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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Troisième séance du mardi 26 février 2013

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de Mme Sandrine Mazetier

1. Débat sur les dispositifs d’efficacité énergétique et de maîtrise de la demande dans le bâtiment

M. Christophe Bouillon

Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement

M. Jean-Paul Chanteguet

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

M. François Brottes

Mme Delphine Batho, ministre

M. Jean-Marie Tetart

Mme Cécile Duflot, ministre

M. Martial Saddier

Mme Cécile Duflot, ministre

M. Frédéric Reiss

Mme Cécile Duflot, ministre

M. Yannick Favennec

Mme Cécile Duflot, ministre

M. Yannick

Mme Cécile Duflot, ministre

M. Denis Baupin

Mme Delphine Batho, ministre

M. Denis Baupin

Mme Cécile Duflot, ministre

M. Philippe Plisson

Mme Cécile Duflot, ministre

M. Daniel Boisserie

Mme Cécile Duflot, ministre

Mme Isabelle Le Callennec

Mme Cécile Duflot, ministre

M. Jacques Krabal

Mme Delphine Batho, ministre

M. Jacques Krabal

Mme Delphine Batho, ministre

M. André Chassaigne

Mme Cécile Duflot, ministre

M. André Chassaigne

Mme Delphine Batho, ministre

M. Fabrice Verdier

Mme Delphine Batho, ministre

M. Philippe Bies

Mme Cécile Duflot, ministre

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Sandrine Mazetier
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Débat sur les dispositifs d’efficacité énergétique et de maîtrise de la demande dans le bâtiment

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle le débat sur les dispositifs d’efficacité énergétique et de maîtrise de la demande dans le bâtiment.

Je vous rappelle que la Conférence des présidents a fixé à deux minutes la durée maximale de chaque question.

Nous commençons par plusieurs questions du groupe SRC.

La parole est à M. Christophe Bouillon.

M. Christophe Bouillon. Madame la présidente, madame la ministre de l’égalité des territoires et du logement, madame la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, nous nous accordons tous ici sur l’urgence qui nous commande d’intervenir massivement en faveur de la rénovation thermique des logements. Il nous faut en effet faire sortir très rapidement un grand nombre de nos concitoyens de la situation de précarité énergétique dans laquelle ils vivent aujourd’hui. L’extension des tarifs sociaux du gaz et de l’électricité est assurément un premier pas. La rénovation des logements sera une seconde étape, primordiale. Pour être réellement efficace, elle devra combiner un certain nombre d’exigences. C’est précisément sur ces exigences que je souhaite vous interroger.

En premier lieu, je voudrais des précisions sur les critères de priorité qui pourraient être appliqués aux ménages en fonction de leurs situations. Certains ménages sont en effet multi-exposés à la précarité énergétique : de par l’ancienneté de leur logement, ou en raison de leur isolement, de leur éloignement même des services publics, des commerces et des bassins d’emplois, qui les oblige souvent à recourir à deux véhicules. C’est le cas dans de nombreux ménages des zones périurbaines, cette France des pavillons qui souffre pleinement du renchérissement de l’énergie. Quels critères pourraient être instaurés afin de cibler en priorité ces ménages dont la facture énergétique est largement contrainte ?

Ma deuxième question est la suite logique de la précédente : comment garantir une présence et un accompagnement en continu auprès de ces ménages dont certains sont déjà en grande difficulté ? L’éloignement des services publics, l’isolement, y compris social, ne risque-t-il pas d’être un obstacle à l’accord pour la rénovation du logement mais également au bon suivi des projets ? Quel rôle pourront jouer les communes au travers des CCAS – les centres communaux d’action sociale –, mais également les conseils généraux au travers des centres médico-sociaux, pour accompagner le service public de la transition énergétique ?

Enfin, le dernier point de mon intervention porte sur le volet emploi de l’efficacité énergétique. Celui-ci représente un vivier considérable d’emplois non délocalisables. Comment permettre aux populations locales de profiter de ce vivier et de contribuer elles-mêmes à la rénovation thermique de leurs lieux de vie ? À l’image de ce qui se fait aujourd’hui dans les marchés publics, avec l’introduction possible de clauses d’insertion ou de clauses d’emploi local, nous situerons-nous dans la même démarche ou est-il possible d’envisager un dispositif comparable ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement. Monsieur le député, votre question comporte plusieurs aspects. Le premier, qui a trait à la précarité énergétique, est un sujet absolument central : 13 % de la population française est aujourd’hui confrontée à une telle situation. Et même si des efforts sont faits en faveur d’une tarification adaptée – je salue à cet égard le président Brottes –, ils sont insuffisants au regard de l’augmentation du coût de l’énergie. C’est pourquoi Delphine Batho et moi-même avons souhaité poursuivre et renforcer le programme « Habiter mieux », à destination prioritaire des familles modestes, en nous attaquant à une des difficultés qui a conduit à une sous-consommation de ce programme, à savoir le reste à charge, de fait absolument bloquant pour des ménages en situation de grande précarité. Nous réfléchissons à un reste à charge qui soit proportionnel au revenu des ménages au lieu d’un reste à charge fixe, pour rendre supportable leur participation. Telle est la piste de travail sur laquelle nous avançons.

Vous avez évoqué la question de l’emploi, et c’est en effet un enjeu décisif et global, parce que l’objectif fixé par le Président de la République de 500 000 rénovations thermiques par an est estimé à plusieurs dizaines de milliers d’emploi durables et non délocalisables. S’agissant de l’insertion professionnelle, j’ai signé avec Delphine Batho et l’ANAH, l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, une convention-cadre qui permettra le recrutement, au titre des emplois d’avenir, d’ambassadeurs de la rénovation énergétique.

Dans le troisième point de votre intervention, vous avez abordé la question de la mise en lien des différents intervenants et de l’identification des personnes qui ont besoin de travaux de rénovation thermique. Et il s’agit en effet de mutualiser tous les acteurs : ce sera le rôle des ambassadeurs de la rénovation thermique. Ceux-ci sécuriseront aussi les familles en situation d’inquiétude. Ils auront une fonction décisive pour le passage à l’acte et pour l’engagement des travaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet.

M. Jean-Paul Chanteguet. Madame la présidente, madame la ministre de l’égalité des territoires et du logement, madame la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chers collègues, je souhaite évoquer la question des certificats d’économies d’énergie créés en 2005 par la loi POPE. Ce dispositif repose sur l’obligation assignée par les pouvoirs publics aux vendeurs d’énergie, les « obligés », de promouvoir l’efficacité énergétique auprès de leurs clients – particuliers, professionnels et services publics. La première période du dispositif, de 2006 à 2009, a permis d’économiser soixante-cinq térawattheures, plus que l’objectif initial de cinquante-quatre térawattheures. Pour la seconde phase triennale, nous visons désormais 345 térawattheures. En fin de période, les obligés justifient de leurs obligations par la détention des certificats correspondants. En cas de défaut, ils acquittent une pénalité libératoire de deux centimes par kilowattheure manquant.

Les certificats d’économies d’énergie sont supposés contribuer à la maîtrise de la demande comme au développement des énergies vertes. L’installation d’équipements permettant le remplacement d’une d’énergie non renouvelable par une énergie renouvelable donne en effet lieu à la délivrance d’un certificat. C’est un dispositif ambitieux. C’est aussi un dispositif dont la complexité nourrit de légitimes interrogations quant à son efficacité.

Sans revenir sur les termes techniques – les fameux CUMAC –, je me concentrerai sur les aspects juridiques.

Il y a donc des non obligés et des obligés, dont l’obligation est établie en fonction d’un coefficient et d’une année de référence. Le calcul est si simple que la liste des obligés pour la période 2011-2014 sera arrêtée... en 2014 ! Il y a par ailleurs des éligibles et des non éligibles, mais qui peuvent être concernés grâce à une convention préalable de partenariat. Quant à la contribution financière à des programmes de réduction de la consommation des ménages défavorisés ou à des programmes d’information, elle octroie des certificats d’économies d’énergie en fonction d’un taux de conversion en euros par kilowattheure CUMAC investi.

Pour ce qui me concerne, je reste dubitatif face aux conclusions élogieuses des études cofinancées par l’ADEME et réalisées dernièrement par deux sociétés qui aident les vendeurs d’énergie à mettre en œuvre leur obligation de promouvoir des actions d’économie d’énergie auprès des ménages, des collectivités et des professionnels. Au-delà des questions de forme, je crains que ces certificats ne soient finalement qu’un fantastique effet d’aubaine pour récompenser des travaux déjà programmés ou pour valoriser encore davantage des modernisations que la seule rentabilité économique commandait impérieusement.

La transition énergétique ne sera une réussite que si elle est soutenue par l’ensemble de la société. Je ne suis pas fermé à la complexité, mais j’avoue que plus de simplicité serait certainement préférable. On parle beaucoup du modèle allemand : les bonifications de prêt accordées outre-Rhin par la KfW semblent l’exemple à suivre.

Madame la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, envisagez-vous le maintien du mécanisme des certificats d’économies d’énergie ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Monsieur le président Jean-Paul Chanteguet, je tiens tout d’abord à remercier le groupe socialiste d’avoir pris l’initiative d’organiser ce débat, qui porte sur un sujet très important puisque notre pays est confronté à un véritable scandale : celui de l’explosion de la précarité énergétique.

Les certificats d’économies d’énergie, vous l’avez rappelé, sont potentiellement un des leviers de financement majeurs de la transition énergétique et des travaux de renforcement de l’efficacité énergétique. Leur définition est simple : il s’agit d’un mécanisme par lequel les vendeurs d’énergie sont obligés de contribuer au financement de l’efficacité énergétique pour éviter un effet pervers – que leur propre intérêt soit qu’il n’y ait pas de travaux en ce domaine.

