Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus de la session > Compte rendu intégral

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Consulter le sommaire
Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2009-2010

Compte rendu
intégral

Première séance du vendredi 23 octobre 2009

Projet de loi de finances pour 2010 Première partie

Première séance du vendredi 23 octobre 2009

Présidence de M. Marc Laffineur,
vice-président

M. le président . La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Projet de loi de finances pour 2010 Première partie (suite)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2010 (n os 1946, 1967).

Article 2 (suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant au sous-amendement n°748 à l’article 2.

La parole est à M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le président, madame la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, monsieur le rapporteur général, j’aimerais, avant que nous poursuivions nos débats sur la taxe professionnelle, vous faire part de mon sentiment. Je suis surpris par ce que j’ai pu entendre ou lire sur l’interprétation donnée à nos débats d’hier, s’agissant de la proposition de la commission des finances sur la réforme de la taxe professionnelle.

Lorsque j’entends dire que les PME ont échappé au pire, je suis choqué, car cela sous-entend que la proposition de la commission des finances, laquelle faisait de surcroît l’objet d’un consensus, était défavorable aux PME. Tel n’est pas le cas. Gilles Carrez l’avait dit en présentant cet amendement et Charles de Courson l’a parfaitement démontré, hier, dans son analyse. De fait, à y regarder de près, le nombre de perdants est quasi identique et aucune petite entreprise industrielle n’était perdante avec le dispositif que nous proposions, puisque la commission des finances proposait une réduction du foncier bâti industriel.

Je regrette ces interprétations et je tenais à le souligner, car le souci de la commission des finances est de soutenir les entreprises industrielles. Nombre d’entre nous auraient même souhaité que celles-ci soient davantage ciblées dans le cadre de la réforme.

Par ailleurs, il faut éviter la caricature. Lorsque j’entends l’un de nos collègues, Claude Goasguen, dire: « Il n’est pas étonnant que la gauche soutienne Gilles Carrez dès lors qu’il s’agit de réformer la taxe professionnelle et de territorialisation, la gauche gérant vingt régions sur vingt-deux! », je l’invite à s’adresser…

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. À Valérie Pécresse!

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. …à certains de ses collègues et à s’informer davantage. La territorialisation et la proposition de la commission des finances n’ont rien à voir avec les régions. Au contraire, c’est le bloc « communes et intercommunalités » qui était concerné par notre dispositif. Évitons la caricature et la polémique politicienne sur ce type de sujet, cela ne grandit personne!

Je tenais, monsieur le président, à faire cette déclaration avant que nous ne poursuivions nos travaux sur la taxe professionnelle.

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. L’un des auteurs de l’amendement présidant la séance, je tiens à dire que Marc Laffineur ne visait pas les collectivités territoriales dans cet amendement. Il ne s’agissait en aucun cas d’obtenir un milliard de ressources supplémentaires pour les collectivités locales.

M. Michel Bouvard. Tout à fait!

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Notre souci, au regard d’une charge fiscale globale qui ne faisait pas payer un euro de plus aux entreprises, était de mieux répartir la baisse, substantielle – 8 milliards d’euros – de la taxe professionnelle, afin qu’elle profite davantage à nos entreprises industrielles, quitte à ce que les baisses, considérables pour nombre de petites entreprises, commerciales ou de services, ne soient pas aussi importantes qu’elles vont l’être.

Dans cette affaire, il ne s’agissait en aucun cas de chercher des ressources supplémentaires pour les collectivités locales, mais de défendre avant tout la compétitivité de nos entreprises industrielles. Tel était l’enjeu de la proposition de Marc Laffineur.

M. le président. Je vous remercie, monsieur le rapporteur général, de rappeler que les élus sont au service de l’intérêt général.

M. Jean-Louis Idiart. Plus on en donne au MEDEF, plus il se montre ingrat!

M. le président. La parole est à M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Au nom du groupe SRC, je souscris aux propos du président de la commission des finances et du rapporteur général qui, de par les fonctions institutionnelles qu’ils exercent, ne peuvent sans doute pas dire ce que, pour ma part, je m’apprête à déclarer, sans, me semble-t-il, choquer qui que ce soit.

En peu de phrases, le rapporteur général vient de défendre remarquablement un amendement qu’il a abandonné hier, sous un prétexte qui n’a trompé personne. L’amendement Laffineur, qui, en réalité, était celui de tous les députés de la commission des finances, ne comportait certes pas de simulations, mais celui qui, implicitement, a été accepté par la majorité UMP n’en comportait pas davantage. Et aucun de nos collègues ayant refusé l’amendement Laffineur au motif de l’absence de simulation ne savait et ne sait encore aujourd’hui ce qu’il en sera, selon les cas, pour les collectivités.

Dans cette affaire, le Parlement est présenté comme irresponsable…

M. Jean-Louis Idiart. Exactement!

M. Jérôme Cahuzac. …puisque méconnaissant le sort des entreprises, alors que le Gouvernement serait là pour les défendre. Cette dichotomie institutionnelle entre un gouvernement qui prétendrait mieux défendre les entreprises qu’une assemblée de parlementaires responsables est extrêmement choquante, car elle ne repose sur rien. Elle est fondamentalement injuste, puisque la commission des finances, unanimement, tous courants politiques confondus, était tombée d’accord sur un dispositif qui reste à ce jour, à mes yeux, bien meilleur que celui adopté hier par la majorité UMP. Cette dichotomie est non seulement choquante et injuste, mais encore tout à fait préjudiciable à l’intérêt général et à la bonne marche de notre pays.

Dans un premier temps, le Gouvernement et le Président de la République apparaissent pour ce qu’ils ne sont pas: les meilleurs défenseurs des entreprises. Mais la vérité se fera jour et ce sont les entreprises elles-mêmes qui se rendront compte, bientôt, que le dispositif proposé par les parlementaires était bien meilleur que ce qu’a imposé le Gouvernement.

Je dirai enfin à ceux qui prônent un hyper-Parlement pour faire face à un hyper-Président qu’il ne faut pas reculer à la moindre brise!

M. le président. Je vais donner la parole à M. Bouvard, puis à M. Garrigue. Ensuite, nous reprendrons l’examen des amendements. Ce matin, le règlement sera appliqué avec rigueur!

M. Jérôme Cahuzac. Il eût mieux valu l’appliquer hier!

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Vous avez bien fait de souligner, monsieur le président, que nous avons encore beaucoup de travail. Aussi n’abuserai-je pas de mon temps de parole.

Je ne crois pas qu’il y ait une dichotomie entre le Parlement et le Gouvernement ni une surenchère entre l’exécutif et le législatif, concernant la défense des entreprises. Mais je me réjouis de ce qu’ont dit le président de la commission des finances et le rapporteur général, et chacun des cosignataires de l’amendement y aura été sensible. En vérité, nous avons eu affaire à une très belle opération de lobbying, menée par certaines professions, fondée sur une caricature de ce qu’était la réforme de la taxe professionnelle, et même sur une accusation de lobbying faite aux élus locaux par ceux-là mêmes qui attendaient un résultat positif de leur propre action de lobbying, ce qui est paradoxal, voire surréaliste, vous en conviendrez!

Je le répète, je me réjouis des propos tenus par le président de la commission des finances et par le rapporteur général, car le Parlement est là pour défendre l’intérêt général,…

M. Jean-Louis Idiart. Cela ne s’est pas vu hier!

M. Michel Bouvard. …non pour obéir à telle ou telle injonction, d’où qu’elle vienne et quelles que soient les bonnes raisons de certaines professions pouvant effectivement rencontrer des difficultés. La priorité de la réforme, c’est l’allégement des charges pour l’industrie – l’industrie délocalisable et soumise à la concurrence internationale. Je suis très heureux que nous restions sur cette ligne.

M. Jean-Claude Sandrier. Hier, vous vous êtes couchés!

M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Je ne veux pas engager une polémique sur une affaire si grave mais, ce matin, j’ai été choqué en lisant dans la presse que l’Assemblée nationale s’est soumise à l’avis du Gouvernement.

Je ne vous mets pas en cause personnellement, madame la ministre. Néanmoins, nous vous avons tous entendue, hier matin, dire clairement, à propos de l’amendement Laffineur, lequel était soutenu par l’ensemble des députés présents dans cette assemblée, que vous étiez d’accord à plus de 90 %.

M. Jean-Louis Idiart. À 99 %!

M. Daniel Garrigue. Ce n’est pas l’Assemblée nationale qui s’est soumise à l’avis du Gouvernement, c’est le Gouvernement qui s’est soumis à un autre avis. Ce n’est pas tout à fait pareil!

Par ailleurs, si l’on prend en compte le prétexte selon lequel il n’y a pas de simulation, c’est l’ensemble de la réforme de la taxe professionnelle qu’il faudrait repousser! Chacun d’entre vous l’a souligné, nous n’avons quasiment pas d’éléments de simulation dans cette réforme.

Enfin, et ce sujet concerne l’ensemble des élus locaux, le problème de la territorialisation de l’impôt reste entier.

M. le président. Nous reprenons maintenant l’examen des sous-amendements à l’amendement n° 45 de la commission à l’article 2.

Je suis saisi d’un sous-amendement n°748 du Gouvernement.

La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi. L’examen de ce sous-amendement me permet de rendre hommage à la qualité du travail fourni par la commission des finances et des propositions du rapporteur général sur une question très importante, puisqu’elle concerne la territorialisation – nous en avons d’ailleurs longuement parlé.

Je rappelle au passage que le rôle du Gouvernement est de mener une politique qui a été approuvée par les électeurs. Dans le domaine économique, elle a pour objectif principal de créer, de maintenir et de développer de l’emploi sur le territoire, en passant de préférence par le secteur industriel dont nous savons qu’il risque le plus d’être délocalisé. C’est dans cet esprit que s’inscrit la proposition que nous examinons actuellement: elle concerne la suppression de la taxe professionnelle et sa modification par l’établissement d’une contribution économique territoriale dont nous souhaitons qu’elle soit moderne, efficace, lisible, et qu’elle institue un lien avec le territoire. Nous avons tout intérêt à concentrer nos efforts sur la qualité de ces travaux.

J’en viens maintenant au sous-amendement n°748. J’ai conscience qu’il y a débat entre le Gouvernement et la commission des finances de l’Assemblée nationale sur les modalités de répartition du produit de la cotisation complémentaire sur la valeur ajoutée. Cela étant, nous sommes d’accord sur la finalité: nous souhaitons tous concilier au maximum le maintien d’une incitation des collectivités à accueillir des entreprises, avec les contraintes et les sujétions que cela suppose.

Nous divergeons, me semble-t-il, sur les moyens. Pour ce qui est du choix de la répartition de la cotisation complémentaire, j’ai employé à dessein le mot « établissement » plutôt que celui d’« entreprise » car, dans notre tissu économique, les entreprises comprennent de plus en plus souvent de multiples établissements.

La méthode que vous avez retenue dans votre amendement n° 45, monsieur le rapporteur général, est le rattachement de l’attribution de la cotisation complémentaire à la collectivité par établissement.

Est-ce le moyen le plus approprié de concilier nos deux objectifs, c’est-à-dire maintenir l’incitation pour une collectivité à attirer de l’activité économique et faire en sorte que lesdites collectivités puissent répondre à leur besoin de financement, sachant que l’aménagement territorial est différent, que des zones ont une forte valeur ajoutée grâce aux entreprises tandis que d’autres à valeur ajoutée beaucoup moins forte ont des besoins de financement? J’entends déjà les arguments selon lesquels il ne faut pas mélanger cotisation complémentaire et aménagement du territoire. Mais les outils fiscaux peuvent être utilisés si l’on a en tête des objectifs légitimes, comme c’est le cas ici.

Nous avions, quant à nous, proposé une répartition nationale qui nous paraissait plus adaptée pour l’avenir. J’ai entendu, ici ou là, que c’était un « machin » inventé par Bercy. Nous avons, nous aussi, travaillé de manière concertée. Nous avons essayé d’être le plus intelligents et le moins polémiques possible afin d’atteindre ces deux objectifs. Nous y parvenons, semble-t-il, par deux voies différentes. J’aimerais vous exposer la notre.

Les caractéristiques de la cotisation complémentaire se prêtent mal à une affectation directe de son produit aux collectivités. En effet, on passe d’un impôt – la taxe professionnelle – dont l’assiette est fixée localement à une nouvelle contribution économique territoriale dont l’assiette, pour la partie cotisation complémentaire, est déterminée au niveau de l’entreprise – et non de chacun des établissements, ce qui serait beaucoup trop compliqué. Le barème de la valeur ajoutée – le taux de 1,5 % – demeure fixé au niveau national. Il nous semble qu’il ne pourrait y avoir d’affectation directe et générale de la cotisation complémentaire aux collectivités d’accueil des entreprises que si ces dernières étaient composées d’un seul établissement. Or, comme je le soulignais précédemment, de nombreuses entreprises ont aujourd’hui de multiples établissements. Une telle approche, d’ailleurs retenue dans votre texte, monsieur le rapporteur général, nécessite des mécanismes correcteurs et une péréquation, également prévus par votre amendement. Donc, étant donné l’architecture de cet impôt, la façon dont il est levé et son mode d’affectation aux collectivités, il ne nous semble pas que la méthode « établissements-collectivités » soit la plus juste sur le plan des principes.

Une répartition par établissement aboutit nécessairement à une ventilation très inégalitaire. Certaines collectivités, en effet, accueillent de très nombreux établissements: c’est particulièrement vrai pour les départements et les régions, les simulations que nous avons effectuées l’attestent. S’agissant des départements, la répartition par établissement accroîtrait les ressources fiscales de trois départements seulement – dont Paris et les Hauts-de-Seine – pour un montant supérieur à 1 milliard d’euros; les quatre-vingt-dix-sept autres départements verraient, quant à eux, leurs ressources fiscales diminuer. Concernant les régions, la répartition par établissement ne favoriserait que la région Île-de-France, dont les ressources fiscales augmenteraient de 67 %, les vingt-cinq autres – y compris les quatre régions d’outre-mer – verraient, en revanche, leurs ressources fiscales diminuer. Les inégalités sont un peu moindres pour les intercommunalités et c’est la raison pour laquelle j’ai clairement fait savoir que le Gouvernement était tout à fait ouvert et prêt à accepter le principe de la territorialisation, mais à condition que soit prévu un mécanisme de péréquation.

Il ne nous semble pas que la méthode clé « collectivités-établissements » soit le point de départ le plus satisfaisant, ne serai-ce que parce qu’il faudrait immédiatement la corriger par l’instauration d’un puissant mécanisme de péréquation. Nous nous sommes interrogés, par conséquent, sur l’intérêt de démarrer tout de suite avec un mécanisme qui nécessiterait une forte péréquation pour permettre une bonne répartition du produit et éviter de criantes inégalités entre Paris et l’Île-de-France, d’une part, et le reste des départements et des régions, d’autre part.

Il semble également au Gouvernement que la répartition nationale de la cotisation complémentaire – c’est-à-dire le système qu’il a proposé – n’est pas incompatible avec un lien très fort entre le territoire et l’entreprise, lien auquel il est, lui aussi, extrêmement attaché. C’est pourquoi j’ai indiqué tout à l’heure que nous sommes tout à fait d’accord sur les objectifs poursuivis. La cotisation locale d’activité crée ce lien entre le territoire et l’entreprise qui s’y installe, même si cela s’avère moins important, en volume – 6 milliards d’euros – que ce que nous connaissions avant.

De plus, nous avons retenu trois critères de répartition nationale, qui ne sont pas ce « machin » inventé à Bercy, à savoir: l’emprise foncière, les salariés et, enfin, la population. Par la vertu et la combinaison de ces trois critères, tout territoire qui accueille un nouvel établissement ou dont l’établissement s’agrandit et, par là même, recrute, attire forcément de la population. Il voit, de ce fait, sa quote-part de cotisation complémentaire augmenter. Le lien territorial est, par conséquent, double.

Je ne dis pas que les critères retenus pour cette répartition nationale soient optimaux. Nous recherchons la perfection et nous sommes, bien entendu, tout à fait prêts à en examiner d’autres. Je tiens simplement à signaler que la répartition proposée par l’amendement n° 45 entraînerait la mise en place d’un mécanisme de péréquation, lequel présente certains éléments de fragilité. J’entends d’autres arguments selon lesquels cette « chose » inventée à Bercy sera gérée sur le plan national. Mais le fait qu’elle le soit sur le plan national ne signifie pas qu’elle sera entre les mains du Gouvernement, ce qui mettrait fin à une décentralisation bienvenue. C’est le Parlement qui déterminera les critères et les affectations.

Je vous assure, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, et, à travers vous, tous ceux qui ont beaucoup travaillé sur ce dossier, que nous partageons le même objectif, même si nous divergeons sur les moyens d’y parvenir. J’ai bien conscience du caractère quelque peu novateur d’une répartition décidée à l’échelon national avec, pour objectifs, de maintenir le lien et de répondre aux besoins de financement. Ce n’est pas la panacée. Nous avons simplement cherché le système le plus adapté au contexte nouveau créé par la mise en place de la contribution économique territoriale.

Je vous le répète, le Gouvernement ne fait pas de cette territorialisation une affaire de principe. Il souhaite impérativement, en revanche, réaliser l’objectif, donc conserver ce lien territorial et permettre aux collectivités d’attirer sur leur terrain, dans leur champ de compétences, des entreprises avec l’ensemble des contraintes que cela suppose. Il est toutefois indispensable de tenir compte des effets très inégalement redistributifs de la valeur ajoutée, laquelle dépend de la création des entreprises qui s’implantent sur le territoire national, quels que soient les degrés de compétition que l’on peut observer entre les régions et les départements, au travers de telles ou telles agences.

Le mécanisme que vous proposez doit être considéré en gardant bien en tête la nécessité d’organiser une péréquation. En effet, les départements qui se trouvent dans une situation extrêmement difficile doivent également bénéficier d’une restitution, afin de répondre à leurs besoins de financement légitimes, compte tenu du vieillissement de leur population et de l’attractivité du territoire qui, si elle est faible, rend le phénomène difficile à enrayer.

