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Délégation pour l’Union européenne

mardi 9 octobre 2007

16 h 45

Compte rendu no 12

Présidence de M. Pierre Lequiller Président

I. Communication de Mme Chantal Brunel sur la conclusion de l’accord de stabilisation et d’association avec le Monténégro (E 3578 et E 3585)

II. Communication de Mme Marietta Karamanli sur le Livre vert sur la révision de l’acquis communautaire en matière de protection des consommateurs (E 3447)

III. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

IV. Audition, ouverte à la presse, de M. Leonard Orban, Commissaire européen chargé du multilinguisme

I. Communication de Mme Chantal Brunel sur la conclusion de l’accord de stabilisation et d’association avec le Monténégro (E 3578 et E 3585)

Mme Chantal Brunel, rapporteure, a d’abord rappelé que les Conseils européens de Feira en juin 2000 et de Thessalonique en juin 2003 ont offert à tous les pays des Balkans occidentaux une perspective d’adhésion à l’Union européenne, confirmée par le Conseil européen de décembre 2006.

La conclusion d’un accord de stabilisation et d’association (ASA) est la première étape d’un long processus de réformes devant conduire à l’adhésion. Dans l’ordre de progression des pays de la région vers leur intégration dans l’Union européenne, si l’on met à part la Slovénie qui a adhéré à l’Union européenne le 1er mai 2004 et à l’euro le 1er janvier 2007, la Croatie, signataire d’un ASA en 2001, a ouvert les négociations d’adhésion avec l’Union européenne le 3 octobre 2005, le même jour que la Turquie. L’Ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM), signataire d’un ASA en 2001 et reconnue candidate le 15 décembre 2005 ne bénéficie pas encore d’une décision d’ouverture des négociations d’adhésion. L’Albanie a signé le 12 juin 2006 un ASA dont la ratification par l’Union et les Etats membres a commencé.

En revanche, la négociation d’un ASA, officiellement ouverte le 10 octobre 2005 avec la Serbie-et-Monténégro et le 25 novembre 2005 avec la Bosnie-et-Herzégovine, n’a pas encore abouti. Le statut définitif du Kosovo n’est toujours pas réglé et la Bosnie-et-Herzégovine ne parvient pas à s’émanciper du régime transitoire défini par les accords de Dayton en novembre 2005.

L’Union étatique de la Serbie-et-Monténégro constituait le dernier vestige de l’ancienne fédération yougoslave. L’indépendance du Monténégro, approuvée à 55,4 % lors du référendum du 21 mai 2006, a permis à ce pays de négocier rapidement un ASA le mettant sur le chemin de l’adhésion à l’Union européenne.

La République du Monténégro dont la capitale est Podgorica a une superficie de 13 812 km2 et une population de 620 000 habitants comprenant notamment 43,2 % de Monténégrins et 32 % de Serbes.

L’homme-clé de la marche du Monténégro vers l’indépendance a été son précédent Premier ministre, M. Milo Djukanovic. Membre de la Ligue communiste yougoslave, il devient Premier ministre en 1991, à 29 ans et rompt avec Milosevic en 1996, mais il n’obtiendra pas la réalisation de ses ambitions indépendantistes après la chute de celui-ci en octobre 2000. L’Union européenne craignait une nouvelle déstabilisation régionale et favorise la création en 2003 de l’Union étatique de la Serbie-et-Monténégro, qui s’est avérée trop artificielle pour fonctionner durablement.

L’Union européenne s’est donc résolue à accepter l’organisation d’un référendum au Monténégro qui a abouti à une séparation à l’amiable. Ce processus pacifique a contribué à la stabilité de la région, mais il pourrait susciter des impatiences dans les trois zones où perdurent des risques de déstabilisation : le Kosovo, la Bosnie-Herzégovine et l’ARYM.

L’Accord de stabilisation et d’association prépare le Monténégro à une adhésion future à l’Union européenne et à recréer un système d’échanges et de coopération avec son voisinage. L’association sera entièrement réalisée à l’issue d’une période de transition d’une durée maximale de cinq ans.

La coopération régionale comporte l’engagement du Monténégro de conclure dans les deux ans avec les pays ayant déjà signé un ASA des conventions, en vue de l’établissement de zones de libre-échange, et avant cinq ans, un accord de libre-échange avec la Turquie.

La libre circulation des marchandises sera assurée par l’établissement progressif d’une zone de libre-échange entre la Communauté européenne et le Monténégro dans les cinq ans qui suivent l’entrée en vigueur de l’accord. Il est à noter que la France a obtenu l’introduction d’un article 33 sur la protection des indications géographiques dans les échanges de produits agricoles autres que les vins, protégés par un protocole, afin d’éviter toute usurpation de marques.

Dans les cinq ans, le Monténégro s’engage à rapprocher sa législation de celle de la Communauté européenne en se concentrant d’abord sur les éléments fondamentaux de l’acquis dans le domaine du marché intérieur, y compris le secteur financier, et dans d’autres domaines tels que la justice, la liberté et la sécurité ainsi que le commerce.

Dans l’attente de la ratification de l’ASA par le Monténégro, les Etats membres et la Communauté européenne, la Commission propose au Conseil de conclure un accord intérimaire pour mettre en œuvre rapidement les dispositions commerciales de l’ASA qui relèvent de la compétence exclusive de la Communauté européenne.

Cet accord s’appuie sur un régime commercial privilégié, sur un partenariat européen adopté en 2004 et scindé en 2006 de celui de la Serbie pour fixer les priorités de réformes du Monténégro à court et moyen terme, enfin sur une assistance financière substantielle de l’Union européenne. L’accord s’appuie enfin sur un ensemble d’initiatives pour recréer un espace commun de stabilité et de prospérité dans la région des Balkans occidentaux.

Le Monténégro présente cependant des lacunes très importantes sur des points fondamentaux qu’il doit combler au plus vite pour progresser sur le chemin de l’adhésion.

Dans le premier rapport de progrès sur le Monténégro indépendant, présenté en novembre 2006, la Commission a appelé ce pays à concentrer ses efforts sur l’amélioration de sa capacité administrative alors qu’il se trouve au tout début d’un processus de reprise de l’acquis communautaire, ainsi que sur la réforme d’un système judiciaire défaillant de manière à le rendre efficace et totalement indépendant du gouvernement. Ce pays doit éradiquer la corruption et le crime organisé qui restent à des niveaux élevés.

L’adoption d’une constitution devrait être adoptée de manière consensuelle, en impliquant tous les partis politiques, dans le respect des normes européennes. Or, le Monténégro n’a toujours pas adopté sa nouvelle constitution et les débats menés depuis des mois sur le projet du gouvernement ont montré un pays plus divisé que ne l’avait laissé paraître son accession pacifique à l’indépendance.

Relever le niveau de vie constituera l’un des principaux défis. La Commission a confirmé la viabilité économique de ce petit Etat qui a privilégié la stabilité par rapport à la flexibilité pour sortir du marasme des années de guerre et doit maintenant développer la croissance d’une économie reposant sur trois secteurs : l’aluminium, le tourisme et l’agriculture.

Le Monténégro qui était la République la plus pauvre de la Fédération yougoslave a un PIB par habitant de 2 790 € et un salaire mensuel moyen de 377 €. L’adoption du deutsche mark en 1999 puis de l’euro a permis de passer d’une hyper-inflation de plus de 100 % à 2,5 % en 2006 et d’améliorer progressivement la croissance, de 3,7 % en 2004 à 6,5 % en 2006. La France est le onzième fournisseur (2,1 % des importations monténégrines) et le 31e client.