Nous sommes maintenant dans la phase de décision de ce que sera la troisième période des certificats d’économies d’énergie. J’ai indiqué ces derniers jours que le Premier ministre avait demandé un rapport à la Cour des comptes sur l’efficacité des dispositifs actuels, qui sera remis au Gouvernement avant la conclusion du débat national sur la transition énergétique. Ils sont, vous l’avez dit, largement discutés ; les uns affirment que c’est un mécanisme très efficace, d’autres le critiquent. On a donc besoin d’avoir l’appréciation de la Cour des comptes sur l’efficacité de cette politique publique et du levier financier que celle-ci représente.

Ensuite, nous aurons, pour la troisième période, un doublement des obligations et donc du niveau des certificats d’économies d’énergie. Nous en verrons alors les mécanismes concrets. Je présenterai au conseil des ministres du 6 mars prochain la partie du projet de loi dit DADU – diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne – qui transposera la directive « Efficacité énergétique ». Ce sera un des éléments importants du travail que je mène actuellement avec Cécile Duflot sur le décret tertiaire, c’est-à-dire le décret fixant les obligations de travaux d’efficacité énergétique dans les immeubles de bureaux, autre point d’appui pour le développement des certificats.

J’ai souhaité que le débat national sur la transition énergétique soit, in fine, le cadre dans lequel nous prendrons les décisions sur la définition exacte des mécanismes de la troisième période, lesquels, je le répète, permettront de doubler l’effort en matière de certificats d’économies d’énergie.

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Madame la présidente, mesdames les ministres, monsieur le président de la commission du développement durable, dans la longue marche vers la transition énergétique, l’idée de prioriser l’économie d’énergie est une évidence et notre majorité, avec votre soutien, madame Batho, met en œuvre un dispositif qui devrait être définitivement voté dans le courant du mois de mars : l’instauration d’un bonus-malus pédagogique pour que chacun ait conscience de sa position par rapport à la notion de surconsommation, lui permettant ainsi de mettre en œuvre, avec l’appui d’un service public de la performance énergétique, des dispositions visant à améliorer ses capacités à faire des économies d’énergie. Cela pourra passer par les comportements, par les appareils électroménagers, par ce qu’on appelle les smart greens –l’optimisation de l’utilisation de l’énergie à l’intérieur du logement – et bien sûr par l’isolation thermique. Je remercie le président Chanteguet d’avoir suggéré ce débat car il est important, à ce stade, de rappeler que cette proposition de loi n’est qu’une première étape vers le texte sur la transition énergétique. Celui-ci établira, j’imagine, la méthode, les moyens et les outils du service public de la performance énergétique.

Par conséquent, madame la ministre, je souhaiterais savoir dans quelles conditions ce service public de la performance énergétique sera effectivement à la disposition de nos concitoyens, dès l’instant où leur signal ne sera pas un signal très positif en matière de consommation d’énergie. Dès lors qu’il y a une articulation entre la proposition de loi et les textes qui vont arriver, il faut pouvoir préciser en quoi elle consiste.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre. Monsieur le président Brottes, votre proposition de loi sera, je crois, définitivement adoptée le 11 mars par l’Assemblée nationale. C’est une étape importante, puisque ce texte permettra d’étendre le bénéfice des tarifs sociaux de l’énergie à huit millions de Français, ce qui est tout à fait considérable. Je rappelle que le plafond de revenu d’une personne seule pour pouvoir en bénéficier passera de 600 euros à 893 euros, et que les familles qui se chauffent au gaz auront un gain de pouvoir d’achat de 200 euros par an, ce qui est tout à fait considérable.

Ensuite, cette proposition de loi vise à mettre en place le mécanisme du bonus-malus. L’étude récente du Conseil d’analyse stratégique montre qu’en l’absence d’un travail sur le comportement des consommateurs – c’est le sens de ce bonus-malus –, les travaux d’efficacité énergétique entraînent un effet rebond. Au contraire, si les travaux d’isolation des maisons sont accompagnés d’actions de sensibilisation et d’information du consommateur sur la maîtrise de la consommation individuelle, notamment au travers des compteurs intelligents dont nous souhaitons accélérer le déploiement, leur efficacité est beaucoup plus grande en termes d’économies d’énergie.

À l’échelle même du comportement de chacun, nous constatons donc l’existence d’un lien entre les travaux d’efficacité énergétique et le système du bonus-malus. Celui-ci va monter progressivement au fur et à mesure que le nombre de personnes habitant dans ces logements très mal isolés et énergivores que sont les passoires thermiques va diminuer. Telle est l’évolution qui a été tracée tout au long du débat parlementaire.

Cette proposition de loi comporte la base juridique nécessaire à la création du service public de la performance énergétique, dont la base matérielle a été établie par les travaux de l’ANAH et des points information énergie.

Une fois la loi adoptée, il faudra organiser tous ces dispositifs qui peuvent paraître éparpillés afin de créer une véritable force de frappe, en associant les collectivités territoriales, car l’État ne doit pas faire les choses tout seul. Avec Cécile Duflot, je travaille à la création de ce guichet unique qui permettra à chacun d’avoir une information claire et précise sur les mécanismes d’aide dont il pourra bénéficier pour pouvoir faire des travaux d’efficacité énergétique dans son logement.

Mme la présidente. Nous en venons à trois questions du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

La parole est à M. Jean-Marie Tetart.

M. Jean-Marie Tetart. Mesdames les ministres, la transition énergétique doit bien sûr mobiliser des énergies renouvelables. Elle doit aussi induire des changements d’habitude, que François Brottes vient de mettre en évidence, en adaptant des dispositifs de domotique et les smart greens afin de changer les habitudes de consommation. Elle devra surtout s’appuyer sur le grand chantier de l’isolation, créateur d’emplois non délocalisables et moyen de renforcement du tissu des TPE.

L’un des principaux défis de cette stratégie d’isolation est certainement celui des grandes et très grandes copropriétés, regroupant plusieurs centaines de copropriétaires dans des immeubles de cinquante à cent logements. Le même défi sera posé dans les plus petites copropriétés dégradées comme l’a souligné le récent rapport de l’ANAH.

Dans ces situations, compte tenu de l’importance des coûts de réhabilitation et d’isolation, le cas où tous les copropriétaires disposeront de la capacité de financement nécessaire au même moment sera peu fréquent. Pour trouver les moyens de financer les travaux d’isolation de tout un immeuble, il est suggéré d’augmenter les droits à construire en surélevant l’immeuble et de les céder.

Pour ce faire, plusieurs conditions doivent être remplies.

Il faut que les plans locaux d’urbanisme le permettent. À cet égard, l’abrogation de la majoration des droits à construire freine cette possibilité. Il faudra revenir à des dispositifs autres que la révision du plan d’occupation des sols ou du plan local d’urbanisme.

Il faudra aussi, sans doute, changer les modalités de vote dans les assemblées de copropriétaires. En effet, les propriétaires des appartements des derniers étages ont des droits de veto supérieurs lorsqu’il s’agit de travailler sur les terrasses ou sur les parties supérieures.

Enfin, il faudra lancer des études techniques pour voir comment ces niveaux supérieurs des immeubles pourraient être, à l’instar de ce qui se fait en Allemagne ou dans les pays scandinaves, préfabriqués et amenés au dernier moment, de façon à gêner le moins possible la vie de ces copropriétés.

Résumons les conditions à remplir : changement des règles de PLU, modification des modalités de vote dans les copropriétés, financement des coûts d’isolation par la cession de droits à construire obtenus grâce à la surélévation des immeubles. Telles sont les pistes de réflexion que je soumets à votre appréciation.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministrede l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le député, vous abordez divers aspects de la question, auxquels je vais m’efforcer de répondre rapidement.

En matière de capacités de financement, vous avez raison, certaines copropriétés sont dans des situations de blocage, qui diffèrent selon qu’il s’agisse de copropriétés classiques ou dégradées. Dans le cadre du projet de loi logement et urbanisme, nous travaillons à l’élaboration de dispositifs qui permettront d’agir en amont, et plus efficacement, sur les copropriétés en très grande difficulté, dont nous cherchons à avoir une vision globale.

La question du financement se pose davantage en amont. Nous réfléchissons à l’intégration d’un provisionnement pour travaux. Ce dispositif, qui existe dans nombre d’opérations, consiste à faire provisionner chaque mois par tous les copropriétaires un montant qui permet ensuite de réaliser des travaux sans faire des appels très importants, parfois insupportables pour certains copropriétaires.

Vous soulevez aussi la très importante question des règles de vote, qui est décisive notamment en cas d’isolation par l’extérieur. Si une copropriété qui décide de réaliser des travaux d’isolation par l’extérieur donne sur la même cour qu’une autre copropriété, tous les copropriétaires, sans exception, de cette dernière doivent donner leur avis favorable pour que les travaux puissent être effectués. Nous travaillons aussi à une réforme de la loi de 1965 sur les copropriétés.

S’agissant de la majoration des droits à construire, nous y reviendrons, comme je l’avais dit au moment de l’abrogation de la loi du 20 mars 2012. Ce n’est pas une règle générale mais une piste de travail qui permet la densification. La surélévation peut être envisagée grâce aux techniques de construction innovantes, offertes notamment par la filière bois, qui permettent la création de structures légères, rapidement installables et parfaitement adaptées à nombre de bâtiments déjà existants.

Voilà mes réponses aux quatre points que vous avez abordés, monsieur le député.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, notre majorité avait fixé un objectif ambitieux de réduction de 38 % de la consommation d’énergie du parc d’ici à 2020, avec un programme de rénovations thermiques de 400 000 logements par an à partir de 2013.

