XVe législature
3e session extraordinaire de 2020-2021

Séance du mercredi 29 septembre 2021

L’ordre du jour appelle la discussion, sur les rapports des commissions mixtes paritaires, du projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique (no 4311) et du projet de loi organique modifiant la loi organique no 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution (no 4310).
La conférence des présidents a décidé que ces deux textes donneraient lieu à une discussion générale commune.
La parole est à Mme Aurore Bergé, rapporteure de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique. D’une certaine manière, voilà presque quatre ans que nous travaillons sur ce texte et sur l’enjeu essentiel qu’est la réforme de l’audiovisuel. Je voudrais tout d’abord réaffirmer l’exigence que le législateur avait lui-même posée, en 1986, celle d’assurer la liberté de communication audiovisuelle et, partant, le pluralisme des médias et l’accès des publics à la diversité culturelle.
Au-delà des évolutions progressives de la loi de 1986 – évolutions d’origine législative mais aussi beaucoup, ces dernières années, d’origine réglementaire – et alors que les règles du jeu ont été profondément bousculées, une adaptation plus importante devenait nécessaire : c’est ce que nous avons réalisé dans le cadre du projet de loi dont nous achevons enfin l’examen aujourd’hui.
Nous avons réaffirmé plusieurs exigences et principes.
La première de ces exigences, madame la ministre de la culture, est évidemment le respect de celles et ceux qui créent. Cela soulève la question du piratage, un enjeu essentiel, d’autant que ces derniers mois, nous en avons malheureusement vu prospérer la pratique. Il faut absolument y mettre un terme. Désormais, le droit nous offrira des outils beaucoup plus puissants pour lutter contre tous les leviers de contournement qui existaient jusqu’alors, notamment les sites dits miroirs. En tant que législateur, nous posons un interdit clair : le piratage, qui est toujours un pillage de l’œuvre et des droits des créateurs, doit cesser.
Nous avons également réaffirmé la souveraineté culturelle. En ce domaine, des adaptations du droit et de la loi de 1986 étaient nécessaires, notamment s’agissant des seuils anticoncentration, que nous avons modifiés pour la télévision comme pour la radio : face aux nouveaux entrants dans un jeu audiovisuel profondément modifié, nous ne souhaitions pas que nos acteurs partent avec des boulets au pied.
S’est également posée la question des publics, car cette loi, qui peut paraître très technique au premier abord, s’adresse avant tout aux Français. Que regardent-ils au quotidien ? La diversité culturelle est-elle assurée ? Le pluralisme audiovisuel est-il garanti ?
Nous avons réaffirmé l’importance de la TNT, la télévision numérique terrestre. Beaucoup, avant le confinement, prédisaient sa mort, mais nous avons vu depuis que la télévision avait de l’avenir, pour peu qu’on lui en donne les moyens. C’est ce que nous faisons, notamment grâce à l’UHD, l’ultrahaute définition. Même s’il ne figure pas dans la loi, le Président de la République et vous, madame la ministre, avez pris un engagement très fort, conforme à la volonté des parlementaires : la pérennité de France 4. Cette chaîne aurait pu disparaître, mais face aux attentes des publics et à la prolifération d’autres types d’écrans, il nous a au contraire paru nécessaire qu’une chaîne du service public soit dédiée non seulement à la jeunesse, mais également à la culture, un des premiers secteurs à avoir souffert de la période que nous avons vécue.
Alors que nous vivons un moment politique où même la vérité devient contestable, disposer d’un audiovisuel public fort est évidemment un atout essentiel. Non pas parce qu’il dirait ce qui doit être dit, à l’instar d’une télévision d’État – ce n’est pas cela, l’audiovisuel public –, mais parce que sa singularité permet de véhiculer des valeurs et principes auxquels nous sommes particulièrement attachés. La pérennité de France 4 en est la parfaite démonstration.
Voilà, en quelques mots, les éléments à nos yeux essentiels que contient le projet de loi.
Je tiens à saluer le climat très serein dans lequel se sont tenus les débats de la commission des affaires culturelles, avant comme après le confinement. Le travail avec le Sénat a également été très fructueux.
Il n’était pas évident de trouver une place pour l’examen de ce texte dans l’ordre du jour des assemblées parlementaires. Il y en aura toujours pour considérer que la culture peut attendre. Mais en réalité, la culture n’attend pas ! Des adaptations législatives et réglementaires étaient nécessaires ; les voilà désormais sur le point d’être adoptées. Nous serons très vigilants quant à l’application des nouvelles dispositions – notamment s’agissant des directives, qui permettront d’assurer le financement à long terme de la création, en particulier du cinéma.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM ainsi que sur les bancs du groupe Dem.) La parole est à Mme Laetitia Avia, rapporteure de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique modifiant la loi organique no 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution. Le texte dont j’ai l’honneur d’être rapporteure tend à actualiser la liste des fonctions soumises à la procédure de nomination prévue par le cinquième alinéa de l’article 13 de notre Constitution. Il accompagne ainsi l’ambitieuse réforme proposée par le Gouvernement et contenue dans le projet de loi relatif à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique, qui vise à faire évoluer les pratiques numériques des internautes vers des usages plus responsables et respectueux des règles de la propriété intellectuelle.
Les dispositions contenues dans ce dernier texte ayant déjà été brillamment présentées par Mme Aurore Bergé, je ne reviendrai pas sur le fond, me contentant de souligner que les évolutions prévues par le projet de loi étaient nécessaires et attendues. En effet, l’actuel cadre de régulation des communications, fragmenté entre de nombreux acteurs et fondé sur des logiques sectorielles, est aujourd’hui confronté à de nouveaux défis, liés au développement des plateformes, au pouvoir qu’elles ont acquis ainsi qu’aux usages qui leur sont associés.
La création d’une nouvelle autorité issue de la fusion du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), doit ainsi permettre de prendre en compte la proximité croissante entre les objectifs et les modalités de régulation des deux institutions originelles et de veiller au développement de la production et de la création audiovisuelles.
Cette fusion s’inscrit par ailleurs dans une démarche de renforcement de la régulation du numérique et des contenus. L’ARCOM se verra confier de nouvelles missions de régulation des contenus et des acteurs du numérique, en matière de lutte contre la désinformation ou la haine en ligne, mais également de prévention du piratage. Enfin, la création d’un nouveau régulateur contribuera à la rationalisation des autorités administratives indépendantes et générera les synergies de moyens administratifs et logistiques.
Il paraît naturel que la nomination à la présidence de cette nouvelle autorité soit soumise au contrôle parlementaire, comme l’était celle du président du CSA. C’est pourquoi le projet de loi organique ajoute la présidence de l’ARCOM à la liste des emplois ou fonctions donnant lieu à la procédure de nomination spécifique prévue par la Constitution.
Pour mémoire, son article 13 soumet à l’avis des commissions parlementaires compétentes les nominations effectuées par le Président de la République à certains emplois ou fonctions publics, « en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation ». Cette procédure, qui constitue l’une des innovations issues de la révision constitutionnelle de 2008, permet d’assurer une meilleure transparence sur les nominations effectuées par le Président de la République et confère au Parlement un réel pouvoir de contrôle. Cinquante-cinq fonctions sont actuellement listées en annexe de la loi organique du 23 juillet 2010. Elles concernent des organismes de différentes natures.
Depuis 2010, le Parlement a eu l’occasion de se prononcer sur de très nombreuses nominations. Si aucune n’a encore jamais été refusée sur le fondement de l’article 13, il n’en demeure pas moins que cette procédure est devenue très importante dans le fonctionnement institutionnel et dans les relations des assemblées parlementaires avec le pouvoir exécutif. Elle conforte par ailleurs la légitimité des personnes nommées : leur audition publique éclaire leur parcours professionnel et personnel et garantit l’adéquation de leurs compétences à la fonction concernée.
En première lecture, les débats furent succincts ; notre assemblée a procédé à diverses coordinations avec d’autres textes de valeur organique sans modifier le fond du projet de loi. Le texte a par la suite fait l’objet d’un accord en commission mixte paritaire : c’est le texte issu de cette commission que je vous propose aujourd’hui d’adopter définitivement.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM ainsi que sur les bancs du groupe Dem.) La parole est à Mme la ministre de la culture. Comme Mmes les rapporteures viennent de le rappeler, les secteurs audiovisuel et cinématographique connaissent des mutations profondes. Chacun d’entre nous peut d’ailleurs en faire le constat tous les jours : avec la multiplication des canaux de diffusion des œuvres et la possibilité de consommer des œuvres culturelles à tout moment, sur tout support et en tout lieu, les usages changent. Notre paysage change également, avec l’apparition de nouveaux acteurs : ces géants aux capacités d’investissement considérables et à l’offre de programme globalisée sont installés en dehors de notre territoire et échappent donc à la régulation que nous y appliquons.
Si ces mutations constituent des opportunités pour la création française, elles appellent également l’établissement de nouvelles règles adaptées à une économie beaucoup plus ouverte et compétitive, mais aussi le renforcement des moyens octroyés à notre création et le maintien d’une ambition industrielle et culturelle pour, et par, l’audiovisuel et le cinéma.
Pour renforcer les moyens de notre création, j’ai tout d’abord engagé une réforme en profondeur des mécanismes de soutien de son financement, avec la révision du décret relatif aux services de médias audiovisuels à la demande, dit décret SMAD, du décret relatif à la contribution d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles des services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre, dit décret TNT, et du décret fixant le régime applicable aux différentes catégories de services de radiodiffusion sonore et de télévision distribués par câble ou diffusés par satellite, dit décret câble et satellite, qui fixent les modalités d’investissement dans la production des télévisions et plateformes.
Néanmoins, en accord avec le Président de la République et le Premier ministre, j’ai souhaité que soit déposé et examiné le projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique. Vous l’avez longtemps attendu, et je suis donc très heureuse que nous arrivions aujourd’hui au terme du processus législatif destiné à l ’adopter.
Je tiens à rappeler les grands objectifs de ce texte ambitieux et important pour notre modèle de création.
Tout d’abord, il vise à améliorer la protection des droits des auteurs, artistes, producteurs, diffuseurs et fédérations sportives en renforçant la lutte contre le piratage. Comme vous le savez, la perte de valeur due à cette pratique est immense, de l’ordre de 1,3 milliard d’euros par an. Agir contre elle est donc une ardente obligation pour les pouvoirs publics, d’autant qu’après une baisse du nombre de pirates au cours de deux années consécutives, les périodes de confinement que nous avons connues ces derniers mois ont favorisé une nouvelle poussée de la consommation illicite de contenus.
C’est tout l’objet des premiers articles du projet de loi, qui permettent de dresser une liste noire des sites internet dont le modèle économique repose sur le piratage, de façon à tarir leurs sources de revenus. Ces articles visent aussi à lutter plus efficacement contre les sites miroirs, qui reprennent, en totalité ou de manière substantielle, les contenus d’un site jugé illicite. Ils créent par ailleurs un mécanisme
ad hoc de référé pour lutter contre le piratage sportif.
Ce texte permet également la modernisation de notre régulation. La fusion du CSA et de la HADOPI était attendue : dans quelques mois, l’ARCOM sera le nouveau régulateur compétent sur l’ensemble du champ de la régulation des contenus audiovisuels et numériques, qu’il s’agisse de lutter contre le piratage, de protéger les mineurs ou de défendre les publics contre la désinformation et la haine en ligne – un combat dans lequel Laetitia Avia s’est particulièrement illustrée.
Le texte permet enfin – principal ajout par rapport au projet de loi que vous avez examiné en mars 2020 – de garantir l’accès du public aux œuvres françaises. Par son article 17, il instaure un dispositif protecteur qui permettra, en cas de cession d’une œuvre française, de vérifier que l’acheteur, même s’il n’est pas un producteur établi en France, présente toutes les garanties pour que l’œuvre soit exploitée – et donc vue par le public – en France et à l’étranger.
Ce projet de loi est le fruit d’enrichissements apportés par le Sénat et l’Assemblée nationale en juin dernier – je pense à la modernisation de la télévision numérique terrestre, à l’actualisation des règles anticoncentration pour les télévisions locales et les radios, ou encore à la redéfinition de la production indépendante. Il a fait l’objet d’un très large soutien lors de son examen en première lecture au Sénat puis à l’Assemblée nationale, et je me réjouis particulièrement de l’accord que vous avez trouvé en commission mixte paritaire, début juillet, avec vos collègues sénateurs. Les points de divergence, il faut l’avouer, étaient peu nombreux, et vous avez su vous rassembler. Ce résultat est à l’image du climat dans lequel se sont déroulés les débats, mon état d’esprit ayant été de travailler avec chacun d’entre vous.
Avant de conclure, je veux remercier chaleureusement M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, cher Bruno Studer, véritable chef d’orchestre du bon déroulement des débats, ainsi que les deux rapporteures du projet de loi ordinaire, Sophie Mette et Aurore Bergé, et la rapporteure du projet de loi organique, Laetitia Avia, pour le travail que nous avons mené en confiance.
En définitive, ce texte est ambitieux et fondamental pour la défense de la création française. En l’adoptant définitivement, vous permettrez d’adapter notre arsenal législatif aux nouvelles mutations des secteurs audiovisuel et cinématographique, en assurant une meilleure protection des créateurs, une modernisation de la régulation et une défense de l’accès du public aux œuvres. Je vous en remercie.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Mme Constance Le Grip applaudit également.)
Dans la discussion générale commune, la parole est à Mme Sophie Mette. Au nom du groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés, je tiens à exprimer notre joie et notre fierté de voir ce texte aboutir. Je le fais à double titre, puisque, en plus d’être le porte-parole de mon groupe aujourd’hui, j’ai été rapporteure d’une partie du projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique.
Avec notre collègue Aurore Bergé, nous avons longuement examiné ce projet de loi, durant plusieurs mois, tout comme celui qui l’a précédé et qu’avait élaboré le ministre d’alors, M. Franck Riester – son travail transparaît encore le texte dont nous discutons. Avec vous, madame la ministre, ainsi qu’avec des députés engagés, issus de tous les bancs, nous avons eu l’honneur d’élaborer un texte important, resserré mais utile – et même nécessaire, car réclamé par de très nombreux acteurs de l’audiovisuel français, tous secteurs confondus. Il permettra à ceux-ci de mieux relever les défis posés par le développement des grandes plateformes américaines et mondiales.
Sans détailler toutes les dispositions du texte, j’évoquerai la réforme de grande ampleur qui conduit à créer un nouveau régulateur, issu de la fusion entre la HADOPI et le CSA. Cette autorité, l’ARCOM, se verra confier de nouvelles missions, parmi lesquelles la lutte contre la désinformation et la haine en ligne, la sensibilisation et la prévention en matière de piratage. Il conviendra de l’accompagner, pour qu’elle dispose d’un budget à la hauteur des prérogatives de contrôle, d’enquête et de régulation dont nous l’avons dotée. Le régulateur devra en outre veiller à garantir une représentation équilibrée de la société française et de sa diversité. Ces sujets ont recueilli un consensus entre les deux assemblées parlementaires.
Le 1er juillet dernier, la commission mixte paritaire travaillait sur les derniers points de débat. Comme nous, nos homologues du Sénat ont abordé l’exercice dans un esprit en consensus, d’ouverture et de construction. Déjà, les deux chambres avaient convergé sur de très nombreux points. L’article 1er comme l’article 3, relatifs à la création de l’ARCOM et à la lutte contre le piratage, ont par exemple été adoptés dans une version quasiment identique à celle qu’avait approuvée le Sénat. Le sujet de la transaction pénale, introduit par le Sénat puis supprimé par notre Assemblée, n’a pas fait débat : il s’agissait de la dernière étape d’une procédure contre les internautes accusés de pirater en pair-à-pair, à savoir une amende de 350 euros. Nous n’avons pas souhaité emprunter cette voie punitive, préférant concentrer les moyens financiers et humains de l’ARCOM sur les pratiques de piratage désormais ultramajoritaires : le streaming et le téléchargement direct. Les sénateurs et les députés qui étaient favorables à cette mesure n’ont pas cherché à la réintroduire – je ne peux que saluer cet esprit de compromis. Mentionnons également l’article 2 A, au sujet duquel un consensus a été trouvé : sa suppression a été acceptée à la suite d’un accord conclu entre Google et les ayants droit des plasticiens et des photographes.
Nous aboutissons donc à un texte acceptable pour chacun et équilibré, œuvrant au bénéfice de nos concitoyens. Il s’est amélioré au fil du temps, comme toujours, grâce au processus habituel de valeur ajoutée parlementaire. Le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés se réjouit que malgré un calendrier parlementaire chargé, et dans le contexte que nous connaissons, un sujet culturel d’importance ait trouvé sa place – merci, madame la ministre.
Je dirai un mot, enfin, du projet de loi organique visant à actualiser la liste des fonctions soumises à la procédure de nomination, de sorte que la désignation de la présidence de la nouvelle autorité, l’ARCOM, soit soumise au contrôle parlementaire. C’était là une question de transparence, de légitimité et d’efficacité ; elle a fait consensus. Notre groupe se réjouit de l’unanimité recueillie par ce projet de loi organique à l’Assemblée nationale et au Sénat. À son sujet, la commission mixte paritaire a traité non d’une divergence de fond, mais d’un amendement de coordination ; nous accueillons favorablement ses conclusions.
Au nom des députés démocrates, permettez-moi d’exprimer une réelle satisfaction quant à l’adoption définitive de ces textes, qui permettront aux acteurs de l’audiovisuel français de faire face aux défis de demain.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Bertrand Pancher. Nous voici enfin au terme d’un parcours législatif qui fut long, chaotique et décousu. Malheureusement, le texte soumis à notre vote est éloigné de son ambition initiale : la grande loi audiovisuelle promise est désormais enterrée. Ce fut une occasion ratée de mener un grand débat de fond, à l’heure où les mutations du numérique et de l’audiovisuel affectent profondément notre société et notre démocratie. Ce dont nous avons besoin, c’est une vision et une stratégie ambitieuse pour l’audiovisuel. Alors que les médias ont un rôle central à jouer dans notre démocratie, nombreux sont ceux qui contribuent à son affaiblissement – malgré la grande qualité de nos journalistes, que je tiens à saluer. J’en prendrai un seul exemple : depuis des jours, matin et soir, soir et matin, de nombreux médias ne cessent de parler et de faire du Zemmour, encore du Zemmour, toujours du Zemmour, un candidat putatif qui rabâche de vieilles obsessions. Notre pays mérite bien mieux que cela ! Alors, pourquoi en parlez-vous ? Dans le même temps, durant les six mois de campagne électorale en Allemagne, premier pays d’immigration, de quoi ont parlé les médias ? Ils ont parlé de logement, de transport, de réchauffement climatique, de difficultés d’accès aux services publics, mais pas d’immigration. En France, quelle est donc cette machine à fabriquer de l’imbécillité collective ? Ce n’est pas la peine d’en rajouter ! Notre démocratie est fragile, et les médias devraient œuvrer à consolider ce bien commun, plutôt qu’à l’affaiblir. Voilà ce à quoi le Parlement devrait s’atteler prioritairement. Si je ne le dis pas ici, où le dirai-je ? Il convient, par exemple, de redéfinir ensemble le temps de parole des candidats dans les médias – aujourd’hui, les critères sont trop flous et laissés à l’interprétation des médias, qui, le plus souvent, s’appuient sur des sondages plutôt que sur la représentativité électorale. C’est faux ! Ce n’est pas sérieux, quand on sait comment les sondages sont parfois réalisés. Il convient de donner davantage de temps à l’analyse et au débat dans les médias de service public, avant, pendant et après les campagnes électorales.
Parallèlement, les bouleversements s’accélèrent depuis de nombreuses années. Nous assistons à des recompositions du paysage audiovisuel, avec la montée en puissance d’acteurs privés et de plateformes. Nous devons nous interroger sur les conséquences des fusions et l’indépendance des rédactions. Il nous faut également travailler sur l’accès au sport pour tous, à l’heure où Amazon Prime, plateforme américaine payante, diffuse 80 % des matchs de Ligue 1 de football. Qu’en est-il de nos concitoyens qui n’ont pas les moyens de s’y abonner ? Toutes ces mutations ne peuvent que nous inquiéter, car elles sont responsables d’un affaiblissement du débat public, d’une rupture dans l’indépendance des médias, et par conséquent d’une défiance de plus en plus forte de nos concitoyens. Quelle est la place des médias publics dans tout cela ?
