- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant création d'un statut de l'élu local, n° 136
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé : "Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 juin 2026, un rapport évaluant les conséquences des différentes réformes fiscales ayant réduit les capacités budgétaires des collectivités territoriales, notamment la suppression de la taxe d’habitation, la réforme de la CVAE et le remplacement des impôts locaux par une fraction de TVA affectée par fléchage. Ce rapport analyse en particulier l’impact de ces évolutions sur l’autonomie financière des collectivités territoriales, leur capacité d’investissement et la soutenabilité de leurs budgets à moyen et long terme."
Par cet amendement, les députés du groupe La France insoumise – NFP dénoncent le désengagement continu de l’État vis-à-vis des collectivités territoriales, alors même que celles-ci assument des responsabilités toujours plus lourdes. L’État impose des compétences nouvelles sans jamais fournir les moyens correspondants. C’est une mise sous tutelle déguisée, qui étrangle les territoires. Les collectivités sont sommées de faire plus, avec moins. Leur autonomie financière est méthodiquement détruite par une recentralisation budgétaire rampante.
La proposition de loi prétend s’attaquer au désengagement civique dans la démocratie locale, mais elle passe complètement à côté des véritables causes structurelles de cette crise. Comme l’a récemment rappelé Martial Foucault, professeur à Sciences Po, dans une étude menée à l’occasion du Congrès des maires, « peu de maires mettent cette question en avant. Aucun ne piaffe d’impatience à l’idée de mettre du beurre dans les épinards. Ce n’est pas ça le sujet. Le sujet, c’est d’obtenir plus d’autonomie, ce qui va de pair avec la responsabilité politique et la capacité à lever l’impôt. Car c’est cela qui produit de la citoyenneté. » Ce rappel est fondamental : sans autonomie réelle des collectivités, sans lien clair entre la responsabilité politique locale et les ressources fiscales, il ne peut y avoir de démocratie locale vivante. La citoyenneté ne se décrète pas par des incantations, elle se construit par la capacité des territoires à décider et à agir.
La première préoccupation des maires, c’est de répondre concrètement aux attentes de leurs administrés : services publics, aménagements, solidarité, transition écologique. Pour cela, ils ont besoin de moyens, mais surtout d’autonomie fiscale, c’est-à-dire de la capacité à lever l’impôt pour financer les politiques qu’ils portent. Or, le Gouvernement a supprimé les principaux impôts locaux — taxe d’habitation, CVAE — vidant les collectivités de leurs ressources propres. Ces suppressions ont été compensées par l’affectation d’une part de TVA. Mais ce mécanisme, en plus d’anéantir toute autonomie locale — les collectivités ne maîtrisant ni l’assiette ni le taux de cet impôt —, fragilise aussi le budget de l’État : en 2024, sur 212 milliards d’euros de TVA collectés, seulement 96,8 milliards restent dans les caisses de l’État, 53 milliards étant fléché vers les collectivités, sans logique de pilotage démocratique local. Par cette politique budgétaire, l’État a brisé la démocratie locale en privant les territoires de toute autonomie fiscale, tout en asphyxiant son propre budget — préparant ainsi le terrain à une austérité qu’il aura lui-même rendue inévitable.