Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus de la session > Compte rendu intégral

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Consulter le sommaire
Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2010-2011

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mardi 22 mars 2011

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Marc Laffineur

1. Organisation du championnat d’Europe de football de l’UEFA en 2016

Motion de rejet préalable

M. Hervé Féron

Rappel au règlement

Mme Valérie Fourneyron

Motion de renvoi en commission

M. André Gerin

M. Régis Juanico, Mme Marie-George Buffet

Discussion générale

M. Éric Berdoati

Mme Valérie Fourneyron

Mme Marie-George Buffet

M. Michel Hunault

Mme Valérie Rosso-Debord

M. Régis Juanico

Mme Colette Langlade

M. Michel Ménard

M. Jean-Luc Pérat

M. Henri Nayrou

Mme Chantal Jouanno, ministre des sports

Discussion des articles

Article 1er

Amendements nos 2, 5

M. Bernard Depierre, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 2

Amendements nos 3, 6

Article 3

Amendements nos 4, 7

Explications de vote

M. Pascal Deguilhem, M. Éric Berdoati, Mme Marie-George Buffet, M. Michel Hunault

Vote sur l’ensemble

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Marc Laffineur,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Organisation du championnat d’Europe
de football de l’UEFA en 2016

Suite de la discussion,
après engagement de la procédure accélérée,
d’une proposition de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, de la proposition de loi relative à l’organisation du championnat d’Europe de football de l’UEFA en 2016 (nos 3149, 3203).

Motion de rejet préalable

M. le président. J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de rejet préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 5, du règlement.

La parole est à M. Hervé Féron.

M. Hervé Féron. Monsieur le président, madame la ministre des sports, mes chers collègues, au nom du groupe socialiste, radical et citoyen, j’ai l’honneur de défendre devant vous une motion de rejet préalable, selon les termes du règlement intérieur de l’Assemblée nationale.

En effet, cette proposition de loi relative à l’organisation du championnat d’Europe de football de l’UEFA en 2016 est une proposition d’exception à la loi, tant elle paraît avoir été organisée sur commande pour ne profiter qu’à quelques-uns et dans le cadre exclusif du championnat d’Europe de football de l’UEFA 2016.

Nous souhaitons d’abord affirmer haut et fort que nous aimons le sport en général, et le football en particulier. Chaque fois qu’une belle manifestation sportive internationale est à organiser, nous avons envie que cela soit possible en France, ce qui est le cas pour ce championnat d’Europe de football 2016. Néanmoins, parce que nous sommes des élus responsables, nous ne souhaitons pas que cela se fasse à n’importe quel prix.

Ne nous faites donc pas, une fois de plus, un mauvais procès pour détourner le débat sur le fond. Ne nous dites pas que parce que nous combattons vivement cette scandaleuse proposition de loi, nous n’aimerions pas le football ou le sport en général. Vous avez tenté de le faire en commission, mais la ficelle est trop grosse.

Pourquoi, disais-je, ne voulions-nous pas que l’organisation se fasse à n’importe prix ? Parce que nous constatons, premièrement, des exigences surdimensionnées de l’UEFA ; deuxièmement, un désengagement de l’État au détriment des collectivités territoriales ; troisièmement, la démocratie une fois de plus bafouée.

Ne nous faites pas non plus le coup du cocorico avec le rappel de la réélection de Michel Platini et des qualités de cette belle équipe de France ! Nous ne partageons pas l’euphorie qui était la vôtre tout à l’heure, madame la ministre, je suis désolé. Surtout, ce n’est pas le débat ce soir, ce n’est pas de cela dont nous devons parler.

D’ailleurs, vous n’avez pas osé tenir l’objectif qui avait été annoncé en réunion au ministère en octobre 2010, qui était de déposer un projet de loi, un projet de loi qui aurait abordé notamment la question de la propriété des enceintes sportives et des relations entre les collectivités et les fédérations sportives. ; un projet de loi qui aurait permis d’aborder l’ensemble de la problématique de façon stratégique, dans une cohérence globale et non pas pour satisfaire des intérêts particuliers.

Vous nous aviez annoncé en commission que ce projet de loi allait venir, mais il aurait fallu élaborer une véritable politique du sport construite et concertée bien avant que de parler des avantages à consentir aux uns et aux autres. Cette façon de faire est une nouvelle preuve des errements du Gouvernement.

À la fin de l’année 2010, j’avais demandé à Mme Rama Yade où on en était de ce projet de loi. Il m’avait été répondu que le Gouvernement était en recherche d’un « véhicule législatif ». En février, alors que je vous posais à nouveau la question en commission, madame la ministre, vous m’aviez annoncé qu’un député UMP déposerait une proposition de loi prochainement. Ce fut fait trois jours plus tard par M. Depierre.

Pourquoi une telle évolution ? Pourquoi est-on passé d’un projet de loi à un « véhicule législatif » pour enfin aboutir à une proposition de loi ? D’une part, parce que le Gouvernement ne souhaitait pas répondre de cette absence de politique sportive ambitieuse et concertée à travers un projet de loi, d’autre part, parce qu’une proposition de loi n’oblige pas à recueillir, au préalable, l’avis du Conseil d’État et à présenter une étude d’impact.

Mme Marie-George Buffet. Tout à fait !

M. Hervé Féron. Dans cette proposition de loi déposée en catimini, trois sites seulement sont concernés par le bail emphytéotique administratif : Paris, Lens et Nancy.

Pour préparer cette proposition de loi, M. Depierre, ami de M. Dufraisse, adjoint au maire de Nancy, a décidé d’auditionner d’une part, le président et le directeur général de l’AS Nancy Lorraine, d’autre part, Mme Werner-Rossinot et maître Cuche, avocat représentant la communauté urbaine du Grand Nancy. On se souvient peut-être que Michel Platini, originaire de Nancy, avait reproché publiquement au maire de cette ville, président de la communauté urbaine de Nancy, de n’avoir pas candidaté pour la Coupe du monde de 1998.

M. Depierre a organisé ces auditions à huis clos. Alors que cette proposition de loi est manifestement demandée par quelques-uns, dans le cadre strict du championnat d’Europe de football 2016, alors qu’elle servira les intérêts de ces mêmes quelques-uns, alors que les personnes auditionnées sont directement intéressées par la proposition de loi, nous n’avons pas pu participer à ces deux auditions et poser les questions pertinentes, voire les questions qui auraient dérangé.

Et puis, la proposition de loi vient à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale entre les deux tours des élections cantonales avec, cerise sur le gâteau, la procédure accélérée, entrave supplémentaire au débat démocratique. À force de faire les choses en cachette, on se demande si c’est une proposition de loi ou une maladie honteuse.

Je parlais d’exigences surdimensionnées de l’UEFA.

Onze villes ont été retenues pour accueillir les matchs de l’Euro de football 2016. Neuf d’entre-elles le seront définitivement par la Fédération française de football en mai 2011. Cela étant les exigences de l’UEFA sont exorbitantes : deux stades de 50 000 places, trois stades de 40 000 places, quatre stades de plus de 30 000 places. Le cahier des charges de l’UEFA faisait de tous les stades français des infrastructures trop obsolètes. Même le Stade de France a été évalué comme n’étant pas au niveau. Quand on connaît le train de vie de l’UEFA, ses installations en Suisse, et que l’on considère la baisse du pouvoir d’achat des Français, on se dit qu’il y a quelque indécence à poser ce niveau d’exigence. Il n’y aura bientôt plus que le Quatar qui sera en capacité d’organiser des manifestations de ce type !

Ces exigences paraissent également surdimensionnées eu égard aux exemples de compétitions internationales récentes qui ont nécessité la création d’infrastructures démesurées quant aux besoins du pays organisateur.

Le bilan des jeux Olympiques d’Athènes en 2004 est certainement le pire de tous : quatre ans après, vingt et un des vingt-deux sites sont à l’abandon. La piscine est vide et sale, les squatteurs campent devant un complexe sportif couvert de graffitis. L’organisation des Jeux d’Athènes a coûté la somme record de 9 milliards d’euros et a laissé une dette énorme à la Grèce. Le déficit qui en a suivi se monterait à 50 000 euros par foyer, que les contribuables remboursent encore aujourd’hui. On pourrait en dire autant des jeux Olympiques d’hiver de Turin. Et après la Coupe du monde de football en Afrique du Sud, les stades sud-africains, eux, sont désespérément vides.

Je vous invite aussi à lire La lettre de l’économie du sport du 25 février 2011 et les inquiétudes de M. Pelé quant au retard pris par le Brésil pour la Coupe du monde 2014 – nous sommes en 2011 – alors que les stades français, eux, devront être, selon les exigences de l’UEFA, opérationnels en 2014. Et que dit João Havelange, ex-président de la FIFA, à propos du Brésil ? Que l’État devrait faire un effort !

M. Depierre a tenté, en commission, de justifier les exigences de l’UEFA en affirmant qu’en France, les stades construits pour l’Euro 2016 serviraient ensuite aux clubs résidents et ne seraient donc pas à l’abandon.

Mme Marie-George Buffet. Ils sont surdimensionnés !

M. Hervé Féron. Je vous invite à regarder de plus près l’exemple du Portugal, organisateur du championnat d’Europe de football en 2004 : on constate une incapacité à entretenir les infrastructures construites il y a sept ans et on se demande même s’il ne faudra pas en démolir.

M. Depierre commence lui-même à se piéger lorsqu’il annonce que ces stades pourront servir par la suite aux clubs résidents, alors que cette proposition de loi est faite pour mettre de l’argent public dans la réalisation de projets privés. On saurait donc à l’avance à qui cela profitera ? Où est la libre concurrence ?

Prenez le projet de Nancy. Il s’agit de construire un stade de 32 000 places, alors que l’AS Nancy Lorraine n’aura rempli son actuel stade de 20 000 places qu’une fois cette saison, pour recevoir Marseille, et que sa moyenne réelle de spectateurs est d’environ 12 000 par match.

M. Régis Juanico. Il y en aura plus pour Saint-Étienne ! (Sourires.)

M. Hervé Féron. Pour répondre aux exigences de l’UEFA, il faudrait construire un stade qui, pendant des dizaines d’années, sera vide la plupart du temps. De plus, le rythme imposé par l’UEFA amènera forcément à ne pas respecter les règles d’urbanisme et à contourner les nécessaires enquêtes d’utilité publique prévues par la loi.

J’évoquais, deuxièmement, le désengagement de l’État.

Le Président de la République s’est bien sûr triomphalement approprié la candidature pour l’Euro 2016.

M. Régis Juanico. Comme d’habitude !

M. Hervé Féron. Il a annoncé une participation de l’État à hauteur de 153 millions d’euros pour l’agrandissement et la rénovation de l’ensemble des stades. On notera tout d’abord qu’il ne savait pas, à l’époque, comment il allait financer cette somme.

Mme Marie-George Buffet. C’est bien le problème.

M. Hervé Féron. Lorsque, en octobre 2010, nous avons posé la question au ministère, il nous a été répondu évasivement que cela transiterait par le CNDS. Il a fallu attendre le projet de loi de finances pour 2011 pour trouver une disposition qui consistait à financer cela par un prélèvement de 0,3 % sur les jeux en dur de la Française des jeux pour la période 2011-2014. Le groupe socialiste, radical et citoyen s’est opposé à cette contribution du CNDS qui ne profitera qu’au monde du football, et non aux autres disciplines sportives.

Il faut remarquer que ces 153 millions d’euros ne représentent, sur le 1,7 milliard d’euros d’investissements prévus, que 8,5 % des dépenses, alors que l’État avait participé à hauteur de plus de 30 % pour la Coupe du monde de football de 1998. Le produit de la taxe sur les jeux en dur étant d’ores et déjà plafonné, il est évident que ce prélèvement supplémentaire sera très nettement insuffisant. Il est donc à craindre que le CNDS participe à ces investissements pour l’Euro 2016 au détriment d’autres petites infrastructures tellement nécessaires aux clubs sportifs de notre pays.

Grâce à la présente proposition de loi, le Gouvernement pourra se désengager en faisant porter les financements par le CNDS, mais également par la contribution, désormais possible, des collectivités territoriales.

