Marché locatif et crise du logement : examen de deux propositions de loi

partager
Commission des affaires économiques : Proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue

Mardi 28 novembre, la commission des affaires économiques a adopté la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue.

Rapporteurs  : Annaïg Le Meur et Inaki Echaniz

Voir le dossier législatif

Cette proposition de loi a été déposée le 28 avril par Annaïg Le Meur (RE, Finistère) à l’issue de la remise du rapport de la mission d’information sur les moyens de faire baisser les prix du logement en zone tendue. Le bureau de la commission des affaires économiques a reconnu le caractère transpartisan de la proposition de loi lors de sa réunion du 17 mai 2023. La proposition de de loi sera examinée en séance publique à compter du lundi 4 décembre 2023 soir.

Voir la vidéo de l’examen en commission (après midisoir)

En commission, Annïg Le Meur a affirmé que l’objet du texte n’est pas d’interdire les plateformes ou les meublés de tourisme. « Nous avons besoin d’avoir une offre de tourisme adaptée et attractive sur l’ensemble de notre territoire mais celle-ci ne doit pas se faire au détriment d’une offre de location à l’année » a-t-elle précisé. Elle regrette ainsi que « des villages entiers se vident sous le poids des meublés de tourisme et se transforment en ‘village vacances’ ». Inaki Echaniz a affirmé se faire le relai du « cri d’alarme des élus locaux » alors que ce problème ne concerne pas que les zones touristiques comme Paris, Biarritz ou Marseille mais « se propage jusqu’à Orléans, Bourge ou Caen ».

De fait, dans leur rapport, Annaïg Le Meur et Inaki Echaniz font le constat d’une « explosion de l’immobilier touristique suscitant une attrition du logement disponible dans les zones tendues ». Le nombre de nuitées dans les meublés touristiques s’est très fortement développé depuis le début des années 2000. Selon les rapporteurs, en 2018, les hébergements touristiques proposés par des particuliers via des plateformes internet représentaient 14 % des nuitées alors qu’ils n’en représentaient que 9 % en 2015.

Selon ADN Tourisme, 186 000 meublés classés étaient comptabilisés au 31 décembre 2022, ce qui constitue une progression de 11 % sur une année. Selon le Gouvernement, l’offre de meublés de tourisme (classés et non classés) serait de l’ordre de 800 000 logements.

Cette augmentation des meublés de tourisme ne concerne plus seulement les communes historiquement touristiques. Les rapporteurs constatent une augmentation du nombre de communes concernées. Par exemple, les rapporteurs soulignent que Bourges a enregistré 500 nouveaux meublés de tourisme en un semestre, « occasionnant un déséquilibre locatif sur son centre-ville ».

Annaïg Le Meur et Inaki Echaniz expliquent le développement du local touristique par rapport au logement du fait d’avantages réglementaires. En effet, ils considèrent que la seule rentabilité brute généralement plus élevée que celle du logement de longue durée et la sécurisation des transactions du fait de la facturation préalable ne peuvent expliquer à elles seules le développement des meublés touristiques. Ils avancent que les propriétaires peuvent bénéficier d’avantages réglementaires (pas d’application de l’interdiction de louer les « passoires énergétiques » par exemple) mais surtout fiscaux. En effet, les régimes des locaux meublés non classés et des meublés de tourisme bénéficient d’un régime fiscal nettement plus avantageux que ceux des logements nus. Selon une simulation de rendement locatif réalisée par l’inspection générale des finances et le conseil général de l’environnement et du développement durable en 2016, en régime réel, l’écart de taux de rentabilité interne au profit de la location meublée était compris en 0,6 et 2,1 points de pourcentage.

En  commission, les députés ont universalisé le numéro de déclaration des meublés de tourisme (amendement CE179, sous-amendé par le CE188).

L’article 1er soumet les meublés de tourisme aux mêmes obligations de performance énergétique que les logements. En d’autres termes, les « passoires énergétiques » (classées F, G) seront interdites à la location d’ici 2028.

Les députés ont, par ailleurs, donné la possibilité aux communes d’abaisser le nombre maximal de jours durant lequel une résidence principale peut être louée en tant que meublé de tourisme de 120 jours à 90 jours par an (amendements identiques CE88, CE134 et CE148).

Ils ont également ouvert la possibilité pour les communes d’élargir l’autorisation d’enregistrement du changement d’usage de tous les locaux qui ne sont pas à usage d’habitation et non par les seuls locaux à usage commercial (amendements identiques CE80 et CE107, sous-amendé par le CE187).

L’article 2 vise à doter les élus de compétences élargies pour réglementer l’implantation des locaux à usage touristique. En commission, les députés ont ouvert la possibilité pour les communes de limiter le nombre de changements d’usage temporaire pour la location de courte durée (amendement CE177) et, pour les communes ayant un taux de résidence secondaire supérieur à 20 %, de définir des zones où les résidences nouvelles seront à usage exclusif de résidence principale (amendement CE176). Ils ont également modifié le contrôle du changement d’usage des biens à usage d’habitation en considérant que l’affectation à usage d’habitation depuis le 1er janvier 1970 vaut usage d’habitation sauf décision explicite contraire (amendement CE34) et ont intégré les personnes morales et non plus les seules personnes physiques dans le régime de l’autorisation de changement d’usage (amendements CE81, CE101 et CE150).

L’article 3 modifie la fiscalité applicable aux meublés de tourisme, en prévoyant une révision des abattements fiscaux et des plafonds de chiffre d’affaires applicable au sein du régime « micro-BIC » pour les meublés. Actuellement fixé à 50 %, les députés ont réduit l’abattement à 30 % en commission (amendement CE201). Il s’agit d’introduire dans le dispositif les autres types de locaux tels que les bureaux.

Ils ont également supprimé la double déduction des amortissements pour les logements en location meublée non professionnelle dans le cadre du régime réel (amendement CE39, sous-amendé par le CE47).

Enfin, les députés ont créé l’obligation pour les propriétaires d’informer les éventuels copropriétaires, via le syndic, de leur souhait de louer son logement en courte durée (amendement CE68).

 

 

Mercredi 29 novembre, la commission a adopté la proposition de loi portant mesures d’urgence pour remédier à la crise du logement.

Rapporteur : Thibault Bazin

Voir le dossier législatif

 

 

Voir les réunions de la commission sur le portail vidéo