Le texte n’apporte aucune réponse à ces questions et à ces dérives, ni au rôle quasi inexistant du CSA. Avec ce projet de loi rabougri, d’autres questions ne sont pas davantage tranchées : je pense par exemple à la réforme de la contribution à l’audiovisuel public, que Franck Riester avait promise pour 2021 au plus tard.
Je dirai un mot de France 4. Le groupe Libertés et territoires, Frédérique Dumas en tête, s’était particulièrement mobilisé pour le maintien de cette chaîne destinée à la jeunesse. Nous nous satisfaisons qu’elle soit préservée, même si nous aurions préféré que ce soit inscrit dans la loi plutôt que dans un décret.
Pour nous, le Parlement est le lieu où la stratégie de l’audiovisuel public doit être débattue. Nous saluons le maintien des dispositions relatives à l’accessibilité de l’offre de proximité de France 3, qui va dans le sens d’une meilleure représentation des territoires – besoin plus que renforcé depuis la suppression de France Ô.
S’agissant, enfin, de la fusion du CSA et de la HADOPI dans l’ARCOM, nous approuvons la création d’un grand régulateur des contenus – reste à savoir si l’ARCOM aura les moyens humains et financiers de mener à bien ses missions, alors que les crédits du CSA ont baissé ces dernières années.
Ce sera dans le projet de loi de finances ! Nous vous donnons donc rendez-vous dans quelques jours, à l’occasion de l’examen du budget. La mission de lutte contre le piratage confiée à l’ARCOM est par ailleurs profondément renforcée – cette évolution était nécessaire. Alors que le piratage tendait à baisser ces dernières années, du fait du développement de l’offre légale, la crise sanitaire a entraîné sa légère reprise, qui doit nous préoccuper : le piratage représente en effet un manque à gagner de plus de 1 milliard d’euros pour le secteur audiovisuel et le sport.
Si nous reconnaissons bien volontiers quelques avancées dans ce projet de loi – que nous approuverons –, nous réitérons notre inquiétude quant à l’absence de stratégie et de vision d’ensemble pour l’audiovisuel public et la création. Les mutations de ces secteurs bouleversent notre société et notre démocratie tout entière ; ne les prenons surtout pas à la légère !
La parole est à Mme Béatrice Piron. Il y a trois mois, nous adoptions en première lecture ce texte essentiel, qui nous revient aujourd’hui après avoir fait l’objet d’un accord entre notre chambre et le Sénat. Saluons cette entente trouvée, de manière responsable, par des parlementaires soucieux de faire évoluer rapidement le droit, en vue de mieux réguler un secteur audiovisuel qui connaît de nombreuses mutations depuis plusieurs années. L’essor du numérique a fait bondir notre consommation de contenus dématérialisés, et avec elle, le risque de piratage des œuvres. Les périodes de confinement ont été propices au piratage audiovisuel, qui engendre une perte de valeur de plus d’un 1,3 milliard d’euros par an. Le texte répond à de nombreuses attentes des acteurs du secteur et introduit des avancées majeures – ce n’est en rien une petite loi.
L’ARCOM, autorité née de la fusion entre le CSA et la HADOPI, détiendra des pouvoirs de contrôle et de sanction étendus et adaptés à l’ère numérique. Ses principales missions ont été renforcées : l’établissement de listes noires de sites contrevenants, la lutte contre les sites miroirs, ou encore la lutte contre le piratage des retransmissions sportives grâce au mécanisme des injonctions dynamiques. Notez que la composition du collège de l’ARCOM a fait l’objet d’un accord. Je retiens également le maintien d’une procédure de sanction dissuasive à l’encontre des éditeurs ne respectant pas leurs obligations de financement de la production.
Nos débats nourris ont permis d’enrichir le texte, s’agissant notamment de l’audiovisuel public, avec la reprise du signal local de France 3, à l’article 10
quater , et la possibilité d’obtenir les données de consommation sur les box, à l’article 10 quinquies . Les discussions ont aussi abouti au relèvement à 19 millions d’habitants du seuil de concentration autorisé pour les télévisions locales.
Enfin, soulignons les avancées relatives à la télévision numérique terrestre même si, à titre personnel, il me semble que nous aurions pu peut-être aller plus loin sur la norme Hybrid Broadcast Broadband Television, dite HBBTV.
Reconnaissons-le : toutes ces avancées étaient nécessaires.
De même, nous avons autorisé le Gouvernement à prendre des mesures qu’il était urgent d’adopter, comme la transposition de la directive dite services de médias audiovisuels (SMA) et de la directive sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique.
Certains sujets comme la chronologie des médias restent cependant en discussion. Sur ce point, nous espérons qu’un accord sera rapidement trouvé entre les différentes parties prenantes.
L’article 17 est une nouveauté par rapport au texte du premier projet de loi relatif à l’audiovisuel. Ses dispositions permettront d’assurer une meilleure protection des catalogues d’œuvres audiovisuelles et cinématographiques françaises et européennes, grâce à l’établissement d’un mécanisme de déclaration préalable à leur vente.
J’insisterai enfin, puisqu’il en a été question au cours des débats, sur le maintien de la chaîne France 4, rendu possible par la mobilisation des parlementaires de tous les bancs. La chaîne de l’audiovisuel public dédiée à la jeunesse poursuit donc sa mission en journée, tout en proposant des contenus culturels en soirée dans le cadre de Culturebox. Je me réjouis également, ayant été rapporteure sur cette partie dans le projet de loi initial, des avancées réelles que contient le texte s’agissant de l’audiovisuel public, même si j’aurais jugé préférable d’aller plus loin encore. J’ajoute que les sociétés publiques comme de nombreux autres acteurs sont inquiets ; ils souffrent du manque de visibilité sur leur financement à partir de 2023, date à laquelle la taxe d’habitation, à laquelle était adossée la contribution à l’audiovisuel public, sera définitivement supprimée.
Mes chers collègues, ce texte se veut plus protecteur vis-à-vis des auteurs, des œuvres et de la création audiovisuelle. C’est un projet de loi équilibré et cohérent qui nous revient aujourd’hui après l’accord trouvé en CMP. Il permettra d’adapter à notre époque et à nos usages ce texte fondateur qu’est la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Je vous invite donc, au nom du groupe La République en marche, à l’adopter définitivement ainsi que le projet de loi organique, qui contient une mesure de coordination nécessaire.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Mme Sophie Mette applaudit également.) La parole est à Mme Constance Le Grip. Les travaux parlementaires sur l’audiovisuel public et les défis et enjeux qui touchent le secteur audiovisuel dans son ensemble avaient démarré dans nos deux assemblées il y a plus de quatre ans, mais la pandémie de la covid-19, madame la ministre, est venue mettre un coup d’arrêt brutal à l’examen du projet de loi de réforme de l’audiovisuel public défendu par votre prédécesseur. Ensuite, le Gouvernement a fait le choix, de manière réaliste et pragmatique, de présenter un projet de loi plus resserré. La grande réforme de l’audiovisuel public français a ainsi été laissée de côté. J’en profite pour réaffirmer l’intérêt de ma famille politique, la droite républicaine, à l’égard de l’audiovisuel public français et le soutien qu’elle souhaite lui apporter… Très bien ! …à l’heure où certaines et certains le remettent en cause, et dire notre satisfaction – je le dis notamment devant mon collègue du groupe Les Républicains, Maxime Minot – de voir que France 4 est maintenue. Je me réjouis enfin de la transposition tant attendue, par voie d’ordonnance, des directives « droit d’auteur » et « SMA » ainsi de la directive, dite CABSAT 2, établissant des règles sur l’exercice du droit d’auteur et des droits voisins applicables à certaines transmissions en ligne d’organismes de radiodiffusion et retransmissions de programmes de télévision et de radio.
Ce projet de loi dont nous parachevons aujourd’hui le processus parlementaire d’adoption est donc concentré sur le renforcement de la lutte contre le piratage, la création d’un nouveau régulateur, fruit de la fusion entre le CSA et la HADOPI, et la protection de l’accès du public français aux œuvres cinématographiques et audiovisuelles en cas de projet de cession des catalogues d’œuvres.
En matière de lutte contre le piratage, dont il est bon de rappeler que l’impact est estimé à plus de 1 milliard d’euros par an, le projet de loi comporte des avancées nécessaires, très attendues par le secteur, les créateurs et que nous avions ardemment appelé de nos vœux. Parmi ces nouvelles dispositions qui viennent renforcer l’arsenal législatif existant, je citerai le mécanisme de liste noire, la lutte contre les sites miroirs, le blocage et le déréférencement des sites contrefaisants et un dispositif spécifique pour les retransmissions de manifestations sportives.
À titre personnel, j’émets un petit regret : celui que le dispositif de transaction pénale qui avait été défendu au Sénat par le rapporteur du texte, Jean-Raymond Hugonet, et voté par la Haute Assemblée, n’ait pas été retenu dans le compromis trouvé entre nos deux assemblées. Mais j’ai compris qu’il n’y avait pas de consensus sur ce sujet précis.
Le groupe Les Républicains, quant à lui, regrette que ce débat n’ait pas été l’occasion de préserver davantage la télévision numérique terrestre universelle et gratuite ni permis de progresser vers la modernisation de la TNT. Si nous nous réjouissons de voir le sujet de l’ultrahaute définition intégré aux dispositions du projet de loi, nous regrettons que ce ne soit pas le cas des propositions que notre collègue Jean-Jacques Gaultier avait très largement mises en avant, notamment le développement de la norme HBBTV, mesure pourtant indispensable à la modernisation de la TNT. Cette norme, qui existe déjà dans plusieurs autres pays européens, est pourtant réclamée à la fois par des acteurs publics et privés. Nous espérons vivement que nous aurons l’occasion d’y revenir, peut-être à la faveur d’une autre législature.
Une fois évoqués ces quelques lacunes, nous réaffirmons notre soutien à l’ensemble des dispositions proposées. À l’heure où les géants du numérique et des plateformes font tout pour imposer leur loi et leurs contenus, les députés et les sénateurs Les Républicains sont convaincus que le texte proposé sera de nature à favoriser le soutien à la création française, la protection de nos créateurs, la diversité culturelle et la souveraineté culturelle de notre pays. Aussi, nous le voterons.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Laetitia Avia, rapporteure, applaudit également.) La parole est à M. Michel Larive. Depuis le début des débats sur les réformes de l’audiovisuel initiées par le Gouvernement, je dénonce, avec mon groupe parlementaire, les attaques portées contre la liberté d’expression sur internet… Toujours ce sens de la mesure ! …et la surveillance généralisée des contenus. À raison, puisque les cas de censure relevés sur les différentes plateformes numériques se multiplient. Cela s’explique par le recours exclusif aux algorithmes, là où nous soutenons qu’une vérification humaine est indispensable avant toute suppression de contenu. La Commission européenne abonde d’ailleurs dans notre sens, puisque le 4 juin 2021, dans ses orientations pour aider les États membres à transposer l’article 17 de la directive « droit d’auteur », elle appelle à restreindre le blocage automatique aux contenus manifestement illicites signalés par un ayant droit, les autres contenus devant être mis en ligne puis examinés par un être humain.
Il manque aujourd’hui un contre-pouvoir face aux principales plateformes numériques, ce qui est inacceptable. Nous ne pouvons pas les laisser décider seules ce qui peut ou non être publié. De même, elles ne sauraient, sans l’accord des usagers, collecter, stocker ou vendre leurs informations personnelles.
Par ailleurs, votre projet néglige totalement l’audiovisuel public. Cela confirme bien l’absence d’ambition dont fait preuve le Gouvernement dans ce domaine, lui qui a fait le choix, chaque année, de diminuer le budget accordé à ce secteur.
La fusion entre le CSA et la HADOPI au sein de l’ARCOM interroge aussi. À nos yeux, la HADOPI est un dispositif coûteux et inefficace. Nous souhaitons que la mission de protection de la propriété intellectuelle soit de nouveau confiée au juge judiciaire plutôt qu’à une autorité administrative.
Indépendante ! Nous appelons également au développement de l’offre légale par la création d’un service public de l’internet et d’une plateforme publique proposant en ligne des musiques, des films et d’autres contenus culturels.
Quant au CSA, il a besoin de voir sa gouvernance profondément réformée en vue de garantir son indépendance. Il n’appartient pas au chef de l’État de nommer son président : celui-ci devrait être élu par les commissions des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat. Par ailleurs, nous défendons toujours l’idée que siègent en son sein des représentants des usagers. De telles mesures apporteraient à la fois garanties d’indépendance et exigences démocratiques.
Pour répondre au sentiment de méfiance qu’éprouve un nombre croissant de nos concitoyens à l’égard des médias, nous avions proposé la création d’un conseil de déontologie formé de représentants des usagers, de représentants des médias et de représentants des journalistes, y compris les précaires et pigistes. Il donnerait ainsi aux citoyens le moyen de faire respecter leur droit à une information objective.
La question de l’indépendance des médias envers la puissance de l’argent est tout aussi cruciale. Il faudrait être bien naïf pour croire que les neuf milliardaires qui se partagent 90 % de nos médias sont engagés dans cette activité par passion du journalisme. Par souci de pluralité, il faudrait donc interdire qu’un groupe contrôle plusieurs chaînes de télévision. Or vous faites l’inverse en relevant le seuil de concentration autorisé pour les chaînes de télévision locales. Dans le même sens, un même groupe ne devrait pas posséder à la fois le réseau de diffusion et la production. Autrement dit, un fournisseur d’accès à internet et de box TV ne devrait pas contrôler aussi des chaînes de télévision.
En résumé, ces longs débats sur l’audiovisuel auront montré que nous défendons un autre projet politique que le vôtre. Celui que nous avons choisi place en son cœur l’intérêt général plutôt que celui de quelques-uns ; c’est un projet politique assorti d’exigences de transparence, de démocratie, de pluralisme, quand vous refusez toute réforme de la gouvernance du CSA ; un projet politique qui préserve la liberté d’expression et celle de s’informer, quand vous privilégiez la censure par algorithmes et que vous refusez de confier le pouvoir de régulation au juge judiciaire pour le laisser entre les mains d’entreprises privées ; un projet politique qui donne les mêmes droits aux habitants des outre-mer et à ceux qui vivent dans l’Hexagone ; un projet politique qui permet à tous de partager le spectacle des grandes compétitions sportives – féminines, masculines et handisport –, quand vous le réservez à ceux qui ont les moyens financiers de cumuler les abonnements auprès des grands groupes privés.
Pour toutes ces raisons, une fois encore, nous voterons contre ce projet de loi.
(Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) La parole est à Mme Michèle Victory. Ce texte, assez ambitieux à l’origine, aura perdu quelques-unes de ses plumes depuis le début de son examen, interrompu par la crise sanitaire. La version issue de la CMP préserve néanmoins les trois objectifs que sont le renforcement de la lutte contre le piratage, la fusion de la HADOPI et du CSA pour créer l’ARCOM et une protection de l’accès du public aux œuvres cinématographiques françaises. En clair, et à quelques mois de la fin du quinquennat, ce n’est pas le big bang de l’audiovisuel promis par le candidat Macron auquel on assiste, mais un projet dont l’ambition a été revue à la baisse.
Si la transposition des directives européennes a pu être effectuée, nous avons regretté qu’elle le fût par ordonnance, privant une fois encore le Parlement d’un droit fondamental.
Exit donc la réforme de la contribution à l’audiovisuel public, qu’il faut réinventer afin de soutenir le secteur public de l’audiovisuel. La suppression du dispositif actuel est en totale contradiction avec la nécessité, pour nos médias publics, de mener le combat pour défendre les enjeux essentiels que sont la souveraineté culturelle, la liberté d’expression, la pluralité et la qualité des contenus, pour accompagner les évolutions des techniques et des usages et pour lutter contre la désinformation et la manipulation de l’information.
Le paysage audiovisuel français est en proie depuis plusieurs années à de profondes mutations qui méritent notre attention, et c’est tout l’intérêt de cette discussion. Les modes de consommation des médias audiovisuels ont profondément évolué avec l’arrivée des géants américains Amazon, Netflix ou Disney+. La concurrence féroce à laquelle ils se livrent sur le marché des investissements de production appelle toute notre vigilance pour protéger les producteurs indépendants et le patrimoine audiovisuel français et européen.
Au vu de ces profonds changements, le texte raccourci issu de la commission mixte paritaire a probablement déjà beaucoup de retard sur notre époque ! Comme souvent, nos lois courent lentement derrière les réalités – c’est ainsi. Ces dispositions opèrent la fusion annoncée entre la HADOPI et le CSA pour former l’ARCOM, ce que nous estimons être une bonne orientation pour mieux réguler les contenus. Il apparaît que cette fusion suscite un certain enthousiasme chez les équipes des deux structures, à la condition bien sûr que les moyens budgétaires soient au rendez-vous pour accompagner et consolider l’immense travail de protection des œuvres et de modernisation des outils. Nous en reparlerons au moment des discussions budgétaires à venir.
La partie du projet de loi relative à la protection de l’exploitation des œuvres cinématographiques en cas de cession est également une avancée positive même si elle aurait mérité d’être renforcée et si nous aurions souhaité intégrer la délicate question de la pollution numérique dans les discussions passées et à venir. Néanmoins, nous regrettons la suppression par la CMP de l’article 7
bis , qui visait à consolider une chaîne du service public comme référente en matière de sport. La captation par Amazon de l’essentiel de la diffusion de la ligue 1 illustre des rapports de force très inégaux en faveur de l’Américain !
Sur la question des droits voisins, nous serons vigilants quant à la bonne application de la directive suite à la suppression de l’article 2
bis . La commission des affaires culturelles et de l’éducation entend les alertes lancées par de très nombreux acteurs : face à la prédation énorme de notre patrimoine culturel par les GAFAM et autres géants du numérique, le Parlement doit veiller à l’exécution sans faille des sentences prononcées par l’autorité de la concurrence.
S’installer dans un rapport de force dynamique avec ces géants est une nécessité si nous voulons sortir de la situation asymétrique actuelle, avec des plateformes opposées à toute forme de régulation et qui n’ont pas pour objectif de présenter la presse de manière impartiale. Nous devons nous armer et créer les outils nécessaires. Je salue donc la démarche de rassemblement adoptée par les acteurs des éditeurs de presse autour d’un nouvel organisme de gestion collective. Peut-être faut-il cependant trouver le bon véhicule législatif, en France et en Europe, pour garantir l’indépendance et la qualité des contenus créés par nos éditeurs et agences de presse.
Enfin, je veux redire notre inquiétude relative au projet de fusion entre TF1 et M6, qui va entraîner de multiples formes de concentration : de l’information, de la publicité – jusqu’à 75 % du marché publicitaire ! – mais aussi de la production de séries ou de téléfilms. Cela nous interroge sur l’espace laissé à la production indépendante. Il nous faut adopter de nouveaux outils anticoncentration pour préserver notre diversité.
Nous le savons tous, chers collègues, l’enjeu est de taille : il s’agit de nous donner les moyens de lutter contre le pillage des œuvres et la captation de la valeur que nos créateurs produisent, que ce soit dans le domaine de la presse, de la musique ou de l’audiovisuel dans sa globalité. À l’heure où l’autorité de la concurrence a rendu des arbitrages forts, le Parlement se doit de jouer pleinement son rôle de contrôle. De ce point de vue, le texte que nous examinons à nouveau ici, s’il n’a pas pris en considération l’ensemble des enjeux relatifs à la régulation des marchés et à la protection des œuvres, est une avancée que nous reconnaissons volontiers.
Nous soutenons évidemment le projet de loi organique : il est essentiel que le Parlement puisse s’exprimer sur la nomination des présidents.
Aussi, malgré les réserves que j’ai émises, et parce que l’attente du monde audiovisuel est importante et que nous voulons défendre la place de l’audiovisuel public dans ce paysage, mon groupe votera en faveur de ce texte.
(Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Maxime Minot applaudit également.) La parole est à Mme Béatrice Descamps. Je souhaite une nouvelle fois saluer votre volonté, madame la ministre, d’agir contre le piratage comme celle de notre assemblée et du Sénat, qui ont su trouver un accord équilibré en CMP.
Il est vrai qu’avec l’avènement d’une société de plus en plus numérique, les pratiques illégales autour des œuvres culturelles ont fortement évolué : des copies privées au streaming en passant par le téléchargement, il est difficile pour le législateur de parvenir à suivre le rythme des nouvelles méthodes. Ainsi l’instauration d’une autorité unifiée, aux larges pouvoirs et moyens d’intervention, est une bonne nouvelle pour la protection des œuvres et surtout pour la promotion des bons comportements. Plus largement, la rationalisation des autorités administratives comme des agences d’État est une bonne chose. J’ose espérer que l’ARCOM saura faire preuve d’efficacité mais surtout que nous serons capables d’être à son écoute pour anticiper les nouvelles pratiques frauduleuses et y répondre au plus vite.
