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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2011-2012

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 16 février 2012

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de Mme Catherine Vautrin

1. Débat sur l’emploi

M. Alain Vidalies

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé

M. Régis Juanico

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Jean Mallot

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Jean-Patrick Gille

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Pascal Brindeau

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Pascal Brindeau

M. Xavier Bertrand, ministre

Mme Marie-George Buffet

M. Xavier Bertrand, ministre

Mme Marie-George Buffet

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Arnaud Richard

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Arnaud Richard

Présidence de Mme Laurence Dumont

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Arnaud Richard

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Jean-René Marsac

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Jean-Patrick Gille

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Alain Vidalies

M. Xavier Bertrand, ministre

Rappel au règlement

M. Jean-Marc Ayrault

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Arnaud Richard

M. Xavier Bertrand, ministre

M. Arnaud Richard

M. Xavier Bertrand, ministre

2. Débat sur l’éducation

Mme Martine Martinel

M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Mme Martine Faure

M. Luc Chatel, ministre

M. Régis Juanico

M. Luc Chatel, ministre

Mme Monique Boulestin

M. Luc Chatel, ministre

M. Pascal Brindeau

M. Luc Chatel, ministre

Mme Marie-George Buffet

M. Luc Chatel, ministre

Mme Marie-George Buffet

M. Luc Chatel, ministre

M. Jacques Grosperrin

M. Luc Chatel, ministre

M. Éric Berdoati

M. Luc Chatel, ministre

M. Jacques Grosperrin

M. Luc Chatel, ministre

M. Yves Durand

M. Luc Chatel, ministre

M. Patrick Bloche

M. Luc Chatel, ministre

M. Yves Durand

M. Luc Chatel, ministre

M. Arnaud Richard

M. Luc Chatel, ministre

M. Éric Berdoati

M. Luc Chatel, ministre

M. Arnaud Richard

M. Luc Chatel, ministre

3. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Catherine Vautrin,
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Débat sur l’emploi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle le débat sur l’emploi, organisé à la demande du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Madame la présidente, monsieur le ministre du travail, de l’emploi et de la santé, mes chers collègues, « si l’on s’engage sur 5 % de chômeurs et qu’à l’arrivée, il y en a 10 %, c’est un problème et c’est aux Français d’en tirer les conséquences ».

M. Jean Mallot. Chiche !

M. Alain Vidalies. Dans ce discours du 26 avril 2007, Nicolas Sarkozy nous donnait quasiment rendez-vous pour le débat d’aujourd’hui. Était-ce un signe prémonitoire ou un manque de confiance ? Toujours est-il que cinq ans après, nous ne pouvons que constater que le chômage approche des 10 % et qu’il appartiendra aux Français d’en tirer les conséquences.

Depuis l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, 1 039 200 personnes supplémentaires se sont inscrites à Pôle emploi, dont 737 900 pour la seule catégorie A.

M. Régis Juanico. Bravo !

M. Alain Vidalies. Le chômage des moins de vingt-cinq ans atteint 24 % et le chômage des seniors a augmenté de 15 % pour la seule année 2011.

Certes, ces chiffres catastrophiques sont en partie le résultat de la crise économique et financière.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Ah, quand même !

M. Jean Mallot. En partie seulement !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous avez enfin enrichi votre vocabulaire !

M. Alain Vidalies. Mais ils sont aussi le résultat de votre politique, monsieur le ministre.

Votre première responsabilité est d’avoir, depuis cinq ans, maintenu le système d’encouragement aux heures supplémentaires qui, non seulement coûte très cher aux finances publiques, plus de 4 milliards d’euros chaque année, mais qui, au surplus, fonctionne comme une véritable machine à détruire l’emploi sur fonds publics.

M. Pascal Brindeau. Et les 35 heures, ce n’était pas une véritable machine à détruire l’emploi ?

M. Alain Vidalies. Ce système absurde accélère les licenciements en période de diminution de l’activité et ralentit les embauches en période de reprise. Autrement dit, à tous les coups on perd lorsque l’on a la préoccupation de l’emploi.

Pendant que la France dépensait chaque année 4,5 milliards d’euros pour subventionner les heures supplémentaires, l’Allemagne dépensait 6 milliards d’euros pour financer le chômage partiel. La France dépensait dix fois moins que l’Allemagne pour le chômage partiel. Cette carence est une erreur politique majeure.

M. Régis Juanico. Majeure !

M. Alain Vidalies. Comme le parti socialiste l’écrivait dès 2009 dans son contre-plan de relance, il fallait utiliser les milliards de l’argent public des heures supplémentaires pour éviter les licenciements et maintenir, grâce au chômage partiel, le lien entre entreprise et salariés.

Votre deuxième erreur est de ne pas avoir donné à Pôle emploi les moyens nécessaires à un réel accompagnement des chômeurs. Créer des postes en CDD, les supprimer, puis les créer à nouveau avant les élections, ce n’est pas une politique, mais une gestion au fil de l’eau.

Le constat est simple : pour 10 000 demandeurs d’emploi, chiffre référence utilisé par les statistiques européennes, on compte à Pôle emploi 215 agents équivalents temps plein ; et en Allemagne, puisque c’est la comparaison que vous prenez toujours, on leur consacre 426 équivalents temps plein, c’est-à-dire exactement le double.

Six millions de Français ont eu recours à Pôle emploi dans l’année. Six millions d’inscriptions, c’est un flux énorme par rapport au nombre d’actifs dans le secteur privé.

M. Xavier Bertrand, ministre. Et combien y a-t-il de sorties ?

M. Alain Vidalies. Certes, il y a beaucoup de sorties…

M. Xavier Bertrand, ministre. 5,9 millions !

M. Alain Vidalies. Avec 6 millions d’entrées et 5,9 millions de sorties, vous ne devriez pas arriver à ce nombre de chômeurs.

M. Xavier Bertrand, ministre. Cela en fait 100 000 de plus.

M. Jean Mallot. Il n’y a pas que ceux-là !

M. Régis Juanico. Il n’y en a pas 100 000, mais un million de plus !

M. Alain Vidalies. Je ne suis pas très fort en mathématiques, mais il me semble qu’il y a un problème dans votre calcul, monsieur le ministre.

Quand 6 millions de Français doivent aujourd’hui avoir recours aux services de Pôle emploi, la moindre des choses serait quand même qu’ils puissent être accueillis et accompagnés, car ce sont les premières victimes de la crise.

Vous n’avez pas non plus été au rendez-vous de l’emploi des jeunes, en ne vous dotant que d’un fusil à un coup, celui de l’alternance, sans vous rendre compte que la capacité d’accueil des entreprises est elle aussi très dépendante de la conjoncture économique ; contre le chômage massif des jeunes, l’alternance ne peut pas tout.

Pour le chômage des seniors, vous êtes resté l’arme au pied, spectateur impuissant d’une dégradation incroyable. Qui ne comprend que ces chiffres posent à l’évidence la question non pas de l’existence mais de l’application aux seniors de la rupture conventionnelle ? Cette dérive, qui aboutit à l’exclusion des plus de cinquante ans de l’entreprise, transforme sous nos yeux une liberté nouvelle, la rupture conventionnelle, en un abus de faiblesse contre les salariés âgés.

Le plus extraordinaire, c’est probablement l’intervention de Nicolas Sarkozy pour menacer maintenant les corps intermédiaires, et explicitement les partenaires sociaux, d’avoir recours à un référendum sur la formation professionnelle obligatoire des chômeurs.

Il n’existe évidemment aucune cohérence entre vos discours et même vos actes sur la démocratie sociale et l’irruption dans ce processus d’un candidat-président manifestement plus nourri de boulangisme que du respect de la négociation collective.

M. Jean Mallot. C’est sûr !

M. Alain Vidalies. Avec François Hollande, nous faisons le choix du retour à la croissance avec le pacte productif mais aussi du retour à la confiance dans la valeur du travail, notamment par l’inscription de la démocratie sociale dans la Constitution, par la mise en œuvre du contrat de génération et par la création de 150 000 emplois d’avenir.

Oui, en 2012, Nicolas Sarkozy, il est temps de tirer les conséquences de votre politique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, cette séance, si je ne me trompe pas, a été voulue par le groupe socialiste.

M. Jean Mallot. Vous êtes bien informé !

M. Xavier Bertrand, ministre. On voit bien qu’elle prend des allures de séance de rattrapage…

M. Jean Mallot. Oui, on vous donne votre chance !

M. Xavier Bertrand, ministre. Il est vrai que l’emploi n’a jamais fait partie des priorités énoncées par votre candidat François Hollande.

M. Jean-René Marsac. N’importe quoi !

M. Xavier Bertrand, ministre. Il a commencé son fameux discours du Bourget en indiquant que, parmi ses priorités, il plaçait le non-cumul des mandats, la nomination du président de France Télévisions et le droit de vote des étrangers aux élections locales. Pour l’emploi, il a fallu attendre !

M. Jean-René Marsac. Ne commencez pas par être ridicule !

M. Xavier Bertrand, ministre. Il est vrai que, dans le débat public sur l’emploi, on n’est pas embarrassé par les idées de la gauche et du parti socialiste, c’est le moins que l’on puisse dire !

M. Jean-Patrick Gille. Nous allons y venir !

M. Xavier Bertrand, ministre. C’est pourquoi je reviendrai sur certains des propos tenus par M. Vidalies à l’instant.

Je vois que vous avez enrichi votre vocabulaire depuis vingt-quatre heures, monsieur Vidalies ! Vous reconnaissez désormais – du bout des lèvres – l’existence d’une crise économique et financière qui n’est pas sans conséquences sur l’activité économique.

Contrairement à vous, nous savons que ce sont les entrepreneurs et les entreprises qui créent les emplois, pas les hommes et les femmes politiques. Notre rôle est de créer les conditions favorables et de ne pas entraver la marche des entreprises.

M. Jean Mallot. Autrement dit, vous ne pouvez rien faire, vous reconnaissez votre impuissance !

M. Xavier Bertrand, ministre. Ne rien faire ? Je ne suis pas socialiste, monsieur Mallot ! Ce n’est pas moi qui ai soutenu un Président de la République qui déclarait que tout avait été essayé contre le chômage. Certainement pas !

Nous n’avons pas dit aux ouvrières de Lejaby ni aux salariés de Photowatt que l’État ne pouvait rien ; c’est vous qui l’avez dit. C’est vous aussi, avec un Premier ministre nommé Lionel Jospin, qui avez montré la faillite de la politique socialiste en termes d’emploi. Vous avez illustré à la fois le reniement et le renoncement.

M. Jean Mallot. Nous avions créé un million d’emplois !

M. Xavier Bertrand, ministre. Le reniement tout d’abord, avec Vilvorde. Avant 1997, M. Jospin et la gauche disaient : « Vous allez voir ce que vous allez voir ! On empêchera la fermeture de Renault à Vilvorde ! » Quelques semaines après les élections, c’en était fini. Vous n’avez jamais soutenu ce dossier.

Renoncement en 2002, face aux ouvriers de Lu, dans l’Essonne, où M. Jospin, invité par M. Valls, a eu ces mots terribles : « L’État ne peut pas tout ». Vous n’avez rien fait. C’était un renoncement à l’action publique et politique.

Je prends des avis et des conseils, c’est normal. Mais recevoir des leçons de votre part, cela m’est difficile, sinon impossible.

M. Jean Mallot. Il va falloir vous y habituer !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous cherchez à faire peur en affirmant que 6 millions de personnes prennent le chemin de Pôle emploi, mais vous oubliez que près de 5,9 millions de personnes ne le prennent plus. L’an dernier, le nombre de chômeurs s’est accru de 150 000…

M. Jean Mallot. 150 000 chômeurs de plus, c’est un aveu d’échec !

M. Xavier Bertrand, ministre. C’est déjà beaucoup trop, et celui qui vous le dit assume complètement ses responsabilités en matière d’emploi et de politique de l’emploi. Vous oubliez de dire également, mais peut-être est-ce parce que vous ne disposiez que de cinq minutes…

M. Pascal Brindeau. Cinq minutes de trop !

M. Xavier Bertrand, ministre. ...que le taux d’emploi des seniors dans notre pays s’est accru de cinq points depuis le début du quinquennat. Cela n’est pas dû au hasard, mais aux réformes d’ampleur que nous avons menées. Nous avons expliqué qu’il n’y avait aucune impuissance politique, aucun fatalisme à cultiver, mais que nous avions la possibilité de faire avancer les choses.

Comme toutes les réformes que nous avons mises en œuvre, vous n’avez pas voté la rupture conventionnelle …

M. Régis Juanico. Si !

M. Alain Vidalies. Ce que vous dites est faux !

M. Jean Mallot. Rétablissez la vérité historique, soyez honnête !

M. Xavier Bertrand, ministre. Et même lorsque, du bout des lèvres, vous approuvez un texte, vous cherchez aussitôt à vous en démarquer ; c’est ce que vous venez de faire à l’instant.

M. Jean Mallot. C’est moi qui ai fait voter l’amendement qui permet d’inscrire le salarié à Pôle emploi !

M. Xavier Bertrand, ministre. Toute la gauche n’a pas voté ce texte ! Et ceux qui l’ont fait semblent aujourd’hui revenir sur leur vote en arguant que la rupture conventionnelle touche davantage de seniors. Je vous le dis, monsieur Mallot : il n’y a pas plus de seniors concernés par la rupture conventionnelle qu’il n’y en a dans les licenciements économiques.

La rupture conventionnelle est un outil nécessaire, pensé par les partenaires sociaux. Je l’assume et je n’ai pas l’intention de revenir dessus.

M. Alain Vidalies. Nous avons voté pour !

M. Xavier Bertrand, ministre. En matière de négociation sociale sur l’emploi, je ne sais pas si vous avez la nostalgie de la méthode de Martine Aubry, qui a imposé les 35 heures aux partenaires sociaux, sans aucune discussion. Si c’est la méthode dont vous rêvez, je vous la laisse. Pour notre part, nous préférons le dialogue social…

M. Jean-Patrick Gille. C’est faux ! Vous, vous faites des referendums !

M. Xavier Bertrand, ministre. C’est ce qui aura permis la signature de vingt-sept accords nationaux interprofessionnels depuis 2007.

La situation de l’emploi n’est certes pas facile, nous le savons ; nous ne sommes pas de ceux qui s’agitent, mais de ceux qui agissent.

M. Jean Mallot. Vous êtes déjà assez agités comme cela !

M. Xavier Bertrand, ministre. Les salariés au côté de qui nous sommes en permanence le savent, même si c’est difficile. Il y a donc une sacrée différence entre vous et nous.

M. Alain Vidalies. Ça, c’est bien vrai !

Mme la présidente. Je vous rappelle que la conférence des présidents du 24 janvier 2012 a décidé que ce débat serait organisé sous forme de questions, d’une durée de deux minutes chacune.

La réponse du Gouvernement sera donnée après chaque question, sans droit de réplique.

Nous commençons par les questions du groupe SRC.

La parole est à M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Monsieur le ministre, le candidat-président que vous soutenez propose de stigmatiser les chômeurs à travers un référendum sur les droits et les obligations des demandeurs d’emploi, alors que vous avez vous-même fait voter en 2008 une loi sur ce sujet.

Les quatre millions de demandeurs d’emploi ne veulent pas d’un référendum, mais d’un accompagnement renforcé et personnalisé pour un retour à l’emploi durable.

Nous venons de publier, avec mon collègue Michel Heinrich, un rapport du comité d’évaluation et de contrôle sur la performance des politiques sociales en Europe. Qu’avons-nous constaté ? Les moyens humains de Pôle emploi sont significativement inférieurs à ceux de ses homologues européens. Chez nos voisins allemands, à qui vous aimez nous comparer, les effectifs du service public de l’emploi étaient de 420 équivalents temps plein pour 10 000 chômeurs en 2010, contre 215 seulement en France. Dans certaines agences, un conseiller doit suivre jusqu’à 600 demandeurs d’emploi : mission impossible !

Plusieurs pays européens ont également fait preuve de davantage de réactivité et de pragmatisme dans la crise en adaptant les moyens du service public de l’emploi à la conjoncture et au niveau du chômage. Le Royaume-Uni a ainsi recruté 16 000 conseillers supplémentaires en 2009 et l’Allemagne 5 000.

Notre rapport souligne également que les contacts avec les demandeurs d’emploi sont moins fréquents en France. Par ailleurs, les conseillers allemands, suédois ou britanniques ont davantage d’autonomie et de ressources pour aider au retour à l’emploi des chômeurs.

Nous préconisons la fin de la généralisation du métier unique, le renforcement de l’expertise et de l’autonomie des conseillers de Pôle emploi, l’intensification des contacts avec les demandeurs d’emploi et, surtout, une augmentation des moyens humains de Pôle emploi en fonction de la hausse du chômage.

Vous avez supprimé 1 800 emplois en 2011 avant de proposer de créer 1 000 CDD en 2012 et d’annoncer 2 000 redéploiements, ce qui est dérisoire au regard du million de chômeurs supplémentaires depuis cinq ans.

Monsieur le ministre, allez-vous enfin prendre la mesure des changements à opérer au sein de Pôle emploi, en lui accordant plus de moyens humains pour un meilleur accompagnement des chômeurs, ainsi que le propose François Hollande ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Alain Vidalies. Excellent !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le député, j’aurai grand plaisir à vous transmettre la nouvelle convention tripartite.

M. Régis Juanico. Je la connais.

M. Xavier Bertrand, ministre. Mais vous ne l’avez pas lue.

M. Régis Juanico. Elle arrive bien tard, alors qu’il y a un million de chômeurs supplémentaires.

M. Xavier Bertrand, ministre. Ne vous faites pas plaisir en maniant des chiffres qui travestissent la réalité : vous ne pouvez parler d’un million de chômeurs de plus, à moins de compter les travailleurs à temps partiel. Est-ce à dire que vous les considérez comme des chômeurs ? Pas moi. Je doute que cela leur fasse plaisir.

M. Alain Vidalies. Ce sont des demandeurs d’emploi.

M. Régis Juanico. Ils sont inscrits à Pôle emploi !

M. Xavier Bertrand, ministre. Ne cherchez pas à danser d’un pied sur l’autre ; vous avez tort. Comme tout un chacun, vous disposez des chiffres du BIT, reconnus et respectés de tous.

Par ailleurs, je connais bien toutes les catégories de demandeurs d’emploi ; je suis désolé, mais les travailleurs à temps partiel ne sont pas considérés comme des chômeurs.

M. Jean Mallot. Certes !

M. Xavier Bertrand, ministre. Si vous avez lu la convention tripartite, vous savez que ce que vous indiquez y figure. Mais c’est là l’un de vos travers : vous cherchez à mettre vos pieds dans les chaussons des autres… Au lieu de reconnaître ce qui va dans le bon sens, vous dites que c’est ce qu’il faudrait faire.

Prendre mieux en compte les besoins des demandeurs d’emploi, ne pas se couper des entreprises, alléger les formalités pour les agents de Pôle emploi : c’est exactement ce que je souhaitais et c’est ce qui est signé dans la convention tripartite.

Y figurent aussi les 2 000 ETP, qui seront redéployés et se trouveront au guichet, devant les demandeurs d’emploi. Lors du sommet Pôle emploi du 18 janvier, le recrutement de 1 000 CDD pour une durée d’un an a été décidé : ils seront opérationnels avant la fin du mois, de façon à faire face aux besoins.

M. Régis Juanico. Ce n’est pas assez !

M. Xavier Bertrand, ministre. C’était ce que demandaient les partenaires sociaux et nous allons dans ce sens. Il vous est impossible de le reconnaître, c’est dommage.

M. Régis Juanico. Cela arrive bien tard !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Mallot.

M. Jean Mallot. Monsieur le ministre, je commencerai par vous rappeler que c’est notre amendement qui a permis que les salariés concernés par la rupture conventionnelle bénéficient de l’assurance chômage de droit commun.

Notre pays connaît une situation très difficile : 2 874 000 demandeurs d’emploi de catégorie A, c’est un record. Confrontées à la crise, les entreprises sont soumises à différents dispositifs souvent contradictoires : le recours au chômage partiel, peut-être un jour les contrats emploi solidarité – travailler moins pour gagner moins –,…

M. Pascal Brindeau. Comme avec les 35 heures !

M. Jean Mallot. …la baisse des cotisations patronales familiales pour compenser votre TVA sociale, les allègements généraux dits « Fillon », sans oublier, bien sûr, la défiscalisation et l’exonération de cotisations sociales patronales et salariales sur les heures supplémentaires : le fameux article 1er de la loi TEPA.

Ce système unique au monde oblige l’État à emprunter chaque année sur les marchés financiers 4,5 milliards d’euros, et d’accroître d’autant la dette, afin de subventionner au-delà de la majoration lesdites heures supplémentaires.

L’effet d’aubaine pour les entreprises est massif, et amplement démontré. On ne compte pas davantage d’heures supplémentaires : déjà effectuées, mais non déclarées comme telles, elles sont simplement révélées.

Mais il y a plus grave. En situation de crise, ce système a accentué l’effet d’éviction, favorisant du coup la montée du chômage. Tous les directeurs des ressources humaines vous le diront : l’heure supplémentaire coûte moins cher à l’entreprise que l’heure normale. De ce fait, lorsque l’entreprise est confrontée à une baisse de son carnet de commandes, elle commence par ne plus recruter d’intérimaires et à ne plus renouveler les CDD. En contrepartie, elle augmente – puisque c’est à son avantage – les heures supplémentaires des salariés en CDI. La montée du chômage s’accentue alors. En situation de retour de la croissance, l’entreprise préférera encore faire effectuer des heures supplémentaires plutôt que de recruter : les intérimaires attendront, les CDD passent avant, ce qui retardera un peu plus la décrue du chômage espérée. Cette mesure pro-cyclique est une catastrophe pour l’emploi !

Monsieur le ministre, quand allez-vous en prendre conscience et comprendre que les 4,5 milliards d’euros ainsi dépensés pourraient être utilisés, comme nous le proposons, pour financer une autre politique, plus efficiente pour l’emploi ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. J’aimerais que cet échange soit rendu public…

M. Alain Vidalies. Mais il l’est !

M. Xavier Bertrand, ministre. Je veux dire réellement et totalement. Ainsi, les 9 400 000 personnes qui ont effectué des heures supplémentaires l’an dernier auront bien conscience de ce que vous venez de dire et de ce que vous voulez faire.