L’amélioration de la transparence dans les affaires devrait favoriser le développement des investissements directs étrangers qui ont atteint 500 millions d’euros en 2006 et sont en progression constante depuis 2004. Le chômage, officiellement de 15 % mais plus élevé, est en partie absorbé par une économie informelle estimée à 20 % et la population au-dessous du seuil de pauvreté s’élève à plus de 10 %.

Le Conseil Affaires générales et relations extérieures doit se prononcer le 15 octobre sur l’ASA avec le Monténégro.

Cet accord est le résultat d’une négociation technique aboutie mais, avant de conclure, le Conseil devrait adresser un message politique clair aux peuples monténégrin et européens pour éviter tout malentendu sur sa portée.

En effet, le Conseil devrait clairement annoncer que l’ASA n’est pas une garantie d’accès automatique à l’Union européenne et que le Monténégro n’entrera pas dans l’Union européenne tant qu’il ne respectera pas complètement les critères d’adhésion généraux et spécifiques aux Balkans.

A cet égard, le Monténégro devrait dissiper les doutes sur deux points fondamentaux.

D’une part, ce pays ne paraît pas en état de s’engager pleinement dans un processus de réformes tant qu’il n’aura pas adopté sa nouvelle constitution, censée notamment garantir le droit des minorités.

D’autre part, ce pays n’a pas respecté une position de principe de l’Union européenne sur la Cour pénale internationale (CPI), en signant le 1er mai 2007 un accord avec les Etats-Unis garantissant la non-extradition de citoyens américains suspectés de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité vers la CPI, en échange d’une aide militaire des Etats-Unis. La Roumanie avait signé un accord semblable en 2002 pendant les négociations d’adhésion mais ne l’a jamais ratifié en raison de l’opposition de l’Union européenne à ces accords affaiblissant l’autorité de la CPI. La Croatie, pays candidat aux négociations d’adhésion, a refusé de signer un accord de ce type, mais il conviendrait de s’assurer que l’ARYM, l’Albanie et la Bosnie-Herzégovine ne l’ont pas fait. Le Monténégro devrait se mettre en conformité avec la position de l’Union européenne sur la CPI pour que l’Union et ses Etats membres puissent conclure et ratifier cet accord.

Le Conseil doit également rassurer l’opinion européenne et lui garantir que la fragmentation de l’ex-Yougoslavie en sept Etats n’affaiblira pas le système décisionnel de l’Union européenne après leur adhésion ni sa capacité d’intégration de nouveaux Etats membres.

L’Union européenne est fondée sur l’égalité entre Etats membres quelle que soit leur taille, corrigée au Conseil et au Parlement européen par une pondération des voix et des sièges en fonction de la population.

Or il serait très difficile d’attribuer des sièges au Parlement européen à l’ensemble des Etats de l’ex-Yougoslavie sans remettre en cause les critères définis par le Conseil européen en juin 2007 pour l’après 2009 (plafond global de 750 députés, seuil maximal de 96 et seuil minimal de six pour chaque Etat membre et proportionnalité dégressive). En particulier, le seuil minimal de six députés pour les Etats les moins peuplés aboutirait à un doublement de la représentation des sept Etats par rapport à ce qu’aurait été celle de l’ex-Yougoslavie, en considération d’une population d’environ 21 millions d’habitants.

Par ailleurs, une forme de pondération n’existe plus à la Commission depuis la disparition du deuxième Commissaire pour les Etats fortement peuplés et la rotation égalitaire de deux tiers des Etats après 2014 pourrait renforcer l’avantage de la fragmentation dans une institution décidant à la majorité simple.

Enfin, la pondération n’a jamais existé à la Cour de justice des Communautés européennes. Elle juge à la majorité simple avec une composition fondée sur le principe qu’un juge par Etat membre égale une voix.

La prime à la fragmentation des Etats dans le système décisionnel de l’Union européenne présente le risque de délégitimer les décisions des institutions et de provoquer un recul de l’intégration communautaire, au profit d’un retour à la coopération intergouvernementale dans laquelle la puissance respective des membres serait mieux prise en compte.

Elle risque également de favoriser la revendication de certaines régions à compétence législative, beaucoup plus riches et peuplées, de devenir des Etats membres de plein exercice pour participer directement aux décisions de l’Union européenne et de la communauté internationale en tant que membres de l’ONU.

L’échéance de ces futures adhésions est encore lointaine mais la réflexion mérite d’être engagée dès maintenant.

Le Président Pierre Lequiller a approuvé les conclusions de la rapporteure assortissant l’approbation de l’ASA par la Délégation d’un certain nombre de réserves sur le fait que l’ASA n’était pas une garantie d’accès automatique à l’Union européenne, sur l’adoption d’une nouvelle constitution par le Monténégro garantissant son plein engagement dans le processus de réformes, sur la renonciation de ce pays à un accord non conforme aux positions de l’Union européenne sur la Cour pénale internationale, enfin sur les garanties à prévoir pour que la fragmentation d’un Etat en Etats moins peuplés n’affaiblisse pas le système décisionnel de l’Union européenne après leur adhésion.

Sur proposition de la rapporteure, la Délégation a adopté les conclusions suivantes :

« La Délégation,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de décision du Conseil concernant la signature, au nom de la Communauté européenne, de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres et la République du Monténégro, et la proposition de décision du Conseil et de la Commission concernant la conclusion de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d’une part, et la République du Monténégro, d’autre part, (COM(07) 350 final / E 3585) ainsi que la proposition de décision du Conseil relative à la signature et à la conclusion d’un accord intérimaire sur le commerce et les mesures d’accompagnement entre la Communauté européenne, d’une part, et la République du Monténégro, d’autre part (COM(07) 351 final / E 3578),

1. Se prononce en faveur de l’accord de stabilisation et d’association dans la mesure où il ouvre un processus de longue durée invitant le Monténégro à redoubler son effort de réforme pour se préparer à une future adhésion avec l’aide renforcée de l’Union européenne ;

2. Estime toutefois que, tout en confirmant la perspective européenne du Monténégro, le Conseil doit clairement annoncer que l’accord de stabilisation et d’association n’est pas une garantie d’accès automatique à l’Union européenne et que le Monténégro n’entrera pas dans l’Union européenne tant qu’il ne respectera pas complètement les critères d’adhésion généraux et spécifiques aux Balkans occidentaux ;

3. Considère que l’Union européenne et ses Etats membres ne peuvent conclure ni ratifier cet accord tant que le Monténégro n’a pas adopté sa nouvelle constitution et n’est pas en état de s’engager pleinement dans un processus de réformes ;

4. Estime également nécessaire que le Monténégro renonce à tout accord avec un pays tiers non conforme aux positions de l’Union européenne sur des questions fondamentales, comme le respect de l’autorité de la Cour pénale internationale ;

5. Souhaite qu’une réflexion soit engagée sur les garanties à prévoir pour que la fragmentation d’un Etat en Etats moins peuplés n’affaiblisse pas le système décisionnel de l’Union européenne après leur adhésion ni sa capacité d’intégration de nouveaux Etats membres ».

