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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2009-2010

Compte rendu
intégral

Troisième séance du jeudi 8 avril 2010

Troisième séance du jeudi 8 avril 2010

Présidence de Mme Danielle Bousquet
vice-présidente

Mme la présidente . La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente-cinq.)

Réforme du crédit à la consommation

Suite de la discussion d’un projet de loi adopté par le Sénat

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, portant réforme du crédit à la consommation (n os 1769, 2150, 2139, 2129, 2131).

Le temps de parole dont dispose chaque groupe est de trois heures quarante-cinq minutes pour le groupe UMP, dont cent quarante-huit amendements restent en discussion;…

M. François Brottes. Mais c’est énorme! (Sourires.)

Mme la présidente. …trois heures vingt-cinq pour le groupe SRC, dont trente-six amendements restent en discussion; deux heures cinquante-neuf pour le groupe GDR, dont cinquante amendements restent en discussion; deux heures quarante pour le groupe Nouveau Centre, dont vingt-deux amendements restent en discussion, et quarante minutes pour les députés non inscrits, dont deux amendements restent en discussion.

Cet après-midi l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n°124 rectifié à l’article 2.

Article 2 (suite)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, n os 124 rectifié, 312 rectifié et 316.

La parole est à M. Émile Blessig, pour soutenir l’amendement n°124 rectifié.

M. Émile Blessig. Le projet de loi a pour objet de développer le crédit responsable; il permet ainsi de lutter contre le surendettement.

Son article 2 encadre fortement la publicité en matière de crédit à la consommation. Des garde-fous sont prévus lors de la souscription, qui ne doit pas être influencée par l’offre de cadeaux ou de lots promotionnels. Or c’est souvent le cas, notamment sur internet, et il n’est pas rare de constater que des publicités vantant des crédits promettent des cadeaux en cas d’ouverture de compte.

Je sais qu’il existe d’ores et déjà une réglementation relative aux cadeaux promotionnels, mais cette dernière n’est pas adaptée au marché du crédit.

J’ai imprimé deux publicités, parues sur le net. L’une d’elle annonce qu’un caméscope est offert pour l’ouverture d’un compte d’un minimum de 500 euros; l’autre promet un lecteur DVD. Le problème, c’est que les taux effectifs globaux des prêts proposés sont de l’ordre de 20 %!

M. Roland Muzeau. Ce sont des bandits!

M. François Brottes. On veut nous faire croire au Père Noël!

M. Émile Blessig. Dans ces conditions, je crois qu’il faut simplement empêcher qu’une offre de crédit à la consommation donne lieu à la proposition de lots promotionnels quels qu’ils soient. C’est pourquoi, avec Richard Maillé et une cinquantaine de collègues, nous proposons d’interdire toute forme de cadeau lors de la souscription d’un crédit.

Mme la présidente. La parole est à M. François Loos, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission.

M. François Loos , rapporteur de la commission des affaires économiques. Nous avons longuement débattu de ce sujet en commission.

Les amendements déposés ont tous été rejetés à l’exception de celui de notre collègue Éric Diard, rapporteur pour avis de la commission des lois. Ce dispositif, devenu l’alinéa 13 de l’article 4, précise que la valeur de la prime en nature associée à la conclusion d’une opération de crédit « ne peut être supérieure à un seuil fixé par arrêté ».

Une interdiction absolue nous paraît excessive. Des petits cadeaux publicitaires peuvent être utiles.

M. Roland Muzeau. C’est cela: c’est amical!

M. François Loos, rapporteur . Il faut donc interdire les grands cadeaux,…

M. Roland Muzeau. Vous pensez au bouclier fiscal!

M. François Loos, rapporteur . …et demander au Gouvernement de fixer une limite par arrêté.

La commission est défavorable à l’amendement. Je vous invite à vous reporter à l’alinéa 13 de l’article 4.

Mme la présidente. La parole est à M. Louis Cosyns, pour défendre l’amendement n°312 rectifié.

M. Louis Cosyns. Comme M. Blessig, je ne recherche que la protection du consommateur.

Sur bien des points, ce projet de loi est satisfaisant en la matière, mais, sur cette question, je suggère que nous allions un peu plus loin. Notre rapporteur évoque un texte réglementaire qui limiterait la valeur du cadeau, mais quel critère retenir? Choisir entre le stylo et le lecteur CD: c’est tout le problème.

Notre solution est sans doute radicale, mais je crois qu’il faudrait tout simplement interdire les cadeaux.

M. Roland Muzeau. Gauchiste!

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour défendre l’amendement n°316.

M. Jean Dionis du Séjour. Lorsque nous avons examiné la loi LME, nous n’avons eu de cesse de répéter qu’il fallait revenir aux produits. Nous voulions éliminer les marges arrière et tous les éléments commerciaux périphériques. Nous sommes en plein dedans!

M. Louis Cosyns. Évidemment!

M. Jean Dionis du Séjour. Et Dieu sait combien il est compliqué de faire un peu de ménage dans la grande distribution: c’est plus difficile qu’avec les banques.

Il faut que les consommateurs se battent sur les produits bancaires et leurs caractéristiques, pas sur les cadeaux!

Il me semble qu’il serait cohérent que le Parlement adopte la même démarche pour traiter de la grande distribution et du secteur bancaire.

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, pour donner l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi. Nous poursuivons tous le même objectif. Nous voulons éviter les incitations déloyales à souscrire un crédit à la consommation.

C’est la raison pour laquelle l’amendement adopté par la commission le 9 décembre dernier, présenté par le rapporteur pour avis au nom de la commission des lois, M. Éric Diard, et désormais inséré dans le projet de loi à l’alinéa 13 de l’article 4, me semble constituer une bonne solution.

Je précise à l’Assemblée que le Gouvernement réfléchit actuellement au plafond de la valeur des cadeaux publicitaires qui serait fixé par décret. Nous pourrions appliquer le plafond de 80 euros actuellement en vigueur pour les cadeaux autorisés lors de l’ouverture d’un compte bancaire.

M. Roland Muzeau. Ce n’est pas pareil!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je crois qu’il ne faut pas confondre le problème des cadeaux en entrée de relations commerciales avec la réglementation applicable aux marges arrière dans la grande distribution. Il me semble en tout cas que nous ne parlons pas de la même chose.

L’avis du Gouvernement est défavorable, mais je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée (« Ah! » sur tous les bancs) , car j’ai le sentiment que vous êtes tous violemment d’accord sur cette question.

M. Roland Muzeau. Fortement d’accord, pas violemment!

M. François Brottes. Raisonnablement d’accord!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Disons « passionnément d’accord », si vous le voulez bien. (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. De manière générale, il me semble que lorsqu’on fait un cadeau en vendant un produit, on a déjà tendance à se moquer du monde. Cela dit, quand on vous explique qu’un paquet de lessive contient 20 % de produit gratuit, ce n’est pas trop grave; cela n’engage pas l’avenir. On a toujours de la lessive même si l’on croit avoir payé le paquet 20 % moins cher.

Pour les crédits à la consommation, tout est différent: on engage l’avenir. Un crédit dure longtemps et il se renouvelle même parfois. L’affaire est donc beaucoup plus grave.

Je suis en désaccord avec ce que nous expliquait le rapporteur, pour qui j’ai beaucoup d’estime par ailleurs. Les parlementaires demandent en permanence que l’on simplifie la vie administrative du pays. (« Très bien! » sur les bancs du groupe SRC.) Où va-t-on s’il faut calculer pour chaque crédit éventuel le pourcentage qui permet de déduire la valeur du cadeau autorisé? Cela n’est pas possible!

Je souhaite que la majorité des parlementaires votent l’amendement dont je suis cosignataire.

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. De notre point de vue, il s’agit de très bons amendements. Je suis donc déçu par la réponse de notre rapporteur, pour lequel j’ai par ailleurs, selon la formule consacrée, une très grande estime. (Sourires.)

Ne confondons pas le produit et le crédit. Qu’un cadeau soit offert pour l’achat d’un produit, nous sommes presque tous prêts à le comprendre – et il n’est d’ailleurs pas idiot de limiter son montant. Mais le meilleur cadeau que l’on puisse faire à la personne qui souscrit un crédit, c’est de lui proposer un taux d’intérêt faible et un crédit de qualité. Le fait que l’on offre des cadeaux pour obtenir la souscription de crédits est absolument inconcevable, et je crois que, sur tous les bancs, nous sommes d’accord sur ce point.

M. Jean Dionis du Séjour. Absolument!

M. François Brottes. Monsieur le rapporteur, il faut raison garder. Mme la ministre s’en est remise à la sagesse de l’Assemblée; vous feriez bien de faire de même. Cela dit, même si tel n’est pas le cas, nous voterons cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Je vais faire entendre une voix discordante. Il faut, me semble-t-il, différencier nettement la souscription du crédit et son utilisation. S’il peut paraître choquant que l’on reçoive un cadeau pour utiliser un crédit, il en va autrement pour sa souscription. À cet égard, le texte tel qu’il est issu des travaux de la commission me semble respectueux des intérêts de chacun. Aussi, je crois que nous devrions nous en tenir au texte de la commission.

J’ajoute que l’on oublie un élément fondamental: lorsqu’on souscrit un crédit, on bénéficie d’un droit de rétractation pendant quatorze jours. (Exclamations sur divers bancs.)

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Et on garde le cadeau!

M. Bernard Gérard. Ce délai est une garantie extraordinaire pour le souscripteur.

(Les amendements identiques n os 124 rectifié, 312 rectifié et 316 sont adoptés.)

M. Michel Raison. On ne fait pas de cadeau au rapporteur! (Sourires.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 57.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Loos, rapporteur . Il s’agit d’un amendement de précision.

(L’amendement n° 57, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°231.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Là encore, nous souhaitons faire œuvre de pédagogie. Cet amendement a ainsi pour objet d’améliorer la formulation des publicités, en introduisant la notion de « revenus suffisants et réguliers », afin d’avertir directement le consommateur, dans des termes clairs et simples. En effet, si le crédit peut donner l’illusion qu’il complétera les revenus, en fait, il pèsera sur ces revenus de façon durable et parfois interminable dans le cas des crédits renouvelables. Il s’agit donc d’informer le consommateur que, chaque mois, le remboursement du crédit amputera ses revenus. C’est pourquoi nous estimons que la notion de « revenus réguliers et suffisants » doit être mentionnée sur les publicités.

(L’amendement n°231, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 56.

La parole est à M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Puisque nous sommes en train de revoir les règles applicables en matière de publicité, il me semble important de compléter les différentes sanctions prononcées en cas de manquement à ces règles. La sanction financière, si elle doit exister, n’est pas la seule possible. Je propose donc qu’en cas de non-respect des règles, l’annonceur ne puisse pas reproduire, éditer ou faire paraître une publicité de même type concernant le même produit pendant au moins un mois. Cette sanction pourrait être davantage dissuasive qu’une sanction pécuniaire et inciter ainsi au respect des nouvelles règles applicables à la publicité concernant les crédits.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Défavorable. La commission a considéré qu’il n’était pas nécessaire d’ajouter d’autres sanctions à celles qui existent déjà.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Même avis que la commission. Les sanctions existantes – 1500 euros par infraction – nous paraissent suffisantes.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je ne voudrais pas plomber cet amendement, mais je tenais à préciser que je le trouve excellent et qu’avec mon groupe nous allons le voter.

(L’amendement n° 56 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements, n os 228, deuxième rectification, 23, 21 et 22, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l’amendement n°228, deuxième rectification.

M. Roland Muzeau. Le crédit renouvelable est la forme la plus nocive du crédit à la consommation; il est intrinsèquement une source de surendettement en raison de son mécanisme de non-amortissement. À défaut de l’interdiction du crédit renouvelable lui-même, que nous avons proposée et qui n’a pas été retenue par la majorité, toute publicité et tout démarchage en faveur de ce type de crédit doivent être interdits. À cette fin, nous souhaitons compléter l’article 2 par trois alinéas:

« Toute publicité pour le crédit renouvelable, quel que soit le support utilisé, est totalement interdite.

« Tout démarchage à distance pour le crédit renouvelable, quelles que soient ses modalités, est totalement interdit.

« Tout démarchage pour le crédit renouvelable sur le lieu de vente est totalement interdit. »

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert, pour soutenir l’amendement n° 23.

M. Jean Gaubert. Je défendrai également les amendements n os  21 et 22, madame la présidente.

Puisque nous n’avons pas réussi à convaincre la majorité d’interdire le crédit revolving, nous voudrions au moins la persuader de l’encadrer de façon draconienne, car je crois que nos collègues de la majorité sont d’accord avec nous pour considérer qu’il est dangereux.

L’amendement n° 23 précise ainsi que la publicité portant sur les crédits renouvelables est prohibée. Par publicité, nous entendons les mails, les courriers, l’affichage et tout ce qui y ressemble.

L’amendement n° 21 précise que le démarchage, la publicité, la distribution et l’ouverture de crédits renouvelables ne peuvent s’opérer dans la même enceinte que celle de l’achat du bien. On sait en effet qu’il existe une concomitance, parfois dangereuse, entre la vente du produit et la distribution du crédit et nous avons tous vu la tête que fait un vendeur lorsqu’on lui achète un bien tout en refusant le crédit qu’il propose, fût-il accompagné de cadeaux. Nous souhaitons donc qu’une personne qui a besoin d’un crédit renouvelable aille dans un autre lieu pour le souscrire ou que la personne qui ouvre le crédit ne soit pas la même que celle qui vend le produit.

Quant à l’amendement n° 22, il précise que le démarchage à domicile, le démarchage à distance et le démarchage itinérant visant à proposer des crédits renouvelables sont prohibés.

Nous avons déjà présenté ces mesures, mais, l’art de la pédagogie étant dans la répétition, nous vous les proposons à nouveau. Certes, elles n’ont pas été acceptées cet après-midi, mais, puisque la composition de l’Assemblée est un peu différente ce soir, nous aurons peut-être un peu plus de chance cette fois.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les quatre amendements en discussion commune?

M. François Loos, rapporteur . Nous revenons au débat sur l’interdiction du crédit renouvelable, que nous avons eu au début de la discussion. Contrairement à vous, nous ne voulons pas que ce crédit soit interdit. Nous souhaitons qu’il puisse continuer à exister, tout en étant encadré convenablement pour produire moins d’effets nuisibles qu’actuellement.

M. Jean Gaubert. Nous proposons précisément de l’encadrer!

M. François Loos, rapporteur . Vos propositions visent à le supprimer, à l’empêcher; nous ne pouvons donc pas les accepter. Un certain nombre de branches économiques et d’activités dépendent de l’octroi de crédits renouvelables. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le Gouvernement est défavorable aux quatre amendements.

Leur objet étant soit d’encadrer la publicité de manière extrêmement rigoureuse, soit de l’interdire littéralement, ces amendements auraient pour effet d’évacuer toute publicité ou tout démarchage en faveur du crédit renouvelable. Or notre ambition est non pas d’interdire le crédit renouvelable ou la publicité et le démarchage qui s’y rapportent et qui sont les actes normaux de la commercialisation de ce produit, mais de l’encadrer. C’est ce que nous faisons dans ce projet de loi tel qu’il a été amélioré lors de son examen par la commission le 9 décembre. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je remercie Mme la ministre et M. le rapporteur de leur réponse, même si j’ai le sentiment que Mme la ministre a mieux compris la subtilité de nos amendements que M. le rapporteur, pour qui nous proposons encore une fois de supprimer purement et simplement le crédit renouvelable. Monsieur le rapporteur, nous avons proposé sa suppression lorsque nous discutions de l’article 1 er , mais, là, il s’agit d’un autre sujet. Nous avons bien compris que vous ne souhaitiez pas supprimer le crédit renouvelable. En l’espèce, nous souhaitons l’encadrer.

Ce qui pose véritablement problème – je parle sous le contrôle de mon collègue Gaubert –, c’est qu’une seule et même personne, dans un lieu unique, puisse à la fois vendre le produit et proposer le crédit, sur lesquels elle perçoit des commissions. Cette personne est ainsi en situation de faire commettre – j’emploie ce terme à dessein, car les consommateurs sont parfois irresponsables – l’acte d’achat.

Ne serait-il pas souhaitable, soit que ce ne soit pas la même personne, même si c’est dans le même lieu, qui vende le produit et propose le crédit, soit que la personne qui propose le crédit ne perçoive pas de commission sur la souscription de celui-ci? Dans la discussion générale, beaucoup de nos collègues ont expliqué que, parfois, le vendeur refuse même que le client paie comptant, car il veut absolument qu’il souscrive un crédit, même si ce n’est pas nécessaire. Il y a donc des abus dans ce domaine.

Certes, il faudrait que nous rectifiions nos amendements, et je ne suis pas certain que Mme la présidente nous y autorise dans l’immédiat. Mais nous pouvons nous accorder sur le fait que ce type de pratique est abusif, sachant par ailleurs que nous ne disposons pas des précautions que nous souhaitons, notamment l’accès à un fichier positif.