M. Jean Mallot. Ce n’est pas un problème.

M. Xavier Bertrand, ministre. Il vous faudra aussi aller, comme moi, dans les entreprises de plus de dix salariés…

M. Jean Mallot. Mais je m’y rends.

M. Xavier Bertrand, ministre. …et leur dire en les regardant dans les yeux : « Si nous sommes élus, à cause de moi, Jean Mallot, à cause de François Hollande, la loi TEPA et les heures supplémentaires, c’en est terminé pour vous ! »

M. Jean Mallot. Je leur dirai que, grâce à nous, leurs enfants auront du travail !

M. Xavier Bertrand, ministre. Allez leur expliquer que ceux qui travaillent dans des entreprises de moins de dix salariés continueront peut-être à profiter de la loi TEPA, mais pas les autres. Allez expliquer à ceux qui font jusqu’à 400 euros de plus par mois que c’en est fini de la majoration fiscale ! Mais vous ne les regarderez pas plus que vous me regardez. Parce que vous n’aurez pas le courage de le faire. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Alain Vidalies. Comment ferez-vous si, comme l’a proposé Jean-François Copé, toute durée légale du travail est supprimée ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Ce serait une injustice sans pareille. Vous avez beau utiliser le terme « justice » dans toutes vos phrases, ce que vous voulez faire avec les heures supplémentaires est le comble de l’injustice, puisque vous créerez une différence entre salariés en enlevant à certains cet avantage, mais pas aux autres.

Ceux qui font des heures supplémentaires ne les volent à personne. Qui croira que les deux ou quatre heures supplémentaires effectuées dans une entreprise de quinze salariés peuvent être partagées ou divisées, pour recruter quelqu’un d’autre en lieu et place ? Cela ne marche pas ainsi.

Travailler moins pour gagner moins, avez-vous dit : Il est vrai que vous avez mis en pratique ce slogan avec les 35 heures… Les Français ont travaillé moins, et ils n’avaient pas le choix, mais ils ont gagné moins parce que vous avez bloqué les salaires. Voilà à quel prix l’économie française n’a pas complètement sombré ! Je suis désolé de vous le dire, mais après avoir fait payer la facture des 35 heures aux ouvriers et aux salariés, vous vous apprêtez à la leur faire payer une deuxième fois en mettant fin aux heures supplémentaires.

M. Jean Mallot. Soyez de bonne foi ! Vous savez bien qu’il s’agit de la subvention des heures supplémentaires au-delà de la majoration !

M. Xavier Bertrand, ministre. Les ouvriers et les salariés sont lucides ; ne vous étonnez pas s’ils ne vous font pas confiance.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

M. Jean-Patrick Gille. Monsieur le ministre, actualité oblige, je voudrais évoquer la formation des demandeurs d’emploi et tirer le bilan des trois réformes du quinquennat.

La fusion de l’ANPE et des ASSEDIC devait améliorer l’accompagnement et le placement des demandeurs d’emplois. Mais aujourd’hui, Pôle emploi ne gère que 10 % des contrats de travail signés dans le pays et ne parvient à faire entrer en formation que 10 % des chômeurs, ce qui représente moins que le nombre d’offres d’emploi qui demeurent non pourvues.

La réforme de la formation professionnelle devait réorienter les fonds de la formation vers ceux qui en ont le plus besoin, avec notamment l’accord des partenaires sociaux pour créer un fonds paritaire, alimenté par une fraction de l’obligation légale et un abondement de l’État. Non seulement l’État n’a pas abondé ce fonds, mais il le ponctionne chaque année de 300 millions d’euros, au point de l’avoir mis en déficit.

La loi sur les droits et les devoirs des demandeurs d’emploi – que réclame le candidat-président – a été votée en juillet 2008 : elle dispose qu’un chômeur qui a refusé une offre d’emploi ne peut plus en refuser une deuxième ou une proposition de formation, sous peine d’être radié de la liste des demandeurs d’emplois et d’être privé d’indemnisation.

Cette loi a abouti à augmenter le nombre de radiations sans améliorer pour autant le retour à l’emploi ni l’entrée en formation. En effet, l’organisation et les moyens de Pôle emploi ne permettent aux conseillers ni d’offrir un véritable suivi individualisé ni de s’approprier l’offre de formation existante.

Bref, c’est un échec. Le Président de la République a beau jeu de le dénoncer aujourd’hui, c’est avant tout le sien ! Sa politique et ses réformes visaient à réduire le budget de l’État – suppression des formations financées par l’État, extinction de l’allocation de fin de formation, abandon de l’AFPA – pour se décharger financièrement sur les régions, les partenaires sociaux et l’UNEDIC, tout en tentant de garder la main.

Croyez-vous vraiment, monsieur le ministre, qu’un référendum populiste améliorera le système ? Pour notre part, nous pensons que seule une véritable négociation sociale qui permettra de l’améliorer en confiant clairement les compétences de la formation aux régions, qui ont la responsabilité du développement économique, des lycées, des CFA. Elles sont mieux à même de piloter la formation et d’organiser la nécessaire coordination sur les territoires au plus près de l’économie et des besoins des demandeurs d’emploi.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur Gille, j’aime bien les débats, car ils permettent de montrer les vraies différences.

M. Jean-Patrick Gille. Nous aussi !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous, vous trouvez que tout va bien ; pas moi.

M. Jean-Patrick Gille. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous vous réjouissez de savoir qu’il y a 10 % des demandeurs d’emploi qui bénéficient d’une formation. Cela vous suffit…

M. Jean-Patrick Gille. Mais je n’ai absolument pas dit cela ! Vous n’avez pas écouté, monsieur le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Moi, cela ne me suffit pas, monsieur Gille.

M. Jean-Patrick Gille. Moi non plus. Mais vous ne m’avez pas écouté.

Mme Laurence Dumont. Puisque vous appréciez les débats, monsieur le ministre, il faut écouter les députés !

M. Xavier Bertrand, ministre. Savoir que les trois quarts de demandeurs d’emploi qui font une demande de formation ne l’obtiennent pas, cela vous suffit ? Peut-être, mais moi, cela ne me va pas, monsieur Gille. Je pense qu’il faut changer les choses, et en profondeur. L’idée est simple : nous avons demandé à Gérard Larcher qui travaille sur cette question de nous donner, dans moins de deux mois, les bases d’une réforme d’ampleur en matière de formation professionnelle et de formation des demandeurs d’emploi.

M. Jean-Patrick Gille. Ce n’est pas déjà ce que vous avez fait ? Encore une réforme ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Sur les bases de ce travail, nous proposerons aux partenaires sociaux d’en discuter. Mais si c’est pour arriver au final à une réforme a minima et en rester au statu quo, non merci ! (Rires sur les bancs du groupe SRC.)

Vous avez beau vous gausser, messieurs de l’opposition ; en fait, vous avez certainement peur de donner la parole au peuple : pas moi ! (Exclamations et sourires sur les bancs du groupe SRC.) C’est très gaulliste, c’est très républicain, le référendum !

M. Régis Juanico. Combien en avez-vous organisé en cinq ans ?

Mme Laurence Dumont. Sur la TVA sociale par exemple ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Moi qui viens du gaullisme, je trouve cette idée foncièrement moderne.

Une chose est certaine. Sur tous ces points, il n’y avait pas de blocage, seulement une agitation d’arrière-garde, notamment de la part d’une opposition (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) qui n’a jamais voulu que les choses changent…

M. Régis Juanico. Il y avait tout de même 7 millions de personnes dans la rue !

M. Xavier Bertrand, ministre. Si vous me cherchez sur le domaine des retraites…

Mme la présidente. Veuillez laisser le ministre s’exprimer.

Mme Laurence Dumont. Il fait un peu de provocation !

M. Xavier Bertrand, ministre. J’aimerais que vous repreniez les propos de Lionel Jospin qui, après 2002, disait…

M. Jean-Patrick Gille. On est en 2012 !

M. Xavier Bertrand, ministre. …que si la réforme des retraites n’avait pas été menée avant l’élection présidentielle, c’était à la demande de François Hollande… Ce n’est pas moi qui l’ai dit, mais Lionel Jospin ! Comme quoi, le manque de courage chez vous et chez votre candidat, cela ne date pas d’aujourd’hui. C’était déjà le cas il y a plusieurs années !

Si l’on propose une formation sérieuse pour changer de métier s’il n’y a plus de débouchés, et si, à l’issue de cette formation, l’on propose une offre d’emploi sérieuse, pensez-vous raisonnablement que l’on peut continuer à dire non ? Je ne le pense pas. Sur ces sujets qui sont suffisamment graves, il faut des réformes d’ampleur…

M. Jean-Patrick Gille. Depuis combien de temps êtes-vous au pouvoir ?

M. Jean Mallot. Pourquoi n’avez-vous pas fait un seul référendum en cinq ans ?

M. Xavier Bertrand, ministre. ...et aller beaucoup plus loin dans le changement. J’ai du reste le sentiment que le changement ne fait pas peur aux Français. Nous, nous voulons le changement ; mais vous, en la matière, vous êtes terriblement conservateurs. Ce n’est pas de conservatisme dont on a besoin.

Mme la présidente. Nous en arrivons aux questions du groupe Nouveau Centre.

La parole est à M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. Comme un grand nombre de pays industrialisés en Europe, la France est touchée par la crise. Je suis très heureux de constater que nos collègues socialistes se réveillent enfin et considèrent que l’évolution de l’emploi et l’aggravation du chômage sont dues à la crise internationale que nous connaissons. J’aimerais qu’ils aillent encore un peu plus loin dans le discours de vérité en reconnaissant que notre pays s’en sort plutôt mieux que d’autres de ses partenaires, car même si le chômage s’est accru en France, ce que nous regrettons tous, il a augmenté moins vite et dans des proportions moindres qu’en Espagne, au Royaume-Uni ou d’autres pays de l’Union européenne.

M. Jean Mallot. Ce n’est pas ce que dit Hervé Morin !

M. Pascal Brindeau. À mon tour, je m’appuierai sur les travaux du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, cher à notre collègue Jean Mallot ainsi qu’à moi-même, et sur le rapport sur les politiques sociales en Europe, montrant qu’il y avait un problème structurel, propre à la France, et non conjoncturel,…

M. Régis Juanico. Le taux d’emploi.

M. Pascal Brindeau. …à savoir celui des politiques de retour à l’emploi.

M. Régis Juanico. En effet.

M. Pascal Brindeau. Notre collègue Juanico l’a rappelé.

Le problème est structurel, le constat ne date pas d’il y a cinq ans ou dix ans.

M. Jean Mallot. Il n’empêche que vous êtes au pouvoir depuis dix ans.

M. Pascal Brindeau. Le problème remonte à bien plus longtemps, ce qui pose évidemment question sur l’organisation de notre service public de l’emploi.

Je reprendrai une des propositions formulées dans ce rapport : l’adaptation des moyens de Pôle emploi en fonction du nombre de demandeurs d’emploi amenés à faire appel au service public de l’emploi. Nous avons une différence majeure avec l’Allemagne, Régis Juanico le sait : parmi les conseillers du service public de l’emploi en Allemagne, certains sont spécifiquement chargés de la relation entre le service public de l’emploi et l’entreprise. C’est ce qui fait gravement défaut au système français.

M. Alain Vidalies. C’est vous qui l’avez voté !

M. Régis Juanico. Pôle emploi, c’est le contraire en effet : un métier unique !

M. Pascal Brindeau. Ce n’est pas une simple question de moyens supplémentaires pour répondre à un flux supplémentaire de demandeurs d’emploi ; il nous faut repenser la façon dont le lien entre l’entreprise et le service public de l’emploi est fondé. Nombre de petites entreprises, je peux en témoigner, et même des grands groupes ne font plus appel au service public de l’emploi pour recruter.

M. Jean-Patrick Gille. Pôle emploi ne gère que 10 % des contrats.

M. Pascal Brindeau. D’un côté, nous avons des entreprises qui cherchent des salariés, de l’autre, des demandeurs d’emploi. À un moment donné, l’on s’aperçoit que Pôle emploi, en dépit des restructurations, ne remplit pas son rôle.

Ma question, monsieur le ministre, porte sur cet aspect de la proposition du rapport du CEC. Comment repenser la relation entre entreprises, créatrices d’emploi et de richesse dans ce pays, et service public de l’emploi ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jean Mallot. Cela ne va pas être facile !

M. Régis Juanico. Parlez du métier unique à Pôle emploi !

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le député, vous avez parlé de Pôle emploi et des entreprises. Moi, je crois, depuis maintenant plus d’un an que j’ai pris mes fonctions, que l’un des vrais sujets est la question des métiers en tension. Bien sûr, la conjoncture économique ne permet pas d’avoir autant de créations d’emploi que nous le souhaitons.

M. Jean Mallot. Récidive !

M. Xavier Bertrand, ministre. Mais en attendant, si vous avez 2 874 000 demandeurs d’emploi – et je remercie M. Mallot d’avoir fait preuve d’intégrité intellectuelle en le reconnaissant –, reste que plus de 280 000 offres d’emploi ne trouvent pas preneur, ou très difficilement. Ce sont autant de demandeurs d’emploi qui ne trouvent pas d’emploi, et autant d’entreprises qui ne peuvent pas faire face à leurs besoins. Ces fameux métiers structurellement en tension, nous les connaissons, même si cela peut varier d’une région à une autre : ce sont l’hôtellerie-restauration, les services à la personne et, nonobstant des variations conjoncturelles, les métiers du bâtiment.

Avec les services publics de l’emploi locaux regroupés et organisés autour du sous-préfet, j’ai voulu mettre davantage en cohérence l’offre et la demande.

Le mois dernier, le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté de 29 900. Mais il faut aussi reconnaître, les chiffres le disent noir sur blanc, qu’il y en a eu aussi 26 000 en moins, parce qu’il y a eu 26 400 offres d’emploi pourvues de plus par rapport à l’année précédente. Autrement dit, sans ces nouvelles orientations, nous n’aurions pas eu 29 900 demandeurs d’emploi supplémentaires, mais bien 56 300. Je suis désolé, mais je préfère que 26 000 personnes aient entre-temps retrouvé un emploi.

Cela marche, mais il faut aussi aller plus loin. Pour certaines, ce n’est pas seulement le rapprochement, la mise en cohérence de l’offre et de la demande, c’est aussi une offre de formation qui doit être adaptée et aménagée. Ce n’est pas au niveau national qu’on peut le faire le mieux, ni au niveau régional, mais bien au niveau local, en donnant du pouvoir aux agences locales et aux services publics de l’emploi locaux.

M. Alain Vidalies. C’est vrai.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Brindeau, pour une deuxième question.

M. Jean Mallot. Ils sont nombreux aujourd’hui, au Nouveau centre !

Mme la présidente. Allons ! Seul M. Brindeau a la parole.

M. Jean Mallot. Il ne peut pas en être autrement, madame la présidente, puisqu’il est tout seul. (Sourires.)

Mme la présidente. Je vous en prie !

M. Pascal Brindeau. Je vais essayer de ne pas décevoir mes collègues socialistes.

Ma deuxième question porte sur un autre instrument de lutte contre le chômage : les contrats aidés. Là encore, nous sommes sur des sujets structurels qui dépassent de simples débats de nature politique et de circonstance.

Qu’ils se soient appelés TUC, TIC, CES, CEC ou désormais CUI ou CAE, la grande difficulté de ces dispositifs qui ont pour vocation à ramener des gens durablement exclus de l’emploi dans une activité, c’est la sortie de ces contrats. Ils ont été adaptés en fonction de la conjoncture et de la difficulté de certains publics – seniors, jeunes, femmes – beaucoup plus exposés que d’autres au chômage tant conjoncturel que structurel. En dépit de toutes les tentatives de doter ces contrats d’obligations en termes de formation, lorsqu’ils arrivent à échéance un grand nombre de personnes se retrouvent de nouveau en situation de chômage, d’exclusion presque définitive du marché de l’emploi ; il ne leur reste plus qu’à attendre d’être à nouveau éligibles à un nouveau contrat aidé.

Dans le même temps, des établissements publics – les établissements hospitaliers, les structures de l’éducation nationale avec les EVS et les AVS, certaines collectivités territoriales – des postes disponibles par le fait qu’ils sont pourvus seulement par des contrats aidés : d’où des incroyablement illogiques où un employé fait bien son boulot, est reconnu dans son métier par sa hiérarchie et son employeur, mais ne sera pas réembauché à cause du système du contrat aidé, dont il est tenu de sortir.

Comment le Gouvernement peut-il envisager demain de mieux adapter les contrats aidés et de mieux gérer la sortie de ces dispositifs afin que l’insertion dans l’emploi soit durable ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le député, je crois aux contrats aidés. Ce n’est certainement pas la solution miracle, mais force est de reconnaître qu’un demandeur d’emploi sans activité depuis un an et demi retrouvera beaucoup moins facilement un emploi sans un dispositif adapté que celui qui est au chômage depuis seulement un mois et demi. C’est ainsi.

Pour moi, le contrat aidé, CAE ou CIE, c’est bien souvent l’étape intermédiaire avant de retrouver un emploi à une condition : qu’il y ait l’obsession de la formation le premier jour où cette personne est prise en contrat aidé.

M. Jean Mallot. Les emplois jeunes, cela a bien marché.

M. Xavier Bertrand, ministre. Je demande régulièrement à tous ceux qui sont prescripteurs de contrats aidés, aux employeurs des contrats aidés. C’est vrai pour les associations, pour les organismes publics, les collectivités locales et les entreprises.

Par ailleurs, j’assume complètement mes propos sur les publics cibles, notamment les demandeurs d’emploi de plus longue durée : lorsqu’on est éloigné de l’emploi depuis longtemps, c’est le contrat aidé qui permet de revenir vers l’emploi.

Nous en avons terminé aussi avec ces politiques accordéon où l’on modifiait les critères de prise en charge, la durée de prise en charge, le montant du financement. Nous avons maintenant une vraie visibilité de façon à permettre, grâce aux contrats aidés, de contenir le chômage en période de crise, mais aussi de le faire reculer.

L’on continuera à s’appuyer sur les CAE dans la sphère publique et sur les CIE. Certains me demandent s’il n’y a pas un effet d’aubaine avec le CIE. Lorsqu’il est bien déterminé, c’est-à-dire que l’on a choisi les publics auxquels on veut s’adresser en priorité, le CIE est un moyen d’intégrer plus facilement l’entreprise. Sur ce sujet, j’ai sollicité une nouvelle fois l’ensemble des conseils généraux. Je rappelle que la question du cofinancement des contrats aidés entre les départements et l’État, c’est un gain pour les départements. Plutôt que de payer 467 euros quelqu’un qui est au RSA socle, mieux vaut cofinancer un contrat aidé avec l’État : cela ne coûte que 411 euros. C’est moins cher, mais pour la personne concernée, c’est l’idée d’avoir un travail, ne serait-ce que pour vingt-quatre heures ou un peu plus dans certains cas, des horaires, un projet et une fiche de paie plutôt qu’un bulletin d’allocations chômage.

M. Jean Mallot. Et le ministre est content parce que les statistiques baissent !

M. Xavier Bertrand, ministre. Oui, je crois aux contrats aidés. C’est d’ailleurs ma conviction depuis des années. Peut-être est-ce parce que l’élu local que je suis n’est jamais éloigné du ministre.

M. Arnaud Richard. Très bien !

Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe GDR.

La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour poser sa première question.

Mme Marie-George Buffet. Le site de Garonor, en Seine-Saint-Denis, est un élément important de l’activité économique de ce département. De nombreux emplois de logistique sont occupés par les habitants des villes alentour.

Or avec la création de nouvelles zones économiques en périphérie de l’Île-de-France, une partie des entreprises de Garonor pourrait quitter le site pour bénéficier de coûts de location plus bas en lien avec le prix du foncier, ce d’autant que le projet de Grand Paris provoque une hausse du prix des terrains.

Les conséquences d’un tel déplacement d’activité seraient négatives pour les salariés. Nombre d’entre eux verraient leur temps de trajet fortement rallongé, d’autres perdraient leur emploi.

Sur le plan économique et environnemental, les conséquences seraient tout aussi négatives. Les entreprises, notamment de logistique, seraient éloignées de leurs clients situés en proche banlieue parisienne, rendant plus compliquée leur activité, et augmentant la pollution.

La situation rencontrée par les entreprises de Garonor est également partagée par de nombreuses TPE et PME de petite couronne, qui sont par ailleurs asphyxiées par les charges financières et qui peinent à accéder au crédit.

Les dirigeants de Garonor ont présenté leur projet de développement du site et de l’emploi, projet soucieux de l’environnement, au ministre de la ville il y a quelques mois.

Pourriez-vous m’indiquer, monsieur le ministre, quelles suites le Gouvernement compte leur donner ?

De manière plus générale, envisagez-vous de mettre en place des fonds régionaux rassemblant les aides économiques existantes afin de bonifier les crédits des entreprises créatrices d’emplois et alléger du même coup leurs charges financières ? Une telle mesure serait vitale pour stimuler le développement des TPE et des PME, qui sont les premiers employeurs et qui créent les emplois de proximité dont la Seine-Saint-Denis a tant besoin.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Madame la députée, vous avez raison, la question de l’emploi à l’échelle locale renvoie à la question de l’emploi à l’échelle nationale. C’est bien dans cet esprit que vous m’interrogez : je reçois le message.

Le projet du Grand Paris poursuit l’objectif de favoriser le développement économique, en particulier celui du tissu du Grand Roissy, l’un des territoires plus stratégiques de ce projet, personne ne le contestera. Il a fait l’objet de quatre démarches de contrats de développement territorial.

Vous savez également, puisque ce dossier vous intéresse, que Garonor fait partie d’une réflexion spécifique dans le cadre du développement des territoires de l’est de la Seine-Saint-Denis. Il doit profiter du dynamisme du nouvel axe de développement qui s’étend du Bourget au sud de Roissy, en passant par le triangle de Gonesse. C’est bel et bien la vocation de ce CDT.