Mais l’action de l’ARCOM ne doit pas être la seule sur la laquelle nous comptons pour faire avancer les choses. En effet, l’évolution des modes de consommation de la musique, secteur dans lequel le développement d’une offre de streaming légale et peu coûteuse a permis de contrecarrer le téléchargement illégal, doit nous inciter à réfléchir à la situation des autres œuvres. Certes, les enjeux du marché du cinéma ou des séries ne sont pas les mêmes, mais l’extension des catalogues et des offres devrait être à même de mieux réguler un marché où de trop nombreux acteurs sont aujourd’hui en concurrence, ne laissant pas au consommateur qui ne posséderait pas de multiples abonnements la possibilité de regarder les œuvres de son choix.
Il en va de même dans le sport. La multiplication des acteurs et l’explosion des coûts d’exploitation sont aujourd’hui incompréhensibles pour le supporter, qui doit parfois jongler avec trois abonnements différents pour regarder ses équipes ou ses compétitions favorites. Sans vouloir excuser quiconque, il nous faut voir qu’une telle complexité favorise le piratage.
D’une manière plus générale, c’est l’ensemble du paysage audiovisuel au niveau national et international qui est en train d’évoluer. Nous ne pouvons ainsi que regretter que les dispositions importantes du projet de loi audiovisuelle votée par la commission des affaires culturelles en mars 2020 n’aient pas été reprises. Alors que des acteurs internationaux comme Amazon ou Netflix viennent concurrencer les acteurs historiques français et européens, il apparaît urgent de redéfinir le cadre du marché de l’audiovisuel pour permettre à nos acteurs de continuer à jouer un rôle majeur dans la diffusion de la culture.
L’Europe n’a pas su être le moteur de la révolution numérique que le monde connaît depuis plus de trente ans. Il serait malvenu que nos acteurs du monde culturel ne sachent pas s’adapter à l’émergence de nouveaux modes de consommation et de nouvelles technologies sous prétexte d’une réglementation trop contraignante qui freinerait leur développement et, avec lui, celui de l’industrie culturelle française.
Cependant le groupe UDI et indépendants votera en faveur de l’accord trouvé en CMP, en espérant que nous saurons continuer à prendre rapidement les mesures nécessaires pour lutter contre toutes les formes de piratage.
(Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I. – Mme Sophie Mette et M. Maxime Minot applaudissent également.) La parole est à M. Loïc Kervran. Nous nous réjouissons que la commission mixte paritaire soit parvenue à un accord sur ce nouveau projet de loi audiovisuelle. Le texte était très attendu par l’ensemble des acteurs du secteur culturel après la suspension, en raison de la crise sanitaire, de l’examen du texte initial présenté par Franck Riester.
C’est l’aboutissement d’un long travail entamé avec la mission d’information parlementaire que notre collègue Pierre-Yves Bournazel, d’Agir ensemble, a eu l’honneur de présider et de mener avec la rapporteure Aurore Bergé, que je salue. À cette occasion, ils ont réalisé pendant plus de six mois un cycle d’auditions de 222 acteurs du secteur. Le constat partagé est celui d’une nécessaire adaptation du cadre légal aux défis que pose la mutation profonde et rapide de l’écosystème audiovisuel.
C’est aussi un aboutissement après la transposition des directives « SMA » et « droits d’auteur » par le Gouvernement, qui permettent un meilleur partage de la valeur produite, assurent une plus grande protection des auteurs et des artistes-interprètes et témoignent de notre besoin d’Europe dans la compétition mondialisée.
Ce projet de loi adopté en CMP constitue en effet une nouvelle avancée qu’il semble important de replacer dans le contexte de la crise sanitaire, économique, humaine inédite que nous avons traversée collectivement. En effet, la pandémie de covid-19 a particulièrement affecté le monde de la culture. Je pense aux intermittents, aux artistes, aux auteurs, aux TPE – très petites entreprises – et PME – petites et moyennes entreprises –, aux festivals, aux théâtres, aux musées, aux cabarets, aux salles de spectacles, aux cinémas.
Le Gouvernement a pris des mesures sans précédent et sans équivalent dans le monde. Mais la crise sanitaire a largement contribué à l’accélération des mutations du secteur audiovisuel, à l’évolution rapide des usages ainsi qu’à un fort repli du marché publicitaire au cours de l’année 2020. Aujourd’hui, la sortie de crise est à l’horizon. J’en veux pour preuve, madame la ministre, la belle inauguration, il y a quelques jours, des nouveaux bâtiments de la maison de la culture de Bourges. Plus que jamais, l’adoption rapide d’un nouveau cadre de régulation est nécessaire pour soutenir la relance culturelle dans notre pays.
Le texte apporte ainsi des réponses concrètes sur trois enjeux majeurs dans le domaine de la communication audiovisuelle. Celui, tout d’abord, de la protection des droits des auteurs, des producteurs, des diffuseurs, ou encore des fédérations sportives : dans ce but, notre arsenal de lutte contre le piratage est musclé et les sites contrevenants qui tirent un profit commercial de l’exploitation illégale d’œuvres culturelles sont précisément ciblés. L’organisation de notre régulation, ensuite : elle doit être rationalisée, modernisée et adaptée à la convergence progressive de l’audiovisuel et du numérique. Il faut un régulateur plus puissant, mieux armé et compétent sur l’ensemble du champ de la régulation des contenus audiovisuels et numériques. La création de l’ARCOM marque la volonté d’inscrire cette action dans une politique plus large de régulation des contenus en ligne. Troisième enjeu, enfin : le texte tend à défendre l’accès du public aux œuvres cinématographiques et audiovisuelles françaises, qui constituent notre patrimoine et forgent l’identité culturelle de la France et de l’Europe à travers le monde.
Ainsi, ce texte majeur s’inscrit dans la continuité de l’action menée par le Gouvernement depuis 2017, afin de protéger notre modèle d’exception culturelle, consolider notre secteur audiovisuel et lui offrir de nouvelles armes à l’ère du numérique pour rivaliser avec les plateformes internationales.
Le Groupe Agir ensemble votera donc en faveur du compromis trouvé avec le Sénat.
(Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Sur le projet de loi ordinaire, je suis saisi par le groupe La République en marche d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Elsa Faucillon.
Il est regrettable que le grand projet de loi sur l’audiovisuel promis depuis le début du quinquennat se soit réduit à une peau de chagrin. À nos yeux, le texte qui nous est aujourd’hui proposé n’est pas à la hauteur de l’ambition que nous devrions avoir pour l’audiovisuel en général et le service public de l’audiovisuel en particulier, surtout au vu des attaques répétées à l’encontre de ce secteur.
Le champ de l’audiovisuel subit de profondes mutations qu’il conviendrait d’analyser et de traiter. Le service public de l’audiovisuel, plus particulièrement, est victime de coupes budgétaires de plus en plus importantes. À titre d’exemple, depuis 2012, l’effectif total de France Télévisions a diminué de plus de 6 %. Cela fait des années que les entreprises de l’audiovisuel public sont soumises à des plans d’économie successifs qui ont saigné à blanc leurs effectifs, remis en cause leurs missions et entravé leur capacité de développement face à un secteur privé bien mieux armé.
De nombreux sujets centraux ne sont pas abordés par ce projet de loi : la redevance audiovisuelle, les missions du service public de l’audiovisuel mais aussi l’explosion inquiétante de la publicité dans le secteur privé.
La première version du projet de loi audiovisuelle examiné l’année dernière faisait la part belle aux publicitaires : elle autorisait une troisième coupure publicitaire, étendait les possibilités de placement de produits et rendait légale la diffusion de publicités dans un coin de l’écran pendant la retransmission des manifestations sportives. Ces sujets seront traités par décrets ou ordonnances. Nous nous opposons à de telles méthodes, habituelles au cours de ce mandat.
Des questions demeurent sur l’avenir de certaines chaînes de notre service public de l’audiovisuel. Le maintien de la chaîne France 4, après des mois et des mois de mobilisations du secteur de l’audiovisuel et des élus, est une bonne nouvelle sachant tout ce que cette dernière a apporté au public jeune pendant la crise du covid. En revanche, la suppression de France Ô a non seulement aggravé le manque de visibilité de nos concitoyens d’outre-mer mais a également réduit l’offre pour 50 millions de téléspectateurs.
Enfin et surtout, ce projet de loi ne pose pas la question majeure de la concentration des médias. Lors de la lecture précédente du projet de loi audiovisuelle, nous étions opposés à la création d’une holding regroupant France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’INA, l’Institut national de l’audiovisuel, mais nous voyons bien que le processus de concentration est en cours dans le privé, notamment avec la fusion de TF1 et M6, dont la situation monopolistique porte un nouveau coup au pluralisme de l’information. Ensemble, les deux chaînes contrôleraient 70 % du marché publicitaire, soit 2,3 milliards de recettes cumulées.
C’est pourquoi nous appelons depuis le début du quinquennat à développer un service public de l’audiovisuel puissant et démocratique – je dirais même : puissant parce que démocratique –, vecteur de pluralisme et capable de relever les défis contemporains.
Revenons au texte qui, malgré son manque d’ambition, présente quelques évolutions, notamment la fusion du CSA et de la HADOPI au sein de l’ARCOM, bien que nous regrettions le manque d’une véritable réflexion sur l’évolution des missions et des moyens attribués à la nouvelle agence de régulation.
Je me réjouis de la suppression en commission du système de transaction pénale ajouté à l’article 1er par la droite sénatoriale. Nous considérions en effet que l’amende de 350 euros prévue à l’encontre des internautes pirates pénaliserait les plus jeunes ou les néophytes en informatique, qui ne sont pas ceux qui commettent les plus graves infractions ni les plus répétées.
Le piratage des manifestations sportives est, bien entendu, un sujet crucial, mais il nous semble qu’il est traité de manière trop artificielle dans le projet de loi que nous examinons.
En définitive, ce texte présente de trop grands manques pour susciter chez nous une adhésion franche. Nous nous opposons également au contenu des futurs décrets et ordonnances destinés à reprendre les aspects problématiques de la première version du projet de loi audiovisuelle. Voilà les raisons pour lesquelles nous voterons contre ce texte.
(Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) Oh ! La discussion générale commune est close.
J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi.
Conformément à l’article 113, alinéa 3, du règlement, je vais d’abord appeler l’Assemblée à statuer sur les amendements dont je suis saisi.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir les amendements de coordination nos 1 et 2, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Ces amendements tiennent compte des textes qui ont été votés entre la réunion de la commission mixte paritaire et l’examen auquel nous procédons aujourd’hui. Quel est l’avis de la commission ? Favorable.
(L’amendement no 1, modifiant l’article 1er, est adopté.)
(L’amendement no 2, modifiant l’article 18, est adopté.)
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire modifié par les amendements qui viennent d’être adoptés.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 53
Majorité absolue 27
Pour l’adoption 49
Contre 4
(Le projet de loi est adopté.) (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique.
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi organique.
(Le projet de loi organique est adopté.) (Mme Laetitia Avia, rapporteure, applaudit.) La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures cinq.) La séance est reprise.
L’ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d’école (nos 3981, 4485).
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Parfois, la République a rendez-vous avec elle-même. C’est souvent le cas lorsque nous examinons des textes portant sur l’éducation, et c’est particulièrement vrai aujourd’hui avec l’examen en deuxième lecture de la proposition de loi de Mme la députée Cécile Rilhac, qui porte sur l’une des fonctions les plus essentielles de notre école : celle de directrice ou de directeur d’école. Dans nos 54 000 écoles, dans nos villes et nos campagnes, il y a, avec les professeurs, une directrice ou un directeur qui est un repère pour tout le monde – parents, enfants, professeurs et maires. Le matin à la grille pour accueillir les enfants, au téléphone avec l’inspecteur ou l’inspectrice de l’éducation nationale pour faire face à un imprévu, à l’écoute des parents qui s’interrogent, inquiet pour un enfant qu’on ne sent pas en forme, toujours bienveillant, toujours exigeant et, en plus de tout cela, la plupart du temps, chargé d’une classe. Je connais la difficulté du travail des directrices et directeurs d’école, et c’est pourquoi nous avons avancé pour améliorer leur décharge – je vais y revenir. Nous savons que, durant la pandémie, matin et soir, ils ont su faire face et organiser en toutes circonstances la continuité des enseignements des élèves.
Cet après-midi, très solennellement, je veux adresser ici ma gratitude et reconnaissance aux directrices et directeurs d’école de France. Ils sont le cœur de notre école et, par conséquent, au cœur de la politique scolaire que mène le Gouvernement depuis quatre ans et dont la priorité, vous le savez, est l’école primaire.
Nous parlerons donc beaucoup aujourd’hui des directrices et directeurs d’école et, en parlant d’eux, nous parlerons de l’école primaire. Rien ne nous fera dévier de ce sillon fondamental pour les élèves, pour leurs familles et pour notre pays. C’est le combat absolu de notre nation, car il est vecteur d’émancipation grâce à la consolidation des savoirs fondamentaux et vecteur de liberté, d’égalité et de fraternité parce que les citoyens qui composent notre pays ont d’abord été des élèves de l’école primaire. Le combat d’une nation qui lutte contre tous les fatalismes – ceux qui découlent du pessimisme, du sentiment d’impuissance et de la naissance –, d’une nation qui veut donner le meilleur à tous ses enfants en luttant à la racine contre la difficulté scolaire. L’élévation générale du niveau scolaire de notre pays et la justice sociale : voilà, en deux mots, ce qui résume notre volonté pour l’école primaire, et cela passe par une directrice ou un directeur d’école bien positionné.
Durant ces quatre années, nous n’avons jamais dissocié l’élévation du niveau des élèves de l’amélioration des conditions de travail des professeurs et, plus largement, des personnels, car nous savons tous que cela fait système. Les Français ont besoin de savoir que leur école fait réussir leur enfant. Souvent, ils ne savent pas que le directeur ou la directrice n’a pas de pouvoir réel. Nous mettons aujourd’hui cette question en lumière, car les professeurs ont le droit de demander à la société la juste reconnaissance de leur engagement – et c’est vrai aussi pour les directeurs et directrices d’école. Pendant quatre ans, nous avons mené une action déterminée pour l’école primaire. Aujourd’hui, nous ne sommes pas moins déterminés à donner aux directeurs et directrices la juste reconnaissance du rôle essentiel qu’ils jouent.
Voilà quatre ans, nous annoncions un objectif volontariste : 100 % des élèves devaient sortir de l’école primaire en maîtrisant les savoirs fondamentaux – lire, écrire, compter et respecter autrui. Durant quatre ans, nous nous en sommes donné les moyens, en abaissant l’âge de l’instruction obligatoire à 3 ans pour faire de l’école maternelle, plus encore qu’aujourd’hui, une école où chaque enfant se prépare avec les mêmes chances à entrer dans les enseignements fondamentaux ; en dédoublant les classes de grande section, CP et CE1 en éducation prioritaire pour que chaque professeur ait deux fois plus de temps pour s’occuper de chacun des élèves – près de 350 000 élèves sont aujourd’hui concernés par cette mesure – et en limitant les effectifs de classe, dans toute la France, à vingt-quatre élèves en grande section de maternelle, en CP et en CE1 pour donner à tous les meilleures conditions de scolarisation en faveur des apprentissages fondamentaux. Cela aussi fait partie de la vie quotidienne des directeurs et directrices d’école. En cette rentrée, 86 % des classes de grande section, de CP et de CE1 de l’enseignement public, tous territoires confondus, bénéficient ainsi d’un effectif inférieur ou égal à vingt-quatre élèves.
En parallèle, nous nous sommes engagés, dans le Grenelle de l’éducation, pour améliorer les conditions d’exercice des professeurs et leur rémunération – parce que c’est, évidemment, ce qu’ils le méritent, mais aussi parce que c’est un levier de progrès pour nos enfants et pour notre pays. En quatre ans, nous avons ainsi porté la prime de l’éducation prioritaire jusqu’à 5 000 euros en ajoutant près de 3 000 euros aux primes existantes, afin de stabiliser les équipes, car nous savons que c’est un facteur de progrès des élèves. Cela faisait longtemps qu’on en parlait. Aujourd’hui, cette prime destinée au réseau d’éducation prioritaire renforcé, ou REP+, est réellement attractive, afin qu’on ne trouve pas dans ce réseau que les nouveaux venus, mais des personnels qui restent longtemps.
Nous avons revalorisé les débuts de carrière des professeurs, et la prime d’attractivité permettra ainsi des augmentations pouvant atteindre 169 euros net par mois pour un débutant. Cette évolution aura eu lieu en moins d’un an. Or, s’il suffisait d’appuyer sur un bouton, cela aurait été fait depuis longtemps. Ce qui a été enclenché avec le Grenelle de l’éducation, c’est un vaste processus, une dynamique qui, nous le voulons – nous le souhaitons –, continuera à se produire tout au long des prochaines années.
Nous avons aussi aidé à financer le matériel informatique des professeurs, avec une prime pérenne de 150 euros net, qui concerne aussi, bien évidemment, les directeurs et directrices d’école. Tout cela s’est traduit par des augmentations budgétaires pour 2022. Ces augmentations, dont nous reparlerons dans un autre cadre et qui viennent d’être présentées, représentent 1,6 milliard d’euros pour la seule année 2022. Nous pouvons en être fiers, car il n’est pas d’investissement plus productif pour une nation que l’investissement éducatif. Comme j’ai souvent eu l’occasion de le répéter depuis plusieurs mois, notamment dans le contexte de la crise sanitaire, ce n’est pas seulement la France, mais aussi l’Europe et le monde qui doivent investir beaucoup plus dans l’école – dans certains pays, pour remédier à la longue fermeture des établissements scolaires et, dans tous, pour tenir compte des défis du XXIe siècle. Cet investissement éducatif supplémentaire doit tout particulièrement porter sur l’école primaire et doit avoir un impact sur la fonction de directeur et de directrice d’école.
Comme vous le savez, les conditions d’exercice de la direction d’école sont très variées selon que l’on se trouve en milieu rural ou urbain et dans de petites ou de grandes écoles, ce qui se traduit par une forte diversité des profils d’écoles, et donc des missions. Cela nous oblige à faire preuve de beaucoup de pragmatisme.
Nous avons déjà pris des mesures pour la direction d’école dans la perspective de cette proposition de loi, jalon fondamental du processus général de reconnaissance. Dès l’été 2019, j’ai souhaité que le chantier de l’amélioration de la situation des directrices et directeurs d’école fasse partie de l’agenda social du ministère. Cela a donné lieu à une grande consultation, dont nous pouvons voir les fruits aujourd’hui, à une grande concertation et à une négociation. Nous avons rendu publics les résultats de cette consultation, ce qui nous a permis de mesurer l’ampleur de l’attente qui s’exprime de la part de nos directrices et directeurs d’école.
Des travaux ont été engagés et les premières réponses ont été apportées ; je citerai les principales. En premier lieu, pour donner davantage d’autonomie à ceux qui exercent le métier de directeur d’école et pour alléger leurs tâches administratives, j’ai souhaité que leur soit confiée la pleine responsabilité de la programmation et de la mise en œuvre des cent huit heures annuelles de service dans le cadre réglementaire existant. Ce temps annuel, qui s’ajoute aux heures d’enseignement, sert – vous le savez – à soutenir les élèves en difficulté, à recevoir les parents, mais aussi à se former. N’oublions pas que jusqu’aux années 1970, les directeurs d’école étaient responsables de la formation des professeurs. Désormais, l’équipe de circonscription les aide et c’est une bonne chose, mais sans doute avons-nous quelque peu oublié que le directeur d’école a toujours été le moteur de l’ambition pédagogique ; il faut retrouver cette idée.
Cela montre bien que l’objectif consistant à consolider le métier de directeur d’école revient à consolider également les équipes qui sont placées sous sa responsabilité, dans l’intérêt de l’esprit d’équipe. Je n’ignore pas les objections qui sont faites à cette proposition de loi : la crainte que soit créé un pouvoir hiérarchique, qu’il en découle un amenuisement des libertés sur le terrain. C’est tout l’inverse qui est proposé. Plus le directeur et la directrice pourront prendre des initiatives, plus les actions seront menées au plus près du terrain, en concertation avec les professeurs de chaque établissement.
En deuxième lieu, nous avons amélioré les outils numériques de gestion afin que les directeurs et directrices se recentrent sur l’essentiel, à savoir le pilotage de leur école.