II. Communication de Mme Marietta Karamanli sur le Livre vert sur la révision de l’acquis communautaire en matière de protection des consommateurs (E 3447)

Mme Marietta Karamanli, rapporteure, a rappelé que le Livre vert amorçait une phase essentielle. Le droit européen de la consommation doit être amélioré à trois titres : son approche est sectorielle ; la teneur de la protection dont bénéficie le consommateur varie selon les Etats membres ; le marché intérieur n’est guère unifié et intégré pour lui. Les transactions transfrontières sont peu nombreuses. La démarche entamée par la Commission est consensuelle, visant au renforcement et à l’harmonisation des droits du consommateur en Europe, ainsi qu’à l’amélioration du marché intérieur. Un cadre juridique plus simple, plus sûr, plus cohérent et plus moderne est un objectif partagé.

La révision concerne certes huit des directives relatives au droit de la consommation seulement, mais cette approche partielle permet d’envisager un délai plus rapide pour obtenir des résultats et une amélioration de la situation sur plusieurs points clés.

Parmi les différentes options suggérées par la Commission, il faut choisir pour le futur non pas une adaptation individuelle de chacune des directives existantes, mais une approche mixte combinant une directive transversale pour traiter les questions communes à tous les contrats conclus par les consommateurs et des directives « verticales » pour les sujets sectoriels. Trois conditions doivent être respectées : la future directive doit s’appliquer à tous les contrats, transfrontaliers et nationaux ; le niveau d’harmonisation doit être sérieusement défini et l’option d’une harmonisation optimale, ou maximale ciblée, doit être retenue. Enfin, toute référence au principe du pays d’origine ou à une clause de reconnaissance mutuelle doit être exclue, de manière à éviter tout risque de « dumping » juridique.

En ce qui concerne le fond de la future directive « verticale », il convient d’éviter toute interférence avec les réflexions et travaux en cours au niveau européen sur le droit général des contrats. Ce dernier représente un élément essentiel du droit civil. En ce qui concerne les hypothèses d’une obligation de bonne foi s’appliquant aux contrats de consommation, les différences de définition et de portée de ces notions selon les pays imposent d’y renoncer. Seule pourrait être éventuellement prise en compte la notion de professionnel « loyal » devant répondre aux « attentes normales et raisonnables » du consommateur. L’hypothèse d’une extension du dispositif sur les clauses abusives au prix et à l’objet du contrat apparaît, par ailleurs, tout aussi délicate à retenir pour le Gouvernement comme pour le Parlement européen. On peut cependant estimer que cette hypothèse ne peut pas être rejetée directement et qu’il faut éviter tout ce qui permet d’abuser de la faiblesse du consommateur.

S’agissant de son contenu, la future directive transversale devrait notamment s’attacher à définir la notion de consommateur de manière harmonisée et à prévoir également une obligation générale d’information, les exigences formelles et linguistiques, les principes relatifs à la rétractation et les clauses abusives.

Sur le fond, le Livre vert offre la possibilité de prévoir des améliorations de la protection des consommateurs : le remplacement de l’actuelle liste indicative des clauses abusives par deux listes, une liste « noire » des clauses interdites et une liste « grise » des clauses simplement présumées abusives ; la clarification des sanctions en cas de manquement aux obligations d’information précontractuelle et contractuelle ; la création d’un droit général à indemnisation avec une notion harmonisée du préjudice comprenant notamment le préjudice moral. Pour ce qui concerne les biens, s’esquissent des améliorations sur la définition de la livraison, sur le transfert du risque et sur la prolongation de la garantie légale selon la durée de réparation du bien, ainsi que sur la suppression du délai de notification du défaut de conformité comme sur l’introduction d’un contenu minimum par défaut de la garantie commerciale et son transfert automatique en cas de revente du bien.

S’agissant du délai de réflexion ou de rétractation, la simplicité recommande un mécanisme unique. Néanmoins, il n’est pas envisageable de prévoir un tel dispositif commun tant sur les délais et les modalités que sur les effets du droit de rétractation. On peut cependant penser que la forme de la rétractation devrait être libre, pour permettre au consommateur de l’exercer aisément. Un accord s’esquisse sur le fait que la rétractation ne doit entraîner aucun frais pour le consommateur, sauf éventuellement des frais de renvoi postal, et qu’elle doit s’accompagner du remboursement du prix du produit.

Sur la question linguistique, non abordée par le Livre vert, il convient de prévoir le droit pour le consommateur qui n’a pas pris l’initiative d’une transaction transfrontalière, de disposer des éléments précontractuels et du contrat dans la langue de son choix.

Pour le futur, d’autres sujets pourraient être intégrés dans le socle commun du droit communautaire des consommateurs, mais ils sont subordonnés à des réflexions et études complémentaires.

L’application du dispositif sur les clauses abusives aux dispositions ayant fait l’objet d’une négociation individuelle recueille l’assentiment des organisations de consommateurs. Le Gouvernement indique que cette évolution n’irait pas sans poser de problème juridique. On peut cependant considérer que le particulier devrait toujours avoir la possibilité de dénoncer une clause abusive.

S’agissant des transactions entre particuliers conclus par l’intermédiaire d’un professionnel, si l’objectif d’une protection comparable représente un idéal, des adaptations sont néanmoins indispensables. L’intermédiaire ne peut pas, en effet, offrir les mêmes garanties qu’un vendeur professionnel, notamment vis-à-vis du remplacement du bien. Une réflexion sectorielle semblable à celle qui a conduit la France à avoir une législation spécifique sur les sociétés de vente volontaire est nécessaire.

En ce qui concerne les nouvelles technologies et les biens et services à contenu numérique, la demande des consommateurs d’avoir les mêmes droits « en ligne et hors ligne » semble légitime. Néanmoins, une expertise est nécessaire pour prévoir ce qui peut être appliqué avec ou sans adaptation : garanties, droit de rétractation. Il faut bien identifier la nature des contrats, dont certains sont des contrats d’exploitation, d’utilisation, de mise à disposition de services à contenu numérique qui n’emportent pas nécessairement transfert de propriété et relations de consommateurs à vendeurs. Le débat s’élargit également à des éléments qui ne sont pas abordés pour les biens et services classiques : le droit à une technique neutre, le droit aux innovations technologiques, le droit à l’interopérabilité des contenus et des services notamment.

Le dernier élément concerne des recours collectifs, les class actions, peu présents en Europe, avec plusieurs exceptions au Portugal et en Suède notamment. Deux questions se posent : faut-il introduire ce dispositif au niveau national ? Faut-il le faire au niveau européen ?

S’agissant de la France, la lettre de mission adressée à Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, des finances et de l’emploi, prévoit la mise en place d’une action de groupe à la française. Les associations de consommateurs sont favorables au principe d’une telle action. Pour leur part, les représentants des entreprises craignent notamment la complexité et les risques d’abus. Globalement, la simple existence d’un dispositif peut cependant présenter un intérêt non pas tant punitif que dissuasif.

Sur le fond, il est possible d’envisager par ailleurs un autre modèle que le modèle américain et créer un « modèle français » qui donne aux consommateurs la possibilité de se défendre.

Au niveau européen, la Commission envisage une initiative créant une action de groupe selon une approche concurrentielle. La présidence portugaise organise pour sa part un colloque sur les actions de groupe le mois prochain. On peut ne pas partager les réserves du Gouvernement français sur l’absence de base juridique adéquate pour une intervention européenne en la matière. Le marché intérieur exige un niveau minimum d’organisation, notamment si les transactions transfrontalières se développent.