Lorsque celles-ci participeront pour tout ou partie avec l’argent public à la rénovation et à l’agrandissement de ces stades, elles ne pourront plus accompagner les projets des petits clubs sportifs, du sport amateur, des disciplines moins riches ; elles ne pourront plus non plus investir dans les infrastructures largement ouvertes au service du public.

Je parlais de démocratie bafouée.

En effet, le plus grave peut-être est que vous tentez de leurrer les Françaises et les Français en leur faisant croire que, par le bail emphytéotique administratif, ces agrandissements ou rénovations de stades – à un niveau souvent inutile – seront financés par les investisseurs privés. Cela est particulièrement séduisant : les Français aiment le foot.

Cependant les Français sont de plus en plus pauvres ; ils n’ont plus de quoi se nourrir, plus de quoi se soigner ; les retraites sont misérables, les jeunes n’ont plus d’espoir. Qu’on leur donne donc du pain et des jeux ! Et faites leur croire en plus que les stades, grâce au BEA, seront payés par des investisseurs privés.

Or cette proposition de loi va rendre possible, à l’insu des Français, l’utilisation du BEA comme couverture, et le financement des projets, pour tout ou partie, avec l’argent public, c’est-à-dire avec l’impôt de nos concitoyens, alors que les bénéfices de l’exploitation de ces stades iront, eux, dans des poches privées.

Mme Marie-George Buffet. Exactement !

M. Hervé Féron. Vous trompez les Français ! Vous devriez de toute urgence tirer les leçons du vote de dimanche dernier, qui a sévèrement sanctionné vos politiques et ce genre de méthodes.

Je l’ai dit, le BEA ne concerne que trois sites : Paris, Lens, Nancy. Votre proposition de loi restreint exclusivement pour l’instant ces petits avantages à l’Euro 2016. Vous ne ferez pas croire que vous n’avez pas déjà une petite idée sur les promoteurs, les grands groupes de BTP et les clubs résidents qui vont profiter de l’opération. Nous sommes manifestement face à de petits arrangements entre amis, triste image de la politique offerte aux citoyennes et aux citoyens de ce pays entre deux tours d’élections cantonales !

L’article 1er vise à permettre, pour les BEA, l’ouverture aux aides de toutes les collectivités, y compris la collectivité bâilleuse. C’est-à-dire que la collectivité qui louera l’infrastructure pourra non seulement participer financièrement à l’investissement privé, mais aussi y ajouter une subvention à peine déguisée, en concédant un prix de location dérisoire. Ce sera tout bénéfice pour l’investisseur privé ! C’est donc la nature même du bail emphytéotique administratif qui est mise en cause.

Cet article permettra aussi au CNDS de verser, toujours pour ces projets présentés comme privés et exclusivement dans le cadre de l’Euro 2016, les 153 millions d’euros promis au départ par le chef de l’État aux collectivités. C’est un régime extrêmement favorable pour les futurs entrepreneurs avec une privatisation des profits quand les charges seront en partie ou complètement publiques.

Cerise sur le gâteau : à l’alinéa 2, il est proposé que, même si la rénovation du stade est terminée et que l’emprunt est remboursé, le versement des subventions puisse être étalé jusqu’à expiration du bail. M. Depierre a tenté en commission de banaliser cet alinéa mais, manifestement, il n’y a rien d’innocent dans ce texte. En étant à peine caricatural, on peut dire qu’une collectivité souhaitant faire un cadeau à l’exploitant privé pourra lui concéder un prix de location d’un euro symbolique annuel pour 99 ans de bail. Elle n’est pas belle, la vie ?

L’article 2 prévoit une dérogation, d’une part aux dispositions qui hiérarchisent le rôle des collectivités territoriales dans l’octroi des aides, d’autre part aux règles qui limitent ces aides au financement du sport. Il édicte donc une exception au code général des collectivités territoriales, qui confie au conseil régional la décision d’octroyer des aides aux entreprises et une autre au code du sport, qui institue les plafonds d’aide et interdit les garanties de collectivités territoriales aux associations et sociétés sportives. Cette proposition de loi n’en finit plus de faire exception à la loi !

Il faut ajouter que ce texte sera très probablement jugé contraire au droit européen. Il sera ainsi intéressant de connaître l’avis du Conseil constitutionnel s’il venait malgré tout à être voté. En effet, la concurrence libre et non faussée, que la majorité a fini par imposer contre le vote des Françaises et des Français, donne une lecture très drastique des possibilités d’aide de l’État. Or rendre possible le financement par une collectivité d’une société privée est une entrave à la concurrence. Les articles 107 et 108 – anciennement 87 et 88 – du Traité de l’Union européenne prohibent, d’une façon générale, les aides de l’État.

Cette proposition de loi est donc bien contraire à l’article 55 de la Constitution, qui dispose que « les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois ».

À propos de concurrence faussée, pour gagner encore plus d’argent, les groupes de BTP seront dans l’obligation de développer en plus des matches de football des activités permettant de réaliser un chiffre d’affaires annuel conséquent. Il s’agira, entre autres, d’organiser des événements culturels, concerts ou spectacles. Avez-vous pensé aux entrepreneurs de spectacles locaux qui, eux, ne vont pas bénéficier de ces aides publiques considérables mais qui devront assumer de lourdes charges et faire face à cette nouvelle concurrence ?

L’article 3 prévoit la possibilité de recourir à l’arbitrage pour tous les contrats conclus, dans le cadre de l’Euro 2016, en lien avec la construction ou la rénovation des enceintes sportives et des équipements connexes permettant le fonctionnement de celles-ci, ainsi qu’avec l’organisation et le déroulement de l’événement. Cette procédure d’arbitrage est encore rarement utilisée quand une personne publique ou de l’argent public sont en cause ; il s’agit encore d’une exception.

La procédure d’arbitrage ouvre une brèche inquiétante dans le droit français, puisqu’elle dépossède les tribunaux administratifs ou judiciaires du règlement des conflits liés à la rénovation ou la construction de stades pour l’Euro 2016. Mme la ministre a eu beau plaider en commission le fait que la procédure d’arbitrage aboutit à une décision de justice, il n’en demeure pas moins que les tribunaux de l’État en sont dépossédés.

Pour exemple, dans le conflit qui opposait le Crédit Lyonnais à Bernard Tapie, la Cour de cassation, plus haute juridiction française, avait été défavorable à ce dernier. Cependant, fin 2007, c’est un tribunal arbitral qui a été saisi, procédure fréquemment utilisée pour régler les conflits de droit commercial privé, mais sans précédent s’agissant d’une personne privée face à l’État. Certains pensent que ce serait le Président de la République lui-même qui aurait pris la responsabilité de suspendre la procédure judiciaire ordinaire devant les tribunaux de la République, en remerciement pour soutien durant la campagne présidentielle de 2007. En tous cas, Mme Lagarde ne s’est pas opposée au recours à l’arbitrage ; elle y était plutôt favorable.

Évoquons quelques dates.

Le 11 juillet 2008 : un tribunal formé de trois arbitres a donc donné raison à Bernard Tapie et tort à l’État. Le consortium de réalisation chargé de gérer le passif du Crédit Lyonnais a été condamné à verser 390 millions d’euros à Bernard Tapie. Début février 2011 : la Cour des comptes estime que cette procédure n’est pas conforme au droit. Mars 2011 : vous proposez par votre proposition de loi que cette procédure soit celle qui régule les conflits dans le cadre de l’Euro 2016.

Où en est-on aujourd’hui de la candidature de la France à l’Euro 2016 ?

En commission, au mois de février, je vous avais fait remarquer, madame la ministre, que, Lille mis à part, la plupart des onze stades retenus – devenus dix depuis l’abandon de Strasbourg – n’avaient pas bouclé leurs montages juridiques et financiers et qu’ils risquaient de ne pas être prêts à temps. Je vous avais donc posé la question de savoir si vous disposiez d’un plan B, pour avoir neuf stades conformes aux exigences de l’UEFA. Ce jour-là, vous avez oublié de me répondre. Je me permets donc de vous reposer la question : Avez-vous un plan B ?

Nous avons, nous, des propositions.

Pour que l’Euro 2016 puisse avoir lieu en France dans de bonnes conditions, il faudrait que l’État français décide d’abonder de façon plus significative ce projet que le Président de la République s’est lui-même approprié. Cela permettrait d’abord que les collectivités locales ne se voient pas transférer de nouvelles charges. Cela permettrait ensuite au CNDS de continuer à jouer son rôle, plutôt que d’être confisqué pour cette unique manifestation. Il faudrait enfin et surtout qu’un vrai projet de loi portant une politique pour le sport globale, éclairée, concertée et ambitieuse nous soit proposé. Cela permettrait ainsi de régler la question de la propriété des enceintes sportives et de leur exploitation. Voilà nos propositions, madame la ministre, pour que l’Euro 2016 puisse se réaliser dans de bonnes conditions.

Au lieu de cela, vous allez faire passer en catimini, en force et en urgence, cette triste proposition de loi. Des stades énormes vont être construits qui, par la suite, seront trop souvent à moitié vides et coûteront une fortune en fonctionnement. Le brave supporteur verra donc par incidence le prix de son billet augmenter encore, alors que ces stades auront été financés par son impôt, augmentant la dette et fragilisant encore plus les équilibres budgétaires des collectivités locales. Triste perspective !

Parce que nous aimons le football, parce que nous aimons le sport, parce nous pensons que le sport doit véhiculer en permanence de belles valeurs éducatives, les valeurs de l’olympisme telles que l’honneur, le respect de l’autre, le respect des règles, à mille lieues d’autres valeurs que nous combattons : l’intérêt personnel, le profit mercantile, l’individualisme, nous rejetons cette proposition de loi injuste et inacceptable. Lorsque Pierre de Coubertin s’exclamait : « Plus vite, plus haut, plus fort », il ne pensait ni au profit, ni au chiffre d’affaires, ni à la spéculation.

Par cette proposition de loi, il est fait trop systématiquement exception à la loi. La démocratie est ignorée, la morale est bafouée ! C’est pour ces multiples raisons, mes chers collèges, que je vous invite à voter cette motion de rejet. C’est pour ces multiples raisons que nous ne voterons pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n’est pas adoptée.)

Mme Valérie Fourneyron. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à Mme Valérie Fourneyron.

Mme Valérie Fourneyron. Monsieur le président, je constate que vous n’avez pas souhaité permettre aux groupes de procéder à des explications de vote sur cette motion.

M. le président. Madame Fourneyron, la règle est que les groupes, s’ils souhaitent des explications de vote, fassent parvenir au président de séance un papier portant le nom des orateurs. Aucun groupe ne m’ayant communiqué de nom, j’ai fait procéder directement au vote.

Motion de renvoi en commission

M. le président. J’ai reçu de M. Yves Cochet et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de renvoi en commission déposée en application de l’article 91, alinéa 6, du règlement.

La parole est à M. André Gerin.

M. André Gerin. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, l’accueil par la France de l’Euro 2016 laissait penser qu’une occasion rêvée se présentait de faire revivre le football dans sa dimension de sport populaire et votre plaidoyer, madame la ministre, pouvait, d’une certaine manière, apparaître séduisant.

Le Président de la République se plaît à évoquer la nécessaire moralisation du capitalisme financier. Bel effet d’annonce, mais, en l’occurrence, avec la proposition que vous nous présentez, c’est tout le contraire qui nous est offert : les grands groupes capitalistes du bâtiment et des travaux publics sont là, qui attendent de remplir les tiroirs-caisses et les coffres grâce à l’Euro 2016, avec l’aide, de surcroît, de fonds publics qui viendront à la rescousse pour les aider à faire leur beurre. Nous sommes évidemment à cent lieues des attentes des Français, de la jeunesse et des familles populaires, dans un contexte de crise dont nous venons de voir les effets électoraux, expression d’un profond désarroi.