Madame la ministre, monsieur le rapporteur, pourriez-vous nous donner votre avis sur ce point? Le cas échéant, nous pourrions réécrire ces amendements, au moins l’amendement n° 21. Mais tout dépend de vos réponses.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. Je suis très opposé à ces amendements, car il s’agit de fausses bonnes idées. Tout à l’heure j’évoquais la nécessaire simplification administrative. Notre pays souffre d’une trop grande complexité en la matière. Or, si un marchand de télévision, par exemple, n’a plus le droit de proposer un crédit à ses clients, son employeur créera un bureau à proximité à cet effet, et non seulement le consommateur paiera plus cher – parce que le marchand de télévisions aura dû créer une deuxième société et louer d’autres locaux –, mais il sera tout de même conseillé au sujet du crédit.

C’est donc une fausse bonne idée, qui ne se traduirait que par une complexité supplémentaire et une augmentation de taux pour le consommateur. J’encourage mes collègues qui auraient pu être tentés de voter cet amendement à le repousser.

M. François Brottes. Un taux de 21 %, c’est déjà très cher!

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je ne comprends pas très bien la position de M. Raison. En effet, ces crédits sont en général au taux maximum – heureusement, d’ailleurs, qu’il existe un taux maximum – et l’on ne voit donc pas comment pourrait être proposé un taux plus élevé.

La situation actuelle profite à la fois au marchand de biens et au marchand de crédits: le complément de rémunération qui va au vendeur permet au marchand de matériel de payer moins cher son salarié tout en vendant son produit au même prix, tandis que le marchand de crédits en vend davantage. Je pourrais, sans citer de marques, vous énumérer les gratifications perçues par les salariés qui vendent du crédit pour les automobiles.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Ce sont des commissions! Pourquoi un vendeur ne pourrait-il pas être commissionné?

M. Jean Gaubert. Qu’un vendeur soit commissionné sur une voiture est normal. Mais qu’il perçoive une commission de 50 euros s’il arrive à vendre un crédit pour l’achat d’une voiture d’entrée de gamme, cela commence à poser problème.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis . Non! En quoi serait-ce un problème?

(L’amendement n°228, deuxième rectification, n’est pas adopté.)

M. Roland Muzeau. Indécrottables! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

(L’amendement n° 23 n’est pas adopté.) (L’amendement n° 21 n’est pas adopté.) (L’amendement n° 22 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°229 rectifié.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable.

(L’amendement n°229 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°230 rectifié.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. On peut légitimement considérer que le surendettement, qui a bondi de 18 % en un an, constitue un enjeu de santé publique, la santé financière des ménages. Or les chiffres sont sans appel: le crédit renouvelable est la principale maladie en cause dans le surendettement. Dans un esprit de prévention, nous souhaitons donc nous inspirer de la législation s’appliquant en matière de lutte contre le tabagisme, qui oblige les fabricants de cigarettes à apposer clairement sur leurs paquets la mention « Fumer tue ». De la même façon, nous proposons de faire apparaître sur les publicités de crédits, qu’elles soient écrites, télévisuelles ou sur Internet, le texte suivant: « Le crédit renouvelable nuit gravement à la santé de vos finances ». (Rires sur les bancs du groupe UMP.) C’est un devoir de l’État d’informer ses citoyens des risques liés aux formes de crédit les plus nocives.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Notre collègue Muzeau a de la suite dans les idées, puisque le texte qu’il propose est conforme à la politique antitabac. Toutefois, un autre texte est prévu par le projet de loi, que je vous propose de conserver: « Le crédit vous engage et doit être remboursé. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager ». La commission est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable.

(L’amendement n°230 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°308.

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Le présent amendement a pour objet de prendre en compte la spécificité du média radiophonique. Pour le moment, tous les dispositifs de prévention sont adaptés aux médias de l’écrit, mais non à la radio. Ainsi, l’obligation de lire à la radio des mentions beaucoup trop longues a deux effets indésirables. Premièrement, l’alerte lue en accéléré est inaudible; deuxièmement, les publicitaires en viennent à craindre que leur annonce ne perde de sa valeur en raison de la mention obligatoire qui lui est accolée et qui la rend beaucoup moins compréhensible. La spécificité de la radio n’est donc pas prise en compte.

M. le rapporteur nous a annoncé tout à l’heure un amendement qui devrait résoudre ce problème. J’attends d’en savoir plus mais, en l’état actuel, le texte n’est pas adapté à la radio, comme nous l’avons déjà dit à plusieurs reprises.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Je voudrais d’abord remercier tous ceux qui m’ont exprimé leur estime tout à l’heure. La nuit promet d’être longue, et je ne sais pas si je conserverai cette estime jusqu’au bout! (Sourires.)

L’amendement n° 57, que vous avez voté tout à l’heure, consiste à insérer, à l’alinéa 17 de l’article 2, les mots: « à l’exception des publicités radiodiffusées ». Votre amendement étant satisfait, monsieur Dionis du Séjour, je vous invite à le retirer.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Pour les mêmes raisons que celles que nous avons évoquées tout à l’heure, le Gouvernement est défavorable à cet amendement et s’en remet à l’amendement n° 57. J’admets que la référence au caractère « lisible » ne convient pas au média radiophonique et mérite d’être modifiée mais, pour le reste, il est important que les annonceurs ne soient pas tentés de sélectionner les informations qui leur paraissent les plus vendeuses, et prennent l’intégralité de l’exemple chiffré. Comme M. le rapporteur, je vous invite à retirer votre amendement, monsieur le député.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Si j’ai bien compris, on nous propose de modifier l’alinéa 17 de l’article 2 en y insérant les mots « à l’exception des publicités radiodiffusées ». Exclure le média radiophonique est une chose, mais encore faut-il préciser de quelle manière la prévention se fait sur ce média; or ce n’est pas prévu! On a franchi un premier pas en faisant en sorte de ne pas employer le mot « lisible » en parlant de la radio, mais comment va-t-on alerter les consommateurs à la radio? Ce n’est pas dit dans le texte, et c’est le but de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Loos, rapporteur . Je précise à M. Dionis du Séjour qu’en ce qui concerne la radio, toutes les obligations demeurent, à l’exception de la phrase qui fait un peu « tunnel » dans un message publicitaire diffusé à la radio. Toutes les obligations prévues par la directive européenne, la transcription et les dispositions complémentaires continueront à être respectées: ainsi, les informations chiffrées doivent faire l’objet d’explications sur le TAEG. L’obligation d’information relative aux publicités radiophoniques est donc aussi large qu’ailleurs, à l’exception d’une seule phrase.

M. Jean Dionis du Séjour. Je retire l’amendement n°308.

(L’amendement n°308 est retiré.) (L’article 2, amendé, est adopté.)

Article 3

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°226 rectifié.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Cet amendement vise à préciser, à l’alinéa 4 de l’article 3, que les informations précontractuelles dont doit disposer l’emprunteur lui sont remises « en main propre ». Nous estimons en effet que le verbe « donner » figurant dans le texte ne suffit pas à apporter cette indispensable notion d’injonction et de sûreté vis-à-vis de l’emprunteur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . La commission a repoussé cet amendement qui revient, de fait, à interdire la distribution de crédit à distance, ce qui est cohérent avec les amendements précédents de M. Brard, mais ne correspond pas aux intentions du texte.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Pour les mêmes bonnes raisons, le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

M. Roland Muzeau. « Bonnes » raisons, c’est vite dit!

(L’amendement n°226 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°227, deuxième rectification.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. J’ai effectivement de la suite dans les idées, et je ne désespère pas de finir par convaincre M. le rapporteur et Mme la ministre.

Si l’objectif de ce texte est d’améliorer l’information précontractuelle, donc de s’assurer que le futur emprunteur possède bien toutes les informations nécessaires, pourquoi introduire une ambiguïté à l’alinéa 4 de l’article 3 avec la formule « ou sur un autre support durable »? Soit cette notion de support durable ne correspond à rien de précis et il ne s’agit que d’une énième production de la novlangue technocratique prisée par les ministères depuis que ce gouvernement est aux affaires, soit cette notion recouvre des choses précises, auquel cas il faut les nommer précisément.

Dans les deux cas de figure, la formule s’oppose aux ambitions de clarté et de transparence dont nous ont fait part Mme la ministre et M. le rapporteur depuis le début de la discussion de ce texte, puisque nous ignorons quels sont ces autres supports durables. Pour ma part, j’estime que le support papier est parfaitement suffisant et fiable pour remettre les informations à l’emprunteur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable. La notion de « support durable » est définie dans le douzième alinéa de l’article L.311-1 et se retrouve dans un certain nombre de directives européennes. Il existe en effet de nos jours un certain nombre de transmissions pouvant être « durabilisées » – un terme affreux…

M. Jean Dionis du Séjour. Un barbarisme!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. …qui n’en recouvre pas moins une notion très largement répandue.

(L’amendement n°227, deuxième rectification, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°182.

Cet amendement est-il défendu?

M. Michel Zumkeller. Défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable.

(L’amendement n°182 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°223 rectifié.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable.

(L’amendement n°223 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°224 rectifié.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Si le législateur souhaite établir une véritable fiche d’information spécifique à chaque type de crédit à la consommation, cette fiche ne doit pas seulement décrire l’offre de crédit, mais aussi avertir des risques qui y sont liés. Or le risque de surendettement dont nous parlons depuis le début de l’examen de ce texte est particulièrement important dans le crédit renouvelable. Il semble donc logique d’inclure une mise en garde claire et sans ambiguïté sur le risque de surendettement lié au crédit à la consommation. Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable.

(L’amendement n°224 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°225 rectifié.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Comme nous l’avons dit à plusieurs reprises, le texte du Gouvernement est assez frileux en matière de contraintes imposées aux emprunteurs. Le verbe « veiller » pour désigner l’obligation de remettre la fiche d’information à l’emprunteur est un peu curieux dans la mesure où il n’implique pas vraiment une obligation. L’enjeu est pourtant d’importance: l’emprunteur doit posséder ces informations avant de signer tout contrat, ce qui implique que le prêteur les lui remette. Selon nous, le verbe « veiller » ne traduit pas une obligation, mais une simple recommandation.

Or nous légiférons aujourd’hui pour rendre la loi plus contraignante. Les mots « a pour obligation de remettre à l’emprunteur la fiche d’informations » nous semblent donc plus appropriés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . La commission a considéré que le verbe  veiller avait valeur d’obligation suffisante.

M. Roland Muzeau. Non!

M. François Loos, rapporteur . Si le prêteur ne veillait pas à ce que la fiche d’informations soit remise à l’emprunteur, il serait en faute puisqu’il est censé le faire. Avis défavorable, donc.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Défavorable. Bien souvent, monsieur Muzeau, ce n’est pas le prêteur qui s’occupe directement de la fiche. Il confie cette tâche à des vendeurs formés à cet effet – c’est d’ailleurs prévu par l’article 4. La responsabilité doit cependant être assumée par le prêteur. L’opération est réalisée par compte de tiers mais la responsabilité pèse sur le prêteur. C’est la raison pour laquelle les mots « veille à ce que » conviennent parfaitement.

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Votre précision est intéressante, madame la ministre, mais sera-t-il possible d’ouvrir un contentieux si celui qui doit veiller n’est pas allé au bout de sa mission? Que va-t-il se passer si celui qui doit veiller transfère sa responsabilité sur quelqu’un d’autre? Que peut faire l’emprunteur s’il se sent floué? Si vous m’assurez qu’il n’y aura pas de difficulté, je suis tout disposé à vous croire.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Monsieur Muzeau, j’espère qu’au bénéfice de mes explications, vous accepterez de retirer votre amendement. Mais je ne m’offusquerais pas que vous ne le fissiez point.

M. Roland Muzeau. Ne préjugez de rien, madame la ministre!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Alors, je tente!

L’alinéa 21 de l’article 14 prévoit: « Le prêteur est responsable de plein droit à l’égard de l’emprunteur de la bonne exécution des obligations relatives à la formation du contrat de crédit, que ces obligations soient à exécuter par le prêteur qui a conclu ce contrat ou par les intermédiaires de crédit intervenant dans le processus de formation du contrat de crédit… » Ainsi que j’ai indiqué, le prêteur doit veiller à ce que l’obligation soit remplie. Peu importe que cela passe par un tiers, c’est lui qui est responsable. Sa responsabilité peut donc être mise en cause dans le cadre d’un contentieux s’il est établi qu’il n’a pas veillé à ce que l’obligation soit exécutée par le tiers.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Loos, rapporteur . Monsieur Muzeau, l’alinéa 4 de l’article 3, qui prévoit que « le prêteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires… » introduit l’obligation. À l’alinéa 6, on demande au prêteur de veiller à ce que la fiche soit remise puisqu’un agent peut agir pour lui. L’obligation est acquise en tout état de cause.

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Au bénéfice de ces deux précisions, dont le Journal officiel témoignera, je retire cet amendement, madame la ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Vous le voyez, je fais preuve de bonne volonté. Je vous attends au tournant, maintenant…

(L’amendement n°225 rectifié est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 63.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Loos, rapporteur . Le prêteur ou l’intermédiaire de crédit doit informer l’emprunteur du coût standard de l’assurance, à l’aide d’un exemple chiffré exprimé en euros et par mois. Il s’agit de donner la même qualité d’information sur l’assurance que sur le prêt lui-même. Nous souhaitons donc que cette information intervienne au stade précontractuel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Favorable. Je remercie le rapporteur d’avoir apporté cette clarification sur le secteur des assurances.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire . C’est un très bon amendement!

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je voudrais comprendre cet amendement. En effet, le prêteur ne pourra pas présenter de simulation à l’emprunteur lorsqu’il exige de lui d’aller chercher ailleurs. Lorsque l’assurance ne sera pas prise chez le prêteur, celui-ci ne pourra pas faire de simulation faute d’en connaître le coût.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Loos, rapporteur . Nous souhaitons que, lorsque l’assurance est souscrite chez le prêteur, les conditions de cette dernière soient présentées à l’emprunteur dans l’information précontractuelle, avec le même souci de qualité que pour le crédit.

(L’amendement n° 63 est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 24.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Il s’agit de prévoir la bonne information de l’emprunteur en cas de rejet de sa demande à la suite de la consultation d’un fichier. Le FICP, certes. Mais les grandes banques ont aussi leur fichier, qui contient un certain nombre d’informations sur les emprunteurs, clients habituels ou très occasionnels. Il nous paraît légitime que l’emprunteur soit informé des sources qui ont conduit le prêteur à refuser sa demande.

L’amendement prévoit également que l’emprunteur peut contester la décision qui a été prise.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Nous considérons qu’il est interdit de se fonder sur la consultation d’un fichier pour interdire un crédit. C’est ce que prévoit l’alinéa 3 de l’article 27: « l’inscription d’une personne physique au sein du fichier n’emporte pas interdiction de délivrer un crédit. »

M. François Brottes. Vous supprimez le FICP?

M. François Loos, rapporteur . Votre amendement risque en outre de créer de nombreux contentieux sans que cela serve pour autant aux consommateurs. Cela va susciter plus de contentieux que régler d’affaires.

Je le répète, le fait de figurer dans un fichier ne doit pas déboucher sur une interdiction de crédit. C’est interdit par la loi. Le refus ne peut se fonder sur la seule consultation du fichier. Avis défavorable, donc.

M. Jean Gaubert. Tout cela n’est pas très clair!

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Monsieur Gaubert, le Gouvernement est défavorable à votre amendement pour des raisons voisines de celles de la commission. Tel qu’il est rédigé, il laisse supposer que l’appréciation de la solvabilité de l’emprunteur va se fonder exclusivement sur la consultation d’un fichier, y compris le FICP. Or cela ne me semble pas une bonne idée.

Je vous rappelle que nous avons prévu des obligations nouvelles pour les banques dans le cadre de la mise en œuvre de crédit à la consommation: l’exercice à quatre mains, la vérification de la solvabilité du client, la consultation du fichier des incidents de paiement. Ces trois obligations sont distinctes et cumulées. Mais je crains que la rédaction de votre amendement ne laisse entendre que la consultation d’un fichier serait à elle seule suffisante pour constater ou non la solvabilité du client. Cette dernière s’apprécie certes en fonction de la présence ou non sur un fichier, mais également d’autres éléments. L’inscription sur un répertoire ou un fichier n’est pas nécessairement exclusive d’un crédit. Ainsi, nous examinerons ultérieurement un amendement de Mme Rosso-Debord sur l’accès au microcrédit, qui est tout à fait légitime pour des personnes inscrites au fichier des incidents de paiement.

Voilà les raisons pour lesquelles je suis défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je préfère la réponse de Mme la ministre à celle du rapporteur même si je ne suis pas pleinement satisfait.

Monsieur Loos, nous avons évoqué non pas une interdiction de crédit, mais le rejet d’une demande. La nuance est de taille. La banque n’interdit pas un crédit: elle vous conseille d’aller voir le voisin.