Plus de 180 000 éco-prêts à taux zéro ont été octroyés entre 2010 et 2012. Grâce à l’éco-prêt logement social, 120 000 logements sociaux ont fait l’objet d’une rénovation. Depuis sa création en 2005, le crédit d’impôt développement durable a permis de rénover plus de 6 millions de logements privés. Aujourd’hui, 40 % des logements neufs sont construits selon les normes « bâtiment basse consommation ». Enfin, lancé en 2008, le programme « Formation aux économies d’énergies des entreprises et artisans du bâtiment » a connu un réel succès, avec plus de 48 000 participants aux formations d’économies d’énergie sur tout le territoire.

Lors de la Conférence environnementale en septembre dernier, le Président de la République, le Premier ministre ont annoncé avec vous, mesdames les ministres, la mise en place d’un plan de performance thermique des bâtiments visant à mettre aux normes énergétiques les logements de notre pays. Toutefois, les décisions concrètes tardent à voir le jour et les professionnels du bâtiment sont de plus en plus inquiets, suite notamment à vos récents choix.

En effet, outre les conséquences économiques désastreuses dans un secteur déjà fragilisé par la crise, l’augmentation du taux de TVA ne va absolument pas dans la bonne direction. Ce relèvement aura un impact fort sur ce secteur : une perte d’emplois, une baisse d’activité estimée à plus de 1,5 milliard d’euros et une modification de la consommation des ménages. Ces conséquences nous font douter que votre majorité puisse atteindre les objectifs qu’elle s’est fixés.

Autre mesure qui envoie un signal très négatif : le crédit d’impôt développement durable a vu son montant réduit de moitié dans la loi de finances pour 2013.

Mesdames les ministres, je ne remets pas en cause votre bonne volonté mais vous appartenez à un Gouvernement qui a fait des choix, notamment fiscaux, depuis huit ou neuf mois. Pouvez-vous nous préciser quels seront vos choix concernant ces différents outils ? Un récent rapport du Conseil économique, social et environnemental préconise de les conforter, alors qu’ils ont été considérablement réduits. Quelles mesures fiscales en faveur de l’efficacité énergétique comptez-vous prendre pour atteindre vos objectifs ?

Enfin, annoncée le 26 novembre dernier, la table ronde sur la rénovation énergétique des bâtiments, chargée de préparer le plan de rénovation énergétique et qui devait se tenir très rapidement, n’a, sauf erreur de ma part, toujours pas eu lieu à ce jour, et aucune date n’a encore été communiquée. Pouvez-vous, mesdames les ministres, nous préciser où en est l’organisation de cette table ronde et quel pourrait être le calendrier de ses travaux ?

Mme la présidente. La parole est à… Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement, peut-être ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Sur ce sujet, madame la présidente, Delphine Batho et moi-même avons appris à parler à deux d’une seule voix et c’est un exercice très agréable.

Monsieur le député Saddier, je voudrais redire les choses avec simplicité en ce qui concerne la TVA. Des augmentations ont été votées pour l’année prochaine. Pour les travaux dont nous parlons, la TVA est à 7,5 % parce que le gouvernement précédent, que vous souteniez, avait porté le taux de 5,5 % à 7,5 % dans le cadre du plan de rigueur porté par François Fillon. La réalité est celle-ci. Comme vous le savez, cette question fait actuellement l’objet d’un débat dans un cadre budgétaire extrêmement contraint.

Pour ce qui est de la mobilisation des acteurs, nous avons travaillé avec tous les professionnels à l’élaboration du plan de rénovation thermique, dans le cadre des objectifs annoncés par le Président de la République et confirmés à maintes reprises, afin d’être très rapidement opérationnels. Je dois reconnaître que l’un des mérites du Grenelle de l’environnement a été de lancer un vrai plan de formation qui a permis à différents professionnels de se spécialiser dans les travaux d’efficacité énergétique. Rappelons qu’au-delà des matériaux utilisés, le résultat dépend de la qualité du travail fourni et de la pose.

Nous serons en mesure de proposer l’intégralité de ce plan, avec un élément décisif sur lequel nous reviendrons peut-être : l’accès au financement. La très forte sous-consommation du plan d’investissement d’avenir et des crédits destinés au programme « Habiter mieux » montre bien que l’enjeu décisif est l’accès aux ménages. Au-delà des dispositifs, c’est grâce au travail sur le guichet unique et l’accès aux ménages que nous pourrons toucher la cible que nous souhaitons.

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Mesdames les ministres, ma question va s’inscrire dans la continuité de celle de Martial Saddier. La conjoncture actuelle, fortement dégradée, n’est pas sans conséquence sur l’activité de nombreuses entreprises du bâtiment. J’ai été interpellé par un fabricant de briques et tuiles en terre cuite qui m’a fait part de son inquiétude et de celle des distributeurs de matériaux de construction, entreprises de gros œuvre et de couverture. Ces entreprises espèrent un nouveau souffle pour le logement.

Avec 43 % de la consommation finale et totale de l’énergie et 25 % des émissions de CO2 dans l’atmosphère, le bâtiment représente le secteur le plus important en termes de potentiel d’économies d’énergie et c’est sur le parc de logements existant que doit principalement porter l’effort pour permettre une véritable transition énergétique.

Dans le champ du bâtiment, la TVA à taux réduit s’applique à l’amélioration et à la rénovation des logements, comme d’ailleurs à l’acquisition et à la construction de logements sociaux. Le relèvement de ce taux de 5,5 % à 7,5 % au 1er janvier 2012, puis son passage prochain à 10 %, annihile tout espoir d’atteindre les objectifs en matière de logement. Les 500 000 rénovations thermiques annoncées par le Gouvernement seront-elles atteintes ? Le choc des prix associé à cette hausse prévue de TVA menace directement 20 000 emplois du secteur du bâtiment.

Pouvez-vous, mesdames les ministres, rassurer mon interlocuteur et la FFTB, c’est-à-dire la Fédération française des tuiles et briques en terre cuite ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le député, il est logique que certains professionnels soient inquiets, pour la bonne et simple raison que la crise touche tout le monde. Elle touche effectivement avec dureté le secteur du bâtiment. L’inquiétude des Français a aussi pour conséquence qu’ils mettent un frein à leurs investissements immobiliers, ce qui peut se comprendre dans ce contexte difficile.

À ce stade, rappelons que ces professionnels bénéficieront comme les autres du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, d’un bol d’air financier pour certaines entreprises, ainsi que du contrat de génération. Soulignons aussi la très grande mobilisation du Gouvernement sur ce dossier.

Dans la ligne de ma réponse à M. Saddier, et puisque vous parlez du bilan du précédent Gouvernement, je précise qu’il ne s’agit pas seulement d’annoncer des dispositifs. Je ne cherche pas à jeter la pierre aux prédécesseurs car ce sujet ne peut s’inscrire que dans le long terme. C’est pourquoi Delphine Batho et moi-même avons décidé de ne pas remettre en cause le programme « Habiter mieux », mais de le redimensionner : alors que son objectif était la rénovation thermique de centaines de milliers de logements, seuls 38 000 en ont bénéficié.

Il s’agit donc de trouver les clefs pour amener les ménages à prendre la décision. La première de ces clefs est le guichet unique. La deuxième est de bien dimensionner les aides afin que les ménages les plus fragiles que j’ai mentionnés tout à l’heure soient en situation de réaliser ces travaux sans avoir un reste à payer trop important. Il est évident, par exemple, que les ménages les plus âgés, souvent en situation de précarité énergétique, ne peuvent pas entreprendre, à soixante-quinze ans, un investissement dont la rentabilité sous forme d’économies d’énergie sera atteinte en quinze ans.

C’est pourquoi nous travaillons à affiner le dimensionnement du dispositif ainsi que sur l’accès aux ménages. D’où la création des emplois d’avenir que sont les ambassadeurs de la rénovation énergétique. Il ne faut pas s’en tenir aux effets d’annonce, mais veiller à ce que ce plan soit opérationnel et touche ceux qui en ont le plus besoin : ce sont essentiellement des particuliers.

Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe Union des démocrates et indépendants.

La parole est à M. Yannick Favennec pour une première question.

M. Yannick Favennec. Le Gouvernement s’est fixé des objectifs ambitieux en matière de construction et de réhabilitation de logements, avec 500 000 unités pour la construction, et autant pour la rénovation.

Avec 32 millions de logements et plus de 68 millions de tonnes d’équivalent pétrole par an, le secteur du bâtiment doit être la cible prioritaire des politiques environnementales du Gouvernement. À lui seul, il concentre plus de 42 % de la facture énergétique du pays, loin devant les transports et l’activité industrielle, et génère 123 millions de tonnes de C02, soit 23 % des émissions nationales.

Le précédent gouvernement l’avait bien compris à travers la véritable révolution induite par le Grenelle de l’environnement. Dès 2009, nous avons proposé la mise en œuvre d’un programme de réduction des consommations énergétiques des bâtiments afin de réduire les dépenses, améliorer le pouvoir d’achat des ménages et réduire les émissions de C02, notamment grâce à la nouvelle réglementation thermique dite « RT 2012 ».

Nous nous sommes appuyés sur des dispositifs fiscaux incitatifs et innovants, permettant d’associer l’ensemble des acteurs, les professionnels de la construction comme les habitants. Je pense au crédit d’impôt développement durable et à l’éco-prêt à taux zéro qui ont montré des résultats significatifs.

Le crédit d’impôt développement durable a notamment permis de réduire la consommation d’énergie du parc résidentiel de près de 8 % par rapport à 2008. La réduction atteindra 30 % en 2020.

Mais aujourd’hui, nous ne retrouvons plus ce volontarisme. L’ambitieuse politique initiée il y a quelques années semble s’essouffler, dans le contexte de crise que nous connaissons.

Le groupe UDI tient à réaffirmer que la rénovation thermique des bâtiments représente un enjeu essentiel pour la durabilité de la société et un investissement d’avenir pour notre pays.

Aussi, nous souhaitons être rassurés sur la mobilisation de l’État dans ce domaine : les dispositifs fiscaux que nous avions mis en place seront-ils repris et renforcés ? Par ailleurs, quels sont les financements innovants que le Gouvernement entend mettre en œuvre ? Le seront-ils dès cette année ?