Si elles étaient créées, ces actions de groupe devraient être accessibles à tous, personnes physiques et personnes morales, concerner tous les secteurs de la vie économique et sociale, permettre la réparation de tous les préjudices subis et la restitution de toutes les sommes indûment perçues, sans préjuger, à ce stade, du fond d’un dispositif qui devrait respecter le principe d’un équilibre dans les relations entre les consommateurs et les entreprises.

M. Daniel Fasquelle a indiqué que l’action communautaire dans le domaine du droit de la consommation était intervenue assez tôt, dès les années soixante-dix. C’est d’ailleurs à partir des années soixante que ce droit s’est développé aux Etats-Unis. Le droit français – en particulier la loi de 1978 sur les clauses abusives – a d’ailleurs souvent servi de modèle au droit communautaire, élément qui mériterait d’être maintenu pour le futur.

Sur le fond, il convient de veiller à instaurer une plus grande cohérence de la terminologie juridique, notamment sur la notion même de consommateur, qui n’est toujours pas harmonisée.

Par ailleurs, les initiatives sur le droit de la consommation ne doivent pas conduire à détricoter, ou à déstabiliser, le droit des contrats, et plus généralement le droit civil.

S’agissant de l’action de groupe, la France dispose de l’action en représentation conjointe qui permet, sous certaines conditions, une action collective des consommateurs. Pour autant, on peut être favorable à l’institution d’une véritable action de groupe, qui s’avèrerait beaucoup plus efficace. Le cas du contentieux avec les opérateurs de téléphones mobiles pour ententes le montre effectivement. L’Union européenne pourrait d’ailleurs affirmer sa compétence pour légiférer en la matière, sur la base des dispositions régissant le droit à la concurrence, comme l’a envisagé le Livre vert présenté en décembre 2005 sur les actions en dommages et intérêts pour infraction aux règles communautaires sur les ententes et abus de position dominante.

M. Daniel Fasquelle a toutefois insisté sur la nécessité d’éviter que la Commission ne copie totalement la législation américaine.

Tout en s’associant aux observations de la rapporteure sur la protection des intérêts économiques des consommateurs, il a ensuite regretté que le Livre vert n’ait pas évoqué la protection de leurs intérêts dans le domaine de la sécurité et de la santé et a estimé que le volet, très important, des actions en justice ouvertes aux consommateurs au titre des achats transfrontaliers ne devait pas être négligé. C’est un domaine dans lequel le droit communautaire accuse un retard.

La rapporteure, après avoir déclaré partager les propos de M. Daniel Fasquelle sur l’action de groupe, a considéré qu’il importait effectivement d’approfondir la question du commerce par l’Internet. Le nombre peu élevé de consommateurs qui y recourent semble résulter de la plus grande complexité des litiges à résoudre et du risque de non respect de leurs droits dans ce domaine.

Le Président Pierre Lequiller a indiqué que la Délégation pourrait se saisir à l’avenir de la question du commerce par l’Internet.

M. Régis Juanico a souligné l’intérêt qu’il y aurait à simplifier la terminologie employée, afin que les parlementaires eux-mêmes puissent plus facilement expliquer aux citoyens les enjeux du droit de la consommation. Puis il a demandé si les recours des consommateurs devraient être introduits devant les juridictions nationales ou si ces derniers pouvaient saisir directement la juridiction communautaire.

M. Daniel Fasquelle a rappelé que le droit communautaire se bornait à harmoniser les législations nationales et que ce sont les juridictions des Etats membres qui étaient compétentes.

M. Jacques Myard a fait observer que la question posée par M. Régis Juanico illustrait – ce qu’il a qualifié de fausse bonne idée – la croyance selon laquelle seule une Cour fédérale serait en mesure d’accorder la meilleure protection, alors que, conformément au principe de subsidiarité, il incombe au justiciable de saisir les juridictions nationales, parce qu’elles rendent une justice de proximité.

Sous le bénéfice de ces observations, la Délégation a pris acte du Livre vert.

III. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Délégation a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Point A

Aucune observation n’ayant été formulée sur les textes suivants, la Délégation les a approuvés.

Ø Espace de liberté, de sécurité et de justice

- Livre vert sur les technologies de détection dans le travail des services répressifs, des douanes et d'autres services de sécurité (document E 3259) ;

- projet de décision du Conseil concernant la mise en oeuvre de la décision 2007/.../JAI relative à l'approfondissement de la coopération transfrontière, notamment en vue de lutter contre le terrorisme et la criminalité transfrontière (document E 3599).

Ø PESC et relations extérieures

- proposition de décision du Conseil relative à la conclusion du protocole modifiant l'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et le Royaume de Thaïlande concernant la production, la commercialisation et les échanges de manioc (document E 3618) ;

- proposition de décision du Conseil concernant la conclusion d'un accord entre la Communauté européenne et la Fédération de Russie relatif au commerce de certains produits sidérurgiques (document E 3634) ;

- proposition de règlement du Conseil concernant la gestion de restrictions à l'importation de certains produits sidérurgiques en provenance de la Fédération de Russie (document E 3635).

Ø Politique sociale

- proposition de Règlement du Conseil visant à étendre les dispositions du Règlement (CE) n° 883/2004 et du Règlement (CE) n° [...] aux ressortissants des pays tiers qui ne sont pas déjà couverts par ces dispositions uniquement en raison de leur nationalité (document E 3612) ;

- proposition de décision du Parlement européen et du Conseil concernant la mobilisation du Fonds de solidarité de l'Union européenne, en application du point 26 de l'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission sur la discipline budgétaire et la bonne gestion financière (document E 3619).

Ø Questions budgétaires et fiscales

- projet de budget rectificatif d'installation et de fonctionnement du C.SIS pour 2007 (document E 3601) ;

- proposition de décision du Conseil autorisant la France à appliquer un taux d'imposition réduit à l'essence sans plomb utilisée comme carburant et mise à la consommation dans les départements de Corse conformément à l'article 19 de la directive 2003/96/CE (document E 3609).

Ø Transports

- proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'interopérabilité du système ferroviaire communautaire (document E 3377) ;

- proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2004/49/CE concernant la sécurité des chemins de fer communautaires (document E 3378).

Point B

Ø Agriculture

- proposition de règlement du Conseil portant sur la modification du règlement (CE) n° 1290/2005 relatif au financement de la politique agricole commune (document E 3480).

M. Jean Dionis du Séjour, rapporteur, a rappelé que cette proposition s’inscrit dans le cadre général de la protection des intérêts financiers de l’Union européenne et comporte deux parties.

La première concerne la publication d’informations relatives aux bénéficiaires des aides du Fonds européen agricole de garantie (FEOGA) et du Fonds européen pour le développement rural (FEADER). Selon le règlement (CE) 1995 /2006, la Commission communique les informations sur les bénéficiaires des fonds fournies par les entités auxquelles les tâches d’exécution du budget sont déléguées, à charge pour les Etats membres d’assurer une publication annuelle des noms des bénéficiaires des fonds en provenance du budget. Devant les réticences de certains Etats – seuls treize pays ont mis en place des registres par le biais du site Internet des institutions européennes, la France ayant seulement commencé à publier l’année dernière les noms des bénéficiaires les plus importants – il était impératif de préciser les obligations relatives à la mise en œuvre de la transparence.