Telles sont les observations que je souhaitais faire. Je le répète, je suis très ouverte au débat et je ne suis pas accrochée à des principes, pourvu que cela permette d’atteindre les objectifs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je vous remercie, madame la ministre, de votre présentation extrêmement claire et sincère. Nous partageons totalement l’objectif recherché, qui est de donner aux départements les moins favorisés les chances de s’en sortir après la réforme. Notre cheminement est le même que le vôtre. Comment, ainsi, éviter que des départements – ceux du Massif Central, par exemple – ne soient pénalisés, comme ils l’ont été jusqu’à maintenant? Nous connaissons l’histoire de leurs ressources au cours de ces dix dernières années. Quel système, du fait de cette réforme, peut leur permettre de s’en sortir?

La réponse ne va pas de soi. Le Gouvernement estime que, si l’on remonte au niveau national l’ensemble des valeurs ajoutées de toutes les entreprises et qu’on opère ensuite une redistribution selon des critères appropriés, et donc favorables auxdits départements, ils bénéficieront de ressources supplémentaires. Certes, la compensation sera totale en 2011, mais que se passera-t-il après? Nous avons une certaine expérience, s’agissant de l’évolution de la DGF et de la fameuse dotation de fonctionnement minimale bénéficiant aux vingt-quatre départements les plus défavorisés, puisque nous menons ces travaux depuis près de quinze ans. Nous avons donc pu constater qu’un étage de péréquations était nécessaire pour l’avenir. Je prendrai l’exemple très intéressant de la Mayenne, qui n’est pas un département parmi les plus pauvres. Comme l’a précisé Mme la ministre, un système national tiendrait notamment compte de la population ou des effectifs salariés. Pour le département de la Mayenne, on parviendra donc à redescendre, en 2011, un maximum de cette cotisation complémentaire sur la valeur ajoutée. Mais que se passera-t-il ensuite?

M. Jérôme Cahuzac. C’est la question!

M. Gilles Carrez, rapporteur général . La population de la Mayenne, même si elle croît, augmentera moins que celles de la Côte d’Azur, du Languedoc-Roussillon ou des Hauts-de-Seine, par exemple. Donc, quels que soient les critères pris, et même avec les meilleures intentions du monde, la situation de la Mayenne, de l’Aveyron ou du Cantal se dégradera en 2011. Vos services, que je remercie, ont travaillé de la façon la plus exhaustive possible et nous sommes totalement d’accord sur l’objectif à atteindre, mais quelles auraient été les conséquences de ces différentes répartitions si elles avaient été en vigueur ces dix dernières années? Tous ces départements auraient peut-être été correctement compensés au début, mais, petit à petit, leur situation se serait dégradée. Nous proposons, en conséquence, un système de péréquation très puissant, comme il n’en a jamais existé jusqu’à présent, permettant à chacun d’être compensé en 2011 à hauteur de ce qu’il avait. À partir de 2012, on comparera l’évolution moyenne nationale et celle des cotisations complémentaires des différents départements. Pour les départements de l’Île-de-France, notamment, qui connaîtront une augmentation très supérieure à la moyenne, une partie de celle-ci sera basculée vers les départements moins favorisés. Ce mécanisme corrigera en permanence des inégalités qui, sans cela, ce creuseraient.

Il y a une autre dimension que vous avez évoquée, madame la ministre, c’est la territorialisation. On sent bien qu’elle est nécessaire au niveau local. Pour que les maires et présidents d’EPCI se battent pour leurs entreprises, il faut qu’ils bénéficient de la valeur ajoutée desdites entreprises. Si une entreprise située près de Strasbourg fait de très bonnes affaires, que sa valeur ajoutée augmente rapidement, M. Schneider sera-t-il d’accord pour que cela profite à Menton ou à Béthune?

M. André Schneider. Je préfère qu’elle reste en Alsace!

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Mais, si cette ressource s’envole tandis que les choses se passent moins bien dans la Lorraine voisine, sans doute sera-t-il tout à fait d’accord pour qu’il y ait un mécanisme de solidarité. C’est un peu l’esprit dans lequel nous avons travaillé.

C’est un débat extrêmement important, nous l’avons esquissé hier et il me paraît utile de l’avoir ce matin. En commission des finances, nous y avons beaucoup travaillé et nous sommes arrivés à une conclusion unanime.

M. Jérôme Cahuzac. Comme hier!

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Voilà pourquoi, madame la ministre, je donne un avis défavorable au sous-amendement.

M. le président. Comme c’est un sous-amendement du Gouvernement et qu’il n’a pas été discuté en commission, je vais laisser plusieurs d’entre vous prendre la parole.

La parole est à M. Michel Diefenbacher.

M. Michel Diefenbacher. Nous avons tous conscience de toucher là l’un des points majeurs de la réforme qui nous est proposée.

Ce qui est en cause, en réalité, c’est pour partie l’autonomie fiscale des collectivités territoriales, mais c’est surtout la solidarité entre les territoires et, finalement, la politique d’aménagement du territoire, ce qui pose deux questions: comment la ressource fiscale doit-elle être perçue et comment peut-elle être efficacement redistribuée entre les différentes collectivités?

Il n’est pas nécessaire d’insister sur le fait que les richesses d’une manière générale et les ressources fiscales en particulier sont réparties d’une manière extrêmement inégale sur le territoire national, les exemples donnés tout à l’heure le montrent à l’évidence et je n’y reviens pas. Cela a fait l’objet de nombreuses études, de nombreux rapports, en particulier au Sénat il y a cinq ou six ans sur les questions de péréquation.

Il est clair que ce n’est pas l’autonomie fiscale qui réglera ce problème. L’autonomie fiscale, c’est tout de même, d’une certaine façon, perpétuer les inégalités, c’est un peu chacun pour soi. Celui qui a une masse fiscale élevée peut pratiquer des taux modérés et donc être attractif, celui qui a peu de bases fiscales est obligé de pratiquer des taux élevés, ce qui dissuade les entreprises de venir s’implanter.

La péréquation est donc indispensable, nous l’avons prévue hier au niveau du département pour les communes. La question est de savoir qui peut au mieux l’assurer pour les départements et les régions.

Le rapporteur général a eu raison de rappeler les débats que nous avons eus au sein de la commission des finances sur ce sujet. Moi, je suis tout de même très sensible aux arguments qui ont été présentés tout à l’heure par la ministre. Assurer une péréquation juste, c’est en réalité traiter au niveau national le problème de l’ensemble des collectivités territoriales. Ce n’est pas parce qu’un dispositif national serait mis en œuvre qu’il serait intégralement piloté par l’État. Il y a des structures de concertation, il y a le Comité des finances locales et nous savons très bien la part qu’il prend dans les débats de cette nature et la manière dont il défend les intérêts des collectivités territoriales.

Nous avons une chance historique, c’est que les ressources procurées par la cotisation complémentaire seront considérables, 3 milliards pour les régions, près de 7 milliards pour les départements. Jamais nous n’avons eu une masse financière de cette importance pour assurer une juste répartition des ressources entre les collectivités territoriales. Par conséquent, c’est un rendez-vous historique que nous avons pour la politique d’aménagement du territoire et la solidarité entre nos différents espaces.

La juste péréquation, ce n’est pas un bon sentiment, c’est une obligation juridique, constitutionnelle. Aux termes du dernier alinéa de l’article 72-2 de la Constitution, « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales ». Chacun sait qu’en matière juridique, l’indicatif est en réalité un impératif. Nous sommes donc obligés de le faire et c’est à cet exercice que nous sommes conviés.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Ce que nous cherchons, mes chers collègues, c’est à maintenir le lien entre entreprises et collectivités territoriales et à avoir une vraie péréquation. Le grave inconvénient du sous-amendement du Gouvernement, c’est qu’il mélange les deux.

Selon les simulations que vous nous avez présentées, madame la ministre, les résultats, dans un premier temps, ne paraissent pas mauvais puisque le rapport entre la population du département et celle de l’ensemble des départements est pondéré par un coefficient de 0,4, mais pourquoi surpondérer la CLA industrielle par rapport à la CLA non industrielle alors que, dans l’assiette de la CLA, l’immobilier industriel représente un bon tiers? Prévoir 40 % pour l’une et 20 % pour l’autre, c’est un peu curieux.

Comme l’a expliqué le rapporteur, il faut distinguer deux choses. Il y a le lien entre entreprise et collectivité territoriale et il y a la territorialisation de l’assiette: nous avons réalisé celle-ci pour le bloc communal avec l’accord du Gouvernement, mais une territorialisation sans péréquation aboutit à des catastrophes, et l’amendement de la commission des finances assure une péréquation forte.

Elle est forte, mais ce qui est important, pourriez-vous nous dire, c’est ce qu’elle deviendra. M. Laffineur qui avait fait les simulations: si l’on retient 50 % de la croissance, cela ne fait pas beaucoup les premières années – environ 150 millions par an d’après nos calculs – mais, au bout de dix ans, il y aura un mécanisme puissant qui entraînera automatiquement un rééquilibrage.

Il faut bien distinguer les deux aspects. Les membres du Nouveau Centre soutiennent la position de la commission et voteront contre le sous-amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Je vous remercie tout d’abord au nom de mon groupe, monsieur le président, de laisser le débat se dérouler.

L’article 2 pose deux questions majeures. Celle du barème fut tranchée hier dans le sens que l’on sait. La seconde, c’est, bien sûr, la territorialisation.

Madame la ministre, n’y voyez surtout pas d’offense de ma part, mais la culture d’élu local, la perception du rôle essentiel de la démocratie locale et des élus locaux, cela ne se comprend ni ne s’attrape par contiguïté ou contagion. Vous avez beau être entourée du maire de Chantilly et du président de la communauté d’agglomération de Grenoble, cela ne suffira pas. Même si vous voulez faire preuve de bonnes intentions, certains mots révèlent ce qu’est en fait votre état d’esprit.

Vous dites, de manière assez lucide, que vous avez conscience du caractère novateur d’une répartition nationale. C’est effectivement très novateur par rapport à 1982. Il se trouve qu’entre-temps la décentralisation est intervenue, et il faudrait que les principaux dirigeants de notre pays en prennent vraiment conscience, sans se contenter de certaines phrases destinées à faire plaisir.

Vous nous expliquez que vous ne faites pas de la territorialisation un principe. Pour nous, c’en est un, et c’est une vraie divergence entre nous. Au fond, le sous-amendement que vous défendez contre l’amendement de Gilles Carrez et de la commission des finances a pour fondement, me semble-t-il, votre perception de la décentralisation et du rôle des élus locaux. Nous sommes en total désaccord avec vous, et avec la position du Gouvernement si c’est elle que vous avez présentée.

Nous sommes d’accord, en revanche, sur les objectifs. Créer et développer de l’emploi, qui est contre? De nombreux élus locaux siègent ce matin encore pour examiner ce projet de loi de finances, personne ne s’y oppose, et nous le faisons depuis bien plus longtemps que vous n’en parlez. Quant à l’affectation locale, nous en connaissons précisément toute l’importance car nous savons que, sans elle, nous ne pourrons pas créer de la richesse locale et développer les territoires.

Notre vie personnelle ou notre culture professionnelle ont d’ailleurs une influence sur nos positions. M. Diefenbacher, député de Lot-et-Garonne comme moi, a, chacun le sait, occupé dans une vie antérieure des fonctions éminentes dans l’appareil d’État, et je ne suis pas surpris qu’il soit plutôt favorable à votre position. On n’est pas préfet pendant quinze ou vingt ans sans que cela laisse des traces et vous donne une vision d’un l’État qui peut tout, qui fait tout, laissant aux élus locaux, d’une certaine manière, une forme de portion congrue.

Nous ne sommes pas d’accord avec vos critères, notamment de population, tout simplement parce que, comme l’a parfaitement démontré le rapporteur général en prenant l’exemple de la Mayenne – mais il aurait pu prendre celui de l’Ariège –, si un département est pauvre et que sa population diminue, il est condamné à continuer de s’appauvrir et à voir sa population diminuer encore. Vos critères de péréquation ne sont donc pas les bons, et ceux proposés par l’amendement de Gilles Carrez et de la commission des finances sont infiniment meilleurs.

Nous sommes tout à fait hostiles au sous-amendement du Gouvernement. Hier, des engagements ont été pris, de façon je crois assez solennelle, pour que, moyennant l’abandon d’un barème pourtant bien plus intelligent et plus performant, la territorialisation soit garantie. Ce que nous souhaitons, pour éviter aux uns et aux autres d’avoir à se déjuger, et ce qui me paraîtrait à la fois élégant, utile et juste, c’est que, même si ce n’est pas l’usage qu’une telle demande se fasse dans ce sens, le Gouvernement le retire.

M. le président. La parole est à Mme Claude Greff.

Mme Claude Greff. J’ai le sentiment que M. Cahuzac n’a pas tout compris… (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC)

M. Jean-Louis Idiart. Il est là depuis le début, lui!

Mme Claude Greff. …et, en entendant Charles de Courson vous répondre, madame la ministre, j’ai eu l’impression que vous parliez tous de la même chose et qu’il y avait peut-être une forme d’incompréhension.

Le débat qui a lieu depuis hier soir est essentiel pour nos collectivités et particulièrement les petites communes. Je ne suis qu’une élue nationale mais je me préoccupe beaucoup de nos territoires et particulièrement du lien entre entreprise et territoire. Une collectivité qui fait des efforts pour attirer des entreprises doit bénéficier en retour de son investissement. C’est le premier objectif.

Donc, ce que souhaite la commission – le rapporteur général l’a bien expliqué –, c’est la territorialisation.

Le deuxième objectif, c’est la péréquation, car il est hors de question que nos territoires ruraux et semi-urbains – il n’y a pas que Paris: mon département, l’Indre-et-Loire, compte une très grosse ville, mais aussi des territoires ruraux et semi-urbains – perdent leurs marges de manœuvre dans le nouveau système.

Madame la ministre, j’ai bien compris que votre amendement visait à concilier ces deux objectifs. Mais s’il était important, hier, que la discussion soit approfondie et de qualité, il me semble tout aussi important qu’elle se poursuive aujourd’hui pour que nous parvenions à un bon compromis.

Je suis bien consciente que votre préoccupation est la nécessaire solidarité entre les territoires. Comme l’a dit le rapporteur général, nous partageons les mêmes objectifs. C’est pourquoi je suggère que nous poursuivions cette discussion aujourd’hui.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Madame la ministre, deux visions sont possibles: soit celle qui figure dans l’amendement de la commission, soit celle que vous proposez.

Je donne acte au Gouvernement que son amendement prend en considération les problématiques d’un certain nombre de départements à faibles ressources et qu’il paraît de prime abord, au regard des simulations qui nous ont été présentées, permettre une plus grande équité. Il présente cependant une faiblesse qui me paraît l’emporter sur les autres considérations.

Il s’agit de la logique de la territorialisation. Les départements ont besoin de la territorialisation car ils sont intéressés, au même titre que les communes, à l’investissement local dans le développement économique. Ils y sont intéressés parce que les grandes opérations ne peuvent se faire sans un partenariat avec les collectivités départementales.

Il ne faut pas perdre de vue le contexte. Nous savons que la réforme va réduire notre pouvoir fiscal. Dans mon département, où celui-ci représente 44 % des moyens de fonctionnement, il devrait être de 12 seulement après la réforme – dans sa version initiale. Mais, au-delà du pouvoir fiscal, dont nous avons pris acte qu’il allait diminuer, il y a la problématique de la dynamique de l’assiette. (« Eh oui! » sur les bancs du groupe SRC.)

C’est quelque chose de fondamental. On ne peut pas amputer à la fois notre pouvoir fiscal et la dynamique de l’assiette. Et une dynamique de l’assiette territorialisée sera toujours préférable à une dotation ou à une dynamique d’assiette nationale, dépendante d’un vote et des enjeux d’équilibre du budget de l’État chaque année.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Exactement!

M. Michel Bouvard. Même si les simulations montrent l’intérêt que pourraient avoir certains départements, au départ, à accepter l’amendement du Gouvernement, le véritable enjeu est celui de la dynamique de l’assiette dans la durée. Or nous savons que la dynamique de l’assiette, par le biais de la valeur ajoutée, reflet de l’activité économique, sera fatalement supérieure à toute répartition qui serait proposée au niveau national.

Dès lors que la péréquation est intégrée dans les dispositions proposées par la commission des finances, le problème de l’équité entre les départements qui auront le plus grand dynamisme économique et les autres sera traité, car la dynamique de l’assiette bénéficiera aussi, par le biais de la péréquation, aux départements les plus affaiblis économiquement, qui ont une population vieillissante et n’ont pas la chance – ce n’est pas la faute de leurs gestionnaires – d’être situés dans les grandes zones de développement économique ou sur les grands axes du pays.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Michel Bouvard. Je reste donc favorable aux dispositions proposées par la commission des finances, tout en reconnaissant que l’amendement du Gouvernement est empreint d’un souci d’équité. Sa faiblesse majeure, c’est qu’il ne tient pas compte du lien territorial ni de la dynamique de l’assiette. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et SRC.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Très bien!

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier. L’avenir des collectivités territoriales, tel qu’il peut se lire dans ce projet de budget, c’est vraisemblablement moins de dotations. Ce sera d’ailleurs le cas dès l’année prochaine. Et ce pour une raison très simple, que le Président de la République a lui-même formulée, c’est que l’exécutif souhaite faire participer les collectivités territoriales à la résorption des déficits du pays, déficits dont elles ne sont pourtant pas responsables.

En outre, il existe un risque avéré – que la commission a souhaité prévenir – que le déplacement des ressources de taxe professionnelle provoque une augmentation de l’impôt des ménages. Ce risque est très réel.

Enfin, il y a la question de la manière dont l’État doit assumer ses responsabilités d’aménagement du territoire.