Les acteurs concernés, quelle que soit leur sensibilité politique, ont tous vocation à travailler en ce sens. Reconnaissons toutefois que la cohérence entre les différents projets et la régulation de la concurrence entre les territoires, que vous avez vous-même évoquée, doivent être assurées par la gouvernance du Grand Roissy, dont le conseil de pôle a été installé mardi dernier, le 14 février.

Connaissant votre influence, madame le ministre, je me permettrai d’ajouter que si le conseil régional, le conseil général de Seine-et-Marne et le conseil général de Seine-Saint-Denis s’associent à cette démarche, ce sera beaucoup plus facile et efficace pour porter entendre des revendications comme celles que vous avez mises en avant.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour poser sa deuxième question.

Mme Marie-George Buffet. Monsieur le ministre, le 21 décembre dernier, le comité central d’entreprise de PSA a décidé de supprimer 4 000 emplois en France, dont 1 900 CDI. Depuis juin, un document de travail de la direction évoquait l’hypothèse de la fermeture du site d’Aulnay, mais le ministre de l’industrie avait affirmé aux salariés qu’il n’y avait pas d’inquiétudes à avoir.

Or la presse annonce aujourd’hui que la situation de PSA s’est énormément dégradée. La division automobile a perdu près de 100 millions d’euros l’an dernier, même si le groupe lui-même a engrangé 588 millions de bénéfices. Face à cette situation nouvelle, le groupe envisage de porter la réduction de ses coûts de 800 millions à 1 milliard d’euros en 2012. Des coupes sont prévues dans la recherche et développement, mettant à mal les projets de nouveaux véhicules. Le siège parisien va être vendu et les salariés devront subir un à deux mois de chômage partiel. À entendre le PDG de PSA, les réductions de surcapacités en Europe sont inévitables, notamment pour les petits modèles, du fait du recul des marchés européens lié à la crise.

Monsieur le ministre, allez-vous continuer à mener vos politiques d’austérité, qui sapent le pouvoir d’achat et fragilisent ainsi notre industrie ?

Le site d’Aulnay, qui produit la C3, se retrouve de nouveau sur la sellette. La fermeture de cette usine de 3 300 salariés entraînerait au total la disparition de plus de 10 000 emplois, en comptant les intérimaires et les sous-traitants. Des milliers de familles se trouveraient dans le plus grand dénuement. Non seulement de nombreux salariés connaîtraient des difficultés pour se reconvertir à cause du fort taux de chômage mais les jeunes seraient privés d’importantes possibilités d’emploi.

Monsieur le ministre, cette situation exige d’agir dans deux directions : renforcer en urgence les droits des chômeurs pour créer une véritable sécurité d’emploi et de formation ; mettre en place au plus vite une véritable politique industrielle en réorientant les richesses produites, des dividendes vers l’emploi et les salaires.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Madame la ministre, sur ce sujet, différentes explications ont déjà été données. Je crois qu’il ne sert à rien de vouloir être alarmiste et de faire peur, comme certains élus ont cherché à le faire par le passé – mais je sais bien que tel n’était pas le ton de votre intervention.

Est-il dans l’intérêt de PSA de trouver un digne successeur à la C3 ? Vous savez bien que oui. Vous savez aussi que PSA a une tradition, plus ancrée encore que d’autres constructeurs : les deux tiers de ses emplois sont situés en France. Des garanties à cet égard ont été données par M. Varin à différentes reprises.

Je vous remercie de me donner l’occasion d’apporter des précisions sur deux points.

D’une part, pour ce qui est de la politique d’austérité, je ne suis pas le bon client,….

M. Alain Vidalies. C’est Copé alors ?

M. Jean Mallot. Peut-être pas le bon client, mais un complice !

M. Xavier Bertrand, ministre. …moi qui n’ai cessé de croire que, pour désendetter notre pays, il fallait absolument préserver la croissance, la compétitivité et l’emploi.

D’autre part, cette situation montre tout l’intérêt qu’il y a à engager une réforme de la protection sociale. Les salariés de l’industrie automobile, notamment en région parisienne, sont en effet directement concernés par les mesures de réduction des charges, en particulier au titre des allocations familiales. Et la réduction des charges permettra d’abaisser le coût de production de ce type de voiture : comme il s’agit d’un véhicule de petite taille, l’impact sur une C3 est plus fort que sur une C6 ou une C8.

Ces mesures, votre formation les a contestées de manière constante. Le parti socialiste, quant à lui, a perdu la mémoire, oubliant qu’en octobre 2005, au congrès du Mans, la motion 1, présentée par François Hollande, proposait noir sur blanc la mise en place de la TVA sociale.

M. Yves Durand. Absolument pas !

M. Régis Juanico. Il devait s’agir d’un amendement d’Éric Besson !

M. Jean Mallot. Vous lisez mal les motions du parti socialiste !

M. Pascal Brindeau. Il faut dire que c’est plutôt difficile à lire !

M. Xavier Bertrand, ministre. Je me dois, madame la ministre, de reconnaître aux communistes le mérite de la constance ; ce n’est pas le cas des socialistes. Si vous vouliez me faire dire que cette mesure a du sens pour préserver l’emploi, vous avez eu raison et je vous en remercie.

Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe UMP.

M. Alain Vidalies. Il n’y a pas beaucoup de députés UMP pour parler de l’emploi !

M. Jean Mallot. Cela ne les intéresse pas !

M. Arnaud Richard. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Monsieur le ministre, le Gouvernement et sa majorité ont fait du développement de l’apprentissage et de l’alternance une priorité, non pour des raisons idéologiques, mais dans l’intérêt des jeunes eux-mêmes.

Rappelons deux chiffres très éloquents. Même en temps de crise, avec une formation en alternance, à tous les niveaux de qualification, vous avez plus de huit chances sur dix de trouver un emploi moins d’un an après l’obtention de votre diplôme. Par ailleurs, à diplôme équivalent, surtout au niveau bac et en dessous du bac, si vous avez eu une formation en alternance, vous avez 10 % de chances de plus d’avoir un emploi qu’une personne ayant suivi la filière traditionnelle du lycée professionnel. Cette différence peut même aller du simple ou double dans certains secteurs comme le bâtiment.

Ma question est extrêmement simple, monsieur le ministre. Le Président de la République a fixé l’objectif d’atteindre le nombre de 800 000 jeunes en formation en alternance en 2015. Pouvez-vous dire à la représentation nationale ce qu’il en est pour l’année 2012 et comment vous entendez vous donner les moyens d’atteindre cet objectif ambitieux ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur Richard, je suis comme vous un militant de l’apprentissage ; et si chacun s’accorde à reconnaître qu’il s’agit d’une bonne idée, nous progresserons.

Malgré la crise, les formations en alternance ont connu l’année dernière une progression de 7 % : 30 000 personnes se sont retrouvées en apprentissage plutôt qu’au chômage. Voilà la réalité.

En outre, il faut souligner que la loi Cherpion que vous avez votée permet un accroissement des facilités données à l’apprentissage. Mais tous ces dispositifs n’ont pas encore porté ses fruits.

M. Jean Mallot. Où est donc M. Cherpion ?

M. Xavier Bertrand, ministre. M. Cherpion est dans une circonscription qu’il connaît bien, monsieur Mallot, à la différence de l’un de vos amis qui en cherche une pour être élu. Vous voyez à qui je fais allusion.

M. Jean Mallot. Il paraît que M. Cherpion prend des cours de parachute…

M. Xavier Bertrand, ministre. Non, M. Cherpion préfère l’ancrage. Le parachutage, c’est M. Lang, et c’est tout la différence !

M. Jean Mallot. Allons, allons !

M. Xavier Bertrand, ministre. C’est vous qui m’avez cherché, monsieur Mallot. Et si certains ont confondu la place des Vosges et les Vosges, ce n’est pas mon problème !

L’apprentissage a du sens mais, aujourd’hui, au sein d’une même classe d’âge, seul un jeune sur trois se tourne vers cette voie. Nous pouvons réussir à la développer davantage. Voilà pourquoi le Gouvernement soumet en ce moment au Parlement une nouvelle réforme afin de passer à une proportion de 5 % d’apprentis dans les entreprises d’ici à 2015. Il est prévu d’augmenter les cotisations financières pour celles qui ne prennent pas suffisamment d’apprentis. Rappelons à cet égard que près de la moitié des entreprises de plus de 250 salariés, pourtant soumises à une obligation légale, n’ont même pas 1 % d’apprentis. Ce n’est pas normal.

M. Jean Mallot. C’est vrai.

M. Xavier Bertrand, ministre. C’est la raison pour laquelle nous avons mis au point cette solution qui, si elle n’est sans doute pas la meilleure, peut inciter les entreprises à tendre aussi la main aux jeunes.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour une deuxième question.

M. Arnaud Richard. Je vais poser une question de mon collègue Jean-Pierre Marcon, qui a dû rejoindre la Haute-Loire.

M. Jean Mallot. L’UMP s’aligne sur le Nouveau Centre !

M. Arnaud Richard. En avril 2009, le Gouvernement a signé avec les organisations professionnelles du secteur des hôtels, cafés, restaurants un contrat d’avenir de la restauration contenant des engagements significatifs en termes d’avancées sociales et salariales pour les employés de ce secteur. Renouvelé par un avenant en avril 2011, il a permis, conjugué à la baisse de la TVA, une augmentation des effectifs, qui atteignent près d’un million de salariés.

Les engagements pris par les restaurateurs ont été, semble-t-il, tenus puisque les chiffres fournis par vos services, monsieur le ministre, indiquent la création de 46 900 emplois, la sauvegarde de 60 000 et une augmentation de 7,7 % du nombre des contrats d’apprentissage, ce qui fait du secteur HCR le premier recruteur de France, en particulier pour les jeunes, et ce dans un contexte économique particulièrement sensible.

M. Régis Juanico. Le premier recruteur de France, c’est l’armée !

M. Arnaud Richard. Toutefois, les entreprises du secteur sont aujourd’hui confrontées à une accumulation progressive de contraintes législatives et réglementaires, qui fragilisent leurs recrutements pour l’année 2012.

La question de mon collègue Jean-Pierre Marcon est simple, monsieur le ministre : outre les allégements de charges souhaités par le Gouvernement et notre majorité, pouvez-vous nous indiquer les mesures que l’État entend prendre pour permettre à ce secteur de rester le premier recruteur de France, notamment auprès des plus jeunes de nos concitoyens ?

(Mme Laurence Dumont remplace Mme Catherine Vautrin au fauteuil de la présidence.)

Présidence de Mme Laurence Dumont,
vice-présidente

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur Richard, plusieurs pistes sont envisagées.

Premièrement, je crois au succès du dispositif « zéro charge ». Dans le secteur de la restauration, s’il n’y a pas que des entreprises de moins de dix salariés, il y en a beaucoup : c’est la majorité. Ce dispositif permet à l’entreprise qui recrute un jeune dans les six mois de bénéficier d’une exonération acquise pour une année entière. C’est une façon de lever les barrières financières et psychologiques au recrutement des jeunes. Nous avons aujourd’hui les moyens financiers pour atteindre l’objectif de 150 000 à 170 000 recrutements.

Deuxièmement, il faut compter sur l’apprentissage. La loi Cherpion a permis qu’il soit fait appel à des apprentis pour le travail saisonnier alors qu’auparavant, il n’était pas possible à un apprenti d’avoir plusieurs employeurs. Pour ne rien vous cacher, cette idée que nous avons partagée avec M. Cherpion, je ne l’ai pas inventée dans mon bureau : ce sont tout simplement des employeurs saisonniers du secteur de l’hôtellerie-restauration qui m’ont demandé de leur ouvrir la possibilité d’embaucher en apprentissage. Même si cela ne touche, ce sont autant de demandeurs d’emploi en moins.

Troisièmement, il faut souligner que le travail des services publics de l’emploi local est très important pour identifier les secteurs où existent des métiers en tension, notamment, mais pas seulement, ceux liés à la saisonnalité, et mettre en regard le « portefeuille » des demandeurs emplois – pardonnez-moi, mais je reprends le terme utilisé par Pôle emploi – et les formations.

Le dernier point enfin, sur lequel a insisté le Président de la République, c’est tout simplement la formation des demandeurs d’emploi.

M. Jean Mallot. C’est laborieux !

M. Xavier Bertrand, ministre. Je me réjouis que l’emploi reste à nos yeux la priorité pour les Français, et pour les années qui viennent. Cela fait une sacrée différence avec vos références, comme le discours du Bourget – je l’ai dit tout à l’heure.

Dispositif « zéro charge », loi Cherpion sur l’apprentissage, SPEL et action sur les métiers en tension, priorité donnée à la formation des demandeurs d’emploi : autant de mesures qui permettront de soutenir ce secteur auquel nous avons bien fait d’appliquer un taux de TVA de 5,5 % et désormais de 7 %, car celle-ci a protégé de l’emploi. N’oublions pas qu’au cœur de la crise, l’un des premiers arbitrages de nos concitoyens est d’aller beaucoup moins souvent au restaurant. Si nous n’avions pas pris cette mesure, plus de 40 000 emplois auraient disparu – ce ne sont pas mes chiffres mais ceux issus d’études indépendantes.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour une troisième question.

M. Arnaud Richard. Comme nous sommes dans le cadre d’un débat, je répondrai au ministre en saluant son attachement aux contrats aidés et sa politique de la mise en place des SPEL autour des sous-préfets.

M. Alain Vidalies. Ce n’est pas le but de ce débat.

M. Arnaud Richard. Nous avons eu, sans doute mes collègues s’en souviennent-ils, un échange un peu vif avec Mme Morano sur les maisons de l’emploi, auxquelles je vous sais comme moi particulièrement attaché, monsieur le ministre. Nous en sommes arrivés à adopter une disposition, contre l’avis du Gouvernement, pour préserver un certain nombre des crédits dont elles bénéficiaient.

J’ai appris ce matin, à la suite d’une réunion qui s’est tenue dans mon département, que la baisse des crédits alloués aux maisons de l’emploi en Île-de-France se ferait de façon uniforme.

Je n’ose imaginer que ce soit effectivement le cas, puisque les échanges que nous avions eus avec Mme Morano, sous la pression très forte de Pierre Méhaignerie, qui y tient, et qui l’a rappelé en commission des finances…

M. Alain Vidalies. La pression très forte de Pierre Méhaignerie… N’exagérons rien, tout de même !

M. Arnaud Richard. …nous amènent à penser qu’il est tout à fait impossible que les crédits de ces structures, qui ont fait leurs preuves, diminuent. Certaines maisons de l’emploi n’ont pas rempli leurs objectifs, ou ne les ont que partiellement remplis ; je comprends tout à fait que leurs crédits baissent. Mais pour celles qui ont apporté à leur territoire une vraie valeur ajoutée, il ne paraît pas concevable que le Gouvernement n’ait pas le courage de s’appuyer sur le contrôle de services faits pour décider de l’affectation des crédits l’an prochain.

Une bonne fois pour toutes, monsieur le ministre, j’ai le sentiment que, depuis la création de Pôle Emploi, on – je ne sais si c’est le Gouvernement ou l’administration – s’évertue à essayer de mettre à mal les maisons de l’emploi.

M. Jean Mallot. Aïe, aïe, aïe, c’est une accusation forte !

M. Arnaud Richard. Votre parole sera très entendue dans les différentes maisons de l’emploi, mais aussi au sein de l’administration de notre pays : il est nécessaire que le Gouvernement affirme la nécessité de mener des politiques territoriales de l’insertion et de l’emploi, qui participent, à côté des politiques nationales, à la résolution de problèmes gravissimes dans notre pays.

Votre réponse est donc très attendue par beaucoup de gens : comment voyez-vous, monsieur le ministre, les maisons de l’emploi et leur avenir dans notre pays ?

M. Jean Mallot. À l’UMP, ils n’attendent rien : ils ne sont pas là !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Ma position est constante en la matière et vous le savez, monsieur le député, puisque vous avez beaucoup œuvré dans les fonctions que vous avez occupées précédemment aux côtés de Jean-Louis Borloo.

M. Arnaud Richard. Je le sais.

M. Xavier Bertrand, ministre. Je crois aux maisons de l’emploi, non pas à la place de Pôle Emploi, non pas en concurrence avec Pôle Emploi, mais à leur place.

Si les crédits ont pu être réduits depuis quelques années, c’est tout simplement parce que le moment où des montants importants étaient consacrés à l’investissement est derrière nous. D’autre part, il faut aussi convenir que depuis que nous avons revu certains crédits à la baisse, nombre de maisons de l’emploi ont réajusté à la baisse le montant de leur loyer, par exemple, ou cherché à optimiser leurs locaux. Pouvait-on se permettre cette économie ? Oui.

Là où il faut faire attention, là où il ne faut pas aller trop loin, c’est qu’après le mouvement de création des maisons de l’emploi, on ne doit pas les voir disparaître : ce serait à mon avis une erreur, notamment dans la logique des SPEL. Les maisons de l’emploi sont en train de trouver leur rôle : veille, anticipation, information, notamment des élus mais pas seulement. Elles ont aujourd’hui toute leur place.

Cela dit, pouvez-vous me préciser si la réunion à laquelle vous faisiez allusion a été organisée à l’initiative du DIRECCTE ou du préfet ?

M. Arnaud Richard. Du DIRECCTE.

M. Xavier Bertrand, ministre. D’accord. Je vais donc veiller à ce que mes instructions soient bien appliquées partout sur le territoire. Je suis bien sûr favorable à une logique de sur-mesure. Il en va de même pour dossier proche, que connaît bien M. Gille, celui des missions locales : beaucoup ont craint que l’on ne veuille passer tout le monde à la même toise, ou couper les crédits. Il ne s’agissait évidemment pas de cela. Nous voulions aussi adopter la logique que vous appelez du service fait, la logique de l’efficacité. Pour les missions locales, j’ai des taux d’insertion qui varient de 18 % à 62 %.

M. Jean-Patrick Gille. Mais cela dépend des territoires ! On a avancé, sur ce sujet !

M. Xavier Bertrand, ministre. Toutes les missions locales ne peuvent pas avoir les mêmes taux d’insertion. Quand vous avez trois zones urbaines sensibles sur votre territoire, vous aurez plus de mal à être à 62 % que quand vous n’en avez pas.

M. Jean-Patrick Gille. Ah, voilà !

M. Xavier Bertrand, ministre. Je suis donc partisan de faire du sur-mesure. Les instructions que je donnerai cette année seront donc les mêmes que celles que j’ai données l’an dernier.

Que nous vivions une époque où un euro affecté ne doit pas venir en concurrence avec un autre euro affecté ailleurs, cela va de soi. L’État, je le répète, reste le premier financeur des maisons de l’emploi. En tout état de cause, je me dois de veiller à ce que les maisons de l’emploi qui ne sont pas en concurrence, qui apportent un réel service, ne se trouvent pas privées de moyens. C’est chez moi un engagement constant.

Mme la présidente. Nous en revenons aux questions du groupe SRC.

La parole est à M. Jean-René Marsac.

M. Jean-René Marsac. Monsieur le ministre, le chômage touche désormais en France un jeune de moins de vingt-cinq ans sur quatre ; le chômage des jeunes est deux fois plus élevé, et même davantage, que la moyenne. Et pour ce qui est du taux d’emploi des jeunes de quinze à vingt-quatre ans, la France reste en queue de peloton, très loin derrière l’Allemagne ou l’Autriche par exemple.

L’OCDE elle-même marque sa préoccupation et fait apparaître qu’en France, un an après avoir quitté le système éducatif, seulement 9,7 % des jeunes peu qualifiés occupent un emploi, contre 26,1 % en moyenne dans les pays européens. Et parmi les plus diplômés, seulement 46,3 % travaillent, soit le taux le plus faible en Europe après l’Italie. Encore est-ce sans compter le sous-emploi chronique des très nombreux jeunes cantonnés dans des emplois très précaires et à temps partiel.

Cette situation est très alarmante. Le Conseil économique, social et environnemental vient d’ailleurs de se saisir du sujet et constate que les politiques publiques – formation, alternance, contrats aidés, dispositifs d’accompagnement – n’ont pas jusqu’ici suffi à remédier au chômage des jeunes.

Pourtant, depuis 2007, le Président de la République et le Gouvernement ont multiplié les annonces en direction des jeunes : « plan Marshall des banlieues » en février 2008, puis son petit frère, avec un budget réduit, « Espoir Banlieues » ; « plan d’urgence » et charte pour l’emploi des jeunes le 24 avril 2009 ; plan « Agir pour la jeunesse » en septembre 2009 ; nouveau discours sur l’apprentissage et l’alternance, présentés comme des formules magiques, le 15 novembre 2010 ; 50 000 emplois aidés supplémentaires en janvier 2011 ; sommet social enfin le 18 janvier 2012.

Or à aucun moment, depuis 2007, cette succession d’annonces n’a inversé la tendance du chômage des jeunes ni permis à la France de combler son déficit d’insertion des jeunes dans l’emploi par rapport aux autres pays européens. Le Président de la République invitait à le juger sur ses résultats. Ce sera fait, je n’en doute pas.

Monsieur le ministre, vous fustigez les propositions de François Hollande qui met en avant le contrat de génération permettant à la fois de mobiliser les salariés en fin de carrière et les jeunes en recherche d’intégration professionnelle ; vous repoussez les 150 000 emplois d’avenir qui serviront de tremplin vers l’emploi.

Mais, monsieur le ministre, après ce florilège d’annonces et de promesses non tenues par le Président de la République et par le Gouvernement, quelle peut être votre politique en matière d’emploi des jeunes ? Pensez-vous vraiment que l’apprentissage soit la solution miracle que vous présentez ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Quelle sacrée différence entre vous et nous, monsieur le député, sur cette question !

M. Régis Juanico. Eh oui !

M. Xavier Bertrand, ministre. Sur l’emploi des jeunes, que proposez-vous : le retour des emplois jeunes ? Auriez-vous la nostalgie de Martine Aubry et de ses contrats d’avenir – ces emplois publics financés avec de l’argent public que vous n’avez pas ? Ne trouvez-vous pas que l’avenir des jeunes passe plutôt par l’entreprise ?