La Commission considère que la communication de la liste des bénéficiaires doit être assurée par les Etats membres. La France estime à l’inverse que la publication doit être du ressort de la Commission et fait valoir plusieurs arguments. Le rapporteur a précisé ne pas partager l’argument selon lequel seule une publication par la Commission permettrait une publication centralisée et harmonisée, ni celui lié aux difficultés de mise en place de bases de données dans certains Etats membres. En revanche, les éventuelles difficultés résultant de l’application dans les Etats membres de certains droits nationaux limitant l’accès aux droits administratifs et aux données personnelles méritent d’ être prises en compte.

Le point de vue de la Commission apparaît le plus solide, les Etats membres étant effectivement les mieux placés pour mettre en œuvre cette transparence. Toute l’application de la politique agricole commune, notamment dans les droits à paiement unique (DPU) est en effet du ressort des Etats membres. Il est en conséquence difficile de refuser cette logique relevant de la subsidiarité. Il faut toutefois cadrer les obligations à la charge des Etats membres afin de les limiter à la publication d’un certain nombre d’informations et veiller à ce que ces dispositions soient en accord avec notre législation relative aux données personnelles. Sur ce point, une saisine de la Commission nationale de l’informatique et des libertés devrait être envisagée.

La deuxième partie de la proposition modifie la procédure d’apurement de conformité en cas de contentieux entre la Commission et un Etat. Elle prévoit un mécanisme continu de correction financière dès lors qu’un Etat a reçu deux décisions entraînant des corrections financières, remettant en cause le principe du débat contradictoire avec la Commission. Il serait souhaitable que la procédure contradictoire soit réactivée dès lors que l’Etat membre apporte des éléments nouveaux. Enfin, cette proposition instaure une dérogation à la règle dite des vingt-quatre mois en cas de contrôle, en application de laquelle seules figurent dans l’assiette de la correction financière les dépenses réalisées dans la période de vingt-quatre mois précédant le premier constat d’irrégularité. La Commission considère à juste titre que l’application de cette règle peut faire échapper au contrôle certaines irrégularités. Il convient cependant de s’assurer un encadrement strict de cette faculté de dérogation.

Sur la publication de la liste des bénéficiaires des aides agricoles, M. Hervé Gaymard a indiqué qu’il avait une opinion dissidente de celle du rapporteur. Il a d’abord fait observer que les agriculteurs, tant français qu’européens, n’étaient pas demandeurs du système des aides directes quand il s’est substitué au mécanisme de soutien des prix. Derrière le slogan que l’on peut considérer comme facile : « On veut des prix pas des primes », il y a assurément un fond de vérité. Par ailleurs, il s’est dit opposé à tout ce qui fustige et est susceptible de désigner à la vindicte populaire. Ces aides sont des aides légales auxquelles les bénéficiaires ont droit et qui résultent d’une politique décidée et assumée par les autorités publiques. Pour cette raison, il est gênant de désigner des « coupables » potentiels.

Il a estimé que la transparence est nécessaire afin de donner aux citoyens et aux contribuables des informations sur le coût de la politique agricole commune. Ainsi, quand il était ministre de l’agriculture, il indiquait lors de ses visites dans les différents départements, le montant total des aides accordées, ce qui permettait en appliquant une règle de trois, d’avoir une idée assez précise du montant accordé par exploitation. En revanche, il a souligné que la transparence nominative est contraire à l’idée que l’on peut se faire des droits de l’homme et de la liberté individuelle. Enfin, il a rappelé que de nombreuses exploitations ayant la forme juridique de groupement juridique d’exploitation en commun (GAEC), la comparaison entre structures collectives et individuelles biaisent inévitablement le raisonnement.

Pour toutes ces raisons, il a émis des réserves sur la transparence totale.

Au Président Pierre Lequiller qui faisait observer que l’objet de la proposition était de déterminer le responsable de la publication, M. Hervé Gaymard a indiqué avoir voulu saisir l’occasion de ce débat pour évoquer, de manière plus générale, le problème de la transparence.

Mme Chantal Brunel a relevé que, lorsqu’une entreprise perçoit une aide, celle-ci est connue. Il n’y a donc pas de raison de cacher les aides agricoles alors que dans d’autres secteurs économiques, les aides sont identifiées, fléchées et remboursées si les critères d’attribution ne sont pas remplis.

M. Jean Dionis du Séjour, rapporteur, a indiqué partager l’opinion de M. Hervé Gaymard sur la philosophie sous-tendue par le slogan «Des prix, pas des primes » et a espéré que ce débat sera pris en compte à l’occasion du bilan de santé de la PAC. La transparence est cependant indispensable afin de mettre fin aux fantasmes existant autour des aides agricoles. Il est vrai que de grandes exploitations du Nord sont les bénéficiaires importants de la PAC et la lumière doit être faite sur ces réalités. Le débat sur la responsabilité de la publication doit être tranché en faveur des Etats membres. Il souhaiterait que dans l’application de ces dispositions, il soit tenu compte des données nationales spécifiques et que l’intervention de la CNIL soit prévue. En conclusion, il a fait remarquer que le sujet est un sujet éminemment sensible comme celui des OGM ainsi que l’ont montré les débats au sein de la Délégation la semaine dernière. D’une façon générale, il faut prendre garde à ce que les informations mises en ligne, par exemple la publication des types de productions de maïs ou de soja, puissent être utilisées par des groupes de pression . Compte tenu du risque de débats frontaux, la sagesse veut que ces dispositifs soient encadrés juridiquement par les Etats membres.

Sous le bénéfice de ces observations, la Délégation a approuvé ce texte.

Ø Pêche

- proposition de règlement du Conseil relatif à la conclusion de l'accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et la République du Mozambique (document E 3615) ;

- proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres relatif à l'application provisoire de l'accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et la République du Mozambique (document E 3616).

Ces deux textes ont été approuvés.

Enfin, la Délégation a pris acte de l’approbation selon la procédure d’examen en urgence, des quatre textes suivants :

- position commune du Conseil modifiant la position commune 2005/440/PESC relative à des mesures restrictives à l'encontre de la République démocratique du Congo (document E 3637) ;

- projet d'action commune relative à l'opération militaire de l'Union européenne en République du Tchad et en République centrafricaine (document E 3638) ;

- position commune 2007/.../PESC du ... reconduisant la position commune 2004/694/PESC relative à de nouvelles mesures à l'appui de la mise en oeuvre effective du mandat du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY (document E 3639) ;

- proposition de décision du Conseil relative à la signature et à l'application provisoire d'un protocole additionnel à l'accord sur le commerce, le développement et la coopération entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République d'Afrique du Sud, d'autre part, pour tenir compte de l'adhésion à l'Union européenne de la République de Bulgarie et de la Roumanie (document E 3641).

IV. Audition, ouverte à la presse, de M. Leonard Orban, Commissaire européen chargé du multilinguisme

Le Président Pierre Lequiller a remercié le Commissaire d’avoir bien voulu venir s’exprimer devant la Délégation et a rappelé que celle-ci s’était saisie du sujet du multilinguisme en 2003, à travers un rapport d’information présenté par M. Michel Herbillon. Il a ensuite souligné que la diversité linguistique était inscrite dans le projet de traité constitutionnel et qu’elle le serait dans le traité modificatif.