Oui, madame la ministre, il y a plusieurs éléments dans un dossier. Mais c’est peut-être la consultation d’un fichier ou d’une base de données – les fichiers internes sont illégaux mais existent bel et bien – qui conduira la banque à rejeter la demande d’un client, au motif que celui-ci est trop endetté et n’a pas communiqué tous les éléments d’information au prêteur. Nous souhaitons donc que les consommateurs puissent prendre connaissance des résultats de la consultation pour être en mesure de les contester éventuellement.

Quant à dire, monsieur le rapporteur, que cela créerait du contentieux, il est vrai que si l’on acceptait que le consommateur n’ait aucun droit, tout serait plus simple. Oui, il peut y avoir du contentieux bancaire. Et il est normal que le consommateur puisse vérifier et éventuellement contester les informations qu’on détient sur lui. Cela doit être vrai pour tous les fichiers. Je rappelle que ceux des banques, qu’aucun texte n’autorise, existent bel et bien.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous sommes au cœur du débat: comment allons-nous vérifier la solvabilité de l’emprunteur? Madame la ministre, vous avez évoqué l’alinéa 9 de l’article 4 dont je rappelle les termes: « Avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris les informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l’article L.333-4… »: c’est le FICP. Certes, c’est un ensemble d’informations qui conduit à la décision. Mais cela signifie que la consultation du FICP va concourir, elle aussi, au rejet d’une demande.

Par leur amendement, nos collègues socialistes souhaitent que, si la demande est refusée du fait, entre autres, de la consultation du FICP, le consommateur soit informé. Cela me semble très sain.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. On ne peut pas se fonder sur la consultation des fichiers pour refuser!

M. Jean Dionis du Séjour. C’est l’alinéa 9 de l’article 4.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, Avis défavorable.

(L’amendement n° 24 n’est pas adopté.) (L’article 3, amendé, est adopté.)

Article 4

Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 4.

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. L’article 4 est au cœur de la problématique, puisqu’il évoque les conditions de formation du contrat.

Comment vérifie-t-on la solvabilité de l’emprunteur? C’est tout notre débat.

La philosophie du texte réside dans l’alinéa 9. Il s’agit d’abord du déclaratif, la fameuse fiche remplie par l’emprunteur à la demande du prêteur, et ensuite de la consultation du FICP.

Je ne crois pas, madame la ministre, à la fiche déclarative de l’emprunteur. Les parlementaires connaissent dans leur permanence la situation de personnes en difficulté, coincées, aux abois. Dans ce cas, on ne dit pas tout, on cache une partie de la vérité. On peut parfois avoir honte par mal-être, par pudeur. Vous pouvez qualifier le fait de masquer la vérité de fraude ou de mal-être. J’ai vu des emprunteurs qui avaient 15 lignes de crédit, certains de nos collègues ont évoqué le cas de concitoyens qui avaient 24 lignes de crédit renouvelable. Je ne crois donc pas à la fiche déclarative de l’emprunteur pour des gens en difficulté.

Je n’ai pas compris pourquoi vous avez refusé l’amendement n° 24 de nos collègues socialistes sur la consultation du FICP. Il peut y avoir des incidents de paiement pour des ratés mécaniques comme un défaut de virement. Mais souvent, lorsqu’il y a incident de paiement, c’est parce que l’emprunteur est allé au bout du système des crédits renouvelables. On ne se situe pas dans un système de prévention, mais à un moment où il est trop tard. Cela nous amène au débat sur le fichier positif. Il manque, que vous le vouliez ou non, avec votre système, une information incontestable sur la totalité de l’endettement de l’emprunteur. C’est pour cela que le groupe centriste est très réservé sur la philosophie de vérification de la solvabilité des emprunteurs, qui est tout de même la pierre angulaire de votre texte, et cela mérite un débat de fond.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je pense que nous ne sommes pas les seuls à gauche à nous interroger sur le refus du Gouvernement d’ aller vers ce fichier positif. Même si, au Sénat, vous avez dû concéder un rapport, vous dites souvent que les rapports servent à meubler les placards et pas forcément à déboucher sur quelque chose.

Je ne reprends pas les arguments développés par M. Dionis du Séjour. Vous nous opposez souvent le FICP. Vous savez qu’il n’est pas de même nature, qu’il n’a pas la même consistance. Vous avez promis de le toiletter et de le rendre plus opérant, nous nous en réjouissons, mais ce fichier ne contient que des informations sur des gens ayant déjà connu des incidents de paiement et n’y figurent pas ceux qui sont cependant susceptibles d’en avoir, car leur surendettement les met au taquet.

J’ai pour ma part connu la situation d’un emprunteur ayant 69 crédits dans les Côtes-d’Armor et je crois que notre collègue Diard a vu pire – ils sont toujours plus forts que nous dans le Sud! La personne avait emprunté 2 millions d’euros, et un grand nombre d’emprunts avaient été contractés auprès du même organisme, qui n’a pas tenu de fichier. Mais, à un moment donné, cela doit s’arrêter. La personne ne figurait évidemment pas au FICP, puisqu’elle n’avait connu aucun incident de paiement. Elle payait régulièrement, en contractant un crédit supplémentaire ailleurs ou auprès du même organisme de crédit, jusqu’au jour où la situation est devenue dramatique et où les opérateurs de crédit, qui avaient largement prêté, ont porté plainte.

Le FICP est totalement inopérant. On entend des propos assez extraordinaires selon lesquels cela ne marche pas ailleurs. Mais, curieusement, un certain nombre d’organismes français qui vont dans les autres pays sont très contents de trouver des fichiers positifs.

M. le rapporteur nous a indiqué que le fichier belge n’avait rien changé. Mais sa création a eu deux effets. Une baisse des incidents a été immédiatement constatée et on a assisté à une hausse des prêts. Un certain nombre d’éléments permettent d’apprécier la solvabilité réelle et il n’a pas été accordé de prêts à certains.

Vous nous rétorquez que l’économie risque d’en souffrir. Je ne le crois pas, car certains emprunteurs ne peuvent obtenir de prêts sur le déclaratif et lorsqu’on considère leur situation réelle au regard des engagements bancaires, on voit que l’on peut leur prêter. En Belgique, on a constaté une augmentation des prêts à la consommation depuis la mise en place de ce fichier. On ne peut pas dire qu’il conduit à une réduction du crédit à la consommation.

Le meilleur argument que j’ai entendu émane des banquiers français lorsque j’ai évoqué le fait que La Poste, qui se lance, est plutôt favorable à ce fichier: « Vous voulez donc que d’autres banques viennent sur notre marché en France? » Voilà la réalité. Des banques qui se veulent les chantres de la concurrence y sont favorables, mais ailleurs que dans leur pré carré. Elles ont peur que d’autres obtiennent des informations qui leur permettraient de pratiquer des taux plus bas que les leurs.

Nous ne pouvons pas accepter plus longtemps de nous faire manipuler par l’ensemble ou la quasi-totalité des banques françaises et de leurs filiales et par la Banque de France, simplement parce que la vraie question n’est pas liée à l’efficacité du fichier positif mais à la façon dont on protège son pré carré et à celle dont on parvient à pratiquer entre soi les mêmes taux et à se servir en quelque sorte sur le dos des emprunteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°282 rectifié.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Cet amendement offre la possibilité de responsabiliser les établissements prêteurs, prévenant ainsi les risques de surendettement. S’il est pertinent d’étudier la solvabilité actuelle de l’emprunteur, il convient également d’intégrer une part d’analyse des risques concrets.

L’enquête typologique sur le surendettement en 2007, réalisée en septembre2008 par la Banque de France, montre que les situations de surendettement dit passif, c’est-à-dire engendrées par une diminution des ressources consécutives à un accident de la vie, comme la perte d’emploi, la maladie, le divorce et autres, demeurent largement majoritaires et se trouvent même en augmentation, correspondant désormais à plus de 75 % des cas de surendettement.

On ne peut pas prévoir un accident de la vie, par essence incertain, mais je vais vous démontrer que le bonheur n’est pas forcément dans le pré. (Sourires.) Les établissements de crédit, particulièrement ceux qui octroient des crédits renouvelables, se doivent d’exercer une vigilance renforcée sur la capacité d’emprunt de leurs clients. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas, ils n’hésitent pas à octroyer des crédits malgré la fragilité de l’emprunteur, qu’ils connaissent parfaitement. Pour cela, ils se contentent d’appliquer une procédure automatisée, via des logiciels de scoring qui évaluent les risques de crédit d’un emprunteur.

La crise des subprimes qui a frappé les États-Unis dans un premier temps, puis contaminé le système financier mondial par la suite, était partie de ces mêmes méthodes de scoring, par lesquelles les banquiers voyous accordaient des prêts, bien qu’étant informés de la situation très fragile de leurs clients.

Force est de constater que ces mêmes pratiques ont engendré la recrudescence de Français surendettés – près d’un million en moins de cinq ans, selon la Banque de France –, témoignant ainsi de la précarité croissante des foyers à revenus modestes face à la crise sociale, prolongement incontestable de la crise financière.

Pour ces raisons, nous avons déposé l’amendement n°282 rectifié tendant à insérer à la première phrase de l’alinéa 3 après le mot: « financière » les mots « et plus particulièrement à sa capacité et son potentiel de remboursement ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . C’est au prêteur de déterminer le potentiel de remboursement, alors que, à l’alinéa 3 – endroit où s’insère votre amendement –, c’est celui qui demande le crédit qui indique son potentiel de remboursement.

Nous ne croyons pas que ce soit à l’emprunteur d’évaluer son potentiel de remboursement. Nous pensons que le prêteur doit évaluer si le client potentiel qui demande un crédit est bien en capacité de rembourser.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, Avis défavorable pour les mêmes raisons.

(L’amendement n°282 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°280 rectifié.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Il est défendu.

(L’amendement n°280 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°176.

La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. L’amendement tend à élargir les obligations liées à la formation du contrat de crédit à tous les canaux de distribution, et pas simplement les magasins, y compris le guichet des agences bancaires.

C’est la raison pour laquelle j’ai proposé la suppression, au début de l’alinéa 4, des mots: « Lorsque le crédit est proposé sur un lieu de vente » En conséquence, il convient de supprimer au même alinéa les mots: « sur le lieu même de la vente ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . L’amendement est satisfait dans la mesure où cette confidentialité est assurée sur les sites bancaires. Elle l’est forcément lorsque vous faites vos achats chez vous sur Internet.

L’amendement prévoit que la confidentialité soit assurée sur le lieu de vente, ce qui est le troisième cas de figure. Vous pouvez prendre un crédit chez vous ou sur un lieu de vente. Le seul endroit où la confidentialité n’est pas automatiquement assurée, c’est le lieu de vente.

Si vous acceptiez de retirer votre amendement, ce serait plus simple, car il est satisfait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je pense également que l’amendement est satisfait. Je propose donc de le retirer.

(L’amendement n°176 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°281 rectifié.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Madame la présidente, je ne voudrais pas entamer mon propos en étant hors sujet.

Je rentre d’une réunion publique à Montreuil et j’ai répété, madame la ministre, ce que vous nous aviez dit tout à l’heure, à savoir que le pouvoir d’achat avait augmenté.

Si l’Assemblée n’était pas aussi loin de Montreuil, je vous assure que les participants se seraient formés en manifestation pour venir exprimer leur surprise. Ils n’ont pu constater dans leur porte-monnaie – à moins qu’ils ne disposent pas du même que les gens au nom desquels vous parlez – votre affirmation.

M. Charles de La Verpillière. Il fallait rester à Montreuil!

M. Jean-Pierre Brard. Non! Je voulais vous apporter, comme il est dit dans les écritures sacrées, « la bonne nouvelle »,…

M. Charles de La Verpillière. Il y avait longtemps!

M. Jean-Pierre Brard. …c’est-à-dire la mobilisation du peuple contre ces affirmations qui ne correspondent pas à la réalité.

Vous savez, madame la ministre, j’ai déjà invité quelques collègues de l’UMP à venir débattre à Montreuil et vous êtes la bienvenue pour rencontrer les Montreuillois, car je suis sûr que cela ne vous est pas encore arrivé! Je peux vous assurer que rendre visite à ces gens de sagesse – une ville de quatorze siècles, où Saint-Louis venait faire ses dévotions; bref, la ville de Saint-Louis et de Jacques Duclos (Sourires.) ‑ vous apprendrait beaucoup sur la réalité telle qu’elle est!

M. Georges Mothron. Et les pêches?

M. Jean-Pierre Brard. Vous avez les asperges, moi j’ai les pêches, mon cher collègue. (Sourires.)

J’en viens à mon sujet que je n’avais pas vraiment quitté puisque j’incitais Mme la ministre à se plonger dans le réel tel qu’il est vécu par les gens et non pas tel qu’il est décrit dans les belles histoires qu’on lit la veille de Noël.

Notre amendement vise à contraindre le prêteur à fournir obligatoirement sur un lieu de vente les informations, les explications nécessaires pour éclairer le consommateur dans sa démarche et son engagement. Les associations de consommateurs sont unanimes; elles demandent une information claire sur le crédit à la consommation. Aujourd’hui, les marchands de crédits se contentent de mettre en évidence l’augmentation de ressources sans expliquer que cela nécessite une contrepartie financière. Tel est le sens de notre modeste amendement qui mériterait d’être adopté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Cela vient de Montreuil, mais c’est très subtil! (Sourires.)

M. Brard propose ni plus ni moins de demander au prêteur d’être présent sur le lieu de vente pour fournir les informations. À l’alinéa 4 de l’article 4, il est précisé que « le prêteur veille à ce que l’emprunteur reçoive ces explications de manière complète ». L’intermédiaire du crédit doit fournir les informations. L’intention est bonne s’il s’agit de la fourniture des informations et le texte y répond. En revanche, l’amendement est retors s’il vise à obliger le prêteur à être présent sur le lieu de vente. Je ne pense pas que telle était l’intention de M. Brard.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Avis défavorable également. Notre rédaction correspond au monde réel, monsieur Brard.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Et non au monde de Montreuil.

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Moi aussi, je souhaite rester dans le monde réel avant que nous dépassions l’alinéa 4.

Cet alinéa vise à garantir la confidentialité des échanges lors de la contractualisation d’un crédit. Chacun connaît bon nombre d’enseignes de la grande distribution qui font remplir les formulaires de crédit aux clients non loin du rayon, au milieu des allées, de petits couloirs, séparant chaque rayon. Quelle est la portée normative de cette disposition, monsieur le rapporteur? Il est important que vous le précisiez pour le Journal officiel . Si je contracte un crédit dans des conditions de non-confidentialité, la loi, si j’en apporte la preuve, me permettra de casser le contrat de crédit. En d’autres termes, est-il utile ou non de l’inscrire dans la loi? Si c’est pour continuer comme avant, cela n’en vaut peut-être pas la peine. Il est important de savoir de quelle arme disposera le consommateur qui aurait souscrit un crédit dans des conditions qui ne garantissent pas la confidentialité. Je ne citerai aucune enseigne, mais tout le monde sait qu’il est courant de contractualiser au milieu des rayons au lieu de se rendre dans un espace réservé à cet effet. Normalement, si la loi est appliquée, les choses doivent changer.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Oui.

M. François Brottes. Si tel n’est pas le cas, le consommateur a-t-il de nouveaux droits et comment peut-il les faire-valoir?

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Loos, rapporteur . À cette bonne question, la réponse est oui.

À partir du moment où le texte ne serait pas appliqué, la sanction prévue est la déchéance des droits; nous y reviendrons dans le chapitre sur les sanctions.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Vous vous êtes demandé, monsieur le rapporteur, si mon amendement était subtil ou retors ou subtil et retors. Ce qui est subtil, c’est l’amendement. Ce qui est retors, c’est le prêteur, cela ne vous aura pas échappé. Il faut donc protéger les consommateurs.

À propos de subtilité, vous venez d’une région, monsieur le rapporteur, où nous avons eu les mêmes fréquentations à la différence que, chez vous, ils passaient, et chez nous, ils restaient. Je veux parler des Prussiens en particulier. À défaut de disposer de la force, il faut avoir l’intelligence. Nous fûmes occupés par les Cosaques qui, ayant froid, coupaient les arbres fruitiers, privant les Montreuillois de cette ressource. Savez-vous quelle fut leur réaction? Ils portèrent les fruits au tsar, de passage à Paris après les aventures napoléoniennes. Le tsar, séduit par la succulence de nos pêches, ordonna le retrait des Cosaques. Eh bien, les Cosaques modernes, ce sont les prêteurs.

M. Guy Lefrand. C’est un peu tiré par les cheveux!

M. Jean-Pierre Brard. C’est parce que vous ne connaissez pas Montreuil, mon cher collègue, je vous organiserai une visite groupée, si vous le souhaitez!

Monsieur le rapporteur, madame la ministre, il faut protéger les honnêtes gens et je vous invite à accepter nos amendements. J’indique à mes collègues de la majorité que les soixante-trois amendements que j’ai déposés sur ce texte ont été élaborés collectivement avec les électeurs de ma ville qui ont bien voulu participer à la préparation de ce texte. C’est pourquoi je suis revenu de la réunion publique à laquelle je participais pour venir défendre ces amendements.