Cette proposition de loi est emblématique de la conception de l’action publique du Gouvernement. Elle illustre la politique conduite dans tous les domaines depuis quatre ans. S’il fallait résumer vos choix et qualifier ce qui les anime, nous pourrions dire que, à vos yeux, aujourd’hui, l’activité humaine est marchandise, et que tous les rouages de la société doivent être soumis à la logique du profit et de la rentabilité ; en l’occurrence, dans ce texte, il s’agit du sport, du football en particulier.

Nous savons tous à quel point l’argent a envahi cette discipline. Les sommes brassées par les clubs sont hallucinantes et s’expriment en milliards d’euros. Ce que vous nous proposez vise, pour la construction et la rénovation des stades, à institutionnaliser cette dérive qui n’a que peu à voir avec l’éthique sportive.

Les exigences de l’UEFA s’inscrivent elles-mêmes dans cette débauche d’argent déversé. Ainsi, pour accueillir l’Euro 2016, il nous faut disposer de deux stades de 50 000 places, de trois stades de 40 000 places et de quatre autres stades de 30 000 places. Au total, l’investissement indispensable est évalué à 1,8 milliard d’euros. Douze stades doivent être mis à niveau pour accueillir les matches, sept autres seront rénovés, et quatre seront construits à Lille, Lyon, Bordeaux et Nice. Les travaux ont déjà débuté au Stade de France.

La question du financement de ces opérations est évidemment posée, d’autant que, aux surenchères de l’UEFA s’ajoute le désengagement de l’État. La conception marchande de la société qui est celle du Gouvernement conduit en effet à dégager la puissance publique des investissements nécessaires pour laisser la place aux intérêts privés. Cette même conception amène en outre l’État à se décharger de ses obligations sur les collectivités territoriales. Il s’agit finalement d’une opération à double détente au profit des grands groupes impliqués qui vont pouvoir remplir leur tirelire.

Ce scénario est exactement celui que le Gouvernement a concocté et qu’il soutient au travers de la proposition de loi qui nous est soumise.

Ainsi, pour l’Euro 2016, les 153 millions d’euros représentant l’engagement de l’État seront financés par l’instauration d’une taxe de 0,3 % sur les paris de la Française des jeux. Son produit sera versé au Centre national pour le développement du sport.

Cependant, l’État, qui s’était engagé à hauteur de 30 % pour la Coupe du monde, ne l’est qu’à hauteur de 7 à 8 % pour l’Euro 2016. Or ce ne sont évidemment pas les clubs eux-mêmes qui mettront la main à la poche. Les clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 sont dans le rouge : leurs pertes cumulées s’élèvent à 130 millions d’euros pour la saison 2009-2010 contre 34,5 millions pour la saison précédente. Les vingt clubs de Ligue 1 représentent la majeure partie de ce déficit, soit près de 115 millions d’euros. Lyon affiche la plus grosse perte avec 35 millions d’euros devant le PSG avec 22 millions et Nancy avec 13,5 millions d’euros.

Dans ces conditions, cette proposition de loi est une trouvaille. Elle correspond bien à la conception qu’a le Gouvernement du fonctionnement de la société qui consiste à s’en remettre à de grands groupes privés dont l’engagement, nous le savons bien, s’explique par des motivations qui n’ont rien à voir avec les prouesses sportives. En complément, les collectivités territoriales sont invitées à passer à la caisse.

C’est tout le sens du dispositif que vous nous proposez avec ce texte qui instaure des mesures de dérogation et d’exception. En effet, il s’agit bien de déroger à plusieurs principes de droit administratif, du code général des collectivités territoriales et du code du sport.

Ainsi l’article 1er permettra au partenaire privé d’une collectivité territoriale avec lequel il aura conclu un contrat de bail emphytéotique administratif de percevoir les mêmes subventions et redevances qu’un maître d’ouvrage public. Ces dispositions dérogent au régime de la loi de 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses relations avec la maîtrise d’œuvre privée.

L’article 2 prévoit que les collectivités territoriales et leurs groupements pourront apporter des aides aux projets concernés. En conséquence, il déroge au code général des collectivités territoriales qui confie au conseil régional la définition du régime, ainsi que la décision d’octroyer des aides aux entreprises, mais aussi au code du sport qui institue des plafonds d’aide et interdit les garanties des collectivités territoriales aux associations et sociétés sportives.

Enfin, l’article 3 court-circuite purement et simplement le juge administratif au profit du recours à l’arbitrage qui est pourtant interdit aux personnes publiques. Avec cette dérogation, nous touchons à l’État de droit. Avec cette procédure, il sera impossible de contester l’implantation géographique d’un stade ou de faire valoir la violation de telles ou telles dispositions d’un plan local d’urbanisme. Cet arbitrage sent bon l’arbitraire. Nous nous souvenons d’ailleurs que, grâce au recours à cette procédure, Bernard Tapie s’est fait verser 45 millions d’euros au titre du préjudice moral. Notons aussi que, sans la justice administrative, les Lyonnais n’auraient pas pu faire valoir leurs arguments, pourtant fondés, contre le projet de Jean-Michel Aulas de construire un grand stade à Décines. J’aurai l’occasion de revenir sur ce sujet.

Ce qu’il nous est proposé d’officialiser aujourd’hui a fait l’objet de ballons d’essais pas très ronds qui donnent la mesure de l’engrenage dans lequel nous risquons d’entrer.

Ainsi, le 29 janvier dernier, Le Mans inaugurait son stade de 25 000 places, le MMArena. Son financement a été assuré à 50 % par le groupe Vinci et à 3 % par l’assureur MMA. Le montant total du contrat de concession s’élève à 102 millions d’euros. Il comprend une dette de 39 millions et un apport de fonds propres de 11 millions versé par l’actionnaire de la société concessionnaire. Il est complété par une subvention des collectivités territoriales de 49 millions d’euros répartie entre la ville du Mans pour 31,48 millions d’euros, la région pour 8,76 millions et le conseil général de la Sarthe pour la même somme. Les 3 millions d’euros restants sont apportés par Les Mutuelles du Mans au titre d’un contrat inédit en France dit de « naming ». Ce stade, le MMArena, porte ainsi le nom de ses financeurs privés. Il faut quand même le faire ! (Murmures)

Les travaux, réalisés sous la direction de l’opérateur AOM Ouest, filiale de Vinci construction France, ont été assurés intégralement par des entreprises du groupe Vinci. Le Mans football club, équipe résidente, actuellement en Ligue 2, assurera l’exploitation du stade en prenant 50 % des parts de la société concessionnaire.

Après avoir fait le tour du montage financier et du fonctionnement de ce projet, que constatons-nous ? Pour l’essentiel, cette affaire rapporte de l’argent au groupe Vinci.

Le maire du Mans résume bien le processus engagé : « La logique est la poursuite d’un désengagement des collectivités du sport professionnel. Après que le secteur public a porté seul les projets de stades, on est dans une phase intermédiaire de partage. C’est une étape, mais je rêve qu’un jour le sport professionnel s’assume totalement ». À quand les stades Coca-Cola, les stades Mac Donald’s, les stades pétrodollars ? Le problème est que, dans cette logique, l’activité sportive n’est plus qu’un prétexte. Ce qui est vraiment recherché, c’est le retour sur investissement le plus rapide possible.

Dans ces conditions, qu’en sera-t-il de la pratique du sport pour tous, en particulier pour nos enfants ? Le sport de masse restera le parent pauvre car il sera toujours jugé non rentable et les petits clubs travailleront avec des bouts de ficelle. Pourtant que serait le sport de haut niveau sans le sport pour tous qui permet de révéler les talents ? Nous sommes décidément loin des valeurs de l’éthique sportive.

Non, l’argent et le sport ne font pas bon ménage ! Ne serait-ce que parce que le premier modèle des comportements dont nous connaissons les effets dès lors qu’il devient l’alpha et l’oméga de tout ce que qui est entrepris. Ils n’ont rien à voir avec les valeurs du sport, avec l’esprit d’équipe et la recherche de la performance physique et personnelle.

Les géants du secteur du BTP sont à l’affût de montages similaires à celui du Mans. Eiffage a été choisie pour construire le nouveau stade de Lille qui nécessite un investissement de 330 millions d’euros. Vinci et Bouygues sont présélectionnés pour les travaux de couverture et d’agrandissement du stade vélodrome à Marseille, projet estimé à 200 millions d’euros.

M. Jean Roatta. Les socialistes l’ont voté : c’est Guérini !

M. André Gerin. Votre proposition de loi est une fenêtre ouverte pour ces projets qui verront fleurir des complexes sportifs : des stades accueillant des manifestations sportives et des spectacles divers et variés seront couplés avec des zones de loisirs et des hôtels, le tout chaperonné par les grands groupes capitalistes rêvant de profits grâce à l’activité sportive et à ses annexes.

Cela peut donner aussi un projet tel que celui de Jean-Michel Aulas à Lyon : l’OL Land. Immense complexe sportif implanté sur la commune de Décines, OL Land comprendrait le nouveau stade de 60 000 places, le centre d’entraînement de l’équipe professionnelle, les bureaux du siège d’OL Groupe, une boutique OL Stade, 7 000 places de stationnement, plusieurs équipements de loisirs et de divertissements dont cent cinquante chambres d’hôtel et 8 000 mètres carrés d’immeubles de bureaux. Finalement, bien plus qu’un simple stade de football destiné aux footballeurs professionnels, il s’agit d’une mégapole d’affaires construites à des fins privées, pour le profit.

La genèse du projet remonte à 2004. L’OL était alors triple champion de France et son président rêvait d’un destin européen pour son club. Pour concurrencer les clubs de Ligue des champions, cela passait par la construction d’un nouveau stade ultramoderne, à l’image de l’Allianz Arena de Munich ou de l’Emirates Arena d’Arsenal, qui étaient alors en cours de construction. Néanmoins une question se pose alors : où trouver l’argent pour un tel projet ?

Certes le football est devenu une industrie lourde en termes de capitaux financiers et le top 20 des clubs de football les plus riches jongle avec les millions d’euros. Les revenus des clubs vont de 101 millions d’euros pour Newcastle United, en Angleterre, à 401 millions d’euros pour le Real Madrid. Pour l’OL, ils s’élèvent à 133,2 millions d’euros ; pour l’OM à 133,1 millions.

Les droits télévisuels sont devenus la principale source de revenu des clubs : 160 millions d’euros pour le Real Madrid, et 68 millions d’euros pour l’OL quand sa billetterie ne représente que 22,4 millions. Ces droits s’élèvent à plus de 600 millions d’euros par an pour les championnats français, soit 58 % des recettes des clubs.

Toutefois ce magot cache mal l’endettement de la plupart des clubs. Selon une étude de l’UEFA, près de la moitié des clubs européens sont déficitaires et un club sur cinq est dans une situation financière préoccupante. La dette des grands clubs anglais atteint 1,3 milliard d’euros. Cette situation résulte du « marché » des joueurs, sur lesquels les transactions atteignent des sommes vertigineuses – 94 millions d’euros pour le seul transfert de Ronaldo –, et des salaires qui grèvent les comptes des clubs.

Alors, où trouver de l’argent pour nourrir la voracité du sport-business ? La réponse paraît simple : sur les marchés financiers. L’Angleterre reste, de ce point de vue, le modèle le plus abouti du football financiarisé, la majorité de ses clubs étant cotés en bourse.

Au-delà du caractère pour le moins contestable du point de vue de l’éthique de cette financiarisation du sport, ces introductions en bourse ont un caractère particulièrement aléatoire car il est quasiment impossible d’estimer les flux futurs comme on peut le faire pour une entreprise industrielle. Le bilan d’un club tient d’abord et surtout à son palmarès sportif qui peut, même avec les meilleurs joueurs du monde, ne pas être au rendez-vous. Une élimination en coupe d’Europe, et tout le bilan sportif et financier d’un club est impacté. En effet cette élimination a des effets, non seulement sur les droits de retransmission télévisuelle, mais aussi sur la cotation du club. Ce jeu-là est bien éloigné des finalités du sport ; nous sommes entrés dans une logique marchande.