Il a interrogé le Commissaire sur les grandes lignes de son action, puis a indiqué que la journée européenne des langues organisée le 26 septembre dernier avait été l’occasion d’insister sur la nécessité de l’apprentissage des langues dans l’enseignement mais aussi tout au long de la vie. Dans le monde des affaires, les langues revêtent une grande importance. Le système d’éducation en France ne permet pas encore d’atteindre l’objectif de connaissance de deux langues étrangères au moins, fixé par le Conseil européen de Barcelone en 2002.

Enfin, le Président Pierre Lequiller a jugé regrettable que la pratique du français dans les institutions européennes ne soit pas plus développée.

M. Leonard Orban, Commissaire européen chargé du multilinguisme, a souligné que la diversité linguistique de l’Union européenne constitue une richesse unique. Aujourd’hui, avec 27 Etats membres et 23 langues officielles – sans compter plus de soixante langues régionales et minoritaires –, cette diversité linguistique prend une dimension nouvelle. Ces différentes langues n’ont pas toutes le même parcours historique, ni le même rayonnement, mais elles ont toutes une légitimité et une égale dignité.

La langue parlée par une personne fait partie intégrante de son identité. Elle est l’expression la plus directe de sa culture. C’est également un outil de communication essentiel. Il est nécessaire que les langues ne soient pas perçues comme des obstacles, mais comme des ponts entre les individus.

Ces mots doivent avoir une résonance particulière dans le contexte de la mondialisation : il faut garder à l’esprit que le multilinguisme peut permettre, et même doit contribuer au développement économique, social et culturel de l’Union européenne.

Le Commissaire a ensuite mentionné les efforts de la Commission pour atteindre elle-même son objectif de multilinguisme et d’accessibilité aux citoyens de l’Union à travers la traduction des documents produits par les institutions. Il a indiqué que la Commission appréciait particulièrement l’action de la France qui plaide pour le respect du principe d’égalité pour toutes les langues officielles de l’Union. Bien évidemment, la mise en pratique de cette idée oblige à relever de nombreux défis techniques et l’équilibre entre la demande énorme et nos capacités est difficile à trouver.

Le Commissaire a souligné que la Commission travaillait actuellement à une analyse d’impact et réfléchissait aux solutions à développer pour répondre à cette question cruciale.

La politique du multilinguisme, au niveau européen, a connu une accélération notable au cours des dernières années, notamment sous l’impulsion du Président José Manuel Barroso. Cette évolution a encore été renforcée avec la création en janvier 2007 d’un portefeuille spécifique consacré au multilinguisme.

Le Commissaire a rappelé que dès le mois de février, il avait présenté au Parlement européen la ligne de conduite qu’il souhaite suivre et les raisons pour lesquelles une politique du multilinguisme plus clairement définie et plus cohérente est nécessaire.

Au Conseil européen de Barcelone en 2002, les Etats membres se sont fixé pour objectif que les citoyens européens apprennent au moins deux langues étrangères. Dans cette droite ligne, en 2003, la Commission a lancé le Plan d’action 2004–2006 pour la promotion de l’apprentissage des langues et la diversité linguistique. Le but de ce plan était de promouvoir le multilinguisme en Europe en coopération avec les Etats membres et via des actions concrètes dans le cadre des programmes d’éducation et de formation.

Un rapport sur la mise en œuvre de ce plan vient d’être publié. Les résultats sont assez encourageants et démontrent qu’une coopération fructueuse entre la Commission et les Etats membres est possible et positive dans le secteur de l’enseignement et l’apprentissage des langues.

Le Commissaire a remercié les autorités françaises pour l’excellente coopération avec la Commission dans ce travail ; une contribution exhaustive sur la situation de l’enseignement des langues en France a été envoyée.

Au cours de ces dernières années, en France, le système d’éducation a profondément été réformé. Ces réformes ont notamment permis de donner plus de place à l’enseignement de deux langues étrangères et d’instaurer un système transparent d’évaluation des compétences linguistiques. Le Commissaire s’est félicité de cette démarche, dont certains aspects sont présentés comme « bonne pratique » dans le rapport de mise en œuvre du Plan d’Action.

Il s’est déclaré persuadé que ces efforts vont continuer et a invité les autorités françaises à utiliser au mieux les programmes européens, en particulier le programme d’éducation et formation tout au long de la vie dont le multilinguisme est un objectif spécifique. Il s’agit d’encourager l’apprentissage des langues dès le plus jeune âge, tout au long du parcours scolaire et aussi durant la vie professionnelle.

Ainsi, mieux armés grâce à une connaissance accrue des langues, les citoyens peuvent accéder à de meilleures opportunités professionnelles ou à des offres de travail à l’étranger.

Pour les entreprises européennes, un personnel multilingue peut ouvrir la voie aux marchés européen et mondial. Les langues sont un moyen d’augmenter leur compétitivité.

Une récente étude confirme que des opportunités commerciales concrètes sont restées inexploitées en Europe en raison du manque de compétences linguistiques dans les entreprises.

La Commission souhaite sensibiliser le monde économique sur l’impact des compétences linguistiques sur les performances des entreprises, sur le potentiel de croissance qu’une meilleure maîtrise des langues étrangères induit. Le Commissaire a indiqué qu’il avait récemment organisé à Bruxelles une conférence intitulée : « Les langues font nos affaires », consacrée aux langues en tant qu’atout concurrentiel pour l’Europe.

Une des principales conclusions de cette conférence est que, dans le monde des affaires internationales, il ne suffit pas de maîtriser l’anglais.

Cette idée a été répétée à maintes reprises par les participants, y compris les Britanniques, dont la vaste majorité était des représentants du monde des affaires. Le lien entre compétences linguistiques en différentes langues – notamment la langue du consommateur – et la performance économique des entreprises devient très clair.

Le Commissaire a souligné qu’il avait créé un forum des entreprises sur le multilinguisme pour rechercher les moyens de renforcer les compétences linguistiques dans les entreprises, afin de les aider à pénétrer de nouveaux marchés.

La Commission veille à ce que la politique du multilinguisme soit associée à d’autres politiques de l’Union, l’éducation mais aussi la culture. Le Commissaire a indiqué qu’à son initiative avait été constitué un groupe d’intellectuels, présidé par l’écrivain Amin Maalouf. Il a pour mandat de définir la contribution du multilinguisme à l’Année européenne du dialogue interculturel en 2008 et au-delà.

La journée européenne des langues a lieu tous les ans depuis 2001 et s’est tenue le 26 septembre dernier. Des centaines de manifestations, à travers toute l’Europe, ont célébré notre diversité linguistique. A cette occasion, le « cyber trophée des langues » a été attribué au Sénat français pour la traduction de son site Internet en anglais, allemand, espagnol, portugais et italien mais aussi en arabe et en chinois. Le site Internet de l’Assemblée nationale est également un exemple d’application pratique du multilinguisme, avec une version multilingue en anglais, allemand, italien et espagnol.

A l’occasion de cette journée européenne, le Commissaire a présenté un rapport élaboré par le groupe de haut niveau pour le multilinguisme. Le but du travail de ce groupe, constitué d’universitaires travaillant dans ce secteur, est de présenter des recommandations pour le développement des futures politiques.

Pour la poursuite des efforts dans ce domaine, il est très important de se rappeler que la culture et l’histoire de l’Europe sont aussi fondées sur l’histoire de ces langues.