En troisième lieu, nous expérimentons depuis la dernière rentrée une fonction de référent. Placés auprès des directions des services départementaux de l’éducation nationale, les référents apportent aux directrices et directeurs écoute et conseils dans l’exercice de leurs missions ; c’est un accompagnement qui complète les deux journées de formation désormais accordées – au minimum. La proposition de loi vise à en généraliser l’expérimentation.
En quatrième lieu, à l’automne 2020, nous avons versé aux directeurs et directrices d’école une indemnité exceptionnelle de 450 euros en reconnaissance de leur rôle fondamental dans la gestion de la crise sanitaire. La pérennisation de cette indemnité en 2021 est une étape supplémentaire – mais pas la dernière – en faveur de la juste reconnaissance des conditions d’exercice de ces professionnels. Dans le cadre du Grenelle de l’éducation, nous continuerons de revaloriser cette fonction. D’autre part, depuis la rentrée de 2021, comme je m’y étais engagé, un nouveau régime des décharges a été instauré : 600 emplois supplémentaires y sont consacrés et 40 % des directeurs et directrices sont concernés. Leur vie s’en trouve changée : alors qu’il leur fallait jusqu’à présent jongler constamment entre des dizaines de priorités, ils ont désormais le temps de bien faire leur travail.
Enfin, les directeurs et directrices d’école bénéficient des avancées majeures qu’a permises le Grenelle en 2020 et 2021. Je récapitule les primes : une prime exceptionnelle de 450 euros en 2020, une revalorisation indemnitaire de 450 euros par an à partir de 2021, une prime d’équipement informatique de 176 euros par an, une prime d’attractivité de 1 400 euros par an pour les débuts de carrière en 2021, à quoi s’ajouteront 800 euros supplémentaires en février 2022 ; enfin, le taux d’accès à la classe exceptionnelle a été amélioré. Citons enfin les primes afférentes à l’éducation prioritaire dans les zones concernées.
L’objectif de cette proposition de loi consiste à récapituler tous ces éléments tout en allant au-delà, en vue d’une pleine reconnaissance de la direction d’école, en faisant notamment des directeurs et des directrices de véritables pilotes pédagogiques de l’équipe scolaire. Le texte vise à consacrer, sinon à renforcer par la loi la reconnaissance nécessaire de la fonction de directeur d’école et de son autonomie, ainsi que l’accompagnement matériel et humain auquel ceux qui l’exercent pourront prétendre. Je sais que nous devons aller plus loin dans l’aide que nous devons collectivement fournir aux directeurs d’école – pour la partie qui ne relève pas de la loi – mais j’y reviendrai au cours du débat.
Cette proposition de loi a pour ambition de conforter et de sécuriser l’emploi de directeur d’école. Il faut reconnaître la mission de ceux qui l’occupent, reconnaître leur fonction de stimulation, de coordination, d’encouragement, d’harmonisation des initiatives de l’équipe pédagogique ; c’est ce à quoi nous nous employons avec pragmatisme et exigence pour qu’ils puissent plus et mieux assurer le relais entre les familles, les collectivités locales, les professeurs et la réussite des élèves.
Reconnaître leur fonction, c’est reconnaître leur rôle – celui de pilote au sein d’un collectif, contribuant à l’échange de pratiques, à la coordination des enseignements pour une meilleure continuité des apprentissages – et c’est reconnaître leur force de proposition dans l’accompagnement de proximité et la formation afin qu’ils répondent mieux aux besoins de l’équipe des professeurs de leur école. Les constellations, par exemple, sont des processus de formation continue mis en œuvre dans le cadre du plan Français et du plan Mathématiques ; elles sont le fruit d’une vision « horizontale » de la formation continue, puisqu’elles interviennent au plus près des besoins définis par les équipes elles-mêmes, sous la coordination des directeurs et directrices d’école. Les deux plans cités nous donnent donc une idée de la forme que pourrait prendre une conception plus large des initiatives prises au plus près du terrain en matière de formation des professeurs.
Il existe, on le voit, un lien entre notre action en faveur de la reconnaissance de la fonction de directeur et l’efficacité pédagogique au service des élèves. Un directeur ou une directrice d’école affirmé dans ses fonctions, c’est un élève qui réussira mieux demain. Reconnaître ces fonctions, c’est lui permettre de mieux défendre le projet d’école auprès des collectivités et des parents d’élèves, mais aussi auprès de l’institution scolaire dans son ensemble. L’école est ainsi replacée au centre du village.
En somme, il s’agit d’apporter une pierre supplémentaire à l’édifice d’une école qui prend tout son sens – le sens donné aux apprentissages des élèves, qu’éclairent la recherche et les évaluations ; celui du métier de professeur, mieux reconnu, plus à l’initiative de son enseignement, mieux formé et membre d’une équipe ; celui des missions du directeur ou de la directrice, véritable pilote pédagogique de cette équipe.
Je veux une nouvelle fois rendre hommage au travail de votre rapporteure, Cécile Rilhac,…
Très bien ! …qui a su avancer sur un texte fondamental et qui l’a fait depuis de nombreux mois par la concertation ; c’est selon moi un modèle de travail parlementaire qui a permis l’écoute et la maturation. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
Le sujet n’est pas simple – sinon, il aurait été réglé depuis longtemps. Il est important d’établir des comparaisons internationales – nous avons notamment observé l’exemple du Québec. Pourquoi des solutions semblant produire de bons résultats dans d’autres pays ne pourraient-elles pas être acclimatées dans le nôtre, dans le respect de notre tradition scolaire et des attentes du terrain ? Ces attentes, précisément, ont évolué, comme l’a montré la consultation.
Le présent débat et les votes qui suivront sont une manière de rappeler que la fonction de directeur d’école est essentielle : elle est l’une des pierres angulaires du système scolaire et de l’école primaire. La proposition de loi consolide ainsi la place légitime que nous devons donner aux directrices et directeurs d’école dans l’institution, au bénéfice de toute l’école de France ; je vous invite donc à l’adopter très largement.
(Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.) La parole est à Mme Cécile Rilhac, rapporteure de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Je suis ravie d’entamer de nouveau le débat autour de ma proposition de loi créant la fonction de directrice et de directeur d’école. Les discussions en première lecture, à l’Assemblée et au Sénat, ont confirmé que cette question est cruciale ; c’est donc logiquement que ce texte revient devant notre chambre pour un examen en deuxième lecture. Je remercie l’ensemble des collègues de la commission des affaires culturelles et de l’éducation pour leur implication et leurs propositions, qui m’ont été très utiles dans la construction de cette proposition de loi. Je salue également les contributions et améliorations de nos collègues sénateurs, en particulier MM. Julien Bargeton et Max Brisson.
La question de la reconnaissance des missions et des responsabilités des directeurs d’école n’est pas nouvelle. L’amélioration de leurs conditions de travail est un point essentiel pour eux, mais aussi pour le bon fonctionnement de l’école dont ils ont la responsabilité.
Peu de parents d’élèves – et peu de gens – le savent : les directrices et les directeurs d’école qu’ils voient travailler tous les jours sont en réalité des enseignants comme les autres. Sur le plan juridique, le titre de directeur d’école n’a ni existence ni fondement.
Le texte que je vous propose apporte des réponses à la question de la reconnaissance des missions et des responsabilités des directeurs et directrices d’école. L’objectif est de reconnaître enfin une fonction pleine et entière qui valorise ses acteurs et qui confirme la priorité donnée à l’école primaire – priorité souhaitée par le Président de la République et confirmée par la politique volontariste menée en ce sens depuis quatre ans.
Plusieurs mesures concernant directement les directeurs d’école ont été prises suite à nos discussions en première lecture. À l’issue de la concertation avec les partenaires sociaux, vous avez décidé – et je vous en remercie, monsieur le ministre – de pérenniser la prime exceptionnelle liée au covid-19 de 450 euros par an. Elle prend désormais la forme d’une augmentation de l’indemnité de sujétion spéciale versée mensuellement à chaque directeur d’école.
Outre l’aspect indemnitaire, à la rentrée scolaire de 2021, 600 postes supplémentaires ont été consacrés au renforcement des décharges, dont la répartition a fait l’objet d’une vaste concertation syndicale. Ces décharges répondent à deux objectifs largement partagés sur le terrain comme dans cet hémicycle. Le premier consiste à donner davantage de jours de décharge aux directeurs des petites écoles – celles qui ont entre une et trois classes et qui se trouvent notamment dans les départements ruraux. Le second vise à rapprocher les conditions d’exercice des directeurs d’école maternelle de celles des directeurs d’école élémentaire.
Ces avancées ont d’ores et déjà été adoptées mais je suis consciente qu’il reste encore du chemin à parcourir, et c’est la raison de notre présence ici. La crise sanitaire a montré l’investissement et le professionnalisme des directeurs d’école. Ils ont été un maillon essentiel, pendant le confinement d’abord, pour maintenir le lien entre les membres de la communauté éducative et proposer aux élèves une véritable continuité pédagogique, puis pendant le déconfinement pour mettre en place les protocoles sanitaires, et enfin pour maintenir nos écoles ouvertes.
Notre débat permettra aux directeurs d’école de se recentrer sur leur mission essentielle : le pilotage de leur école. Il s’agit de leur donner plus de temps, de simplifier les procédures, mais aussi de les accompagner en favorisant les échanges entre pairs. Je souhaite que ce texte, une fois adopté et promulgué, se traduise par des évolutions concrètes dès la rentrée scolaire de 2022.
J’en viens au texte lui-même et aux travaux du Sénat et de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée, qui ont donné lieu à plusieurs évolutions tout en affirmant les objectifs suivants : la reconnaissance, la simplification des tâches, le soutien au directeur d’école et la revalorisation du métier.
La reconnaissance, d’abord : elle passe par l’affirmation des missions essentielles des directeurs d’école. L’article 1er renforce leur pouvoir d’initiative et de décision. Au reste, l’autorité fonctionnelle introduite par les sénateurs dans cet article est loin d’être une aberration. Cette nouvelle terminologie permet d’ancrer dans la loi l’idée qu’une directrice ou un directeur aura désormais la possibilité et le devoir d’agir pour le bon fonctionnement de son école. Je précise tout de même que les missions des directeurs d’école restent inchangées.
Que les choses soient claires : non, le texte ne prévoit en aucun cas d’instaurer une quelconque autorité hiérarchique. L’article 1er instaure une autorité fonctionnelle : autrement dit, la directrice ou le directeur d’école disposera de l’autorité au sens administratif du terme,…
Très bien ! …c’est-à-dire « un pouvoir de décision légalement défini » – voilà ce que j’entends par autorité fonctionnelle. Non, le texte ne prévoit pas de confier au directeur d’école une mission d’évaluation de ses pairs. Non, enfin, il ne crée pas de nouvelles missions pour les directeurs d’école. Très bien, il faut le rappeler ! L’article 2 crée un emploi de direction d’école, dont la spécificité des missions et des responsabilités est ainsi reconnue. Cette avancée permet une nouvelle articulation de la fonction de direction avec des missions que le directeur assume déjà, comme l’enseignement, la formation, ou encore la coordination. Ce ne sont pas des missions supplémentaires.
Le débat se poursuivra sur ce point mais, à mon sens, la nouvelle rédaction de l’alinéa 8 de l’article 2, issue de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, est équilibrée. Cette nouvelle rédaction permet de clarifier les modalités d’octroi des décharges d’enseignement en fonction non plus seulement du nombre de classes, mais aussi des spécificités de l’école. Grâce à cette nouveauté, de nombreuses spécificités pourront être prises en considération : la diversité des territoires, la diversité et le nombre des élèves, la précarité dans laquelle vivent certains enfants, ou encore la catégorie socioprofessionnelle des parents. L’objectif est d’augmenter le temps des décharges, et donc de donner d’autant plus de temps aux directrices et aux directeurs d’école afin qu’ils puissent exercer leurs missions. C’est aussi cela, la reconnaissance de leur cœur de métier.
Le deuxième objectif du texte réside dans la simplification et la diminution des tâches des directeurs d’école : c’est là une nécessité. L’article 2 précise qu’ils seront déchargés des activités pédagogiques complémentaires (APC), afin de se concentrer sur leurs missions de direction. L’article 2
bis dispose qu’une assistance administrative et matérielle pourra être mise à leur disposition en fonction de la taille et des spécificités de l’école : voilà encore une avancée très attendue. Je dirai même que cette mesure fait partie, avec les décharges, des premières demandes exprimées par les directeurs aujourd’hui en poste. Par ailleurs, la nouvelle rédaction de l’article 5 permettra, grâce au vote numérique, d’alléger l’organisation des élections des représentants des parents d’élèves, et l’article 6 attribue principalement aux autorités académiques l’élaboration des fameux plans particuliers de mise en sûreté (PPMS), simplification, là encore, très attendue sur le terrain.
Le troisième objectif, le soutien aux directeurs d’école, se traduit par la création d’un référent au sein de chaque direction académique. Cette mesure répond au réel besoin des directeurs d’avoir un autre interlocuteur que leur supérieur hiérarchique, l’inspecteur de l’éducation nationale (IEN). Je précise que celui-ci conservera sa position hiérarchique vis-à-vis des enseignants et des directeurs : rien dans le texte ne modifiera cet état de fait. L’instauration de référents n’en est pas moins importante, car les directeurs n’osent pas toujours faire part à leur hiérarchie d’éventuelles difficultés de nature très variable, pouvant par exemple concerner leurs relations avec des parents, des élus, des collègues ; ils craignent d’être mal jugés, voire mal notés. Le référent constituera à cet égard un véritable soutien, tout en demeurant un pair parmi ses pairs, ayant lui-même exercé ces fonctions avant d’être déchargé de ses missions de direction et d’enseignement afin d’être à l’écoute de ses collègues. Cette avancée se trouve, elle aussi, très attendue, et l’amélioration apportée par les sénateurs répond de manière bienvenue à la diversité des territoires.
Le quatrième et dernier objectif de ce texte est la revalorisation du métier de directeur d’école. L’article 2 crée le cadre juridique indispensable à sa reconnaissance, en explicitant les conditions de nomination, de formation et d’exercice. Cet article prévoit également le versement d’une indemnité spécifique et une progression plus rapide dans les échelons, tout au long de la carrière. Vous l’aurez compris, chers collègues, ce texte permet des avancées concrètes et pragmatiques ; il répond aux attentes sur le terrain ; il est nécessaire en vue de reconnaître enfin le travail remarquable de nos directrices et directeurs d’école.
Je conclurai en soulignant que cette proposition de loi constitue une première étape dans l’amélioration des conditions d’exercice de ces professionnels. En raison de la complexité du tissu que composent les 44 455 écoles publiques, il est en effet impossible de se contenter d’une réponse globale. Une réflexion au plus près des territoires, des besoins et spécificités de chaque établissement demeure nécessaire afin de faciliter le travail quotidien des directeurs. Bien au-delà des rivalités politiques, ce texte n’est guidé, je le répète, que par une seule et unique motivation : reconnaître la fonction et améliorer les conditions de travail de nos directeurs et directrices d’école.
(Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
J’ai reçu de M. Jean-Luc Mélenchon et des membres du groupe La France insoumise une motion de rejet préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à M. Michel Larive.
Pour commencer, je tiens à exprimer mon soutien aux personnels de l’éducation nationale venus en nombre aux abords du Palais-Bourbon afin d’y manifester leur opposition à cette proposition de loi. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) J’ai participé à leur action collective : ils défendent leur cadre actuel de travail, c’est-à-dire le conseil des maîtres et maîtresses, et refusent la perspective d’une école managériale. Ils peuvent compter sur le groupe parlementaire La France insoumise pour relayer leurs revendications au sein de cet hémicycle.
Au cours de l’examen du texte en première lecture, vous me contredisiez lorsque j’affirmais qu’il aboutirait
in fine à la création d’un nouveau statut pour les directeurs d’école. Je vous alertais à l’époque au sujet du rejet massif de ce statut par la profession elle-même : selon différentes enquêtes d’opinion, plus de 89 % des intéressés dénoncent cette mesure. C’est faux ! Le Président de la République a fini par me donner raison en assumant vos intentions. Le 2 septembre, à Marseille, il annonçait une grande réforme pour « l’école du futur », incluant l’ambition d’un nouveau statut pour les directeurs d’école. J’ai écouté son discours avec attention : ce qui nous attend, si nous ne changeons pas rapidement de cap, c’est une libéralisation encore accrue du service public de l’enseignement, à commencer par la conversion des directeurs d’école en DRH – directeurs des ressources humaines. En effet, dans l’école du futur, a déclaré le président Macron, les équipes pédagogiques seront recrutées par le directeur devenu chef d’établissement, un mixage opéré en leur sein entre personnels enseignants, qui appartiennent à l’éducation nationale, et non enseignants, employés par les collectivités. Des dérogations aux rythmes scolaires nationaux deviendront possibles ; bref, après le code du travail décliné entreprise par entreprise, nous aurons droit à un système scolaire inégalitaire, variant selon les établissements, donc selon les territoires.
La proposition de loi que nous examinons de nouveau aujourd’hui, visant à créer la fonction de directeur d’école, ne sert que de tremplin au projet destructeur du Président de la République et de M. le ministre Blanquer en matière d’éducation. Aucun syndicat d’enseignants ne demande la création de cette fonction, telle qu’elle est prévue. J’ai discuté avec l’intersyndicale sur le parvis du Palais-Bourbon : elle réclame l’abandon pur et simple du texte, et davantage de moyens plutôt que davantage de hiérarchie. Malgré cela, vous persistez à poser les jalons d’un statut de directeur d’école qui menace l’égalité républicaine, ainsi que le principe d’égalité territoriale du service public de l’éducation. Contrairement à ce que sous-entendait M. Blanquer lors de nos débats en première lecture, nous ne voulons pas abolir toute hiérarchie au sein de l’éducation nationale : nous pensons qu’une hiérarchie est nécessaire dans l’enseignement du premier degré, qu’elle existe et qu’il convient donc de ne pas la modifier. Ce cadre hiérarchique est incarné par l’IEN, supérieur des enseignants, y compris des directeurs, qui sont eux-mêmes des professeurs des écoles ; il faut que cela reste ainsi.
Or, preuve s’il en fallait de votre volonté de hiérarchiser l’école, vous prévoyez que le directeur bénéficie d’une délégation de l’autorité académique afin d’assurer le bon fonctionnement de l’école qu’il dirige, ce qui revient à en faire un manager dans son école.
C’est faux ! Selon le décret du 24 février 1989 relatif aux directeurs d’école, celui-ci « représente l’institution auprès de la commune et des autres collectivités territoriales », disposition amplement suffisante pour lui permettre de mener à bien ses missions. Pourtant, dans l’exposé des motifs de votre texte, il est déploré dès le premier paragraphe que le directeur se trouve « sans réel pouvoir de décision » et suggéré qu’il devienne « décisionnaire lors des débats ». Votre but réside donc dans la suppression du fonctionnement collégial de l’école primaire ! Mais non ! Oh là là ! De plus, vous souhaitez modifier le code de l’éducation afin que le directeur ne donne plus seulement son avis, mais entérine les décisions du conseil d’école. Avant même la mise aux voix de ce texte, un communiqué du ministère de l’éducation nationale, daté du 2 juillet, indiquait que les directeurs pourraient désormais décider de la répartition des 108 heures de service annuelles dues par les professeurs en plus de leurs 24 heures hebdomadaires devant les élèves. Ainsi organiseront-ils seuls, sans aucune consultation du conseil des maîtres, le temps de travail de leurs enseignants, qui auront cessé d’être leurs pairs.
Quant à la rémunération de ces futurs DRH d’école, vous envisagez un régime spécifique, ce qui créera de fait un corps distinct de celui des enseignants. Actuellement, tous les directeurs bénéficient de 8 points de bonification indiciaire, auxquels peuvent s’ajouter 2 points supplémentaires en fonction de la taille de l’école, ainsi que d’une indemnité de sujétions spéciales pour la direction, qui se compose elle-même d’une part principale commune et d’une part variable liée à la taille de l’école. Au total, ils perçoivent une rémunération mensuelle brute supplémentaire de 240 à 445 euros, majorée, comme vous l’avez dit, dans les réseaux d’éducation prioritaire, REP et REP+. Or, dans l’exposé des motifs du texte, vous évoquez une augmentation de l’indemnité de 150 à 300 euros bruts : selon la CGT Éducation, cela revient à 50 à 12 euros nets par mois, soit une somme dérisoire. Nous préférerions une bonification indiciaire qui serait prise en compte dans le calcul des retraites actuelles.