En France, seul l’OL s’est, pour l’instant, risqué en bourse, en 2007, son président, Jean-Michel Aulas, justifiant son choix par le fait qu’il dirige « une entreprise de divertissement sportif » ; cela prêterait à sourire si le sujet n’était pas aussi grave. Il s’agissait pour lui, en réalité, de permettre le financement de l’OL Land, qui est devenu un complexe de loisirs sportifs de 50 hectares, dont la tête de gondole doit être le grand stade de 60 000 places. Aujourd’hui, l’OL accuse un déficit de 35 millions d’euros sur l’exercice 2009-2010.

Aujourd’hui se pose un autre problème. Si Jean-Michel Aulas réalise son grand stade, que deviendra le stade de Gerland, qui est à la charge de la ville de Lyon ? Les Munichois ont connu une situation identique : l’ancien stade olympique est devenu inutile. Gerland, dont la rénovation et la mise aux normes à l’occasion de la Coupe du monde de 1998 ont coûté près de 33 millions d’euros aux pouvoirs publics, coûte 1,4 million d’euros par an ; s’il n’a plus de locataire, qui paiera ?

Pour justifier le projet d’un stade neuf sur un site très éloigné du centre de Lyon, on a prétendu que Gerland se trouvait en zone Seveso. Ainsi, à l’automne 2006, c’est le site de Décines qui a été choisi. Pour Jean-Michel Aulas, peu importe la localisation, pourvu qu’il n’ait pas à payer la voirie ni la logistique. Cependant, rapidement, le projet a pris l’eau de toutes parts. La disparition programmée d’espaces naturels, l’amputation des espaces verts de l’est lyonnais, les graves carences du projet en matière d’accessibilité, les nuisances engendrées par l’équipement et le montant des investissements publics suscitent la contestation, non seulement à l’échelle locale, mais aussi dans l’ensemble de l’agglomération. Fin 2010, trois avis défavorables et autant d’enquêtes publiques plus tard, le projet est au point mort. La troisième enquête publique pour la révision du PLU a été repoussée et il a été décidé que ce projet ne pouvait faire l’objet d’une déclaration d’utilité publique.

Parmi les onze stades à construire ou à rénover, figure celui de Lyon, sous un régime privé. L’usine à gaz de Jean-Michel Aulas se trouve ainsi confortée.

Nous savons pourtant que la capacité du stade de Gerland, qui compte aujourd’hui 41 000 places, peut être portée à 55 000 places et répondre ainsi aux critères, et bien au-delà, des stades de catégorie 3. Vingt-trois hectares constructibles sont en effet disponibles autour du stade, qui dispose, en outre, contrairement au projet actuel, d’une bonne desserte : métro, tramway, bus, autoroute. Alors que Gerland offre tous les avantages, le projet de l’OL Land nécessiterait que le Grand Lyon débourse 300 millions d’euros dans des infrastructures qui ne répondent que secondairement et superficiellement aux attentes des habitants.

Si je me suis appesanti sur cet exemple (Sourires), c’est parce qu’il me semble illustrer parfaitement les dérives vers lesquelles cette proposition de loi nous entraîne. Il s’agit, ici, uniquement de sport business, d’affairisme, et nous savons que, dans ce cadre, la fin justifie les moyens.

Au demeurant, nous ne pouvons pas ne pas nous interroger sur l’expérience d’autres pays européens. Au Portugal, qui a accueilli l’Euro 2006, le précédent ministre de l’économie s’est interrogé sur l’opportunité de démolir certains stades de football, sous-utilisés. À Athènes, la même préoccupation s’est exprimée. Sommes-nous sûrs qu’il en ira différemment pour les stades de 50 000 places que nous allons construire, sachant que, même si des clubs résidents y jouent, leur situation financière est telle qu’il sera bien difficile d’équilibrer les budgets de fonctionnement ?

En définitive, nous légiférons dans la précipitation parce que nous avons pris du retard sur l’échéance de l’Euro 2016 et parce que l’État, dans ce domaine comme dans tant d’autres, a décidé de se désengager. Nous nous tournons alors vers les intérêts privés, en nous mettant à leur service. Ainsi, nous sommes prêts à enrichir les géants du BTP, qui n’attendent que cela et qui bénéficieront de l’argent public via les collectivités territoriales, lesquelles devront faire des choix dans leurs priorités et se serrer la ceinture.

J’ai déjà exprimé ce que je pensais des multiples dérogations à notre droit prévues dans le texte. Elles contreviennent à l’esprit de nos lois, animé du souci de l’intérêt général. Ces dispositions d’exception qui mêlent intérêts privés et fonds publics sont sujettes à caution et à contentieux. Vous croyez vous en sortir en recourant à l’arbitrage, tel que le définit l’article 3, qui est un mode juridictionnel de résolution des conflits dérogatoire au droit commun consistant à résoudre à l’amiable des litiges dans le cadre d’une juridiction d’exception appelée tribunal arbitral. Or un groupe d’étude, placé sous l’autorité du conseiller d’État Daniel Labetoulle, a rendu, en avril 2007, un rapport au garde des sceaux dans lequel il est souligné que le manque de définition du champ de l’arbitrage est à l’origine d’une forte insécurité juridique, notamment lorsqu’il est appliqué dans le cadre de partenariats public-privé.

Votre article 3 organise ainsi une procédure dérogatoire au droit administratif pour régler des problèmes de droit administratif. Or les problèmes qui peuvent se poser sont lourds. Des citoyens, des associations peuvent contester le bien-fondé d’un projet de stade pour des raisons liées à l’urbanisme, à l’environnement, aux nuisances qu’il provoquerait, et que leur opposera-t-on ? La décision d’un tribunal arbitral, dont on a du mal à penser qu’il pourra déboucher sur une solution amiable.

En réalité, l’échéance de 2016 vous presse, au point que vous décidez de vous asseoir sur les règles de droit les plus élémentaires. Pensez-vous que cela suffira pour atteindre vos objectifs ? Rien n’est moins sûr. Savez-vous, par exemple, que, saisi le 14 décembre 2010 par la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel a rendu, le 11 février dernier, une décision qui annule le contrat de concession relatif à la réalisation d’un Stade de France à Saint-Denis, conclu le 29 avril 1995 entre l’État et le consortium Grand Stade SA.

Mme Marie-George Buffet. Eh oui !

M. André Gerin. Le Conseil constitutionnel a en effet considéré que, si le législateur peut valider un contrat de concession, il doit indiquer le motif précis de cette validation, motif qui n’était pas mentionné dans l’article unique de la loi du 11 décembre 1996. Dès lors, l’article incriminé a été jugé contraire à la Constitution et abrogé.

Ne pensez-vous pas que les dispositions d’exception que vous souhaitez prendre dans cette proposition de loi sont infiniment plus aléatoires que la loi de 1996 que le Conseil constitutionnel vient d’abroger ? Mesurez-vous les risques que vous prenez, en plus d’ouvrir la boîte de Pandore en jetant en pâture aux appétits de groupes multinationaux la construction de stades pour l’Euro 2016 ?

Les enjeux sportifs et financiers, en termes d’investissements, méritent infiniment mieux que ces mesures prises à la va-vite. Un texte d’ensemble comportant des études d’impact et précédé d’une large concertation avec les collectivités concernées aurait été nécessaire. Au lieu de cela, vous piétinez la notion d’intérêt général et vous remettez en cause le modèle français, au profit de normes européennes qui consacrent, en ce domaine comme en d’autres, la « concurrence libre et non faussée », en clair la loi de la jungle du marché, qui fait de l’argent le moteur de tout ce que nous entreprenons.

À force de soumettre au pouvoir de l’argent le football et le sport en général, nous le dévoyons ; nous perdons de vue sa finalité pour le réduire à une logique marchande. Or le sport nous enseigne le respect de l’autre, la justice et l’équité, le sens de l’engagement physique, le travail acharné, l’effort, le sain dépassement de soi-même ; il procure équilibre, bien-être et liberté. À ce titre, il est porteur de valeurs d’humanisme, de générosité et de solidarité.

La France compte près de 172 000 clubs et associations sportives et 13 millions de licenciés, toutes disciplines confondues. Certes, les professionnels sont une consécration du sport de masse, mais nous nous trouvons dans une situation aberrante.

Les structures sportives font appel au bénévolat. Le sport et ses valeurs constituent une réponse à bien des problèmes que connaît notre société. Ces valeurs sont menacées si nous les soumettons à des logiques commerciales. L’argent, le dopage, la corruption en sont les preuves évidentes, trop souvent constatées. Les valeurs du sport ne resteront saines que si la République, l’État et les décideurs publics, à tous les niveaux, veillent à les défendre et à les prémunir contre les prédateurs.

Votre proposition de loi foule cette exigence aux pieds. Ce texte expéditif, cette fuite en avant et les dangers qu’elle nous fait courir en permettant une utilisation de l’argent public à des fins mercantiles justifient que ce texte soit renvoyé en commission, car nous n’acceptons pas que le business l’emporte sur le sport populaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

M. le président. Dans les explications de vote sur la motion de renvoi en commission, la parole est à M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Monsieur le président, mes chers collègues, Hervé Féron, dans sa motion de rejet préalable, et André Gerin, dans sa motion de renvoi en commission, ont bien résumé la situation : nous avons affaire, ce soir, à un texte de pure opportunité.

Sur la forme, tout d’abord, le véhicule législatif choisi – une proposition de loi – n’est pas anodin, puisqu’il permet de se passer de l’avis préalable du Conseil d’État et d’une étude d’impact. En tant que législateurs, nous aurions pourtant été curieux de connaître les conséquences de ce texte. En outre, celui-ci est examiné en procédure accélérée, ce qui devient une habitude.

Ensuite, et Hervé Féron l’a bien rappelé, les exigences surdimensionnées que l’UEFA inscrit dans son cahier des charges sont quelque peu déplacées dans l’ambiance de rigueur et de restriction budgétaire actuelles. Alors que le Gouvernement nous répète à l’envi que l’argent public se fait rare, que les collectivités locales sont exsangues du fait de l’asphyxie financière organisée par l’État et que, de surcroît, nous assistons à un désengagement financier sans précédent de l’État dans le domaine du sport, ces exigences des instances internationales sont-elles bien raisonnables ? Il s’agit d’un élément très important de notre discussion.

Par ailleurs, cette proposition de loi a été taillée sur mesure pour profiter à quelques intérêts privés. J’en veux pour preuve le régime extrêmement favorable qui est réservé aux investisseurs, en particulier à ceux du bâtiment et des travaux publics.

M. le président. Il vous faut conclure, monsieur Juanico.

M. Régis Juanico. Je termine, monsieur le président, en indiquant que cette succession de dérogations au droit commun, qu’il s’agisse du droit administratif, du code des collectivités locales ou du code du sport, présentera un caractère très aléatoire devant une juridiction.

Pour toutes ces raisons, nous voterons le renvoi en commission de cette proposition de loi.

M. le président. Je rappelle que le temps de parole pour les explications de vote est de deux minutes.

La parole est à Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Comme l’ont bien montré Hervé Féron et André Gerin, nous sommes face à une loi d’exception, une loi qui ne vise qu’à régler les problèmes de trois stades, de trois clubs, une loi datée dans le temps, en liaison avec l’Euro 2016. Cette proposition de loi instaure un régime dérogatoire aussi bien au code du sport qu’à celui des collectivités territoriales.

Les deux orateurs ont souligné les dangers qu’elle faisait courir aux collectivités territoriales, s’agissant de leur gestion, mais ils ont aussi montré qu’elle n’améliorait en rien l’équipement de notre pays en grandes infrastructures sportives. Elle n’a d’autre objet que de soumettre une partie de notre sport aux intérêts privés et au retour sur investissement le plus rapide possible.

L’Euro 2016 valait mieux que cette loi d’exception votée en urgence. La motion de renvoi en commission se justifie donc pleinement, afin que nous prenions le temps de préparer ce championnat, avec des missions de service public, une mobilisation des finances publiques, et le souci que cette compétition serve la pratique du sport pour tous au lieu de la desservir.

(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n’est pas adoptée.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Éric Berdoati.