Bien sûr que l’avenir des jeunes passe par l’entreprise ! Et je crois, moi, à l’apprentissage. Il est vrai que dans le programme de François Hollande, si vous trouvez le mot « apprentissage », ne cherchez pas plus loin : il ne sera jamais écrit une seconde fois. Il n’est écrit qu’une seule fois dans toutes ses propositions ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Patrick Gille. On parie ?

M. Régis Juanico. Donnez-lui un programme !

M. Xavier Bertrand, ministre. Une seule fois dans toutes ses propositions ! Monsieur Juanico, je dois être l’un des plus grands lecteurs de ce programme, et savez-vous pourquoi ? Parce que je dois bien dire ce que vous n’osez pas dire.

M. Jean Mallot. Vous auriez bien besoin d’un apprentissage ministériel ! Mais il est vrai que vous avez été ministre en alternance…

M. Xavier Bertrand, ministre. Ce qu’il y a dans ce programme et que vous n’osez pas révéler, je le révèle, moi !

Moi, je crois à l’apprentissage, et visiblement plus que vous. Un jeune en apprentissage a 80 % de chances d’être dans l’emploi un an après la fin de son cycle d’apprentissage : c’est légèrement plus que vos emplois jeunes, qui coûtaient beaucoup trop cher au regard de leurs effets. Qui plus est, l’apprentissage est ouvert à tous les jeunes, même à ceux qui ne sont pas qualifiés ; vos emplois jeunes s’adressaient surtout aux jeunes surqualifiés, en laissant les autres sur le côté.

Je crois, moi, au dispositif zéro charge pour les jeunes : ces outils existent, nous les avons mis en place. Je dis maintenant aux chefs d’entreprise : tendez la main à ces jeunes. Voilà pourquoi, avec nos projets, nous sommes en mesure de former beaucoup plus de jeunes et d’ouvrir la voie d’un emploi à beaucoup plus de jeunes que vous.

Je disais tout à l’heure que nous ne sommes pas embarrassés par les idées de la gauche en matière d’emploi.

M. Jean Mallot. En tout cas, aujourd’hui, c’est surtout par les députés UMP que vous n’êtes pas embarrassé !

M. Xavier Bertrand, ministre. C’est encore plus vrai en matière d’emploi des jeunes, puisque vous ne proposez rien. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) C’est ce qui fait la différence par rapport à nous, qui essayons de trouver des solutions et qui en trouvons. Je vous donne rendez-vous notamment sur le dispositif zéro charge.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

M. Jean-Patrick Gille. Monsieur le ministre, si l’emploi est la priorité des Français, c’est malheureusement parce que chaque jour, notre pays compte mille chômeurs de plus, et notamment des seniors. Annoncé comme une priorité du Gouvernement, l’emploi des seniors est sans doute votre pire échec : le taux d’emploi des seniors stagne en dessous de 40 %, alors qu’il est de 58 % en Allemagne et même de 70 % en Suède. Le nombre de demandeurs d’emploi seniors a augmenté de 16 % en 2011, et de 112 % au cours du quinquennat !

Il faut dire que, depuis 2010, les seniors sont les sacrifiés de la politique du Gouvernement : recul de l’âge de la retraite appliqué depuis juillet 2011…

M. Pascal Brindeau. Sur lequel vous ne reviendrez pas !

M. Jean-Patrick Gille. …fermeture totale des dispositifs de préretraite et suppression du Fonds national de l’emploi, et surtout – nous en avons beaucoup débattu – extinction de l’allocation équivalent retraite depuis le 1er janvier 2011.

D’ailleurs, puisque vous en parliez, je redis ici que nous avons voté le principe de la rupture conventionnelle. Mais il faut bien noter qu’il y a une sorte de dérive, puisqu’elles sont bien souvent utilisées maintenant comme substitut de préretraite.

M. Jean Mallot. Exactement.

M. Jean-Patrick Gille. D’un côté, il y a votre volonté de prolonger la durée d’activité, en arrêtant tous les dispositifs d’accompagnement de la sortie de l’emploi ; de l’autre côté, il y a la faiblesse ou l’absence de dispositifs de soutien à l’activité des seniors : l’aide à l’embauche des seniors, mise en place dans le cadre de la réforme des retraites, a disparu du budget pour 2012. Elle était financée en 2011 à hauteur de 50 millions d’euros, mais le décret n’a jamais été publié ! Il y a encore la lenteur de la mise en œuvre du dispositif sur la pénibilité : six mois après son entrée en application de départ anticipé pour pénibilité, seules 1 243 personnes en ont bénéficié.

M. Pascal Brindeau. S’il avait fallu vous attendre pour faire quelque chose, on y serait encore !

M. Jean-Patrick Gille. Enfin, il y a le bilan dérisoire des contrats de professionnalisation pour les seniors.

Face à cette situation, ne faut-il pas prendre des mesures d’urgence ? C’est pourquoi, avec François Hollande, nous proposons le contrat de génération, qui comporte d’abord une exonération de charges pour l’emploi des jeunes – mesure, je le rappelle, que vous avez critiquée en début de quinquennat pour finalement l’utiliser en 2011, puis l’arrêter au bout de six mois tellement l’effet d’aubaine était fort, et pour finalement la reprendre in extremis afin d’endiguer la montée du chômage. Quelle cohérence sur ce sujet ! Mais, dans le contrat de génération, l’exonération de charges pour l’emploi d’un jeune est assortie d’une condition : le maintien d’un senior dans l’entreprise, qui bénéficiera aussi d’une exonération destinée à compenser l’ancienneté.

Cela fait toute la différence, car cela évitera l’effet d’aubaine, et surtout cela mettra les seniors en situation de tutorat. Alors que les jeunes et les seniors sont les victimes de votre politique de l’emploi, nous proposons de créer une solidarité entre les générations et de valoriser dans les entreprises la richesse que représentent ces seniors. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Alain Vidalies. Voilà quelqu’un qui connaît le monde du travail !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Sur le taux d’emploi des seniors, on parle bien des 55-59 ans ? Parce que si vous voulez travestir la vérité, vous prenez tout le monde jusqu’à 70 ans, comme cela se fait dans certains pays : avec l’âge de la retraite que nous connaissions avant la réforme, quand l’âge légal était à 60 ans…

M. Jean-Patrick Gille. Je parle des 55-64 ans.

M. Xavier Bertrand, ministre. Si vous voulez ; mais comme vous n’avez eu le courage de voter ni la réforme des retraites, ni la réforme des régimes spéciaux, ni la réforme de 2003, je comprends que vous ayez du mal à reconnaître la réalité.

M. Régis Juanico. Ce n’aurait pas été du courage, mais du suicide !

M. Jean Mallot. Elle n’était pas financée, cette réforme ! Et puis vous avez déjà tout changé…

M. Xavier Bertrand, ministre. En ce qui concerne les 55-59 ans, nous sommes aujourd’hui à un taux d’emploi de 64,2 % ; sur la zone euro, c’est 61,3 %. Nous sommes donc au-dessus de la moyenne européenne, et le chiffre s’est amélioré de cinq points depuis le début de ce quinquennat. Voulez-vous que je vous dise ? Vous devriez vous en réjouir comme moi. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour le Gouvernement, c’est une bonne nouvelle pour les seniors, c’est une bonne nouvelle pour les entreprises.

M. Jean-Patrick Gille. Vous avez changé l’âge de départ à la retraite entre-temps !

M. Xavier Bertrand, ministre. Nous tournons enfin le dos aux terribles erreurs commises par tout le monde, par absolument tous les responsables publics : évidemment, si les salariés pouvaient partir avant, en préretraite, ils se sentaient protégés de la crise économique ; les chefs d’entreprise étaient intéressés ; les syndicats laissaient faire parce que c’était le souhait des salariés ; les gouvernements, quels qu’ils soient, fermaient les yeux.

M. Jean Mallot. Tiens, l’UMP a doublé ses effectifs : ils sont deux.

M. Xavier Bertrand, ministre. Mais cela a été un gâchis économique, financier, et surtout humain.

Que faisons-nous ? Le contrat de professionnalisation – plus de 45 ans, pour ne stigmatiser personne et pour ne pas créer de barrière à 55 ans – c’est 2 000 euros versés par l’État, 2 000 euros versés par Pôle Emploi, et l’exonération des charges. Soit l’équivalent de 6 600 euros. Ce dispositif fonctionne ; plusieurs milliers de personnes en ont bénéficié, et nous allons accentuer la promotion de cette mesure, parce que je pense que c’est une mesure puissante, avec un réel potentiel.

Vous avez parlé du contrat de génération. J’hésite : dois-je commencer par citer Martine Aubry, qui pendant les primaires socialistes disait : « le contrat de génération coûte cher, je le sais, j’ai essayé : c’est un effet d’aubaine pour les entreprises » ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) En définitive, pourquoi assumez-vous si mal le contrat de génération ? Il se réduit comme peau de chagrin : François Hollande a commencé à 8 milliards d’euros ; on en est à 2,5 milliards, et j’ai même appris hier que ce n’était plus que 2,3 milliards. Si vous y croyez vraiment, pourquoi n’en parlez-vous pas tout le temps ?

M. Jean-Patrick Gille. Mais justement, nous n’arrêtons pas !

M. Jean Mallot. La preuve !

M. Xavier Bertrand, ministre. Je vais vous le dire : c’est parce que vous n’avez rien inventé ! Le contrat de génération, c’est le tutorat, ce sont les maîtres d’apprentissage, sauf qu’aujourd’hui ils existent, ils sont là, et ils ont le sentiment, parce qu’ils transmettent un savoir, d’être utiles.

Votre mesure, c’est au mieux un contrat d’apprentissage au rabais : il n’y a même pas de qualification et de diplôme pour les jeunes. Non seulement cela coûte les yeux de la tête, non seulement c’est beaucoup trop compliqué, mais en plus c’est beaucoup moins bien que ce qui existe aujourd’hui avec l’apprentissage et le tutorat !

M. Éric Berdoati. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Monsieur le ministre, vous n’êtes pas obligé de proférer des mensonges aussi énormes, et avec une telle assurance.

Premièrement, qu’est-ce qui vous permet de soutenir que nous n’avons pas voté pour la rupture conventionnelle ? C’est faux.

M. Xavier Bertrand, ministre. Le parti communiste ne l’a pas voté !

M. Alain Vidalies. Maintenant, c’est le parti communiste ! Mais tout à l’heure, c’était bien à nous que vous vous adressiez ! Le ministre de la République sait parfaitement qu’il ment.

M. Pascal Brindeau. En tout cas, la retraite, vous ne l’avez pas votée, c’est sûr !

M. Alain Vidalies. Deuxièmement, vous venez de dire qu’au congrès du Mans, il y avait une motion favorable à l’augmentation de la TVA. Là encore, c’est totalement faux.

M. Jean Mallot. Et il le sait !

M. Alain Vidalies. Je vous mets au défi de prouver ce que vous affirmez dans les médias. Vous savez parfaitement qu’il s’agit en fait d’une proposition de transfert sur l’assiette de la valeur ajoutée des cotisations patronales, qui permet d’avantager les entreprises de main-d’œuvre et de pénaliser celles qui font d’énormes bénéfices sans main-d’œuvre, c’est-à-dire exactement le contraire de ce que vous affirmez ; et jamais ce transfert ne se retrouve à la charge du consommateur. Vous le savez parfaitement, et pourtant vous n’hésitez pas à mentir dans les médias et ici même, une fois de plus.

Malgré cela, monsieur le ministre, je veux prendre votre défense. (Sourires.)

M. Pascal Brindeau. Le ministre n’est pas rassuré !

M. Alain Vidalies. En effet, je ne trouve pas normal, même si je ne suis pas d’accord avec vous, qu’avec tous les efforts que vous déployer pour rappeler votre politique, vous soyez ainsi jeté à la vindicte populaire par le Président de la République. Vous accuser de laxisme et d’avoir laissé les chômeurs profiter de l’argent qu’ils percevaient sans avoir à sortir de chez eux, vous montrer du doigt en vous reprochant de n’avoir rien fait pendant dix ans…

M. Jean-Patrick Gille. Ce n’est vraiment pas gentil !

M. Alain Vidalies. Non, monsieur le ministre, franchement, vous ne méritez pas cela. Je suis en total désaccord avec M. Sarkozy. S’il le faut, nous créerons un comité de soutien ! (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Pascal Brindeau. C’est de l’effet de manches !

M. Alain Vidalies. J’en viens à ma question.

L’article 40 de la proposition de loi de M. Warsmann remet en cause la décision de la Cour de cassation sur le rapport entre la loi et le contrat. Cet article est l’application, en quelque sorte par anticipation, des conséquences des accords compétitivité-emploi.

M. Jean Mallot. Eh oui !

M. Alain Vidalies. Ni les partenaires sociaux ni, semble-t-il, les responsables administratifs n’en ont été informés. Le jour où M. Fillon a envoyé une lettre leur demander d’aller négocier ce point, on préparait ici même un coup fourré pour donner raison à une vieille revendication du MEDEF.

Ma question est simple : quelle sera la position du Gouvernement lors de la lecture définitive de ce texte s’agissant de l’article 40 ? Autrement dit, quel message envoyez-vous aux partenaires sociaux ? Êtes-vous sincères quand vous leur demandez de négocier ou est-ce, à nouveau, un faux-semblant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Mallot. Cela ne va pas être facile au ministre de répondre à cette question !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. La position du Gouvernement sera exactement la même que pendant tous les débats – j’ai d’ailleurs eu l’occasion de le confirmer.

Monsieur Vidalies, si vraiment vous assumez votre choix et votre vote sur la rupture conventionnelle, pourquoi passez-vous votre temps à la critiquer à ce point ? Pourquoi essayez-vous de travestir la vérité en disant que ce mode de rupture concerne davantage les seniors, alors que le taux est exactement le même que pour les licenciements économiques ?

Avez-vous voté la réforme des retraites ? Bien sûr que non !

M. Jean Mallot. Vous changez de sujet ! Vous fuyez !

M. Xavier Bertrand, ministre. Voulez-vous que je vous rappelle le vote des DRH qui assistaient, hier soir, à une table ronde où on leur a demandé de se prononcer sur le contrat de génération ? Ils l’ont majoritairement repoussé.

M. Jean Mallot. C’est normal : ce sont des DRH !

M. Alain Vidalies. Ils étaient quand même 40 % à avoir voté pour !

M. Xavier Bertrand, ministre. Par contre, ils étaient très largement favorables à l’accord de compétitivité-emploi.

Et s’il faut des assurances sur les chiffres, monsieur Vidalies, me confirmez-vous que dans votre département des Landes, où 5 317 personnes bénéficient du RSA, le conseil général devait en financer seulement 216 – un des chiffres les plus bas de France –, mais qu’il n’a finalement même pas tenu ses promesses puisque vous n’en avez cofinancé que trente-trois ?

M. Alain Vidalies. Nous avons deux fois moins de chômeurs que chez vous ! Changez de disque !

M. Xavier Bertrand, ministre. Oui ou non, ces chiffres sont-ils exacts ?

M. Alain Vidalies. Finalement, Sarkozy a raison !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous êtes souvent le magicien de l’arithmétique. Mais les Français y voient clair. Vous qui êtes le spécialiste des questions d’emploi au sein du parti socialiste et de ce groupe, vous n’avez pas donné l’exemple dans votre département. Cela pose juste un grand problème de crédibilité !

M. Alain Vidalies. Il y a deux fois moins de chômeurs dans les Landes qu’ailleurs !

M. Jean Mallot. Il y en a davantage à Saint-Quentin !

M. Jean-Marc Ayrault. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Madame la présidente, M. Bertrand nous répond toujours la même chose : dans votre département, etc. Comme si les départements étaient responsables de la politique de la France entière ! Mais il ne répond pas aux questions posées. Il en profite pour dégager en touche, pour se défausser. Cette fois-ci encore, il a trouvé une échappatoire pour ne pas répondre à une question précise qui porte sur une proposition de loi du président Warsmann.

Monsieur le ministre du travail, j’aimerais que vous répondiez vraiment aux questions qui vous sont posées.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le président Ayrault, je vous invite à relire le Journal officiel. Vous verrez que j’ai bien indiqué à M. Vidalies que, s’agissant de la proposition de loi de M. Warsmann, la position du Gouvernement sera exactement la même que pendant tous les débats. Et je l’ai écrit aux partenaires sociaux.

M. Jean-Marc Ayrault. Non !

M. Xavier Bertrand, ministre. Ou alors, dites-moi ce que vous voulez que je vous réponde : ce sera plus simple !

Cela dit, vous avez raison, je n’ai pas répondu à toutes les interpellations de M. Vidalies. Je vais lui faire transmettre, en même temps qu’à la presse, le contenu de la motion présentée par François Hollande au congrès du Mans. Et comment s’appelait-elle ? « Volonté, vérité, unité ». La vérité, vous l’avez oubliée en route !

M. Alain Vidalies. Mme Pécresse a été obligée de reconnaître qu’elle s’était trompée !

Reprise du débat

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour le groupe UMP.

M. Arnaud Richard. Quand une entreprise s’installe sur un territoire prioritaire de la politique de la ville, des moyens financiers, matériels et humains conséquents sont souvent déployés par l’État, les collectivités locales et des opérateurs associatifs, que ce soit dans la phase d’installation ou, et c’est le sujet de ma question, dans les opérations de recrutement.

J’aimerais connaître le sentiment du Gouvernement sur cette idée, peut-être saugrenue, qui consiste à négocier en amont, c’est-à-dire dès qu’une entreprise décide de s’installer ou de s’étendre dans un bassin d’emploi, afin de définir l’offre de services de l’ensemble des partenaires qui pourrait être proposée à cette entreprise. Cela permettrait aussi d’organiser les modalités d’intervention des différents partenaires, mais également d’accompagner et de préparer les personnes à la recherche d’un emploi, plus particulièrement les jeunes, les seniors et les demandeurs d’emploi de longue durée.

On se rend compte que, même si une entreprise qui s’implante sur un territoire prioritaire de la politique de la ville est très aidée, et même si l’ensemble des partenaires du service public de l’emploi réalisent des efforts, on a du mal à faire comprendre qu’un objectif de recrutement significatif sur un territoire donné doit avoir la priorité, surtout quand il s’agit d’un territoire fragile en termes d’emplois.

Ma question fait suite à une difficulté que nous avons rencontrée à Chanteloup-les-Vignes, lors de l’implantation d’une entreprise. On a bien senti que le regard que les entreprises pouvaient porter sur tel ou tel public prioritaire n’était pas simple à faire passer en l’état actuel de l’organisation du service public de l’emploi… Peut-être la mise en place des SPEL permettra-t-elle de répondre à ce problème ; mais pour l’heure, force est de regretter certains cloisonnements qui empêchent les publics les plus fragiles de prétendre à ce type d’emploi.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le député, il faut s’assurer que le service public de l’emploi local animé par le sous-préfet prend bien le soin d’inviter régulièrement les collectivités territoriales – pas forcément dans le cœur du dispositif, assez chronophage –, pour bien expliquer comment s’effectue cette mise en relation. C’est du reste parce que cela n’avait pas été suffisamment fait dans le passé que certaines collectivités ont décidé de s’engager dans la logique des maisons de l’emploi.

Par ailleurs, il est intéressant de généraliser toute la logique des clauses d’insertion locale, même s’il faut veiller à leur rédaction, de façon à ne pas en exclure les entreprises locales de petite taille, qui peuvent rencontrer des difficultés pour mettre en place les heures de travail concernées.

En outre, certaines collectivités sont en train d’étudier, dans la légalité la plus totale, certaines formes de clauses de présence économique, qui pourraient être mises au point avec les services de l’État qui, bien évidemment, jouent leur rôle dans les commissions d’appel d’offre, mais aussi dans les services publics de l’emploi locaux.

Ces questions qui semblent transversales, j’ai voulu les réunir dans la logique des SPEL.

J’ai rappelé très clairement les consignes aux préfets et sous-préfets, aux DIRECCTE et aux responsables régionaux de Pôle emploi que j’ai reçus il y a quinze jours : je ne veux pas que cette politique de l’emploi se passe en dehors des élus locaux.

J’invite aussi les élus locaux à prendre l’initiative de rencontrer les acteurs de l’emploi. Régulièrement, à Pôle emploi, on me dit rêver que les élus présentent leurs projets d’aménagement à six mois, un an, voire trois ans, de façon à pouvoir intégrer, dans les prévisions de création d’emplois et de filières de formation, l’orientation que prendra le développement économique d’un territoire. Cette manière de faire a d’autant plus de sens que si les SPEL sont d’abord là pour éviter l’explosion du chômage, ils n’en resteront pas moins actifs, quoi qu’il arrive, dans une logique de GPEC, gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, et de GTEC, gestion territoriale des emplois et des compétences.

Rapprochez-vous des sous-préfets qui animent les SPEL : pour ma part, j’ai fait passer le message et je suis prêt à recommencer.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour une dernière question.

M. Arnaud Richard. Monsieur le ministre, malgré une baisse du chômage durant les quatre premiers mois de l’année 2011, le nombre de demandeurs d’emplois a augmenté au cours du second semestre. Cette remontée est liée, selon les observateurs économiques qui s’accordent unanimement sur ce point, à la crise économique et financière qui frappe les pays européens.

Ma question est double et embrasse l’ensemble du débat que nous avons aujourd’hui : pourriez-vous replacer l’évolution de l’emploi dans notre pays dans le contexte international et nous dire quelle est la situation de l’emploi chez nos voisins européens ?

Pouvez-vous également rappeler les mesures que le Gouvernement a prises pour limiter la hausse du chômage ?

M. Jean-Patrick Gille. Ça, c’est une question !

M. Régis Juanico et M. Alain Vidalies. Allô !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le député, je suis le premier à reconnaître que le chômage augmente. Cela dit, même s’il ne s’agit pas de s’en consoler, force est de reconnaître qu’il augmente beaucoup plus dans nombre de pays européens.

Je voudrais remettre les pendules à l’heure par rapport à un certain nombre de chiffres que l’on peut entendre.