M. Lionel Tardy. Ces amendements sont donc tombés du ciel!

M. Jean-Pierre Brard. Non, ils ne sont pas tombés du ciel sauf si vous considérez que Montreuil est au ciel, auquel cas vous avez raison!

(L’amendement n°281 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°279 rectifié.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Du fait de l’obligation pour le prêteur contenue dans le projet de loi de s’assurer que le personnel sur le lieu de vente est dûment formé à la distribution de crédit et à la prévention du surendettement, il est primordial d’adapter chaque formation en fonction du produit vendu. Il ne faudrait pas que cela se passe avec les centres d’appel où l’on vous donne tous les renseignements par téléphone, c’est-à-dire que vous n’en avez aucun ou de très mauvaise qualité. Et vous savez comment sont recrutés les personnels!

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Avis défavorable. Cela relève du domaine réglementaire.

(L’amendement n°279 rectifié, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°278 rectifié.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Il est trop facile de s’en sortir avec un tel argument, monsieur le rapporteur: « réglementaire, réglementaire »!

Vous connaissez le fonctionnement de l’appareil d’État. Je suis sûr que si vous étiez dans ma position, vous auriez exactement la même opinion que moi. Il faut faire confiance, mais c’est encore mieux de contrôler. D’une certaine manière, mes amendements proposent un contrôle a priori, c’est-à-dire que l’on inscrit les bonnes règles dans la loi pour que la volonté du législateur non seulement puisse s’exprimer, mais se concrétise dans les faits.

In fine , il est évident que l’obligation de formation du personnel, sa prise en charge, reposera sur les distributeurs de biens et services ou sur les prêteurs. Cette disposition favoriserait davantage les grandes entreprises qui ont les moyens de former une personne. Derrière ces sociétés de crédit – Cetelem, Sofinco, Finaref – se cachent des banques célèbres que le client n’identifie pas, comme le Crédit agricole ou BNP-Paribas, qui dégagent des bénéfices invraisemblables sur le dos de familles modestes et souvent surendettées. Elles peuvent donc bien financer une formation à leurs salariés d’un minimum de vingt heures, et ce dans un établissement public, pour veiller à ce que cela ne soit pas seulement un endoctrinement avec des visées mercantiles, mais que l’on y délivre aussi le sens de l’intérêt de nos concitoyens. Cela ne coûtera aux banques qu’une misère face aux bénéfices qu’elles réalisent chaque année. Le renvoi à un décret ultérieur n’est pas préconisé de fait. Le dispositif de formation minimum doit intervenir dès l’entrée en vigueur de la loi afin de prévenir d’autres cas de surendettement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Permettez-moi de vous lire l’alinéa 5 de l’article 4 que vous avez forcément lu, puisque vous l’amendez: « Les personnes chargées de fournir à l’emprunteur les explications sur le crédit proposé […] sont formées à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement. L’employeur de ces personnes tient à disposition, à des fins de contrôle, l’attestation de formation […] Un décret définit les exigences minimales auxquelles doit répondre cette formation. »

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Montreuil n’a pas lu le texte!

M. François Loos, rapporteur . Votre amendement est satisfait, monsieur Brard et je suggère que vous le retiriez.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Il est plus que satisfait.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Le rapporteur fait preuve de bonne volonté. Comme j’en attendais autant de sa part, je fais un geste et je retire mon amendement.

(L’amendement n°278 rectifié est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 25.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Nous avons déjà évoqué l’immoralité de la double rémunération des vendeurs, qui vendent du crédit en même temps que leurs produits sur le lieu même de la vente, et vous avez tout à l’heure écarté un amendement à ce sujet. Nous proposons que le vendeur du produit n’ait aucune rémunération, ni lui ni la société qui le rémunère. Dans certains cas, il n’est pas rémunéré directement par la société de crédit, qui indemnise ou dédommage la société qui vend le produit.

Cette situation est anormale. Nous avons tous pu en faire l’expérience en achetant du matériel hifi, une télévision ou un aspirateur. Il suffit de regarder la tête du vendeur lorsque vous lui dites que vous n’êtes pas intéressé par son crédit. M. Delevoye racontait récemment lors d’un débat télévisé qu’il avait eu toutes les peines du monde à refuser un crédit et qu’il avait été harcelé pendant un certain temps par l’organisme de crédit. Non seulement on vend, on harcèle, mais on garde le nom du client dans le fichier pour continuer à le solliciter dans l’espoir qu’il finira par céder.

Nous proposons de clarifier la situation: le produit doit être complètement indépendant du crédit. Vous me rétorquerez que le produit sera un peu plus cher: peut-être. Mais le crédit pourrait être moins cher.

M. Jean-Pierre Brard. Oui.

M. Jean Gaubert. En réalité, les promotions sur la vente du produit sont payées par le crédit, donc par les emprunteurs au bénéfice de celui qui n’emprunte pas. Telle est la situation actuelle, toujours au détriment des plus faibles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Peut-on accepter qu’un vendeur touche une commission pour des crédits qu’il a vendus avec un produit? Nous avons considéré que c’était possible. Si cette pratique était interdite, il est fort probable qu’elle existerait sous d’autres formes difficilement détectables. En tout état de cause, nous avons pensé qu’une corrélation entre les crédits que l’on vend et les revenus que l’on touche n’était pas impossible.

En revanche, nous avons souhaité qu’il n’y ait pas de différence entre le crédit renouvelable et le crédit amortissable. Voilà pourquoi nous avons adopté en commission un amendement de notre excellent collègue Diard…

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Excellent, vraiment!

M. François Loos, rapporteur . …qui interdit de distinguer entre les types de crédit vendus pour déterminer la rémunération du vendeur.

Pour ces deux raisons, la commission a émis un avis défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le rapporteur a parfaitement résumé une partie des arguments qui fondent l’avis défavorable du Gouvernement.

Je souhaite simplement compléter son propos sur un point. En l’état, le texte impose au prêteur des obligations particulières nouvelles, introduisant ainsi des innovations significatives dans la relation entre un prêteur et un emprunteur liés par un crédit à la consommation. C’est notamment le cas de l’obligation de vérifier la solvabilité ou de l’obligation d’explication. Ces obligations nouvelles sont déterminantes dans la formation du contrat; nous en avons évoqué tout à l’heure les conséquences.

Deuxièmement, nous venons d’installer l’Autorité de contrôle prudentiel, qui rassemble sous une même coupe, si j’ose dire, et sous l’autorité de la Banque de France, la Commission bancaire et l’Autorité de contrôle des sociétés d’assurance et des mutuelles. Elle doit jouer le rôle, désormais étendu, d’un véritable gendarme des produits financiers, mais aussi du crédit. Elle sera notamment chargée de s’assurer, dans le cadre du texte actuel, qui interdit tout différentiel de commissionnement entre crédit renouvelable et crédit amortissable – conformément à l’amendement du rapporteur pour avis de la commission des lois, M. Diard, désormais incorporé au texte‚–, de l’absence de pratiques incitant à prendre des risques déraisonnables.

Tous ces éléments nouveaux assurent aux emprunteurs une plus grande sécurité.

Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. En gros, madame la ministre, je vous demande des prunes et vous me répondez que vous avez des bananes.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. C’est meilleur!

M. Jean Gaubert. Ce n’est pas la même chose. Vous proposez une alternative entre le crédit revolving et le crédit amortissable, mais j’ai cru comprendre que le crédit revolving était lui aussi amortissable; vous l’avez dit vous-même. Je ne vois donc pas bien la différence. Nous y reviendrons peut-être au cours du débat.

Quoi qu’il en soit, ce n’est pas cette question que je vous ai posée. Ce que je demande, c’est que l’on moralise la situation, de sorte que chaque produit soit vendu à sa vraie valeur et que les choses soient claires.

En effet, en l’état actuel des choses, les produits sont vendus un peu moins cher, parce que la rémunération du vendeur du produit est complétée par celle du vendeur du crédit. Donc moi, qui n’ai pas besoin de crédit, j’achèterai le produit moins cher, et la différence sera financée par un autre, qui paiera des intérêts trop élevés. On connaît bien cette situation.

Madame la ministre, lors d’autres débats – puisque nous discutons de ces questions depuis un certain temps‚–, vous m’avez paru sensible à l’idée d’interdire cette rémunération. J’aimerais savoir ce qui vous a fait changer d’avis. Si vous nous le disiez, peut-être pourrions-nous à notre tour changer d’avis; mais, pour l’instant, nous n’avons aucune raison de le faire.

(L’amendement n° 25 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°175.

La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. L’amendement est défendu.

(L’amendement n°175, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n°151.

La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Il s’agit d’étendre le champ d’application de l’alinéa 7 aux contrats de crédit souscrits grâce à un moyen de communication à distance.

En effet, là encore, on limite le champ d’application au lieu de vente, alors qu’il serait aujourd’hui important de proposer de vendre à distance un crédit renouvelable, mais aussi un crédit amortissable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . La commission a repoussé cet amendement. Toutefois, à titre personnel, j’y suis plutôt favorable, car il tient compte d’une réalité.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Eh oui: c’est la vraie vie!

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est du bon sens!

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Voilà!

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Madame la députée, vous proposez dans cet amendement, très proche de l’amendement n°175, d’étendre à la vente à distance l’alternative du crédit renouvelable et du crédit amortissable.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Oui.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Cela me semble tout à fait justifié. Avis favorable.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Merci, madame la ministre! (« Très bien! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je souhaite simplement appeler l’attention sur une question de méthode. Jean Gaubert et moi-même nous étonnions de n’avoir pas examiné en commission cet amendement, qui est un bon amendement.

Jean Gaubert m’a alors rappelé que la commission s’était réunie en application de l’article 88 de notre règlement. Or, dans ce cas, on nous indique généralement les amendements retenus par le rapporteur et ceux qui ne le sont pas, sans que nous ayons le temps de les examiner, ce qui explique que certains collègues les découvrent en séance.

C’est ainsi que nous travaillons. Si je le précise, c’est pour que nous ne passions pas pour des imbéciles lorsque le rapporteur indique en séance que l’amendement a été examiné en commission. En réalité, on nous a simplement indiqué que l’amendement était rejeté, en le désignant par son numéro.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Absolument.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Puisque c’est ainsi, monsieur Brottes, je m’opposerai à l’examen de vos amendements en séance!

M. François Brottes. M. Ollier me menace!

(L’amendement n°151 est adopté.)

M. Éric Diard, rapporteur pour avis de la commission des lois. Votez Labrette-Ménager!

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°277 rectifié.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Qui n’aspire à posséder une belle maison? Vous le savez bien, madame la ministre: depuis la Révolution, au fond de chacun de nous sommeille un propriétaire. Certains parviennent à satisfaire leur fantasme, d’autres moins.

Ou bien on rêve de posséder une belle voiture. Nous avons évoqué tout à l’heure les choix possibles: une Ferrari ou une Fiat Uno…

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Une Punto!

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Une Twingo!

M. Jean-Pierre Brard. Je suis d’accord avec vous: il faut donner la priorité à Renault, malgré son épouvantable patron.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. C’est une très bonne voiture, la Twingo!

M. Jean-Pierre Brard. Je partage votre avis sur la Twingo, mais je n’ai pas la même opinion favorable du patron de Renault.

M. Éric Diard, rapporteur pour avis de la commission des lois. Lequel? L’ancien président de la HALDE?

M. Jean-Pierre Brard. Je vois que nous sommes d’accord, madame Rosso-Debord.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Monsieur Brard, n’interrompez pas Mme Rosso-Debord! (Sourires.)

Mme la présidente. N’hésitez pas à poursuivre, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je n’hésite pas, madame la présidente,...

Mme la présidente. Je vous y encourage même.

M. Jean-Pierre Brard. …mais cela devenait intéressant: notre collègue défendait la production nationale malgré M. Ghosn.

Je reviens au sujet qui nous occupe. (« Ah! » sur les bancs du groupe UMP.)

De nombreuses personnes veulent aussi posséder les derniers gadgets: le dernier écran plasma, le dernier téléphone portable, etc. Heureusement, les sociétés de crédit vous facilitent l’accès à ces biens, en vous proposant par exemple de payer vos meubles dans un an, votre voiture sur sept ans ou en vous octroyant un prêt hypothécaire sur trente-cinq ans ou plus! Incroyable mais vrai! Le problème, pour bien des gens, c’est que tous ces petits paiements faciles s’accumulent jusqu’à entraîner les dépenses que nous avons déjà évoquées.

Voilà pourquoi il est important que, pour financer l’achat de biens ou de prestations de services, un particulier puisse, lorsque le montant de l’achat dépasse cinq cents euros, choisir de conclure un contrat de crédit amortissable au lieu d’un contrat de crédit renouvelable, à des taux nettement moins préjudiciables à sa situation financière.

Nous plaidons ainsi pour que les prêteurs favorisent davantage les prêts personnels, moins chers et moins risqués.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Tout à l’heure, M. Brard a eu des bontés pour moi en retirant un amendement, et il m’a demandé d’en avoir aussi à son égard.

Monsieur Brard, je suis d’accord avec vous quant au fond.

M. Jean Dionis du Séjour. Ah!

M. François Loos, rapporteur . Malheureusement, cette question relève du domaine réglementaire. Mieux vaut donc laisser fixer par décret le seuil à partir duquel on doit proposer un crédit amortissable.

M. Jean Gaubert. Peut-être Mme la ministre peut-elle prendre un engagement sur ce point?

M. François Loos, rapporteur . Avis défavorable, donc, même si, quant au fond, vous avez raison de poser la question en ces termes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Monsieur Brard, votre proposition part d’un bon sentiment.

M. Jean-Pierre Brard. C’est gentil, mais cela commence mal!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Malheureusement, le Gouvernement lui est défavorable.

En effet, nous avons étudié la question, soupesé les arguments et travaillé – soyons clairs – avec les opérateurs pour déterminer le seuil au-delà duquel il fallait obligatoirement proposer soit un crédit amortissable, soit un crédit renouvelable. Il s’agit d’une obligation nouvelle que nous imposons aux prêteurs. Or, à mille euros, cela passe de justesse: si l’on descend très en deçà de ce seuil, l’équilibre est remis en cause.

Le rapporteur l’a dit, cela relève du domaine réglementaire. Mais je ne saurais m’engager devant vous à étudier un seuil de cinq cents euros, puisque je ne pourrai pas tenir cette promesse: cela ne passerait pas. Le seuil raisonnable est de mille euros, et ce n’est déjà pas un seuil facile.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Sans vouloir vous offenser, madame la ministre, vous nous répondez toujours en vous plaçant du point de vue des banques; mais il faut aussi envisager le point de vue des familles. Or cinq cents euros représentent la moitié d’un SMIC mensuel, soit une somme relativement importante pour nombre d’entre elles.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Cela n’a rien à voir.

M. Jean Gaubert. Voilà la vraie question. Vous nous parlez toujours des banques; mais, en un an, elles ne se sont pas mal débrouillées: cela va bien pour elles! Mais cela va beaucoup moins bien pour de nombreuses familles de notre pays.

M. William Dumas. Très bien!

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Madame la ministre, votre raisonnement souffre d’un déséquilibre. En effet, vous discutez avec les opérateurs, c’est-à-dire avec ceux qui profitent. Naturelle ment, leur conception du point d’équilibre n’est pas nécessairement la nôtre: le taux de rentabilité qu’ils exigent n’est pas raisonnable.

À mille euros, cela passe de justesse, avez-vous dit. Nous devons progresser, et tout ce qui contribue à mieux protéger les consommateurs est bon à prendre. À supposer que votre hypothèse des mille euros soit la bonne et suscite un consensus – bien que ce soit sous la forme « un pâté, une alouette »‚–, pourriez-vous nous indiquer quand le texte réglementaire paraîtra?

En effet, vous savez comme moi, surtout dans votre ministère, que, entre les textes que nous votons ici et les textes d’application, les délais sont longs, au point que certains textes ne sont jamais publiés. J’ai à l’esprit des exemples très précis.

Vous êtes une ministre qui a de l’autorité sur ses services; vous avez un poids politique que vous pouvez utiliser. Je ne dis pas cela pour vous flatter. Vous le savez bien: certains ministres ont une carte de visite, mais personne n’en tient compte, surtout pas le Président de la République. Vous, en revanche, vous avez l’autorité nécessaire pour imposer à vos services une volonté politique.

Ma question est simple: je le répète, si votre chiffre est le bon, combien de temps après le texte législatif le texte réglementaire sera-t-il publié? Il s’agit presque d’un marchandage: si j’obtiens une bonne réponse, j’accepterai de faire un geste de bonne volonté qui ne me satisfait qu’à moitié, puisque vous doublez en fait la mise par rapport à ma proposition.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Monsieur Brard, je m’engage avec tous les membres de mon administration qui travaillent sur ce texte à ce que ce décret soit publié dans un délai de trois mois à compter du vote définitif de la loi. De mon point de vue, il s’agit d’un texte urgent, sur lequel nous devons avancer vite. Pour le mettre au point, j’y ai passé, je puis vous l’assurer, beaucoup plus de temps avec les associations de consommateurs ou du même type que CRESUS qu’avec les banques.