M. Éric Berdoati. Madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, avant de débuter mon propos, je tiens à m’associer aux chaleureuses félicitations adressées par notre rapporteur à Michel Platini pour sa réélection à la présidence de l’UEFA. Je le fais avec d’autant plus de plaisir que j’ai la chance de compter M. Platini parmi les administrés de ma commune et que je le connais bien. Je lui adresse tous mes vœux pour cette nouvelle mission.

Mes chers collègues, le 28 mai 2010, peu après treize heures, la France a été choisie pour accueillir le championnat d’Europe de football de l’UEFA en 2016, avec une voix de majorité, devant la Turquie. Cette désignation représente pour notre pays une véritable chance et une réelle opportunité. En effet, un tel événement recouvre des enjeux majeurs, sur les plans tant sportif qu’économique et médiatique.

Sur le plan sportif, tout d’abord, la première conséquence de ce choix est notre qualification d’office pour la compétition, ce qui est la règle et la pratique dans ce sport.

Néanmoins pour être à la hauteur de cet événement et renouveler le succès populaire et sportif que nous avons connu en 1998, il nous faut impérativement répondre aux exigeants critères fixés par l’UEFA pour l’organisation de cette manifestation et la mise aux normes de nos infrastructures et de nos stades. Ce cahier des charges impose des rénovations, des réhabilitations ou des constructions d’équipements. Nous savons combien, dans ces circonstances, la question des enjeux financiers et des besoins de financement est primordiale.

Tel est justement l’objet de cette proposition de loi : assouplir la méthodologie administrative lourde et complexe pour le montage de dossiers de cofinancements, afin de faciliter la rénovation, l’agrandissement ou la construction de stades de football. Mes chers collègues, si l’on veut accueillir le championnat de football de l’UEFA en 2016, cette proposition de loi est non seulement nécessaire mais aussi indispensable.

M. Jacques Grosperrin. Absolument !

M. Éric Berdoati. En effet – dois-je vous le rappeler ? –, pour les neuf villes sélectionnées, la livraison des équipements est prévue en 2014.

Il faut également souligner que la France dispose du parc de stades ayant la plus faible capacité d’accueil du public des cinq championnats majeurs de football en Europe. En effet, notre capacité moyenne d’accueil du public s’établit à 29 155 places.

De plus, en matière de qualité d’accueil et de niveau des prestations offertes, la France présente un handicap par rapport à ses principaux concurrents européens : l’âge moyen de nos enceintes sportives est de dix-sept ans, contre onze ans en Angleterre et sept ans en Allemagne.

M. Yves Durand. Et alors ?

M. Éric Berdoati. Dans ce contexte, l’organisation de l’Euro 2016 permettra de doter les villes hôtes et les clubs professionnels de stades conformes aux exigences de l’UEFA. Cet événement donnera au football français un nouvel élan, dont bénéficiera également le monde amateur.

II s’agit donc d’une opportunité de développement non seulement pour le sport mais aussi pour les collectivités qui accueilleront cet événement. Aujourd’hui, onze villes sont candidates, dont sept dirigées par des maires de gauche.

Mme Valérie Rosso-Debord. Eh oui !

M. Éric Berdoati. C’est pourquoi je n’arrive pas à m’expliquer le vote de nos collègues des groupes SCR et GDR en commission,…

M. François Pupponi. Vous n’êtes pas non plus toujours d’accord à l’UMP ! Surtout en ce moment ! C’est l’hôpital qui se fout de la charité !

Mme Valérie Fourneyron. La maîtrise d’ouvrage publique, ce n’est pas mal non plus !

M. Éric Berdoati. …qui se sont réjouis de la victoire française pour l’organisation de l’Euro 2016 tout en votant contre cette proposition de loi.

Les principales difficultés rencontrées par les porteurs de projets et les maîtres d’ouvrage sont liées au montage financier des projets et aux éventuels contentieux portant sur des contrats que ceux-ci peuvent générer.

Cette proposition de loi a pour but principal de permettre une répartition plus souple, plus efficace de l’aide au financement des projets de construction ou de rénovation des stades, afin qu’elle soit exécutée de façon équitable et neutre, quelles que soient les formules juridiques retenues pour la construction.

Elle permettra également aux collectivités territoriales d’apporter des aides aux projets de construction et de rénovation en dérogeant à la compétence exclusive confiée aux conseils régionaux.

Enfin, cette proposition de loi tend à simplifier la résolution des éventuels conflits entre personnes morales de droit public en instaurant un recours à l’arbitrage.

Madame la ministre, madame la présidente de la commission, le groupe UMP soutient pleinement cette proposition de loi, car l’organisation du championnat d’Europe de football est une chance et un élément fédérateur pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Fourneyron.

Mme Valérie Fourneyron. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi de commencer par les quelques éléments sur lesquels nous pouvons nous retrouver. Vous vous doutez cependant bien que ce consensus ne se prolongera pas longtemps.

M. Michel Hunault. Dommage !

Mme Valérie Fourneyron. Le football, indépendamment des dérives qui lui sont souvent associées aujourd’hui, est effectivement le sport le plus populaire de notre pays : avec ses deux millions de licenciés, ses 350 000 bénévoles, son million de matches par an, il contribue à l’épanouissement de milliers de jeunes et constitue un vecteur fort de cohésion sociale. Personne ne le nie et personne ne l’oublie.

De même, dans un contexte où nous voyons la difficulté d’obtenir l’organisation d’une grande compétition internationale, nous nous sommes réjouis que l’UEFA ait attribué l’organisation de l’Euro 2016 à la France. Les enjeux sont nombreux : emplois, aménagement et promotion des territoires qui accueilleront les matches, dynamique sociale collective, rayonnement de la France à l’international…

Cependant, et je vous cite, madame la ministre : « Nous nous devons d’accueillir l’Euro 2016 dans les meilleures conditions, ce qui ne signifie pas dans n’importe quelles conditions. »

M. Patrick Bloche. Absolument !

Mme Valérie Fourneyron. Tout le contraire de ce que vous proposez ! En effet ce texte instaure un régime d’exceptions – avec un « s » – qui va bien au-delà de la souplesse nécessaire à des investissements contraints dans le temps. Vous nous demandez d’adopter des dispositions qui font fi de la prudence la plus élémentaire lorsqu’il s’agit d’utilisation d’argent public, car c’est bien d’argent public qu’il s’agit avant tout.

Quelques mots pour replacer l’examen de cette proposition de loi dans son contexte.

Le premier élément est celui de l’économie générale du football français et européen. Je ne vous apprendrai rien en disant que celui-ci se porte mal : inflation subie par les salaires, volatilité de la valeur des joueurs, diminution des droits de télévision, au moins en France. À cet égard, la décision du tribunal de l’Union européenne, il y a quelques jours, rejetant les recours de la FIFA et de l’UEFA et privilégiant le droit à l’information du public sur les droits d’exploitation, sera lourde de conséquences.

Les clubs professionnels européens sont dans le rouge : 15 milliards d’euros de dettes. On sait que le président Platini, que nous félicitons également pour sa brillante réélection, souhaite instaurer des règles de fair-play financier et un éventuel salary cap, mais, pour l’instant, le modèle économique des clubs – même de ceux qui sont propriétaires de leurs stades – n’est pas soutenable à long terme. S’agissant des clubs français de Ligue 1, certes moins endettés que leurs homologues étrangers, ils totalisent tout de même 130 millions d’euros de dettes. Et c’est dans ce modèle économique déséquilibré et tendu vers une fuite en avant que vous demandez aux collectivités et à leurs contribuables d’investir !

Le deuxième élément de contexte est celui de la contrainte qui pèse sur les finances publiques, notamment sur celles des collectivités. Cela a d’ailleurs été souligné par de nombreux parlementaires UMP : les budgets des collectivités territoriales sont très contraints. Crise économique, réforme de la taxe professionnelle, baisse des dotations globales de fonctionnement, désengagement de l’État dans tous les domaines réduisent les marges de manœuvres des régions, départements, intercommunalités et communes.

S’y ajoute l’exigence du cahier des charges de l’UEFA, sur lequel les principaux financeurs n’ont absolument aucune prise. Or, si l’on peut être d’accord sur des critères de développement durable, d’inscription des équipements dans l’aménagement du territoire, on peut aussi émettre des réserves – et même plus que des réserves – sur certains caprice ; citons les salles de 150 mètres carrés attenantes à chaque vestiaire pour la préparation musculaire des joueurs ou les quatre centimètres à ajouter aux sièges VIP dénoncés par les élus rennais.

Enfin, on ne peut pas dire que les collectivités aient été consultées sur la candidature de la France tout court : notre Président est allé la chercher avec les dents, nous dira-t-il, et l’intendance devra suivre !

Or, dans ce contexte budgétaire tendu, vous faites sauter de nombreux garde-fous qui protégeaient les collectivités et garantissaient une utilisation pertinente de l’argent de leurs contribuables, garde-fous qui n’existaient pas sans raison. Faut-il rappeler l’évolution du statut des clubs, les raisons du passage au statut de sociétés anonymes, celles pour lesquels nous avons arrêté de garantir les emprunts et de cautionner ces structures ? Souvenons-nous de ces collectivités qui, au moment des dépôts de bilan de clubs, dans les années 80, y ont laissé beaucoup de plumes, c’est-à-dire beaucoup d’argent public !

Mme Colette Langlade. Eh oui !

Mme Valérie Fourneyron. Le troisième élément de contexte, c’est bien sûr l’urgence. Nous sommes en retard. Il faut que les équipements sortent de terre avant 2014, qu’ils aient accueilli quelques matches-test ; pourtant de nombreux projets ne sont pas encore sur les rails ! Ce n’est pas de votre faute, madame la ministre, mais vos prédécesseurs ont commandé beaucoup de rapports sans faire avancer le dossier.

Mme Marie-George Buffet. Ça, nous en avons eu, des rapports !

Mme Valérie Fourneyron. Il y a bien eu des rumeurs au sujet d’une loi sur le sport de haut niveau, dans laquelle devait d’ailleurs être traitée la retraite des sportifs : elle a dû se perdre dans les tuyaux ! On en vient donc, comme d’habitude quand il s’agit de sport – et c’est particulièrement dommageable –, à un bout de texte sans recul, alors que bon nombre de sujets liés aux stades, aux clubs, aux pratiques auraient mérité un projet de loi.

Or c’est bien l’avantage d’une proposition de loi : vous évitez un passage par le Conseil d’État et la présentation d’une étude impact. J’insiste sur ce point : il est très grave que nous n’ayons pas en notre possession les éléments qui nous permettraient d’évaluer précisément le coût pour les finances publiques locales et nationales, donc pour les contribuables, de la construction des stades.

Enfin, sur l’urgence, j’observe que nous ne savons pas tirer les leçons de nos erreurs passées. La Cour des comptes a publié un rapport sur l’organisation du Mondial 1998 et la construction du Stade de France, dans lequel elle revient sur les méfaits de la législation en urgence et les décisions coûteuses prises dans de telles conditions.

J’en viens à un certain nombre de points que je souhaite évoquer avant que s’épuise mon temps de parole.

Le premier, qui sera rapide, pour nuancer fortement l’argument qu’on nous sert souvent sur les retombées économiques positives de l’organisation d’une compétition comme l’Euro 2016. Ce n’est pas David Douillet qui me contredira puisqu’il a écrit dans son rapport : « L’impact purement économique ou financier pour le pays organisateur est le plus souvent limité. Des études économiques récentes montrent que, hormis celle des jeux Olympiques d’été, l’organisation d’un grand événement sportif ne procure pas de réels avantages au plan macroéconomique et que les coûts d’organisation parfois élevés ne sont pas toujours compensés par les recettes liées à l’événement. »

Deuxième point : les partenariats public-privé et les financements prétendument mixtes. À cet égard, il faut mettre un terme à un tel discours. Tout le monde ici sait bien qu’en définitive dans un partenariat public-privé, c’est la collectivité et, surtout les contribuables, qui paient l’investissement, l’exploitation, la maintenance en totalité sous forme de loyer annuel.

M. Éric Berdoati. C’est faux.

Mme Valérie Fourneyron. C’est le partenaire privé qui emprunte à la banque à la place de la collectivité, mais c’est le contribuable qui paie les intérêts de la banque et du partenaire privé.