Je crois qu’une réunion d’arbitrage s’est tenue à l’Élysée aujourd’hui. Pourriez-vous nous en livrer la teneur ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Comme je l’ai dit précédemment, monsieur le député, il faut regarder les choses de manière objective.

Je peux vous donner les chiffres exacts du nombre d’éco-prêts à taux zéro : 70 000 en 2009, 80 000 en 2010. Et puis, en 2011, une division par deux : 41 000. Il y en aura probablement 35 000 en 2012. Qualifier de très prometteur le travail fait par le précédent gouvernement est inexact. Un certain nombre de ces dispositifs ont bénéficié d’un effet d’entraînement, tout de suite après le Grenelle, mais se sont, pour beaucoup d’entre eux, effondrés ensuite. Le programme « Habiter mieux » ne fonctionne pas. Ce n’est pas un critique politicienne que de le dire. C’est une réalité.

La réalité est qu’il est difficile d’atteindre la cible. Plusieurs de ces dispositifs ont été dimensionnés pour ne pas pouvoir être délivrés, si j’ose dire. L’éco-prêt à taux zéro fait peser tellement de contraintes, notamment sur la certification des travaux, que les banques elles-mêmes disent ne pas savoir le délivrer. Nous travaillons notamment sur une possibilité de certification par les entreprises labellisées Grenelle, en utilisant le travail mené sur la formation, pour que l’accès à l’éco-PTZ soit simplifié.

Sur ces questions-là, il ne faut pas s’en tenir à l’effet d’annonce. La question qui nous occupe et qui était à l’ordre du jour de la réunion de ce matin – vous êtes bien renseigné, monsieur le député – est de rendre efficace un vrai plan de rénovation thermique et d’être au plus près des besoins des ménages. Il ne faut pas se contenter d’une annonce et d’une réponse qui semble bonne sur le papier. Il faut pouvoir s’adresser aux ménages de manière efficace, stimuler la demande et encourager le passage à l’acte de tous ceux qui en ont besoin. Car l’enjeu, aujourd’hui, n’est pas le dimensionnement des dispositifs mais l’accès direct pour les ménages qui en ont besoin.

Le bilan de la période précédente montre, contrairement à ce que vous dites, une restriction de la mobilisation en faveur de l’efficacité énergétique, alors même que, comme vous en avez fait la parfaite démonstration au début de votre question, c’est sur ce terrain que se trouvent les ressources majeures en matière d’économies d’énergie.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Favennec, pour une seconde question.

M. Yannick Favennec. Mois après mois, le secteur du logement s’enfonce un peu plus dans la crise. Les derniers chiffres relatifs à la construction font craindre aux experts que les mises en chantier plongent largement sous la barre des 300 000 en 2013, très loin de l’objectif des 500 000 fixé par François Hollande. Les travaux de rénovation des bâtiments seront évidemment lourdement pénalisés par cette crise, avec les conséquences que l’on devine sur votre objectif de rénover 500 000 logements par an.

Sans mesures de soutien fortes de la part du Gouvernement, vous le savez, mesdames les ministres, cet objectif ne sera jamais atteint. Je vous l’ai dit, la rénovation thermique des bâtiments est un enjeu essentiel pour réduire notre facture énergétique, qui pèse très lourd sur notre déficit extérieur. Les artisans du secteur ne savent plus quoi faire pour alerter le Gouvernement.

Pourtant, au-delà de la conjoncture difficile, le Gouvernement, à travers ses décisions récentes, porte une responsabilité non négligeable dans la situation du secteur de la rénovation. Je pense évidemment au relèvement du taux de TVA de 7 à 10 % au 1er janvier 2014, qui contribue déjà à bloquer un grand nombre de mises en chantier.

Au-delà des drames humains qui se profilent dans le secteur – on parle de 40 000 suppressions d’emplois à court terme ! –, c’est bien la politique de rénovation thermique des bâtiments qui va durablement marquer le pas.

Mesdames les ministres, pouvez-vous nous assurer que vous êtes en cohérence avec vos objectifs ambitieux, et que vous plaidez de toutes vos forces, lors des réunions interministérielles, pour abandonner ce projet de hausse de la TVA dans le secteur de la construction et de la rénovation de logement ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Si j’osais, je vous retournerais la question : espériez-vous un instant que je vous répondrais par la négative en vous disant que nous ne plaidions pas pour le taux de TVA alors que ce sujet nous semble évidemment décisif ?

Je le redis, sur la TVA, il faut rappeler que le passage de 5,5 à 7 % a été le fait du précédent gouvernement dans le cadre du plan de rigueur Fillon. C’est une réalité. Cela a freiné une partie des travaux.

Le nouveau taux de TVA sera applicable au 1er janvier 2014. Le Premier ministre a indiqué que cette question ferait l’objet d’une discussion. C’est le cas. La mobilisation du Gouvernement en faveur des professionnels du secteur est totale, pas seulement pour des raisons d’emplois : il s’agit d’emplois durables, non délocalisables, dont l’efficacité sur la balance commerciale – à travers la réduction des consommations énergétiques – est avérée, et dont l’efficacité sur le budget des ménages peut là aussi être décisive, puisque l’on peut parvenir à des économies d’énergies de 30, 40 parfois même 50 % pour certaines passoires thermiques.

Nous sommes plus que convaincus : nous sommes déterminés. Cela étant, nous ne voulons pas d’agitation ou d’improvisation. Nous voulons que les dispositifs que nous allons mettre en place soient effectifs, dans cette période difficile où les ménages sont inquiets et ont plus de difficultés à s’engager dans le passage à l’acte quand ils envisagent ce type de travaux. Nous voulons faire en sorte que la mobilisation de l’ensemble des acteurs de la rénovation thermique, qu’il s’agisse du service public de l’efficacité énergétique ou des différentes collectivités locales, soit totale. Nous travaillons notamment à la mise en place de ce guichet unique qui permettra d’avoir un accès direct à l’ensemble des informations et des possibilités de financement, ainsi qu’à un interlocuteur capable de surveiller la réalisation de l’ensemble des travaux.

La mobilisation du Gouvernement est très forte. Nous sommes attentifs aux professionnels du secteur. Je les rencontre tous les mois pour faire le point sur la situation. Nous sommes convaincus qu’il est de notre responsabilité de préserver le système productif de construction en France, qui est un outil absolument décisif pour engager ce chantier.

Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe écologiste.

La parole est à M. Denis Baupin, pour une première question.

M. Denis Baupin. Je veux souligner à mon tour l’importance de ce débat sur la réhabilitation des bâtiments, dans le cadre de la transition énergétique.

Les études montrent que les investissements dans des travaux visant à l’efficacité énergétique d’un bâtiment sont rentabilisés sur la durée de vie de celui-ci, si l’on prend en compte les économies d’énergie et la valorisation du patrimoine.

La difficulté à laquelle nous sommes confrontés relève plus de l’ingénierie financière que d’un problème technique. Les propositions aujourd’hui débattues doivent porter principalement sur la mise en place d’une diversité de dispositifs permettant notamment à ceux qui sont déjà très endettés après l’achat de leur logement de pouvoir externaliser la dette qu’ils doivent contracter pour ces travaux d’efficacité énergétique. C’est le principe du tiers investissement. Quel type de dispositifs en matière de tiers investissement, de fonds de garantie, d’incitation fiscale, pourront être proposés ?

Je veux insister sur la nécessité d’adresser un signal important en direction du secteur industriel du bâtiment, pour qu’il décide de s’impliquer réellement, de façon définitive, dans la rénovation thermique et de la considérer comme le grand chantier du futur. Pour cela, les signaux économiques sont importants. J’avais compris que le retour à un taux de TVA de 5,5 % était une hypothèse qui était sur la table. Je veux donc à mon tour insister sur ce point, même si je ne m’attends pas à ce que nous ayons des scoops ce soir. Nous espérons une issue positive.

Il est nécessaire d’envoyer un signal pour que la formation des professionnels soit au rendez-vous, parce que nos concitoyens ont besoin de savoir que, s’ils engagent des travaux, ceux-ci donneront des résultats.

Avec ce secteur de la rénovation thermique du bâtiment, nous avons l’occasion de monter qu’il est possible de concilier, dans la même activité, protection de l’environnement, amélioration du pouvoir d’achat et création d’emplois. On parle de plusieurs centaines de milliers d’emplois qui peuvent être créés. Dans la période actuelle et au vu des difficultés de notre pays, c’est quelque chose que nous ne pouvons pas rater.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre. Les travaux d’efficacité énergétique sont un investissement coûteux au départ, mais un investissement particulièrement rentable. Il est rentable en matière d’économies d’énergie pour les ménages. C’est un des principaux leviers dont nous disposons pour alléger la facture énergétique des ménages comme celle du pays. On évalue à 3 à 5 milliards la réduction du déficit de la balance commerciale qui serait rendue possible par la généralisation des travaux d’efficacité énergétique.

C’est aussi rentable en matière de création d’emplois : on estime que 50 000 emplois peuvent être maintenus ou créés grâce aux travaux d’efficacité énergétique.

La question du financement de ces investissements se pose. Il y a les dispositifs d’aide existants mais nous devons aller vers un nouveau mécanisme. C’est le travail qu’a confié le Premier ministre à la Caisse des dépôts et consignations. Il doit permettre de mettre sur pied le plus rapidement possible un système de tiers financement, qui est un financement de long terme permettant d’engager l’investissement immédiatement et de se rembourser en partie sur les économies d’énergie qui seront réalisées. C’est un système vertueux que plusieurs pays essaient de mettre en place aujourd’hui. C’est notamment le cas du Royaume-Uni au travers du green deal, le nom est assez parlant.