J’ai donc essayé d’élargir mon horizon qui, parfois, je le reconnais, est un peu limité.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Mais non, mais non!

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Cette réponse est satisfaisante: un délai de trois mois me semble parfait. Fixer le seuil à 1000 euros est pertinent dans la mesure où la plupart des détenteurs de crédit renouvelable y ont recours pour acquérir des biens d’une valeur inférieure, qu’il s’agisse de meubles, d’équipement électroménager, de hi-fi, de téléviseurs ou de vêtements. Les crédits classiques, quant à eux, sont davantage destinés à financer des voitures neuves ou des travaux d’aménagement.

Cela dit, il ne faudrait pas aller plus bas et il pourrait même être intéressant de remonter le chiffre.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Madame la ministre, je note que nous progressons grâce au dialogue.

D’abord, vous progressez dans la voie de l’autocritique.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. J’ai de bonnes lectures! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Oui, je sais que vous avez de bonnes lectures désormais. Mais comme disait Marx, « la preuve du pudding, c’est qu’on le mange ». Vous avez déjà la substance liquide, il nous faut maintenant voir s’il y a le pudding avec et si vous le dégustez ainsi que Marx l’a conçu.

Vous savez, la vie est un long processus dont les contradictions incessantes enrichissent et la pratique et la réflexion. Et, chers collègues de l’UMP, de ces contradictions naît l’unité dialectique supérieure si excitante pour l’intellect.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Oh là là!

M. Jean-Pierre Brard. Vous n’allez pas me dire que c’est difficile pour vous, parce que je sens que vous reculez devant les difficultés.

M. Guy Lefrand. Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement!

M. Jean-Pierre Brard. Madame la ministre, vous avez indiqué que vous avez consacré plus de temps aux associations de consommateurs qu’aux banquiers. Je pourrais en tirer une conclusion facile jusqu’à laquelle je n’irai: c’est qu’avec les banquiers vous tombez spontanément d’accord et que les réunions sont vite terminées, tandis qu’avec les consommateurs le débat est plus difficile.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. C’est un peu facile!

M. Jean-Pierre Brard. Vous me permettrez de considérer qu’à cette heure on peut plaisanter un peu. Votre pratique, madame la ministre, ne correspond pas à la caricature que je viens de présenter.

Mais là encore, ce qui nous départagera, c’est l’examen concret de la réalité concrète, disait le même, de façon fort sage.

Compte tenu de l’engagement que vous avez pris, j’accepte de retirer mon amendement.

(L’amendement n°277 rectifié est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°165.

La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Dès lors que le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur, il me semble important qu’il ne se contente pas de simples informations mais puisse obtenir des justificatifs.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Fournir des justificatifs est une procédure normale: il est évident que le prêteur le demandera. La question est de savoir s’il faut intégrer une telle disposition dans la loi. À titre de comparaison, dans le secteur du crédit immobilier, de nombreux justificatifs sont demandés car c’est le rôle du prêteur d’évaluer la possibilité pour l’emprunteur de rembourser, mais leur liste n’est pas fixée dans la loi. Ce n’est pas son rôle. Il n’est que d’imaginer le contentieux que cela pourrait créer.

Je vous demande donc de retirer votre amendement, madame Labrette-Ménager.

Mme la présidente. Le retirez-vous?

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Oui, madame la présidente.

(L’amendement n°165 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n os  26 et173, pouvant être soumis à une discussion commune.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. L’amendement n°173 est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. William Dumas, pour soutenir l’amendement n° 26.

M. William Dumas. Nous sommes ici tous d’accord pour dire qu’il est nécessaire de protéger les emprunteurs: nous sommes au cœur du débat.

Afin d’éviter le surendettement, il convient de responsabiliser l’emprunteur comme le prêteur. L’emprunteur doit prouver qu’il a les moyens de rembourser dans la fiche d’informations fournie lors de chaque offre de crédit et le prêteur doit s’assurer de sa situation.

Il est absurde d’imaginer que la souscription d’un nouveau crédit renouvelable pourra aider à résorber une dette antérieure. Pourtant, bon nombre de ménages souscrivent des crédits revolving pour effacer la dette du précédent, et ainsi de suite, comme l’a très bien expliqué Jean Gaubert.

Compte tenu du fait que 84 % des dossiers déposés aujourd’hui en commission de surendettement comportent en moyenne six crédits revolving , il est urgent et impératif de limiter ces souscriptions en cascade qui conduisent inévitablement au surendettement puis aux drames familiaux.

Pour éviter cela, la solution que nous proposons est on ne peut plus simple: il suffit d’obliger le prêteur à s’assurer de la solvabilité de son futur client en consultant ses trois derniers relevés de compte. Certes, l’on peut toujours falsifier un relevé de compte mais les souscripteurs, dans leur grande majorité, sont honnêtes.

Il faut que la loi précise à partir de quelles pièces la vérification de la solvabilité sera établie, car nous savons tous que certains établissements sont peu regardants sur les conditions de prêts dans la mesure où les taux sont attrayants.

À titre d’exemple, je citerai une plaquette de Carrefour où l’on demande parmi les pièces à fournir: « une carte d’identité, les deux derniers bulletins de salaire de vous et votre conjoint, votre dernier avis d’imposition, un RIB, un chèque annulé et la dernière facture de France Télécom ou EDF ».

Il faudrait que la loi précise les justificatifs à fournir.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune?

M. François Loos, rapporteur . J’aurai recours aux mêmes arguments: pourquoi la loi devrait-elle fixer la liste des justificatifs à fournir pour obtenir un crédit renouvelable?

Alors que les crédits immobiliers portent sur des sommes bien plus importantes, aucune pièce n’est exigée dans la loi. Les banques demandent ce qu’elles estiment nécessaire de demander et le client le leur fournit.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Avis défavorable également.

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Libre aux prêteurs de demander les justificatifs qu’ils veulent, dites-vous, monsieur le rapporteur. Mais que penser quand on lit dans cette plaquette Carrefour que l’un des justificatifs demandés est la dernière facture d’EDF ou de France Télécom? Que va en déduire le client potentiel s’il n’est plus abonné à France Télécom? Il pourra se croire exclu du prêt.

La loi aurait parfois besoin d’être précise car les acteurs sont dans l’incapacité de faire eux-mêmes les choses intelligemment.

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. J’estime que ces amendements sont d’application beaucoup plus facile que le fameux fichier positif. Il suffira au prêteur de demander au souscripteur ses trois derniers relevés bancaires. La plupart du temps, l’emprunteur n’a qu’un compte bancaire sur lequel sont versés ses salaires et s’effectuent la majorité de ses prélèvements. Cela permet donc de voir si certains prélèvements se chevauchent sur un ou deux mois et d’établir un bilan comptable de la situation susceptible de déterminer si le souscripteur est en mesure de respecter son engagement.

Certes un relevé peut toujours être falsifié mais la comparaison des photocopies aide. C’est un document très facile à obtenir, tout le monde le reçoit d’office. Et sur trois mois, à moins que la personne ait vingt comptes différents, ce dont on peut douter, on dispose de l’ensemble des éléments qui permettent de prendre une décision et de contrôler les dépenses et les recettes de l’emprunteur.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Rappelons la situation: dans 95 % des cas, tout se passe bien, mais 90 % des dossiers de surendettement comportent des crédits renouvelables. Que se passe-t-il? Les banques ne procèdent à aucune vérification et mutualisent seulement les impayés par le biais de taux extrêmement élevés. Ne nous dites pas après cela que les prêteurs s’assurent de la solvabilité de l’emprunteur. Le système actuel est indigent: au départ, une fiche avec tous les non-dits possibles et, à l’arrivée, l’inscription au fichier des incidents de remboursements des crédits aux particuliers quand l’emprunteur est allé au bout des possibilités du crédit renouvelable.

Fournir les trois derniers relevés de compte, comme le proposent les amendements en discussion, permet au moins de partir d’un document moins pauvre que votre simple fiche déclarative. Bien sûr, il peut y avoir plusieurs comptes, tout peut être contourné. Mais au moins il s’agit d’un progrès.

Je voudrais, madame la ministre, monsieur le rapporteur, que vous rentriez dans le débat. Le contrôle de solvabilité effectué actuellement par les prêteurs fonctionne-t-il? Nous pensons que non et que c’est même la cause de bien des drames. Quelles propositions faites-vous?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. D’article en article, d’amendement en amendement, on se situe toujours au cœur du débat. Tout le texte est important. Quand nous aborderons les questions du microcrédit ou du fichier, vous me direz que c’est votre cœur à vous. Chacun trouve son cœur où il peut dans ce texte.

M. William Dumas. Et les millions de Français?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Cela nous intéresse tous et cela les intéresse beaucoup. Je souhaite que nous façonnions un beau texte, un texte qui fonctionne bien.

Pourquoi aujourd’hui de nombreux organismes financiers ne se préoccupent-ils pas beaucoup de la solvabilité? Parce qu’ils n’ont pas l’obligation de le faire et qu’ils mutualisent les risques. Et si un établissement financier n’est pas soumis à une obligation légale qui implique sa responsabilité et peut l’exposer à un contentieux, il continue tant que ça roule. C’est pour cela que notre texte prévoit une obligation nouvelle à la charge du prêteur, quel qu’il soit – banques, établissements financiers ou leurs succédanés –, à savoir la vérification de la solvabilité.

Je formulerai une objection et je vous dirai ensuite quelle solution de compromis me paraît souhaitable, puisqu’une solution intelligente a été élaborée.

Mon objection de fond, c’est qu’à partir du moment où vous commencez à enfermer dans le texte de la loi, sans concertation préalable, la liste précise des justificatifs que devront fournir les emprunteurs potentiels, le risque est grand que l’emprunteur considère qu’il a rempli son obligation par le simple fait de collecter les documents demandés. Il me semble que cette obligation est trop restreinte alors qu’elle doit être large.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Par ailleurs, s’agissant de cet amendement, que penser du choix des trois derniers relevés bancaires? Il se peut fort bien qu’une personne ait organisé sa situation financière en ouvrant plusieurs comptes. En ce cas, les trois derniers relevés d’un seul compte ne fourniraient pas beaucoup d’informations.

M. William Dumas. Admettez que peu de personnes sont dans cette situation!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Enfin, imaginons que j’achète du matériel de sport chez Décathlon au moyen d’un crédit renouvelable. Je n’aurai pas forcément envie de montrer au vendeur, aussi bien formé soit-il, mes trois derniers relevés bancaires où il pourrait voir les restaurants où je suis allée dîner et les achats de sous-vêtements que j’ai fait. Cela relève de ma vie privée.

Une solution de compromis intelligente est proposée. Elle vise à préciser ce point par décret, à consulter les associations de consommateurs pour voir ce qui leur paraît légitime et à prévoir une liste d’informations beaucoup plus large, afin de ne pas enserrer l’obligation de vérification de solvabilité dans un petit nombre de documents.

Madame Labrette-Ménager, monsieur Raison, votre amendement n°154 prévoit également de renforcer les obligations de vérification de solvabilité des emprunteurs lorsque les sommes empruntées dépassent un certain seuil.

Monsieur Dionis du Séjour, j’espère avoir répondu sur le fond et être entrée dans le cœur du débat.

(L’amendement n° 26 n’est pas adopté.)

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Madame la présidente, je retire l’amendement n°173.

(L’amendement n°173 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Diard, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n°146.

M. Éric Diard, rapporteur pour avis . Cet amendement vise à apporter une réponse aux dénégations de signature des emprunteurs. La commission des lois avait adopté un dispositif reposant sur l’annexion au contrat d’une copie des pièces d’identité des emprunteurs. Néanmoins, j’ai bien entendu les objections du rapporteur selon lesquelles on risque de se heurter à des fraudes. Le présent amendement propose donc un autre mécanisme. Il prévoit, pour les crédits excédant un montant fixé par décret, que chaque emprunteur présente au prêteur l’original d’une pièce d’identité. Cette règle, qui pourrait s’appliquer au moment de la vérification de la solvabilité des emprunteurs, serait de nature à rendre plus systématique la présence des deux conjoints lors de la souscription d’un crédit et permettrait ainsi de limiter le nombre de contrats souscrits par l’un à l’insu de l’autre.

Je citerai le cas d’un couple dont l’un des membres avait contracté soixante-sept crédits à l’insu de l’autre qui effectuait des voyages d’affaires. Ce couple a dû vendre sa maison.

M. François Brottes. Je connais un cas similaire où trente-deux crédits avaient été contractés!

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . La proposition de M. Diard renvoie à ce que vient de dire à l’instant Mme la ministre à propos de l’amendement n°154.

Sur le fond, il s’agit d’éviter des cas de surendettement et des conflits dans les ménages. Cette question pourra être débattue avec les associations de consommateurs.

La commission avait émis un avis défavorable au présent amendement. Après la discussion qui vient d’avoir lieu, je propose de renvoyer M. Diard à l’amendement n°154.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Même avis. Étant donné que le décret relatif à la liste des informations prévoira de demander à chacun des deux co-emprunteurs un justificatif d’identité, je vous invite, monsieur Diard, à retirer votre amendement au bénéfice de l’amendement n°154 que nous allons examiner dans quelques instants.

M. Éric Diard, rapporteur pour avis . Je retire donc l’amendement n°146 car je considère qu’il est satisfait.

(L’amendement n°146 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l’amendement n°276 rectifié.

M. Jean-Pierre Brard. Selon le baromètre de surendettement établi par la Banque de France, 50 % des crédits en cours ont plus de cinq ans et 75 % des cas de surendettement sont liés à des crédits revolving . Il apparaît donc primordial de vérifier la solvabilité de l’emprunteur tout au long de la relation commerciale. Le surendettement a largement changé de nature. Au début des années 90, il était souvent lié à un excès de crédit. C’était un surendettement actif, de cigale en quelque sorte. Ce n’est plus majoritairement le cas aujourd’hui puisque 75 % des surendettés se trouvent dans cette situation en raison d’accidents de la vie: perte d’emploi, divorce ou maladie par exemple.

Pour faciliter cette démarche, l’établissement qui gère le compte de l’emprunteur est le mieux placé pour délivrer une validation par écrit et motivée.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Avis défavorable: cet amendement est satisfait par les alinéas 22 à 25 de l’article 5.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour les mêmes raisons.

(L’amendement n°276 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l’amendement n°284.

M. Jean-Pierre Brard. Je ne suis pas vraiment convaincu par la réponse précédente.

L’amendement n°284 vise à responsabiliser les organismes prêteurs, qui devront dorénavant apporter la preuve de leur démarche visant à s’informer de la situation de solvabilité de l’emprunteur.

Si le prêteur ne peut apporter cette preuve, il commet une faute par l’omission d’une formalité substantielle et se voit alors retirer le droit d’exercer toute procédure de recouvrement à l’encontre de l’emprunteur défaillant.

De même, s’il s’avère que le prêteur a accordé un crédit alors que la solvabilité de l’emprunteur était manifestement insuffisante lors de la signature, le créancier ne pourra plus engager de procédure de recouvrement. En outre, le prêteur sera condamné à une amende dont le montant est équivalent à celui du crédit accordé.

Cette mesure vise évidemment à faire en sorte que les prêteurs prennent leurs responsabilités au sérieux. Certains craignent que cette réforme instituant une responsabilité réelle du prêteur ne restreigne l’offre de crédit et la croissance, ce qui est tout à fait vrai. Mais il ne saurait y avoir de croissance économique saine et durable fondée sur le surendettement et la détresse de la population. Cette croissance par endettement serait fictive et socialement destructrice.

Il est donc préférable de s’en prémunir en encadrant de façon plus responsable l’offre de crédit. On voit bien que pénaliser le prêteur qui n’a pas fait son travail convenablement serait une façon efficace d’atteindre notre objectif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Nous avons prévu un régime de sanctions aux articles 14 et suivants du texte. Pour ce cas particulier, l’alinéa 4 de l’article 14 prévoit la déchéance du droit des intérêts tandis que l’amendement de M. Brard vise la déchéance des intérêts et du capital. Nous avons considéré que la déchéance totale ou partielle des intérêts était suffisante dans ce cas.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les mêmes raisons.

L’alinéa 4 de l’article 14 prévoit la déchéance totale ou partielle des intérêts en cas de non-respect de l’une quelconque des obligations mises à la charge des banques, notamment dans le cadre de la formation du contrat. Y ajouter la sanction de non-remboursement du capital nous paraît excessif et contraire à la Convention européenne des droits de l’homme et à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, dans la mesure où elle constitue une « atteinte majeure à la force obligatoire du contrat et aux droits du créancier ». Je cite in extenso la terminologie appropriée que l’on retrouve dans les arrêts pris en la matière.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. La terminologie appropriée, pour reprendre votre formule, madame la ministre, c’est celle que vous avez lue. Mais ce ne sont pas des textes sacrés! Cela prouve simplement qu’ils ne sont pas pertinents et qu’ils mériteraient d’être modifiés. Après tout, nous sommes là pour cela!