M. Patrick Bloche. Imparable !

Mme Valérie Fourneyron. Les investissements privés servent à débloquer des sommes importantes à court terme, mais ils sont plus que remboursés sur le long terme ! C’est là que la note d’impact manque cruellement.

Quant aux financements de l’État, ils ne sont pas à la hauteur des enjeux : ils couvrent à peine 8 % du coût total contre 30 % en 1998, et ce ne sont pas 150 millions, mais 120 millions qui pourront être dégagés par la taxation supplémentaire sur les mises de la Française des jeux. Prélever 30 millions d’euros sur le fonds de roulement du CNDS, dont le budget pour les équipements non exceptionnels est déjà sous-doté, ce n’est pas raisonnable. Il s’agit donc d’un investissement trop faible de l’État et d’un transfert du financement au CNDS qui aurait aimé pouvoir disposer librement de ces 30 millions pour financer des sports moins médiatiques.

M. Patrick Bloche. Oui ! C’est honteux.

Mme Valérie Fourneyron. Alors bien sûr, j’entends d’ici vos réponses, monsieur le rapporteur, madame la ministre : les collectivités sont libres. Elles pouvaient choisir de ne pas se porter candidates. D’ailleurs, certaines ont renoncé. C’est vrai.

Mme Marie-George Buffet. Oui !

Mme Valérie Fourneyron. Tout comme on peut, à juste titre, regretter que ces centaines de millions ne soient pas investis dans des salles ou dans des équipements et des disciplines qui en ont bien plus besoin que le football.

Ce que nous vous reprochons, c’est de faire sauter les digues : vous privez les collectivités de remparts juridiques précieux, qui leur permettent aussi de lutter contre la pression parfois très forte de certains clubs. Si les subventions allouées aux clubs et aux sociétés sportives par les collectivités ont été plafonnées, si les garanties d’emprunt ont été interdites, il y avait sans doute de bonnes raisons. Rappelez-vous, chers collègues, du four des METP ou du dépôt de bilan de certains grands clubs de football.

Ce texte pose plus généralement la question des rapports entre collectivités, entre argent public et sport professionnel, sujet qui a intéressé la Cour des comptes, la Commission européenne et qui intéresse directement les contribuables.

Dans un rapport de décembre 2009, la Cour des comptes avait souligné à quel point le concours des collectivités au sport professionnel était impossible à chiffrer, entre les aides directes, indirectes, les mises à disposition d’équipements. Ces aides sont souvent attribuées sans lien avec des missions d’intérêt général ou sans qu’il soit possible de le vérifier. Elles répondent d’abord aux besoins de financement des sociétés sportives, sans transparence ni sécurité juridique. La Cour a insisté pour dire qu’il fallait modifier ces modalités de soutien afin d’établir un partenariat qui soit respectueux de l’intérêt public.

M. le président. Il faut conclure, madame la députée.

Mme Valérie Fourneyron. J’en viens à ma conclusion, monsieur le président.

Je ne suis pas certaine que la présente proposition de loi aille dans le bon sens ; je suis même certaine du contraire. Le texte que vous proposez aujourd’hui cautionne en réalité une forme de crédit revolving aux frais du contribuable pour financer les stades de l’Euro 2016 : subprimes, emprunts toxiques, surendettement, nous sommes dans cette ligne. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’Euro 2016 est un événement d’une grande portée pour notre pays. Comme toute compétition internationale se tenant sur notre sol, l’Euro 2016 peut être une chance pour le développement des pratiques et des infrastructures sportives. J’espère d’ailleurs que les très bonnes performances des handballeurs français augurent d’une possible organisation d’une prochaine coupe du monde sur notre territoire et non au Qatar.

Toutefois l’Euro 2016, comme d’autres événements sportifs, ne représentera cette chance que s’il est porté par une ambition et des moyens publics – État et collectivités territoriales – au service de l’intérêt général. Il ne sera cette chance que s’il est accessible au plus grand nombre, que s’il est accompagné et poursuivi par un effort important envers les pratiques amateurs afin qu’elles puissent accueillir les nouveaux pratiquants motivés par cet événement.

Vous avez, madame la ministre, souhaité qu’il soit procédé à une évaluation des candidatures portées par la France ces dernières années pour améliorer le rayonnement et l’efficacité de nos futures candidatures. Je m’en félicite. Cependant, dans cette évaluation, il faudra ouvrir un chapitre sur les conséquences et les engagements que la réussite de telle ou telle candidature pose en matière de financement et de responsabilité publiques !

En se portant candidat, l’État et la Fédération française de football connaissaient les conditions édictées par l’UEFA concernant le nombre de stades, leur capacité d’accueil du public ainsi que de la qualité d’accueil : loges, salons privés pour les partenaires officiels. Le chiffre de 5 000 a été cité.

Le cahier des charges était, certes, discutable, le coût des grands événements sportifs ne cessant de grimper pour les États organisateurs et l’utilisation pérenne d’équipements surdimensionnés pouvant poser des problèmes aux collectivités comme aux clubs. Néanmoins le cahier des charges était connu, qui demandait des provisions, des mobilisations budgétaires au plus haut niveau.

Non seulement cela n’a pas été fait, mais les moyens publics pour le sport ont encore été réduits dans la dernière période. Au pauvre budget du ministère des sports de 197 millions hors CNDS, s’ajoutera un financement moindre des collectivités territoriales, victimes du gel des dotations et de la suppression de la taxe professionnelle.

Résultat : des collectivités ont renoncé, d’autres cherchent des financements tous azimuts et l’État fait défaut. Il ne s’engage que pour un peu plus de 8 % par rapport au 1,8 milliard nécessaire et met à contribution le CNDS dont, vous le savez, ce n’est pas l’objectif et qui, par ailleurs, restreint les financements du sport amateur. Je rappelle l’engagement de 30 % de l’État pour la Coupe du monde l998.

Exigence de la FIFA, désengagement public, tout pousse à renforcer la tendance déjà lourde de la marchandisation du sport, notamment par le biais de partenariats public-privé. Heureusement, comme il existe encore des obstacles à cette complète marchandisation, nous arrivons à cette proposition de loi de circonstance. En effet, comment dénommer ce texte qui ne porte que sur l’organisation du championnat d’Europe de l’UEFA 2016 et qui multiplie des régimes dérogatoires au code du sport comme à celui des collectivités ?

Si j’étais certaine que cette loi n’a pas vocation à faire jurisprudence pour le financement futur des équipements sportifs, je pourrais, monsieur le rapporteur, lui trouver, sans pour autant l’approuver, l’excuse de l’impréparation et de l’urgence au regard de la date butoir de 2014. Si cette loi nous garantissait que la gestion des collectivités ne sera pas impactée à long terme par ce méli-mélo juridique, j’aurais la même attitude. Cependant tel n’est pas le cas. Le risque est grand que les collectivités soient amenées à s’endetter pour encourager des projets démesurés.

Cette proposition de loi vient après une série de cavaliers et de lois parcellaires allant tous dans le même sens : celui d’un remplacement des financements publics pour un droit effectif au sport du plus grand nombre dans toutes les pratiques et à tous les niveaux au profit d’un financement privé centré sur le retour sur investissement.

Nous avions déjà eu le cavalier introduit dans le projet de loi relatif à la modernisation des services touristiques permettant aux collectivités locales de participer au financement de stades entièrement privés comme le fameux OL Land dont a parlé mon collègue André Gerin. Nous avons maintenant cette proposition de loi qui organise la participation des collectivités territoriales au financement de stades privés pour quelques clubs, en l’occurrence ceux de Paris, de Nancy et de Lens.

Ainsi, l’article 1er donne la possibilité aux collectivités territoriales d’accorder des subventions à des clubs pour la construction d’équipements qu’elles financent déjà par d’autres voies, puisqu’elles sont parties prenantes de montages reposant sur un bail emphytéotique administratif.

Au moins, le bail emphytéotique ne permettait que le financement d’un équipement d’intérêt général. En l’occurrence, la subvention pourra en revanche être utilisée pour développer des stades galeries commerciales comme en témoigne l’article 2. Cet article fait sauter tous les verrous encadrant les subventions des collectivités aux clubs. Que disent en effet les articles du code du sport que vous entendez supprimer ?

M. André Gerin. Scandaleux !

Mme Marie-George Buffet. Son article 113-1 interdit aux collectivités territoriales d’accorder des garanties d’emprunt et de cautionnement aux clubs qui réalisent plus de 75 000 euros de recettes par an, et ne les autorise à aider que les associations pour leurs projets d’équipement et d’investissement.

L’article 113-3 plafonne le montant des aides accordées par les collectivités territoriales aux sociétés sportives pour les contrats de prestation de services et pour leurs activités qui ne sont pas d’intérêt général.

L’article 112-11 interdit le versement aux sociétés sportives par les collectivités territoriales d’aides économiques, y compris des subventions, si elles ne sont pas en difficulté ou si elles ne servent pas un intérêt public.

J’ai lu ces articles, résultat du travail législatif de ministres ayant appartenu à des majorités différentes. Au moins, avaient-ils au cœur la défense du mouvement sportif et soutenaient-ils l’idée que le droit au sport ne pouvait relever d’une marchandisation à l’extrême.

Si vous faites sauter ces articles, monsieur le rapporteur, madame la ministre, c’est pour supprimer toute limite à l’utilisation de ces subventions, quitte à ce qu’elles servent à résoudre les problèmes financiers des clubs ou à nourrir les grands groupes du BTP.

Nous savons ce que les clubs entendent par « problèmes financiers ». Ces problèmes sont liés à la baisse des droits TV sur lesquels ils ont fondé leurs budgets, à la course aux salaires et aux transferts, mais également à un problème de billetterie.

Nous aurions un beau travail à mener sur ce sujet. Quels rapports nouveaux aux supporters, qui ne peuvent se résumer aux articles les concernant dans la LOPPSI !

L’Euro 2016 aurait pu permettre d’avancer sur le contrôle de gestion des clubs au plan européen. Si l’on peut se féliciter du fair-play financier initié par Michel Platini qui vient d’être réélu à la présidence de l’UEFA – à quelques pas d’ici au Grand Palais –, une initiative de l’Union européenne pour un véritable contrôle de gestion des clubs est indispensable et la France, madame la ministre, pourrait en prendre l’initiative.

Il y a quelques semaines, nous avons entendu beaucoup de discours sur le millefeuille des collectivités territoriales et la nécessité de réduire les dépenses publiques lors du débat sur la réforme des collectivités territoriales. En revanche lorsqu’il s’agit de l’Euro 2016, lorsqu’il s’agit de maximiser les profits des grands groupes privés, vous faites exception.

M. André Gerin. Bingo !

Mme Marie-George Buffet. En supprimant l’article 1511-2 du code général des collectivités territoriales, vous éliminez le contrôle par la région du versement des aides économiques par les communes et les départements pour les sociétés sportives. En réalité, votre discours diffère lorsqu’il s’agit des hommes et des femmes qui vivent de leur travail et lorsque les intérêts de quelques financiers sont en jeu.

Enfin, parlons d’Europe.

Nous avons tous ici, à part quelques-uns peut-être, contribué à faire reconnaître l’exception sportive dès le traité de Nice. Nous avons fondé cette exigence en soulignant que le sport ne relevait pas des logiques marchandes, mais d’un droit. J’espère, madame la ministre, que la Commission européenne ne reviendra pas sur cette spécificité en prenant appui sur la loi que vous voulez nous faire adopter ce soir. Elle pourrait en effet considérer que ce régime d’aide est contraire aux règles les plus élémentaires du droit de la concurrence – que vous défendez – car vous accordez un avantage concurrentiel majeur à certaines sociétés sportives uniquement.

L’article 3 couronne cet édifice dérogatoire. À ce régime de circonstance, vous ajoutez une justice de circonstance. Vous proposez que les collectivités territoriales puissent s’accorder avec les sociétés sportives sur la composition d’un tribunal ad hoc qui démêlera leurs différends. Vous proposez qu’elles puissent fixer elles-mêmes les règles de résolution des conflits et, de surcroît, qu’elles puissent s’arranger à l’amiable.