Les chiffres du Bureau international du travail et de l’OCDE, disponibles sur Internet, montrent que le nombre de chômeurs a augmenté de 17 % depuis 2007, ce qui représente un peu plus de 400 000 personnes. Pour ma part, je chiffre cette augmentation depuis le début de la crise à 31 %, pour la bonne raison qu’entre 2007 et 2008, nous avions connu une diminution du nombre de chômeurs en France, mais aussi dans toute l’Europe.

Le parti socialiste répète donc à longueur de temps un mensonge puisqu’il parle de 1 million de chômeurs supplémentaires. Ces chiffres sont faux, ils sont destinés à faire peur et ils discréditent ceux qui utilisent de tels procédés.

L’Angleterre, il y a eu un million de demandeurs d’emploi supplémentaires. En Italie, 500 000 de plus. En Espagne, l’augmentation a atteint les 3,5 millions. Et aux États-Unis, où la population est bien plus importante, 7 millions.

M. Régis Juanico. Ce n’est pas comparable !

M. Xavier Bertrand, ministre. Voilà, depuis 2007, l’évolution du chômage dans les autres pays : elle est sans rapport avec la situation française. Ce n’est pas une consolation : cela montre seulement que le chômage ne se limite pas au cadre franco-français. Nous avons, nous, en France, la responsabilité de prendre des mesures supplémentaires et d’aller plus loin dans le changement.

Car même si, grâce aux formations en alternance, nous avons 30 000 demandeurs d’emploi de moins ou si, grâce à nos actions en direction des métiers en tension, nous avons 26 000 demandeurs d’emploi de moins, je sais que la courbe du chômage continue d’augmenter. Et si elle n’explose pas, il n’est pas question que je me contente des résultats actuels.

Si vous voulez aller beaucoup plus loin, si vous voulez faire reculer le chômage de façon durable et importante, oui, il faut prendre des mesures plus importantes : accords compétitivité-emploi, changements en matière d’activité partielle – comme celui que nous sommes en train de mettre en place –, modification du financement de la protection sociale et formation des demandeurs d’emploi avec davantage de droits mais aussi de devoirs. C’est la politique à laquelle nous croyons, la politique que nous entendons mener. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Régis Juanico. Et les chiffres de l’Allemagne ?

Mme la présidente. Monsieur le ministre, je vous remercie.

Le débat est clos.

2

Débat sur l’éducation

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle le débat sur l’éducation, organisé à la demande du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

La parole est à Mme Martine Martinel. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Martine Martinel. Madame la présidente, monsieur le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, mes chers collègues, débattre aujourd’hui sur l’éducation nationale revient à dresser un bilan sévère de votre politique qui a accentué les difficultés de l’école publique.

Malgré vos déclarations, alors que le destin de chacun est très souvent déterminé par sa scolarité, vous n’avez cessé de conforter un système éducatif à plusieurs vitesses au détriment des valeurs fondatrices de notre école républicaine telles l’égalité et la laïcité. Je ne reviendrai pas en détail sur ce qui a été défendu par les députés socialistes au cours de cette législature dans l’hémicycle ou au cours des réunions de la commission des affaires culturelles lors de l’examen des différents projets de loi de finances et autres textes.

Pourtant, qu’il me soit permis de dresser un rapide bilan de votre politique durant ces cinq dernières années : une baisse continuelle de l’effort financier avec 66 000 postes supprimés, des fermetures de classes et d’écoles, la destruction des réseaux d’aide spécialisée aux élèves en difficulté, la non-reconduction des contrats des emplois de vie scolaire et des auxiliaires de vie scolaire, le quasi-abandon de la médecine scolaire, la réorientation de l’éducation prioritaire, la fin de la carte scolaire, enfin le vote, hier, de la proposition de loi sur la formation des enseignants, qui tend purement et simplement à supprimer toute formation.

M. Jean Mallot. C’est le comble !

M. Jacques Grosperrin. C’est faux !

Mme Martine Martinel. Tout cela est la marque d’une conception étroitement conservatrice de notre école.

M. Jean Mallot. Celle des ignares de l’UMP !

Mme Martine Martinel. Les députés socialistes se sont largement fait l’écho, durant ces cinq dernières années, du malaise de la communauté éducative. Nos propos ont été systématiquement caricaturés par les différents ministres qui n’ont voulu y voir qu’une demande obsessionnelle de moyens en refusant toute discussion de fond sur le devenir de l’école.

Il est vrai qu’avec un gouvernement qui donnait, lui, toujours moins, nous ne pouvions que passer pour budgétivores. La question des moyens n’est pas tout, mais elle est déterminante. Aujourd’hui, nos enseignants sont moins bien payés que chez nos voisins européens et notamment qu’en Allemagne.

M. Jean Mallot. C’est vrai !

M. Pascal Brindeau. Vous oubliez ce qu’était leur situation avant que nous n’arrivions au pouvoir !

Mme Martine Martinel. Merci pour la bande-son, chers collègues !

Aujourd’hui, notre système éducatif est à l’image des élèves dits « décrocheurs » : il est distancé, en termes de résultats – des enquêtes internationales l’ont largement démontré –, par la moyenne des pays industrialisés.

Sur tous les bancs de cette assemblée nous ressentons une inquiétude à propos d’une école qui se précarise. En témoignent les nombreuses questions écrites déposées par nos collègues de la majorité sur le sujet sensible des RASED et des AVS.

Comment ne pas citer également l’intervention de notre collègue René Couanau, siégeant sur vos bancs,…

M. Jean Mallot. L’excellent M. Couanau !

Mme Martine Martinel. …qui, lors de la séance publique consacrée à la proposition de loi sur la formation des maîtres, a dénoncé en ces termes l’absurdité et l’inanité de ce texte ? (Murmures sur les bancs du groupe UMP.) Je remercie ceux qui font la bande-son, on se croirait dans un film de Duras.

M. Régis Juanico. Un mauvais film !

M. Pascal Brindeau. Vos collègues y contribuent, madame !

Mme Martine Martinel. M. Couanau déclarait donc : « Nous sommes en train de suivre une voie à rebours des autres pays européens qui sont eux-mêmes revenus sur la formation des enseignants, pour y introduire davantage de formation professionnelle et pratique. [...] Monsieur le ministre, pourquoi persévérer dans l’erreur ? [...] Ce n’est pas une question de lutte politique, mais une question grave, importante pour l’avenir. »

Face à cela, face au fait que l’école a été dégradée ces dernières années…

M. Pascal Brindeau. Elle l’a été par le PS aussi !

Mme Martine Martinel. …et qu’elle est devenue une variable d’ajustement, face au fait qu’il existe aujourd’hui une dette éducative aussi importante par son ampleur que la dette financière, il est temps de mettre en place une politique éducative ambitieuse.

Il faudra, dans les années à venir, qu’il y ait plus d’enseignants que de classes, notamment dans les quartiers difficiles. (Murmures.) Je remercie nos collègues membres du groupe UMP pour leurs bavardages des plus stimulants.

M. Pascal Brindeau. Ceux de vos collègues socialistes ne le sont-ils pas ?

Mme Martine Martinel. Aujourd’hui, malheureusement, l’encadrement dans le primaire est de 15 % inférieur à la moyenne des pays développés.

Il est temps d’en finir avec cette politique absurde des suppressions de postes et du non-remplacement de postes de fonctionnaires dans l’éducation nationale. Il est temps de redéployer les plus de 60 000 postes que l’actuelle majorité a supprimés, en mettant l’accent sur la maternelle, le primaire et les zones en difficultés. Il est temps d’accueillir les enfants de moins de trois ans parce que l’on sait désormais que scolariser plus tôt, c’est minimiser l’échec scolaire et faciliter la socialisation. Il est temps de réviser les rythmes scolaires, d’offrir un tronc commun le plus long possible, de ne pas procéder à des orientations trop précoces et de donner la place qu’il mérite à l’enseignement professionnel. Il est temps enfin de considérer à nouveau nos enseignants avec le respect qui leur est dû et de repenser une formation professionnelle initiale et continue adaptée à la réalité du métier.

Il est temps, en fait, de changer de politique et, pour cela, seule une nouvelle majorité élue par les Français est susceptible de relever le défi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jacques Grosperrin. Ah !

Mme Martine Martinel. Je vous remercie de votre approbation, monsieur Grosperrin.

M. Pascal Brindeau. Nous y voilà ! Ça manquait !

M. Jean Mallot. Le changement, c’est maintenant !

M. Pascal Brindeau. Prôner le changement n’a jamais fait une politique !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative. Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, le fait que le groupe SRC ait proposé un débat sur l’éducation nationale dans cette période propice, justement, au débat, aurait dû permettre d’élever le niveau et de sortir de la caricature…

M. Patrick Bloche. Ça commence mal !

M. Luc Chatel, ministre. Je m’efforcerai, pour ma part, de rester sur le fond…

M. Jean Mallot. En effet, l’UMP est au fond et vous allez creuser !

M. Luc Chatel, ministre. …et de confronter nos points de vue pour que les Français puissent objectivement choisir.

Madame Martinel, nous avons l’école en héritage, en partage. Cette école, depuis cent cinquante ans, a connu des mutations profondes. La première, à la fin du XIXe siècle, a été l’obligation scolaire : ce fut l’école obligatoire, gratuite et laïque chère à Jules Ferry. On oublie que, pendant près de cent ans, elle est restée l’école de quelques-uns. Il a fallu, à la fin du XXe siècle, qu’un mouvement de massification, de démocratisation permette ce que nous appelons aujourd’hui « l’école pour tous » : 100 % d’une génération au collège et 71 % au lycée.

La vérité est que cette école-là n’a pas permis à chaque élève de trouver une solution en sortant du système éducatif. Et, depuis cinq ans, nous avons entamé une mutation profonde consistant à chercher une solution pour chaque élève qui quitte le système éducatif. Cette politique porte un nom : la personnalisation. Une solution pour chaque élève.

Aujourd’hui, les classes sont hétérogènes ; on ne peut plus travailler de la même façon qu’il y a vingt-cinq ans, alors que nous avons triplé, depuis, le nombre de bacheliers au sein d’une classe d’âge. La personnalisation touche la pédagogie, les parcours et l’organisation du système éducatif.

La personnalisation de la pédagogie a guidé la réforme du primaire lancée par Xavier Darcos en 2008. Je rappelle que trop d’élèves quittaient le système éducatif en primaire après être entrés en sixième en ne maîtrisant pas particulièrement les fondamentaux – à la fin des années 1990, ils étaient 15 % à ne pas maîtriser la lecture en entrant en sixième. Nous avons donc décidé de revoir les programmes, de les concentrer sur les fondamentaux : lire, écrire, compter. Surtout, nous avons mis en place une aide personnalisée de deux heures par semaine pour les élèves en difficulté repérés par le maître dans leur classe. Le travail et la qualité de nos enseignants permettent donc d’apporter un remède au sein même de nos écoles.

Cette réforme s’est accompagnée de la mise en œuvre de stages de remise à niveau pour 240 000 élèves. Autrement dit, à la fin des dernières vacances scolaires, 15 % des CM1 et CM2 qui rencontrent le plus de difficultés ont bénéficié de ces stages de remise à niveau en lecture et en écriture. C’est cela, la personnalisation : du sur-mesure. Vous avez parlé d’égalité, madame la députée, mais l’égalité, ce n’est pas faire la même chose pour tout le monde.

Mme Martine Martinel. Je le sais bien, monsieur le ministre !

M. Luc Chatel, ministre. L’égalité, c’est faire plus pour les élèves qui en ont le plus besoin.

Mme Martine Martinel. C’est sans doute la raison pour laquelle vous avez supprimé les RASED !

M. Luc Chatel, ministre. Nous réussirons à offrir une solution pour chaque élève si nous sommes capables de faire plus et mieux pour les élèves qui ont le plus de difficultés.

La personnalisation, c’est aussi ce qui a guidé la mise en œuvre d’un engagement très important de Nicolas Sarkozy en 2007. Il voulait répondre à ce qu’il appelait le traumatisme des « orphelins de seize heures »,…

M. Yves Durand. Et alors ?

M. Luc Chatel, ministre. …ces collégiens qui, une fois sorti de leur établissement, n’avaient personne à la maison pour les accueillir, pour les faire travailler. Eh bien, à l’heure où je vous parle, madame la députée, un million de collégiens sont accueillis dans leur établissement scolaire et pris en charge par des enseignants pour du soutien scolaire, des activités sportives ou culturelles. Un collégien sur trois bénéficie aujourd’hui de ce nouveau dispositif.

La personnalisation a également sous-tendu la réforme du lycée que j’ai engagée. Pour la première fois, un accompagnement personnalisé de deux heures permet de préparer les lycéens au monde qu’ils vont découvrir à l’université. Nous avons aujourd’hui trop d’échec en fin de terminale. Rappelons qu’un étudiant sur deux échoue en fin de première année à l’université. Il fallait donc réorganiser le lycée pour mieux préparer nos élèves à l’enseignement supérieur. C’est l’esprit même de la réforme du lycée.

Personnalisation aussi lorsque nous mettons en place un système sur mesure pour lutter contre le décrochage scolaire. Jamais, madame la députée, jamais nous n’avions détecté comme nous l’avons fait les « décrocheurs » scolaires : on n’en connaissait même pas le nombre. Quand je suis arrivé au ministère, j’ai demandé combien d’élèves quittaient le système éducatif sans qualification, sans diplôme. Mes services n’en avaient aucune idée ! Il a fallu interconnecter les réseaux de l’éducation nationale avec ceux de l’enseignement agricole, des centres de formation d’apprentis et des missions locales. Et nous savons depuis qu’environ 220 000 jeunes quittent le système éducatif chaque année sans qualification. Maintenant que nous les connaissons individuellement, nous avons mis en place un dispositif de suivi et nous proposons à chacun une réponse à ses problèmes. C’est cela, la personnalisation.

Personnalisation également des parcours, avec un système d’orientation qui doit être beaucoup plus progressif, réversible. On a le droit, madame la députée, de ne pas savoir ce qu’on veut faire dans la vie à quatorze ans.

Mme Martine Martinel. Je sais !

M. Luc Chatel, ministre. On a le droit de se tromper, de changer de parcours. Le système éducatif doit mieux organiser les passerelles. C’est ce que nous avons fait avec la réforme du lycée et la réforme de l’orientation, notamment dans le cadre de la loi sur la formation professionnelle avec le système interministériel d’orientation.

Personnalisation enfin en matière d’organisation du système éducatif. On ne peut plus fonctionner aujourd’hui en pilotant tout depuis le 110 de la rue de Grenelle. Ce ministère devait faire confiance aux acteurs locaux. Aussi avons-nous lancé un mouvement qui donne davantage d’autonomie aux établissements scolaires. Nous avons même expérimenté dans 300 collèges une autonomie totale en matière de recrutement. Autrement dit, c’est le chef d’établissement qui choisit ses enseignants sur la base du projet pédagogique de l’établissement. Tout simplement parce qu’il est mieux placé que l’inspecteur d’académie, désormais appelé directeur départemental de l’éducation nationale et pour lequel j’ai par ailleurs beaucoup de respect, mieux placé que le recteur, mieux placé que le ministre, pour porter un projet éducatif, pour choisir son équipe, pour apporter une solution adaptée aux élèves qu’il accueille.

C’est aussi l’expérimentation qui nous a guidés lorsque nous avons décidé de travailler sur les rythmes scolaires. Aujourd’hui, 250 collèges expérimentent un rythme différent, qui consacre une place plus importante au sport ou aux activités culturelles l’après-midi. Nous misons sur l’expérimentation parce que chaque enfant est différent, chaque collège est différent : l’éducation nationale doit être capable de s’adapter à cette diversité.

L’organisation personnalisée, nous l’avons choisie aussi lorsque nous avons décidé d’apporter une réponse spécifique aux élèves très perturbateurs qui, sans être des délinquants, sont capables de polluer la vie d’un établissement scolaire. Nous avons créé des établissements spécifiques de réinsertion scolaire. Aujourd’hui au nombre de dix-sept, ils accueillent de très petits effectifs avec un sur-encadrement. Le taux de réinsertion est remarquable puisque, au bout d’un an, 90 % de ces élèves ont retrouvé une place dans un établissement traditionnel.

La personnalisation, nous l’avons également mise en œuvre en créant les internats d’excellence. Au nom de l’égalité des chances, l’excellence doit être accessible à ceux qui sont issus de milieux défavorisés et qui n’ont pas la chance d’avoir à la maison des parents qui les font travailler. C’est dans cet esprit qu’ont été ouvertes les 6 000 places d’internat d’excellence – il y en aura 10 000 demain, 20 000 en 2014. Elles permettent d’accueillir des jeunes motivés à fort potentiel, qui réussiront grâce à l’école.

C’est cela la différenciation, la personnalisation que nous avons voulue, qui se traduit également par une différenciation des moyens.

Madame la députée, vous n’avez à la bouche que la question des moyens.

Mme Martine Martinel. Pas du tout !

M. Luc Chatel, ministre. Depuis dix ans, le parti socialiste n’a pas produit une idée neuve sur l’école. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Yves Durand. C’est faux !

M. Luc Chatel, ministre. Il ne fait qu’intervenir sur la question des moyens.

M. Jacques Grosperrin. C’est vrai !

M. Luc Chatel, ministre. Permettez-moi d’abord de corriger vos propos. Les moyens n’ont pas diminué. Depuis 1980, les moyens par élève dans l’éducation nationale ont augmenté de 80 % en euros constants. Cette année, le budget de l’éducation nationale, dans le contexte budgétaire que vous connaissez, continue à augmenter de 0,7 %,…

M. Yves Durand. Il diminue par rapport au PIB !

M. Luc Chatel, ministre. …alors que l’immense majorité des budgets de la nation régresse. Il y a, aujourd’hui, plus d’enseignants dans le système éducatif qu’il n’y en avait, et vous le savez, monsieur Durand, au début des années quatre-vingt-dix. Le taux d’encadrement est meilleur par classe.

M. Yves Durand. Ce n’est pas vrai !

M. Luc Chatel, ministre. Nous avons moins d’élèves par classe en maternelle, au collège, au lycée professionnel et au lycée qu’il y a vingt ans, lorsque M. Jospin était le ministre de l’éducation nationale.

M. Yves Durand. Ce sont des moyennes, cela ne veut rien dire !

M. Luc Chatel, ministre. Assez de caricature ! La France investit aujourd’hui plus dans son système éducatif que la moyenne des pays de l’OCDE et des pays de l’Union européenne.

M. Yves Durand. C’est faux !

M. Luc Chatel, ministre. Nous, madame la députée, nous avons fait le choix de la qualité, du sur-mesure.

M. Yves Durand. Ce sont des mots !

M. Luc Chatel, ministre. D’ailleurs, un certain nombre d’enquêtes montrent que nous commençons à obtenir des résultats. Ainsi, les jeunes dont je parlais tout à l’heure, qui quittent le CM2 en ne maîtrisant pas parfaitement la lecture et qui étaient 15 % à la fin des années quatre-vingt-dix,…

M. Yves Durand. Ils sont 20 % maintenant !

M. Luc Chatel, ministre. …étaient encore 15 % selon l’enquête CEDRE réalisée par mes services en 2003 – et lancée par un de mes prédécesseurs, qui appartient à votre groupe politique : on ne peut donc me taxer de partialité à cet égard.

M. Régis Juanico. Vous ne publiez pas les enquêtes, vous les cachez dans les tiroirs !

M. Luc Chatel, ministre. Cette enquête remarquable faisait donc état de 15 % d’élèves quittant le CM2 en ne maîtrisant pas la lecture en 2003.

M. Régis Juanico. Publiez tout !

M. Luc Chatel, ministre. La même enquête, réalisée en 2009, vient d’être publiée par mes services : 13 % des élèves ne maîtrisent pas la lecture. C’est beaucoup trop, mais cela veut dire que nous allons dans la bonne direction.

Pour compléter cette information, les évaluations que nous avons mises en place en CE1 témoignent d’une amélioration dans l’apprentissage des fondamentaux en français, pour la cohorte d’élèves qui a connu la réforme du primaire que j’évoquais tout à l’heure depuis le début.

M. Régis Juanico. Comment pouvez-vous le savoir puisqu’il n’y avait pas d’évaluation avant !

M. Luc Chatel, ministre. Ceux qui ont bénéficié d’un enseignement concentré sur les fondamentaux – savoir lire, écrire, compter – et qui ont reçu de l’aide personnalisée, ont aujourd’hui de meilleurs résultats en français, en lecture, en écriture.

Voilà, madame la députée, ce que je voulais répondre à vos propos. Nous, nous croyons à une école qui s’adapte au monde d’aujourd’hui,…

Mme Martine Martinel. Nous aussi !

M. Luc Chatel, ministre. …une école qui se modernise grâce au talent, à la passion, au savoir-faire de nos enseignants, mais grâce aussi à un système capable de s’adapter, de se moderniser et de leur faire confiance. C’est sans doute toute la différence entre nous. Vous, vous restez attachés à un système extrêmement centralisé, figé.

Mme Martine Martinel. Pas du tout !

M. Luc Chatel, ministre. Nous, nous voulons libérer les énergies qui existent dans nos écoles,…

M. Yves Durand. Vous libérez les élèves en les mettant à la porte !

M. Luc Chatel, ministre. …et nous voulons faire confiance aux enseignants. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons décidé de revaloriser leur traitement : en cinq ans, entre 2007 et 2012, nous avons augmenté les enseignants en début de carrière de 18 %. Dans la période actuelle, je ne connais pas beaucoup d’entreprises, d’administrations ou de pays qui aient augmenté leurs collaborateurs de 18 % en cinq années.

M. Régis Juanico. Pensez aux rémunérations des patrons du CAC 40 !

M. Luc Chatel, ministre. C’est un choix de ce gouvernement, et nous avons pu le faire grâce à la politique de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, qui nous a permis de revaloriser nos enseignants. Nous croyons à l’avenir de notre école grâce à nos enseignants. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Je rappelle que la conférence des présidents du 24 janvier dernier a décidé que ce débat serait organisé sous forme de questions.

La durée des questions et des réponses est de deux minutes. La réponse du Gouvernement sera donnée après chaque question, sans droit de réplique.

La parole est à Mme Martine Faure.