Par ailleurs, je profite de cette intervention pour marteler que les directeurs ne doivent en aucun cas être nommés par l’inspecteur d’académie, comme le prévoyait la rédaction initiale de cette proposition de loi : la fonction aurait ainsi pu être conférée et retirée selon le bon vouloir de l’inspecteur, ce qui constituerait un moyen de pression inacceptable. Comme les syndicats, j’estime satisfaisant le dispositif actuel – inscription sur liste d’aptitude après avis de la commission administrative paritaire du département, puis participation au mouvement et affectation en fonction du nombre des points cumulés durant la carrière. Par la suite, le directeur ne peut se voir retirer son emploi qu’après avis de la même commission. Ce système garantit une relative transparence en matière d’attribution des postes, contrôlée par les syndicats, ce que nous souhaitons conserver.
Je souhaite également vous alerter à propos de la responsabilité juridique dont vous souhaitez transférer une partie sur les épaules du directeur d’école : il est à craindre que la hiérarchie en profite parfois pour se défausser sur lui. Je regrette que ces dispositions soient renvoyées au domaine réglementaire, car cet important sujet aurait mérité un débat législatif. Le flou entretenu par l’actuelle rédaction du texte laisse penser que votre but est de vous conserver toute latitude pour, je le répète, faire du directeur un manager chargé de recruter les enseignants et autres membres de l’équipe éducative – afin de répondre aux desiderata du Président de la République.
(Mme Maud Petit proteste.)
Pour résumer, cette proposition de loi ne permet en rien de répondre aux difficultés des directeurs d’école, telles que les énumère l’exposé des motifs. Encore une fois, le fait de créer la fonction de directeur et donc d’accroître la hiérarchisation au sein de l’enseignement ne résoudra pas ces problèmes de charges administratives, de gestion de la sécurité, d’accès à l’école, de temps de décharge insuffisants ou encore de trop faibles rémunérations, qui du reste ne concernent pas seulement les directeurs mais aussi leurs collègues. Alors même qu’elles ne concernaient que 25 % des établissements et ignoraient les zones rurales, les décharges prévues au stade de la première lecture ont été supprimées ; celles que le ministre a octroyées par circulaire ne sont pas à la hauteur. Les postes de remplaçant permettant aux directeurs de prendre leurs jours de décharge ne se trouveront jamais en nombre suffisant tant que l’on n’ouvrira pas aux concours de nouveaux postes assortis d’un revenu décent.
Chers collègues, à quelques mois de l’élection présidentielle, nous constatons que l’éducation, les conditions de travail et de rémunération des enseignants occupent le débat public. C’est là une bonne chose. Seulement, cette proposition de loi participe d’une vision de l’école calquée sur le modèle de l’entreprise, et dont je ne veux pas. Je préfère défendre le service public, le fonctionnement collégial et démocratique de l’école primaire. Face à la surcharge de travail, au manque de moyens, l’État doit prendre ses responsabilités en augmentant les décharges, y compris en milieu rural, ainsi qu’en fournissant les aides humaines et matérielles nécessaires. Or ce texte et la stratégie dont il procède vont absolument à l’encontre de telles ambitions. De même qu’avec le projet de loi 4D – décentralisation, différenciation, déconcentration et décomplexification –, devenu 3DS – différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification –, territoires ruraux et quartiers populaires pâtissent de vos politiques libérales visant à différencier l’accès aux services publics. Voilà pourquoi je vous demande d’entendre la demande de l’écrasante majorité des intéressés :…
C’est faux ! …abandonnons ce texte, votons en faveur de cette motion de rejet ! (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) Dans les explications de vote sur la motion de rejet préalable, la parole est à M. Gaël Le Bohec. Ce soir sera installée la commission Bronner, qui vise à comprendre et à mesurer les dangers que peut présenter le numérique pour la cohésion nationale, pour la démocratie. Chers collègues de La France insoumise, j’aimerais procéder à quelques ajustements. Vous donnez des chiffres… Le pourcentage de directeurs d’école opposés à cette réforme : 89 % ! …sans citer vos sources. J’apprécierais que nous fassions montre de cohérence et de respect. Des directeurs nous regardent à la télévision, d’autres suivent nos débats ici même, dans les tribunes : je voudrais d’ailleurs les féliciter. Vous souteniez en commission qu’aucun n’était favorable à ce texte, qu’il faisait l’unanimité contre lui ; pourtant, comme nous, vous avez dû recevoir aussi des syndicats de directeurs qui souhaitent et soutiennent cette évolution législative.
Manifestement, votre rapport à la hiérarchie n’est pas simple : soit ! Je l’accepte d’autant mieux que je le comprends davantage en examinant quelques chiffres : un article du
Figaro , fin 2018, vous désignait comme le groupe le plus monolithique, celui qui, en dix-sept textes, n’a pratiquement pas connu de divergence dans ses votes.
Je voudrais également souligner que cette proposition de loi a été élaborée dans la concertation. La rapporteure Cécile Rilhac, qui y travaille depuis plusieurs années, s’est rendue dans des dizaines de territoires différents pour auditionner les directeurs et directrices d’école, avec beaucoup de respect. Elle a dialogué avec les sénateurs pour faire évoluer le texte. Non, cette proposition de loi défendue par la majorité ne confie pas une autorité hiérarchique aux directeurs d’école. Elle n’a qu’une intention : reconnaître, consacrer et mettre en valeur les missions qu’ils assurent d’ores et déjà. Elle leur confie une autorité fonctionnelle qui les aidera dans la mise en œuvre du projet pédagogique de l’école, au plus près du terrain, et qui leur permettra de mener à bien l’intégralité de leurs missions, de direction bien sûr mais aussi de coordination et de formation. Elle leur donnera accès à une offre de formation tout au long de leur carrière ainsi qu’à une assistance administrative, comme ils le demandaient. C’est pour ces raisons que nous voterons contre la motion de rejet.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Maxime Minot. Le groupe Les Républicains regrette sincèrement de voir arriver cette motion de rejet. L’occasion de débattre de l’école est trop rare dans cet hémicycle pour que nous puissions passer à côté du débat. Le texte va enfin clarifier le cadre juridique attaché à la fonction de directeur d’école. Chers collègues de La France insoumise, vous affirmez que 89 % des enseignants y sont opposés mais vous avez dû lire le sondage à l’envers, car 89 % des enseignants attendent ce texte. Alors débattons ! Je le redis : le groupe LR s’opposera à cette motion de rejet. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.) La parole est à Mme Maud Petit. L’institution scolaire a connu d’importantes transformations ces dernières années, la fonction de direction aussi. Il nous faut donc sans attendre ancrer cette fonction dans le marbre de la loi, par respect pour nos directrices et directeurs d’école qui ont besoin de reconnaissance, d’un cadre et de moyens. Eu égard au travail considérable réalisé par nos deux chambres ces derniers mois, il nous paraît en outre stupéfiant et désolant de voir aujourd’hui une motion de rejet de ce texte. Vous vous en doutez, le groupe Dem votera donc contre la motion présentée par nos collègues de La France insoumise. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Sur la motion de rejet préalable, je suis saisi par le groupe La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Sylvie Tolmont.
Le texte que nous examinons cet après-midi en deuxième lecture ne correspond pas aux attentes des directeurs et directrices d’école. Puisqu’il faut citer ses sources, je rappelle l’enquête diligentée par le ministère en 2019 pour lancer la concertation. Les directeurs d’école y ont exprimé clairement leurs attentes. Augmentation de leur temps de décharge, simplification des démarches administratives et aide humaine pour la gestion des tâches administratives et matérielles : ils réclament légitimement un allégement de leurs tâches. Or le texte alourdit leurs missions, si l’on en juge par les perspectives tracées en matière de formation et de coordination. Non. La proposition de loi n’apporte malheureusement pas de réponse à la situation des directeurs d’écoles de moins de quatre classes, qui sont majoritaires dans nos territoires ruraux. Ces directeurs n’arrivent pas à se faire remplacer pendant leur temps de décharge.
En outre, nous sommes fermement opposés à la notion d’autorité fonctionnelle : elle laisse entendre que l’organisation collégiale qui fonctionne au sein de nos écoles n’est plus d’actualité. Par exemple, madame la rapporteure, nous ne comprenons pas pourquoi vous refusez d’inscrire dans le marbre, comme vous l’avez fait en première lecture, que les directeurs n’auront pas d’autorité hiérarchique. Pour ces quelques raisons, notre groupe votera cette motion de rejet.
(Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) La parole est à M. Pierre-Yves Bournazel. Je crois d’abord que, sur tous les bancs, nous respectons les directrices et directeurs d’école ainsi que les enseignantes et les enseignants. Il me semble important de dire qu’ils font un travail formidable, très difficile, et que nous les soutenons avec force et conviction. Chacun développe ensuite ses arguments. Mais je ne peux pas vous laisser dire, monsieur Larive, que nous souhaitons libéraliser l’école et que nous la considérons comme une sorte d’entreprise : eh bien non ! Ce que nous faisons depuis maintenant quatre ans et demi, c’est de renforcer l’égalité des chances. Dédoubler les classes en réseau d’éducation prioritaire et en réseau d’éducation prioritaire renforcé, c’est donner plus à ceux qui ont moins de capital social et culturel au départ. Vous en avez peut-être rêvé, mais c’est nous qui l’avons fait. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Mme Maud Petit applaudit également.) Cela n’a rien à voir ! Nous avons mis en place le dispositif Devoirs faits car il nous semblait important pour aider les enfants ayant besoin d’un soutien scolaire. C’est dans le même but que nous avons réalisé la réforme du baccalauréat et de l’orientation : pour favoriser l’égalité des chances. Ce n’est pas le sujet. Lorsque nous agissons pour revaloriser le métier et augmenter les revenus des enseignants, nous nous battons pour l’école. Et lorsque nous augmentons le budget de l’éducation nationale comme nous le faisons depuis cinq ans, c’est parce que nous croyons en l’école et croyons aux enseignants, aux directrices et aux directeurs. Je ne veux pas laisser dire que nous souhaitons libéraliser l’école et que nous la considérons comme l’entreprise. Nous nous battons pour l’égalité des chances, avec des preuves très significatives depuis maintenant quatre ans et demi. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.) La parole est à Mme Béatrice Descamps. Notre groupe ne votera pas cette motion de rejet. Refuser les débats sur ce texte nous paraît inconcevable : enfin, nous parlons de la situation des directeurs et directrices ! Nous pensons que nous nous devons de les représenter, de débattre, de soutenir les avancées, d’exprimer nos inquiétudes peut-être et nos attentes encore. Ce qui est sûr, c’est que les directeurs méritent toute notre reconnaissance, et nous l’exprimerons en participant au débat. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) La parole est à Mme Sabine Rubin. Produire une loi pour résoudre les graves difficultés que rencontrent les directeurs d’école était un impératif dont vous vous êtes saisis dès 2018 mais, trois rentrées plus tard, la deuxième version de la proposition de loi visant à résoudre ces fameuses difficultés apparaît, je vous le dis clairement, comme une farce et une manipulation. (Une députée du groupe LaREM s’esclaffe.) Oui, une farce, car loin de répondre aux lourds problèmes rencontrés par les directeurs d’école, cette proposition de loi tend plutôt à les amplifier.
Peut-être convient-il de rappeler ce que sont les fonctions et les missions d’un directeur d’école, et les difficultés qu’il rencontre. Il fait face à une surcharge de travail administratif qui ne cesse de croître et à une surcharge dans la gestion logistique de l’école, au détriment de ce qui est au cœur de sa fonction : la coordination de l’équipe pédagogique, son animation, le suivi des élèves, la relation avec les parents et avec les institutions des collectivités territoriales.
Pourtant, quand les directeurs d’école réclament un allégement de leur charge, la proposition de loi les accable de nouvelles missions et responsabilités aux contours flous. Lorsqu’ils demandent plus d’heures de décharge, la nouvelle version du texte ne prévoit plus aucune amélioration en ce sens. Lorsqu’ils demandent une véritable aide administrative, vous ergotez autour de la possibilité d’emplois en contrat d’insertion qui représentent plus une charge qu’une aide – etc., etc. Mais quand ces directeurs affirment ne pas vouloir de relations hiérarchiques – vous avez reçu des tonnes d’e-mails en ce sens !
(Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM) –,… Non, pas des tonnes ! Un peu de silence s’il vous plaît, chers collègues. …vous instituez une autorité fonctionnelle doublée de la délégation de compétences de l’autorité académique, en refusant d’inscrire dans le corps des articles que le directeur n’exerce pas d’autorité hiérarchique sur les enseignants de son école. C’est là que se niche la manipulation ! Car, en plus de nouvelles missions et responsabilités, vous imposez votre vision managériale de l’école. Ce n’est pas sans faire écho au discours présidentiel de Marseille et à l’expérimentation dans les écoles laboratoires… Je vous invite à conclure, madame Rubin. …où les directeurs d’école pourraient choisir leurs enseignants. Demandez-vous pourquoi ils ne souhaitent pas le faire ! Nous voterons contre la motion de rejet de cette proposition de loi qui n’apporte aucune solution aux conditions de travail des directeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – Mme Elsa Faucillon applaudit également.) La parole est à M. Michel Castellani. Notre groupe est réservé sur la teneur du texte. Nous connaissons bien entendu l’importance et le caractère irremplaçable du travail des directeurs d’école. Nous prenons acte du mal-être de beaucoup d’entre eux, lié notamment au manque de reconnaissance à leur égard. Face à cette situation, les premiers pas qui ont été faits sont les bienvenus. La prime de rentrée notamment, ainsi que d’autres mesures positives renvoyées à des décrets, doivent être saluées.
Il y a manifestement absence de consensus sur le texte. La profession est largement attachée au travail en équipe et beaucoup de directeurs – pas tous, mais un grand nombre d’entre eux – ne souhaitent pas que soit créé un statut comparable à celui des chefs d’établissement du second degré ; ils nous ont d’ailleurs interpellés en ce sens. Nous tenons à ce propos, comme d’autres collègues, à comprendre en quoi l’autorité fonctionnelle fera réellement évoluer leurs conditions de travail.
Faut-il pour autant rejeter le texte
a priori ? Non. Nous sommes toujours partisans, sur ce texte comme sur les autres, du débat démocratique. Nous espérons que, lors de ce débat, chacun exprimera son opinion sur ce sujet important. Je mets aux voix la motion de rejet préalable
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 74
Nombre de suffrages exprimés 72
Majorité absolue 37
Pour l’adoption 17
Contre 55
(La motion de rejet préalable n’est pas adoptée.) (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.)
Dans la discussion générale, la parole est à Mme Sylvie Charrière. Je tiens tout d’abord à remercier ma collègue Cécile Rilhac, qui défend ce texte depuis le début, et à saluer sa ténacité. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.) Depuis 2018 et la rédaction d’un rapport avec Valérie Bazin-Malgras – que je salue –, Mme la rapporteure travaille sans relâche sur ce sujet. Je tiens également à saluer mes collègues du groupe La République en marche. Nombre d’entre eux, parfois anciens directeurs d’école eux-mêmes, se sont fortement investis tant pour enrichir la proposition de loi que pour contribuer à son aboutissement. Je les en remercie.
De nombreux représentants de la profession nous ont aussi témoigné récemment leur soutien et nous ont dit combien cette proposition de loi est attendue. La consultation lancée dès 2019 auprès des directeurs d’école, à la suite d’un événement tragique qui aura marqué chacun d’entre nous, fut révélatrice. Elle a permis de faire émerger trois attentes centrales, qui demeurent notre ligne directrice : le nécessaire allégement de la charge de travail des directeurs d’école ; le besoin de renforts humains et matériels ; la volonté de bénéficier d’une formation plus solide.
Monsieur le ministre, vous avez maintes fois témoigné dans cet hémicycle de votre volonté d’améliorer durablement le quotidien des directeurs d’école. Je salue la mise en place de mesures fortes, à la suite du Grenelle de l’éducation : une prime de 450 euros pour l’ensemble des directeurs d’école et une amélioration du régime de décharge qui concerne déjà 40 % des directeurs. Ces décisions prouvent que le Gouvernement et la majorité présidentielle partagent pleinement la volonté d’agir pour permettre aux directeurs d’école d’exercer au mieux leurs fonctions.
Vous l’avez souligné hier, nous abordons aujourd’hui des questions cruciales pour les directeurs d’école. Tout d’abord, à l’article 1er, la délégation de compétences et l’autorité fonctionnelle : en donnant au directeur plus de responsabilités, nous renforçons son autonomie et sa capacité à agir et à prendre des décisions dans un esprit de collectif pédagogique. Le travail en commission des affaires culturelles et de l’éducation a permis, je l’espère, de préciser les choses et de rassurer quant à notre volonté de créer une véritable fonction de directeur sans bouleverser l’organisation unique de nos écoles. Non, nous ne créons pas de hiérarchie entre le directeur et les enseignants, nous maintenons l’équilibre fondamental qui existe sur ce point.
Autre question : l’allégement des contraintes bureaucratiques liées aux missions du directeur. Elle fait l’objet de l’article 6, qui traite du plan de prévention et de mise en sûreté, mais aussi de l’article 5 qui, tout en simplifiant le processus de l’élection des représentants de parents d’élèves, vise à renforcer la participation démocratique.
Nous le savons, la place du directeur d’école dans nos politiques publiques est déterminante. Il doit s’assurer du bon fonctionnement de son école, de la relation avec les parents d’élèves, de la coordination entre les enseignants ainsi que des relations avec l’inspecteur de l’éducation nationale, la municipalité et tous les autres partenaires, notamment associatifs – en somme, de tout ce qui concerne son établissement.
Bien qu’il soit au centre du système éducatif, le directeur d’école a peu de marges de manœuvre. Créer une fonction, c’est reconnaître et valoriser son rôle.
S’il est essentiel de rendre à nouveau ce métier attractif, c’est aussi, ne l’oublions pas, parce que nous peinons chaque année à trouver des enseignants qui souhaitent être chargés de direction. Nos travaux en commission ont permis des avancées sur ce point.
À l’alinéa 4 de l’article 2, nous avons obtenu que la condition de trois ans d’ancienneté au poste d’enseignant soit suffisante pour être inscrit sur la liste d’aptitude, contre cinq ans en première lecture. Cela permettra aux jeunes enseignants qui souhaitent s’investir différemment au sein de leur école de le faire plus tôt. Ces candidats recevront une formation qui garantira une entrée plus sereine dans le métier et ils pourront par la suite bénéficier de l’accompagnement de référents.
La nouvelle rédaction de l’alinéa 7 de l’article 2 confirme une position forte concernant les décharges des directeurs d’école. Celles-ci doivent être adaptées à la diversité de nos écoles et tenir compte de leurs spécificités. Qu’elles se situent dans des communes rurales ou dans des quartiers relevant de la politique de la ville, toutes les écoles sont différentes, d’autant qu’aux disparités géographiques s’ajoutent, pour certaines, l’accueil d’enfants à besoins spécifiques ou des formes d’organisation particulières.
L’article 2
bis traite d’un autre sujet majeur, qui correspond à une préoccupation importante des directeurs d’école : le besoin d’assistance administrative et matérielle. Il offre une première réponse : nous avons souhaité que l’État mais également les communes et leurs groupements puissent participer à la mise en place de cette aide administrative. C’est pourquoi nous avons rétabli cette coparticipation. Ne plus donner demain aux communes et à leurs groupements cette possibilité, ce serait revenir en arrière et même remettre en cause leurs compétences en matière de gestion des écoles élémentaires et maternelles. Or, nous le savons, de nombreuses communes aident déjà les directeurs en mettant à leur disposition une aide humaine et matérielle.
Cette proposition de loi n’est qu’un premier pas mais il s’agit d’un pas de géant pour la reconnaissance de la fonction de directeur d’école et l’amélioration des conditions de travail. Elle nécessitera sans aucun doute des ajustements ultérieurs et le groupe La République en marche se réjouit de pouvoir à nouveau débattre de ce sujet et de trouver collectivement des réponses à cet enjeu central pour l’école d’aujourd’hui et de demain que sont le renforcement des capacités d’initiative et de décision des directeurs et l’amélioration de leurs conditions de travail.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Mme Maud Gatel applaudit également.) La parole est à Mme Béatrice Descamps. Cette proposition de loi nous a permis de prêter réellement attention à la situation des directeurs d’école, maillons incontournables de notre système éducatif qui unissent les différents membres d’une équipe éducative. Or la lourdeur de leurs tâches quotidiennes – je n’ai pas assez de temps pour les énumérer – n’est pas prise en compte et ils manquent cruellement de reconnaissance et de temps. Et je veux ici saluer une nouvelle fois le travail chronophage que chacun d’eux effectue. Lors de l’examen de la loi pour une école de la confiance, plusieurs d’entre nous ont d’ailleurs demandé une véritable reconnaissance de cette fonction de directeur accompagnée des moyens correspondants.