Nous faisons depuis longtemps une proposition, d’ailleurs relativement partagée mais dont on nous dit qu’elle est très difficile à mettre en œuvre: la taxation des actifs financiers des entreprises. Monsieur le rapporteur général, bien qu’un amendement, hier, ait appelé la réponse que vous avez faite, taxer les actifs financiers, ce n’est pas taxer la trésorerie des entreprises; il s’agit d’imposer des placements. Imposer ces actifs à 0,2 % rapporterait environ 12 milliards d’euros. Les marges financières sont là. Même si certaines PME sont très en difficulté, il faut regarder les choses de manière générale, notamment du côté des dividendes distribués.

L’intérêt de cette proposition est triple. Tout d’abord, elle permettrait de compenser les pertes qui s’annoncent pour les collectivités territoriales. Il faut savoir que l’État doit aujourd’hui aux collectivités 3,5 milliards d’euros environ.

Ensuite, elle permettrait de redynamiser la politique d’aménagement du territoire, qui a actuellement tendance à rétrécir de plus en plus.

Enfin, ce serait moins d’argent destiné aux marchés financiers et à la spéculation, dont on sait ce qu’ils en font.

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Je souhaite juste donner un exemple, à petite échelle, de ce qui pourrait se passer. Et croyez-moi, c’est du vécu!

Une entreprise installée sur une commune souhaite s’agrandir. C’est très souvent le cas: en France, nous avons davantage à faire à des croissances endogènes qu’à des entreprises qui viennent de l’extérieur. Cette entreprise s’est installée il y a cinq ou dix ans. À l’époque, le maire lui avait déroulé le tapis rouge; il était content, cela lui faisait de la taxe professionnelle.

Cette entreprise souhaite donc changer de locaux. Son dirigeant va trouver à nouveau le maire, qui lui dit: « Désolé, je ne peux plus rien faire: nous sommes maintenant dans le système de la taxe professionnelle unifiée. » Il lui explique qu’avec la taxe professionnelle unifiée, cela ne change pas grand-chose pour lui, que l’entreprise parte ou qu’elle reste,

M. Gérard Bapt. Exactement! Ce ne sont pas les « technos » qui sont là qui peuvent le comprendre!

Mme Claude Greff. Oh! Arrêtez!

M. Gérard Bapt. C’est vrai!

M. Lionel Tardy. Il le redirige donc vers les services concernés, où il rencontre trois fonctionnaires, au lieu d’avoir à faire à des élus, et où son dossier traîne huit mois.

C’est l’exemple même de ce qui pourrait se passer. Je crois vraiment qu’il faut maintenir un lien entre l’entreprise et le territoire, et j’ai bien peur que, si nous adoptons l’amendement du Gouvernement, ce que l’on constate avec la taxe professionnelle unifiée se produira à un niveau beaucoup plus élevé.

M. Jérôme Cahuzac. Très bien!

M. le président. La parole est à M. Claude Bartolone.

M. Claude Bartolone. J’interviendrai dans la continuité de ce que vient de dire notre collègue. Nous connaissons tous des exemples qui montrent que le lien entre taxe professionnelle et territoires, ou plus généralement entre fiscalité et territoires, est indispensable. De nombreux chefs d’entreprise vont s’en rendre compte dans la période à venir.

On a jusqu’ici envisagé les situations les plus favorables: des entreprises non polluantes, qui ne créent pas de difficultés, par la circulation de camions ou autres. Il en va autrement quand il s’agit de faire accepter à la population une difficulté.

Dans mon département, nous allons être confrontés, avec l’arrivée d’une usine de méthanisation, à un certain nombre de riverains, qui n’avaient jamais posé le moindre problème jusqu’à présent, mais qui voient cette installation avec beaucoup d’inquiétude, eu égard à sa dangerosité ou aux problèmes qu’elle pourrait introduire dans leur vie de tous les jours. Pourquoi voulez-vous que les élus se cassent les pieds à favoriser une installation qui n’aurait aucune retombée sur le territoire, s’ils ne peuvent que risquer de perdre des électeurs?

Mme Claude Greff. Il n’y a pas que ça!

M. Claude Bartolone. Vous savez très bien que c’est le type de problèmes qui se posera!

Mme Claude Greff. Ce n’est pas une profession, être élu!

M. Claude Bartolone. Je vois dans le dispositif proposé une projection du Gouvernement sur l’avenir. Quand on constate le déficit inscrit au budget et les découverts accordés dans le PLFSS – 65 milliards –, on ne peut manquer en effet d’y voir une projection.

Lorsque la reprise se fera sentir, nos partenaires européens plus vertueux commenceront à alerter le gouvernement français: « Vous ne pouvez pas poursuivre cette dérive, avec un déficit de 8 %, eu égard aux critères de Maastricht. » Le Gouvernement aura alors à sa disposition deux variables d’ajustement.

Le plus facile, pour lui, sera de revenir à une présentation du budget plus acceptable par les autorités bruxelloises, en prenant en main de manière directe, dans le cadre de cette recentralisation, le budget des collectivités locales. Plus nous serons sous dotations, plus il sera facile pour le Gouvernement, chaque année, d’imposer arbitrairement telles ou telles restrictions au budget des collectivités locales. Et ce sera la même chose pour le budget de la santé.

Par le biais de cette recentralisation, qui n’aura que des effets négatifs sur le développement économique et social de nos territoires, c’est déjà « la France d’après » qui est envisagée!

M. Jérôme Cahuzac. Très bien!

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Sur ces sujets de fond, nous pouvons, les uns et les autres, avoir quelques points de désaccord, comme nous l’avons vu hier. Mais je crois que le Gouvernement et l’Assemblée partagent le même objectif de péréquation.

Mme Claude Greff. Absolument!

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Je ne veux pas mettre en doute, madame la ministre, votre sincérité quant à la nécessité d’une péréquation. Nous divergeons toutefois sur les modalités.

Vous nous proposez, pour organiser une péréquation reposant en grande partie sur des critères nationaux, de remettre en cause la territorialisation que nous préconisons au niveau des départements et des régions. Mais nous connaissons les limites de l’actuel système de péréquation et de compensation, qui se réduit à la question des dotations. On en revient donc à la question des moyens budgétaires de l’État, et nous sommes sceptiques sur la capacité de l’État à continuer d’augmenter les dotations. Au passage, je tiens à dire à Michel Diefenbacher qu’il ne faut surtout pas opposer autonomie fiscale et péréquation. Les deux peuvent tout à fait coexister.

Cela étant, la divergence principale entre le Gouvernement et la commission des finances, c’est que nous pensons, par expérience, qu’il vaut mieux fonder la péréquation sur le dynamisme de la richesse fiscale plutôt que sur des critères nationaux noyés dans des dotations. Une péréquation qui s’appuie sur la richesse territorialisée apporte une garantie bien plus forte que le mécanisme jouera pleinement en direction des départements, en particulier les plus défavorisés. C’est pourquoi, madame la ministre, et je le dis sans esprit polémique, la commission vous demande de bien réfléchir car elle croit plus efficace le dispositif qu’elle propose. Vous avez su nous entendre sur un certain nombre de sujets – je pense entre autres au découplage – et j’aimerais que vous fassiez preuve de la même écoute sur celui-ci. Nous partageons le même objectif, mais je suis persuadé que les mesures proposées par le rapporteur général sont beaucoup plus fortes pour parvenir à la péréquation que nous souhaitons tous.

M. Henri Emmanuelli. Très bien!

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Monsieur le président de la commission des finances, je tiens d’abord à vous remercier de votre intervention car elle me paraît caractérisée par son honnêteté intellectuelle. Un certain nombre d’entre nous s’efforcent de faire preuve d’honnêteté intellectuelle, et c’est utile.

Monsieur le rapporteur général, je vous rends hommage puisque vous êtes l’auteur de l’amendement n° 45, qui prévoit un mécanisme fort et double.

Monsieur Cahuzac, nous partageons l’attachement au principe de la territorialisation. Ne déformez donc pas mon propos. Je réaffirme que le Gouvernement est très attaché à ce principe. Nous comprenons très bien la nécessité de maintenir le lien entre l’entreprise et le territoire. La territorialisation, on y croit et on la veut.

Deuxième principe auquel nous sommes très attachés: celui de la péréquation. Il s’agit d’éviter que certaines collectivités qui, historiquement, ont su attirer de nombreuses entreprises, bénéficient dans une proportion excessive de la cotisation et de la contribution économique territoriale.

Monsieur le président de la commission des finances, vous avez très bien indiqué quel est notre point de désaccord. Nous divergeons en effet sur la nature des critères de réallocation. Là où la méthode proposée par le rapporteur général prévoit des critères fondés sur la valeur ajoutée dégagée localement dans la collectivité concernée, nous, nous avons proposé un panier de critères – la population, les salariés et l’emprise foncière. Il s’agit, par des voies certes un peu différentes, de parvenir au même objectif. Je suis très sensible à la qualité des travaux que votre commission a engagés, en particulier à la dynamique que vous avez introduite dans votre appréciation de la répartition nécessaire et de la territorialisation indispensable. J’apprécie la manière dont se déroule ce débat. J’ai bien entendu qu’il y a, dans la majorité, certaines interrogations sur la pertinence de chacune des deux méthodes. C’est pourquoi je retire le sous-amendement n748, et il en sera de même pour le n°749. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP, SRC et NC.) C’est la conséquence de l’excellent débat que nous venons d’avoir. Nous allons retravailler notre proposition.

M. Patrice Martin-Lalande. Très bien!

(Le sous-amendement n°748 est retiré.)

M. le président. Il est vrai, madame la ministre, que nous avons eu un débat qui fait honneur à notre assemblée.

Je suis saisi de deux sous-amendements, n os 463 et633, pouvant être soumis à une discussion commune.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot, pour défendre le sous-amendement n 463.

M. Nicolas Perruchot. Cette proposition de bon sens permettrait de donner au bloc communal une part plus importante dans la répartition du produit de la cotisation complémentaire. Je rappelle que le projet initial prévoit 25 % pour la région et 75 % pour le département. Dans l’excellent amendement du rapporteur général, il est proposé 25 % pour la région, 55 % pour le département et 20 % pour le bloc communal. Notre sous-amendement vise à faire passer la part du bloc communal de 20 % à 30 %. La répartition serait alors la suivante: 25 % pour la région, 45 % pour le département et 30 % pour le bloc communal. C’est important parce que les EPCI sont aujourd’hui les acteurs les plus dynamiques en matière d’investissements sur la sphère locale. Il est donc logique de leur donner une part plus importante de ces recettes fiscales, afin que le développement des territoires s’effectue dans la plus grande proximité.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour défendre le sous-amendement n°633.

M. Michel Bouvard. Nous avons déjà évoqué hier la situation des ouvrages hydrauliques. C’est un vrai sujet. Il faut que la territorialisation de cette ressource soit la plus proche possible des territoires concernés, car ceux-ci supportent les contraintes liées à ce type d’ouvrage. Mon sous-amendement prévoit qu’il n’y ait pas de part de répartition au bénéfice des régions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux sous-amendements?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Défavorable aux deux.

S’agissant de celui défendu par M. Perruchot, je m’en suis expliqué hier soir à propos de propositions du même type. Nous avons calibré de façon extrêmement précise le transfert de 20 %. Une modification entraînerait, en compensation, des rebasculements d’impôts au niveau des départements. Nous sommes arrivés à un équilibre dans une matière complexe. Je ne dis pas que ce ne sera pas modifié au Sénat, mais tout le monde est d’accord sur l’objectif: injecter davantage de cotisation complémentaire au niveau commune-intercommunalité.

Quant au sous-amendement de M. Bouvard, il a été rejeté en commission parce qu’il remettrait en cause le partage clair de la perception de cotisation complémentaire qu’a établi le texte du Gouvernement: 25 % en revient aux régions. On ne voit pas pourquoi on les priverait, sur certaines valeurs ajoutées, de leur quote-part.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Le groupe SRC votera le sous-amendement n°463 en raison de la nécessité de conserver et de mieux protéger les capacités d’investissement et de financement des collectivités locales. Les arguments de M. le rapporteur général ne nous convainquent pas.

Par ailleurs, j’apprécie beaucoup Mme Greff quand elle s’occupe, très intelligemment, du groupe d’études sur le cancer. En revanche, je l’apprécie beaucoup moins quand elle parle des collectivités locales. À ce propos, madame la ministre, je vous ai exposé hier comment je vis la cassure de la dynamique de financement de ma commune à cause de cette réforme de la taxe professionnelle. M. Pierre Méhaignerie était venu en septembre 1993 inaugurer la bretelle d’autoroute – que connaît bien M. Carrez car il l’emprunte régulièrement pour aller de Toulouse vers le Tarn.

M. Michel Bouvard. C’est en 1986 qu’il était ministre de l’équipement!

M. Gérard Bapt. Vous me l’avez fait observer hier, mais j’ai vérifié depuis: il est venu en tant qu’ancien ministre de l’équipement, alors qu’il était garde des sceaux!

Grâce notamment à M. Méhaignerie, donc, nous avons pu ainsi créer la zone d’activité du Cassé – le « Cassé 1 » et le « Cassé 2 » –, et accroître notre proportion de recettes fiscales directes provenant de l’activité économique, qui était devenue très insuffisante. Et puis, alors que nous allions passer au « Cassé 3 », je viens d’apprendre qu’un collectif de résidents forme un recours contre moi devant la juridiction administrative parce qu’il s’oppose à l’arrivée d’un hôtel et d’un resto-marché à proximité de leur lotissement. Qu’en sera-t-il du Cassé 3 pour l’activité industrielle? Croyez-vous que les habitants me seront très reconnaissants si, passant du POS au PLU, je transforme cette future zone d’activité en zone résidentielle?

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l’Assemblée est consultée par assis et levé. Le sous-amendement n° 463 n’est pas adopté.) (Le sous-amendement n°633 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°461.

La parole est à M. Nicolas Perruchot.

M. Nicolas Perruchot. Avec ce sous-amendement, mon collègue Charles de Courson et moi-même entendons prendre date. En effet, il est intéressant à plusieurs titres: tout d’abord, parce qu’il ne coûterait rien au Gouvernement et à l’État; ensuite, parce qu’il vise à attribuer une part de la CSG aux départements et aux régions. Nous sommes tous à la recherche du bon impôt, c’est-à-dire de celui qui a la base la plus large possible et les taux les plus faibles, afin que la répartition s’effectue sur le plus grand nombre.

Ce sous-amendement tend à faire passer le taux de la CSG de 7,5 % à 5,3 %, les 2,2 points de baisse étant redonnés aux départements et aux régions. Cette affectation permettrait à la fois de mieux pérenniser les recettes de ces deux collectivités et de créer un lien plus évident entre l’impôt proposé et les recettes des départements, dont les dépenses sociales sont particulièrement importantes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Défavorable à ce sous-amendement qui, à l’évidence, nécessiterait des études et des débats très approfondis. Il porte sur des transferts de plusieurs dizaines de milliards d’euros.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État . Monsieur le député Nicolas Perruchot, le Gouvernement vous remercie vraiment de déclencher ce débat. En réalité, il vous remercierait aussi de retirer votre sous-amendement (Sourires.) Ma position n’est-elle pas équilibrée?

Évidemment, j’approuve les propos du rapporteur, et je tiens à la cohérence de notre système d’imposition. La totalité de la CSG – 82 milliards d’euros en 2009 – finance la sphère sociale: la majeure partie – autour de 50 ou 51 % – est affectée à l’assurance maladie, le reste se répartissant entre le Fonds de solidarité vieillesse, la Caisse nationale d’allocations familiales, etc.

Or, cette sphère sociale connaît des difficultés, sur lesquelles nous reviendrons la semaine prochaine lors du débat sur le PLFSS et que M. Cahuzac a déjà évoquées à plusieurs reprises. Les recettes sont insuffisantes, les dépenses appelées à augmenter, notamment dans le domaine de la vieillesse, etc. Le déficit prévisionnel pour 2010 atteint 30 milliards d’euros, ce qui est une préoccupation majeure.

Nous ne pouvons donc pas débrancher une partie du tuyau de CSG de la sphère sociale pour aller le rebrancher sur les départements ou les régions, même si je comprends que chacun a besoin de recettes dynamiques et même si votre sous-amendement a la vertu de tendre à un certain rééquilibrage en diminuant d’autant les dotations budgétaires. Je pense que ce n’est pas possible. Nous devons vraiment garder à la CSG une forme de pureté: son affectation au financement de notre système de protection sociale. Sinon, ce serait à ne plus rien y comprendre.

Voilà ce que je souhaitais vous dire. Merci d’avoir provoqué ce débat et cette réflexion, mais merci aussi de bien vouloir retirer ce sous-amendement.

M. le président. Est-il retiré, monsieur Perruchot?

M. Nicolas Perruchot. Non, je le maintiens. Je pense que nous devons avoir et porter ce débat. Ce n’est pas une simple lubie centriste. Il y a très longtemps, nous avons lancé un débat sur les niches fiscales qui a fini par porter ses fruits. Actuellement, au Nouveau Centre, nous considérons que nous devons avoir ce débat sur la CSG. Je maintiens le sous-amendement. Cela mettra peut-être cinq ou dix ans, mais nous finirons par adopter ce type de dispositif.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Pour ma part, je suis contre ce sous-amendement par principe. Quels que soient les problèmes de financement des départements et quelle que soit la montée en puissance de la dépense sociale des départements, je pense, comme le ministre, que nous avons la chance de disposer d’un impôt national dont l’emploi est clairement établi.

Étant donné la situation de déficit des comptes sociaux nationaux – Jérôme Cahuzac a évoqué les 65 milliards de besoins de trésorerie de l’ACOSS –, entrer dans une logique de partition d’un impôt bien identifié, et affecté en totalité à la sphère sociale nationale, serait une grave erreur.

Pour aller jusqu’au bout du raisonnement, j’ajoute, en qualité d’élu départemental, que si l’on veut accélérer le processus d’« évaporation » du département – pour reprendre le terme utilisé par Édouard Balladur en 2004 dans son article du Monde –, on n’a qu’à s’engager dans cette voie-là! Le département sera alors identifié comme un acteur dont l’unique vocation sera de faire du social. On pourra alors nous supprimer la clause de compétence générale, après quoi on nous transférera un impôt particulièrement impopulaire. De cette manière, on sera sûr que les départements seront bien engagés sur la voie de la disparition!

