont été rejoints par 73 nouveaux territoires, habilités par les ministres du Travail et de l’Emploi.
Cette expérimentation repose sur une conviction simple : nul n’est inemployable, dès lors que l’emploi est adapté aux capacités des personnes et aux besoins des territoires. Depuis bientôt dix ans, cette démarche collective démontre qu’il est possible d’offrir à chacune et chacun un emploi à durée indéterminée, utile et financé par le redéploiement du coût du chômage. Aujourd’hui, près de 6 000 personnes sont sorties du chômage de longue durée grâce au développement du projet dans 83 territoires, dont un tiers en dehors des entreprises à but d’emploi (EBE).
Deux évaluations publiques récentes ont confirmé la pertinence et l’efficacité du dispositif :
- La Cour des comptes, dans son rapport du 20 juin 2025, souligne que la démarche a fait la preuve de “sa capacité à remettre en emploi des personnes qui en étaient très éloignées”, notamment des publics fragiles au regard du marché du travail. Elle reconnaît que les activités développées “répondent à des besoins réels du territoire, mais non satisfaits par les entreprises existantes”, et qualifie de “souhaitable” la pérennisation de l’expérimentation. Elle rappelle également que “le financement des conséquences du chômage de longue durée doit pouvoir être supporté par la solidarité nationale”, certaines activités étant non rentables mais socialement utiles.
- Le Comité scientifique d’évaluation, dans son rapport final du 23 septembre 2025, décrit TZCLD comme une “innovation sociale totale et singulière”, confortant la place des comités locaux pour l’emploi comme maillon essentiel du réseau territorial pour l’emploi. Il confirme que la démarche comble un vide dans les politiques publiques d’insertion et qu’elle permet à des personnes durablement exclues du marché du travail de retrouver un emploi stable, notamment grâce au CDI.
Ces constats convergents confirment les trois principes fondateurs du projet : personne n’est inemployable, le travail utile ne manque pas, et l’argent n’est pas le principal obstacle dès lors qu’on prend en compte le coût social et économique du chômage.
Or, le projet de loi de finances pour 2026 ne traduit pas ces conclusions. L’enveloppe prévue est notoirement insuffisante pour garantir le maintien des emplois existants et le déploiement dans les nouveaux territoires en préparation.
Un tel budget ne permettra pas de pérenniser le dispositif “Territoires zéro chômeur de longue durée”, comme le propose la proposition de loi du député Stéphane Viry, déposée afin de maintenir cette initiative qui a fait ses preuves depuis dix ans. De nombreux rapports ont en effet souligné la complémentarité de TZCLD avec les autres dispositifs d’insertion par l’activité économique, au bénéfice des personnes durablement privées d’emploi.
Un sous-financement reviendrait à geler la dynamique de l’expérimentation, à rompre le principe d’exhaustivité, c’est-à-dire la possibilité pour toute personne volontaire d’accéder à un emploi, et à fragiliser les entreprises à but d’emploi et leurs salariés.
TZCLD n’est pas une dépense, mais un investissement dans la cohésion sociale et la vitalité des territoires. La Cour des comptes comme le Comité scientifique reconnaissent que son coût est en partie compensé par les économies et les recettes induites. Le Fonds d’expérimentation évalue le coût net d’un équivalent temps plein (ETP) à 6 000 euros par an, sans même tenir compte des externalités positives en matière de santé, de réussite scolaire ou de lien social. À long terme, l’emploi coûte moins cher que l’exclusion.
Le budget prévu pour l’expérimentation dans le projet de loi de finances pour 2026, fixé à 68,8 millions d’euros, ne permet pas d’assurer les embauches prévues dans les 83 territoires habilités, ni de couvrir le paiement des salaires des personnes embauchées en 2025. Sans revalorisation, des suppressions d’emplois interviendront au sein des entreprises à but d’emploi.
Cet amendement vise donc à garantir aux territoires les moyens nécessaires à la poursuite et au développement de l’expérimentation, en portant le budget 2026 à 88,6 millions d’euros. Ce montant intègre :
- les effectifs présents au 31 décembre 2025 (effet report) ;
- les trajectoires d’embauche 2026 des EBE existantes ;
- ainsi que les effectifs des nouvelles EBE à conventionner et des territoires à habiliter.
Pour assurer la recevabilité financière de cet amendement, en respectant le cadre de la LOLF.
- Il augmente de 19 800 000 d'euros les autorisations d'engagement et les crédits de paiement de la sous-action n°03.05 "Autres structures d'insertion dans l'emploi" du programme n° 102 " Accès et retour à l’emploi ";
- Il réduit de 19 800 000 d'euros les autorisations d'engagement et les crédits de paiement de l'action n°2 "Amélioration de l’insertion dans l’emploi par l’adaptation des qualifications et la reconnaissance des compétences » du programme du programme n° 103 "Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi".
Monsieur le Député Stéphane Viry tient toutefois à souligner qu’il ne souhaite pas réduire les crédits alloués au programme n° 103. Il appelle le gouvernement à lever le gage.
Enfin, cet amendement a été élaboré en collaboration avec l’association Territoires zéro chômeur de longue durée et s’inscrit dans une démarche transpartisane.