Madame la rapporteure, monsieur le ministre, je vous remercie encore de nous avoir donné la possibilité de débattre de ce sujet, ô combien important, tant pour les directeurs que pour l’avenir de notre école. La première lecture de ce texte a été l’occasion de mettre en lumière la situation souvent très difficile de nos directeurs et directrices d’école.
Il était important de reconnaître, dans cette proposition de loi, la place particulière qu’ils occupent. À cet égard, je salue les évolutions apportées par nos collègues sénateurs à travers d’utiles modifications qui assurent un meilleur accompagnement de nos directeurs, tout en précisant, à bon escient, leurs missions. La notion d’autorité fonctionnelle établit un juste équilibre entre nécessité de reconnaître le statut de directeur d’école et maintien de l’important principe qui veut qu’il demeure un enseignant au même titre que ses collègues.
Si ce texte vient à juste titre reconnaître le statut particulier de nos directeurs d’école, il ne faut pas oublier qu’ils sont surtout demandeurs de conditions plus favorables pour effectuer correctement leur travail.
Sur la question des rémunérations et des décharges, j’espère que vos services, monsieur le ministre, resteront à l’écoute du terrain pour ne pas perdre les bénéfices d’une situation en amélioration mais qui reste fragile. Rappelons que les directeurs d’école souhaitent avant tout bénéficier de plus de temps pour mener à bien les missions essentielles au pilotage de leur école, au profit de la réussite des élèves. Libérer efficacement du temps pour les directeurs d’école peut se concevoir soit en augmentant les décharges d’enseignement, soit en fournissant une aide administrative.
Il faut ici saluer l’article qui prévoit la mise à disposition de moyens particuliers pour les écoles qui en auraient besoin, sans oublier de souligner, toutefois, que tous les directeurs ont besoin de moyens, que leur école soit petite ou grande, où qu’elle se situe. Si je peux concevoir que l’aide matérielle dépende éventuellement des municipalités, je considère qu’il revient à l’État de garantir une assistance administrative à ces établissements – je présenterai un amendement en ce sens. On ne doit pas créer de disparités entre les communes en mesure de financer aisément des investissements nécessaires et celles qui n’en ont pas la possibilité, et il y en a.
Je veux aussi relayer les interrogations des enseignants et des directeurs à la suite des annonces que le Président de la République a faites à Marseille, annonces qui, il faut le dire, nous ont surpris. Je crois vraiment, monsieur ministre, que les expérimentations peuvent être une bonne chose mais il faut qu’elles soient bien délimitées, bien expliquées, et surtout que le Parlement soit en mesure d’en évaluer les résultats avant de voir s’il est réellement profitable d’opérer un changement. Nous vous avions proposé un amendement en ce sens, mais celui-ci a été malheureusement jugé irrecevable.
Enfin, il est nécessaire de se poser la question de la place des personnes faisant fonction de directeur. S’il ne faut pas remettre en cause la sélection et la formation des directeurs d’école, il importe de donner la priorité à un directeur faisant fonction titularisé durant l’année afin qu’il garde la direction de son école l’année suivante. Je défendrai un amendement en ce sens.
La proposition de notre collègue Cécile Rilhac nous paraît aller globalement dans le bon sens, mais elle ne nous satisfait pas pleinement. Nous voterons pour afin de ne pas nous opposer au dispositif bénéfique qu’elle prévoit. Nous restons toutefois fermement attachés à certaines mesures qui ont été malheureusement écartées et nous continuerons à les défendre afin que les directeurs d’écoles obtiennent des conditions de travail humainement tenables. Pour ne plus recevoir de messages de détresse, pour qu’il n’y ait plus jamais de Christine Renon, nous devons avoir de l’ambition pour notre école, préparer l’avenir de nos enfants et penser l’école de demain : n’oublions pas que nos directrices et directeurs en sont un maillon essentiel.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Maxime Minot applaudit également.) La parole est à Mme Muriel Ressiguier. Les directeurs et les directrices d’école primaire sont aujourd’hui en grande difficulté, faute de moyens et de considération, et ce n’est pas votre proposition de loi, hélas, qui répondra à leurs besoins. Vous saisissez fort opportunément l’occasion de mettre en œuvre votre vision managériale et libérale de l’école, sans toutefois l’assumer ouvertement, ce qui fausse les débats. Toutefois les professeurs des écoles ne sont pas dupes : plusieurs syndicats ont appelé à des rassemblements aujourd’hui devant l’Assemblée nationale, les permanences parlementaires et les directions des services départementaux de l’éducation nationale pour protester contre votre proposition de loi.
Les revendications des directeurs sont pourtant concrètes. Que veulent-ils ? Ils demandent une aide administrative statutaire dans chaque école, un réel allégement des tâches administratives, une augmentation des quotités de décharge de direction et une décharge hebdomadaire. En réponse, vous créez une autorité fonctionnelle qui implique en réalité une autorité hiérarchique qui ne dit pas son nom
(Protestations sur les bancs du groupe LaREM) C’est faux ! …et dont les principaux concernés ne veulent pas. Une consultation lancée en novembre 2019 par le ministère de l’éducation nationale auprès des directeurs d’école le confirme : seuls 11 % d’entre eux se sont dits favorables à la création d’un statut et seulement 3 % ont manifesté le besoin d’avoir plus d’autonomie. Un directeur d’école, ce n’est pas un chef d’établissement, c’est un enseignant chargé de la coordination des équipes pédagogiques, un pair parmi ses pairs, garant d’une collégialité pédagogique. C’est tout à fait ce que nous disons ! S’agissant de la charge de travail, force est de constater que vous leur attribuez des missions et des responsabilités supplémentaires dont le cadre parfois est parfois flou. Ainsi se verront-ils déléguer des fonctions qui étaient auparavant du ressort de l’autorité académique et auront-ils en charge et la formation et la coordination. Désormais les directeurs participeront à l’encadrement du système éducatif, autrement dit le ministère pourra leur confier des missions d’évaluation, par exemple, dans le cadre de l’entretien du rendez-vous de carrière, en utilisant simplement la voie réglementaire.
En outre, ces nouvelles missions définies en concertation avec l’inspection académique passeraient par une négociation individuelle, ce qui brise le cadre statutaire, individualise les missions de chaque directeur et le laisse seul face à sa hiérarchie, sans regard des syndicats. Vous allez donc de fait alourdir la charge de travail des directeurs d’école en leur confiant des missions qu’ils ne demandent pas.
Du reste, ce n’est pas un hasard…
Complotiste ! …si cette proposition de loi est débattue au moment où le Président de la République annonce une expérimentation de l’école du futur à Marseille. Une fois celle-ci entérinée, elle permettra de la généraliser plus rapidement sur tout le territoire. C’est donc un préalable. La vision de l’école-entreprise que vous prônez va être mise en place dans 50 établissements à Marseille. Pour l’heure, les écoles ne se bousculent d’ailleurs pas pour y participer, ce qui devrait vous pousser à vous interroger. Les professeurs des écoles espéraient une rénovation des 174 établissements délabrés. Encore une fois, vous répondez à côté.
Avec cette expérimentation, un directeur d’école aura la possibilité de repenser les projets d’apprentissage, les rythmes scolaires, les récréations, la durée des cours et la façon d’enseigner avec les équipes pédagogiques, titulaires ou non, qu’il aura lui-même recrutées. Ce qui se joue ici, c’est la fin du mode d’affectation actuel des enseignants et donc du lien entre le concours et le poste. En somme, c’est le statut de fonctionnaire des enseignants qui est attaqué. En effet, si cette expérimentation était généralisée, les écoles publiques fonctionneraient alors comme les écoles privées sous contrat : les enseignants qui réussiraient le concours devraient ensuite démarcher l’établissement dans lequel ils souhaitent enseigner.
On est dans la politique-fiction, là ! Non, nous ne sommes pas dans la politique-fiction, chère collègue, mais dans la ligne idéologique que le Gouvernement veut mettre en place et vous vous prêtez à ce jeu. Cette proposition de loi, il est important de le redire, est un préalable à la généralisation à l’école élémentaire de la vision libérale du Gouvernement. Comme elle est déjà à l’œuvre dans l’enseignement supérieur et la recherche, il n’est pas surprenant que vous souhaitiez ainsi l’étendre. La mise en concurrence entre les établissements, les professeurs, le personnel administratif et les agents des écoles sera tout aussi nocive que la mise en concurrence des universités et des chercheurs l’a été pour l’enseignement supérieur et la recherche.
Votre proposition de loi ne répond pas aux problématiques auxquels font face les directeurs d’école et ouvre la boîte de Pandore. C’est pourquoi, bien évidemment, nous voterons contre.
(Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.) La parole est à M. Bertrand Pancher. Régulièrement, nous débattons de la situation des directeurs d’école, conscients que celle-ci n’est plus satisfaisante, compte tenu des difficultés rencontrées au quotidien par ces femmes et ces hommes pourtant si dévoués à leur métier et au service public. Rappelons-nous qu’en 2019, lors de l’examen du projet de loi pour l’école de la confiance, ce sujet avait ressurgi à l’occasion d’un amendement introduit au Sénat qui créait un statut hiérarchique pour ces directeurs d’école, disposition supprimée par la suite. L’an dernier, le débat autour du caractère hiérarchique ou non du statut a refait surface à l’occasion de la première lecture de cette proposition de loi et nous voici, un an plus tard, réunis pour sa deuxième lecture.
Ces deux dernières années ont largement plaidé en faveur d’une évolution du métier de directeur d’école, avec un sentiment d’urgence accru. En septembre 2019, le dramatique suicide de Christine Renon dans son école maternelle à Pantin a remis en lumière le quotidien difficile des directeurs. Dans la lettre qu’elle a laissée, elle racontait sa charge de travail, l’absurdité des tâches administratives et, finalement, la perte de sens de son métier. Ces constats, nous ne les connaissons que trop bien. À cela s’est ajoutée la crise sanitaire qui n’a pas fini de sursolliciter les directeurs d’école et, plus largement, tout le personnel éducatif.
Ce n’est évidemment plus acceptable. Chaque année, nous continuons à déplorer un nombre toujours plus élevé de postes vacants de directeur. Certains directeurs finissent par abandonner, d’autres reconnaissent ne pas avoir demandé à exercer cette fonction, la majorité heureusement fait le choix de rester malgré les difficultés, animés qu’ils sont par le sens du service public et l’amour de la pédagogie.
La consultation mise en place par le Gouvernement a permis de premières avancées, notamment pour limiter le sentiment de solitude des directeurs et pour pérenniser la prime de rentrée. Cependant d’autres messages continuent de susciter des inquiétudes chez les enseignants et les directeurs sur l’avenir de leur profession, et c’est à ces inquiétudes qu’il faut répondre.
Prenons d’abord celles nées de ce texte. Initialement, il était question d’emploi fonctionnel, mais une évolution s’est faite vers la notion d’autorité fonctionnelle.
Or cette autorité fonctionnelle, si elle n’est pas une autorité hiérarchique, continue de diviser.
À cela s’ajoutent les récentes annonces d’Emmanuel Macron à Marseille et son souhait d’expérimenter dès la rentrée 2022, dans une cinquantaine d’écoles de la ville, la liberté, pour les directeurs d’école, de choisir les enseignants de leur équipe pédagogique. Une fois encore, l’idée d’une potentielle autorité hiérarchique est revenue en filigrane alors même, nous le savons, que la profession reste très attachée au fonctionnement en équipe et que beaucoup de directeurs d’école ne souhaitent pas la création d’un statut comparable à celui des chefs d’établissement du second degré.
Surtout, ils tiennent au cumul de leur fonction avec le travail en classe. Les enquêtes menées auprès d’eux l’attestent : ce qui les anime, ce sont les missions pédagogiques et le suivi des élèves. Voilà pourquoi la majorité d’entre eux rejettent l’idée de se voir offrir un statut hiérarchique, qui impliquerait d’appartenir à un autre corps administratif que celui des enseignants.
Ne nous trompons toutefois pas de débat et ne tombons pas dans le piège qui consisterait à penser que la seule question pertinente est de savoir s’il faut ou non créer un statut hiérarchique. La priorité est d’améliorer les conditions de travail des directeurs d’école au quotidien : ils ont besoin de plus de temps de décharge et de soutien humain pour gérer la complexité des tâches au sein de l’école.
Le texte contient des mesures positives qu’il faut saluer, telles que la création d’un référent. Les décharges et la revalorisation de l’indemnité sont renvoyées à des décrets, mais la proposition de loi constitue un premier pas sur ces questions. En revanche, elle n’apporte pas de solution satisfaisante quant à l’absence d’aide administrative et de secrétariat dans certaines écoles.
La diminution drastique des emplois aidés depuis 2017 a créé un vide, obligeant certains directeurs d’école à travailler du lundi au dimanche sans aucune aide. Pour y remédier, le texte propose la mobilisation de jeunes en service civique et la possibilité pour l’État et les collectivités de mettre à leur disposition une aide administrative ou matérielle. Cette mesure, introduite par l’article 2
bis , n’est pas satisfaisante compte tenu des inégalités territoriales et du caractère facultatif de cette assistance. Nous proposerons donc de revenir à la rédaction du Sénat afin que l’État prenne systématiquement en charge ces moyens.
Vous l’aurez compris, le groupe Libertés et territoires conserve ses réserves quant à ce texte, qui répond insuffisamment aux demandes des directeurs et des enseignants, toujours dans l’attente d’une amélioration de leur quotidien.
La parole est à Mme Elsa Faucillon. Nous examinons aujourd’hui, en deuxième lecture, la proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d’école. Nous avons commencé à débattre de ce sujet il y a plus de deux ans, le projet de ce texte étant né après la consultation lancée par le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports à la suite du suicide de Christine Renon à Pantin. Cette directrice d’école avait, comme d’autres, dénoncé la surcharge de travail liée aux tâches administratives et la dégradation des conditions de travail conduisant parfois à une perte de sens du métier. Dans certains territoires, les directrices et les directeurs d’école sont désormais des recours face au démantèlement des services publics et à la diminution du nombre d’interlocuteurs pour les parents. Je suis sûre, chers collègues, que vous avez été comme moi, en tant qu’élus locaux, alertés sur des situations sociales difficiles. Venir en aide aux familles en difficulté est devenu une activité à part entière pour les directrices et les directeurs de l’école.
La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, dite loi sur l’école inclusive, a également alourdi leur charge de travail, tout comme les protocoles sanitaires liés à l’épidémie de covid-19, mais ils n’ont reçu en échange aucune aide supplémentaire. Les missions existantes s’alourdissent et de nouvelles tâches apparaissent : la demande des directrices et des directeurs d’école de bénéficier d’une plus grande décharge de leurs tâches administratives, de meilleures conditions de travail et d’une revalorisation salariale est, dès lors, tout à fait que légitime.
Chacun mesure l’importance d’améliorer significativement les conditions de travail des directeurs et directrices d’école. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine considère, hélas, que cette proposition de loi ne répond pas aux attentes que les directeurs et les directrices d’école expriment depuis si longtemps. Pis encore, certaines mesures contenues dans le texte vont à rebours de leurs exigences.
Plusieurs collègues l’ont souligné, la consultation menée par le ministère a conclu au refus catégorique des directrices et des directeurs d’école d’exercer une autorité hiérarchique sur les enseignants. Avant même la consultation, leur position était connue dans le monde de l’éducation. L’article 1er, qui constitue le cœur du texte, donne pourtant au directeur d’école une autorité fonctionnelle sur les professeurs des écoles. À aucun moment il n’est fait mention du rôle du conseil des maîtres, pourtant central au sein des écoles françaises. Le fonctionnement démocratique du conseil des maîtres fait la particularité de la direction d’école dans notre pays. Nous savons tous combien les personnels pédagogiques de l’éducation nationale sont attachés à cette instance, créée en 1908 afin de favoriser le partage du pouvoir sur les questions pédagogiques. Toutes les tentatives gouvernementales – celle-ci n’est pas la première – de revenir sur ce modèle ont entraîné une levée de boucliers de la part de la profession. L’école française ne reconnaît pas les « petits chefs ». L’autorité et la crédibilité du directeur d’école viennent précisément du fait qu’il est un pair parmi les pairs.
Lors de l’examen de la proposition de loi en commission, des collègues socialistes et insoumis ont tenté de préciser dans la proposition de loi que le directeur n’exerce pas d’autorité hiérarchique à l’égard des enseignants de son école, mais toutes leurs tentatives ont été balayées d’un revers de main. Le Gouvernement n’a visiblement pas voulu rassurer celles et ceux qui ont participé à la consultation du ministère et exprimé leur refus catégorique d’exercer une autorité hiérarchique sur les enseignants… C’est bien une idéologie ultralibérale de l’école qui imprègne ce texte !
L’une de nos collègues a dénoncé il y a quelques instants le prétendu complotisme qui consiste à faire le lien entre cette mesure et l’intention d’Emmanuel Macron d’autoriser des directeurs d’école marseillais à recruter directement leur équipe enseignante. Non, ce n’est pas du complotisme : il s’agit bien d’un projet ultralibéral de l’école !
Veuillez conclure, chère collègue. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous nous opposerons à la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) La parole est à M. Pierre-Yves Bournazel. Permettez-moi tout d’abord de vous féliciter, madame la rapporteure, pour votre engagement et votre travail de terrain afin de défendre cette proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d’école.
Monsieur le ministre, en réponse aux arguments développés par les députés de La France insoumise et, à l’instant, par Elsa Faucillon, je veux rappeler pourquoi nous vous soutenons depuis quatre ans et demi. Ils ont parlé d’école ultralibérale et dénoncé le mépris de la majorité à l’égard des enseignants et des directeurs d’école. C’est tout le contraire, en vérité, et je vais vous dire pourquoi.
On le sait ! Tout d’abord, lorsque l’on augmente le budget de l’éducation nationale comme nous l’avons fait depuis quatre ans et demi, c’est parce que l’on croit à l’école… Et quand on supprime des postes ? …et au principe de l’égalité des chances qu’elle incarne.
Ensuite, lorsque l’on dédouble les classes de CP et de CE1 dans les écoles des réseaux d’éducation prioritaire et dans celles des réseaux d’éducation prioritaire renforcé – c’est-à-dire lorsque l’on donne plus de moyens aux classes élémentaires qui accueillent des enfants dont le capital social et culturel est moindre –, c’est parce que l’on croit à l’école et à l’égalité des chances.
C’est ce gouvernement qui l’a fait et non un gouvernement socialiste ! Vous en avez sans doute le regret.
Mensonges ! Vous auriez pu prendre de telles mesures quand vous étiez aux responsabilités, mais vous ne l’avez pas fait ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Mme Maud Petit applaudit également.)
Lorsque nous avons fait la réforme du bac et de l’orientation, nous avons défendu cette même vision de l’éducation et nous avons garanti l’égalité des chances qui fonde le pacte républicain et la mission de l’école.
Enfin, monsieur le ministre, si nous vous soutenons depuis quatre ans et demi, c’est parce que vous avez toujours défendu avec cohérence et constance la République et la laïcité au cœur de l’école. Cela nous paraît essentiel car l’école doit permettre à chaque enfant de s’émanciper et de construire son propre avenir et sa liberté.
Chers collègues, nous aimons l’école et nous soutenons les directrices et les directeurs d’école tout comme nous soutenons les enseignantes et les enseignants. Ce sont les architectes du monde de demain parce qu’ils préparent l’avenir de nos enfants. C’est la raison pour laquelle nous avons travaillé, avec Mme la rapporteure, à l’élaboration de ce texte.
Les directeurs d’école exercent de nombreuses responsabilités. C’est peu de le dire, la direction d’une école constitue un engagement à temps plein. Afin de remplir correctement leur mission, il leur manque, d’une part, le temps et les moyens adéquats, et, d’autre part, une fonction reconnue comme telle. La situation actuelle génère évidemment des tensions et un sentiment d’impuissance, voire de lassitude, chez ces professionnels, à tel point qu’il est devenu très difficile d’attirer les jeunes générations vers des postes de directrice ou de directeur d’école. Un trop grand nombre de postes restent d’ailleurs aujourd’hui vacants.