Je suis donc contre ce sous-amendement: par principe, par souci des comptes sociaux au niveau national et pour des raisons tenant à l’avenir des départements.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Très bien!

M. le président. La parole est à M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Une fois n’est pas coutume, je souscris totalement aux propos du ministre des comptes publics et j’approuve – ce qui est plus fréquent – la position de Michel Bouvard.

Rappelons l’état des comptes sociaux: 30 milliards d’euros de déficit; des creux de trésorerie de 65 milliards d’euros dont la Caisse des dépôts et consignations n’accepte d’assumer que la moitié, ce qui va imposer à l’ACOSS d’emprunter avec la garantie de l’État, au jour le jour, plus de 30 milliards d’euros!

L’ACOSS devra le faire au moment de payer les retraites puisque c’est précisément à ce stade que les creux de trésorerie seront les plus importants. Choisir justement ce moment pour débrancher la CSG des financements sociaux afin d’en faire bénéficier les départements ne me paraît absolument pas raisonnable.

En revanche, nous examinerons ultérieurement l’un de nos sous-amendements visant non pas à détourner la CSG de son objet premier, mais à indexer les dotations aux départements sur le dynamisme de l’assiette de la CSG. Il offre l’avantage du sous-amendement de notre collègue Perruchot sans en avoir l’inconvénient: la base est dynamique, mais la CSG reste affectée au financement de notre protection sociale.

(Le sous-amendement n°461 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux sous-amendements n os 462 et 460.

La parole est à M. Nicolas Perruchot.

M. Nicolas Perruchot. Ils sont défendus.

(Les sous-amendements n os 462 et 460, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures cinquante, est reprise à dix heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Je suis saisi d’un sous-amendement n°325.

La parole est à M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Par ce sous-amendement, nous proposons de conserver aux régions la part de foncier bâti dont elles bénéficient actuellement.

Faute d’un tel choix, les régions n’auraient plus aucun pouvoir de taux sur les impositions dont elles bénéficient, sauf à envisager une possibilité de modulation du taux de la cotisation complémentaire que le Gouvernement n’a jamais acceptée.

Les régions ne lèveraient donc plus aucune imposition sur les ménages, alors que tous s’accordent à reconnaître qu’il est essentiel, pour préserver une certaine stabilité du produit fiscal, de disposer d’assiettes diversifiées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . La commission n’a pas retenu ce sous-amendement, car il met en cause toute l’architecture de cette réforme…

Mme Marylise Lebranchu. Et voilà!

M. Gilles Carrez, rapporteur général . …ainsi que l’architecture de la proposition de la commission des finances, monsieur Cahuzac.

Dans la proposition du Gouvernement, la taxe foncière régionale est intégralement basculée au niveau des communes et intercommunalités, alors que dans la vôtre elle resterait acquise aux régions.

Notre propre proposition consiste à établir un partage: 60 % aux départements, 40 % aux communes et intercommunalités. On ne voit pas très bien comment elle pourrait s’articuler avec la vôtre. La commission est donc défavorable à ce sous-amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable également, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Je vous propose, monsieur le président, de présenter l’amendement n°599 rectifié, qui a le même objet.

Comme l’a suggéré Jérôme Cahuzac, le ratio d’autonomie financière des régions tombera, en l’état actuel du texte, à un niveau très sensiblement inférieur à celui prévu par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003, en l’occurrence à l’article 72-2 de la Constitution, dont je rappelle les termes: « Les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l’ensemble de leurs ressources. »

Cette disposition a été mise en œuvre par la loi organique du 29 juillet 2004, laquelle précise que « la part des ressources propres des collectivités ne peut être inférieure au niveau constaté au titre de l’année 2003 »; or, selon l’actuelle rédaction du projet de loi, ce niveau tomberait à 10 %, ce qui est très inférieur au ratio légal. Le texte risque donc d’être censuré par le Conseil constitutionnel. En tout état de cause, il ne resterait aux régions que la tarification des cartes grises. Les priver de tout impôt sur les ménages paraît quelque peu déséquilibré.

(Le sous-amendement n°325 n’est pas adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n°599 rectifié a été défendu.

(Le sous-amendement n°599 rectifié, rejeté par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°681.

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps le sous-amendement n°683.

L’autonomie fiscale implique non seulement la mise à disposition des collectivités locales de ressources fiscales importantes et dynamiques, mais aussi le vote libre et non encadré des taux de ces impôts par des assemblées délibérantes démocratiquement élues au suffrage universel, ce qui les rend légitimes pour fixer ces taux. Or le Gouvernement développe une atmosphère de suspicion, mettant constamment en cause la qualité et les finalités de la gestion des collectivités locales, lesquelles ont surtout le grave défaut, à ses yeux, d’être majoritairement dirigées par la gauche.

Mieux inspiré pour défendre la liaison des taux, notre rapporteur général, en 2008, disait craindre que les collectivités ne mènent « une politique fiscale excessivement asymétrique, protégeant les personnes assujetties à la taxe d’habitation ». Effectivement, nous sommes soucieux de la situation des ménages modestes et moyens, premières victimes de l’injustice fiscale, tout particulièrement en période de crise économique et sociale; nous souhaitons donc les protéger et améliorer leur vie quotidienne.

Vous avez offert des cadeaux aux entreprises sans exiger la moindre contrepartie: c’est votre problème et votre responsabilité. Nous considérons pour notre part que le vote des taux des impôts locaux ne doit plus être corseté par un mécanisme obsolescent et complexe; c’est pourquoi nous proposons de délier les taux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les sous-amendements n os 681 et683?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Défavorable. L’an dernier, je le rappelle, la commission a décidé de relier les taux pour la totalité de la taxe professionnelle.

La présente réforme rend encore plus nécessaire la liaison des taux puisque, désormais, seule la part foncière de la taxe sur les entreprises pourra faire l’objet d’un vote, le taux de cotisation sur la valeur ajoutée étant établi au niveau national. Dès lors que la part foncière des locaux abritant une activité économique est entièrement liée au foncier et aux valeurs locatives du tissu local, les taux qui lui sont appliqués doivent évoluer au même rythme que ceux appliqués aux logements; il serait illogique de désolidariser les deux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposée par le rapporteur général.

Seule la part de la cotisation locale d’activité qu’il a évoquée sera concernée par le vote des taux. Il est indispensable d’établir une solidarité entre ménages et entreprises en termes de fixation des taux.

M. Jean-Pierre Brard. Ben voyons! Une solidarité entre le cheval et le cavalier!

M. le président. La parole est à M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli. Vos arguments ne sont guère convaincants, madame la ministre. Expliquer aux Français que le prix du foncier sera le même pour un laminoir et pour un logement social ne relève plus de la solidarité mais de la confusion des genres. La vocation et les ressources ne sont pas les mêmes: il faut avoir une certaine conception des choses, pour éviter les mots qui fâchent, pour expliquer qu’il n’y a pas lieu de faire des distinctions.

(L’amendement n°681 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°675.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Madame la ministre, vous faites de la pédagogie à l’envers alors que, dans nos tribunes, se trouvent des jeunes de Seine-Saint-Denis, département que vous ne connaissez guère puisque vous ne passez le périphérique que lors des visites officielles. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) La solidarité entre les entreprises et les ménages dont vous parlez s’apparente à celle du cheval et du cavalier! Il est invraisemblable d’imaginer une solidarité entre France Télécom et une famille au RMI, à moins de tondre les plus pauvres pour remplir, comme vous le faites, les poches des plus riches. Mais, de ce côté-ci de l’hémicycle, nous voyons les choses différemment.

M. le rapporteur général est assurément un homme sympathique; toutefois – rendons à César ce qui lui appartient – il a l’esprit de classe, même si, j’en conviens volontiers, c’est moins violemment que Mme Lagarde: il défend les privilèges et les privilégiés. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) En affirmant qu’il est impossible de délier les taux, il porte atteinte à la libre administration des collectivités: après tout, pourquoi ne pas leur faire confiance pour déterminer ces taux? D’autant que le suffrage universel sanctionnerait les élus ayant fait preuve d’irresponsabilité.

Le sous-amendement n°675 est en quelque sorte de repli, puisqu’il vise à tenir compte de la situation particulière des EPCI et à permettre aux collectivités de moduler les taux afin de ne pas surtaxer les familles. Quand on habite au Raincy, la loi ne porte guère à conséquences; mais à Montreuil, au Pré-Saint-Gervais, à La Courneuve, à Stains ou au Blanc-Mesnil, il serait utile de laisser aux élus la liberté de fixer les taux, car ils sont confrontés à des difficultés que, madame la ministre, vous ne connaissez pas – même si vous vous intéressez au Havre. Malgré vos dénégations, vous ne connaissez pas le quotidien de ces familles: je vous invite à visiter nos HLM!

M. le président. Merci de conclure, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je conclus, monsieur le président, en observant au passage que la situation est encore différente en Maine-et-Loire.

Je vous invite, madame la ministre, à venir vous confronter au réel: vous verrez alors que notre amendement est légitime. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable également.

M. Jean-Pierre Brard. Je demande à répondre à la commission et au Gouvernement!

M. le président. Vous avez la parole, pour une minute.

M. Jean-Pierre Brard. Vous êtes bien bon, monsieur le président. (Sourires.) Je le dis pour faire de la pédagogie à l’intention des jeunes dans les tribunes:…

M. Claude Bartolone. Des jeunes de la Seine-Saint-Denis!

M. Jean-Pierre Brard. …quand le Gouvernement et la commission sont en difficulté, ils nous opposent le silence afin de cacher leurs coups tordus!

(Le sous-amendement n°675 n’est pas adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n°683 a été défendu; la commission et le Gouvernement y sont défavorables.

(Le sous-amendement n°683 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°311 rectifié.

La parole est à M. Nicolas Perruchot.

M. Nicolas Perruchot. Ce sous-amendement de bon sens permettrait aux EPCI de maintenir un taux de cotisation locale d’activité dans l’hypothèse où la diminution du taux moyen pondéré de référence est liée à la seule croissance des bases et non à une diminution des taux d’imposition votés.

Pour les EPCI qui lèvent la cotisation locale d’activité unique ou une cotisation locale d’activité de zone, la variation du taux de cotisation locale d’activité en année « n » est liée à la variation du taux moyen pondéré des taxes sur les ménages entre les années « n-2 » et « n-1 ». Or le taux moyen pondéré varie non seulement en fonction des variations de taux votés par les communes et l’EPCI, mais aussi en fonction des bases taxables. En d’autres termes, le taux moyen pondéré des taxes sur les ménages peut diminuer du simple fait de la croissance des bases taxables et alors même qu’aucune réduction de taux n’a été votée par l’une des communes membres ou par l’EPCI.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Favorable. Le sous-amendement répond à un cas réel. Lorsque les assiettes des impôts sur les ménages de communes membres d’un EPCI levant la taxe professionnelle unique varient, et que la pondération entre les différentes communes s’en trouve modifiée, le taux moyen peut baisser. Dès lors, l’EPCI est lui-même obligé de baisser son taux. Vous avez raison, monsieur Perruchot, de soulever ce problème.

(Le sous-amendement n°311 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Les sous-amendements n os 406 et309 tombent.

M. François Pupponi. Pourquoi?

M. le président. Les alinéas visés ont été supprimés hier par l’adoption du sous-amendement n°740.

Je suis saisi d’un sous-amendement n°676.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Mieux vaut des amendements tombés que retirés, monsieur le président; mais je ne remuerai pas le couteau dans la plaie: ce serait cruel à votre égard.

Il me semble que le sous-amendement parle de lui-même car il entend instaurer une pratique qui, même si elle paraît évidente, ne l’est absolument pas dans la réalité. En effet, il a fallu attendre la loi de finances pour 2008, soit trente-quatre ans après la mise en place de la taxe professionnelle, pour obtenir la liste nominative des entreprises figurant dans les rôles supplémentaires. Trente-quatre ans!

Le sous-amendement vise à éviter les mêmes erreurs pour les taxes que vous allez créer, et à faire en sorte que les services de l’État transfèrent ces informations capitales pour identifier la provenance de l’enveloppe sur laquelle se fonde le transfert d’impôts dont les collectivités locales vont bénéficier. Celles-ci pourraient ainsi intégrer les données concernées dans le développement économique du territoire qu’elles gèrent. Il est difficilement compréhensible que les collectivités locales ne disposent pas d’informations qui sont des éléments constitutifs de la recette, y compris pour vérifier que chacun paie son dû.

Madame la ministre, savez-vous que certains élus sont obligés d’avoir recours à des officines privées pour vérifier les bases qui constituent l’assiette? L’expérience montre en effet que, les informations n’étant pas transmises, la fraude ou, comme il vous arrive de dire avec délicatesse, l’« évitement », l’« optimisation fiscale », est facilitée. C’est tout de même un comble! Pour contrôler les bases de l’administration fiscale, on en est réduit à embaucher des personnels dont certains viennent de cette même administration fiscale!

M. le président. Il faut conclure, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. On le voit, cela permet de protéger les voleurs. Grâce à la communication des bases qu’il préconise, notre sous-amendement favoriserait au contraire l’introduction d’un peu de transparence dans le dispositif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . La commission est favorable à ce sous-amendement. Jean-Pierre Brard se souvient, comme moi, du fameux arrêt Pantin sur les rôles supplémentaires. La transmission d’informations est d’autant plus indispensable qu’il va être procédé à un réagencement important des impôts et qu’il faut, comme le souhaite notre collègue Brard, en assurer la traçabilité.

M. Michel Bouvard et M. Jean-Pierre Gorges. Très bien!

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Monsieur Brard, votre souci de partage de l’information et de transparence est le mien.

M. Jean-Pierre Brard. Formidable!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Il me paraît en outre bien préférable d’obtenir l’information à la source que de la recueillir par des voies et moyens divers et variés – et au surplus souvent coûteux, puisque les dispensateurs de sagesse et d’informations en manquent pas de facturer leurs honoraires…

Sous réserve que le texte soit un peu affiné, afin que nous soyons bien sûrs de pouvoir délivrer l’information, le Gouvernement est favorable à votre sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, je me demande si nous sommes à Lourdes ou à l’Assemblée nationale: nous venons en effet d’assister à un miracle!

M. Jean-Pierre Gorges. Il en est tout ému! (Sourires.)

M. Dominique Baert. Mais de là à garder les mains jointes!

M. Jean-Pierre Brard. C’est une belle leçon à retenir, notamment pour nos jeunes de Seine-Saint-Denis, pour lesquels j’ai toujours une petite pensée: dès lors qu’on a raison, la persévérance et la détermination finissent par payer. Il nous a fallu attendre trente-quatre ans avant d’être entendus, et je vous en suis d’autant plus reconnaissant, madame la ministre, de vous être laissé évangéliser.

(Le sous-amendement n°676 est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

Je suis saisi d’un sous-amendement n°758.

La parole est à M. Nicolas Perruchot.

M. Nicolas Perruchot. Je me réjouis de constater que, pour notre collègue Jean-Pierre Brard, il est plus facile de travailler avec Mme Lagarde qu’avec Mme Voynet. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Pierre Brard. Demandez à Claude Bartolone…

M. Claude Bartolone. C’est une attaque personnelle insupportable, monsieur le président! (Sourires.)

M. Nicolas Perruchot. Le sous-amendement n°758 vise à aligner, au profit des chambres consulaires, la réduction du taux de 4,4 % établie au profit des collectivités locales et de leurs groupements.

Vous le savez, une réforme, importante pour les chambres consulaires, va bientôt intervenir. Il est donc nécessaire de reconnaître le rôle éminent que jouent les chambres de commerce et les chambres des métiers pour le développement économique et l’aménagement des zones d’activité, ou pour le conseil aux entreprises. La réforme prévoit de régionaliser l’assiette de taxation, et il est important d’aligner ce dispositif sur celui prévu pour les collectivités locales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . La commission n’a pas examiné ce sous-amendement et je m’en remets à la position du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. La rédaction de votre sous-amendement, monsieur Perruchot, conduirait à réduire les frais d’assiette et de recouvrement perçus par l’État sur les taxes revenant aux chambres consulaires: 4,4 % au lieu de 5,4 %. Les frais de gestion pour ces taxes s’élèveraient in fine à 8 %.

Le Gouvernement n’est pas favorable à ce sous-amendement. Tel qu’il sera modifié par l’amendement n° 45, l’article 2 réduira déjà la part des frais de gestion perçus par l’État sur les montants des taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties, de la taxe d’habitation et de la cotisation locale d’activité. Il maintient par ailleurs les frais perçus par l’État pour les impositions établies au profit des chambres consulaires. Ces modalités participent à l’équilibre financier de la réforme et leur modification entraînerait évidemment pour l’État un surcoût qui ne nous paraît pas opportun.

Nous aborderons la question des chambres consulaires à l’article 3 et je suis sûre que nous serons alors amenés à reparler de ces financements. Je propose donc que vous retiriez votre sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot.

M. Nicolas Perruchot. Je remercie Mme la ministre pour ces explications et je retire mon sous-amendement.

(Le sous-amendement n°758 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°677.

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier Le principe du seuil prévu par l’alinéa 426 nous paraît bien fondé, mais il nous semble trop élevé dans la rédaction de l’amendement n° 45, puisqu’il représente dix fois la superficie unitaire en deçà de laquelle joue l’exonération, soit 400 mètres carrés. Nous proposons donc de limiter ce seuil à trois fois cette superficie unitaire et de le fixer à 1200 mètres carrés, ce qui procurera quelques recettes supplémentaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Défavorable, dans la mesure où il n’y a pas lieu de procéder à la modification de la TASCOM. Le texte se borne ici à procéder à son transfert.

(Le sous-amendement n°677, rejeté par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°646, deuxième rectification.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Coordination.