Le rapporteur nous dit qu’il ne faut pas toucher au capital. Si l’on en reste à votre système, vous allez punir de temps en temps ces gens qui prêtent de façon inconsidérée. Mais cela vaudra toujours le coup qu’ils tentent leur chance et prêtent n’importe comment puisque, quand ils seront pris la main dans le sac, ils perdront seulement les intérêts mais pas le capital. Ils raisonneront de la même façon que ces automobilistes qui stationnent de façon illégale et qui disent avoir peu de risques d’être verbalisés. Vous protégez trop les prêteurs qui poussent au crime.

(L’amendement n°284 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l’amendement n°283.

M. Jean-Pierre Brard. Madame la ministre, j’ai bien compris que nous ne défendons pas les mêmes. Ceux que vous défendez avec ardeur, pour ma part, je ne les défends pas du tout, tandis que vous ne voulez pas les tacler trop fort.

Je vous propose un amendement de repli qu’il vous sera peut-être plus facile de faire adopter pour une réelle responsabilisation de vos amis banquiers, allais-je dire – mais je ne veux pas être désagréable à cette heure tardive. L’engagement de leur responsabilité serait limité à l’impossibilité d’exercer une procédure de recouvrement à l’encontre d’un débiteur défaillant dont la solvabilité n’aurait pas été vérifiée au préalable.

C’est en quelque sorte un amendement allégé puisqu’il ne prévoit plus que les prêteurs soient également condamnés à une amende.

(L’amendement n°283, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager, pour soutenir l’amendement n°177.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Il est défendu, de même que l’amendement n°167.

(L’amendement n°177, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) (L’amendement n°167, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°154, qui fait l’objet d’un sous-amendement n°351.

La parole est à M. Michel Raison, pour soutenir l’amendement.

M. Michel Raison. Le problème en matière de crédit, c’est toujours la vérification de la solvabilité de l’emprunteur. S’agissant des entreprises, on dispose de leur bilan mais, pour les ménages, c’est beaucoup plus difficile.

L’amendement vise donc à renforcer les obligations de vérification de solvabilité tout en sachant que la solvabilité est évolutive. On a intérêt à ce que la solvabilité soit vérifiée à l’aide de pièces justificatives lorsque la somme empruntée atteint un montant défini par décret. En dessous de ce seuil, une simple déclaration sur l’honneur pourrait suffire.

Le projet de loi, tel qu’amendé par la commission des affaires économiques, prévoit que les organismes prêteurs devront collecter des justificatifs pour confirmer l’ensemble des informations requises en vue d’apprécier la solvabilité d’un emprunteur potentiel. Il apparaît plus simple et plus cohérent de n’exiger des justificatifs que lorsque le crédit souscrit est supérieur à un seuil défini par décret. Lorsque la déclaration sur l’honneur ou la corroboration des pièces justificatives avec les informations déclarées ont été accomplies, les informations de la fiche mentionnée à l’article L.311-6 deviennent alors opposables à l’emprunteur de bonne foi.

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir le sous-amendement n°351.

M. Lionel Tardy. Ce sous-amendement apporte deux modifications à l’amendement n°154. Il précise que la liste des pièces justificatives à fournir sera définie par décret: Mme la ministre s’est exprimée à ce sujet. Il supprime par ailleurs la phrase précisant que les informations déclarées deviennent opposables à l’emprunteur de bonne foi. Cette disposition est superfétatoire dans la mesure où elle s’inscrit déjà dans le droit commun.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement?

M. François Loos, rapporteur . Je rejoins la démonstration faite tout à l’heure par Mme la ministre. La commission n’a examiné que l’amendement. À titre personnel, j’émets un avis favorable à l’amendement tel que M. Tardy souhaite le sous-amender.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je ne vous infligerai pas la répétition des arguments que j’ai tâché de faire valoir tout à l’heure. Je suis reconnaissante aux députés qui ont présenté cet amendement dûment sous-amendé, visant à encadrer le crédit dans des limites raisonnables puisque, au-delà d’un certain seuil, des pièces justificatives, comme des pièces d’identité, seront exigées.

Je reste ouverte à la concertation pour déterminer le seuil précis au-delà duquel s’appliquerait cette demande de pièces justificatives.

Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Comme vient de me le souffler William Dumas, nous tournons un peu autour du pot, mais peut-être allons-nous parvenir à écrire des textes applicables qui seront donc utiles aux consommateurs. L’idée de renvoyer à un décret n’est pas absurde; on comprend bien que la loi ne peut pas figer des dispositions qui devront être actualisées. L’intention est ici d’autant plus louable qu’elle est juste.

Il me paraît important de confirmer que c’est parce que le droit commun le prévoit déjà qu’on supprime la phrase précisant que les informations déclarées deviennent opposables à l’emprunteur de bonne foi. Si, malgré les instructions données, les stipulations ne sont pas respectées, cela pourra servir d’argument pour défaire le contrat passé sans ces éléments d’information. Je fais les questions et les réponses mais le rapporteur est mieux placé que moi pour cet exercice. (Sourires.)

La question du seuil me préoccupe. Nous nous donnons les moyens de contrôler de façon responsable les conditions d’octroi d’un emprunt mais nous ne pouvons rien savoir d’un éventuel cumul de crédits. On peut très bien fixer le seuil à 990 ou à 1000 euros et avoir affaire à quelqu’un qui demande son cinquantième crédit à 950 euros! Je vous laisse calculer le total. Or tous les cas, ou presque, que nous avons dénoncés les uns et les autres résultent du cumul de petites sommes – qui sont, certes, de grosses sommes lorsque l’on touche le SMIC, ainsi que le notait Jean Gaubert.

Nous allons être d’autant plus confrontés à la question du cumul que vous avez décidé de rendre « rechargeable » le crédit en question. Comment éviter, malgré le seuil, le surendettement de personnes qui auront emprunté à de nombreuses reprises, et dans des délais parfois courts, des sommes relativement modestes?

Vous n’apportez pas de réponse à cette question. Peut-être ai-je mal lu, mal compris; peut-être, comme il nous y a habitués, le rapporteur va-t-il nous révéler qu’on trouve un peu plus loin dans le texte une disposition répondant à ma préoccupation. Si ce n’est pas le cas, je souhaite en avoir le cœur net.

M. François Loos, rapporteur . J’ai beau chercher…

M. William Dumas. Le rapporteur n’a pas de réponse!

M. François Brottes. Allez-vous nous répondre, monsieur le rapporteur?

Mme la présidente. Il ne semble pas qu’il le souhaite.

(Le sous-amendement n°351 est adopté.) (L’amendement n°154, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. François Brottes vient de poser une vraie question, ce que paraît avoir compris M. le rapporteur qui n’a pas cherché à nous donner une réponse dilatoire et avoue ne pas pouvoir nous informer. Au nom de mon groupe, je demande une suspension de séance de cinq minutes pour lui permettre de préparer une réponse cohérente. J’insiste: François Brottes a posé une vraie question qui mérite une vraie réponse.

Mme la présidente. Avant de faire droit à votre demande, monsieur Gaubert, je vais donner la parole à M. le président de la commission.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Puisqu’une suspension de séance vient d’être demandée, le moment me paraît bien choisi pour faire le point sur la suite de nos travaux. Avec les responsables des groupes, Mme la ministre, le rapporteur et les rapporteurs pour avis, et si vous en aviez été d’accord, madame la présidente, nous avions caressé l’espoir de finir cette nuit en séance prolongée. Ce ne sera pas possible, car il reste encore 210 amendements à examiner. En accord avec Mme la ministre et les représentants des groupes, je vous propose donc, afin de ne laisser subsister aucun doute, de lever la séance à une heure, comme d’habitude, et de reprendre nos travaux demain à neuf heures et demie.

L’espoir caressé s’est malheureusement évanoui au fur et à mesure que M. Brard développait ses arguments, nous berçant tout au long de la nuit par l’évocation de l’ambiance merveilleuse qui règne à Montreuil, où j’espère qu’il nous invitera après la fin de la séance.

M. Jean-Pierre Brard. Et encore, je ne vous ai pas parlé de Mme Voynet!

Mme la présidente. J’étais parvenue aux mêmes conclusions que vous, monsieur le président.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante, est reprise le vendredi 9 avril 2010 à zéro heure cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Loos, rapporteur . J’aimerais répondre à la question que posait tout à l’heure notre collègue François Brottes. Il s’agissait de savoir s’il y aurait un seuil au-dessus duquel devraient être fournies des pièces justificatives et en dessous duquel ce ne serait pas nécessaire. La question était importante, dans la mesure où un crédit d’un montant inférieur à ce seuil pourrait être accordé plus facilement qu’un crédit d’un montant supérieur.

Vous avez entendu, monsieur Brottes, ce qu’a dit Mme la ministre: elle organisera une concertation avec les associations de consommateurs, avec toutes les parties prenantes, avant d’établir par décret la liste de ces pièces. A partir du moment où la concertation sera mise en place, elle portera tout autant sur le seuil que sur la liste. La question piège que vous posez reste donc posée, et fera partie de la concertation préalable au décret.

M. Jean Gaubert. Ce n’était pas une question piège, c’était une question pratique.

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Loin de moi l’idée de vous piéger, monsieur le rapporteur. Nous posons ici des questions utiles pour ceux qui liront le compte rendu de nos débats et en tiendront compte dans l’application de la loi.

Je vous remercie de cette réponse. Cela signifie que, dans les échanges qui auront lieu avant la rédaction du décret, la question du cumul des crédits sera abordée. La présentation d’un certain nombre de pièces pourra être rendue obligatoire afin de vérifier s’il y a cumul de crédits ou pas. Du moins, vous ne fermez pas la porte à cette éventualité, et je vous en remercie. C’est une réponse qui me paraît constructive.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n os 152 et 333, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager, pour soutenir l’amendement n°152.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir l’amendement n°333.

M. Jean Dionis du Séjour. Je reviens un instant, si vous me le permettez, madame la présidente, à l’amendement n°154. Cet amendement présente beaucoup d’incertitudes, notamment en ce qui concerne le seuil, ou encore les pièces justificatives, mais il va néanmoins dans la bonne direction. Nous avons posé un principe et renvoyé à un décret d’application: il y a là un point de méthode dont je voudrais que nous nous souvenions quand nous aborderons le fichier positif. Je dépose simplement un petit caillou blanc. La méthode consiste à prendre le temps nécessaire pour élaborer les décrets, tout en posant d’emblée le principe.

L’amendement n°333 porte sur un débat déjà ouvert par notre collègue Jean Gaubert. On comprend bien que les vendeurs soient financièrement intéressés, au moyen de commissions, sur les biens qu’ils vendent. On comprend moins bien qu’ils le soient – et c’est le cas, par exemple, des vendeurs d’automobiles ou de meubles – sur les prêts qu’ils placent: comme le système des cadeaux, que notre assemblée a eu la sagesse de supprimer, ce mécanisme de rémunération est fondamentalement nocif.

Jean Gaubert avait demandé, monsieur le rapporteur, madame la ministre, pourquoi vous maintenez la possibilité de verser des commissions sur les prêts liés aux ventes. Cela mérite un débat.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. François Loos, rapporteur . Ils sont très voisins de quelques amendements que nous avons examinés il y a environ une heure, et qui portaient également sur le point de savoir s’il fallait ou non commissionner les vendeurs. Il est ici proposé d’interdire toute rémunération. Après en avoir débattu en commission des affaires économiques, nous avons préféré retenir l’amendement de la commission des lois, que présentait M. Diard. Il prévoit que la commission versée ne doit pas être fonction du type de crédit ou du taux d’intérêt auquel le crédit a été placé. Cet amendement a été incorporé dans le texte de l’article précédent. Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable à ces deux amendements en discussion commune.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Ces amendements sont exactement similaires à celui que nous avons déjà examiné tout à l’heure, sur lequel le Gouvernement avait émis un avis défavorable, et qui a été repoussé par votre assemblée. Nous émettons le même avis défavorable, pour les mêmes raisons. Il nous paraît que l’amendement approuvé par la commission le 9 décembre dernier est juste, puisqu’il permet de faire en sorte que le mode de rémunération des vendeurs respecte le principe du choix. C’est au consommateur de décider quel type de crédit il choisit: soit le renou velable, soit l’amortissable. Il ne sera pas influencé dans ce choix par le vendeur, puisque le mode de rémunération de ce dernier ne pourra pas privilégier l’un au détriment de l’autre.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Nous serons aussi constants que vous l’êtes, madame la ministre. Nous considérons que l’amendement de M. Dionis du Séjour est un très bon amendement. Comme vous, nous avons bien remarqué que c’était à peu près le même que celui que nous avions déposé.

Je rappelle – il faut le faire systématiquement – qu’il y a deux problèmes. Le premier, celui que vous soulevez, tient au fait que deux types de crédit peuvent être proposés. Le second tient à ce que la rémunération du vendeur puisse dépendre du fait même qu’un crédit sera souscrit ou pas. Cela le conduit à pousser le consommateur à en souscrire un alors que ce n’est pas nécessaire, ou alors que la personne pourrait elle-même rechercher à l’extérieur du magasin un crédit à de meilleures conditions.

Nous n’avons pas obtenu la différenciation du lieu de vente et du lieu où le prêt est souscrit. Qu’au moins vous nous suiviez en rendant impossible le lien entre la rémunération du vendeur et la souscription d’un prêt. Car on sait que le vendeur peut alors profiter de sa position de force par rapport au consommateur qu’il a devant lui.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Je retire notre amendement.

(L’amendement n°152 est retiré.) (L’amendement n° 333 n’est pas adopté.) (L’article 4, amendé, est adopté.)

Article 5

Mme la présidente. Nous en venons à l’examen de l’article 5.

Je suis saisie d’un amendement n°168.

La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Il s’agit de ce que l’on appelle la double signature. Quand on est élu local, quand on est président d’un centre communal d’action sociale, on est régulièrement confronté à des situations de détresse résultant du fait que l’un des deux conjoints a signé à la place de l’autre, souvent en imitant sa signature, plaçant ainsi le ménage dans un état de précarité.

Souvent, c’est un nombre important de crédits revolving qui s’accumulent, entraînant la responsabilité du conjoint qui, pourtant, n’avait pas donné son accord.

Il semble donc nécessaire d’exiger, lors de toute acceptation d’offre de prêt, la signature des deux conjoints lorsqu’ils sont mariés ou pacsés, et cela en présence du prêteur, car il s’agit surtout d’éviter l’imitation de la signature par l’un des conjoints.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Loos, rapporteur . Cet amendement a un inconvénient: chaque achat va nécessiter la signature des deux époux. Je ne suis pas sûr que ce soit l’objectif que vous poursuiviez, madame Labrette-Ménager. Votre objectif, c’est que personne n’ait à répondre des dettes de son conjoint sans en avoir eu connaissance. C’est évidemment ce qu’il faut viser. Mais votre amendement aurait pour conséquence que chaque dépense de l’un devrait être cosignée par l’autre.

M. Jean-Pierre Brard. Pourquoi pas?

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Ce ne serait pas anormal!

M. François Loos, rapporteur . Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le Gouvernement est également défavorable à votre amendement, madame la députée, même s’il partage votre objectif. Comme je l’ai dit en répondant aux orateurs qui s’étaient exprimés dans la discussion générale, nous avons le souci de protéger le conjoint qui est en situation d’infériorité. Il ne doit pas être engagé par les dettes de l’autre, qui serait, au sein du couple, en position de pouvoir.

Par votre amendement, vous prévoyez, d’une part, la double signature et, d’autre part, la présence du prêteur.

La présence du prêteur, en soi, pose un vrai problème: l’exiger impliquerait que tout le secteur de la vente par correspondance, par exemple, et l’essentiel du crédit à la consommation, qui se fait sur le lieu de vente, disparaissent ipso facto , puisque, ni dans un cas ni dans l’autre, on n’a la présence du prêteur. On l’a vu, le crédit à la consommation est très souvent mis en place par des vendeurs qui agissent pour le compte du prêteur. Cela pose donc un très gros problème, car c’est un volet important du crédit à la consommation qui se trouverait éliminé.

La double signature, c'est-à-dire la signature des deux conjoints, pose elle aussi un vrai problème. En effet, dans les cas où l’un des conjoints exerce un rapport de domination sur l’autre, on mettrait celui des conjoints qui est dominé en situation d’être contraint par le conjoint dominant de venir signer avec lui. Or l’article220 du code civil stipule qu’il y a une solidarité de droit entre les époux pour les dettes ordinaires et celles qui résultent de l’éducation des enfants, mais que, pour tout le reste, il n’y a pas de solidarité. C’est pourquoi j’ai pris tout à l’heure l’exemple, peut-être un peu ridicule, de l’achat d’un véhicule hors de prix, pour lequel il n’y a pas de solidarité aux termes de l’article220.

M. Lionel Tardy. Ça ne marche pas! Il n’est jamais appliqué.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Vous allez me dire que, dans la vie réelle, bien souvent les conjoints ne le savent pas…

M. Lionel Tardy. Eh oui!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. …et que, du coup, ils se laissent entraîner par des créanciers indélicats, par des huissiers qui oublient de notifier ses droits au conjoint et en particulier, évidemment, l’existence de l’article220.