Nous sommes sur la voie d’un nouveau modèle de financement des économies d’énergie, pour les travaux des particuliers mais aussi pour les collectivités territoriales avec des prêts à très bon marché pour les travaux sur les bâtiments publics, qui sont aussi un enjeu.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Baupin, pour une seconde question.

M. Denis Baupin. Ma seconde question porte sur la nécessité ou non de prévoir une obligation de rénovation, une fois que les dispositifs d’accompagnement financiers auront été mis en place.

Si nous voulons tenir les objectifs de la France en matière de dérèglement climatique, face à l’épuisement des ressources pétrolières et au coût pour la facture énergétique de la France de l’importation d’énergies fossiles, nous devons avancer.

Dans de nombreux logements, les locataires paient les factures énergétiques, alors que ce sont les propriétaires qui ont la responsabilité des travaux.

La question peut donc se poser, à moyen terme – à l’horizon 2017, 2018, ou 2019, mais l’annonce pourrait en être faite d’ores et déjà –, d’un passage progressif à l’obligation de rénovation thermique des bâtiments, à l’instar des obligations de travaux qui ont été instaurées en matière de risques incendie, d’accessibilité des personnes handicapées ou de ravalement.

Je veux parler des passoires énergétiques qui sont un problème rencontré par beaucoup de locataires. Dans les critères aujourd’hui fixés pour qu’un propriétaire puisse louer son logement, figure le caractère décent de ce logement, notamment sa salubrité. Certains critères doivent être respectés pour que la location du logement soit autorisée.

Je vous demande donc s’il est prévu que nous puissions, par exemple à l’occasion d’un prochain projet de loi, soit sur la transition énergétique, soit sur le logement, affirmer que le fait qu’un logement ne soit pas une passoire énergétique est bien, à un horizon fixé à quelques années, un critère qui permet de juger si un logement est décent ou pas.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le député, les deux questions que vous posez – la première sur l’obligation de faire des travaux de rénovation, la deuxième sur les critères de décence – appellent deux réponses de nature différente.

En tout état de cause, l’obligation de faire des travaux ne pourrait donner de résultats immédiats. Nous devrions effectivement la fixer à un terme assez éloigné. Néanmoins, c’est une piste qu’il nous faut ouvrir, notamment parce que la réduction, nécessaire, de la récupération des factures d’énergie sur les locataires devrait pousser les propriétaires à effectuer ces travaux, alors que les choses sont plus compliquées tant qu’ils ne sont pas comptables du coût énergétique que représente leur logement. C’est une piste sur laquelle nous réfléchissons mais il faut faire mûrir la concertation sur ce sujet et anticiper très en amont les éventuels effets néfastes, comme le retrait de certains logements du marché.

Il en est de même pour le critère de décence. L’imposer aujourd’hui risquerait de faire sortir du marché un nombre très important de logements, alors que l’objectif est bien de travailler sur leur rénovation thermique. Le Gouvernement veut se concentrer sur ceux des logements qui sont dans la situation la plus difficile. Aujourd’hui, 4,8 millions de logements sont en catégorie G. Ce sont les logements les plus énergivores. C’est bien en modifiant le périmètre du plan de rénovation thermique que nous souhaitons pouvoir intervenir, à la fois auprès des propriétaires occupants de leur logement et auprès des bailleurs.

Jusqu’à présent, le programme « Habiter mieux » ne concerne pas les bailleurs. Or il nous semble absolument indispensable que les ménages en précarité énergétique dans des logements en location fassent aussi l’objet de l’attention du Gouvernement. Nous travaillons donc à trouver les méthodes et les moyens qui permettent d’avancer sur cette question sans faire sortir du parc locatif un certain nombre de logements dont nous avons besoin.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Plisson, du groupe SRC.

M. Philippe Plisson. Madame la présidente, mesdames les ministres, le 15 septembre dernier, notre Premier ministre Jean-Marc Ayrault rappelait dans son discours de clôture de la conférence environnementale les objectifs fixés par le Président de la République en termes de performance thermique de l’habitat.

Ainsi, pour en finir avec les logements passoires thermiques, chaque année, 500 000 logements devront être rénovés et dotés d’une isolation thermique de qualité. À cela s’ajoutera la construction de 500 000 logements neufs écologiques. Cette rénovation énergétique des bâtiments est un impératif environnemental qui fait consensus. En effet, avec 44 % de la consommation énergétique finale et 21 % des émissions de gaz à effet de serre en France, nous comprenons que le Gouvernement ait fait de cette rénovation du parc immobilier une priorité absolue, d’autant que la transition énergétique ne pourrait avoir lieu si ce secteur n’évoluait pas massivement. En outre, ce vaste projet d’éco-rénovation et de reconstruction, en plus de lutter contre la précarité énergétique et de réduire la pollution, constitue aussi un puissant levier de création d’emplois industriels durables et non délocalisables, qui implique de facto des millions de Français, d’entreprises et d’artisans du bâtiment éparpillés sur le territoire français. Pour parvenir à cet objectif et soutenir des investissements dans l’efficacité énergétique et la qualité environnementale, des dispositifs dédiés ont été élaborés : crédit d’impôt développement durable, éco-prêt à taux zéro, labellisation, recours au tiers financement.

Lors de son discours de clôture, le Premier ministre a également fait référence à la création d’un guichet unique pour les opérations de rénovation énergétique. Celui-ci devrait être organisé sur les territoires autour des agences de l’État et des collectivités locales, en collaboration étroite avec les associations et les acteurs privés des filières. Il aidera les Français à remplir les nouvelles normes énergétiques dans leur logement, notamment en regroupant l’ensemble des informations juridiques, techniques et financières dont les particuliers ont besoin pour démarrer leurs travaux et en permettant également de trouver les entreprises les plus qualifiées, en particulier celles qui porteraient la marque reconnue « Grenelle de l’environnement ». Notons néanmoins, sur ce dernier point, que ces entreprises devront posséder les moyens et la qualification nécessaires pour répondre à ce nouveau marché ; ce n’est pas le cas actuellement.

M. Daniel Boisserie. C’est sûr !

M. Philippe Plisson. Il est donc impératif de les sensibiliser, de les informer et de mettre en place, très rapidement, les informations correspondantes.

Pourriez-vous nous informer de l’état d’avancement de la création de ce guichet unique ? Quels seront son format et ses compétences ? Quel lien cela aura-t-il avec une réforme de la formation professionnelle ? Quelles sont les dispositions pratiques prévues pour cette nécessaire formation et dans quels délais ? Quid, enfin, du déploiement des ambassadeurs de l’efficacité énergétique ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Vous avez bien posé, monsieur le député, la question du guichet unique. Le travail que nous menons, avec Delphine Batho, est bien centré sur cette question. Un certain nombre de dispositifs existent. Mais, nous en avons conscience, il est parfois difficile pour des particuliers, de collecter l’ensemble des informations, de comprendre ce qui leur est le plus utile, d’identifier quels sont les différents acteurs – je pense aux collectivités locales – qui ont engagé des politiques sur ce thème. Comment, en outre, les associer ?

Nous travaillons donc à un guichet unique extrêmement simple : un numéro unique pour l’ensemble du territoire français et un site internet dédié qui pourra renvoyer vers le service public de la rénovation thermique du territoire. S’agissant du déploiement du dispositif sur le territoire, il faut réussir à faire travailler en réseau les différents intervenants que sont l’ANAH, l’Agence nationale de l’habitat, l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, et les différentes ADIL, les Agences départementales d’information sur le logement, où propriétaires et locataires peuvent s’informer. Ce sont eux qui devront jouer un rôle d’interface pour porter la rénovation thermique.

C’est dans ce cadre, notamment avec l’ANAH, qu’a été signée la convention sur les ambassadeurs de l’efficacité énergétique, qui prévoit une formation. Le financement a été prévu pour assurer la formation de ces jeunes recrutés dans le cadre des emplois d’avenir. Ils auront pour fonction d’être des ensembliers, dialoguant directement avec les ménages qui en ont besoin, pour pouvoir à la fois définir les travaux nécessaires et déterminer le financement adapté. C’est bien l’esprit de ce plan : simplifier l’accès aux dispositifs. Il ne s’agit pas de réinventer l’eau tiède en la matière, il s’agit bien de simplifier, de clarifier les acteurs, de responsabiliser les uns et les autres et, surtout, de donner un accès simple aux dispositifs qui existent d’ores et déjà.

Ce travail est en cours. Il se déploiera de façon différenciée sur les territoires, en fonction des initiatives déjà prises, mais en lien privilégié avec les collectivités locales qui accepteront d’être les porteurs et les ensembliers de ce type de projets.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Boisserie, du groupe SRC.

M. Daniel Boisserie. Madame la présidente, mesdames les ministres, je suis à l’origine de la TVA à 5,5 %. C’était – je crois qu’il faut le rappeler – avec François Patriat, sous le gouvernement Jospin. Je me réjouis que, plus de dix ans plus tard, vous vous attaquiez à ce gros chantier de l’isolation thermique et, ne l’oublions pas non plus, de la production d’énergie.

On a évoqué cette TVA à 5,5 %. Je crois effectivement qu’il sera incontournable, si la contrainte budgétaire nous le permet, d’arriver à ce taux. Ajoutons qu’il ne devrait pas seulement s’appliquer aux factures des entrepreneurs. En matière d’isolation, on fait aussi beaucoup de bricolage, et les bricoleurs sont capables, eux aussi, de faire de l’isolation d’une manière très simple ; ce n’est pas quelque chose de très compliqué, sauf lorsqu’il s’agit d’isolation par l’extérieur. Et j’aimerais effectivement que l’on puisse aligner la taxation des produits sur celle des prestations.

L’isolation par l’extérieur est probablement – vous le savez, madame la ministre – la meilleure solution, celle qui confère le plus d’inertie à l’intérieur. Cela dit, cela posera d’énormes problèmes.