Mme Martine Faure. Monsieur le ministre, vous avez insisté sur la personnalisation et le sur-mesure, oubliant l’obligation de s’assurer, par la médecine scolaire, de la santé de nos élèves. Aujourd’hui, les médecins scolaires sont 1 300 pour 12 millions d’élèves ; d’ici à 2019, 42 % d’entre eux partiront à la retraite ; 220 postes sont actuellement vacants. En début de carrière, leur salaire mensuel brut est de 1 750 euros – les médecins scolaires sont les grands oubliés de la revalorisation dont vous avez parlé –, après neuf ans d’études de médecine, une formation spécifique à l’École des hautes études de santé publique et un an de stage professionnel. Le décret qui devait modifier cette grille indiciaire, annoncé pour la fin décembre 2011, est toujours en attente de publication.

En septembre 2011, la FCPE de Seine-Saint-Denis avait sollicité de l’Organisation des nations unies et de l’Organisation mondiale de la santé une aide humanitaire pour attirer l’attention sur les défaillances de la politique de santé à l’école. S’il s’agit là d’un département particulièrement sinistré, où de nombreux enfants ne bénéficient d’aucun suivi médical, le même constat d’insuffisance peut être fait sur tout le territoire, dans chacune des régions. C’est d’autant plus grave que, dans certaines zones défavorisées, l’école est le seul lieu susceptible d’offrir prévention et dépistage pour des pathologies que l’on croyait éradiquées et qui réapparaissent, comme la tuberculose. Sans ce suivi personnel, nos enfants sont les grands oubliés !

La semaine dernière, une journée d’action était organisée à Paris, au cours de laquelle les médecins scolaires ont manifesté pour alerter la population sur la disparition progressive d’une profession indispensable dont les missions sont fondamentales pour détecter les troubles de l’apprentissage, déceler la souffrance des élèves et favoriser l’intégration des enfants handicapés. Voilà ce qu’est une véritable personnalisation !

Le corps des médecins de l’éducation nationale est victime de conditions de travail de plus en plus dégradées et d’une véritable crise d’attractivité. Les rapports de la Cour des comptes et du Comité d’évaluation préconisent une politique globale de revalorisation et de renforcement de la médecine scolaire. Et vous, monsieur le ministre, avez-vous décidé d’abandonner purement et simplement la médecine scolaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Je vous remercie, madame la députée, d’aborder un sujet aussi important sur un ton non polémique.

Nous sommes tous attachés à la médecine scolaire. Élu local d’un département extrêmement rural, je constate que nous avons un problème de recrutement et de vocation chez les médecins, qui dépasse largement la problématique de la médecine scolaire. C’est d’ailleurs pour cette raison que le Gouvernement a pris, dans la loi Hôpital, patients, santé et territoires, des mesures d’encouragement des vocations à la médecine. Cette crise de vocation est encore plus forte chez les médecins scolaires, tout comme d’ailleurs chez les infirmières scolaires.

Face à cela, nous avons décidé de mobiliser des moyens. Je rappelle que, dans la loi de 2005, une programmation s’est traduite par le recrutement de 1 500 personnels supplémentaires. L’année dernière, nous avions budgété le recrutement de plus de 120 médecins supplémentaires, mais une grande partie des postes est restée vacante compte tenu de ces problèmes de vocation. Un décret est élaboré, qui doit être étudié par le prochain comité technique ministériel dans les prochaines semaines. Il sera donc bien signé.

Face à ces difficultés de recrutement, j’ai décidé de travailler différemment. J’ai signé une convention avec la Mutuelle générale de l’éducation nationale et, en liaison avec les agences régionales de santé, à l’échelon des bassins de vie, nous travaillons en vrai partenariat avec la médecine de ville. Là où l’on manque de médecins scolaires, on peut, en effet, se tourner vers des partenariats plus importants avec les médecins de ville.

Le sujet est très complexe et nous sommes mobilisés, à la fois sur le plan réglementaire et sur celui des moyens, mais aussi dans la recherche de solutions nouvelles pour apporter une réponse à ce manque de vocations.

Mme la présidente. La parole est à M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Monsieur le ministre, au moment où vous vous apprêtez à supprimer, dans mon département de la Loire, cinquante-quatre postes à la rentrée 2012, à travers la fermeture de trente-sept classes pour quatorze ouvertures seulement et des coupes sombres dans les postes d’enseignants chargés du suivi des élèves en difficulté – six postes de RASED et six postes de conseillers pédagogiques –, ma question porte sur l’école maternelle et la scolarisation des enfants de moins de trois ans.

L’accueil des jeunes enfants dans une structure éducative adaptée est une condition essentielle à la réussite scolaire. Elle constitue un outil majeur de lutte contre les inégalités sociales et la pauvreté. C’est aussi un atout pour notre compétitivité sociale et économique, car cet accueil favorise le taux d’activité, la croissance et donc l’emploi, mais aussi l’égalité entre les hommes et les femmes.

Toutes les études sérieuses démontrent les bienfaits d’une scolarisation précoce. L’étude internationale Pisa 2009 révèle que « les élèves qui ont suivi un enseignement pré-primaire tendent à être plus performants. Cet avantage est le plus marqué dans les systèmes d’éducation où l’enseignement pré-primaire dure longtemps, où le ratio élèves-enseignant au niveau pré-primaire est faible et où les dépenses publiques par élève à ce niveau sont élevées. »

Dans le cadre du rapport du comité d’évaluation et de contrôle, que nous venons de publier avec mon collègue Michel Heinrich, tous les experts que nous avons auditionnés préconisent d’investir massivement dans le service public de la petite enfance, en particulier dans l’école maternelle. Non seulement c’est un lieu d’apprentissage fondamental du langage, du vocabulaire, de la socialisation et du vivre ensemble, mais c’est aussi une possibilité de prise en charge qui vient en complément des autres modes de garde d’enfants, financièrement accessible à de nombreuses familles, en particulier à des femmes qui souhaitent continuer à travailler. Une étude réalisée par l’OFCE et Sciences Po souligne que « le point fort du système français reste l’école maternelle ».

En dix ans, avec la droite, le pourcentage d’élèves scolarisés dès deux ans est passé de 35 % à 13 % aujourd’hui. Nous ne demandons pas de généraliser l’accueil en maternelle dès deux ans, mais de le permettre là où c’est nécessaire et efficace, dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé : zones urbaines sensibles, zones rurales, territoires d’éducation prioritaire.

Monsieur le ministre, pourquoi vous acharnez-vous à démanteler ce qui constitue une originalité française, un atout envié dans de nombreux pays ?

François Hollande s’est engagé : « Je ferai en sorte que les enfants de moins de trois ans puissent être accueillis en maternelle, je ferai de l’école maternelle une priorité ».

M. Pierre Lequiller. On est sauvés !

M. Pascal Brindeau. Encore une promesse en l’air !

M. Régis Juanico. Que fera le candidat Sarkozy ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Premièrement, monsieur Juanico, l’école maternelle, François Hollande en a rêvé, ce gouvernement l’a faite. (« Ah non ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Deuxièmement, monsieur Durand, vous qui connaissez bien les questions d’éducation, reconnaissez qu’il y a plus d’enseignants en maternelle aujourd’hui qu’au début du quinquennat et qu’il y a moins d’élèves par classe – en moyenne vingt-cinq contre vingt-sept il y a quinze ans.

M. Yves Durand. Ce sont des moyennes, cela ne veut rien dire !

M. Luc Chatel, ministre. Troisièmement, j’ai créé cent postes d’inspecteurs de l’éducation nationale, un par département, spécifiquement chargés de la maternelle. Ils ont pour mission de mettre en œuvre le plan de prévention de l’illettrisme et de développement de la lecture.

Quatrièmement, mon prédécesseur Xavier Darcos, a mis en place une aide personnalisée de deux heures par semaine dans le primaire. Pourquoi ? Parce que nous savons, et tous les spécialistes du langage le confirment, qu’en matière de lecture, tout se joue avant l’entrée en cours préparatoire. Quand tel enfant maîtrise 700 ou 800 mots parce qu’il a été stimulé dans sa famille, tel autre en maîtrisera 150 parce qu’il n’aura pas été stimulé avant l’apprentissage de la lecture. Celui-ci rencontrera de graves difficultés en matière d’apprentissage.

Cela veut dire que la maternelle doit constituer le lieu de compensation. C’est la logique du plan de lutte contre l’illettrisme et de développement de la lecture que j’ai lancé en maternelle.

Sur la question de la scolarisation précoce, je ne partage absolument pas vos orientations. D’ailleurs, je peux trouver autant de spécialistes pour vous expliquer que la scolarisation précoce n’a aucun impact sur les résultats en matière éducative.

M. Régis Juanico. Nous nous fondons sur un rapport international !

M. Luc Chatel, ministre. Je note d’ailleurs que le système finlandais, considéré comme l’un des plus performants en Europe, ne pratique pas la scolarisation précoce des enfants, et n’a pas d’école maternelle.

M. Yves Durand. Si. Ils appellent cela jardin d’enfants, mais c’est la même chose.

M. Luc Chatel, ministre. Je vous ai dit tout mon attachement pour l’école maternelle. Parlons maintenant de la scolarisation dès deux ans. Vous trouverez, dans une école, la moitié des enseignants pour vous expliquer que la scolarité dès deux ans, c’est essentiel, et l’autre moitié qui vous expliquera exactement l’inverse.

M. Régis Juanico. Tout dépend où !

M. Luc Chatel, ministre. Nous ne supprimons pas la scolarisation dès deux ans, nous la maintenons dans des zones d’éducation prioritaire, dans des zones rurales. Mais le rôle de l’école, ce n’est pas d’être une garderie pour les enfants de deux ans. Le rôle de l’école maternelle, c’est de permettre à l’enfant de commencer une scolarité dès le plus jeune âge afin qu’il se familiarise avec le langage et se prépare à la lecture. Et ce n’est pas moi qui l’ai inventé. Depuis des décennies, en France, on scolarise les enfants l’année de leurs trois ans.

Je voulais donc vous redire mon attachement à l’école maternelle. Certains parlent, d’autres agissent, et ce gouvernement a agi pour la maternelle.

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Boulestin.

Mme Monique Boulestin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, si nous étions dans un récit romanesque, nous pourrions titrer la séquence qui vient de s’achever : « IUFM, chronique d’une mort annoncée ». Mais il s’agit de l’école de la République, et de la formation de ses maîtres. À cet égard, nous sommes bien face à une triste réalité.

C’est d’ailleurs ce que viennent de nous rappeler, en démissionnant, trente professeurs du jury de l’agrégation externe de mathématiques, pour protester contre « la destruction du système de formation et de recrutement des enseignants ».

En effet, ce mercredi 15 février, votre majorité a voté un texte dont l’objectif, malgré vos dénégations, est de détruire définitivement les IUFM et d’ouvrir ainsi la voie à toutes les dérives.

Or, nous ne cessons de le répéter, la formation des enseignants, quel que soit leur niveau de recrutement, doit rester sous la responsabilité des universités et se dérouler en leur sein.

Oui, monsieur le ministre, oui, mes chers collègues de la majorité, loin de tout conservatisme et de tout dogme passéiste, nous avons une ambition pour l’école, nous avons une ambition d’avenir, celui de nos enfants et celui de notre pays.

C’est pourquoi nous appelons de nos vœux la transformation des actuels IUFM en véritables écoles supérieures du professorat et de l’éducation.

Ainsi serait rétablie, notamment, l’année de stage, indispensable à la connaissance et aux exigences du métier d’enseignant.

J’ai bien entendu, monsieur le ministre, la préoccupation qui est la vôtre d’assurer une personnalisation de l’enseignement, afin de répondre aux difficultés de chaque élève. Mais, très sincèrement, pensez-vous que l’autonomie des établissements soit la seule réponse à apporter face au malaise grandissant des enseignants les plus chevronnés et face au désarroi des nouveaux professeurs ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Madame la députée, si je comprends bien, François Hollande veut rétablir les écoles normales que Lionel Jospin avait supprimées au début des années 1990 ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Tout le monde a le droit de se tromper, et de changer d’avis !

M. Yves Durand. Monsieur le ministre, vous avez été meilleur.

M. Luc Chatel, ministre. C’est flatteur, monsieur Durand.

Madame la députée, sur le fond, oui, nous avons réformé la formation des enseignants, parce que nous voulions revaloriser le métier d’enseignant. Regardons objectivement autour de nous : dans tous les grands pays développés, on recrute les enseignants au niveau master, c’est-à-dire au niveau bac + 5. Nous avons donc, en effet, ajouté une année de formation initiale pour les futurs enseignants.

De plus, et nous nous rejoindrons certainement sur ce point – en tout cas sur l’analyse, pas sur le contenu de ce que propose le Gouvernement –, nous avons pensé que l’université était la mieux placée pour former nos futurs enseignants.

Ensuite, nous estimons que trop d’étudiants qui se destinent au métier d’enseignant mais ne sont pas reçus au concours se retrouvent sur une voie de garage. Il était donc important de réfléchir et d’imaginer des passerelles entre différentes solutions d’orientation.

C’est pour cela que nous avons mis en place un système de mastérisation – en langage un peu barbare –, ce qui signifie un nouveau recrutement au niveau master pour nos étudiants, qui passent donc leur master et le concours pour se destiner au métier d’enseignant.

Je ne peux pas vous laisser dire que cette réforme s’est traduite par une partie exclusivement disciplinaire, et qu’il n’y aurait plus de formation pratique, pédagogique. Je vous rappelle que pendant leur première année de master, les étudiants bénéficient de 108 heures de stage d’observation. Pendant la deuxième année de master, en cinquième année, ils bénéficient de 108 heures de mise en situation. Ensuite, dès lors qu’ils sont reçus au concours, lorsqu’ils sont professeurs stagiaires, nous avons mis en place un tutorat par des enseignants chevronnés.

M. Yves Durand. Ça ne marche pas !

M. Luc Chatel, ministre. Nous avons ensuite mis en place des systèmes de stages filés, et dix-sept académies proposent aujourd’hui un système de master en alternance. Oui, nous avons relevé le niveau de formation de nos enseignants, parce que nous voulons un meilleur niveau de qualification et que nous rémunérons mieux nos enseignants en début de carrière : je vous rappelle que nous les avons augmentés de 18 %. Oui, c’est la politique que poursuit ce gouvernement, et de grâce, cessez de caricaturer cette réforme. Nous avons aujourd’hui moins de démissions qu’il n’y en avait auparavant dans les IUFM.

M. Yves Durand. Alors publiez les chiffres !

M. Luc Chatel, ministre. C’est une grande marque de confiance que de considérer que nous laissons aux universités, à notre système universitaire, le soin de former nos futurs enseignants.

Mme la présidente. Pour le groupe Nouveau Centre, la parole est à M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons, l’école de la République, notre école, celle à laquelle nous sommes tous attachés, a considérablement évolué, et elle sera amenée à évoluer encore. Comme vous l’avez rappelé dans votre propos liminaire, monsieur le ministre, elle a dû relever, à la fin des années quatre-vingt, le défi de la massification. Elle est aujourd’hui confrontée à celui de la qualité.

Relever ce défi de la qualité, c’est d’abord garantir à chaque élève, à l’issue de la période de scolarité obligatoire, la maîtrise des enseignements fondamentaux : savoir lire, écrire et compter. De cette maîtrise des enseignements fondamentaux dépend tout parcours de vie, tout parcours de construction du citoyen et tout parcours de construction d’un avenir professionnel. Il est donc clair que cela doit être une priorité absolue.

Pendant trop longtemps, notre système éducatif ne s’est pas suffisamment attaché à garantir cette maîtrise des savoirs fondamentaux. C’est d’ailleurs ce que rappelle l’enquête PISA de 2009, à laquelle notre collègue Régis Juanico a fait référence tout à l’heure. Ces fondamentaux ont été oubliés, nous le constatons. Je rappelle que les élèves de quinze ans qui ont passé les tests en 2009 étaient élèves du premier degré sous le gouvernement de Lionel Jospin. Il ne s’agit donc pas de l’échec d’un gouvernement ou d’un autre, mais bien d’un lent processus de notre système scolaire, qui faillit au fur et à mesure que les années avancent.

La maîtrise de ces bases demeure fragile. Cette dernière enquête montre que, alors qu’en 2000, 15 % des élèves étaient en difficulté, ils sont près de 20 % aujourd’hui. Cet échec, nous le constatons à l’entrée en sixième, à la fin du collège, et lors des journées de préparation à la défense.

Monsieur le ministre, ma question est simple et double. D’une part, quels sont les mesures et les engagements du Gouvernement pour que ces fondamentaux soient mieux acquis ? D’autre part, vous avez souhaité un nouveau système d’évaluation en CE1 et en CM2 : quels en sont aujourd’hui les résultats ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le député, votre question touche au cœur du défi que nous sommes chargés de relever : faire en sorte que chaque enfant de France maîtrise les fondamentaux en quittant le premier degré.

Comme vous l’avez très justement rappelé, l’enseignement secondaire tel qu’il est organisé ne permet pas de compenser les difficultés d’un élève après son entrée en sixième – et ceci n’est pas un reproche, car ce n’est pas son rôle. Nous avons la même proportion d’élèves en très grande difficulté à l’entrée en sixième et à dix-huit ans. Cela signifie que lorsque des difficultés sont apparues avant l’entrée en sixième, on n’arrive plus à les compenser.

C’était donc au primaire qu’il fallait s’attaquer. C’est pour cela que nous avons décidé de mobiliser des moyens, je l’ai rappelé tout à l’heure, sur la maternelle, afin que, à travers l’apprentissage du travail de la mémoire, de la récitation, du par cœur, l’on puisse stimuler les fondamentaux dès le plus jeune âge. Ensuite, nous avons mis en œuvre les programmes rénovés, concentrés sur les fondamentaux. Finalement, on apprenait trop de choses à l’école. À force de tout vouloir enseigner, on en avait oublié les fondamentaux : savoir lire, écrire et compter à l’entrée en sixième.

Nous avons également mis en place un système d’évaluation en CM2 et en CE1, qui est intéressant, car il permet d’avoir des comparaisons annuelles sur l’ensemble d’une cohorte, et il permet de mesurer les progressions des performances de notre système éducatif. Je l’ai dit tout à l’heure, dans les résultats de l’évaluation de 2011, que nous avons réalisée au printemps sur des élèves de CE1, nous avions 78 % d’élèves qui avaient des résultats bons ou très solides en français. Les résultats étaient de quatre points inférieurs à la même époque l’année précédente. Nous voyons donc bien que le travail de fond qui consiste à concentrer les programmes sur les fondamentaux, à apporter une aide personnalisée, deux heures par semaine, par petits groupes, pour les élèves qui ont des difficultés, donnera des résultats sur le long terme.

Vous l’avez rappelé, le temps de l’école est un temps long, qui n’est sans doute pas celui du temps politique, mais nous sommes là pour améliorer durablement les résultats. Les réformes que nous avons mises en œuvre dans le primaire donneront des résultats positifs sur la durée.

Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe GDR.

La parole est à Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Monsieur le ministre, vous nous avez accusés d’avoir une vision centrée sur les effectifs et budgétivore. Je voudrais tout de même faire vivre de manière un peu concrète les conséquences de la réduction massive du nombre d’enseignants.

Le manque d’enseignants provoqué par la RGPP a rendu nécessaire le recours à des professeurs remplaçants dès les premiers jours de la rentrée scolaire pour que les élèves puissent avoir un enseignant face à eux. Conséquence : il n’y a plus de remplaçants, et dès les premières absences liées à la maladie des enseignants, les élèves se trouvent abandonnés. J’ai eu connaissance du cas d’une école de Stains dans laquelle trois maîtres des écoles étaient absents, sans possibilité de remplacement de l’inspection d’académie.

Le plus grave concerne les élèves les plus en difficulté, car la pénurie d’enseignants a conduit à la mobilisation des maîtres E, que l’on a mis devant des classes, et donc à la suppression progressive du RASED. Rien que dans les trois villes de ma circonscription, Stains, Dugny et Le Blanc-Mesnil, quatorze postes de maîtres E sur trente et un ont été perdus depuis 2008. Cela représente un tiers des effectifs.

Dans certaines villes, les coupes ont été plus fortes encore. À La Courneuve par exemple, dont la population est particulièrement touchée par la précarité et par les inégalités sociales, le nombre de postes de maître E est passé de onze en 2008 à cinq actuellement. C’est sans doute cela que vous appelez le suivi individualisé. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

D’une certaine manière, en abandonnant les RASED, on abandonne les enfants à leurs difficultés. Ces réseaux ont pourtant fait leurs preuves, la mobilisation des parents en témoigne.

Monsieur le ministre, avez-vous décidé de mettre fin à ces réseaux ou allez-vous écouter parents et enseignants, et donner les moyens aux RASED de permettre à chaque enfant de recevoir le soutien qui lui est dû ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Je veux tout d’abord rappeler, madame la députée, qu’il existe, en matière de remplacements, des moyens très importants. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

M. Yves Durand. Où sont-ils ?

M. Luc Chatel, ministre. Dans le premier degré, 8 % des emplois d’enseignants, soit 27 000 d’entre eux, sont affectés aux remplacements. Dans le second degré, ce que nous appelons le taux de couverture, c’est-à-dire le taux de remplacement des enseignants absents, est de plus de 97 %. C’est sans doute insuffisant et il faudrait approcher les 100 %. Il reste que des moyens importants sont mobilisés, aussi bien avec les titulaires de zone de remplacement qu’avec des postes de contractuel, qui nous permettent de répondre au pied levé à des absences imprévues.

S’agissant maintenant des enseignants spécialisés, nous ne supprimons pas les RASED. Nous n’avons pas décidé de supprimer totalement ce dispositif, nous avons décidé de le sectoriser, de le rendre plus complémentaire de ce qui se passe dans la classe.