(Le sous-amendement n°646, deuxième rectification, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°678.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. M. Perruchot m’a taquiné tout à l’heure à propos de Mme Lagarde et de Mme Voynet. Mais Mme Lagarde, elle, n’avance pas masquée: elle est de droite et je la combats. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.) L’autre personne qu’évoquait M. Perruchot, elle, c’est l’introduction des OGM en France, c’est l’Erika, c’est la suppression des livres de prix pour les enfants, l’obligation de payer pour que les enfants puissent aller jouer dans un parc de la ville, et je pourrais citer d’autres exemples… (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. Monsieur Brard, veuillez revenir à notre sujet!

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, il faut assumer ce que l’on est: quand on est de droite, on est de droite. Mais il est vain de se cacher derrière un masque de gauche pour faire une politique de droite!

Le sous-amendement n°678 permet de prendre en compte les réalités du développement économique de nos territoires et, surtout, de faire correspondre une référence chiffrée à une réalité législative, car il apparaît que 5000 mètres carrés ne correspondent à rien, sinon – mais j’espère me tromper – à une volonté de permettre à un certain type d’hypermarchés de ne pas payer cette taxe. Au contraire, les 4000 mètres carrés que propose notre sous-amendement correspondent à une mesure législative bien réelle. Compte tenu des bénéfices que les petits hypermarchés ou les grands supermarchés ont pu réaliser ces dernières années, voire ces derniers mois, y compris en période de crise, il nous semble tout à fait injustifié de les exonérer de cette taxe, d’autant moins que ces commerces ont une véritable empreinte territoriale sur les communes où ils sont installés: ce sont autant de mètres carrés qui ne seront pas utilisés pour d’autres commerces plus petits, des logements, des équipements collectifs publics ou privés.

(Le sous-amendement n°678, rejeté par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°545.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Défendu.

(Le sous-amendement n°545, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°707.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Il s’agit d’un sous-amendement rédactionnel.

(Le sous-amendement n°707, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n°651 de M. Carrez est également rédactionnel.

(Le sous-amendement n°651, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°712.

La parole est à M. le ministre du budget.

M. Éric Woerth, ministre du budget . Ce sous-amendement propose de revenir à la rédaction initiale sur ce sujet spécifique de la compensation relais pour les collectivités durant l’année 2010.

Le système proposé par le Gouvernement est, me semble-t-il, équitable. Il s’agit d’abord de compenser en retenant les bases fictives de 2010, déterminées à partir des éléments réels déclarés en 2009 et des taux votés en 2008. Une clause de sauvegarde est prévue, afin que le résultat de ce calcul ne soit pas inférieur à celui de 2009 – une sorte de plancher de garantie, en quelque sorte.

Le sous-amendement qu’avait préparé la commission, s’il était voté, représenterait un coût supplémentaire, dans la mesure où à des communes ayant voté des taux beaucoup plus importants au sortir des élections ou à des collectivités qui auraient anticipé sur la réforme de la taxe professionnelle – qui était dans l’air depuis quelque temps – bénéficieraient d’un avantage dont ne disposeraient pas celles qui n’ont pas su ou voulu anticiper.

Je rappelle que la proposition du Gouvernement se fonde sur les bases de 2010, c’est-à-dire sur la réalité de l’investissement de 2008, avant la crise. Il n’est pas question d’intégrer le résultat négatif de la crise sur les investissements. Selon l’INSEE, l’investissement des entreprises en 2008 avait augmenté de 5,5 %. C’est bien sur une base dynamique que les choses se feront.

Je vous propose donc de revenir à la rédaction initiale du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . La commission avait adopté une rédaction qui consistait également à lier les taux de 2009 aux bases du 1 er  janvier 2010. Je rappelle que la rédaction du Gouvernement prévoit deux options: soit les taux de 2009 avec les bases de 2009, soit les taux de 2008 avec les bases au 1 er janvier 2010. Nous avons, pour notre part, proposé les bases au 1 er  janvier 2010, qui figurent déjà dans le texte, avec des taux rafraîchis en 2009.

Il est vrai, monsieur le ministre, que nous ne disposions pas des évaluations. Il est vrai aussi que l’on a constaté d’importantes augmentations de taux en 2009. Toutefois, on ne peut pas toutes les considérer de la même manière. Certaines ont manifestement été excessives; mais dans d’autres communes – celles où les taux étaient plus bas que la moyenne nationale et où les entreprises paient la cotisation nationale de péréquation –, le petit coup de pouce qui a été donné n’avait rien d’illégitime.

Vous venez toutefois d’évoquer un argument de poids, monsieur le ministre: si cette réforme n’avait pas lieu, si l’on conservait la taxe professionnelle en l’état, les bases risqueraient sans doute de baisser fortement au 1 er  janvier 2011. Elles sont en effet constituées à 80 % par les équipements et biens mobiliers, et donc par les investissements. Or, en 2009, la crise économique a entraîné une forte réduction de l’investissement, mouvement qui, vous le savez, ne se traduira en termes fiscaux que deux ans plus tard. De ce point de vue, cette réforme vient à point nommé, car les collectivités vont recevoir une compensation à un niveau 2009 ou 2010, si elles choisissent les bases au 1 er janvier 2010, qui dépend du niveau d’investissement de 2008 ou de 2007. Comme l’a dit le ministre, même en 2008, le niveau d’investissement s’est maintenu à un rythme élevé – plus 5 %. Cet argument nous autorise à écouter la demande de M. le ministre du budget, dans la mesure où la compensation relais intervient à un niveau favorable en termes de bases.

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Sous couvert d’éviter une optimisation par les élus, le sous-amendement du Gouvernement vient, une fois de plus, pénaliser les collectivités. Nous préférerions maintenir votre rédaction, monsieur le rapporteur général. Vous aviez utilisé la notion de « taux rafraîchi »: nous aimons bien votre fraîcheur! Je trouve donc dommage que vous laissiez la porte ouverte à un recul sur ce point. L’application à la base2010 des taux votés en2009, que vous souhaitiez, est une solution bien meilleure que ce que préconise le Gouvernement, qui revient à une référence au taux de 2008 totalement défavorable aux collectivités.

M. le président. La parole est à M. Yves Nicolin.

M. Yves Nicolin. Je voudrais simplement savoir si la différence entre la proposition de la commission et celle du Gouvernement a été évaluée.

M. Christian Eckert. 800 millions d’euros: c’est dans l’exposé des motifs…

M. Yves Nicolin. Ce chiffre me paraît bien rond… S’agit-il effectivement d’une évaluation arrondie? A-t-on des détails à ce propos?

M. le président. La parole est à M. Michel Diefenbacher.

M. Michel Diefenbacher. Je suis sensible aux propos tenus tout à l’heure par M. le rapporteur général, mais je mesure à quel point la distinction entre un taux d’augmentation excessif et un taux d’augmentation acceptable aurait été délicate à faire. Par conséquent, la position du Gouvernement me paraît tout à fait raisonnable: c’est la clarté et la simplicité.

M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n°612, déposé par le Gouvernement, qui, si j’ai bien compris, a recueilli un avis favorable du rapporteur général, si je puis dire… (Rires sur les bancs du groupe SRC.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je vous remercie, monsieur le président, de ne pas approfondir le sujet! (Sourires.)

M. le président. Je préfère que l’on clarifie les choses!

Mme Marylise Lebranchu. Mais ils vont le voter! Que faites-vous donc?

Mme Claude Greff. Ce que nous devons faire!

M. Jean-Pierre Brard. C’est la fin d’une histoire d’amour!

Mme Claude Greff. Pas avec vous!

(Le sous-amendement n° 712 est adopté.)

M. Claude Bartolone. Ah, bravo!

M. Gérard Bapt. Ils creusent la tombe de nos communes!

M. Christian Eckert. Je ne leur conseille pas d’aller au congrès des maires!

M. le président. Les sous-amendements n os 652 et 653 de la commission sont rédactionnels.

(Les sous-amendements n os 652 et 653, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°679.

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier. Le sous-amendement n°679, nous entendons supprimer l’abattement de 16 % des bases d’imposition des entreprises décidé en1986, qui s’appliquera encore à la future cotisation locale d’activité au motif que la philosophie de la réforme est de limiter la taxation de l’investissement et, dans le cas présent, du foncier bâti.

Considérant que cette disposition est une résurgence historique de la réforme de 1986, il nous semble essentiel de la porter à 1 %. Pour rappel, la future CLA résultera de l’application du taux local, du taux départemental et du taux régional. Elle est aujourd’hui multipliée par un taux de 0,8807. Ce dernier est le produit des frais d’État à transférer, multipliés par l’abattement des 16 % historiques.

La taxe professionnelle était calculée sur cette base nette. Or on doit revenir à des bases saines et réelles, intégrant ces 16 % d’abattement pour calculer la future CLA.

Le sous-amendement n°679 permet de prendre en compte ces éléments. En outre, il répond, en matière d’investissement des entreprises, à votre souci, qui est aussi le nôtre, de perpétuer un lien réel entre les entreprises et les territoires sur lesquels elles sont installées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable: la modification que tend à introduire le sous-amendement se traduirait un alourdissement de la charge des entreprises.

(Le sous-amendement n° 679, rejeté par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n°654 de la commission est rédactionnel.

(Le sous-amendement n° 654, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°715 du Gouvernement.

La parole est à Mme la ministre de l’économie.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Coordination.

(Le sous-amendement n° 715, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. En conséquence, le sous-amendement n° 655 tombe.

Je suis saisi d’un sous-amendement n°703.

La parole est à Mme la ministre de l’économie.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Ce sous-amendement propose de réintroduire une disposition supprimée par l’amendement n° 45 et à laquelle je crois savoir que M. le rapporteur général se rallie: il s’agit d’un sous-amendement rédactionnel et de coordination.

(Le sous-amendement n° 703, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°437.

La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Nous abordons une longue série de sous-amendements portant sur les dotations des fonds de péréquation au profit des communes les plus pauvres, particulièrement celles situées en Île-de-France.

Mon sous-amendement n°437 concerne justement le fonds de solidarité pour les communes de la région d’Île-de-France, que la suppression de la taxe professionnelle fera mécaniquement disparaître. C’était en effet elle qui abondait ce fonds dont je vous rappelle qu’il est l’un des plus péréquateurs que nous connaissions, comme le savent ceux qui ont un peu étudié la question.

Les collectivités les plus riches finançaient les collectivités les plus pauvres en fonction de leur base de taxe professionnelle et de leur potentiel financier. L’impôt disparaissant, la contribution disparaît mécaniquement.

Même si l’on m’a déjà répondu, je le sais bien, qu’il ne fallait pas que je m’inquiète et que les communes les plus pauvres ne devaient pas non plus s’inquiéter pour l’année2010, je préfère, pour en être sûr, déposer ce sous-amendement. Cela dit, la question qui nous interpelle est la suivante: que va-t-il se passer à partir de 2011?

Je le répète: ce fonds est vital pour les communes les plus pauvres d’Île-de-France. Si elles n’en disposent pas, elles ne pourront plus fonctionner; concrètement, elles se retrouveront dans l’obligation de fermer des services publics.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . La commission a émis un avis défavorable.

Je suis tout à fait d’accord avec M. Pupponi: il faut que nous réglions la question du fonds de solidarité pour les communes de la région d’Île-de-France pendant l’année 2010. Pourquoi attendre, alors que nous allons régler dès maintenant la question des fonds départementaux de péréquation, que nous allons aborder avec le sous-amendement n°662, déposé par M. Bouvard? C’est parce ceux-ci fonctionnent directement en écrêtement de la taxe acquittée par les entreprises. Comme nous modifions celle-ci dès 2010, nous devons traiter le problème tout de suite, tandis que le fonds de solidarité pour les communes de la région d’Île-de-France n’est pas alimenté par des écrêtements sur les impôts payés par les établissements exceptionnels mais est financé par un reversement à partir des ressources des collectivités locales. Or, comme vous le savez, monsieur Pupponi, l’année 2010 est une année neutre pour elles.

Je prends cependant l’engagement de travailler avec vous pour trouver une solution satisfaisante.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Même avis, monsieur le président.

Cette question est importante, mais il est prématuré de l’examiner maintenant. Nous le ferons bien entendu pour le projet de loi de finances de règlement de l’année2011.

M. François Pupponi. Je retire le sous-amendement.

(Le sous-amendement n°437 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°371.

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. En supprimant l’alinéa621, nous voulons éviter d’intégrer dans la compensation due aux collectivités locales la reprise de recettes à notre sens indûment perçues par l’État pour la mise en œuvre du plafonnement de la valeur ajoutée instauré en 2006. En d’autres termes, il s’agit de ne pas minorer la base de calcul des compensations du montant du ticket modérateur que, pour notre part, nous avons toujours contesté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Défavorable. M. Launay est parfaitement cohérent avec la position qu’il défend depuis l’origine. Cependant, le traitement des compensations par le Gouvernement est également tout à fait conforme à la réforme de 2005 de la taxe professionnelle.

M. Claude Bartolone. Ce n’est pas parce qu’on supprime la TP que l’on règle le problème du ticket modérateur…

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Même avis.

(Le sous-amendement n° 371 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°662.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Ce sous-amendement vise à consolider les moyens d’action des fonds départementaux de péréquation de taxe professionnelle.

Comment les choses se passent-elles actuellement? Pour les établissements dits exceptionnels situés dans les petites ou moyennes communes, il est procédé à un écrêtement du surplus de taxe professionnelle, versé dans un fonds départemental. Celui-ci a, ensuite, la possibilité de répartir cette somme selon une clef 40-60.

La première part consiste en versements obligatoires effectués au profit des communes dites « concernées », même si, pour les emprunts contractés il y a déjà un certain nombre d’années, ce dispositif est en voie de disparition. Les versements tiennent compte des charges des communes liées aux salariés des établissements, à l’implantation de ces derniers et aux risques spécifiques qu’ils engendrent.

La deuxième part est destinée aux communes dites « défavorisées ».

Les conseils généraux peuvent moduler les deux parts, chacune devant représenter entre 40 % et 60 % du total des sommes réparties.

Comme M. le rapporteur général l’a dit, ces fonds vont disparaître avec la taxe professionnelle. Des dispositions doivent donc être prises dès cette année.

Soit les sommes versées étaient consolidées ad vitam aeternam dans les ressources des communes, tant « concernées » que « défavorisées », soit nous gardions une possibilité de continuer à faire de la péréquation, en sachant que des communes aujourd’hui défavorisées d’un département peuvent très bien ne plus l’être dans trois, quatre ou cinq ans, en raison de l’évolution de leurs ressources , de leurs projets d’urbanisme ou de leur développement économique.

Il est donc proposé de conserver cet outil de péréquation à la main des départements. La garantie que perçoit chaque commune serait donc versée au profit des fonds de péréquation; autrement dit, le fonds de péréquation percevrait les sommes qu’il recevait auparavant au titre de la taxe professionnelle sous la forme de la garantie.

Un reversement obligatoire serait effectué au profit des communes « concernées », qui ont un lien historique avec les établissements écrêtés; il n’est pas question de bouleverser brutalement l’économie de leurs budgets. Elles continueront donc de recevoir leur part.

Les communes classées « défavorisées », dont la liste peut être amenée à évoluer au fil du temps, seraient servies à hauteur des montants actuels pendant deux ans. Ensuite, au cours d’une nouvelle période de deux ans, il ne serait plus obligatoire de leur verser que la moitié de ces montants. Ainsi, au bout de deux ans, la possibilité de répartition offerte au conseil général serait en quelque sorte réactivée: il pourrait alors soit moduler les ressources versées aux différentes communes défavorisées sans modifier leur liste soit ajouter à celle-ci de nouvelles communes défavorisées. Enfin, au bout de quatre ans, le fonds retrouverait sa liberté de manœuvre pour la totalité de l’enveloppe « communes défavorisées ».

Il s’agit donc d’un sous-amendement de consolidation, mais également de cristallisation des capacités des fonds. La situation d’urgence est ainsi traitée mais, pour ma part, j’ai la conviction qu’il faudra aussi que nous nous posions la question de la péréquation infra-départementale à propos d’un certain nombre de ressources qui arriveront sur le bloc communal et intercommunal, dans le cadre des dispositifs que nous sommes en train de mettre en place: ainsi en est-il des impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux, dont nous nous sommes aperçus que le mode de calcul allait apporter à certaines communes un montant de ressource très conséquent, peut-être même supérieur à celui des sommes qu’elles perçoivent aujourd’hui au titre de la taxe professionnelle, qui fait justement l’objet d’un écrêtement au bénéfice des fonds. Il faudra donc, lorsque le nouveau dispositif fiscal sera en place, compléter cette disposition d’urgence par une autre permettant d’abonder les fonds départementaux de péréquation. Ainsi conserverons-nous un outil dont chacun a salué l’utilité; s’ils ont, dans le passé, suscité des débats, tous les rapports rendus ont effectivement confirmé leur utilité.

M. le président. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Bien entendu, le sous-amendement n°662 va dans le bon sens. Mais en figeant les fonds, il pose tout de même un problème, puisque les recettes perçues par les communes « concernées » au titre de la péréquation n’évolueront pas au cours des deux prochaines années, alors que ces fonds étaient tout de même évolutifs.

M. Michel Bouvard. Vous voulez dire: les recettes des communes « défavorisées »!

M. François Pupponi. En effet. Désormais, on leur gèle le fonds départemental, on leur gèle le fonds du schéma directeur régional d’Île-de-France, on leur gèle, pour l’instant – j’en parlais tout à l’heure avec le ministre –, la dotation de solidarité urbaine.

M. Jean-Louis Idiart. C’est la glaciation!

M. François Pupponi. Ces communes, qui ne vivent qu’avec des fonds et des dotations de péréquation vont donc voir leurs recettes figées l’an prochain. Cela crée une véritable difficulté dans la mesure où leurs dépenses sociales augmentent.