Depuis 2017, le Gouvernement a agi. Il a accordé une plus grande reconnaissance aux chefs d’établissement en leur attribuant de nouveaux moyens financiers, humains et matériels, en leur allouant un jour de décharge supplémentaire et en alignant le régime de décharge des écoles élémentaires sur celui des écoles maternelles. Le Gouvernement a également mis en place un nouveau système d’accompagnement des directeurs d’école, renforcé leur rôle de pilote pédagogique et versé à chacun d’eux une prime de rentrée de 450 euros en février 2021.
Un monde merveilleux ! Avec ce texte, nous allons revaloriser le sens même de leur mission au cœur de l’école et de notre projet pour l’égalité des chances. La proposition de loi vient affirmer le statut décisionnaire du directeur d’école sur le plan pédagogique et dans la vie quotidienne de l’établissement. Il est primordial d’inscrire dans le marbre de la loi les missions afférant à la fonction pour légitimer le statut du directeur d’école auprès de l’équipe pédagogique comme auprès des parents d’élèves, dont il est le premier interlocuteur.
Le groupe Agir ensemble considère que la proposition de loi va dans le bon sens en valorisant le statut des directeurs d’école et en les y préparant par une solide formation préalable. Pilier de l’éducation nationale, les directrices et les directeurs d’école veillent au bien-être de tous et à la réussite de chacun. Voilà la priorité ! Il est donc décisif que la loi accorde une plus grande légitimité aux directeurs d’école, à la hauteur de leur mission et de leur travail.
Quand on aime l’école et quand on veut la servir, quand on pense à l’avenir des enfants et qu’on veut soutenir les directrices et les directeurs d’école, les enseignantes et les enseignants, on ne cherche pas à les monter les uns contre les autres, mais à les rassembler. C’est précisément ce que nous faisons depuis quatre ans et demi.
Lorsque des budgets importants sont alloués à l’école et lorsqu’une réforme historique comme le dédoublement des classes est mise en œuvre, le rôle de l’opposition devrait être de soutenir la politique du gouvernement plutôt que de la critiquer !
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.) La parole est à M. Maxime Minot. Gangrenée par le communautarisme et le multiculturalisme, pervertie par la déconstruction, touchée par l’ensauvagement de la société, l’école de la République est indéniablement en danger. Sa mission essentielle de transmission des connaissances et des valeurs de la République, dans le refus de toute discrimination, est chaque jour davantage remise en cause. Fini, la recherche de l’excellence, le mérite et l’apprentissage du respect de chacun ! Les trop nombreux renoncements et le nivellement par le bas ont conduit à la situation actuelle.
Cette situation n’est pas une fatalité. Il est encore temps d’inverser une tendance dangereuse pour notre avenir. En qualité d’élus de la nation, il est de notre responsabilité de redonner à l’école ses repères, un cap à suivre et des moyens à la hauteur des enjeux. La proposition de loi que nous examinons en deuxième lecture contribue très indirectement à cette mission en remédiant à un vide juridique préjudiciable pour le bon fonctionnement de nos écoles.
Les attentes sur le terrain sont fortes car, cela a été rappelé, les missions confiées aux directeurs d’école se sont particulièrement étoffées ces dernières années. Dans 85 % de nos écoles, les directeurs sont des enseignants qui assurent des responsabilités de direction en plus de leur charge d’enseignement. Leur pouvoir de décision est limité, mais leur charge de travail supplémentaire s’alourdit au fil du temps.
En les obligeant à instaurer un protocole évolutif et à faire face à des situations diverses, la crise sanitaire a été un puissant révélateur de la place qu’ils occupent et des carences statutaires dont ils pâtissent. Je tiens cependant à saluer le professionnalisme dont ils ont fait preuve tout au long de cette période. Si l’ambition d’apporter une reconnaissance aux missions et aux responsabilités des directeurs d’école n’est pas nouvelle, la question s’est donc posée avec une acuité accrue ces derniers mois. Le
statu quo n’est ni tenable, ni souhaitable.
Tout ce qui peut améliorer la bonne marche des établissements et l’attractivité de la profession va dans le bon sens. Ainsi, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, nous avons été animés d’un esprit ouvert et constructif, à condition que la loi ne se défausse pas – comme elle le fait trop souvent – sur le pouvoir règlementaire. C’est pourquoi le groupe Les Républicains est favorable à la création d’un statut donnant aux directeurs d’école d’abord une reconnaissance, ensuite de l’autonomie et enfin des moyens supplémentaires.
Compte tenu des échanges que j’ai pu mener dans ma circonscription et des réserves qui ont été soulevées, je précise à mon tour que si la mention a été supprimée par le Sénat, l’autorité dont disposeront les directeurs d’école ne sera pas hiérarchique mais bien fonctionnelle
(Mme Maud Petit applaudit) ; c’est nécessaire à l’accomplissement de leurs missions, qui s’avèrent spécifiques et particulières.
Néanmoins, permettez-moi de formuler trois regrets. Nous déplorons d’abord que certaines modifications du Sénat n’aient pas été retenues alors qu’elles nous apparaissent opportunes, comme celles relatives à la formation des directeurs. Il me semble en effet particulièrement utile, compte tenu des exigences du poste, que les directeurs soient soumis à une formation certifiante.
De même, à l’article 2
bis , la commission a rétabli la possibilité, pour les communes ou leurs groupements, d’apporter aux directeurs d’école une aide matérielle et administrative s’ajoutant à celle de l’État. Or le Sénat avait – à raison – modifié le texte, afin d’alerter sur le risque fort d’inégalité entre les communes et groupements qui pourront apporter ces aides précieuses et celles qui ne le pourront pas, d’autant qu’il s’agit avant tout, il faut le rappeler, d’une compétence de l’État. Les écoles rurales risquent d’être les premières touchées par cette rédaction, à moins que l’État ne s’engage à compenser le déséquilibre, mais nous savons comment les choses se terminent, trop souvent, sur le terrain.
Le deuxième regret a trait à la méthode employée, qui consiste à légiférer par morceaux pour faire plaisir à la majorité. En effet, que de temps perdu ! Il aurait sans doute été plus utile d’inclure cette mesure dans la loi pour une école de la confiance.
Nous regrettons enfin, troisièmement, de ne pas avoir pu vous convaincre d’adopter plusieurs de nos propositions, notamment celles de notre collègue Constance Le Grip, qui permettraient pourtant de mettre la majorité au diapason des annonces présidentielles. Les amendements en question ont été jugés irrecevables, mais j’espère que nous aurons l’occasion d’en débattre dans les minutes qui viennent.
Monsieur le ministre, chers collègues, je ne doute pas que nous arriverons à un accord sur ce texte indispensable, qui participe indéniablement à améliorer le fonctionnement de nos écoles. Pour sa part, le groupe Les Républicains, que je représente, votera pour.
Pour conclure, permettez-moi de formuler un vœu : je souhaite que l’école de la République retrouve rapidement sa boussole, afin qu’elle redevienne ce lieu de savoir et d’exigence qu’elle ne devrait jamais cesser d’être.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe LaREM.) La parole est à Mme Maud Petit. « Un directeur d’école dispose de pouvoirs dont jamais Premier ministre ne fut investi », avait dit Winston Churchill. En effet, dans l’enseignement primaire, le directeur veille à la bonne marche de chaque école maternelle ou élémentaire et prend toute disposition pour que l’école assure sa fonction de service public, celle qui, depuis la loi de 2013 pour la refondation de l’école de la République, l’enjoint à être « un lieu de réussite, d’autonomie et d’épanouissement pour tous ; un lieu d’éveil à l’envie et au plaisir d’apprendre, à la curiosité intellectuelle, à l’ouverture d’esprit ».
Le directeur d’école s’assure de réunir les meilleures conditions pour cultiver les adultes de demain : vaste tâche et lourde responsabilité ! Il était donc devenu nécessaire de définir clairement sa fonction. Quelle mission, quels devoirs, quel rôle, quels outils et quel cadre pour les directrices et directeurs d’écoles ?
Tel est l’objectif de la proposition de loi défendue par notre collègue Cécile Rilhac, dont nous débutons aujourd’hui la seconde lecture. Son texte s’attache ainsi à faire évoluer les missions et les responsabilités des directeurs d’école, qui se sont régulièrement trouvées au cœur des débats concernant la politique publique en matière d’enseignement scolaire.
Nos directeurs d’école, outre qu’ils ne disposent pas d’un cadre juridique cohérent, ne bénéficient pas de la reconnaissance qui devrait pourtant leur être accordée. La révision de leur fonction est réclamée par beaucoup ; elle est indispensable, tant le champ de leurs prérogatives et des tâches qui leur incombent s’est étendu.
La fonction de directeur d’école souffre de manques bien identifiés : faible valorisation salariale, manque de temps et de soutien administratif, tâches trop lourdes, défaut d’accompagnement et de reconnaissance au cours de la carrière, solitude. Pourtant, les responsabilités qui s’y attachent sont importantes.
Ainsi, la proposition de loi présentée cet après-midi en séance est le fruit à la fois d’une vaste consultation du public concerné, de la volonté ministérielle d’améliorer la situation des directeurs et d’un travail constructif et réfléchi mené par nos deux chambres.
L’article 1er définit les missions essentielles du directeur d’école et acte son rôle décisionnaire. Le directeur reste cependant un enseignant comme les autres, faisant partie intégrante de l’équipe pédagogique. Ce principe du
primus inter pares , au fondement de la conception du travail, coopérative et horizontale, qui prévaut dans le primaire, reste inchangé. Les professeurs y sont d’ailleurs particulièrement attachés, en ce qu’il préserve leur autonomie pédagogique.
L’article 2 crée un emploi fonctionnel de directeur d’école et acte la nécessité d’une formation préalable, ce qui permettra notamment au directeur de bénéficier d’une indemnité de direction spécifique annuelle, de poursuivre sa carrière dans son corps d’origine de façon accélérée, et d’être désormais déchargé de classes dans les établissements comptant au moins huit classes.
En commission, plusieurs amendements ont rappelé l’importance de l’autonomie et du dialogue social. Ainsi, les membres du groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés ont obtenu que soit assouplie l’obligation de formation tous les cinq ans, ajoutée par le Sénat, en appelant à préférer une offre de formation régulière. Il nous a paru sain de laisser au corps enseignant la liberté de s’organiser et de travailler en se concertant sur cette question.
Concernant l’article 2
bis , notre groupe s’est positionné, comme la rapporteure, en faveur du rétablissement de la version initiale du texte, qui nous semble plus équilibrée puisqu’elle ouvre à l’État la possibilité de se charger des compétences d’assistance administrative et matérielle, mais sans que cela soit rendu obligatoire. Cette version intègre également les collectivités locales qui sont, rappelons-le, les principales actrices de la politique éducative dans les territoires ; il est donc essentiel de les impliquer dans de telles décisions.
S’agissant de l’article 3, une inquiétude est remontée du terrain à propos des missions des référents direction d’école, qui doivent être définies par décret. Afin de rassurer les personnels concernés, pourriez-vous, madame la rapporteure, monsieur le ministre, réaffirmer ici les objectifs d’accompagnement et de dialogue qui seront au cœur de l’action de ces référents ?
Enfin, nous ne défendrons pas d’amendement visant à rétablir l’article 4, supprimé par le Sénat, mais nous pensons que le sujet de la participation du directeur à l’organisation du temps périscolaire devra être abordé ultérieurement.
Grâce à la présente proposition de loi, je veux croire que nous apporterons à nos directeurs d’école le cadre et les outils indispensables pour que l’école cultive encore et toujours les talents de demain. Ainsi, vous l’aurez compris, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour toutes ces raisons, le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés votera en faveur de son adoption.
(Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – M. Pierre-Yves Bournazel applaudit également.) La parole est à Mme Michèle Victory. L’école est cet espace particulier, à la fois sanctuaire permettant le développement des enfants et fenêtre grande ouverte sur le monde ; c’est un lieu dans lequel les enfants de notre pays peuvent apprendre, se dépenser, penser et construire leur citoyenneté.
Afin de les aiguiller et de les accompagner dans ce projet exigeant, les personnels encadrants de nos écoles accomplissent un travail formidable, œuvrant au quotidien à l’épanouissement des enfants dont ils ont la responsabilité. Je veux ici remercier l’ensemble des personnels éducatifs en grève la semaine dernière et ceux qui ont manifesté aujourd’hui ; ce quinquennat, marqué par un manque de considération et d’écoute, aura été pour eux source d’inquiétude – les propos du Président de la République n’auront rien arrangé.
Le texte que nous examinons, s’il a permis de débattre de la situation des directeurs et des directrices d’école – je sais l’attachement de Mme la rapporteure à ces questions –, n’est pas satisfaisant. Les directeurs et directrices sont en effet le fil conducteur garantissant le bon fonctionnement des établissements ; ils défendent le pouvoir d’agir dans un esprit de collégialité et de responsabilité.
Nous avons auditionné plusieurs syndicats représentant la profession et nous avons écouté ce que les femmes et les hommes concernés demandent ; à l’évidence, nous n’avons pas entendu les mêmes choses ! Leurs attentes sont très claires et je me permets de les rappeler : ils veulent une augmentation du temps de décharge, une simplification des tâches – souvent chronophages –, une aide humaine dans la gestion des missions et une revalorisation de leur métier. Finalement, la plupart réclament un allègement de leur charge quotidienne, eu égard à des conditions de travail qui se sont dégradées dans un contexte de plus en plus tendu au fil des ans, assignant à l’école la lourde tâche de réparer tout ce que la société peine à corriger.
En augmentant leurs tâches annexes tout en supprimant des emplois aidés, la proposition de loi issue de la commission conduit à alourdir leurs missions sans leur fournir les moyens adéquats ; son contenu ne saurait donc nous satisfaire, d’abord parce que, contrairement à ce que nous avions décidé en première lecture, vous avez choisi de revenir à l’instauration d’une autorité fonctionnelle, concept que fort peu de directeurs revendiquent. Le conseil des maîtres permet déjà, dans le cadre d’un dialogue ouvert, la prise de décisions nécessaires au bon fonctionnement de l’école.
Monsieur le ministre, madame la rapporteure, si l’école est une entreprise humaine à la recherche de l’épanouissement de nos enfants, elle ne peut en aucun cas devenir une entreprise soumise aux lois du marché et de la rentabilité.
(Mme Muriel Ressiguier applaudit.) Car, s’il est un constat partagé, c’est bien celui de l’appétence pour le travail collégial. Il peut donc être question d’inscrire dans la loi un quelconque lien de subordination ou de hiérarchie, même de manière déguisée.
En commission, plusieurs d’entre nous vous ont demandé une rédaction claire et sans ambiguïté concernant la place et le rôle des directeurs et directrices. Or la rédaction que vous avez choisie est de nature à distiller doutes et craintes dans l’esprit des intéressés. Cette disposition risque finalement d’être une source de tensions inutiles entre enseignants, pour lesquels la notion de relation de pair à pair reste fondatrice. Nous demandons sa suppression ainsi que l’inscription dans la loi de l’absence de lien hiérarchique entre les directeurs, les directrices et les enseignants. C’est assez simple : un sujet, un verbe, un complément !
Il est à craindre que les directeurs et les directrices se retrouvent à effectuer des missions supplémentaires liées à la formation, à la coordination ou à l’inclusion, assorties d’objectifs à atteindre. Or ces axes de travail, s’ils sont essentiels, doivent rester le fruit d’un dialogue fluide entre les autorités administratives, les équipes et les familles.
Nous nous interrogeons également sur la bonification indiciaire ainsi que sur les indemnités et les primes : elles méritent d’être augmentées, alors même que le dialogue social apparemment instauré n’a pas permis d’obtenir un consensus large sur ces questions. Il en est de même pour les temps de décharge, qui devraient être sanctuarisés. C’est une des clés du problème : la quantité de travail consacrée par les directrices et les directeurs à leurs responsabilités ne relève pas d’un calcul purement mathématique, car certaines tâches sont incompressibles. De plus, nous l’avions déjà évoqué en première lecture, le manque de remplaçants susceptibles de venir soutenir les équipes reste un problème majeur. La question de l’attractivité des métiers de l’enseignement dans leur ensemble se pose toujours avec acuité, à l’heure où trop de postes restent vacants faute de candidats.
À cet égard, nous avons déposé un amendement visant à introduire plus de souplesse dans les conditions d’inscription des enseignants sur la liste d’aptitude à la fonction de directeur d’école ; si nous pensons qu’elle doit être préalable à la prise de fonction, son absence ne doit pas être un frein à la réalisation d’un projet.
Nous serons toujours favorables à l’apport d’une assistance matérielle et humaine aux personnels, dès lors qu’elle s’effectue concrètement, grâce à des moyens budgétés et chiffrés. Ainsi, nous sommes aussi attachés à ce que l’État ait la capacité, partout sur le territoire national, de donner aux équipes les moyens nécessaires à leur bon fonctionnement. Les inégalités territoriales doivent être corrigées par la volonté d’un État pleinement engagé aux côtés de ses enseignants et de sa jeunesse pour mener une politique ambitieuse d’émancipation.
La revalorisation de la fonction de directeur d’école, que tous et toutes appellent de leurs vœux, ne peut être satisfaite par les propositions que vous nous faites. Pour toutes ces raisons, le groupe Socialistes et apparentés votera contre le texte.
(Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, FI et GDR.) La discussion générale est close.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux assemblées n’ont pu parvenir à un texte identique.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon. En novembre 2019, plus de 29 000 directrices et directeurs d’école ont répondu à une consultation réalisée par le ministère de l’éducation nationale à propos de leurs conditions de travail – cela a été dit tout à l’heure mais il convient de le répéter. Or 89 % d’entre eux ne mentionnaient pas la création d’un statut spécifique comme une piste concrète d’amélioration, et 97 % ne disaient pas avoir besoin de davantage d’autonomie ni vouloir prendre des décisions sans l’aval de leur supérieur hiérarchique direct.
Le Gouvernement a-t-il pris en compte leurs réelles demandes en aides humaines pour accroître leur temps de décharge et alléger leurs tâches ? Comment élaborer des lois sans prendre en compte les réels problèmes de l’éducation nationale et des personnes y travaillant ? À travers les chiffres cités, vous voyez vous-même que chacun est attaché au modèle actuel et qu’il y a besoin, non de nouveaux chefs, mais de moyens pour mieux fonctionner.
L’école n’est pas une entreprise et ne pourra jamais fonctionner comme telle. À cette occasion, comment pouvons-nous laisser les directrices et directeurs d’école choisir leurs enseignants ? Vous savez autant que moi qu’un tel dispositif entraînera des injustices, certains enseignants et enseignantes étant choisis en raison d’affinités de culture, d’appartenance à un réseau ou d’apparence physique. Certains seront donc mis de côté, malgré leurs compétences et leur envie de travailler, ce qui ne fera qu’accentuer les difficultés que nous rencontrons dans les écoles ultramarines. Rappelons qu’un directeur n’exerce pas d’autorité hiérarchique sur les enseignants de son école.
Il s’agit donc ici de la fin d’un service public national car la fonction de directeur, donc l’organisation de l’école, varient en fonction de critères encore indéterminés. Cet article est mal venu.
La parole est à Mme Sylvia Pinel. L’article 1er concentre les principales inquiétudes que nous inspire cette proposition de loi.
Il rouvre un débat ancien et sensible à propos d’un éventuel statut hiérarchique pour les directeurs et directrices d’école. Certes, tel que rédigé, il ne crée pas de hiérarchie formelle entre les directeurs et les enseignants. Cependant, nos collègues sénateurs ont inscrit une autorité fonctionnelle qui vient alimenter la crainte qu’un tel statut hiérarchique interviendra tôt ou tard, avec le risque que le directeur ne soit plus considéré comme un pair parmi les pairs. Pire : le Sénat a supprimé une précision adoptée ici en première lecture, selon laquelle le directeur n’aurait pas d’autorité hiérarchique sur les enseignants, qui était de nature à apaiser un peu les inquiétudes qui nous remontent du terrain.
Les directrices et les directeurs ont besoin de davantage de temps, d’une aide humaine systématique, et non pas d’une autorité hiérarchique. Les résultats de la consultation menée par le Gouvernement en 2019 corroborent mes propos puisque les directeurs d’école plébiscitent l’aspect pédagogique au détriment des tâches administratives et logistiques : plus de 80 % d’entre eux estiment que le suivi collectif des élèves, le travail en équipe et l’élaboration des dispositifs d’aide constituent le cœur de leur métier. Voilà pourquoi ils craignent de se voir offrir un statut hiérarchique qui les ferait appartenir à un autre corps administratif que celui des enseignants.
Enfin, l’autorité fonctionnelle, telle que prévue par cet article, fait courir le risque d’isoler les directeurs en les éloignant de leurs pairs, au détriment de la cohérence d’équipe.