La conservation de cet héritage commun est inscrite au cœur de la construction européenne depuis son origine et les citoyens européens doivent pouvoir s’approprier le plus largement possible son patrimoine. Il est donc nécessaire que les gouvernements des Etats membres approfondissent leur coopération. Une conférence ministérielle sera organisée au début de l’année prochaine pour évaluer les progrès accomplis et débattre des possibilités de collaboration dans le futur.

L’implication des citoyens dans ce débat est également essentielle et c’est pourquoi la Commission organise une consultation sur Internet concernant le futur des langues en Europe.

Le Commissaire a indiqué qu’il présenterait pendant la présidence française du second semestre 2008 une communication qui exposera les grandes lignes d’une nouvelle stratégie pour le multilinguisme en Europe. Elle mettra en exergue le caractère transversal du multilinguisme et son articulation avec d’autres politiques européennes, telles que la culture, la justice et la sécurité, l’emploi et la cohésion sociale. Il a souligné qu’il comptait sur l’appui des autorités françaises pour cette tâche.

En conclusion, le Commissaire a cité Stendhal qui disait que « le premier instrument du génie d’un peuple, c’est sa langue ». Il s’est déclaré convaincu que le multilinguisme est une chance pour la langue française, même si en France on est parfois irrité par la place croissante de l’anglais comme langue de communication internationale. Il a observé qu’en tant que Commissaire européen en charge du multilinguisme, il ne lui appartenait pas de prendre position pour une langue ou pour une autre, mais qu’il appréciait toute action en faveur de chaque langue européenne et a porté son plein soutien aux autorités françaises pour tous leurs efforts en faveur du multilinguisme.

Après que le Président Pierre Lequiller eut remercié M. Leopold Orban de son intervention et lui a dit avoir beaucoup apprécié qu’il se soit exprimé en français devant la Délégation, un débat a suivi l’exposé du Commissaire européen.

M. Michel Herbillon s’est associé aux propos du Président et a rappelé que beaucoup de Roumains parlent encore notre langue.

Après s’être déclaré en accord avec les différents objectifs et programmes présentés et mis en place par le Commissaire européen, il a souligné l’importance de l’existence d’un Commissaire chargé du multilinguisme.

L’originalité de l’Union européenne est d’avoir posé le principe de l’égalité de toutes les langues même s’il y a une prédominance croissante de l’anglais. Cette évolution est sensible depuis la parution de son Rapport sur la diversité linguistique dans l’Union européenne et le recul significatif du français et des autres langues par rapport à l’anglais est préoccupant. Ce reflux date de 1995, époque du « Petit élargissement » et s’est aggravé au fil du temps, le dernier élargissement ayant fait empirer la situation.

Après que M. Leopold Orban eut indiqué que lors des Forums qu’il organise, il invite chaque intervenant à s’exprimer dans sa langue maternelle, M. Michel Herbillon a souligné que la langue appartient au patrimoine culturel de chacun et est un élément essentiel de l’identité. C’est également un élément utile des relations internationales et économiques.

La promotion des différentes langues européennes passe par l’adoption de mesures concrètes qui peuvent être de deux ordres.

Tout d’abord, même si cela n’est pas de la compétence de l’Union européenne, il faut rendre obligatoire l’acquisition de deux langues en Europe car, sans cette mesure, c’est l’anglais seul qui est appris. A l’époque de la rédaction de son rapport, sept pays seulement sur vingt-cinq avaient institué l’obligation de l’apprentissage de deux langues étrangères. Cela était le cas de l’Espagne où le nombre de jeunes apprenant le français a ainsi été multiplié par cinq. L’avenir des langues européennes est d’être l’une des premières langues après l’anglais et il faut promouvoir l’apprentissage des langues dans le système éducatif.

Ensuite il faut veiller à la formation des fonctionnaires de l’Union européenne. A cet égard il a fait le distinguo entre les fonctionnaires des anciennes générations qui parlaient le français et ceux des générations récentes qui ne parlent que l’anglais.

M. Jacques Myard, après s’être associé aux propos M. Michel Herbillon, a souligné que les offres d’emploi de la Commission précisent que l’anglais est la première langue devant être parlée. Il a estimé qu’il faut être vigilant pour maintenir l’égalité de traitement des différentes langues, qui est une règle non écrite.

Concernant les langues de travail dans l’Union européenne, il s’est déclaré favorable au multilinguisme. Mais il a critiqué les fonctionnaires français qui ne s’expriment pas dans leur langue maternelle dans les réunions internationales et a considéré qu’un tel comportement devrait être sanctionné.

Il a conclu son intervention en notant que s’il ne sera pas possible à chacun de parler vingt-trois langues, le problème le plus important était celui des langues de travail au sein de l’Union européenne.

M. Pierre Forgues a félicité M. Leopold Orban pour sa maîtrise du français. Il a déclaré que ce sujet lui était très cher et que le devoir de l’Union européenne est de défendre toutes les langues. Il a estimé que les fonctionnaires français devaient s’exprimer en français en soulignant qu’ils avaient un certain complexe qui les poussait à s’exprimer en anglais. Chaque européen, tout en parlant plusieurs langues, devrait avoir la fierté de s’exprimer dans sa langue maternelle. Il a souhaité qu’il y ait au minimum deux langues étrangères obligatoires en Europe.

M. André Schneider a complimenté le Commissaire européen pour s’être exprimé de façon remarquable en français et a souligné que la langue faisait partie de l’identité culturelle et économique d’un pays.

Il a rappelé qu’il avait fait partie des personnes de la délégation française au Conseil de l’Europe qui s’étaient retirées quand un fonctionnaire français s’était exprimé en anglais devant cette assemblée.

Il a estimé qu’il avait pu mesurer à l’occasion de ses activités professionnelles de directeur d’un établissement d’enseignement combien les enseignants de langues étrangères devaient être mieux formés en soulignant aussi la nécessité que les jeunes français parlent mieux le français.

M. Daniel Fasquelle a souligné que la nécessité de préserver ou développer l’apprentissage obligatoire de deux langues étrangères est, en fait, la condition pour sauvegarder ce qui fait l’essence de la culture européenne : sa richesse et sa diversité. Sans ouverture aux cultures et donc aux langues de nos partenaires, il n’y a plus d’Europe. Il faut cependant se garder de positions extrêmes qui pourraient précisément conduire à l’inverse de l’effet recherché. A défendre toutes les langues, on risque fort, au final, de ne promouvoir que l’anglais. Il serait irréaliste et contreproductif de ne pas savoir faire des choix, avec pragmatisme, sur les langues que l’on souhaite conserver dans chaque secteur. Cette démarche avait présidé au choix de cinq langues obligatoires dans le règlement sur les marques européennes. De même, le protocole de Londres sur les brevets retient, sagement, quelques langues obligatoires pour ne pas toutes les sacrifier à l’anglais. Le cœur du problème devient dans ce contexte de s’assurer que l’usage de plusieurs langues, mêmes sélectionnées, ne soit pas factice. Il est ainsi inquiétant de constater que de nombreux fonctionnaires d’origine française à la Commission préfèrent souvent rédiger leurs documents en anglais plutôt qu’en français, pourtant l’une des trois langues de travail de la Commission, au motif que leurs collègues seraient incapables de comprendre des contributions écrites dans la langue de Racine.