Cela est source de bien des dangers car, pour que les stades sortent bien de terre avant 2016, il y a fort à parier que ni le club ni la collectivité territoriale ne feront appel de la décision du tribunal arbitral en cas de désaccord. L’intérêt de la puissance publique peut passer au second plan, ce que ne laisserait pas faire un tribunal administratif. C’est d’ailleurs un principe général de notre droit inscrit dans le code civil que de ne pas compromettre quand de l’argent public est en jeu.

En 2007, le rapport du conseiller d’État Labetoulle remis au garde des sceaux indiquait que si l’arbitrage venait à être autorisé pour les personnes publiques, il devrait être encadré par des règles spécifiques. L’arbitrage est très répandu dans le monde de la FIFA, dites-vous, madame la ministre. Cependant la FIFA n’est pas l’État, les responsabilités ne sont pas les mêmes.

Vous allez sans doute me dire, monsieur le rapporteur, que cette loi est inévitable car, maintenant, on ne peut plus faire autrement, d’où l’urgence. Mais enfin, mesurons les conséquences de l’adoption d’une telle loi et la jurisprudence politique qu’elle peut créer !

L’argent privé va-t-il devenir le seul recours en matière d’infrastructures sportives ? Puisque parler de la construction d’équipements, c’est parler d’avenir, quelles alternatives avons-nous ? Débattons-en donc.

Je pense qu’il faut remettre le problème à l’endroit et se poser d’abord la question de nos objectifs en matière sportive avant d’aborder celle des moyens.

Le sport et les activités physiques, parce qu’ils participent à la construction personnelle et à l’épanouissement des individus, parce qu’ils constituent des éléments d’aménagement du territoire, doivent s’appuyer sur des missions de service public. Cela signifie que l’État, le mouvement sportif, les élus locaux et nationaux doivent élaborer de concert un grand plan national d’équipements à même de répondre aux besoins des pratiquants et pratiquantes comme des publics et d’accueillir tous les niveaux de compétition. Néanmoins tout cela n’est possible que si la puissance publique crée des conditions favorables par la loi et par un budget correspondant.

Tout le monde est d’accord pour dire que la connaissance participe à l’élévation des individus et que, en conséquence, il doit exister une école nationale, publique, financée par l’impôt. II en va de même pour le sport. Nous devons donc mobiliser des moyens publics pour construire les équipements et garantir le droit à la pratique sportive pour tous et toutes, amateurs, sportifs de haut niveau ou professionnels

En 2007, un candidat à la présidentielle s’était engagé devant l’assemblée générale du Comité national olympique et sportif français à porter la part du budget consacrée au sport à 3 %. En cette matière comme en d’autres, ce candidat devenu Président n’a pas tenu ses engagements. (Approbations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Hervé Féron. Des promesses, toujours des promesses !

Mme Marie-George Buffet. Pour notre part, nous prenons l’engagement de nous acheminer vers cet objectif, avec une première étape dès 2012. Mettons fin au gel des dotations pour les collectivités. Tout cela est possible si l’on met enfin en place une réforme de la fiscalité juste et efficace.

J’ai déjà parlé des cavaliers et des lois sectorielles qui ont accompagné la marchandisation d’une partie du sport tout au long de ces dernières années. Quand pourrons-nous enfin, onze ans après la loi de 2000, débattre d’une grande loi-cadre sur le sport, une grande loi qui permettra de relever les nouveaux défis et de préserver le sens et l’éthique du sport ?

C’est, je l’espère, madame la ministre, cette exigence qui s’exprimera lors du parlement du sport que vous organisez la semaine prochaine.

Pour toutes ces raisons et parce que nous estimons qu’il était possible de préparer autrement cet Euro 2012, madame la ministre, monsieur le rapporteur, les député-e-s communistes, républicains et du parti de gauche, qui regrettent que vous ayez demandé la procédure d’urgence, ne pourront que voter contre cette loi de circonstances, je dirais même d’exception, qui nous est proposée. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

M. le président. La parole est à M. Michel Hunault.

M. Michel Hunault. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, j’avais cru comprendre que tout le monde se réjouissait de l’organisation dans notre pays du prochain championnat d’Europe. L’écoute attentive des divers orateurs m’a toutefois conduit à me replonger dans le texte de la proposition de loi. Beaucoup d’interventions, fort bien rédigées du reste, ont posé de vrais problèmes, en matière de sport et d’éthique, mais étaient éloignées du fond de la proposition de loi qu’il nous est aujourd’hui proposé d’adopter.

Mme Marie-George Buffet. Elles étaient en plein de dedans, au contraire !

M. Michel Hunault. C’est pourquoi, au nom de mes collègues du Nouveau Centre, je souhaite revenir à l’essentiel, à savoir les nouvelles possibilités offertes par la proposition de loi. Il s’agit, d’une part, de la possibilité pour les stades gérés dans le cadre d’un bail emphytéotique administratif de bénéficier d’aides publiques afin de sécuriser leurs installations et de mener à bien des opérations de rénovations avant l’organisation de l’Euro 2016 ; d’autre part, de la possibilité désormais ouverte aux collectivités de participer aux frais de rénovation ou de construction des stades ou d’apporter leur caution au bailleur en cas d’emprunt, ce qui met fin à un casse-tête pour les stades loués à travers un bail emphytéotique.

Le soutien apporté à ce texte par mes collègues et moi-même se veut exigeant. Il ne saurait être question – et je me tourne vers mes collègues de l’opposition – de ne pas respecter le code des marchés publics. Je vous ai entendu soulever certaines interrogations. André Gerin est allé jusqu’à dire que cette proposition mettait à mal les valeurs du sport en privilégiant l’argent et en laissant place à la corruption et au dopage. Il est assez choquant d’entendre de tels propos. Les valeurs du sport sont universelles, chers collègues. Elles ne sont ni de droite ni de gauche. Elles appartiennent à la communauté nationale.

Comment parler de corruption ? Il s’avère que j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur de la loi anti-corruption qui portait transposition dans notre droit des standards européens. Si vous avez le moindre doute sur l’existence d’une zone de non-droit, pourquoi ne pas saisir en amont le service central de prévention de la corruption, qui est à la disposition des collectivités pour juger de la conformité des montages juridiques et financiers de toutes les réalisations à caractère public ?

Parler comme vous l’avez fait des partenariats public-privé est très grave. Vous savez très bien que ce type de partenariat est encadré et qu’il n’est pas possible de faire n’importe quoi.

Vous avez encore cité les grands groupes de BTP. Il faut se réjouir qu’ils existent. Ils constituent souvent des partenaires très efficaces pour les collectivités territoriales que vous présidez majoritairement – dois-je le rappeler ? – puisque vous êtes à la tête de vingt-deux régions et de cinquante-six départements.

Mme Marie-George Buffet. Ce n’est pas l’objet de la proposition de loi !

M. Michel Hunault. Vous avez cité l’exemple du Mans et de Lyon. Permettez-moi de rappeler qu’il s’agit, là encore, de collectivités présidées par des élus de l’opposition.

Mme Colette Langlade. Cela vous embarrasse !

M. Michel Hunault. Ne faites pas dire à la proposition de loi de notre collègue ce qu’elle ne dit pas. Songez plutôt à ce qui se passerait si elle n’était pas adoptée. Certains stades ne seraient pas prêts alors que, dans le cahier des charges, nous nous sommes engagés à recevoir la coupe de l’UEFA en 2016, ce qui implique de disposer de stades aux dimensions requises.

Mme Marie-George Buffet. Il aurait fallu s’en inquiéter au moment de faire acte de candidature !

M. Michel Hunault. Cette proposition de loi est un outil juridique et financier à même de répondre aux exigences posées dans ce cahier des charges.

Il ne s’agit pas de créer des zones de non-droit. Je suis certain, madame la ministre, que vous aurez à cœur de répondre aux légitimes préoccupations qui s’expriment à cet égard et d’affirmer que le souci du Gouvernement est le respect du code des marchés publics et de ses exigences d’éthique et de transparence.

Nos collègues de l’opposition ont évoqué les valeurs du sport, auxquelles nous sommes nous aussi attachés. À ce propos, je rappelle que c’est une initiative parlementaire qui avait permis que le sport amateur ne soit pas oublié dans la redistribution des bénéfices induits par la Coupe du monde de 1998. Pour la préparation de ce championnat d’Europe 2016, il ne doit pas non plus être oublié. Vous-même et le rapporteur y êtes particulièrement attachés, je le sais. Il ne tient que grâce à ses bénévoles. Nous savons l’importance du sport dans l’éducation, la formation de la personnalité des jeunes. Il serait bon de réaffirmer que l’une des exigences du cahier des charges doit être la prise en compte du sport amateur.

Venons-en au financement.

Une taxe sur les paris de la Française des jeux a été instaurée. Nous avons libéralisé les paris en ligne et nous avons atteint un plafond en matière de prélèvements qui ne nous permet pas d’aller au-delà. Cela dit, il existe des pistes en matière de financement du sport en général, que certains ont évoquées.

Au-delà de cette proposition de loi, nous aurions intérêt à ce que soit établi, sous votre autorité, madame la ministre, un groupe de travail réunissant toutes les composantes de notre assemblée afin de cerner les initiatives qui permettraient de faire du championnat d’Europe une véritable fête du sport, loin des mises en cause que nous avons entendues de la part de nos collègues de l’opposition, qui ont employé des mots très durs.

S’agissant de l’article 3 relatif à l’arbitrage, il est hors de question de laisser se développer des zones de non-droit et de faire en sorte que des litiges ne seraient pas réglés par les juridictions compétentes. Nous reviendrons sur ce point lors de la discussion des articles. Des amendements ont été déposés et je suis certain que le rapporteur, auteur de cette proposition, et le Gouvernement auront à cœur de répondre aux légitimes interrogations que suscite le recours à l’arbitrage.

Madame la ministre, je terminerai par un vœu : que ce championnat d’Europe soit un moment d’unité nationale, comme l’a été la Coupe du monde. Tous ceux qui ont vécu cet événement savent qu’il a été l’un des rares moments où la nation, dans toute sa diversité, a pu se rassembler. J’espère qu’il en ira de même en 2016.

Toutefois, j’avoue avoir été très surpris de la violence des mises en cause qu’a suscitées cette proposition de loi.

Mme Colette Langlade. Le mot est fort !

M. Sébastien Huyghe. C’est la violence du stade !

M. Michel Hunault. Regardez donc le Journal officiel. Lorsque l’on s’exprime, il faut assumer ses propos. Des interrogations, il y en a peut-être, mais je peux vous assurer, madame la ministre, que les membres de la majorité sont tout autant attachés que ceux de l’opposition aux valeurs du sport et à son éthique. C’est la raison pour laquelle le groupe Nouveau Centre votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Rosso-Debord.

Mme Valérie Rosso-Debord. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs, le 28 mai 2010, à la satisfaction générale, du moins en apparence, l’UEFA a désigné la France comme pays organisateur du championnat d’Europe 2016. Tout le monde se félicitait alors de cette issue. Malheureusement, il semble aujourd’hui que ce dossier fasse l’objet d’une instrumentalisation politicienne de la part du parti socialiste et de ses alliés au risque d’en hypothéquer le bon déroulement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Sébastien Huyghe. Ils sont toujours contre tout !

Mme Valérie Rosso-Debord. Faut-il répéter, mes chers collègues, que cette manifestation sportive est un honneur et une chance pour notre pays : un honneur car c’est la première fois que cette rencontre de premier plan réunira vingt-quatre pays ; une chance car les retombées économiques de ce genre de manifestation sont considérables. La France sera au cœur de l’actualité avec 2, 5 millions de spectateurs et près de 2 milliards de personnes qui suivront les matches devant les écrans de télévision ; et surtout, ce sera une immense fête populaire. Ne boudons donc pas notre plaisir.