Je vous pose la question, à vous qui êtes urbaniste, madame la ministre de l’égalité des territoires et du logement : que va-t-il se passer lorsqu’on isolera par l’extérieur des maisons d’une rue dont le trottoir est large d’un mètre vingt ? Quelles seront les possibilités ? Faudra-t-il modifier le PLU ? Faudra-t-il modifier la ZPPAUP, la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager ? J’aimerais que l’on puisse, en la matière, arriver à réaliser quelque chose de plus simple, à simplifier les procédures. Nous en sommes tous là aujourd’hui, majorité et opposition : simplifions ! Et vous savez combien il est difficile, pour une commune, de modifier un plan local d’urbanisme ou une ZPPAUP, ou une AVAP, une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine.

En ce qui concerne le guichet unique, j’applaudis. On ne peut plus continuer, les maires sont, aujourd’hui, totalement dépassés par le nombre de guichets.

Cela étant, puisqu’on parle de simplification, pourrions-nous aussi simplifier toutes les procédures en matière de construction d’usines de valorisation de la biomasse et d’usines de méthanisation ?

Enfin, vous avez annoncé il y a quelques mois, madame la ministre, que nous utiliserions les fonds issus de la cession de terrains militaires pour alimenter le logement. Or j’ai visité nombre de gendarmeries récemment, et elles sont dans un état pitoyable. Est-ce qu’on ne pourrait pas réserver le fruit des cessions de ces terrains à l’isolation thermique, enfin, des gendarmeries ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Je suis heureuse, monsieur le député, que vous expliquiez l’utilité du guichet unique. C’est l’élément absolument décisif pour pouvoir passer à l’acte en matière de rénovation thermique.

Quant aux contraintes architecturales, il ne faut évidemment pas considérer qu’en matière de rénovation thermique et d’efficacité énergétique il y a une solution et une seule, par exemple uniquement l’isolation par l’extérieur, uniquement le changement des ouvertures. Cela peut aussi être – Delphine Batho en a parlé tout à l’heure – des smart grids et des dispositifs d’efficacité énergétique active. On peut cumuler l’ensemble des solutions.

Depuis le Grenelle, la loi Grenelle II et ses décrets d’application ont, de fait, instauré un principe d’interdiction d’interdire au profit d’un certain nombre de dispositifs dont la mise en œuvre et l’application était bloquée. Désormais, sauf dans certains secteurs protégés, notamment les ZPPAUP, les AVAP et les sites classés, ces dispositifs de recours aux énergies renouvelables, comme l’utilisation du bois ou de toitures végétalisées, ne peuvent plus être interdits.

Il n’y a évidemment pas de solution magique en la matière. Néanmoins, les progrès faits sur les différents matériaux utilisables, sur la capacité de mobiliser les différents dispositifs – nouveaux équipements, efficacité énergétique active et isolation – de manière cumulative permettent de trouver des réponses appropriées. C’est pourquoi, au-delà du guichet unique, un ensemblier sera extrêmement utile pour faire les arbitrages. Il ne sert à rien, par exemple, de changer les fenêtres d’une maison dont la toiture n’est absolument pas isolée. Il faut donc rassurer les particuliers, ceux qui investiront : ils disposeront bien de dispositifs adaptés.

Votre dernière question concerne la gendarmerie. Je connais la sensibilité de certains parlementaires à la situation des gendarmeries, et je peux la comprendre. D’une part, il est absolument décisif que l’État et les collectivités locales soient exemplaires dans la rénovation thermique de leurs propres bâtiments. D’autre part, le décret sur la rénovation du parc tertiaire existant permettra d’avancer sur cette question, notamment en ce qui concerne les bâtiments du type des gendarmeries.

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, du groupe UMP.

Mme Isabelle Le Callennec. Madame la présidente, mesdames les ministres, le secteur du bâtiment a récemment tiré la sonnette d’alarme. Rien que pour l’année 2012, on compte près de 25 % de mises en chantiers de moins, et l’année 2013 s’annonce sombre.

Dans le même temps, plusieurs dizaines de millions de logements pourraient faire l’objet d’une rénovation. Les deux tiers du parc ont en effet été construits avant la première réglementation thermique de 1974. D’une part, les professionnels du bâtiment sont prêts à s’investir dans la lutte contre la précarité énergétique. Ils ont même des salariés formés ; nombreux sont ceux qui ont fait de gros efforts en la matière. De l’autre, le marché permettrait de maintenir et de développer des milliers d’emplois.

Nous attendons donc des signes forts de la part du Gouvernement. Certes, vous annoncez une loi mais, en fait les signaux que vous adressez sont plutôt inquiétants. Je n’en donnerai que deux exemples, sur lesquels je vous ai interrogées, mesdames les ministres, et à propos desquels je n’ai pas reçu de réponse, mais peut-être en aurai-je une ce soir.

Premièrement, confirmez-vous l’augmentation de la TVA applicable au secteur bois-énergie ? Elle passerait, semble-t-il, de 7 % à 10 % le 1er janvier 2014.

Deuxièmement, continuerez-vous d’exclure du crédit d’impôt développement durable, le CIDD, le fait de remplacer seulement des fenêtres, des volets isolants ou des portes d’entrée dans une maison individuelle ?

Au-delà, dois-je rappeler l’engagement du candidat Hollande, que certains ont rappelé ce soir, qui annonçait vouloir mettre en place un plan de travaux d’isolation thermique ? Nous souscrivons bien évidemment à l’idée, mais, pendant la campagne, il annonçait 1 million de logements par an, et nous voilà descendus à 500 000. Ce serait déjà bien que nous les fassions.

Mes questions sont simples, mesdames les ministres. Quels sont les dispositifs existants que vous conservez ? Vous évoquiez, madame la ministre du logement, le programme « Habiter mieux ». Et quels sont les dispositifs que vous supprimez, s’ils ne sont pas efficaces ? En proposez-vous de nouveaux ? Comment les financez-vous ? Quel calendrier nous annoncez-vous ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Madame la députée, je vous décevrai peut-être un peu mais je ne crois pas être en situation de pouvoir vous présenter ce soir, en deux minutes, l’intégralité du plan gouvernemental en faveur de la rénovation thermique. Je ne répondrai donc pas à toutes vos questions ! Certes, je pourrais faire semblant de vous répondre tout en ne vous répondant pas, mais je préfère vous annoncer avec franchise que je ne vous donnerai pas l’intégralité du dispositif.

Néanmoins, je veux répondre à l’une de vos questions, qui concerne précisément le CIDD. Actuellement, le CIDD est majoré pour un bouquet de travaux, et il n’est pas supprimé pour des travaux seuls. Nous souhaitons nous orienter vers une suppression du CIDD pour la réalisation d’un seul travail, sauf pour les ménages très modestes. Cependant, il nous semble absolument décisif de pousser à la réalisation de bouquets de travaux, dont l’efficacité énergétique est bien plus importante, lorsque les ménages en ont les moyens. C’est pourquoi nous souhaitons réserver le CIDD à la réalisation de bouquets de travaux, tout en conservant la possibilité d’accès au CIDD pour un seul travail pour les ménages modestes. Il ne s’agit toutefois que d’une piste de réflexion : pour le moment, la réglementation actuelle est maintenue et l’accès au CIDD est simplement majoré dans le cadre d’un bouquet de travaux.

S’agissant de l’ensemble du dispositif, nous conserverons les outils qui fonctionnent. Le CIDD fonctionne ; il en est de même pour l’éco-PTZ sous réserve que la certification soit simplifiée, car il est aujourd’hui très difficile d’obtenir le certificat permettant la délivrance de ce prêt. L’éco-PTZ pourra également être redimensionné afin de devenir plus accessible, notamment pour les ménages les plus modestes. En effet, la question du reste à charge est absolument décisive, de même que celle du tiers financeur si nous voulons une montée en charge rapide et efficace de ce plan, comme l’a bien expliqué Delphine Batho en réponse à M. Baupin.

Nos pistes pour améliorer de manière efficace la situation des ménages en précarité énergétique sont donc le tiers financement, le maintien des outils existants redimensionnés, ainsi qu’un travail complémentaire à destination notamment des ménages à revenus modestes dans le cadre du programme « Habiter mieux » redimensionné. Voilà le grand canevas de notre plan d’action, sans entrer plus avant dans les détails que vous connaîtrez très bientôt.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Jacques Krabal. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, l’efficacité énergétique du bâtiment est un enjeu écologique et économique majeur, mais également un enjeu social incontournable. La rénovation thermique des logements anciens est la priorité pour réduire la facture énergétique, et donc pour faire reculer la précarité énergétique.

Afin de favoriser la réhabilitation des logements anciens, il faut trouver un outil incitatif pour les propriétaires, pour les copropriétaires mais aussi pour les artisans. Je ne fais que le répéter : cet outil est clairement le taux de TVA, qui ne doit pas être relevé à 10 %, même s’il faut rappeler qu’il est passé de 5,5 % à 7 % sous le gouvernement Fillon. Si cette décision – qui représenterait quasiment un doublement en moins de deux ans – était mise en œuvre, elle aurait inévitablement de multiples conséquences indésirables qui ont été rappelées. N’oublions pas que les passoires thermiques, les habitations ayant le plus besoin de travaux de rénovation thermique, sont souvent situées dans le parc ancien : c’est donc là que l’effort doit être réalisé.

Je suis parfaitement conscient du contexte difficile pour nos finances publiques et des contraintes qui pèsent sur le Gouvernement. Cependant, compte tenu des objectifs écologiques ambitieux fixés en matière de rénovation thermique mais aussi d’emploi, ce relèvement de TVA présente un bilan coûts-avantages nettement défavorable.

Je vous soumets cette réflexion de Jean de la Fontaine dans la fable Le Héron : « On hasarde de perdre en voulant trop gagner. » Madame la ministre, n’est-il pas possible de maintenir un taux de TVA de 7 % pour les travaux de rénovation thermique ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre. Ce sujet a déjà été largement évoqué : Cécile Duflot a eu l’occasion de répondre ce soir à plusieurs parlementaires dont les interventions étaient convergentes. Ma réponse sera donc extrêmement brève.