M. Lionel Tardy. Exactement.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je serais tout à fait favorable à des propositions qui viseraient à rappeler les droits du conjoint, à renforcer son information et ses moyens de défense, à souligner l’absence de solidarité sauf dans les cas prévus par l’article220, c'est-à-dire pour les créances ordinaires du ménage et les dettes contractées au titre de l’éducation des enfants. Mais exiger la double signature, c’est à mon avis affaiblir au contraire le conjoint, du point de vue du droit, par rapport à la situation d’aujourd’hui. Cela me paraît très dangereux.

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Madame la ministre, c’est un sujet qui nous préoccupe depuis de nombreuses années. Lors de la précédente législature, j’avais même déposé ce qui était, je crois, le premier amendement sur cette question; M. Chatel était alors rapporteur du texte concerné et Mme Labrette-Ménager ne siégeait pas encore dans cette assemblée.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Mais j’étais quand même déjà née! (Sourires.)

M. François Brottes. À l’époque, cet amendement avait été voté à l’unanimité par l’Assemblée.

M. Jean Dionis du Séjour. C’est vrai!

M. François Brottes. C’est dire que cette préoccupation est partagée sur tous les bancs depuis très longtemps.

On nous a ensuite fait des reproches en nous disant – ce que vous n’avez pas encore fait aujourd’hui, madame la ministre‚– que cette disposition allait pénaliser la consommation et que, pour cette raison, il fallait y renoncer. Vous avez utilisé d’autres arguments, ce dont je vous remercie. Pour autant, je ne suis pas convaincu par vos propos, parce que la définition de la notion de dette ordinaire, que vous avez évoquée, n’est pas du tout précise.

Les uns et les autres, nous avons eu à connaître moult exemples de situations dramatiques pouvant aller jusqu’au suicide de personnes qui avaient découvert qu’elles étaient solidaires d’une dette dont elles n’avaient jamais eu connaissance. Cela ne peut pas durer et vous ne pouvez pas nous expliquer qu’on a toujours la possibilité, a posteriori, de faire du contentieux pour régler le problème. Le présent amendement vise à faire de la prévention et c’est bien le sujet: c’est avant que la ligne jaune ne soit franchie qu’il faut intervenir,…

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Bien sûr!

M. François Brottes. …et non pas après, car il est trop tard.

Il faudra expliquer aux gens que l’« ordinaire » n’est pas tout à fait l’ordinaire, tout en étant quand même l’ordinaire. Soyons sérieux! Ce sujet est extrêmement grave.

Pour ma part, j’ai tout de même été sensible, madame la ministre, à l’un de vos arguments, que je juge imparable, et je proposerai à nos collègues de rectifier leur amendement en supprimant les mots: « en présence du prêteur ». Il est que cela n’est pas possible dans tous les cas.

Pour le reste, je suis quant à moi peu sensible à l’évocation de l’article220 qui, malheureusement, ne protège en rien. Nous avons mille exemples à vous donner! Nous pouvons même recommencer la discussion générale… (Sourires.) Si c’était un article protecteur, on le saurait!

Je le répète, nous sommes au cœur d’un débat important. Réglons au moins ce problème; évitons que quelqu’un soit solidaire d’une dette dont il n’a pas connaissance. Je pense que l’amendement de notre collègue ravira bon nombre de ceux qui attendaient avec impatience cette disposition.

Mme la présidente. La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Madame la ministre, il ne s’agit pas, en l’occurrence, d’achats extraordinaires, mais d’achats ordinaires de la vie quotidienne. En tant que présidente d’un centre communal d’action sociale, – mais vous êtes tous, mes chers collègues, confrontés à ce genre de soucis‚– je vois bien que le problème concerne des crédits à la consommation, contractés pour des dépenses ordinaires et incombant à des couples ordinaires, mariés ou pacsés. Et on voit bien aujourd’hui dans nos CCAS, notamment avec la prolifération des familles monoparentales, que les conséquences des crédits reposent systématiquement sur l’un des deux conjoints. On va ainsi déboucher sur un système créant de la précarité, même si cela n’était peut-être pas voulu au départ.

En ce qui concerne le texte de mon amendement, j’accepte de le rectifier en supprimant les mots: « en présence du prêteur ». Quoi qu’il en soit, c’est un amendement important et je le maintiendrai.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Madame la ministre, vous avez insisté, dans votre démonstration, sur ce qu’étaient les dettes ordinaires du ménage et les dettes exceptionnelles. Mais, par définition, le crédit à la consommation concerne la consommation, c’est-à-dire les dépenses courantes du ménage.

Je vais, par ailleurs, vous donner un exemple, déjà évoqué ici même, le 15 octobre dernier, lors de l’examen d’une proposition de loi déposée par le groupe SRC et que j’avais eu l’honneur de rapporter. C’est ma collègue Catherine Coutelle, qui s’excuse de ne pouvoir être avec nous ce soir, qui l’avait cité. Beaucoup parmi nous en connaissent d’autres du même genre, mais celui-là me paraît assez extraordinaire.

Une dame avait découvert que son mari avait contracté une multitude de crédits à la consommation et s’était rendu insolvable. Après avoir divorcé, elle était restée redevable des crédits souscrits par son mari. Elle s’est ensuite remariée mais est malheureusement morte quelque temps après. Eh bien, son nouveau mari est considéré comme responsable des dettes contractées par l’ancien époux!

M. François Brottes. De telles choses ne devraient plus être possibles!

M. Jean Gaubert. Et ce n’est pas une banque qui l’a décrété, c’est un tribunal qui l’a jugé! Il a en effet décidé que, puisque cet homme s’était marié, il était devenu coresponsable et que, maintenant qu’il est veuf, il est seul responsable. Est-ce que vous pouvez accepter que de telles choses durent encore longtemps?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Mais l’amendement ne résoudra pas ce problème!

Mme la présidente. Madame Labrette-Ménager, puis-je déduire de votre intervention précédente que vous acceptez de rectifier votre amendement en enlevant, comme cela a été proposé, les mots « en la présence du prêteur » dans chacun des deux paragraphes de l’amendement?

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Tout à fait, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Éric Diard, rapporteur pour avis . Ce qui me gêne dans cet amendement, c’est le membre de phrase: « Lorsque l’emprunteur est marié ou pacsé ». Pour plus de précision juridique, je propose, à la place des mots: « ou pacsé », l’expression: « ou signataire d’un pacte civil de solidarité ».

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Si vous voulez!

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis . Pour aller dans le même sens que Mme Labrette-Ménager, il me semble insupportable, étant vice-présidente d’un CCAS, que ce soient les aides de nos collectivités locales qui permettent d’apurer en grande partie les dettes de ces personnes en situation délicate. Je trouverais normal de responsabiliser davantage les prêteurs en les obligeant à s’assurer de la double signature. Pour ma part, je voterai donc cet amendement tel qu’il a été rectifié.

Mme la présidente. Madame Labrette-Ménager, acceptez-vous de rectifier encore une fois votre amendement, en remplaçant le mot: « pacsé » par les mots: « ou signataire d’un pacte civil de solidarité »?

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n°168 est donc ainsi rectifié.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je voudrais simplement qu’avant de voter cet amendement, l’Assemblée soit bien éclairée sur les conséquences qu’il aurait. Vous invoquez des cas particuliers, des circonstances que l’on rencontre en effet et qui présentent bien souvent des aspects dramatiques. Mais je redoute plusieurs choses.

Je crains premièrement que cet amendement ne rende le recours au crédit à la consommation extraordinairement compliqué et difficile. En effet, le crédit à la consommation se prend le plus souvent sur les lieux de vente ou à proximité, sans que la femme aille nécessairement chercher le mari, ou le mari la femme. Toute cette partie du crédit à la consommation qui relève du financement de la vie courante, sans beaucoup de formalisme ni d’accompagnement, devrait probablement s’effondrer. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Bien sûr, vous protestez, mais je sais bien que cela correspond au souhait que vous avez de verrouiller au maximum l’utilisation de ce crédit.

Mme Marietta Karamanli. Nous voulons simplement l’encadrer!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Je comprends, encore une fois, votre objectif, mais je veux attirer l’attention de l’Assemblée sur les conséquences de son vote.

Deuxièmement, on n’éliminera pas, grâce à cet amendement, les situations dans lesquelles l’un des conjoints exerce sur l’autre une influence indue, que l’on ne soupçonne pas, que l’on n’apprécie pas correctement et qui n’est pas du tout visible, mais dont on sait qu’elle existe pour connaître un peu les situations de dépendance et les drames familiaux. Eh bien, on n’évitera pas cette situation: les deux conjoints seront présents pour contracter mais, si l’un d’entre eux ne manifeste pas sa volonté libre et éclairée, on ne le saura pas nécessairement. En revanche, les deux seront ainsi engagés dans une solidarité complète. On aggraverait donc, de mon point de vue, la solidarité de droit entre les conjoints.

Voilà pourquoi je veux vous faire deux suggestions que je livre à votre appréciation.

D’abord, je vous rappelle qu’un décret prévoit les mentions obligatoires devant figurer sur les lettres de recouvrement adressées par les créanciers aux débiteurs. Je m’engage à modifier ce décret pour qu’y soient spécifiquement incluses les dispositions de l’article220 du code civil et expressément mentionnée l’absence de solidarité entre époux pour les dettes qui ne résultent pas des dépenses ordinaires du ménage, pour lesquelles, en revanche, il est bien normal qu’il y ait solidarité, de même que pour les dettes d’éducation. Il s’agirait de faire en sorte que le conjoint qui reçoit la lettre de recouvrement de l’huissier ou de l’organisme de financement sache tout de suite que pour certaines dettes, il n’est pas solidaire, qu’il n’a donc pas à se laisser faire, à se laisser pousser à rembourser.

M. François Brottes. Ce sera trop tard!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Mais on ne règle pas le problème avec la proposition qui est faite!

Ensuite, s’il vous semble absolument indispensable de maintenir la signature des deux conjoints, je propose qu’elle ne soit au moins prévue qu’au-delà d’un certain seuil, c’est-à-dire qu’elle ne concerne pas le petit crédit renouvelable du quotidien, d’un montant de 200 ou 300 euros!

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis . C’est juste!

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. À défaut, je vous assure que vous risquez de porter atteinte à un pan entier du crédit à la consommation.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Sur le principe – je vous le dis très sincèrement‚– je suis personnellement favorable à l’idée qui est à l’origine de cet amendement. Je la trouve tout à fait généreuse et elle peut apparaître comme juste.

M. François Brottes. Attention à ce qui va suivre!

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Attention, en effet, monsieur Brottes: j’ai écouté la ministre et, très franchement, je me rends à ses arguments. Mais j’ajoute une autre raison: j’aimerais que vous me disiez, quelle que soit la générosité qui sous-tend cet amendement, comment vous résolvez le problème de l’influence que peut avoir l’un des conjoints sur l’autre. Vos idées en la matière m’intéresseraient beaucoup!

Il y a toujours, malheureusement, dans ces situations de couple difficiles, un dominant et un dominé. Comment faites-vous avec un mari qui exige la cosignature de sa femme – l’inverse pouvant aussi être vrai‚–, même si elle ne veut pas la donner? Vous ne résolvez pas ce problème, qui se posera de toute manière, parce que c’est la force de l’un qui s’impose à l’autre. J’ai connu un tel cas, il n’y a pas si longtemps, dans ma mairie de Rueil-Malmaison. Cela s’est terminé de manière dramatique.

Et, quand bien même nous pourrions passer outre à ce problème, j’en pose un autre, sur le plan du droit: comment allez-vous faire, si l’on vote cet amendement – et on a envie de le voter, madame Labrette-Ménager, car l’idée paraît tout à fait intéressante‚–, étant donné que l’article220 existera toujours dans le code civil? Je pose la question en droit: vous allez avoir deux articles qui s’opposent, parce que vous ne supprimez pas l’article220 du code civil.

Ici, nous faisons la loi, nous ne pouvons nous contenter d’agir sur la base de bonnes intentions. Si cela suffisait, il n’y aurait plus besoin de lois!

L’amendement que vous nous proposez, madame Labrette-Ménager, serait très bien s’il n’y avait pas l’article220. Mais l’article220 restant dans le code civil – on ne va le supprimer ce soir‚–, ça ne va pas. Pourquoi? Parce que l’un s’oppose à l’autre.

Les deux dispositifs entrent en contradiction, et c’est un vrai problème. M. Brottes a évoqué les débats que nous avions déjà eus lorsque Luc Chatel était rapporteur de la proposition de loi tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur. J’avais, pour ma part, proposé que l’article220 soit lu lors des mariages: on me disait en effet qu’il était peu utilisé car mal connu des conjoints, ce qui est vrai.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Et si les conjoints ne sont pas mariés?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Le jour où le maire pourra lire l’article220 et informer les conjoints des dispositions qui les protègent, la situation s’améliorera. Je crois que M. Diard a repris cette excellente idée dans un amendement, et j’y souscrirai.

Comment fait-on, enfin, si le contrat de crédit est conclu par internet? C’est une question qui se pose.

Mais peu importe. Je ne retiens que l’argument de droit – nous faisons la loi, nous ne sommes pas là pour nous amuser: si on vote cet amendement, deux articles de loi s’opposeront, et la commission mixte paritaire devra trancher en supprimant l’un ou l’autre des deux articles. En droit, il ne peut pas y avoir deux articles de loi qui s’opposent: sinon, ils s’annulent, et s’ils s’annulent, il n’y a plus de loi.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. Je souscris aux propos de Mme la ministre: je crois très important de ne pas oublier le secteur de la vente à distance, où l’exigence de la signature de l’un et l’autre conjoint créera de vraies difficultés.

Je rappelle que 40 % des ventes à distance se font grâce à un crédit à la consommation. En moyenne, ces achats ne représentent pas plus de 80 à 90 euros. Il faut avoir à l’esprit cet aspect du problème: ne créons pas une procédure trop lourde, qui rendrait le crédit inopérant.

De plus, nous ne pouvons pas aboutir à une loi dont les dispositions entreraient en contradiction avec celles de l’article220. Il serait vraiment gênant que la loi que nous allons voter donne aux conjoints moins de droits qu’ils n’en ont aujourd’hui avec l’article220!

Je respecte tout à fait l’objectif poursuivi par Fabienne Labrette-Ménager, mais nous devons, je crois, rester vigilants: n’aboutissons pas à quelque chose de déraisonnable, notamment pour la vente à distance. Réfléchissons bien à ce que nous allons voter ce soir!

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Il y a longtemps que le ton un peu sentencieux du président de la commission des affaires économiques ne m’émeut plus beaucoup, même si ce soir il est un peu la voix de la Chancellerie – chacun l’a bien compris.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Vous n’avez pas le droit de dire cela!

M. François Brottes. Vous parlez de droit, monsieur le président. Je voudrais revenir à votre rappel au droit.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Cela ne m’amuse pas! Vos propos sont scandaleux!

M. François Brottes. Tout d’abord, on peut parfaitement déroger à l’article220 pour la matière du crédit: l’article220 ne couvre pas que le crédit. Il ne devient donc pas inutile…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Ce n’est pas ce que j’ai dit!

M. François Brottes. Vous venez de nous expliquer que, si nous votions cet amendement, l’article220 ne servirait plus à rien. C’est ce que j’ai compris, et j’espère ne pas trahir votre expression.

On peut donc déroger à l’article220 en matière de crédit.

De surcroît, nous avons récemment voté un texte qui porte sur les pressions que l’un des conjoints peut faire subir à l’autre, par des actes allant jusqu’à la violence. Et on peut avoir besoin de l’article220 pour démontrer, par exemple, qu’une signature a été forcée: il sera alors bien pratique pour trancher le contentieux, même en cas de double signature. L’article220 n’est donc pas inutile, y compris si nous votons la mise en œuvre de la double signature.

Je comprends bien que l’on souhaite, pour mille et une raisons, s’opposer à cet amendement. Il n’en demeure pas moins qu’il est attendu, qu’il est important, et qu’en aucun cas il ne remet en cause l’utilité de l’article220.

Mme la présidente. La parole est à M. Émile Blessig.

M. Émile Blessig. Il est clair, mes chers collègues, que le problème de la souscription d’un prêt par l’un des conjoints à l’insu de l’autre pose d’énormes problèmes. Nous le voyons très régulièrement dans nos permanences.

Alors, bien sûr, nous votons la loi. Mais nous devons aussi répondre à des questions précises: sommes-nous, oui ou non, en mesure d’éviter que l’un des conjoints ne contracte un prêt à l’insu de l’autre? De plus, ces prêts, même d’un niveau modeste – et la notion de prêt modeste est très relative –, peuvent être renouvelés fréquemment, et on peut en arriver à des sommes importantes, voire très importantes.

Enfin, vous nous avez dit, madame la ministre, que ces engagements unilatéraux n’étaient pas opposables aux dépenses du ménage. Mais quand on parle des dépenses du ménage, de quoi s’agit-il exactement? C’est une notion qui mériterait à mon avis d’être définie avec plus de précision, car on peut en avoir une conception extrêmement large.