J’attire en outre votre attention, monsieur Bouvard, mes chers collègues, sur le fait que, en Île-de-France, le fonds départemental de péréquation bénéfice d’un abondement spécifique en raison des nuisances aéroportuaires de Roissy. Il convient donc d’examiner avec un soin particulier comment les fonds départementaux ainsi alimentés actuellement le seront à l’avenir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission n’a pas examiné ce sous-amendement; nous y avons réfléchi la semaine dernière, mais sans parvenir à une rédaction satisfaisante.

La proposition de M. Bouvard me paraît extrêmement astucieuse. Dans la rédaction du Gouvernement, ou de l’amendement de la commission des finances, une commune qui percevait normalement une recette de 100, mais dans laquelle un établissement écrêté faisait qu’elle ne percevait en réalité que 80, aurait droit à une compensation de 80, directement, par ce fameux Fonds national des garanties individuelles. La commune qui, elle, percevait normalement 100 mais qui recevait 20 de plus au titre du reversement, soit 120 en tout, toucherait une compensation de 120 par le fonds des garanties individuelles. On perdrait ainsi toute trace des fonds départementaux, autrement dit toute trace des 20 prélevés à l’une et reversés à l’autre. M. Bouvard nous propose de ne pas injecter ces 20 directement dans les compensations commune par commune, mais de les faire transiter par le fonds départemental.

Le seul problème, et M. Pupponi l’admettra, c’est que cela exige une certaine stabilité dans un premier temps.

M. François Pupponi. Certes.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . C’est ce que propose M. Bouvard; le taux de reversement des communes diminuera ensuite suivant une évolution en biseau.

Je fais le lien avec le débat que nous avons eu hier soir sur l’une des impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux. Nous étions arrivés à la conclusion qu’il serait intelligent de faire basculer vers les fonds départementaux ce type d’imposition forfaitaire. Cela répondrait au problème qui se pose autour de Roissy.

M. Michel Bouvard. Tout à fait.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . En revanche, sur le fonds de solidarité d’Île-de-France, je souligne qu’il n’y aura pas de changement en 2010.

M. François Pupponi. Il est figé!

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Non, car le prélèvement sur ressources sera opéré dans les mêmes conditions; et les ressources des collectivités contributrices vont évoluer, ne serait-ce qu’en raison du phénomène de base. Le prélèvement jouera donc sur la compensation relais de 2010; et si celle-ci s’est modifiée par rapport à 2009, cela aura une incidence sur le fonds: on ne peut pas dire qu’il complètement gelé en 2010.

En revanche, le problème se posera, vous avez tout à fait raison de le dire, en 2011. Mais j’ai répondu à cette question tout à l’heure.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le Gouvernement a examiné rapidement ce sous-amendement dont la complexité, dans un premier temps, l’a quelque peu surpris. Mais en approfondissant l’analyse, nous comprenons que votre proposition vise à créer des fonds départementaux de péréquation qui permettent en réalité de maintenir des dispositifs déjà en place, en prévoyant la nouvelle allocation résultant de la mise en place de la contribution économique territoriale, tout en prévoyant un mécanisme de biseau, qu’a décrit M. le rapporteur général.

Cette proposition nous paraît judicieuse; reste à savoir si nous pourrons la mettre en œuvre dans de bonnes conditions. À cette réserve près, j’émets un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Monsieur Pupponi, nous allons, c’est vrai, figer les choses pendant un délai limité. Mais je souligne que, pour les communes bénéficiaires de ces fonds, les ressources n’ont jamais été garanties; il arrivait même, dans un certain nombre de cas, qu’elles diminuent. Des communes classées comme défavorisées pouvaient cesser de l’être et donc sortir du dispositif; des communes concernées voyaient baisser ces ressources quand la base d’imposition à la taxe professionnelle évoluait, et provoquait une diminution des retours sur le fonds de TP.

Le fait de figer les choses, pendant une durée limitée, ne change donc pas la donne, ni l’appréciation que les élus doivent porter sur ces fonds issus de la taxe professionnelle: dès lors qu’il n’était pas fixes – et c’était même tout leur intérêt –, ils ne se sont jamais traduits par une garantie de recettes pour les communes, qu’elles aient été dans la catégorie « défavorisées » ou dans la catégorie « concernées ».

M. le président. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. J’appelle l’attention de notre collègue Bouvard sur le fait que ce qu’il dit est vrai hors de l’Île-de-France: il y a une spécificité francilienne, avec des communes extrêmement défavorisées jouxtant des communes très riches. Depuis de nombreuses années, le fonds départemental de la taxe professionnelle augmentait régulièrement; le fait de le figer est donc un changement – même si, nous sommes d’accord, il n’y avait pas de garantie.

Je suis tout à fait d’accord avec M. le rapporteur général sur la nécessité de mettre en place de façon urgente un groupe de travail sur la péréquation, pour les communes les plus défavorisées en particulier, et en s’intéressant en particulier au cas de l’Île-de-France: on voit bien que vos dispositifs mettent à mal des fonds qui existaient depuis de nombreuses années, et que cela va créer de grandes difficultés. Il nous faut une meilleure visibilité dès 2010.

(Le sous-amendement n°662 est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

En conséquence, le sous-amendement n°759 tombe.

Je suis saisi d’un sous-amendement n°374.

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Je reprends le raisonnement que j’ai développé tout à l’heure pour le bloc communal, mais cette fois à propos des départements. Et j’espère que M. le rapporteur général retrouvera sa fraîcheur. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Ma réponse est la même que tout à l’heure: avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Avis défavorable.

(Le sous-amendement n°374 n’est pas adopté.)

Je suis saisi d’un sous-amendement n°337.

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. De toutes les collectivités, les départements sont ceux dont les recettes souffriront le plus de la disparition de la taxe professionnelle, et qui, du coup, recevront la compensation symétrique la plus massive par le biais de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle.

En regard, chacun s’accordera sur le constat que la dépense sociale, du simple fait des compétences transférées, pèsera lourd. Elle évolue même d’une façon que l’on pourrait qualifier de dynamique.

Ajoutons que ces budgets sont, pour une large part, soumis à des règles d’indexation de plus en plus défavorables – à l’image de celles prévues dans le projet de loi de finances actuel, qui prévoit une diminution de 0,6 % en volume.

Au total, l’équation budgétaire pour les départements sera de plus en plus difficile à résoudre.

Nous proposons, par ce sous-amendement, de jouer sur deux tableaux: d’une part, en agissant sur le dynamisme de la recette, de l’autre, en mettant en place une péréquation.

Nous proposons donc de prévoir, à l’avenir, une indexation de la dotation de compensation particulière sur l’évolution du produit de la CSG, donc principalement sur l’évolution de la masse salariale. D’autre part, nous suggérons que le montant excédentaire de la dotation, pour la part dépassant la compensation historique des effets de la réforme, pourrait être réparti par une péréquation au profit des départements dont les dépenses sociales connaîtraient l’évolution la plus dynamique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

M. Éric Woerth, ministre du budget . Nous avons déjà eu ce débat tout à l’heure: je ne pense pas qu’il faille lier la CSG à quoi que ce soit.

Un débat sur l’évolution de la dotation se tiendra certainement au Parlement, comme cela se fait chaque année. Mais je voulais rappeler ce qu’a déjà dit tout à l’heure M. le rapporteur général: si la taxe professionnelle avait continué à vivre sa vie sur les bases économiques de 2009, et donc sur les bases utilisées à partir de 2011, la chute du rendement de la taxe aurait été extrêmement brutale.

Faire évoluer les dotations de compensation suivant l’évolution de la CSG serait curieux: il n’y a pas de rapport entre les deux, et pas de raison d’établir un tel lien.

Avis défavorable.

(Le sous-amendement n°337 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°375.

La parole est à M. Dominique Baert.

M. Dominique Baert. L’objet de cet amendement est d’appliquer aux régions le dispositif que nous avions proposé tout à l’heure pour les communes, puis pour les départements, comme l’avait expliqué Jean Launay.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je reconnais que la question de la dotation budgétaire se pose de façon un peu différente pour les régions. L’avis demeure néanmoins défavorable.

(Le sous-amendement n°375, rejeté par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°442.

La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Mes sous-amendements n os 442, 438 et439 ont tous trois le même objet.

Votre système comporte une anomalie qu’il faut relever: dans les simulations qui nous ont été remises, les intercommunalités les plus pauvres voyaient mécaniquement leurs recettes augmenter de manière importante: en effet, elles ne disposaient pas de taxe professionnelle et l’impôt par lequel on remplace cette dernière leur sera plus favorable. Elles étaient donc en quelque sorte les grandes gagnantes de cette réforme. On aurait pu s’en féliciter et espérer que cette réforme permette enfin une vraie péréquation au profit des communes les plus défavorisées.

Mais alors que ces collectivités allaient gagner des sommes conséquentes grâce à la réforme, voilà qu’on leur annonce que ces sommes vont leur être reprises, au profit d’un fonds national destiné à permettre que des communes ou des intercommunalités particulièrement favorisées continuent à bénéficier de sommes substantielles… Par un effet « contre-péréquateur », on reprend aux plus pauvres qui gagnent à la réforme pour financer les plus riches…

Il faut, je l’admets bien volontiers et nous sommes tous d’accord sur ce point, il faut préserver les recettes des collectivités. Mais ne peut-on pas faire en sorte que les collectivités les plus défavorisées, classées en tant que telles par la délégation interministérielle à la ville et donc reconnues au niveau national, bénéficient dès maintenant des aspects positifs de la réforme, tandis que les plus défavorisées commenceraient dès maintenant à payer un peu plus pour que les collectivités les plus défavorisées bénéficient de moyens supplémentaires?

L’effet d’annonce est catastrophique: dire à des intercommunalités très faibles financièrement qu’elles vont gagner à la réforme, mais que ces fonds leur seront immédiatement soutirés, a quelque chose d’incongru.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . La commission n’a pas examiné ce sous-amendement, mais j’émets à titre personnel un avis défavorable.

C’est exactement le problème que nous avons rencontré au moment de la suppression de la part « salaire » de la taxe professionnelle: fallait-il compenser à chacun ce qu’il avait déjà, autrement dit peu à ceux qui avaient peu et beaucoup à ceux qui avaient beaucoup, ou bien fallait-il d’emblée introduire une péréquation?

À l’époque, le choix avait été fait de compenser chacun au franc près. Par la suite, cette compensation a été intégrée à la dotation globale de fonctionnement, ce qui en a bloqué l’évolution. Cela a permis d’alimenter en particulier le financement de la dotation de solidarité urbaine.

Nous partons ici du même principe: à l’occasion de la réforme, on ne peut pas déshabiller Pierre, même s’il est immensément riche, pour habiller Paul, même si celui-ci est très pauvre. On verse donc à chacun une compensation au niveau des revenus qu’il percevait auparavant.

Mais on crée, et c’est là la nouveauté, un niveau de péréquation national très important pour les départements et pour les régions. Je précise qu’il ne s’agit pas ici des fonds départementaux.

Nous ne l’avons, il est vrai, pas fait au niveau des intercommunalités, par manque de temps: nous descendons 20 % de la cotisation complémentaire au niveau de ces intercommunalités, mais nous n’avons pas pu mettre au point ce mécanisme de péréquation. Nous comptons beaucoup, je l’ai dit hier, sur le travail du Sénat pour établir les péréquations au niveau des intercommunalités.

Je suis d’accord avec vous sur l’objectif poursuivi, mais nous n’avons pas pu répondre à la péréquation à tous les niveaux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Même avis. Je vous suggère, monsieur Pupponi, de retirer ces trois amendements. Le mécanisme que nous proposons prévoit bien une garantie par la compensation, ainsi que les fonds nationaux de garantie prévus par les textes à l’échelon départemental et à l’échelon régional. Compte tenu de l’évolution de la position du Gouvernement sur l’attribution aux intercommunalités d’une partie de la cotisation complémentaire, il va falloir, mutatis mutandis , répercuter également un fonds de péréquation au niveau communal.

La combinaison de ces trois fonds, associée au puissant mécanisme de péréquation prévu par l’amendement n° 45, répond à mon avis à votre objectif, consistant à rétablir une balance entre les EPCI qui se trouvent grands gagnants et ceux qui, au contraire, sont perdants de manière pérenne.

M. le président. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Je suis tout disposé à vous entendre, madame la ministre. Le problème, c’est qu’un prélèvement va être effectué auprès des gagnants pour être affecté à un fonds national et reversé aux perdants, mais que l’on nous dira seulement l’année prochaine comment la péréquation va être mise en œuvre, en particulier pour l’intercommunalité et le bloc communal…

Il me semble que l’on aurait pu, dès cette année, faire un effort symbolique. Villiers-le-Bel, par exemple, une commune de 32000 habitants qui a connu depuis deux ans des événements dramatiques, perçoit 1,5 million d’euros au titre de la taxe professionnelle. À quatre kilomètres, Roissy, avec 2500 habitants, perçoit plus de 20 millions d’euros de taxe professionnelle. Après application de la réforme, Villiers-le-Bel toucherait 7 millions d’euros de taxe professionnelle, mais on lui reprendrait l’excédent pour le rendre à Roissy! De tels excès ne sont pas acceptables, et justifieraient que des mesures symboliques soient prises. Sans bouleverser l’ensemble du dispositif, il serait bon de déplacer quelques curseurs pour réparer certaines injustices. Cela met un peu de baume au cœur, madame la ministre, lorsqu’on sait que l’on a été entendu.

Ce n’est pas que je ne veuille pas vous faire confiance, mais certains territoires auront du mal à attendre un an de plus, compte tenu de l’urgence sociale où ils se trouvent – une urgence à laquelle nous pourrions répondre dès maintenant.

Il en va de même pour la DSU, que vous avez décidé de figer, alors que l’augmentation annuelle de la DSU aurait pu, comme cela a été décidé de façon consensuelle l’année dernière, être réservée aux communes les plus pauvres. Nous attendons des mesures précises pour que les quartiers les plus défavorisées ne soient pas les grands perdants de cette réforme.

M. le président. Retirez-vous votre sous-amendement, monsieur Pupponi?

M. François Pupponi. Non, monsieur le président. Il vaut mieux, d’un point de vue psychologique, qu’il soit mis aux voix. (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je veux dire à M. Pupponi que nous allons devoir travailler à nouveau, au Sénat, sur le fonds national de garantie qui doit être mis en place à l’échelon des EPCI. Dans la mesure où je soutiendrai ce texte au Sénat, je m’engage à ce que nous examinions très attentivement le cas de figure sur lequel vous attirez notre attention.

(Le sous-amendement n°442 n’est pas adopté.)

M. le président. Puis-je considérer que les sous-amendements n os 438 et439 ont été défendus?

M. François Pupponi. Oui, monsieur le président.

(Les sous-amendements n os438 et439, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°506.

La parole est à M. Nicolas Perruchot.

M. Nicolas Perruchot. Le sous-amendement n°506 vise à réduire la fracture territoriale entre les collectivités riches et les pauvres, à laquelle la réforme ne va pas remédier. L’objet de notre amendement est de procéder à une péréquation afin de lisser les différences.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Cet amendement est satisfait par les étages de péréquation que nous avons mis en place dans le cadre de la rédaction de la commission des finances.

M. le président. Maintenez-vous votre sous-amendement, monsieur Perruchot?

M. Nicolas Perruchot. Je le retire, monsieur le président.

(Le sous-amendement n°506 est retiré.)

M. le président. Le sous-amendement n°659 de la commission vise à rectifier une erreur matérielle.

(Le sous-amendement n°659, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°637 de M. le rapporteur général, visant également à la rectification d’une erreur matérielle, et auquel le Gouvernement est favorable.

(Le sous-amendement n°637 , accepté par le Gouvernement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement rédactionnel n°718, auquel le Gouvernement est favorable.

(Le sous-amendement n°718 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°603 rectifié.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Ce sous-amendement d’appel, en quelque sorte, vise à démontrer en quoi consisterait la poursuite d’une péréquation infra-départementale à partir de la cotisation complémentaire. Comme vous l’aurez constaté, il n’y a pas d’urgence, puisque je propose de créer dans chaque département un fonds de péréquation communale et de mettre en place, à compter de 2012, un mécanisme de péréquation de la cotisation complémentaire pour les collectivités dont le potentiel financier par habitant est au moins égal à deux fois la moyenne départementale. En cas de progression, une partie de celle-ci pourrait être versée au fonds pour être ensuite répartie par les conseils généraux.

Compte tenu des débats que nous avons eus en commission, je n’irai pas plus loin dans mes explications. Mon sous-amendement a d’abord pour but de montrer que l’on ne souhaite pas rester dans une situation figée par rapport au fonds actuel, et qu’il serait bon de conserver un complément de péréquation infra-départementale. J’ajoute que je suis disposé à retirer cet amendement si M. le rapporteur général le souhaite, ce qui nous permettra de travailler encore sur cette question, en y intégrant au passage la problématique des IFER que nous avons évoquée hier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Ce sous-amendement montre la direction, mais présente l’inconvénient, à court terme, d’infliger une double peine à certaines communes qui, tout en perdant la recette, continueraient à être écrêtées. Je préférerais donc que vous le retiriez, monsieur Bouvard.

M. Michel Bouvard. Je le retire.

(Le sous-amendement n°603 rectifié est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°407.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Le débat sur la péréquation a été vif en ce qui concerne les départements et les régions. Notre amendement n°407 propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la péréquation communale, qui nous permettra peut-être de disposer de davantage d’informations – puisque des bruits contradictoires ont circulé au sujet des simulations ayant ou non été effectuées.

(M. Marc Le Fur remplace M. Marc Laffineur au fauteuil de la présidence.)
Présidence de M. Marc Le Fur,
vice-président

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n°407?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Notre collègue Pupponi vient d’appeler notre attention sur le fait que ce n’est pas d’un rapport que nous avons besoin: la péréquation va devoir être mise en place dans le courant de l’année 2010. Je ne voudrais pas que l’on donne le sentiment que l’établissement d’un rapport nous exonère de l’urgence à mettre en place les dispositifs de péréquation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. J’ai exactement le même avis que M. le rapporteur général. Plutôt que d’adopter un rapport avant mars2010, je préfère – et j’en prends l’engagement devant vous – que l’on ait trouvé une solution, pour le PLF 2011, c’est-à-dire avant la fin de l’année 2010, à la question de la péréquation au sein du bloc communal.