Vous connaissez parfaitement la situation budgétaire. En outre, les entreprises que vous évoquez bénéficient du pacte de compétitivité : il faut le souligner, car il s’agit d’un élément dont il faut aussi tenir compte dans la balance.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal, pour une seconde question.

M. Jacques Krabal. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, l’énergie consommée au sein de chaque foyer représente en France le tiers de la consommation énergétique finale et le cinquième des émissions de CO2. Ainsi, le secteur du bâtiment est celui qui présente le meilleur potentiel d’amélioration en matière d’efficacité énergétique.

Nous ne pouvons contester que la principale source d’économies d’énergie des prochaines décennies est la diminution de la consommation. Nous savons aussi que la rénovation thermique des bâtiments ne suffira pas pour atteindre les objectifs d’amélioration de l’efficacité énergétique inscrits par le Gouvernement dans la feuille de route pour la transition écologique.

Il existe cependant un levier puissant, que François Brottes a également rappelé tout à l’heure : il s’agit de la sensibilisation des consommateurs et utilisateurs en vue de faire évoluer leurs comportements vers davantage de sobriété. Pour promouvoir des comportements responsables en matière de lutte contre le gaspillage, nous devons mettre en œuvre des campagnes d’information, ne pas cesser de répéter que l’énergie la moins chère est celle qui n’est pas consommée, et améliorer la mesure et l’affichage des consommations, notamment grâce aux compteurs intelligents.

Nous pouvons nous inspirer d’expériences réalisées à l’étranger, par exemple en Allemagne où des comportements de sobriété énergétique sont heureusement et depuis longtemps valorisés socialement, par le biais de concours récompensant des immeubles, des quartiers ou des familles.

Ainsi, pour un coût quasi nul, les factures de gaz et d’électricité pourraient facilement comporter de nombreuses informations pédagogiques, comme une évaluation de la consommation et les gains résultant de comportements vertueux.

Là encore, mesdames les ministres, je vous propose de faire mentir Jean de la Fontaine qui écrivait dans la fable L’Horoscope : « Mais, quoi qu’on fasse, propos, conseil, enseignement, rien ne change un tempérament. » Nous devons prouver le contraire et oser la pédagogie verte. Mesdames les ministres, comment comptez-vous renforcer les actions pédagogiques pour faire évoluer dans le bon sens les comportements de nos concitoyens ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre. Monsieur le député, vous avez parfaitement raison : j’évoquais tout à l’heure l’enjeu de la modification des comportements en faveur de la performance, de l’efficacité et de la sobriété énergétiques. Le mot « sobriété » résonne d’ailleurs parfois comme un synonyme de « restriction », alors qu’il s’agit de permettre à chacun d’accéder à un confort de vie normal.

La plus forte sensibilisation au changement des comportements réside dans la réduction de la facture et dans l’impact financier des économies d’énergie qui peuvent être réalisées par les consommateurs. Il faut en effet déployer des politiques publiques puissantes en faveur des économies d’énergie : c’est l’enjeu du bonus-malus, qui permettra aux consommateurs de disposer d’un signal incitatif et lisible sur leur facture d’énergie. 75 % des consommateurs percevront ce bonus : voilà déjà un encouragement très significatif aux économies d’énergie.

Le deuxième élément de sensibilisation consiste en un développement des compteurs intelligents – d’électricité ou de gaz – qui permettront aux utilisateurs de suivre en temps réel leur consommation, et donc de mieux la maîtriser. Cela nécessitera certainement aussi – nous en discuterons dans le cadre de la transition énergétique – une évolution des tarifs eux-mêmes. C’était, à l’origine, le principe du tarif « tempo » : l’énergie devait être plus chère aux heures de pointe et moins chère aux heures creuses. Nous devrons certainement réfléchir à cette question de l’évolution des tarifs.

Le troisième élément de sensibilisation correspond à des grandes campagnes d’information. Tout le monde se souvient de la campagne menée à la fin des années 1970 sur le thème de la « chasse au gaspi », qui fait encore référence aujourd’hui. Il ne s’agira pas de refaire la même chose, mais il est prévu que l’ADEME engage des campagnes de communication à destination du grand public sur la question des économies d’énergie. Elle dispose des budgets pour effectuer ce travail parallèlement à la réalisation du plan de rénovation thermique. Le futur président de l’ADEME était d’ailleurs auditionné tout à l’heure par la commission du développement durable.

La meilleure campagne de communication consiste sans doute à donner la parole à ceux qui ont réalisé des travaux dans leur maison. Avec Cécile Duflot, nous étions la semaine dernière à Melun, en Seine-et-Marne, chez un monsieur ayant réalisé chez lui des travaux à hauteur de 19 000 euros, pris en charge par le programme « Habiter mieux » avec néanmoins un reste à charge de 8 000 euros – c’est peut-être sur ce point que les dispositifs doivent évoluer aujourd’hui. Ce monsieur réalisera 2 000 euros d’économies par an sur ses factures de chauffage et d’électricité. Un tel exemple reste quand même le témoignage le plus convaincant pour favoriser un certain nombre de travaux et accélérer les changements de comportements.

Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Mesdames les ministres, mes chers collègues, l’amélioration de l’efficacité et de la sobriété énergétiques du secteur résidentiel est un volet déterminant de la transition énergétique que nous voulons engager. La consommation énergétique du secteur résidentiel et tertiaire représente plus de 40 % de la consommation d’énergie finale en France et contribue à hauteur de 18 % aux émissions nationales de gaz à effet de serre.

Notre volonté en matière d’isolation des bâtiments et de réduction de la consommation moyenne d’énergie des logements ne doit souffrir d’aucun retard et doit s’adapter à la réalité. Ce n’est un secret pour personne : dans le secteur du bâtiment comme ailleurs, il y a la règle et la réalité des faits.

Depuis la directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments de 2002, le législateur a progressivement renforcé les mesures visant à améliorer la performance énergétique des bâtiments, en obligeant notamment le propriétaire, suite au Grenelle 2, à tenir à la disposition de tout candidat acquéreur ou locataire un diagnostic de performance énergétique.

En raison des très nombreuses critiques à l’encontre des DPE et des diagnostiqueurs, plusieurs arrêtés ont renforcé les compétences nécessaires à l’ensemble des entreprises réalisant des DPE et ont revu les méthodes de calcul. Mais force est de constater que ces DPE sont toujours effectués dans une certaine impunité. Concrètement, il n’est pas rare – pour ne pas dire qu’il est fréquent – de voir des diagnostiqueurs réaliser leur travail en moins d’une heure, sans vérification des dires des vendeurs, voire par simple contact téléphonique sans déplacement sur le terrain. Je pense en particulier au contrôle des isolants, notamment dans les combles.

Nous avons besoin d’adapter la pratique aux objectifs ambitieux de la transition énergétique. Pour nous prémunir de telles dérives, il devient indispensable de nous doter d’un véritable système public de contrôle inopiné de ces entreprises ou de ces personnes physiques.

Madame la ministre, ma question est donc simple : au-delà de la multiplication des décrets et des arrêtés, quels engagements comptez-vous prendre pour donner à la puissance publique de véritables moyens humains de contrôle dans ce domaine déterminant pour la réalisation de nos objectifs ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. La question du diagnostic de performance énergétique est un sujet absolument majeur. En effet, si l’on prend en considération la nécessité des améliorations voire, à terme, des obligations en matière de performance énergétique que j’ai évoquées tout à l’heure, une grande solidité du diagnostic est indispensable. Aujourd’hui, le DPE est un document d’information et de sensibilisation. Il doit être fiabilisé, afin de devenir un document de référence et servir de point d’appui pour les travaux.

Je tiens à vous dire qu’un diagnostiqueur qui exercerait mal son travail engage aujourd’hui sa responsabilité délictuelle : nous n’évoluons donc pas dans un univers totalement déréglementé. Le diagnostiqueur dispose aujourd’hui des outils lui permettant d’évaluer l’ensemble des matériaux d’isolation : il est donc effectivement indispensable que cette connaissance professionnelle progresse. La formation initiale est une vraie question, car nous manquons en France de thermiciens et de professionnels suffisamment formés. Le plan de formation aujourd’hui mis en œuvre dans l’ensemble du secteur du bâtiment devra continuer de se développer et prendre en compte le diagnostic, en particulier sur la performance énergétique.

Cependant, malgré tous ces reproches, le diagnostic de performance énergétique a suscité une prise de conscience des différences de consommation et de performance énergétiques dans les divers lieux d’habitat, qui n’existait absolument pas avant la mise en place de ce dispositif.

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour une seconde question.

M. André Chassaigne. Mesdames les ministres, je l’ai déjà dit : le bâtiment est à l’origine d’environ 40 % de la consommation d’énergie finale dans notre pays. L’effort concerne les 400 000 nouveaux bâtiments construits chaque année – c’est, du moins, ce que nous espérons – qui doivent devenir particulièrement performants : l’objectif à atteindre est une consommation annuelle de 50 kilowattheures par mètre carré. Mais l’effort concerne aussi – et surtout – le parc ancien, d’une taille cent fois plus importante, qui nécessite une rénovation de grande ampleur puisque la consommation moyenne de ces bâtiments est actuellement au moins six à sept fois supérieure à celle des bâtiments neufs.

Un instrument juridique sert de support à l’immense effort d’adaptation indispensable : il s’agit de la dernière version de la réglementation thermique, dite RT 2012, entrée en vigueur le 1er janvier 2013.