La parole est à Mme Jacqueline Dubois. La présente proposition de loi renforce les missions et l’autonomie du directeur d’école par l’instauration d’une délégation de compétences de l’autorité académique. Cela était tant attendu !
À l’initiative des sénateurs, l’article 1er confère une autorité fonctionnelle aux directeurs et directrices d’école. Le texte prévoit que le directeur organise les débats sur les questions relatives à la vie scolaire. Il bénéficie d’une délégation de compétences de l’autorité académique pour le bon fonctionnement de l’école qu’il dirige et la réalisation des missions qui lui sont confiées. Cette autorité fonctionnelle ne confère pas aux directrices et directeurs de lien hiérarchique à l’égard des autres enseignants de l’école : ils en restent les pairs et ne deviennent pas leurs supérieurs. Il s’agit de compléter et de renforcer leur autonomie pour entériner les décisions prises collectivement lors du conseil d’école ou du conseil des maîtres, les mettre en œuvre et faciliter la réalisation de projets d’école et des projets pédagogiques.
En outre, grâce à une disposition ajoutée en commission, la place et le travail des chargés d’école seront reconnus dans la loi. Cette mention apporte une reconnaissance aux plus de 3 500 enseignants exerçant en classe unique, souvent constituée de plusieurs niveaux, au cœur des villages ruraux. Tout comme le directeur, ils veillent au fonctionnement et à l’organisation de l’école, aux bonnes relations avec les élus et les parents d’élèves. Au sein des regroupements pédagogiques intercommunaux, ils s’assurent de travailler en coordination avec les autres enseignants.
Redéfinir les missions des directeurs, affirmer leur autorité fonctionnelle, reconnaître les chargés d’école, c’est ainsi que la majorité et le Gouvernement montrent leur attachement à l’école primaire et à ceux qui en assurent au quotidien le bon fonctionnement, y compris dans les toutes petites écoles rurales.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Michel Larive, pour soutenir l’amendement no 35, tendant à la suppression de l’article. Par cet amendement, nous nous opposons à la délégation de compétences de l’autorité académique aux directrices et directeurs d’école ainsi qu’à la création d’une autorité fonctionnelle pour ces enseignants.
Premièrement, nous refusons que les directrices et directeurs s’inscrivent dans une nouvelle chaîne hiérarchique dans laquelle ils deviendraient les « managers » de leur école. Le Grenelle de l’éducation, organisé par le Gouvernement, propose, dans la synthèse de ses travaux, de créer un « statut de directeur en leur conférant une autorité décisionnelle et fonctionnelle » pour en faire un fonctionnaire « au leadership assumé », installé dans une « culture du management ». Ce n’est pas notre conception du service publique de l’éducation nationale.
Deuxièmement, je rappelle que plus de 89 % des 29 000 directrices et directeurs d’école, qui ont répondu à la consultation de novembre 2019 sur leurs conditions de travail, n’évoquent pas la création d’un statut comme une piste concrète d’amélioration. Vous vouliez savoir quelles étaient nos sources ? Les voilà ! Ces données sont d’ailleurs corroborées par les syndicats. Ceux qui en doutent auraient pu aller les voir devant l’Assemblée nationale à treize heures, comme ils y étaient invités. En revanche, les directeurs demandent des aides humaines, plus de temps de décharge et un allégement de leurs tâches, autant de choses que le Gouvernement et la majorité présidentielle refusent de leur accorder.
Enfin, les compétences déléguées aux directrices et aux directeurs ne sont pas mentionnées dans cet article. Les contours de cette autorité fonctionnelle ne sont pas non plus définis. Comment accepter d’insérer dans le code de l’éducation des termes aussi flous ?
L’école ne peut pas fonctionner sur le modèle de l’entreprise, avec l’instauration de managers dans chaque établissement. Il existe actuellement un supérieur hiérarchique, l’inspecteur de l’éducation nationale, et un fonctionnement collégial au sein de chaque école. Nous sommes attachés à ce modèle, comme la très grande majorité des enseignants.
Quel est l’avis de la commission ? Je serai évidemment défavorable à cet amendement qui s’inscrit dans la logique de votre motion de rejet, monsieur Larive, et qui tend à supprimer un article modifiant le cadre juridique de l’exercice de la fonction de directeur d’école.
Nous sommes, nous aussi, attachés à la collégialité au sein des écoles primaires. Ce texte, répétons-le, ne modifie en rien l’organisation du conseil des maîtres et des conseils d’école – ils sont inscrits dans le code de l’éducation et nous n’y touchons pas.
En revanche, l’article 1er reconnaît explicitement les missions des directeurs d’école, qui ne sont actuellement reconnues que de manière implicite : l’article L. 411-1 du code de l’éducation ne mentionne que l’« exercice des fonctions spécifiques » par les directeurs. C’est tout aussi flou, pour reprendre votre terme.
Contrairement à ce que vous dites, monsieur Larive, les directeurs demandent une certaine autonomie, non pour eux-mêmes, mais pour leur équipe pédagogique. Pour la réussite de leurs élèves, ils souhaitent avoir les moyens de piloter et de mettre en œuvre les projets de leur école, décidés collectivement au sein du conseil des maîtres. Ils souhaitent aussi plus d’autonomie afin de pouvoir prendre des décisions plus rapidement, en particulier en matière de sécurité, au lieu d’avoir à appeler leur inspecteur et lui demander de signer tel ou tel document, la paperasserie occasionnant une perte d’énergie et de temps. Ce texte permettra de mettre un terme à une espèce d’infantilisation subie par les directeurs d’école depuis plusieurs décennies.
Revenons à vos sources, monsieur Larive. Quand vous citez le taux de 89 %, vous omettez de dire que l’enquête du ministère posait une question très ouverte aux directeurs d’école. Il leur était demandé de s’exprimer spontanément sur les pistes d’amélioration possibles. Quelque 11 % d’entre eux ont spontanément demandé un statut hiérarchique, alors que la question ne leur était pas posée de manière directe.
Et les autres ? 100 moins 11, ça fait 89 ! De nombreux directeurs d’école et enseignants étaient à l’extérieur de l’Assemblée nationale à treize heures, dites-vous. Pour ma part, je tiens à saluer ceux qui sont présents dans cet hémicycle et qui représentent, eux aussi, leur syndicat. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Quel est l’avis du Gouvernement ? Nombre d’arguments ont déjà été échangés concernant cet article essentiel de la proposition de loi. Tout d’abord, je ferai une remarque générale, dans la lignée des propos tenus par M. le député Bournazel. Nos débats doivent s’articuler autour des objectifs clairs que nous affichons pour l’école primaire comme pour l’ensemble du système scolaire : élever le niveau général et réduire les inégalités sociales. Nos propositions pour les directeurs d’école s’inscrivent dans cette volonté globale.
Qu’il soit dans l’opposition ou la majorité, nul ne doit faire à personne le procès de poursuivre d’autres objectifs que ceux qu’il affiche. Certains ont parlé de dérégulation, de vision néolibérale, etc. Tout cela est faux et ne correspond à rien. Plusieurs intervenants ont d’ailleurs répondu que, plus qu’aucun autre, ce gouvernement a augmenté le budget de l’éducation nationale et renforcé les réseaux d’éducation prioritaire. Si vos accusations étaient fondées, nous n’aurions pas fait cela ni enclenché le Grenelle de l’éducation.
Incroyable ! Que ne sommes-nous pas obligés d’entendre ! Nos méthodes pour parvenir au résultat ne vous conviennent peut-être pas, mais lorsque vous laissez entendre que nous poursuivons d’autres objectifs que ceux que nous affichons, vous entrez dans une logique qui fragilise la démocratie. Pourquoi postuler toujours la mauvaise foi de l’interlocuteur ? Moi, je ne postule aucune mauvaise foi de votre part, mesdames et messieurs les députés de l’opposition. (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SOC et GDR.) Je vous fais totalement crédit de poursuivre réellement les objectifs que vous affichez, de vouloir réellement lutter contre les inégalités sociales. Je pense que vous êtes tout à fait convaincus. En revanche, je ne suis pas d’accord avec vous sur le chemin à prendre. En entendant vos propos, je trouve d’ailleurs que vous défendez une position très conservatrice : vous voulez le statu quo , surtout ne rien changer. C’est faux ! Nous voulons plus de moyens et plus de décharges ! Chers collègues, s’il vous plaît. Après tout, nous pouvons en discuter, sachant que je suis convaincu de votre volonté d’avoir un service public de l’éducation nationale fort. De votre côté, ne doutez pas de notre volonté de renforcer le service public de l’éducation nationale, en renforçant les directeurs et directrices d’école.
Vous avez le droit de penser que notre chemin n’est pas le bon, mais sachez que notre but est très clair et affiché : renforcer le service public de l’éducation nationale, ce qui permettra d’élever le niveau général et de lutter contre les inégalités sociales, en donnant plus de force aux directeurs et directrices d’école. Comme vient de le rappeler la rapporteure, cela revient à renforcer les équipes. Nous visons l’exact inverse de la caporalisation redoutée par certains : donner plus de pouvoir au terrain, le directeur et la directrice d’école incarnant l’équipe au quotidien.
La notion d’autorité fonctionnelle est pragmatique en ce qu’elle permet des délégations de compétences de la part des inspecteurs de l’éducation nationale qui, notez-le, sont très demandeurs de cette évolution, loin de toute vision verticale et d’idée de conquête du pouvoir par les uns ou par les autres, car le sujet n’est pas celui-là. Il s’agit d’avoir une vision efficace, au plus près du terrain. Grâce à cette évolution, les inspecteurs et inspectrices de l’éducation nationale pourront consacrer plus de temps au soutien, à l’appui des équipes, notamment sur le plan pédagogique.
Comme l’a souligné la rapporteure, l’article 1er va réduire la bureaucratie : le directeur ou la directrice pourra prendre des décisions du quotidien – pour les sorties scolaires, par exemple – sans avoir nécessairement à remplir un papier pour l’inspecteur de l’éducation nationale. Aussi essentielle que l’autorité fonctionnelle, la délégation de compétences est pragmatique et s’inscrit dans une logique de confiance dans les acteurs. Faisons confiance aux interlocuteurs – en les créditant de leur bonne foi – et aux directeurs et directrices d’école.
Pierre angulaire de cette proposition de loi, l’article 1er constitue une évolution très importante, nous ne disons pas le contraire. Ses dispositions sont également très pragmatiques, et ne bouleversent en rien ce qui fonctionne dans l’école primaire en France.
En revanche, l’adoption de ce texte permettra de débloquer certains des points qui ressortent de l’enquête réalisée par le ministère, et dans laquelle les directeurs d’école se plaignent avant tout de la surcharge administrative et des difficultés du quotidien. Nous y avons partiellement porté remède au travers des mesures que j’ai énumérées précédemment. Il s’agit ici d’y répondre à travers l’autorité fonctionnelle des directeurs d’école et la délégation de compétences de l’autorité académique à ces enseignants.
Je terminerai en soulignant, comme je l’ai fait durant la présentation du texte, que, dans ce genre de circonstances, la comparaison internationale est loin d’être inutile. Si nos idées étaient si absurdes que vous le prétendez, il faudrait aussi considérer comme telle la façon dont fonctionnent certains pays. Or il est des sociétés qui appliquent une logique de travail en équipe, de responsabilisation et d’autonomie renforcée à l’école primaire et qui s’en portent bien.
On pourrait parler de la Suède, par exemple ! Ouvrons nos fenêtres, sachons évoluer plutôt que de camper sur des positions conservatrices – qui sont évidemment les plus simples à défendre – et réfléchissons aux moyens de moderniser notre école primaire, tout en conservant ce qu’elle a d’excellent.
J’ai eu l’occasion de le rappeler – et, de ce point de vue, je m’inscris en faux contre le tableau catastrophique fait par le député Minot, même si ce dernier n’est plus présent : non, l’école primaire française ne se dégrade pas. Au contraire, elle se renforce. Je ne reviendrai pas sur les mesures que j’ai déjà exposées concernant les savoirs fondamentaux, la logique de formation continue, les plans en faveur de l’enseignement du français et des mathématiques, ou encore les évaluations qui ont lieu en ce moment même : tout cela montre que nous concentrons nos moyens sur ce qui permet aux élèves de réussir.
Ne cultivons pas le pessimisme afin de nourrir des arguments politiques. Soyons au contraire optimistes et constructifs. Essayons aussi d’être le plus unis possible, car ce n’est que si la société est unie autour d’elle que l’école peut fonctionner. Créons les conditions d’une école primaire fonctionnant au mieux. Cela passera par l’application d’une logique de confiance, de responsabilisation et de prise de décision au plus près du terrain. Or, ces décisions, ce sont précisément les directeurs d’école qui peuvent les prendre, car ce sont eux qui travaillent avec leurs équipes au quotidien et sont à leur écoute.
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Agir ens. – Mme Sophie Mette applaudit également.) La parole est à Mme Sabine Rubin. Il est vrai, monsieur le ministre, que nous ne partageons absolument pas votre vision de l’école, ni même de la société. Avant de transformer quoi que ce soit – d’être « progressiste », comme vous dites –, il me semble que vous devriez renforcer l’institution dont vous avez la charge, car elle se délite complètement, à tel point que plus personne ne veut y venir. Quoi que vous en disiez, et malgré l’emploi – que je trouve, pour ma part, quelque peu hypocrite – des termes « revalorisation » et « reconnaissance », l’article 1er modifie profondément la fonction de directeur d’école, quand personne ne vous le demandait.
Les directeurs d’école ne demandent pas à devenir les délégataires de compétences de l’autorité académique ! De quelles compétences s’agit-il, d’ailleurs ? De celles de l’inspecteur d’académie (IA), de celles du directeur académique des services de l’éducation nationale (DASEN), ou de celle du recteur ? Tout cela est très flou ! Que demandent les directeurs d’école ? Simplement à disposer d’un pouvoir de décision – avec l’appui, selon l’urgence, du conseil d’école ou du conseil des maîtres – sur certaines procédures qui incombent actuellement aux IEN ou au DASEN. Ces procédures seraient d’ailleurs très étroitement circonscrites, puisqu’elles se limiteraient à celles qui facilitent le travail de l’école et son bon fonctionnement.
C’est bien ce qui est prévu ! Non ! Avoir un pouvoir de décision sur certaines procédures, ce n’est pas la même chose qu’être délégataire de l’autorité académique… Mais si ! …– ou alors, il faut retourner à l’école ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) S’il vous plaît, mes chers collègues. Par ailleurs, quand la délégation de l’autorité académique s’accompagne de l’instauration d’une autorité fonctionnelle, pardonnez-moi, mais on est en droit de douter ! Et puisque vous affirmez, dans votre exposé des motifs, que le directeur d’école ne deviendra pas un responsable hiérarchique, pourquoi ne pas l’inscrire dans la loi ? Merci, madame la députée. En réalité, c’est tout un jargon que vous employez pour casser le statut de professeur des écoles et faire de lui un petit chef (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem), ce qui est d’ailleurs représentatif de la manière dont vous concevez les organisations. La parole est à Mme Elsa Faucillon. Je ne perdrai pas de temps à répondre au procès en conservatisme que nous fait M. le ministre, mais je m’attacherai aux faits, aux actes et aux mots qui entourent la discussion sur cette proposition de loi. Dans la synthèse des ateliers du Grenelle de l’éducation, les termes employés marquent les choix, voire les tournants, qui sont opérés. Je reprendrai ici les mots déjà cités par mes collègues : la volonté d’instaurer un statut de directeur « conférant une autorité décisionnelle et fonctionnelle », d’encourager les fonctionnaires à exercer un « leadership […] assumé » et d’instaurer une culture du « management ». Admettez tout de même que ce ne sont pas là des mots associés au statut de fonctionnaire, à une école émancipatrice ou à un service public,… Si ! …mais plutôt des termes renvoyant à une idéologie libérale ou à une culture du management inspirée de l’entreprise privée.
Et s’il n’y avait que les mots ! À mes yeux, le discours fait déjà acte. Mais à nos discussions et aux débats qui entourent la présente proposition de loi s’ajoutent les annonces que le Président de la République a faites à Marseille. Si, dans cette ville, l’éducation nationale, l’ensemble des services publics et la population réclament certes de l’autonomie, ils ne demandent pas à pouvoir tout décider. L’autonomie n’est pas un concept libéral, mais une notion progressiste
(Mme Muriel Ressiguier et M. Michel Larive applaudissent), à travers laquelle on doit donner aux acteurs concernés tous les moyens, les outils et le cap nécessaires pour assumer et accomplir leurs missions, y compris de façon collégiale. Le sens de ce mot, je le sais, a été complètement détourné par la loi du 10 août 2007 censée faire progresser l’autonomie des universités. Veuillez conclure, chère collègue. Si l’on veut dresser des parallèles, regardons les résultats de l’application de cette loi ! Ils me conduisent évidemment à voter en faveur de l’amendement de suppression défendu par M. Larive, car cette autonomie-là, c’est du délaissement. (Mme Muriel Ressiguier et M. Michel Larive applaudissent à nouveau.)
(L’amendement no 35 n’est pas adopté.) La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement no 23. On va enfin entendre des paroles sensées ! (Sourires sur quelques bancs du groupe LaREM.) M. le ministre a mentionné l’intervention de M. Minot. Nous croyons réellement que tout ne va pas au mieux dans le meilleur des mondes pour l’école. En revanche, mon collègue a clairement indiqué que nous voterions en faveur de cette proposition de loi. Nous estimons en effet qu’elle va dans la bonne direction, dans la mesure où elle contribue à clarifier le cadre juridique applicable aux directeurs d’école.
Je regrette toutefois que ce texte apparaisse très en retrait par rapport à la version initialement proposée par Mme Rilhac, que nous avions adopté en première lecture. Avec la rédaction actuelle, nous restons au milieu du gué. Mais sans doute de nombreux directeurs seront-ils rassurés. L’adoption de cette proposition de loi devrait – il faut l’espérer – susciter de nouvelles vocations pour la fonction de directeur d’école.
L’article L. 411-1 du code de l’éducation dispose qu’« un directeur veille à la bonne marche de chaque école ». La commission ayant adopté un amendement tendant à mentionner également les chargés d’école, le présent amendement vise à adopter la rédaction suivante : « un directeur d’école ou chargé d’école veille à la bonne marche de chaque école [….]. »
Quel est l’avis de la commission ? Comme vous l’avez indiqué, il s’agit d’un amendement rédactionnel. Il me semble que la version adoptée en commission, selon laquelle « un directeur ou chargé d’école veille à la bonne marche de chaque école », est suffisante et va dans le sens de votre demande, qui est donc satisfaite. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
(L’amendement no 23, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 24 et 45.
La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement no 24.
Un amendement similaire a déjà été examiné en commission. Je remercie la rapporteure d’avoir précisé dans son rapport que, « issu d’un amendement de M. Frédéric Reiss, l’alinéa 2 visait enfin à inclure dans les dispositions de l’article L. 411-1 les écoles primaires, qui regroupent l’école maternelle et l’école élémentaire ».
Le présent amendement ne vise pas à revenir sur l’esprit de la rédaction qui a été retenue, mais, comme Mme Descamps s’est évertuée à le démontrer en commission – sans succès, c’est pourquoi je me joins à elle cette fois-ci – nous pensons qu’il importe, par souci de cohérence, de mentionner les écoles dans le même ordre que dans les alinéas suivants et les autres articles du texte, et donc de parler des directeurs d’école « maternelle, élémentaire ou primaire ».
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l’amendement no 45. Je me suis effectivement évertuée à défendre cet amendement en commission. Je préciserai donc simplement, en séance publique, qu’il est identique à celui de M. Reiss. Cette rédaction serait en effet bien plus cohérente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ? Vous avez bien fait de vous évertuer, car il est vrai la rédaction que vous proposez est plus logique. Avis favorable.
(Les amendements identiques nos 24 et 45, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés à l’unanimité.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 2, 3, 30, 36 et 4, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 3, 30 et 36 sont identiques.
Sur les amendements nos 2 et 4, je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l’amendement no 2.
Il vise à supprimer la phrase prévoyant que le directeur d’école dispose d’une autorité fonctionnelle. Nous ne comprenons vraiment pas votre entêtement sur cette question. J’ai bien saisi que nous menions un dialogue de sourd et que nous ne parviendrons pas à nous faire entendre, mais il s’agit seulement de faire évoluer une terminologie dont une majorité des personnes concernées vous expliquent qu’elle ne les satisfait pas, car elle instille du dou