M. le président. Voilà une réponse encourageante, n’est-ce pas, monsieur Eckert?

M. Christian Eckert. Je ne m’interdis pas de faire confiance à Mme la ministre, mais je préfère tout de même maintenir cet amendement, monsieur le président.

M. Jean-Pierre Brard. Voilà un homme sage et prudent!

(Le sous-amendement n°407 n’est pas adopté.) (M. Marc Laffineur remplace M. Marc Le Fur au fauteuil de la présidence.)
Présidence de M. Marc Laffineur,
vice-président

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°323.

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Cet amendement vise à assurer que la perte potentielle ouvrant droit pour les entreprises au dégrèvement est calculée en référence à une somme qui inclut les taxes consulaires, ce qui est important dans la mesure où la charge liée à ces taxes devrait décroître très fortement à l’issue de la réforme en cours.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je trouve cet amendement assez logique, puisqu’il vise à inclure les taxes consulaires, qui ont vocation à diminuer, dans le dispositif d’écrêtement. En réduisant l’écrêtement, nous allons réaliser des économies qui, pour être modestes, n’en seront pas moins réelles. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je suis tout à fait d’accord avec M. le rapporteur général: s’il y a des économies à faire, nous les ferons!

(Le sous-amendement n°323 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°321.

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Nous voulons, avec le sous-amendement n°321, rappeler notre attachement à quelques principes de justice fiscale. Il s’agit d’éviter des comportements d’optimisation reposant sur le démembrement artificiel d’entreprises d’un même groupe entre plusieurs entreprises qui resteraient liées entre elles par un lien de dépendance.

Notre amendement permet également d’éviter que la perte potentielle soit calculée en référence à une somme qui inclut les taxes consulaires, ce qui est important dans la mesure où la charge liée à ces taxes devrait décroître très fortement à l’issue de la réforme. Mais l’essentiel est de parer au risque d’optimisation par démembrement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur . Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable.

(Le sous-amendement n°321 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°320.

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. M. le rapporteur général et Mme la ministre se sont contentés d’une réponse laconique, alors que le risque d’optimisation est bien réel…

M. Dominique Baert. Absolument!

M. Jean Launay. … et il est de notre devoir de le prévenir. Une réforme est en cours, certes, mais cela ne doit pas nous empêcher d’anticiper sur des comportements susceptibles d’en affaiblir les effets.

M. Dominique Baert. On aura prévenu!

(Le sous-amendement n°320, rejeté par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°731.

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Défendu.

(Le sous-amendement n°731, rejeté par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. Dominique Baert. On aura prévenu!

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°730.

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Défendu.

(Le sous-amendement n°730, rejeté par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n°640 de la commission est de coordination.

(Le sous-amendement n°640, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n°641 de la commission est de coordination.

(Le sous-amendement n° 641, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°228.

La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Madame la ministre, je suis convaincu que vous serez sensible à ce sous-amendement qui concerne le monde rural. Vous savez que des dispositions spécifiques existent pour les zones de revitalisation rurale, mais encore faut-il s’accorder sur leur définition exacte.

Le monde rural se caractérise généralement par des densités relativement faibles, mais pas toujours. Du fait des critères trop exigeants, me semble-t-il, retenus jusqu’à présent, certains cantons ruraux ne bénéficient pas des dispositions applicables aux ZRR. L’objet de mon amendement, certes mineur, mais qui peu intéresser bon nombre de ces territoires, est de permettre aux cantons ruraux dont la densité est supérieure à trente et un habitants au kilomètre carré de bénéficier de ce dispositif dont chacun reconnaît l’intérêt.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement mais elle a accepté un amendement que nous allons examiner plus loin et qui porte également sur la modification des critères ZRR.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le Gouvernement a beaucoup de sympathie pour la proposition de Marc Le Fur…

M. Christian Eckert. Quand cela commence comme ça, cela finit toujours mal!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. …car les zones de revitalisation rurale sont en effet une vraie question. Cela étant, une évaluation est en cours, effectuée sur la base de deux rapports réalisés par une mission interministérielle et un cabinet d’études, et qui doit être remise avant la fin du mois d’octobre au ministre chargé de l’espace rural et de l’aménagement du territoire.

Je vous suggère donc, monsieur Le Fur, de retirer votre sous-amendement au bénéfice des conclusions de ce rapport, qui nous permettra de déterminer si les ZRR fonctionnent correctement dans leur forme actuelle.

M. Marc Le Fur. Je suis désolé, madame la ministre, mais je préfère le maintenir.

(Le sous-amendement n°228 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux sous-amendements identiques, n os 365 et619.

La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir le sous-amendement n°365.

M. Jean Launay. Ce sous-amendement porte lui aussi sur les zones de revitalisation rurale. Nous avons reçu dans nos départements les missionnaires dont vous venez de parler, madame la ministre, et nous leur avons expliqué, comme vient de le faire Marc Le Fur, qu’il existait aussi des zones mixtes, c’est-à-dire des zones rurales et de montagne. L’attachement de la montagne aux ZRR est particulièrement fort. Je le dis d’autant mieux qu’Henri Nayrou, le premier signataire de cet amendement, est président de l’association nationale des élus de la montagne, qui tient actuellement son congrès annuel.

M. Michel Bouvard. Excellent président!

M. Jean Launay. Notre sous-amendement décline celui de Marc Le Fur en l’appliquant aux zones de montagne.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir le sous-amendement n°619.

M. Michel Bouvard. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai également mon sous-amendement suivant, n°620, qui procède du même esprit.

Depuis la mise en place du nouveau périmètre des zones de revitalisation rurale intervenue il y a quelques années, il faut réunir deux critères pour être classer en ZRR. Le premier critère est un critère de densité de population; il doit être combiné à un second critère à choisir entre le déclin démographique, un taux de chômage supérieur à la moyenne nationale ou un taux de population agricole active deux fois supérieur à la moyenne nationale.

Le critère démographique est évidemment celui qui reflète le mieux le déclin historique d’une zone d’activités. Or, dans les territoire de montagne, il arrive qu’un canton complet soit en déclin démographique, à l’exception d’un micro-territoire où est installée la station de sport d’hiver dont la population, souvent saisonnière, va masquer de façon artificielle la chute de la démographie et exclure le canton du classement en ZRR pour quelques dizaines d’habitants.

Ce sous-amendement propose donc de prendre en compte dans les données démographiques la mesure du déclin de la population dans la majorité des communes du canton, chef-lieu inclus, ce qui permettrait un constat plus objectif du déclin démographique.

Quant au sous-amendement n°620, il propose de distinguer dans le référentiel entre la population permanente et la population saisonnière – ce qui permet notamment d’avoir une meilleure idée du taux de chômage.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. J’aimerais que M. Bouvard me rassure sur un point: son sous-amendement ne conduira-t-il pas à faire passer Tignes ou Val d’Isère en ZRR? (Sourires.)

M. Marc Le Fur. Serre-Chevalier y est déjà!

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Je rassure Gilles Carrez: aucun canton ni aucun chef-lieu de la vallée de la Tarentaise n’est en déclin démographique. Les zones les plus touristiques du pays ne sont pas en déclin démographique. En fait, le cas peut se produire dans un canton des Pyrénées doté d’une station moyenne et qui peut se trouver exclu de la ZRR sans que le problème du déclassement économique soit réglé. Mais il n’y a aucun risque de voir les cantons qui abritent nos plus grandes stations de sports d’hiver entrer dans ce zonage.

M. Gérard Bapt. Avec la réforme, cela va changer!

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission préfère le sous-amendement n°620, qui exclut la population saisonnière dans l’appréciation des critères démographiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Mon avis est le même que pour le sous-amendement de Marc Le Fur. Les ZRR bénéficient d’un régime de défiscalisation particulier fondé sur les critères que M. Bouvard vient de rappeler. Nous sommes actuellement en train d’examiner l’efficacité de ces ZRR, pour éventuellement en modifier les critères et le régime. Nous aurons un rapport à la fin du mois d’octobre, et il serait raisonnable et légitime d’en attendre les conclusions.

M. Michel Bouvard. Je veux bien attendre le collectif!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Au vu de ses conclusions, nous déciderons alors s’il y a lieu de prendre en compte les propositions faites par Marc Le Fur, Michel Bouvard et les autres députés.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je suis moi-même embarrassé, car nous nous apprêtons à statuer sur la question des saisonniers sans régler le problème posé par Marc Le Fur. J’ai répondu tout à l’heure à un sous-amendement de nos collègues communistes sur la TASCOM que la réforme concernait la compensation et le réagencement de l’impôt, mais que nous n’entendions pas en profiter pour en revoir les critères de calcul ou des exonérations. Il serait donc plus sage d’attendre, pour aborder la révision des critères ZRR, les conclusions du rapport, quitte à intégrer les modifications dans le collectif. Sinon, ce ne serait pas faire du bon travail.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Je suis convaincu par l’argumentation de rapporteur général et de la ministre. Dès lors qu’un travail est en cours, l’usage veut que l’on attende qu’il soit rendu. Cela dit, notre débat ayant lieu pendant le congrès de l’Association nationale des élus de la montagne, qui représente une grande partie de ces territoires défavorisés, il faudrait que le Gouvernement, après le rapporteur général, s’engage à ce que nous puissions vraiment aborder cette question à l’occasion du collectif de fin d’année et que nous ne perdions pas de nouveau un an.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je voudrais démontrer l’absurdité de certains des critères qu’a évoqués Michel Bouvard. Je connais une zone de Bretagne intérieure dans laquelle aucun des cantons ne bénéficie de l’avantage ZRR, parce qu’ils ont des densités de population trop élevées, à l’exception d’un seul, dont la chance est d’être occupé pour moitié par une forêt, ce qui, bien évidemment, fait chuter sa densité.

Pour éviter ces situations absurdes, il faut donc remonter les niveaux de densité, sans quoi les ZRR ne seront plus qu’une aide à la montagne…

M. Michel Bouvard. Oh! On trouve des tas de territoires classés en ZRR… Et il n’y a même pas de critère d’altitude! (Sourires.)

M. Jean-Louis Idiart. Voilà bien la jalousie du massif Armoricain!

M. Marc Le Fur. Or nous avons bon nombre de zones rurales objectivement en difficulté. Cela sous-tend également la notion de zone franche, qu’il faut intégrer. Je vous fais confiance, à condition que l’on débouche sur une solution.

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Je suis prêt, comme mes collègues à retirer mon sous-amendement, dès lors que nous avons l’engagement que la question sera abordée au fond dans la loi de finances rectificative, étant entendu que le travail conduit par vos experts missionnés – dont je ne doute pas de la qualité – ne sera que le support d’un vrai débat prenant en compte le regard et l’expérience des acteurs du terrain.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je le confirme.

(Les sous-amendements n os 365 et619 sont retirés.)

M. le président. Les sous-amendements n os 369, deuxième rectification, et 620 ont également été retirés.

Le sous-amendement n°642 de la commission est rédactionnel.

(Le sous-amendement n°642, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Les sous-amendements n os 643 et 644 de la commission sont également rédactionnels.

(Les sous-amendements n os 643 et 644, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.) (M. Marc Le Fur remplace M. Marc Laffineur au fauteuil de la présidence.)
Présidence de M. Marc Le Fur,
vice-président

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°413.

La parole est à M. Marc Laffineur. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Quelle organisation!

M. Dominique Baert. Décidément, il est partout!

M. Jean-Pierre Brard. Il pourrait remplacer Copé, ce serait mieux!

M. le président. Allons!

M. Marc Laffineur. Le sous-amendement n°413 vise à réparer un oubli dans l’amendement n° 45 du rapporteur – comme dans le texte du Gouvernement, me semble-t-il. Sous le régime de l’ancienne taxe professionnelle, des aides étaient accordées sous forme d’abattements aux entreprises qui s’étaient créées dans l’année. Celles-ci bénéficiaient ainsi d’une diminution de 50 % de la base taxable. Or cette disposition ne figure pas dans l’amendement du rapporteur. mon sous-amendement n°413 vise donc à réintroduire cette aide dans le nouveau dispositif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Ce sous-amendement me paraît utile. Jusqu’à présent, la première année, une entreprise n’était assujettie à la taxe professionnelle qu’à hauteur de la moitié de ce qu’elle aurait dû payer, et ce au titre des réductions d’impôt pour création d’entreprise. Ce n’est que la deuxième année qu’elle entrait pleinement dans le dispositif. Précisons que le coût de cette mesure s’élevait, de mémoire, à quelques dizaines de millions d’euros chaque année; mais le sous-amendement de M. Laffineur propose de n’appliquer cet abattement temporaire de 50 % que sur la cotisation locale d’activité. Encore une fois, cette disposition me paraît très utile.

M. Dominique Baert. C’est simple et lisible!

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je vais compléter mon propos. De mémoire – vous me corrigerez si je me trompe, madame la ministre –, il me semble que les bases d’une entreprise existante sont saisies avec deux ans de décalage. Cette année, par exemple, celle-ci sera assujettie à la taxe professionnelle sur les bases de 2007. En revanche, une entreprise créée en 2007 y a été assujettie dès 2008 – donc sans les deux ans de décalage –, mais sur la moitié de ses bases seulement, la totalité de celles-ci n’étant appliquées qu’en 2009. L’entreprise qui s’est créée en 2008 n’a été assujettie que sur la moitié de ses bases en 2009 et elle le sera sur la totalité en 2011.

Certes, nous ne disposons pas du chiffrage de cette mesure; mais, encore une fois, elle nous paraît utile. Surtout, madame la ministre, j’insiste sur le fait que la mesure porte, non plus sur 26 milliards d’euros, mais sur 6 milliards. Au demeurant, vous disposerez sans doute d’un chiffrage lors de l’examen du budget au Sénat; nous aviserons alors en commission mixte paritaire. Quoi qu’il en soit, si nous adoptions ce sous-amendement, nous enverrions un signal très important en faveur des créations d’entreprise. Aussi la commission y est-elle favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. L’esprit et l’objet de ce sous-amendement conviennent parfaitement au Gouvernement, car nous souhaitons évidemment encourager l’emploi, le maintien et la création d’entreprises. Tel que je le comprends, il porterait de 50 % à 80 % l’abattement pour la deuxième année, mais celui-ci porterait désormais non plus sur l’intégralité de la taxe professionnelle, comme c’était le cas jusqu’à présent, mais sur une base réduite, la CLA. Dès lors, le volume d’exonérations serait à peu près identique au volume actuel. Dans ces conditions, je suis favorable à ce sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Un instant de pédagogie, monsieur le président. Le sous-amendement de notre collègue Laffineur est très intéressant – la permutation au perchoir aussi, du reste. Rappelez-vous: hier, Marc Laffineur et Gilles Carrez ont accepté, avec force accents de contrition dans la voix, de retirer le sous-amendement n°737, au prétexte que les simulations n’avaient pas été faites. Et voilà qu’aujourd’hui, le même M. Laffineur, oubliant certainement l’épisode d’hier, nous propose un autre sous-amendement sans aucune simulation... Au reste, j’ai vu que Mme Lagarde avait hésité un instant.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . C’est un petit sujet!

M. Jean-Pierre Brard. Un petit sujet: 80 millions! Je vous connais plus pingre quand il s’agit de donner des petites sommes aux gens qui en auraient vraiment besoin et en feraient le meilleur usage!

En tout état de cause, il est très intéressant que l’opinion s’aperçoive que votre argumentation est à géométrie variable selon les sujets. Hier, il vous fallait des simulations, et c’est en raison de leur absence que vous capitulâtes. Aujourd’hui, la ministre accepte votre sous-amendement sans disposer de la moindre simulation. Dans ce jeu de rôles, la sincérité n’est pas au rendez-vous.

M. le président. Je vous remercie, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je terminerai d’une phrase, monsieur le président: ce dont les entreprises ont avant tout besoin, ce n’est pas d’exonérations, mais de carnets de commande remplis. Or la politique du Gouvernement les tarit. Lorsqu’ils sont pleins, l’activité fonctionne et le paiement de l’impôt, loin d’être un problème, est un devoir.

M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Ce sous-amendement n’entraîne pas de dépenses, mais une non-recette; ce n’est pas du tout la même chose.

M. Jean-Pierre Brard. Bien sûr!

M. Marc Laffineur. Par ailleurs, nous avons grand besoin de créations d’entreprise. Or, souvent, nous le constatons tous dans nos communes, les entreprises sont créées par des personnes qui ont peu de moyens. C’est ceux-là qu’il faut aider.

M. Jean-Pierre Brard. Il y a déjà l’auto-entrepreneur!

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Madame la ministre, la générosité dont vous faites preuve vis-à-vis de ce sous-amendement n’a de comparable que la recette supplémentaire de 800 millions d’euros qui a été proposée dans un autre sous-amendement, qui pourtant n’a pas fait beaucoup débat.

Plus sérieusement, je m’interroge sur la rédaction du sous-amendement n°413. En effet, celui-ci fait référence à la « création d’établissements », alors que M. le rapporteur comme Mme la ministre ont évoqué la création d’entreprises. On connaît la différence entre ces deux termes et les optimisations fiscales auxquelles un tel choix pourrait donner lieu. Je souhaiterais donc que l’on me précise s’il s’agit d’établissements ou d’entreprises.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Actuellement, l’abattement pour création d’entreprise représente une quarantaine de millions d’euros. Le coût de la mesure proposée serait donc compris entre 8 et 10 millions d’euros, et il sera compensé par l’État, puisqu’il s’agit d’une politique nationale. Il serait dommage que cette politique, qui s’applique à tous les dispositifs fiscaux – qu’il s’agisse de l’IS ou des cotisations sociales –, exclue la fraction cotisation locale d’activité de la contribution économique territoriale. Certes, il vous faudrait lever le gage, madame la ministre, mais celui-ci est raisonnable.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je lève le gage.