Depuis 2005 et jusqu’en 2015, la France a notamment fait le choix du crédit d’impôt développement durable pour inciter les consommateurs à s’équiper d’appareils de production de chaleur performants ou à rechercher une meilleure isolation des bâtiments. Les taux de crédit d’impôt varient en fonction des équipements, mais il n’est en aucun cas tenu compte de l’origine de ceux-ci. Ainsi, nous venons de subventionner pendant plusieurs années des pompes à chaleur air/eau à un taux de crédit d’impôt de 23 %, dont l’immense majorité étaient fabriquées en Chine, et nous faisons de même avec les chauffe-eau thermodynamiques aujourd’hui.

M. Laurent Furst. Eh oui !

M. André Chassaigne. Ma première question est donc simple et j’aurais pu la poser en d’autres lieux au ministre du redressement productif : pensez-vous qu’il soit envisageable de revoir les conditions de bénéfice du crédit d’impôt afin de favoriser les excellents équipements produits en France ou en Europe ?

Par ailleurs, plusieurs entreprises françaises dont les produits innovants ont fait la preuve de leur performance in situ se heurtent à des obstacles d’ordre administratif pour les faire homologuer, notamment parce que les tests techniques imposés sont réalisés sur banc, hors de toute situation réelle.

C’est le cas dans le secteur des isolants : plusieurs parlementaires ont recensé des plaintes émanant d’entreprises promouvant des matériaux biosourcés – chanvre, ouate de cellulose – ou des films multicouches. Des échos font état d’obstacles similaires pour d’autres produits innovants, comme des pompes à chaleur ou des systèmes de ventilation.

Je viens de demander aujourd’hui par courrier au président du Bureau de l’Assemblée nationale de saisir l’OPECST, afin qu’il mobilise ses moyens d’expertise scientifique et dresse un bilan de la situation. Ainsi le Parlement serait-il éclairé sur les éventuelles réformes à entreprendre pour retrouver le chemin de réelles économies d’énergie dans le bâtiment. Je souhaitais donc également savoir si vous comptez, mesdames les ministres, aider à lever ces blocages.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre. Votre question illustre un concept que j’ai mis en avant, le patriotisme écologique. Celui-ci doit nous permettre de revisiter toute une série de dispositifs, comme par exemple les mécanismes de soutien aux énergies renouvelables : chaque euro dépensé dans le développement des énergies renouvelables doit se traduire par le développement de filières industrielles et par des créations d’emplois.

Vos remarques sur le dispositif du CIDD doivent absolument être prises en compte. Il faut rechercher les bonnes réponses à apporter, les mécanismes aptes à orienter les travaux d’efficacité énergétique, notamment en faisant appel à des critères de qualité. Il convient aussi de sensibiliser les entreprises sur leurs achats de fournitures et d’équipements. Vous avez raison de dire qu’il faut effectuer dans ce domaine un travail très important.

Le déploiement du projet du compteur intelligent « linky » s’appuie sur une démarche similaire, prenant en compte les matériaux qui entrent dans sa composition. Depuis sa conception par le précédent gouvernement, l’évolution du projet est notable.

Je vous rejoins aussi sur les observations que vous avez faites sur les matériaux biosourcés. Nous avons évoqué le sujet la semaine dernière avec Cécile Duflot, car nous avons eu écho d’un certain nombre de difficultés et de blocages. Ayant des attaches avec un département, les Deux-Sèvres, où se trouvent des cultures de chanvre – un matériau tout à fait exceptionnel pour l’isolation des maisons – je connais la problématique.

J’ai eu l’occasion aussi d’en parler avec d’autres parlementaires, membres de l’OPECST : si l’Assemblée nationale décidait d’engager des travaux sur cette question, cela contribuerait certainement à faire avancer les choses dans la bonne direction.

Mme la présidente. La parole est à M. Fabrice Verdier, pour le groupe SRC

M. Fabrice Verdier. Mesdames les ministres, l’inconvénient de passer en dernier est de se voir souffler les questions par ses collègues ! M. Chassaigne a évoqué un sujet qui m’est cher, celui du DPE, mais je l’ai trouvé sévère car, sous votre impulsion commune, la fiabilité s’est améliorée.

Un certain nombre de mesures ont été prises, qui font que ce diagnostic peut désormais être utilisé en confiance, dans la plupart des cas, par ceux qui projettent une rénovation thermique.

Serait-il néanmoins envisageable de réfléchir à une responsabilité, non pas délictuelle, mais juridique des diagnostiqueurs ? Ainsi, pourrait-on prévoir en toute confiance une rénovation, muni d’un véritable bilan thermique, accompagné d’un calendrier hiérarchisant les travaux et d’un plan de financement présentant les aides éligibles.

Vous avez évoqué le formidable chantier que constitue la rénovation thermique. Il faut que ceux qui la réalisent sur la base d’un diagnostic puissent agir en confiance.

Envisagez-vous donc de conduire une réflexion autour du DPE et de la responsabilité des diagnostiqueurs, associant des juristes, assureurs et professionnels du secteur ? L’attente est grande pour faire du DPE le premier outil de la politique d’efficacité énergétique.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre. Comme Cécile Duflot l’a dit tout à l’heure, les diagnostiqueurs ont déjà une responsabilité juridique.

Un plan de fiabilisation est en cours. Reste la question du prix du DPE : faut-il une norme au mètre carré ? Les maisons étant différentes, cela soulève toute une série de questions techniques. Chacun connaît des exemples où, pour une même habitation, deux diagnostics peuvent donner lieu à des résultats différents et ne pas être tarifés de la même façon.

Il convient donc de normaliser et de fiabiliser le DPE. Sans doute faut-il mettre en place, comme Cécile Duflot l’a évoqué, un DPE + qui déboucherait sur la prescription de travaux et permettrait de vérifier, après leur réalisation, l’amélioration de la performance énergétique du logement. Ce DPE + serait donc prescriptif et beaucoup plus normé que le DPE de base.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Bies, du groupe SRC.

M. Philippe Bies. Madame la présidente, mesdames les ministres, comme cela a été rappelé à plusieurs reprises ce soir, le Président de la République a fait de la rénovation thermique une priorité de son quinquennat. Chaque année, 500 000 logements seront remis aux normes en se concentrant sur les 4 millions de logements les plus énergivores.

La rénovation thermique concernera particulièrement le parc social, dont une grande partie a été construite entre 1960 et 1975, période où les procédés de construction étaient le plus gourmands en énergie.

La réalisation des objectifs, tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif, dépendra des outils de financement. Aujourd’hui, les travaux de rénovation thermique réalisés par les bailleurs sociaux sont principalement financés par des emprunts comme l’éco-prêt de la Caisse des dépôts et consignations et par des aides des collectivités locales. Toutefois, ces dernières se révéleront très vite insuffisantes et il est nécessaire de trouver de nouveaux modes de soutien.

À titre d’exemple, une étude réalisée récemment pour le compte de l’association des organismes HLM alsaciens a démontré que pour traiter les 38 000 logements prioritaires dans la région, il faudrait augmenter d’environ 60 % le niveau d’investissement des bailleurs. Le coût des travaux est plus ou moins important selon le type de bâtiments, mais il est aussi fonction du gain énergétique nécessaire pour atteindre l’optimum énergétique.

On constate que les travaux effectués n’entraînent pas toujours des économies pour le locataire, mais qu’ils réduisent fortement l’impact de l’augmentation continue du coût de l’énergie.

Il est donc impératif d’aider les bailleurs sociaux grâce aux différents instruments de financement public et aux aides que vous serez à même d’envisager, y compris le taux réduit de TVA. Ces aides pourraient être octroyées en fonction de l’effort à fournir pour atteindre les objectifs de performance énergétique fixés, et non pas exclusivement en fonction du niveau de performance atteint.

Quels sont les outils de financement et les aides que l’État pourrait apporter aux bailleurs sociaux pour permettre la réhabilitation thermique des logements sociaux ? Quels seront les critères d’attribution de ces aides ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le député, vous avez raison de dire à quel point la mobilisation des acteurs du logement social est décisive.

En effet, leur parc est important et il est possible de mener les travaux simultanément dans de nombreux logements, voire dans des immeubles entiers. Par ailleurs, agir dans ce secteur permet de limiter les conséquences de la hausse du coût de l’énergie sur des ménages dont les ressources sont modestes.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé de renforcer le dispositif de l’éco-PLS. Ce prêt a démontré depuis 2009 son efficacité, puisque l’enveloppe de 1,2 milliard d’euros pour la rénovation de 100 000 logements était entièrement engagée dès mai 2011.

Il existe donc une attente et une volonté de la part des bailleurs. Le relèvement du plafond du livret A devrait permettre de mobiliser davantage l’épargne. Quant à l’éco-PLS, il fait désormais partie des prêts classiquement distribués par la Caisse des dépôts et consignations aux bailleurs sociaux qui en font la demande.

C’est donc bien une pérennisation et un développement qui sont engagés par le Gouvernement. Si l’objectif en matière de rénovation est intégré, il nous semble qu’il faut se fixer aussi des objectifs en termes de diminution de la consommation d’énergie, afin que les locataires en perçoivent un bénéfice direct. Les rénovations doivent donc être importantes.

Dans le cadre du plan de rénovation thermique, nous réfléchirons à la mise en place de dispositifs spécifiques pour les bailleurs qui ont besoin de l’impulsion nécessaire pour intervenir. Ainsi, la mutualisation des fonds propres, destinée au financement de la construction de logements neufs, pourrait être utilisée pour la rénovation.

Nous sommes plus que sensibilisés à cette question, ainsi qu’au risque de l’effet rebond, qui entraîne une surconsommation après les travaux lorsque le travail de médiation et d’explication n’a pas été effectué auprès des locataires.

Mme la présidente. Mes chers collègues, le débat est clos. Je veux vous féliciter pour votre efficacité et remercier les ministres pour leurs réponses concises et précises.

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Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, mercredi 27 février à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Débat sur « le Mali : au-delà de l’intervention militaire, perspectives de reconstruction et de développement ».

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-deux heures cinquante-cinq.)