Nous sommes face à une question majeure: soit nous estimons qu’il n’est pas possible de légiférer en la matière, et nous laissons toute liberté aux prêteurs; soit nous estimons que nous devons, compte tenu des dérives observées, apporter un certain nombre de régulations. C’est le sens de cet amendement, et je l’approuve.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. À ce stade du débat, il serait intéressant que nous nous entendions sur l’objectif réel de ce projet de loi. J’avais cru comprendre qu’il était d’abord destiné à protéger les consommateurs: on a parlé, par exemple, des excès du crédit. Mais si j’entends bien ce qui se passe ici depuis un certain temps, on parle surtout de ne mettre aucun frein aux abus de la consommation.

J’écoutais M. Gérard à l’instant, et je veux bien admettre que des vendeurs fassent pression pour que la représentation nationale n’aille pas trop loin. Mais la réalité, c’est que ce texte préserve surtout les avantages des vendeurs et reconduit grosso modo les fonctionnements actuels.

Ensuite, si véritablement la double signature est inopérante, pourquoi croyez-vous que les banques l’exigent systématiquement pour les crédits les plus importants?

Mme Fabienne Labrette-Ménager et M. Lionel Tardy. Eh oui!

M. Jean Gaubert. Les organismes de crédit ne l’exigent pas pour les crédits à la consommation car ils arrivent à se couvrir par des méthodes qui sont quelquefois contestables, pour ne pas employer d’autres termes à cette heure tardive.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Bien sûr! C’est la collectivité qui paye!

M. Jean Gaubert. Mais quand il s’agit de crédits plus importants, la double signature est exigée! Qu’on ne vienne donc pas nous dire qu’un tel dispositif serait inopérant, car les services juridiques des banques le considèrent, eux, comme très efficace.

M. William Dumas. Très bien!

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Sans vouloir allonger exagérément les débats, je tiens à répondre à M. Brottes.

M. François Pupponi. Il est sorti pour quelques instants.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Il sera informé de mes propos.

Je regrette, et cela m’étonne de sa part, qu’il mette en cause ma vie privée. Je ne supporte pas ce genre d’accusations, et il est dommage que quelqu’un de la qualité de M. Brottes se permette d’utiliser de tels arguments.

M. William Dumas. Vous savez bien que ce n’est pas ce qu’il voulait dire!

M. Jean Gaubert. Il ne savait pas, peut-être… (Sourires sur les bancs du groupe SRC.)

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Monsieur Gaubert, je vous en prie!

Ce que je voulais dire à M. Brottes, c’est que l’heure avancée n’excuse pas toutes les dérives.

Mais je reviens au problème de fond, qui est, pour moi, un problème d’opposition en droit. J’entends bien les arguments de M. Blessig, qui sont les mêmes que ceux de Mme Labrette-Ménager; et sur le fond, chers collègues, on peut vous donner raison. Je suis même convaincu que, sans l’article220, vous auriez tout à fait raison.

Mais il faut regarder ce qui existe dans la loi! Avez-vous lu l’article220?

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Vous allez nous le lire, j’en suis sûre.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je vais vous le lire, en effet, car mon souci, en tant que législateur, c’est que l’on ne vote pas un article de loi qui s’oppose à un autre: dans ce cas, il n’y aurait plus de loi. Je n’ai jamais dit que l’article220 ne s’appliquerait pas. J’ai dit que, l’un disant le contraire de l’autre, c’est le juge qui décidera de ce qu’il faudra faire. Mais l’article220 laisse de toute façon le juge décider, et cela convient parfaitement.

Je lis donc l’article220 du code civil.

« Chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants: toute dette ainsi contractée par l’un oblige l’autre solidairement.

« La solidarité n’a pas lieu, néanmoins, pour des dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à l’utilité ou à l’inutilité de l’opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant. »

On voit que la loi entre ici dans le détail.

« Elle n’a pas lieu non plus, s’ils n’ont été conclus du consentement des deux époux, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante. »

Cet article est très complet. Il mériterait, j’en conviens, d’être mieux connu, et il peut ne pas être appliqué. Vous avez peut-être raison sur ce point: voyons alors comment mieux l’appliquer.

Mais si nous votons un article qui dit le contraire, alors ces deux articles ne pourront pas s’appliquer: l’incertitude juridique laissera au juge toute latitude pour faire ce qu’il voudra. De toute manière, lorsqu’on va devant le juge, il a déjà la possibilité de dire le droit et de faire ce qu’il veut.

Je vous appelle à ne pas entrer dans une logique qui pourrait donner le sentiment que l’on veut juste accomplir une bonne action. Nous sommes ici, je le répète, pour faire la loi! Et nous ne devons pas la faire avec de bons sentiments, même si je les partage avec vous.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Ce ne sont pas de bons sentiments!

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Disons alors une bonne intention. Et je partage avec vous cette intention, mais en droit cela ne fait pas une bonne loi. Or nous sommes ici, en principe, pour faire de bonnes lois.

Monsieur Brottes, puisque vous voici de retour, je vous indique que j’ai répondu à vos assertions personnelles, que je n’ai pas acceptées.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Loos, rapporteur . Il n’y a rien à ajouter à ces démonstrations: nous n’avons pas intérêt à voter cet amendement, car il nous conduirait à des situations inextricables.

Il est clair que l’article220 et l’amendement sont en totale contradiction. L’amendement dit: « Lorsque l’emprunteur est marié, la signature des deux époux est obligatoire… »

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Marié ou pacsé! Ce n’est pas pareil!

M. François Loos, rapporteur . Et l’article 220 dit: « Chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats… » La contradiction est frontale!

Et on imagine la complexité de la vie de famille si on exigeait cette double signature pour tout emprunt, pour tout engagement solidaire. Soyons pragmatiques: pour des gens qui sont en déplacement pour quelques mois ou qui ont des obligations professionnelles très prenantes, il y aurait évidemment une difficulté extrême à mettre cette disposition en œuvre.

Même si la protection que vous recherchez est justifiée et nécessaire, la meilleure façon de l’obtenir, c’est de faire mieux connaître l’article220 du code civil, qui est à l’opposé de l’amendement que vous proposez.

Encore une fois, il faut que nous nous montrions réalistes et pragmatiques…

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Je suis très réaliste et tout à fait pragmatique.

M. François Loos, rapporteur . …et donc que nous rejetions cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je voudrais dire au président Patrick Ollier que je comprends mal sa réaction: en aucun cas il n’était visé personnellement, et je veux qu’il le sache.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je ne suis pas le porte-parole de la chancellerie!

M. François Brottes. J’ai sous les yeux une note dans laquelle la chancellerie indique ses réticences vis-à-vis de cet amendement, à cause du statut du mariage. Si les arguments du président Ollier avaient été exposés par M. le rapporteur, ou par n’importe quel autre député, j’aurais fait la même réflexion.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est simplement une remarque de gens qui font du droit!

M. François Brottes. Monsieur le président, les arguments que vous avez développés à propos du code civil auraient pu l’être par d’autres, et j’aurais présenté les mêmes observations. Ne vous sentez donc pas visé personnellement par ma remarque. De grâce, évitons de nous faire des procès personnels; ce n’était pas du tout mon objectif.

Mme la présidente. La parole est à M. Émile Blessig.

M. Émile Blessig. Je suis sensible à vos explications, monsieur Ollier, mais vous n’avez pas évoqué la question de la répétition de prêts individuels. Au risque de déplaire, mais nous ne sommes pas là pour plaire, le fichier positif pourrait être une réponse pour éviter ce type de dérive.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. C’est sûr!

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Là, je suis d’accord.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous en discuterons demain.

M. Émile Blessig. Là, nous devrions pouvoir avancer de manière à trouver une solution.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. C’est un amendement d’appel!

M. Émile Blessig. Alors continuons dans la voie que je viens de suggérer.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Très bien!

Mme la présidente. La parole est à M. William Dumas.

M. William Dumas. J’ai effectué toute ma carrière dans les banques. Je ne sais pas si on connaissait ou non l’article220, mais chaque fois que l’on faisait signer un prêt, à un agriculteur, à un artisan, on demandait la signature de l’épouse. Après ce que vous venez de nous dire, madame la ministre, je me demande pourquoi les banques procédaient ainsi.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Bien sûr!

M. William Dumas. Il reste que lorsqu’on allait au contentieux, le fait d’avoir fait signer le conjoint servait énormément.

(L’amendement n°168 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 27.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Nous avons passé beaucoup de temps sur l’amendement précédent, mais je pense que le résultat aurait été le même si nous avions voté plus tôt.

L’amendement n° 27 n’est pas de la même importance mais il mérite considération. Il s’agit de préciser que le droit de rétractation prévu pour le contrat d’achat d’un bien est de plein droit pour le contrat de crédit destiné à en assurer le financement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Cette préoccupation est déjà satisfaite par l’alinéa 20 de l’article 10: « Lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation du contrat de vente […], le contrat de crédit destiné à en assurer le financement est résilié de plein droit sans frais ni indemnités. » Je propose donc à M. Gaubert de retirer son amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Même avis.

M. Jean Gaubert. Je retire l’amendement, madame la présidente.

(L’amendement n° 27 est retiré.)

Mme la présidente. Et l’amendement n° 28, monsieur Gaubert?

M. Jean Gaubert. La réponse du rapporteur vaut également pour cet amendement, que je retire.

(L’amendement n° 28 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°275 rectifié.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. L’amendement n°275 rectifié vise à ne rendre effectif le contrat de prêt qu’à l’expiration du délai de rétractation et à supprimer les dispositions du projet de loi qui prévoient le remboursement des fonds lorsqu’ils ont été versés avant la rétractation, source de multiples complications.

Il paraît essentiel que ce contrat ne puisse prendre effet qu’une fois ce délai expiré, de telle sorte que l’emprunteur puisse réellement mettre à profit ces deux semaines pour prendre en considération les conséquences du prêt, notamment dans le cadre du crédit renouvelable. Cette obligation signifierait que le droit de tirage ne pourrait être mis en œuvre avant la fin du délai.

À l’inverse, en cas de versement des fonds avant l’expiration du délai, les conditions de remboursement du capital versé et des intérêts cumulés depuis la date de ce versement risquent de dissuader l’emprunteur de se rétracter.

Cet amendement évince toute tentative d’utilisation des sommes accordées aux emprunteurs, notamment les plus modestes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . C’est une affaire compliquée parce que les délais de rétractation de la directive européenne sont de quatorze jours et qu’ils sont de sept jours en France. Le texte permet une combinaison intelligente de ces quatorze jours et de ces sept jours. L’amendement de M. Brard propose la suppression de cette possibilité. Avis défavorable.

(L’amendement n°275 rectifié, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 29.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. L’alinéa 15 de l’article 5 est déjà relativement complet. Je propose simplement de préciser que la formulation écrite requise pour la souscription ou l’augmentation du crédit renouvelable vaut également pour son renouvellement.

(L’amendement n° 29, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°169.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Il est défendu.

(L’amendement n°169, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 30.

M. Jean Gaubert. Défendu.

(L’amendement n° 30, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 64.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Loos, rapporteur . L’amendement n° 64 vise à compléter le dispositif introduit par la commission en donnant la possibilité aux prêteurs de mettre en place, en sus des rendez-vous périodiques, un système d’alerte préventive.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le Gouvernement est très favorable à cet amendement.

(L’amendement n° 64 est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, n os 311 rectifié et318.

La parole est à M. Louis Cosyns, pour soutenir l’amendement n°311 rectifié.

M. Louis Cosyns. Je propose d’instaurer une résiliation de plein droit du crédit renouvelable au bout d’une année suivant les mêmes règles que la procédure en vigueur. La loi Chatel, appliquée depuis le 1 er  août 2005, a introduit la résiliation de plein droit au bout de trois années de non-utilisation. Il faut aller plus loin.

Le rapport Athling souligne que c’est de la multiplication des crédits revolving que naissent les situations de surendettement. Il faut créer un cadre juridique qui évite que les crédits ne s’allongent dans le temps. De plus, cela permettra à l’emprunteur de faire plus facilement le tri. Sa situation financière sera ainsi clarifiée.

J’ajoute que si l’on souscrit un crédit pour ne pas l’utiliser, c’est que l’on a mal évalué ses besoins de financement. Prendre un crédit, ce doit être dans un but précis, dans un cadre temporel défini.

Il me semble que mon amendement renoue avec les vrais buts du crédit à la consommation.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir l’amendement n°318.

M. Jean Dionis du Séjour. Le rapport Athling souligne le décalage entre le nombre très important de crédits revolving ouverts et le nombre de crédits actifs. Au bout de combien de temps un crédit ouvert non actif doit-il être résilié de plein droit? Pour le moment, le délai est de trois ans. Il nous semble raisonnable de le réduire à un an, compte tenu de la nature des dépenses qui sont couvertes par ces crédits de consommation courante.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Il est vrai que certains crédits sont inactifs. La durée au-delà de laquelle la résiliation devient automatique est aujourd’hui de trois ans et nous n’avons pas estimé nécessaire de la réduire à un an. En réalité, on s’aperçoit que 50 % des crédits ont une vie de plus de cinq ans. Ce n’est pas parce que la durée serait raccourcie à douze mois que la dangerosité du point de vue du surendettement en serait réduite. Avis défavorable.

M. Jean Dionis du Séjour. Il s’agit de crédits inactifs!

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, d’une part, parce que cela semble être une mesure bien pénalisante, d’autre part, parce qu’elle paraît assez disproportionnée.

Pénalisante parce que l’ouverture d’un crédit est un acte qui représente un coût réel pour l’organisme financier. Obliger à renouveler l’exercice tous les ans à défaut d’utilisation constituerait une pénalisation assez forte.

Disproportionnée parce que trois ans, ce n’est pas si long que cela. Par exemple, si un consommateur utilise du crédit renouvelable pour faire ses achats à l’occasion des soldes d’été, ce qui est bien souvent le cas dans certains magasins, il se peut qu’il saute les soldes de l’année suivante pour une raison x ou y, et la carte de crédit serait alors inactivée. Il ne nous paraît donc pas raisonnable de réduire la durée à un an.

Je serais néanmoins disposée à examiner un dispositif qui ramènerait le délai de trois à deux années. Deux ans, cela me paraît correspondre à la situation de cette personne qui prend une carte de crédit renouvelable auprès d’un magasin, qui fait ses soldes une année, qui saute l’année suivante, mais qui peut avoir besoin de l’utiliser l’année d’après.

Donc, si vous acceptiez de sous-amender à deux ans, je serais favorable.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous sommes d’accord.

M. William Dumas. Comme on dit chez nous, c’est une cote mal taillée!

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Il n’y a pas de vérité établie.

M. Jean-Pierre Brard. Surtout chez les centristes! (Sourires.)

M. Jean Dionis du Séjour. Cela vous a réussi, les vérités établies, monsieur le marxiste impénitent!

M. Jean-Pierre Brard. Chez nous, il n’y a que les vérités bibliques qui marchent.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous aurions cependant intérêt à faire le ménage dans ces crédits inactifs. Mme la ministre nous propose de réduire le délai de trois à deux ans. Je suggère à M. Cosyns d’accepter comme moi.

Mme la présidente. Monsieur Cosyns, acceptez-vous cette rectification qui remplace deux fois le mot « première » par le mot « deuxième »?

M. Louis Cosyns. Oui.

(Les amendements identiques n os 311 rectifié et318, ainsi modifiés, sont adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n°139, le dernier que nous examinerons ce soir.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour le soutenir.

M. Jean Gaubert. Madame la présidente, je ne sais pas si c’est une invitation à faire court, mais je comprends que vous vous sentiez responsable de l’engagement que vous avez pris auprès du président de la commission.

Une avancée vient d’être obtenue avec le raccourcissement du délai de résiliation de trois ans à deux ans, même si un an aurait peut-être été plus intéressant.

L’amendement que je propose précise qu’un même consommateur ne peut disposer de plus de deux crédits renouvelables simultanément – chacun aura compris pourquoi. Ce sera plus facile d’ailleurs avec la proposition de Mme la ministre d’avoir, au-delà de 1000 euros, l’option de choisir le crédit amortissable. Il nous paraît assez légitime de dire que le crédit renouvelable doit être considéré comme quelque chose de marginal et qu’il ne doit pas occuper la place la plus importante dans la somme des crédits que les familles peuvent avoir à rembourser.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission?

M. François Loos, rapporteur . Avis défavorable bien sûr. Pourquoi deux crédits, et pas trois? Comment vérifier?

M. Jean Gaubert. Pourquoi deux ans et pas un?

M. François Loos, rapporteur . Je dis simplement que je ne vois pas comment le respect de cette disposition pourrait être vérifié.

(L’amendement n°139, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, vendredi 9 avril 2010 à neuf heures trente:

Suite du projet de loi portant réforme du crédit à la consommation.

La séance est levée.

(La séance est levée, le vendredi 9 avril 2010, à une heure.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l’Assemblée nationale,
Claude Azéma