Mme Marietta Karamanli, après avoir témoigné de la puissance de l’attachement que l’on peut ressentir pour une langue choisie qui n’est pas sa langue maternelle, a relevé que l’encouragement de la pratique des langues étrangères ne peut seulement dépendre de dispositions normatives. Il faut aussi l’assortir de moyens conséquents. Chacun sait que les séjours prolongés sont les meilleurs facteurs d’assimilation des langues étrangères. Or, trop peu de moyens sont encore aujourd’hui consacrés au développement de ce type de séjour pour les enfants et les jeunes.

Mme Arlette Franco a relevé qu’à ses yeux, l’essentiel est de parvenir à un respect réciproque. Du point de vue des méthodes de travail, ce respect passe par la faculté laissée à chacun de s’exprimer dans sa langue maternelle. Ainsi, à titre d’exemple, le comité de travail des Pyrénées est parvenu à un système satisfaisant dans lequel chaque participant peut utiliser sa langue, qu’elle soit le catalan, le basque, l’espagnol, le français, etc. et être compris par tous, au grand profit de la collaboration mutuelle.

M. Céleste Lett a estimé pour sa part que l’attachement d’un pays à la promotion de sa langue à l’étranger est souvent inversement proportionnel au respect qu’il accorde à ses langues régionales minoritaires. Il a témoigné de la violence avec laquelle avait été combattue, lorsqu’il était enfant, sa langue maternelle, le « francisque mosellan », mais aussi de l’apport que fut pour lui cette langue, grâce notamment à laquelle il bénéficia d’un accès plus aisé et naturel à l’allemand qui lui permet notamment d’entretenir de nombreux échanges frontaliers dans lesquels chacun s’exprime dans sa langue tout en étant compris de tous. Or, les jeunes franco-allemands d’aujourd’hui, privés de cette chance, tendent aujourd’hui à communiquer entre eux exclusivement en anglais, ce qui est évidemment regrettable et appauvrissant culturellement.

Les moyens de lutter contre ce déclin des langues européennes sont à rechercher du côté de l’enfance, en particulier en maternelle où l’acclimatation des langues est plus aisé. Les programmes d’échanges de « native speakers » en particulier, grâce auxquels les enfants sont au contact d’étrangers s’exprimant dans leur langue, devraient être puissamment encouragés, ce qui rend probablement nécessaire d’harmoniser dans une certaine mesure le profil des enseignants (les professeurs des écoles français, par exemple, peuvent enseigner à des enfants dont l’âge va de 3 à 12 ans tandis que leurs homologues allemands sont concentrés sur des classes d’âge plus restreintes, ce qui obère les programmes d’échange).

Le Président Pierre Lequiller a observé que le nombre des interventions de membres de la Délégation illustrait bien la sensibilité des parlementaires français sur la question linguistique, et a demandé des précisions sur l’apprentissage d’au moins deux langues européennes pendant la scolarité.

En réponse, le Commissaire européen a fait part des éléments suivants.

La question du multiliguisme est au niveau communautaire une question essentielle et fort intéressante, qui justifie la compétence d’un Commissaire européen, en dépit des scepticismes qui ont pu s’exprimer lors de la création du poste. La dimension politique est très importante. La sensibilité à la langue est très forte en raison de son lien avec l’expression des idées.

Lorsque l’on parle de la prédominance de l’anglais au sein des institutions communautaires, il ne faut pas négliger que la langue française détient une place privilégiée au sein de ces mêmes institutions.

S’agissant de la Commission, les trois langues de travail et d’interprétation sont le français, l’anglais et l’allemand. Si, lors des réunions, une majorité des Commissaires européens s’exprime en anglais, un tiers environ le fait en français. Par ailleurs, à la Cour de justice, la langue des délibérations est le français.

Par ailleurs, si la langue de travail entre les fonctionnaires communautaires est souvent l’anglais et si les trois quarts des documents sont rédigés directement en anglais, notamment parce que les ressortissants des nouveaux membres le connaissent, la solution passe par une incitation des fonctionnaires de la Commission, du Parlement européen et du Conseil à apprendre le français, notamment grâce à des stages comme celui qui existe déjà pour les Commissaires. Les Commissaires ont par ailleurs pris une décision importante, celle d’obliger les fonctionnaires à maîtriser trois langues pour leur avancement. La question est de savoir quelles seront ces trois langues. Cela dépendra de la politique française en la matière.

Sur les publications de la Commission, il n’est pas exact de dire que les documents ne sont le plus souvent publiés qu’en anglais. La situation a d’ailleurs été améliorée pour le site Internet, même si celui-ci donne encore l’impression que la majorité des documents ne sont diffusés qu’en anglais.

S’agissant de l’apprentissage, le principe de subsidiarité s’oppose à une intervention communautaire pour obliger que l’enseignement délivré dans les Etats membres donne accès à deux langues étrangères européennes. La sensibilité est très forte sur cette question. Le Royaume-Uni notamment n’a pas de motivation particulière, ce qui est un défi pour ses ressortissants mais aussi pour le reste de l’Europe.

La Commission doit donc s’en tenir à la promotion du message suivant lequel un tel apprentissage doit être obligatoire. Le rapport sur les résultats du plan d’action 2004-2006 fait ainsi apparaître que certains Etats ont mis en œuvre ce principe, notamment la Roumanie.

Par ailleurs, l’égalité entre les langues officielles de l’Union européenne est importante. C’est un élément de la démocratie et de l’accès au droit. La moitié des européens ne comprennent que leur langue maternelle. L’Union européenne n’est pas les Etats-Unis et le projet européen tient compte de la diversité. Il est donc essentiel de préserver l’égalité de traitement entre les langues et de ne pas modifier le règlement de 1958 qui la prévoit.

Concernant les séjours linguistiques, beaucoup de voix se sont élevées contre le programme Erasmus lors de son lancement par l’Union européenne alors qu’il a été un très grand succès. Il faut élargir ce programme et augmenter ses moyens financiers pour donner plus de chances au développement de la connaissance des langues.

Le Commissaire a ensuite évoqué l’expérience espagnole des trois langues régionales couvertes par un programme semi-officiel grâce auquel, si un citoyen envoie un document en catalan, basque ou galicien, l’Union européenne est obligée de répondre dans la même langue et les coûts sont couverts par le Gouvernement espagnol.

En ce qui concerne les langues régionales, la Commission a ouvert depuis le 1er janvier 2007 un programme finançant l’apprentissage de toutes les langues parlées dans l’Union européenne, y compris des projets relatifs à la promotion des langues régionales.

L’harmonisation des politiques d’enseignement n’est pas possible. En revanche, il est possible d’identifier puis de diffuser les meilleurs projets comme il en existe beaucoup en France.

L’apprentissage des langues étrangères a fait l’objet d’un rapport très intéressant du groupe à haut niveau sur le multilinguisme montrant la nouvelle réalité de son développement.

Le Commissaire a conclu en indiquant sa décision de présenter sa nouvelle stratégie en septembre 2008, durant la présidence française, sur l’appui de laquelle il compte pour développer une politique à long terme du multilinguisme.

Le Président Pierre Lequiller a déclaré qu’à chacune de ses rencontres avec le Président José Manuel Barroso, il soulignait la nécessité d’augmenter les crédits consacrés à la culture et de développer la coopération interculturelle et interlinguistique dans un domaine où s’applique la subsidiarité, car ce qui fera l’Europe, ce sera que les jeunes connaissent les langues et les autres pays. Il a enfin salué la foi et l’enthousiasme du Commissaire européen en faveur du multilinguisme.