(Le sous-amendement n° 413, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n°184.

La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Actuellement, lorsque l’administration fiscale fait une erreur dans son évaluation des bases de la taxe professionnelle, elle adresse au chef d’entreprise de bonne foi, parfois un ou deux ans plus tard, un redressement assorti d’intérêts sur le non perçu. Or, il serait plus simple, me semble-t-il, que dans un tel cas, le chef d’entreprise ne subisse pas de redressement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Ce sous-amendement a été accepté par la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Monsieur Laffineur, vous proposez, pour la nouvelle cotisation locale d’activité, que les erreurs d’imposition imputables à l’administration ne soient pas mises à la charge du contribuable. Il est difficile d’accéder à cette demande. En effet, de manière générale, l’administration fiscale dispose d’un droit de reprise qui lui permet, pendant un certain délai, variable selon les impôts ou taxes concernées, de rectifier les erreurs dans le calcul des bases d’imposition, que ces erreurs lui soient imputables ou qu’elles résultent d’un défaut ou d’une insuffisance de déclaration du contribuable.

Le fait de rectifier les erreurs commises à l’avantage comme au détriment des entreprises, lorsqu’elles sont identifiées à l’intérieur d’un certain délai, est un devoir de l’administration fiscale. C’est une question de bonne application de la loi votée par le Parlement et d’équité entre les opérateurs économiques. Il n’y a pas de raison objective de déroger à ce principe, qui s’applique de manière générale et systématique en matière d’erreurs, quelle que soit l’origine de celles-ci.

En outre, je vous signale qu’en cas d’erreurs commises par les services fiscaux dans la liquidation de l’impôt, le complément d’impôt mis à la charge du contribuable n’est évidemment pas assorti d’une quelconque pénalité. (Murmures sur divers bancs.)

M. Jean-Pierre Brard. Il ne manquerait plus que cela!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Enfin, votre proposition risquerait d’impacter les recettes des collectivités locales, ce qui n’est pas souhaitable, dans l’esprit de la réforme que nous mettons en place.

Je vous suggère donc de retirer votre sous-amendement, monsieur Laffineur.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Madame la ministre, vous êtes si peu convaincue de ce que vous dites que vous vous bornez à lire prudemment la note que l’on vous a préparée. Mais c’est tellement injuste! Pour une fois, je suis d’accord avec notre collègue Marc Laffineur: il y a quelque chose qui est plus fort que le droit, c’est la justice. Or, dans les cas visés par le sous-amendement, ce sont des braves gens de bonne foi qui sont pénalisés.

J’ai travaillé sur la fraude, et j’ai encore en mémoire l’histoire de cet artisan du Val-de-Loire qui, pour son malheur, portait le même nom qu’un autre artisan qui, lui, n’était pas intègre. Eh bien, il a été ruiné par l’administration fiscale et il n’a même pas eu droit à des excuses!

C’est un devoir pour nous tous de soutenir le sous-amendement de Marc Laffineur. Plus globalement, il est du devoir de l’administration fiscale de faire, sous votre houlette, madame Lagarde, une sorte de revue générale et de toutes ces procédures immorales qui pénalisent des personnes d’une totale bonne foi. Le citoyen vivra d’autant mieux ses rapports avec l’administration fiscale que ceux-ci reposeront sur l’éthique et la justice.

M. Marc Laffineur. Très bien!

M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Madame la ministre, je ne retirerai pas mon sous-amendement; c’est une question de morale. Tous les parlementaires ont eu connaissance de cas similaires à ceux que je vise dans mon sous-amendement. À chaque fois qu’une personne de bonne foi qui était dans cette situation est venue me voir – je ne dis que j’en rencontre tous les jours, bien entendu –, je me suis demandé combien d’autres, dans la même situation, n’étaient pas venus solliciter mon aide.

M. Jean-Pierre Brard. Exactement!

M. Marc Laffineur. Je ne peux pas l’admettre. Pour des raisons morales, je ne retirerai pas mon sous-amendement.

M. Jean-Pierre Brard. Très bien!

M. le président. Madame la ministre, accepterez-vous malgré tout de lever le gage?

M. Jean-Pierre Brard. Soyez fair-play, madame la ministre, un petit effort!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Soit. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

(Le sous-amendement n°184, modifié par la suppression du gage, est adopté.) (M. Marc Laffineur remplace M. Marc Le Fur au fauteuil de la présidence.)
Présidence de M. Marc Laffineur,
vice-président

M. le président. Les sous-amendements n os 638, 724, 656, deuxième rectification, 657 et 658 de la commission sont rédactionnels.

(Les sous-amendements n os 638, 724, 656, deuxième rectification, 657 et 658, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

M. le président. Les sous-amendements n os 762 et761 de la commission sont de coordination.

(Les sous-amendements n os 762 et761, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux sous-amendements, n os 716 et760, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir le sous-amendement n°716.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. L’article 53 de la loi de finances pour 2004 a institué une compensation par l’État aux collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale des pertes de recettes résultant d’une perte importante de bases d’imposition à la taxe professionnelle. Du fait de la suppression de la taxe professionnelle et de son remplacement par la contribution économique territoriale, il n’y a plus lieu de maintenir cette compensation. Il est donc proposé de supprimer ce dispositif qui était intrinsèquement lié aux caractéristiques de la taxe professionnelle.

Bien évidemment, la compensation des pertes importantes de redevance des mines, également prévue par l’article 53 de la loi de finances pour 2004, elle, n’est pas modifiée.

M. Jean-Pierre Brard. Nous sommes dans le sophisme, là!

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement n°760 et donner l’avis de la commission sur le sous-amendement n°716.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Le sous-amendement n°760 est complémentaire puisqu’il traite, lui aussi, des compensations de pertes.

À côté de la compensation de perte générale, nous avions été obligés de mettre en place, il y a quelques années, un système de compensation de pertes spécifique « France Télécom ». La question France Télécom ayant été résolue, je profite de l’occasion pour vous en remercier, madame la ministre, ainsi que votre collègue Éric Woerth, car il s’agissait d’un sujet très difficile que nous traînions depuis des années.

M. Marc Le Fur. Tout à fait!

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Il est dès lors tout à fait légitime que nous supprimions le dispositif d’écrêtement de la perte, qui ne donnait pas satisfaction.

Avis favorable au sous-amendement du Gouvernement, qui vient en complément de celui de la commission puisqu’il traite du régime général de compensation de pertes.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n°760?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le Gouvernement est favorable au sous-amendement de M. Carrez dans la mesure où M. Carrez est favorable au sous-amendement du Gouvernement. (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Je ne voudrais pas qu’il y ait de confusion.

Le sous-amendement n°716 supprime les dispositifs de compensation de pertes de bases de taxe professionnelle. Ces dispositifs en sifflet jouaient notamment lorsqu’un établissement important cessait ses activités pour des raisons économiques. A-t-on prévu un mécanisme similaire sur les nouvelles contributions? Je comprends bien que la loi ne puisse conserver le dispositif de compensation pour perte de taxe professionnelle à partir du moment où celle-ci change de nom, d’assiette et de mode de calcul, mais je voudrais m’assurer qu’il existe un mécanisme analogue dans l’amendement n° 45 du rapporteur général. Sinon, ce serait un oubli majeur dans la mesure où l’on a, semble-t-il, territorialisé, même si nous contestons l’efficacité de cette décision, la dotation de compensation.

Existe-t-il, avec votre nouvelle taxe, un dispositif de compensation lorsqu’une grosse entreprise disparaît d’un territoire? Que vous supprimiez les anciennes compensations, tout en maintenant celles qui ont été acquises avant 2010, paraît légitime; mais que prévoyez-vous dans le cadre de la nouvelle contribution?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . M. Eckert a raison de soulever cette question pour l’avenir mais je lui répondrai que le régime de compensation de pertes avait été monté à partir de problèmes réellement rencontrés voici une douzaine d’années. Aujourd’hui, nous remettons tous les compteurs à zéro – notamment pour France Télécom. Je crois qu’il faut attendre que, ici ou là, des problèmes de pertes importantes surgissent pour mettre en place le bon dispositif. On ne peut pas aujourd’hui imaginer un dispositif parfaitement calé sur une nouvelle contribution économique territoriale dont l’assiette, qui fait intervenir la valeur ajoutée, est fondamentalement différente.

Si je suis tout à fait favorable à l’idée que l’on mette en place un dispositif d’écrêtement des pertes, j’estime que nous sommes incapables de le calibrer aujourd’hui.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. La raison pour laquelle on remplace cette taxe professionnelle par la contribution économique territoriale, en réduisant l’assiette liée à l’activité et en utilisant la valeur ajoutée, c’est précisément pour éviter ce type de situation avec des délocalisations, des départs d’entreprises, qui entraînent une modification significative du financement.

La clef de répartition « macro » initialement envisagée palliait les difficultés que vous évoquez, mais je suis sûre qu’avec le dispositif de péréquation prévu par l’amendement n° 45, nous parviendrons à retomber sur un mécanisme qui permettra d’éviter les conséquences financières de ce genre de situation.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Je ne veux pas empêcher les choses d’avancer mais je tiens à attirer l’attention de tous ici sur cette affaire.

En Lorraine, nous savons ce que sont des pertes de ressources liées à l’activité économique. En tant qu’élu d’un secteur minier, je suis sensible au fait que la compensation pour la redevance des mines demeure, là où elle existe encore – tout en faisant remarquer que la redevance des mines n’était absolument pas comparable, dans son volume, avec la taxe professionnelle; mais tout cela relève maintenant du passé…

Monsieur le rapporteur général, je ne peux accepter votre argument selon lequel il serait compliqué de trouver le mécanisme de compensation. Auparavant, le système était simple, me semble-t-il: pendant une durée fixée, je crois, à cinq ans, la compensation de pertes de ressources liée à la taxe professionnelle descendait en sifflet à raison de 20 % par an de façon linéaire. Un dispositif de même nature pourrait être introduit, quelle que soit l’assiette, valeur ajoutée ou autre.

Vous m’accorderez qu’un sinistre industriel majeur se traduirait en tout état de cause par une lourde perte de l’assiette de la valeur ajoutée pour le territoire. Il me paraît donc essentiel de préserver – il ne s’agit même pas d’inventer – un système équivalent. Je veux bien croire à un oubli; nous-mêmes nous aurions pu déposer des sous-amendements sur ce sujet. Mais j’attire votre attention sur le fait que des territoires risquent de connaître des évolutions extrêmement brutales en cas de sinistres industriels. N’avez-vous pas accordé quelque chose tout à l’heure pour les créateurs d’entreprise?

M. le président. Il faut conclure, monsieur Eckert.

M. Christian Eckert. Il faut un dispositif équivalent pour les cas de sinistres industriels majeurs.

M. le président. Je vous indique qu’il convient de rectifier le sous-amendement n°716 du Gouvernement en remplaçant, dans le dernier aliéna, l’expression: « jusqu’à leur terme » par l’expression: « jusqu’à son terme ».

(Le sous-amendement n°716, ainsi rectifié, est adopté.) (Le sous-amendement n°760 est adopté.)

M. le président. Les sous-amendements n os 647 et648 de la commission sont rédactionnels.

(Les sous-amendements n os 647 et648, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

M. le président. Le sous-amendement n°645, deuxième rectification, de la commission est de coordination.

(Le sous-amendement n°645, deuxième rectification, accepté par le Gouvernement, est adopté.) (L’amendement n° 45, sous-amendé, est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 2 est ainsi rédigé et tous les amendements suivants déposés sur l’article 2 tombent.

(M. Marc Le Fur remplace M. Marc Laffineur au fauteuil de la présidence.)
Présidence de M. Marc Le Fur,
vice-président

Après l’article 2

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n°384 portant article additionnel après l’article 2.

La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Nous venons d’adopter une grande réforme en supprimant la taxe professionnelle.

M. Dominique Baert. Une réforme qui appelle beaucoup de réserves!

M. Marc Laffineur. Et nous avons mis en place plusieurs fonds de péréquation. Je propose d’en créer un nouveau, qui ne pénaliserait personne.

Les droits de mutation connaissent actuellement une chute très importante, tous les départements, ou presque, en souffrent. Quand l’augmentation des droits de mutation est supérieure au double de l’inflation de l’année N–1, je propose que la moitié de ce qui est au-dessus aille dans un fonds de péréquation qui serait distribué aux départements qui connaissent les potentiels fiscaux les plus bas.

Je prends un exemple: si les droits de mutation augmentent de 10 %, et que l’année N–1, l’inflation était de 2 %, on fait 2 fois 2 égale 4 et on prend la moitié de ce qui est au-dessus pour verser dans un fonds de péréquation. Ainsi, le département qui a connu 10 % d’augmentation de ses droits de mutation percevra 7 % tandis que les 3 % restants iront dans un fonds de péréquation pour aider tous les départements qui ont un potentiel fiscal par habitant inférieur à la moyenne.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission est favorable à l’amendement de notre collègue Marc Laffineur, qui montre à quel point nous sommes soucieux de la mise en place – enfin! – d’une péréquation efficace.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement est favorable à la mise en place d’un mécanisme de péréquation au niveau de l’augmentation des DMTO supérieure à deux fois le taux d’inflation. Le mécanisme d’écrêtement et d’abondement à un fonds de péréquation au niveau départemental est une méthode intelligente pour essayer de faire de la répartition.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Une précision, monsieur le président: M. Laffineur avait présenté un amendement n°543 rectifié. Est-ce à dire qu’il l’a retiré?

M. Marc Laffineur. Oui.

M. le président. La parole est à M. Claude Bartolone.

M. Claude Bartolone. J’entends l’amendement tel qu’il est déposé mais je voudrais revenir sur un point.

Pour un certain nombre de départements qui n’ont pas obtenu de l’État les compensations correspondant aux charges qui leur étaient rétrocédées, le manque à gagner a bien souvent été comblé grâce à l’augmentation des droits de mutation. Je suis tout à fait d’accord pour une péréquation, mais si l’État persiste à ne pas transférer à l’euro près les différents moyens qui devraient permettre aux départements de financer les secteurs transférés et qu’en plus on leur demande d’équilibrer leurs comptes en jouant sur la dynamique de leurs recettes de DMTO, cela ne pourra pas fonctionner.

Je comprends la nécessité de parvenir à une péréquation juste entre collectivités riches et collectivités pauvres, mais comment pouvez-vous traiter des droits de mutation sans toucher au reste?

Je voudrais revenir sur le ticket modérateur. Cela aurait été l’occasion d’instaurer une véritable péréquation puisque, dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, ce ticket modérateur concerne des collectivités qui, compte tenu des charges sociales, n’ont pu faire autrement qu’augmenter leur taux de TP pour boucler leur budget. Mais là, on ne fait rien! Je vous donne toujours cet exemple caricatural de la Seine-Saint-Denis qui paie 37 millions d’euros de ticket modérateur alors que les Hauts-de-Seine n’en paient pas.

Sur les dernières années, monsieur Laffineur, je le constate dans le département dont je suis l’élu, c’est la dynamique des droits de mutation qui nous a permis de combler la perte résultant des charges non compensées par l’État. On ne peut toucher à la seule recette dynamique sans se préoccuper de ces charges!

M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Lisez bien l’amendement, monsieur Bartolone. Les départements gardent leur dynamique: il s’agit simplement de faire contribuer ceux dont la dynamique dépasse un certain niveau, et simplement à hauteur de la moitié. Il n’est pas question de supprimer la dynamique.

M. le président. La parole est à M. Claude Bartolone.

M. Claude Bartolone. J’entends bien, monsieur Laffineur, mais j’aurais tendance à dire: la moitié de la dynamique sur la différence entre ce qui est encaissé et ce qui n’est pas donné à la collectivité locale dans le cadre du transfert des charges. Sinon, il n’y a pratiquement plus de dynamique.

M. Marc Laffineur. N’oubliez pas que les ressources seront redistribuées aux départements dont le potentiel financier est inférieur à la moyenne nationale.

M. le président. Pardonnez-moi d’intervenir dans le débat, monsieur Bartolone, mais la redistribution tiendra compte de la faiblesse du potentiel fiscal.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . C’est exactement ce que je voulais dire, monsieur le président! Il est fort possible que le département de la Seine-Saint-Denis soit éligible à la redistribution.

(L’amendement n°384 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 46.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . La commission a adopté cet amendement à l’initiative de M. de Courson. Il s’agit de demander un rapport au Gouvernement.

M. le président. Un rapport de plus…

M. Jean-Pierre Brard. C’est pour occuper les soirées d’hiver de Charles-Amédée!

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le Gouvernement est globalement favorable à cette proposition sous réserve de quelques petites modifications de fond et de forme.

D’abord, je rappelle que l’exonération de taxe professionnelle des activités agricoles issues de la patente est historiquement justifiée par le caractère spécifique de ces activités. Elle doit donc tout naturellement être maintenue dans le cadre de la présente réforme.

Surtout, cette proposition est de nature à remettre en cause la politique menée au cours des dernières années en vue d’alléger les charges pesant sur les exploitants agricoles. Or, vous le savez, le Premier ministre s’en est fait l’écho il y a moins de vingt-quatre heures et le sujet sera abordé mardi prochain, le Gouvernement est très soucieux du niveau de pression fiscale pesant sur les agriculteurs exploitants. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, dans le cadre de la loi de finances de 2006, l’allégement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties qui avait pris la forme de la suppression des parts départementale et régionale de la taxe pour les propriétés agricoles a été poursuivi par l’institution d’une exonération de 20 % des parts communale et intercommunale. Cette disposition a été appliquée pour la première fois aux impositions établies au titre de 2006.

Dans ces conditions, il me semblerait plus utile d’envisager un rapport constituant un diagnostic sur la fiscalité agricole sans préjuger a priori de la fiscalisation qu’il conviendrait de privilégier.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je retire l’amendement.

(L’amendement n° 46 est retiré.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures:

Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2010.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l’Assemblée nationale,
Claude Azéma