Je rappelle que c’est dans la classe qu’on doit commencer la détection de la difficulté. C’est là toute la politique qui est la nôtre depuis 2008, que j’évoquais à l’instant : c’est le maître, c’est-à-dire celui qui est dans la classe, qui repère les difficultés de l’enfant, dès son plus jeune âge, et y apporte une remédiation, sous la forme de sa propre aide personnalisée – deux heures par semaine –, et, si c’est nécessaire, on fait appel à un enseignant spécialisé. Aujourd’hui, avec les RASED et les psychologues, il y a environ 12 000 enseignants spécialisés. Nous maintenons donc ce dispositif. Simplement, il est sectorisé pour que le maître puisse faire appel en cas de besoin à cette expertise supplémentaire.

Encore une fois, nous concentrons les moyens sur ce qui se passe dans la classe, avec une décision prise par le maître dans sa classe et une remédiation apportée par lui-même.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour une deuxième question.

Mme Marie-George Buffet. Monsieur le ministre, le code de l’éducation prévoit que « l’accueil des enfants de deux ans est étendu en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé ».

En Seine-Saint-Denis, département touché, je le répète, par les inégalités sociales, le taux de scolarisation des enfants âgés de deux à trois ans est passé de 23 % en 1999 à 8 % en 2006, et il est aujourd’hui proche de zéro. Ces chiffres mettent en évidence un véritable désengagement du ministère, que la Cour des comptes avait déjà relevé dans un rapport de 2008, et qui frappe l’ensemble de la maternelle.

Des milliers d’enfants sont en attente de scolarisation, faute de places disponibles.

M. Éric Berdoati. Mais non !

Mme Marie-George Buffet. La raison en est simple : d’une part, la scolarisation des moins de six ans n’est pas obligatoire et, d’autre part, les enfants de deux à trois ans ne sont pas pris en compte dans les calculs d’effectifs pour la maternelle.

De nombreuses études montrent pourtant que la scolarisation dès l’âge de deux ans permet une meilleure intégration dans le système scolaire et une réduction des inégalités scolaires.

L’absence de volonté du Gouvernement en matière de scolarisation précoce a aussi des conséquences sur les familles. Les parents qui auraient souhaité que leurs enfants soient scolarisés sont contraints de se tourner vers des structures d’accueil qui n’offrent pas le même apport pédagogique, surtout qu’il y a un manque criant de places en crèche, ou alors ce sont souvent les femmes qui sont amenées à sacrifier leur vie professionnelle pour s’occuper de leurs enfants.

Aussi, rendre effectif le droit à la scolarisation dès deux ans devrait être une priorité nationale.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous garantir le droit à l’éducation dès deux ans ? Comptez-vous enfin avancer à trois ans l’âge de la scolarité obligatoire, qui est actuellement de six ans ?

Rien qu’en Seine-Saint-Denis, monsieur le ministre, 10 % des enfants de quatre et cinq ans ne sont pas scolarisés. Cela prouve l’urgence de telles mesures.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Vous me permettrez de distinguer deux sujets que vous évoquez dans votre question : d’une part, l’âge de la scolarisation et, d’autre part, la problématique de la scolarisation précoce, dès deux ans, que nous avons évoquée tout à l’heure.

S’agissant du premier, il est vrai que, selon les termes de la loi, l’école, ou, plus exactement, l’instruction, est obligatoire de six à seize ans. La question de la scolarisation obligatoire à trois ans peut se poser. Dans certaines zones, dont certaines parties de votre département, tous les enfants âgés de trois à six ans ne sont pas scolarisés, même si nous approchons les 100 %. Or, comme je le disais tout à l’heure, c’est un grave handicap pour la suite de leurs études, notamment en termes d’acquisition des fondamentaux.

J’ai cru comprendre que nous abordions une période passionnante, au cours de laquelle les débats seront nombreux ; chacun fera ses propositions. J’ai déjà eu l’occasion, à titre personnel, de prendre position sur ce sujet.

S’agissant de la scolarisation précoce, je vous réitère la réponse que j’ai faite tout à l’heure. Le principe, dans notre pays, est celui d’une scolarisation à trois ans, même si cela ne figure pas dans la loi. L’exception, la scolarisation dès l’âge de deux ans, concernait les zones d’éducation prioritaire ou les zones de développement rural. Encore une fois, rien ne prouve que les enfants scolarisés à deux ans aient de meilleurs résultats que ceux qui sont scolarisés à trois ans.

Cela étant, une question plus globale se pose : celle de l’accueil de la petite enfance. D’autres formes d’accueil sont possibles. Le Gouvernement en a d’ailleurs développées dans certains territoires. Quel est l’accueil approprié pour les moins de trois ans ? C’est une question pertinente, dont nous pouvons débattre avec les collectivités territoriales. Encore une fois, je m’en tiens au principe d’une scolarisation à l’âge de trois ans, la scolarisation à deux ans restant l’exception.

Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. Jacques Grosperrin.

M. Jacques Grosperrin. Monsieur le ministre, ma question a trait à la lutte contre le harcèlement à l’école.

La vie des établissements scolaires ne saurait se résumer à des questions de violence à l’école. Les brimades répétées – physiques, verbales, symboliques – ne sont pas non plus toute la violence à l’école. Cependant, il est probable que beaucoup d’enfants et de jeunes souffrent de ce phénomène trop longtemps ignoré ou banalisé. Grâce à la recherche, aux associations et à votre action, monsieur le ministre, nous savons désormais que près de 12 % des enfants âgés de huit à onze ans rencontrent des problèmes de harcèlement et que 10 % des collégiens subissent un harcèlement que l’on peut qualifier de sévère à très sévère.

Or cette forme de violence trop longtemps passée sous silence peut avoir des conséquences dramatiques, voire, parfois, irréversibles : absentéisme, phobie scolaire, perte de l’estime de soi, déscolarisation, anxiété, dépression, voire pire. Vous avez décelé ce harcèlement scolaire méconnu. Le harcèlement est reconnu par la loi comme un acte de violence, mais, à l’école de la République, sous la responsabilité des enseignants, des chefs d’établissement et de leurs équipes, des brimades et des moqueries quotidiennes peuvent marquer à vie nos enfants et nos adolescents. Des phrases terribles, qu’on entend de-ci, de-là, semblent banaliser ces actes, comme « il faut apprendre à se défendre seul » ou « c’est l’apprentissage de la vie ». Elles témoignent aussi de l’impossibilité de se défendre lorsqu’on est humilié.

À la suite des états généraux de la sécurité à l’école, qui se sont tenus en 2010, et dans le prolongement des assises nationales sur le harcèlement, qui ont eu lieu au mois de mai dernier, vous avez décidé, monsieur le ministre, de faire de la lutte contre le harcèlement à l’école une priorité nationale,…

M. Yves Durand. Encore une !

M. Jacques Grosperrin. …et nous vous en remercions. Pouvez-vous nous exposer ce que vous compter faire afin de sensibiliser et d’interpeller tous les acteurs du système éducatif sur cette question ?

M. Yves Durand et Mme Martine Faure. Rien !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Mesdames et messieurs les députés de l’opposition, il s’agit d’un sujet sensible. Il mérite mieux que des invectives ou la caricature.

C’est la première fois, je le dis avec gravité, que l’éducation nationale prend en charge cette question extrêmement douloureuse du harcèlement à l’école. C’était un sujet tabou ! On n’avait pas le droit d’en parler.

Mme Monique Boulestin. Ce n’est pas vrai.

M. Luc Chatel, ministre. Nous avons décidé de regarder la réalité en face. À cet égard, je veux rendre hommage à Éric Debarbieux, qui présidait le conseil scientifique des états généraux sur la sécurité à l’école et qui m’a alerté sur ce sujet. Il m’a fait rencontrer des parents dont les enfants étaient victimes de harcèlement.

Le harcèlement, cela commence par la petite brimade, la petite bousculade. Cela se poursuit avec la taquinerie qui aboutit à l’exclusion, et cela peut conduire jusqu’à l’échec scolaire, jusqu’à l’absentéisme, voire jusqu’au suicide.

Selon l’étude de l’UNICEF conduite par Éric Debarbieux, 10 % des élèves sont victimes de harcèlement d’une manière ou d’une autre.

J’ai donc décidé d’organiser, en mai dernier, les premières assises sur le harcèlement à l’école, et nous avons pris un certain nombre de décisions. La première fut la création d’un site de ressources qui a reçu, en quelques semaines, plus de 170 000 visites et qui informe à la fois les parents et les enseignants de ce qu’est le harcèlement. J’ai pu voir, en Finlande et au Danemark, par exemple, des programmes éducatifs absolument remarquables de prévention du harcèlement.

Deuxième décision, j’ai signé avec Facebook une convention de partenariat pour lutter contre le harcèlement en ligne. C’est effectivement une nouvelle forme de harcèlement : on crée des groupes d’amis contre Untel ou Untel, et on insulte, on diffame, on harcèle un camarade de classe, un professeur. Cela nous regarde, nous, éducation nationale. Nous n’avons pas le droit de dire : « Ça ne s’est pas fait dans l’enceinte du collège, ça ne nous concerne pas ! » Nous devons être vigilants et prévenir cette forme de harcèlement. Dorénavant, l’opérateur Facebook pourra aller jusqu’à fermer un compte utilisateur lorsqu’il détecte un harcèlement que nous avons repéré.

Autre décision, nous avons lancé une grande campagne contre le harcèlement. Vous avez peut-être pu voir ces spots de trente secondes à la télévision publique, mais la campagne se déroule également sur internet. Elle vise à sensibiliser les jeunes, qui ont parfois tendance à minimiser l’impact de leurs gestes, l’impact de leurs actes.

Je vous remercie, monsieur le député, de me donner l’occasion de rappeler tout cela. C’est un sujet sur lequel nous devons être totalement mobilisés, par-delà nos différences de sensibilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Berdoati.

M. Éric Berdoati. Avant de poser ma question, je tiens à vous dire, monsieur le ministre, que je partage tout à fait votre opinion sur la scolarisation des enfants de moins de trois ans. Il est faux de prétendre que toutes les études démontrent les grandes avancées qu’elle permettrait. Il s’en trouve tout autant qui démontrent exactement le contraire.

Nous devons réfléchir sur la capacité d’accueil des enfants de moins de trois ans dans des structures collectives. D’ailleurs, toutes les crèches doivent avoir un projet pédagogique, un projet éducatif,…

M. Yves Durand. C’est ridicule !

M. Éric Berdoati. …des compléments sanitaires, avec un pédiatre. Ce dispositif est d’ailleurs validé par les caisses d’allocations familiales. Par contre, intégrer un enfant de moins de trois ans dans une structure d’école maternelle n’est pas forcément la meilleure solution.

Cela dit, l’objet de ma question est tout à fait différent. Vous avez tout à l’heure évoqué, monsieur le ministre, la problématique de la personnalisation et de l’aide à apporter à chacun dans le cadre du système éducatif et du système scolaire.

Sans doute abordé-je le sujet au travers d’un prisme particulier, car la ville de Saint-Cloud, dont j’ai l’honneur d’être le maire, se caractérise par une tradition très ancienne de prise en charge du handicap, marquée notamment par la création de Perce-Neige avec Lino Ventura, par la création des Papillons Blancs, par la présence de centres audiométriques. L’histoire de notre commune est donc, depuis très longtemps, une histoire où se mêlent une émotion, une proximité et un partenariat riche avec le handicap.

De gros efforts ont été faits en matière de prise en charge du handicap, notamment avec la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous éclairer sur les efforts qui ont été faits en faveur de la prise en charge du handicap au cours de ce quinquennat ?

M. Jacques Grosperrin. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le député, la politique menée en faveur de l’accueil des enfants handicapés en milieu ordinaire illustre assez bien la stratégie de personnalisation que j’évoquais tout à l’heure. En 2005, le Parlement a voté une loi très importante en faveur des handicapés. Depuis lors, des efforts considérables ont été fournis par l’éducation nationale, et je veux rendre hommage – car tout ne dépend pas de la seule volonté du ministre – à tous les acteurs qui l’ont rendu possible, et d’abord aux enseignants qui ont accueilli dans leurs classes des enfants handicapés. C’est un drame terrible, pour des parents, que de se voir fermer la porte de l’école pour leur enfant handicapé.

D’autre part, le Président de la République a voulu cette scolarisation en milieu ordinaire. Au-delà de ce drame de la porte fermée, il est très important que les autres enfants – ceux qui n’ont pas de difficultés – soient dès leur plus jeune âge confrontés à la différence, apprennent que d’autres enfants, qui ont peut-être eu moins de chance qu’eux dans la vie, ont un handicap mais sont accueillis comme les autres, partagent les mêmes enseignements.

Nous avons donc mobilisé des moyens sans précédent. Je rappelle que, depuis la loi de 2005, l’école de la République accueille 60 % d’enfants handicapés de plus, soit un total de 214 000 aujourd’hui. Cet effort se prolonge : dans le budget pour 2012, les crédits que l’éducation nationale consacre à la scolarisation des enfants handicapés augmentent de 30 %. C’est possible grâce à l’ouverture de classes spécialisées, CLIS et ULIS. C’est possible grâce à l’accueil de ces enfants dans des classes classiques, avec un accompagnement individuel par des auxiliaires de vie scolaire. Le Président de la République avait tenu à annoncer, au moment de la conférence sur le handicap, la création d’auxiliaires de vie scolaire. Nous en avons créé 2 300 à la rentrée, nous en créerons de nouveau à la rentrée prochaine : en quelques années, nous avons doublé le nombre d’accompagnants individuels pour les enfants handicapés.

Vous le voyez, notre détermination est totale. Certes, on ne fait jamais assez, et, il y a quelques jours, nous étions réunis autour du Premier ministre pour traiter de la question de l’autisme, car nous avons à progresser encore en la matière. Dès cette année, nous ouvrirons de nouvelles classes, car la scolarisation des enfants handicapés est un principe absolument fondamental, et le Gouvernement a décidé de le porter.

M. Éric Berdoati. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Grosperrin.

M. Jacques Grosperrin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre collègue Robert Lecou vient de remettre au Président de la République un rapport sur le sport à l’école dans lequel il souligne les nombreux bienfaits du sport, tant en ce qui concerne l’équilibre, la santé des élèves que l’intégration par les jeunes de valeurs essentielles comme le respect de l’autre et des règles, le sens de l’effort et l’esprit d’initiative.

Vous l’aviez bien compris, monsieur le ministre, lorsque, dès la rentrée 2010, vous avez proposé à des établissements scolaires d’expérimenter la formule « cours le matin, sport l’après-midi ». Cette expérimentation s’inscrit dans le cadre de la réflexion de fond que vous avez engagée sur les apprentissages et sur le temps scolaire, sur une nouvelle façon de vivre le temps au collège et au lycée, pour conduire davantage d’élèves vers la réussite. Ils obtiendront en effet de meilleurs résultats scolaires si l’on aménage leur emploi du temps, s’ils développent le goût de l’effort, le respect de la règle, s’ils apprennent l’esprit d’équipe.

Le rythme « cours le matin, sport l’après-midi » permettrait également de réduire l’absentéisme. Soixante pour cent des proviseurs déclarent que l’assiduité a gagné en constance et 42 % constatent une amélioration des résultats scolaires de leurs élèves. En aidant, pendant trois ans, les élèves à appréhender l’école autrement, à se trouver une nouvelle motivation, à développer leurs relations avec leurs camarades et leurs professeurs, on propose pour notre école de nouveaux équilibres entre les apprentissages et les pratiques sportives et culturelles. D’autres sont peut-être encore à inventer.

Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous communiquer les premières conclusions des expérimentations de ce dispositif que 85 % des élèves et de leurs parents plébiscitent ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Nous avons, c’est vrai, voulu développer la pratique sportive à l’école. L’école et le sport partagent les mêmes valeurs : l’engagement, le goût de l’effort, la récompense du mérite. C’est pourquoi nous avons décidé de mettre en place une nouvelle expérimentation.

Les rythmes scolaires sont un sujet extrêmement complexe. J’ai installé une conférence nationale qui a travaillé sur le sujet pendant des mois avant de formuler plusieurs propositions. Il me semblait opportun de commencer à expérimenter de nouveaux rythmes.

C’est ainsi qu’est née l’expérimentation « cours le matin, sport l’après-midi », sur la base de ce qui s’était passé à Meaux dans un lycée que j’avais eu l’occasion de visiter. La première année, en 2010, 125 collèges ont été concernés. Nous avons doublé leur nombre à la rentrée dernière et ce sont aujourd’hui 250 collèges qui permettent à environ 5 000 collégiens de bénéficier de cette expérimentation.

Au-delà de la découverte de la pratique sportive, on s’aperçoit que ce rythme a des effets encourageants sur la scolarité. Nous avons mené deux enquêtes, l’une auprès des chefs d’établissement, l’autre auprès des parents. Nous constatons que ce nouvel aménagement du temps scolaire permet une amélioration de l’assiduité des élèves, qui gagne en constance. Nous savons que le climat scolaire, les relations entre les enseignants et les élèves, les relations entre les élèves se sont sensiblement améliorés. Nous enregistrons d’autres résultats encourageants : un principal sur deux – 45 % – nous indique que des progrès en matière scolaire sont constatés chez les élèves qui bénéficient de cette expérimentation, laquelle est plébiscitée par 85 % des parents et des élèves.

Très sincèrement, je ne crois pas, monsieur le député, qu’on puisse généraliser une telle expérimentation. D’une part, notre pays ne dispose pas d’équipements sportifs suffisants pour cela. D’autre part, dans cette logique de personnalisation, il est important que l’école soit capable de proposer des formules, des rythmes différents, selon la nature, selon le caractère de nos enfants et de nos élèves. L’école moderne doit être capable de s’adapter à cette diversité.

Mme la présidente. Nous revenons aux questions du groupe SRC.

La parole est à M. Yves Durand.

M. Yves Durand. Monsieur le ministre, il y a une qualité qu’on ne peut vous dénier : vous êtes un extraordinaire communicant et vous avez une capacité peu commune d’inventer des mots qui ne recouvrent aucune réalité. Ainsi, chaque fois que vous répondez à l’une de nos questions, vous nous assénez systématiquement ce mot de « personnalisation ». J’avoue n’avoir pas très bien compris ce que cela désignait dans la réalité.

M. Pierre Lequiller. Vous, c’est la mystification que vous pratiquez dans la réalité !

M. Yves Durand. Voilà dix ans que la droite est aux responsabilités. Nous sommes aujourd’hui à un moment important, où il s’agit de faire le bilan. Vous voulez remonter à Lionel Jospin : pourquoi pas jusqu’à Jules Ferry ? Le bilan de vos dix années de politique éducative est clair, et ce n’est pas le groupe socialiste qui le met en avant, mais des études nationales sérieuses : celle de la Cour des comptes – difficile de considérer qu’elle est un ramassis de gauchistes –, les enquêtes PISA ou encore celles que mènent des professionnels, comme ces chefs d’établissement auxquels vous faites souvent référence.

Ce bilan présente deux caractéristiques : 150 000 jeunes sortent toujours du système éducatif sans diplôme ni qualification. C’est votre grand échec. Deuxièmement, et surtout, les inégalités se creusent. Non seulement elles se creusent, mais elles correspondent de plus en plus à l’origine sociale des élèves. Il y a une corrélation entre les inégalités sociales et les inégalités scolaires. L’école d’aujourd’hui – la vôtre – tourne le dos à la mission même de l’école républicaine, qui était de compenser les inégalités.

Nous avions mis en place deux outils pour lutter contre ces inégalités. Le premier était l’éducation prioritaire. On sait ce qu’il en est advenu depuis que vous êtes là. Le second était la carte scolaire. En 2007, le candidat Sarkozy avait fait de la suppression de la carte scolaire la grande révolution pour atteindre l’égalité scolaire. Or, aujourd’hui, on note une ghettoïsation accrue des collèges et des lycées.

M. Éric Berdoati. C’est la gauche caviar qui se bat pour mettre ses enfants dans les grands lycées !

M. Yves Durand. Le ministère de l’éducation nationale a réalisé une étude à ce sujet. Êtes-vous prêt, monsieur le ministre, à la publier à la fin de cette législature, afin que nous puissions faire clairement, honnêtement, le point sur cette affaire ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le député, compliment pour compliment, si je suis un communicant, vous êtes un grand illusionniste. Vous oubliez de rappeler que le temps de l’éducation est un temps long.

M. Yves Durand. Vous êtes là depuis dix ans !

M. Luc Chatel, ministre. Vous parlez de l’enquête PISA, que l’OCDE réalise tous les trois ans auprès d’élèves de quinze ans. La dernière date de 2009. Comme l’a très bien dit M. Brindeau, les élèves de quinze ans qui ont été évalués en 2009 ont commencé leur scolarité en 1997, avec un système éducatif qui avait été imaginé, pensé, inventé à la fin des années 80 et au début des années 90. C’est cela, la réalité, monsieur Durand.

M. Yves Durand. Ça aurait pu s’améliorer, mais ça s’est aggravé !

M. Luc Chatel, ministre. Les enfants des réformes Darcos et Chatel seront évalués par PISA en 2018 ou en 2021. Je ne vous donne pas rendez-vous en 2021, monsieur Durand, mais, de grâce, pour la clarté et la bonne tenue du débat, essayons plutôt de considérer le fond du problème.

Pendant vingt-cinq ans, le système éducatif n’a pas su se moderniser, s’adapter à la massification – vous allez encore dire que j’invente des mots ! On ne peut pas travailler de la même façon lorsque le lycée est fréquenté par 20 % d’une classe d’âge et lorsqu’il l’est par 70 % d’une classe d’âge. Il y a une génération d’enseignants qui exercent encore aujourd’hui leur métier et qui ont connu l’époque où les classes étaient homogènes, où c’était en quelque sorte l’élite qui allait au lycée.

Vous savez très bien que la stratégie qui, depuis plusieurs années, consiste à s’adapter, à faire davantage confiance aux enseignants, à offrir davantage d’autonomie, de marges de manœuvre, de personnalisation – oui, je maintiens ce mot –, c’est la politique qui nous permettra d’obtenir de bons résultats. Il faut faire du sur mesure, faire plus pour les élèves qui ont plus de difficultés, tels les handicapés, tels ces jeunes issus de milieux défavorisés et qui sont accueillis dans les internats d’excellence, et sortir de l’égalitarisme qui a fait tant de mal à l’éducation nationale. Voilà la vraie réponse.

Enfin, vous m’avez interrogé sur la carte scolaire. Monsieur Durand, vous le savez très bien, nous ne l’avons pas supprimée, nous l’avons assouplie. Aujourd’hui, nous prenons en compte davantage de dérogations. Défendez-vous vraiment un système qui permettait les passe-droits à outrance et qui avait abouti à la ghettoïsation ?Celui qui était issu d’une famille connaissant le système se faisait domicilier à proximité d’un établissement qui avait bonne réputation : c’était cela, le système précédent.

M. Éric Berdoati. Exactement !

M. Luc Chatel, ministre. Nous avons ouvert une brèche, nous avons assoupli le dispositif, mais nous ne l’avons pas supprimé, car il faudra du temps et de la progressivité.

M. Yves Durand. Vous engagez-vous à publier l’étude ?

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Monsieur le ministre, « personnalisation », « sur mesure », « solution pour chaque élève », tels sont les mots que vous avez employés au début de ce débat. Comment ne pas être aussitôt tenté de confronter vos paroles à la réalité vécue quotidiennement dans les écoles ? Force est de constater que votre discours n’est en aucun cas un acte de vérité, pourtant invoqué par le président-candidat pas plus tard qu’hier soir.

À cet égard, les personnels des réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED, sont les grands sacrifiés de la nouvelle vague de suppression de postes au sein de l’éducation nationale pour la rentrée 2012.

Alors que les RASED ont déjà subi des saignées successives ces dernières années, ce sont des milliers de postes supplémentaires qui vont disparaître à nouveau. Au moment même où vous mettez en avant l’importance de l’individualisation des solutions et de la prise en compte au cas par cas des situations, les RASED – spécialistes pédagogiques, psychologues, rééducateurs, c’est-à-dire personnels chargés d’aider les élèves en difficulté dans nos écoles – sont voués à disparaître. Cibler tout particulièrement ces personnels, au nom d’une logique purement comptable, est inacceptable.

Parents et enseignants vous interpellent régulièrement. Je viens d’ailleurs de vous faire parvenir la pétition, totalisant 646 signataires au 2 février, des comités FCPE des XIe et XIIe arrondissements de Paris, au moment même où se prépare la prochaine rentrée scolaire et alors que sont d’ores et déjà annoncées quatre-vingts nouvelles suppressions de poste à Paris.

Comme les effectifs des classes explosent, ce seront donc les RASED qui serviront à nouveau de variables d’ajustement. Un poste sur RASED que l’on supprime ici ou là, y compris dans une zone d’éducation prioritaire, c’est moins voyant qu’une fermeture de classe.

D’ores et déjà, dans les XIe et XIIe arrondissements, les exemples sont légion et tristement édifiants : ici une école maternelle avec plus de vingt enfants signalés par leurs enseignants comme relevant du RASED, mais la présence annoncée d’un maître G une seule demi-journée par semaine ; là une école élémentaire avec près de vingt-cinq enfants relevant a priori du RASED et sans aucune nomination de professionnel compétent ; là encore une école élémentaire avec déjà neuf enfants qui vont avoir besoin du réseau, mais un maître E présent une seule demi-journée par semaine ; dans une autre école maternelle, la présence du réseau est censée se limiter, cette année, à la psychologue scolaire.

Vous devinez déjà ma question, monsieur le ministre : quand cela va-t-il enfin s’arrêter ? N’est-il pas temps de dire « stop » aux suppressions de postes, et notamment de postes RASED ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. C’est Zola, monsieur Bloche !

M. Yves Durand. Non, c’est la réalité.

M. Luc Chatel, ministre. Tout à l’heure, j’ai eu l’occasion de rappeler les chiffres. Il y a plus d’enseignants aujourd’hui qu’il n’y en avait dans le système éducatif il y a quinze ou vingt ans…

M. Patrick Bloche et M. Yves Durand. Où sont-ils ?

M. Luc Chatel, ministre. …alors qu’il y a moins d’élèves. Le taux d’encadrement est donc meilleur.

M. Yves Durand. Non, ce n’est pas vrai. C’est une moyenne !

M. Luc Chatel, ministre. Si, monsieur Durand, il est meilleur, et vous le savez. Puisque vous êtes attaché aux études de mes services – et vous avez raison, car elles sont de grande qualité –, eh bien, lisez-les…

M. Yves Durand. Publiez-les !

M. Luc Chatel, ministre. …et regardez les documents annuels qui montrent que, cette année, nous avons 35 000 professeurs de plus dans le système éducatif, alors qu’il y a 500 000 élèves de moins qu’en 1990. C’est la réalité des chiffres !

Cessons avec cette logique quantitative. S’il suffisait de créer des postes d’enseignants – et j’ai cru comprendre que vous vouliez en créer de nouveaux – pour obtenir des résultats, cela se saurait et nous serions les champions du monde en matière éducative !

M. Yves Durand. On ne les crée pas, on ne fait que rendre les postes que vous avez détruits !

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur Bloche, il n’est pas question de supprimer les RASED. Je vous fais d’ailleurs remarquer que ce dispositif, pour ce qui est de son organisation, ne faisait pas l’unanimité au début des années 2000 – je ne dis pas auprès de la majorité et du Gouvernement, mais auprès des spécialistes en matière éducative ou de la recherche éducative et pédagogique. Nous avons adapté ce dispositif, nous l’avons redéployé, nous sectorisons, mais nous mettons en place un système d’accompagnement personnalisé, d’aide personnalisée, et ce dans chaque classe. Ainsi, après avoir repéré les quatre, cinq ou six élèves qui ont des difficultés dans sa classe, le maître les prend en charge pendant deux heures parce que ces élèves ont besoin de temps supplémentaire, par exemple pour la lecture.

M. Yves Durand. Les RASED, ce n’est pas cela !

M. Luc Chatel, ministre. Le sur mesure, c’est cela.

Ensuite, on a besoin de spécialistes du langage lorsque la difficulté avérée est plus importante que prévue. C’est le rôle des RASED,…

Mme Martine Faure. Il n’y en a plus !

M. Luc Chatel, ministre. …des psychologues scolaires, d’autres formes d’accompagnement. Je ne peux pas vous laisser caricaturer notre action dans le domaine de l’éducation.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Durand.

M. Yves Durand. Monsieur le ministre, je souhaite que vous puissiez publier toutes les études de votre ministère, qui sont probablement excellentes, mais que – je suppose – vous gardez pour vous.

S’agissant de la carte scolaire, par exemple, il y a des études sur les conséquences de son « assouplissement » – puisque c’est le terme que vous employez –, sur la ghettoïsation des collèges. Publiez-la et ayons un vrai débat au fond, un débat sérieux !

Sans même parler des moyens, monsieur le ministre, la carrière enseignante est de moins en moins attractive. En l’occurrence, vous ne pouvez pas contester les chiffres : dans de nombreux cas, il y a autant de candidats que de postes, voire moins. Ce n’est pas parce qu’il y a beaucoup de postes, c’est parce que les jeunes se détournent de la carrière enseignante.

Vous êtes en train d’assécher le vivier des enseignants, non seulement pour la rentrée prochaine, avec votre politique de suppression de postes, mais aussi pour la rentrée 2013, voire celle de 2014. Nous aurons, je l’espère, la responsabilité de cette rentrée, mais ce sera vous le responsable de l’assèchement des postes dans l’éducation nationale.

La raison pour laquelle les jeunes se détournent de la carrière enseignante, c’est qu’on leur interdit toute formation professionnelle. Alors, ne caricaturez pas notre position ! Nous sommes favorables à la mastérisation, c’est-à-dire à ce que les enseignants soient recrutés au niveau du master. Nous sommes favorables à ce que la formation se fasse à l’intérieur des universités. Le problème n’est pas là. Mais vous avez supprimé les stages, et ce ne sont pas vos 108 heures de stage « en responsabilité » qui vont résoudre le problème ! Car les jeunes sont tout seuls, en toute responsabilité, devant des élèves que, souvent, ils n’ont jamais rencontrés ! Ce ne sont pas des stages !

Vous parlez des tuteurs : 15 % des stagiaires n’ont pas de tuteur, parce qu’il est à cinquante kilomètres ! Certains stagiaires travaillent parfois dans deux établissements. Comment voulez-vous qu’ils préparent leur concours en même temps qu’ils se préparent professionnellement à leur métier d’enseignant ?

Vous avez supprimé les stages professionnalisants, et c’est ce qui amène les jeunes à ne plus vouloir entrer dans l’éducation nationale.

Il y a un moyen de remédier à cela, monsieur le ministre : faire échec – et ce serait du bon sens – à la proposition de loi de notre collègue Grosperrin sur la formation des maîtres, proposition que vous avez sans doute initiée. Je regrette que ce texte aille devant le Sénat, car c’est une véritable catastrophe : il propose de légaliser l’absence de formation professionnelle des enseignants. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Pour ne pas être caricaturé, monsieur Durand, il ne faut pas être caricatural. Vous savez très bien qu’il n’y a pas le même nombre d’étudiants en master et en licence. Il doit y avoir 850 000 étudiants en licence et 40 % de moins en master, ce qui est tout à fait normal puisqu’il s’opère, dans les études supérieures, une sélection progressive.

Par conséquent, vous ne pouvez pas comparer le taux de recrutement d’étudiants en licence et en master. Oui, il y a eu, en proportion, moins de candidats au concours au niveau master qu’il n’y en avait à l’époque au concours ouvert en licence, simplement parce qu’il y a moins d’étudiants en master. Vous faites confiance à l’université de votre pays, monsieur Durand : ces étudiants ont été bien sélectionnés.

Maintenant, regardons la réalité des chiffres.

S’agissant du concours 2012 de professeur des écoles, le nombre des inscrits a augmenté de 7 % si l’on cumule le concours de professeur des écoles et le CAPES.

M. Yves Durand. Par rapport à quoi ?

M. Luc Chatel, ministre. Par rapport à 2011.

M. Yves Durand. Et par rapport à 2010 ?

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur Durand, on ne peut pas comparer les recrutements ; vous avez 527 000 étudiants en master. Nous recrutons sur une base de 527 000 étudiants, alors qu’auparavant, à l’entrée des IUFM, on recrutait sur une base de 850 000 étudiants. Ce n’est absolument pas comparable !

Je vais aller plus loin dans l’exposé de vos contradictions, monsieur Durand. J’ai cru comprendre que le candidat que vous soutenez voudrait créer 60 000 postes supplémentaires, tout en mettant fin au non remplacement d’un fonctionnaire sur deux.

M. Yves Durand. Il suit en cela l’avis de la Cour des comptes.

M. Luc Chatel, ministre. Expliquez-moi comment vous allez recruter chaque année 13 000 enseignants – c’est environ ce que nous recrutons, nous, chaque année –, tout en mettant fin au « un fonctionnaire sur deux ». Cela fait 26 000 plus 60 000 sur cinq ans, c’est-à-dire 12 000 par an. Vous vous apprêtez donc à recruter 40 000 enseignants par an. Voilà la promesse de François Hollande ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Martine Faure. N’importe quoi !

M. Luc Chatel, ministre. Et il y a effectivement 40 000 candidats qui passent le concours. Par conséquent, que veut François Hollande ? Il veut mettre en place un système où 100 % des candidats sont reçus au concours ! Eh bien, monsieur Durand, ce n’est pas le système de sélection des enseignants que nous voulons !

M. Yves Durand. C’est de la malhonnêteté intellectuelle, monsieur le ministre !

Mme la présidente. Nous en revenons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Monsieur le ministre, il résulte de nombreuses études, de façon récurrente, que le niveau des Français en langues, et notamment en anglais, est relativement faible.

Ainsi, au lycée, seuls trois lycéens sur dix obtiennent un niveau B2, niveau visé au baccalauréat, et sept lycéens sur dix atteignent ou dépassent le niveau minimum requis en fin de scolarité obligatoire, soit le niveau B1.

Or, aujourd’hui, la connaissance des langues est devenue une compétence indispensable aux élèves, aussi bien dans le cadre de la poursuite de leurs études que pour faciliter leur insertion professionnelle.

Conscient de ces difficultés, vous avez installé en avril 2011 un comité stratégique des langues, qui avait pour mission de faire des propositions concrètes visant à refondre l’enseignement des langues en France. Le rapport final de ce comité vous a été remis récemment, monsieur le ministre. Pouvez-vous dire à la représentation nationale, dans le cadre de ce débat, quelles ont été les préconisations de ce rapport et, parmi ces préconisations, quelles mesures vous souhaitez mettre en œuvre pour améliorer l’apprentissage des langues dans nos écoles ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur Richard, apprendre l’anglais ne doit plus être une option.

Nous vivons dans un monde ouvert, qu’on le veuille ou non. Et c’est, en tant que ministre de l’éducation nationale, un ardent défenseur de la langue française qui vous parle. Nous avons un partenariat permanent avec l’Académie française, et j’évoquais tout à l’heure l’apprentissage du français dès le plus jeune âge. Mais la langue de communication internationale est devenue, qu’on le veuille ou non, la langue anglaise. Or nous savons, du fait des comparaisons internationales, chères à M. Durand, que les Français ne sont pas particulièrement brillants dans l’enseignement et l’apprentissage de l’anglais.

J’ai installé il y a plusieurs mois un comité chargé de faire des propositions, présidé par Suzy Halimi, grande linguiste et ancienne présidente de Paris III, qui vient de me remettre un rapport. J’ai retenu un certain nombre de ses propositions.

D’abord, la sensibilisation précoce, c’est-à-dire dès la maternelle. Des poésies, des comptines, des mots en anglais doivent être appris pour que l’oreille se familiarise. Et l’on sait que dès le plus jeune âge, cela permet d’obtenir des résultats. Car ce que l’on apprend à quatre ans ou à six ans, on peut l’acquérir pour la vie.

Ensuite, la mobilité internationale. Il y a sans doute là une des plus grandes inégalités sociales. En effet, dans certains milieux, les parents peuvent envoyer leurs enfants à l’étranger dans le cadre de séjours scolaires ou d’échanges, alors que, dans d’autres milieux, ce n’est pas possible. Il y a là une véritable inégalité. Or, lorsque vous vous présentez à l’entrée d’une grande école ou à certains concours, l’anglais fait partie des disciplines obligatoires, et être bilingue est souvent une nécessité.

Nous allons travailler, sur la proposition de ce rapport, à l’élaboration d’un cahier des charges national de séjours linguistiques. Il faut, dans les années qui viennent, que l’on puisse s’engager vis-à-vis des parents à ce que chaque enfant de France puisse, au cours de sa scolarité, bénéficier d’un séjour individuel. Je veux parler d’un vrai séjour linguistique, pas d’un séjour de découverte.

Enfin, j’ai demandé au CNED, il y a plusieurs mois, de réfléchir à un système interactif d’enseignement à distance de l’anglais. Les équipes du CNED ont fait un travail absolument remarquable. Je vous encourage d’ailleurs à aller sur le site englishbyyourself.fr, qui propose un nouveau mode d’apprentissage de l’anglais – allant de la maternelle jusqu’à l’enseignement supérieur ou à la formation continue et permanente –, avec des exercices, des jeux, ou encore la possibilité d’avoir un enseignant sur internet grâce aux nouvelles technologies. L’éducation du XXIe siècle, monsieur Richard, c’est aussi être capable d’utiliser le numérique pour apporter un meilleur service à l’ensemble de nos élèves et à leurs familles.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Berdoati.

M. Éric Berdoati. Monsieur le ministre, l’assiduité à l’école est une obligation, parce qu’elle constitue la condition première de la réussite et de l’insertion de nos enfants.

Malheureusement, aujourd’hui, l’absentéisme scolaire touche à peu près 7 % des enfants, et 120 000 élèves par an quittent l’école sans diplôme, sans qualification, et connaissent ensuite des difficultés d’insertion professionnelle.

C’est pourquoi la lutte contre l’absentéisme scolaire est une des priorités de cette majorité, le Président de la République l’a rappelé à plusieurs reprises.

La proposition de loi de notre collègue Éric Ciotti, que nous avons adoptée, visait à ce que la décision de suspendre les allocations familiales ait un caractère systématique en cas d’absentéisme scolaire injustifié et répété d’un élève. Fortement décrié, ce dispositif préventif et de remédiation avec les familles est désormais en place depuis environ un an.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, faire un bilan de ce dispositif de main tendue aux familles et non de sanction couperet, comme d’aucuns voudraient bien le présenter ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le député, l’obligation d’assiduité est fondamentale dans notre système scolaire. J’ai rappelé tout à l’heure les lois Ferry, qui ont mis en place l’école gratuite, laïque et obligatoire. Nous avons encore aujourd’hui, en France, trop d’élèves absents, 7 % en moyenne, et cela peut aller jusqu’à 15 % dans les lycées professionnels. Or le manque d’assiduité peut aboutir au décrochage scolaire, lequel a des conséquences radicales puisque, toute sa vie, un enfant sera pénalisé parce qu’il ne sera pas sorti du système éducatif avec un diplôme.

Parmi les dispositions que nous avons mises en place, celles prévues par la proposition de loi de votre collègue Éric Ciotti, qui a été adoptée il y a quelques mois par la majorité, ont permis d’enregistrer des résultats spectaculaires.

Je rappelle les polémiques qu’avaient suscitées cette loi sur la suspension – je dis bien, la suspension, et non la suppression – des allocations familiales. Or cette mesure donne satisfaction puisque, sur un semestre, c’est-à-dire entre la mise en application de la loi, en février 2011, et la fin de l’année scolaire, un peu plus de 50 000 signalements d’absentéisme de ces élèves ont été adressés aux familles par les inspecteurs d’académie. Dans quatre cas sur cinq, ce traitement individualisé, puisque nous parlons personnalisation, a permis à l’enfant de revenir à l’école. Lorsqu’il y a eu un deuxième signalement – soit par rendez-vous, soit par courrier –, dans l’immense majorité des cas, il a permis à l’enfant de retourner à l’école. Au total, nous avons enregistré 171 suspensions effectives d’allocations familiales, soit 0,3 % du total des signalements. Ainsi, la loi, telle que vous l’avez pensée et votée, avec sa progressivité et son caractère incitatif, nous a permis d’obtenir des résultats, à savoir faire revenir les enfants à l’école. C’est ce que nous souhaitions.

M. Éric Berdoati. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Aujourd’hui, un jeune qui quitte l’école sans diplôme court trois fois plus de risques d’être au chômage qu’un jeune diplômé. Au vu de ces chiffres, que nous ne pouvons admettre plus longtemps, le Président de la République a présenté, en septembre 2009, un ensemble de mesures engageant le Gouvernement à lutter contre le décrochage scolaire et à faire de cet objectif une priorité. L’éducation nationale est évidemment en première ligne, mais ne doit pas être seule dans cette bataille. Les élus de terrain que nous sommes savent bien qu’elle ne peut agir seule et qu’elle a besoin de l’appui et de la coordination de l’ensemble des services et des forces de l’État. En effet, face à cet enjeu capital, la réussite dépend en grande partie de la synergie ainsi créée, afin de ramener vers l’école ou, plus largement, vers la formation ou vers le parcours d’insertion, ceux que l’on appelle les « décrocheurs ». C’est la raison pour laquelle vous avez mis en place les plateformes de décrochage scolaire.

Dans des territoires fragiles, tels que les quartiers politique de la ville – et en particulier à Chanteloup-les-Vignes –, nous disposons d’un autre outil : le CUCS, contrat urbain de cohésion sociale, expérimental. En effet, seule une mobilisation sans précédent autour de l’éducation et de la prise en charge des jeunes en difficulté permettra d’agir sur les causes des inégalités scolaires et sociales. Je citerai, à cet égard : la remobilisation de la communauté éducative ; le parcours de réussite éducative renforcé ; la lutte contre le décrochage scolaire ; et l’effort accentué pour susciter l’envie de réussir, grâce aux Cordées de la réussite.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous dresser un bilan du dispositif de lutte contre le décrochage scolaire ? Quel est, enfin, le regard du ministre de l’éducation nationale sur la lutte contre le décrochage scolaire dans les sites particulièrement difficiles qui relèvent de la politique de la ville, et notamment ceux qui sont éligibles aux CUCS expérimentaux ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le député, prévenir le décrochage scolaire est, d’abord, un travail d’anticipation. La politique que nous portons depuis plusieurs années en matière d’individualisation, d’accompagnement et d’aide personnalisée permettra indiscutablement, sur la durée, d’obtenir des résultats et de trouver une solution pour chaque élève sorti du système éducatif. Nous devons passer de l’école pour tous, qui a été un slogan pendant années, à la réussite de chacun : une solution pour chaque élève. Nous ne sommes malheureusement pas en mesure, aujourd’hui, de garantir à chaque parent de France une solution pour son enfant au moment où il sort du système éducatif. Ce travail préventif est nécessaire et justifie la politique que nous conduisons.

Nous devons également nous préoccuper des 160 000 perdus de vue, c’est-à-dire des élèves qui ont disparu du système éducatif entre la fin d’une année scolaire, en juin, et le début de l’année suivante, en septembre. Comme je l’ai précisé tout à l’heure, grâce à un travail d’interconnexion de nos réseaux informatiques avec ceux du ministère de l’agriculture, des CFA et des missions locales, nous avons réussi à identifier les décrocheurs intuitu personæ. J’ai, par conséquent, adressé à chaque inspecteur d’académie, dans chaque département, la liste de ceux qui nous ont quittés après l’âge de seize ans suite à un échec scolaire. Quatre cents plateformes de lutte contre le décrochage scolaire ont été mises en place à l’échelon des bassins de vie, afin de coordonner l’action de l’éducation nationale, des CFA, des chambres d’agriculture – dans le cadre de l’enseignement agricole – et des missions locales, s’agissant des formations non spécifiques, permettant ainsi d’apporter une solution à chacun de ces décrocheurs. Ce dispositif a été mis en place à l’automne par les préfets et par les recteurs. Ainsi, un suivi individualisé nous permettra de faire une proposition à chacun de ces élèves.

Vous le voyez, qu’il s’agisse de la prévention ou du traitement instantané de la lutte contre le décrochage, nous avons décidé de nous mobiliser fortement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Le débat est clos.

3

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, vendredi 17 février à neuf heures trente :

Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2012.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinq.)