Il nous faut néanmoins nous rendre à l’évidence : la capacité d’accueil de nos stades n’est pas suffisante. Contrairement à certains pays européens qui, depuis une dizaine d’années, ont su faire des compétitions internationales un important levier de modernisation de leurs équipements sportifs et engager une véritable rénovation de leur parc – je songe à l’Allemagne, à l’Angleterre, aux Pays-Bas, au Portugal ou encore à la Suisse –, la France, elle, est restée en arrière. En l’état, les stades des villes candidates ne sont pas conformes au cahier des charges défini par l’UEFA, que – je tiens à le rappeler – nous nous sommes engagés à respecter afin d’obtenir l’organisation du championnat.

Il ne s’agit pas de n’importe quelles conditions. Je le dirais à Mme Fourneyron, si elle était encore là.

M. Sébastien Huyghe. Cela ne l’intéresse pas !

Mme Valérie Rosso-Debord. Il s’agit de permettre aux onze villes concernées, dont sept de gauche, d’accueillir l’Euro. Rien n’obligeait ces villes à le faire : elles l’ont voulu ! Saint-Denis, Lyon, Lille, Lens, Paris, Saint-Étienne, Toulouse : Mme Fourneyron ira-t-elle dire à ces communes qu’elles sont irresponsables, incapables de résister aux sirènes des financeurs publics…

M. Régis Juanico. À Saint-Étienne, oui !

Mme Valérie Rosso-Debord. …ou des entreprises dont vous ne voulez pas citer le nom, et qu’elles n’ont pas mesuré ce qui est en jeu ? Leurs élus, vos amis, apprécieront.

M. Bernard Depierre, rapporteur. Très bien !

Mme Valérie Rosso-Debord. Nous devons donc rénover notre parc sportif. Voilà pourquoi le Président de la République a fait de l’Euro 2016 un projet d’intérêt national et annoncé la création d’un fonds de soutien de 150 millions d’euros dédié au programme de construction et de rénovation des stades de la compétition.

M. Sébastien Huyghe. C’est très bien !

Mme Valérie Rosso-Debord. C’est un signal fort de l’engagement de l’État, dont nous ne pouvons que nous réjouir. Je rappelle que nous ne sommes pas dans la même situation économique qu’en 1998, époque où d’aucuns n’ont eu de cesse d’utiliser l’argent à d’autres fins que la réduction de notre endettement.

M. Philippe Gosselin. C’est très bien de le rappeler !

M. Régis Juanico. Vous le regrettez donc !

Mme Valérie Rosso-Debord. Nous devons proposer des solutions nouvelles, des montages financiers innovants et, surtout, nous devons intégrer les acteurs privés, ne vous en déplaise.

M. Philippe Gosselin. Cela n’a rien de honteux !

Mme Valérie Rosso-Debord. Nous y réfléchissons depuis plusieurs années déjà. Tirons donc enfin les enseignements des rapports de Philippe Séguin et de David Douillet, qui démontrent la nécessité absolue d’un nouveau modèle économique pour financer les équipements sportifs.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui va dans le bon sens : elle vise à accroître la part du financement privé, tout en sécurisant le cadre juridique de la construction et de l’exploitation des stades. Elle ne résoudra certes pas tous les problèmes posés par l’organisation du championnat et par le cahier des charges de l’UEFA, mais son domaine d’application est précis. C’est ce qui en fait un texte indispensable et efficace.

Celui-ci mettra notamment fin à une injustice en matière d’éligibilité aux subventions. En effet, les travaux de construction ou de rénovation réalisés sous le régime du bail emphytéotique administratif ne sont pas éligibles aux subventions publiques, à la différence de ceux qui sont régis par le partenariat entre public et privé ou par la maîtrise d’ouvrage publique. Les villes de Paris, de Lens et de Nancy ont opté pour le bail emphytéotique administratif.

M. Hervé Féron. Tiens tiens !

Mme Valérie Rosso-Debord. Il ne serait pas acceptable qu’elles ne puissent pas bénéficier des mêmes possibilités de financement que les autres villes candidates.

J’ajoute que les collectivités locales elles-mêmes ont appelé de leurs vœux des dispositifs leur permettant de se doter de ces nouveaux équipements – dont la vocation ne sera pas seulement sportive –, afin d’accroître la compétitivité de leur territoire.

Dès lors, comment comprendre la posture stérile de l’opposition sur ce texte ? Nos villes ont besoin de ces nouveaux outils juridiques pour satisfaire les exigences du championnat. On ne peut pas à la fois vouloir l’Euro 2016 et refuser le texte qui permet d’édifier les stades nécessaires au déroulement de cet événement sportif. Soit vous voulez, comme nous, ce championnat d’Europe, soit vous n’en voulez pas !

M. le président. Il faut conclure, madame.

Mme Valérie Rosso-Debord. Comment justifiez-vous, monsieur Féron, votre acharnement à faire échouer un texte nécessaire, notamment, aux travaux de rénovation du stade Marcel Picot, qu’entreprendra la communauté urbaine de Nancy sur le territoire de Tomblaine, commune dont vous êtes maire ? Je ne peux croire que vous soyez sincère.

M. le président. Merci.

Mme Valérie Rosso-Debord. Il s’agit certainement d’une posture politicienne…

M. Philippe Gosselin. Évidemment !

M. Sébastien Huyghe. Comme d’habitude !

M. le président. Madame Rosso-Debord, s’il vous plaît, concluez !

Mme Valérie Rosso-Debord. J’appelle donc tous mes collègues à un peu de courage, sous peine de carton rouge ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le 28 mai dernier, la France a été désignée pour organiser le championnat d’Europe de football 2016. Pour tous les passionnés de sport, en particulier de football, que nous sommes, et pour tous les Français, c’est une grande satisfaction et un grand honneur d’accueillir une compétition sportive considérée comme la plus importante après la Coupe du monde et les jeux Olympiques.

L’organisation de ce championnat s’accompagne d’exigences strictes en termes d’infrastructures et de rénovation de nos capacités d’accueil. Les travaux supposent donc un investissement massif : leur coût total est estimé à 1,7 milliard d’euros d’ici à 2016.

La proposition de loi soumise à la représentation nationale marque l’aboutissement d’un processus de désengagement financier de l’État au profit d’intérêts particuliers et au détriment des collectivités territoriales. Elle est faite sur mesure, aux petits oignons, si j’ose dire, pour satisfaire quelques intérêts privés, ceux des grands groupes du BTP. C’est un cadeau, voté dans l’urgence d’une procédure accélérée, sous la pression de lobbys assez éloignés de l’intérêt général.

Cela devient une habitude, madame la ministre, dont témoigne également l’adoption récente du texte sur l’ouverture à la concurrence du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne et de celui qui encadre la profession d’agent sportif.

Je veux exprimer les quelques regrets et le sentiment de malaise que nous inspire ce texte.

Le premier regret est la pingrerie de l’État et de ce gouvernement. (Mme la ministre rit.) En 1998, l’État avait participé au financement des rénovations des stades à hauteur de 30 % du budget total ; pour 2016, cette part atteindra à peine 8 %.

Second regret : au moment de la candidature de la France, Nicolas Sarkozy et son gouvernement avaient fièrement annoncé que l’État apporterait une aide financière de 153 millions d’euros. Naïvement, nous avions imaginé qu’il s’agissait d’une contribution exceptionnelle et spécifique, hors budget des sports et du CNDS. Puis nous avons découvert que cette somme devait être ponctionnée sur le budget du CNDS. Finalement, au cours de la discussion budgétaire au Sénat, fin 2010, un amendement de dernière minute a été adopté, qui permet de porter le prélèvement sur les paris en dur de la Française des jeux de 1,8 à 2,1 % entre 2011 et 2015.

Malheureusement, le compte n’y sera pas malgré tout. En effet, ce prélèvement complémentaire est plafonné à 24 millions d’euros par an. Si mes calculs sont exacts, il devrait donc rapporter, au maximum, 120 millions, et non 153. Jusqu’à présent, personne ici n’a obtenu d’explication sur le financement de la différence, à moins que l’on ne déplafonne ce prélèvement lors de la prochaine discussion budgétaire. Il faut donc trouver 33 millions d’euros. Si votre gouvernement compte faire les poches du fonds de réserve du CNDS, au détriment de la construction d’autres équipements sportifs, il faut le dire clairement !

Enfin, nous ressentons un malaise profond, car votre texte, monsieur Depierre, consiste uniquement à faire bénéficier les intérêts privés de dérogations absolues au droit existant.

Prenons l’exemple des baux emphytéotiques administratifs.

L’article 1er dispose que les partenaires privés qui assurent, en théorie, l’exploitation d’un l’équipement sportif en contrepartie d’un bénéfice sous forme de retour sur investissement pourront bénéficier du versement de subventions, de redevances et autres participations financières de la part des collectivités ou de l’État. Dans un bail emphytéotique classique, le partenaire privé assure seul l’exploitation du bien, donc les risques afférents. Or votre texte permettra à ce partenaire de percevoir de l’argent public, donc de ne plus assumer les risques, cela aux dépens de la collectivité, autrement dit des citoyens contribuables.

M. Hervé Féron. Eh oui !

M. Régis Juanico. Nous avons affaire, d’une part, à une stricte logique de mutualisation des risques et des pertes avec les contribuables et, de l’autre, à une privatisation, une captation des profits par les acteurs privés, à qui l’on déroule une nouvelle fois le tapis rouge. Pour résumer la philosophie de ce texte purement opportuniste : ces acteurs privés auront le beurre, l’argent du beurre et le bonnet de la crémière. (Sourires.)

Comment ne pas s’offusquer de ce qui constitue un détournement pur et simple des principes du droit actuel au profit de quelques grands groupes du BTP, au demeurant très rentables ? Je rappelle que Bouygues et Vinci ont réalisé en 2010 un bénéfice net de 1,1 milliard d’euros chacun, le bénéfice d’Eiffage dépassant quant à lui 232 millions d’euros.

Je le répète, l’organisation de l’Euro 2016 est une chance. Nous avons tous gardé en mémoire la Coupe du monde de 1998 et le championnat d’Europe de 1984…

M. le président. Il faut conclure.

M. Régis Juanico. Je concluais justement, monsieur le président.

Ces souvenirs sont ceux d’une France en fête. Malheureusement, le désengagement de l’État et les retards accumulés au cours des derniers mois donnent lieu à une proposition de loi qui sacrifie cet esprit sur l’autel du sport-business.

Nous ne voterons donc pas ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à Mme Colette Langlade.

Mme Colette Langlade. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi est difficilement acceptable, sur la forme comme sur le fond.

Sur la forme, ce texte conforte notre opposition à votre réforme constitutionnelle de 2008. En effet, après le texte sur le travail du dimanche, vous récidivez en passant à nouveau par une proposition de loi et non un projet de loi, afin d’éviter de présenter une étude d’impact et de recueillir l’avis du Conseil d’État. En outre, nous avons appris avec étonnement que le Gouvernement avait engagé, le 17 mars dernier, la procédure accélérée sur ce texte, réduisant ainsi la durée des échanges entre les deux chambres.

Sur le fond, ce texte instaure des dérogations au droit existant pour permettre aux collectivités territoriales d’aider au financement de la construction ou de la rénovation d’enceintes sportives et d’équipements connexes, afin de répondre aux exigences du cahier des charges de l’UEFA. Au regard de ces dernières, nos équipements actuels, Stade de France compris, sont déjà obsolètes.

Sollicitées de nouveau, les collectivités territoriales, qui – comme à l’accoutumée avec votre gouvernement – n’ont malheureusement pas été consultées, devront mettre la main au porte-monnaie, alors même que les effets de la crise se font encore sentir et que l’État ne cesse de se désengager.

Le poids économique total du sport en France est de 35 milliards d’euros : 50 % de ce montant est à la charge des ménages, 30 % incombe aux collectivités, dont une grosse part au bloc communal, 10 % à l’État et 10 % aux acteurs privés. Ainsi, alors que l’État avait contribué à hauteur de 30 % au financement de la Coupe du monde de football en 1998, il ne participera à l’Euro 2016 qu’à hauteur de 7 %.

Malgré les demandes incessantes d’un budget permettant de financer les stades qui accueilleront le championnat, le Gouvernement n’a pas souhaité engager de nouveaux crédits pour construire les structures d’accueil. Ainsi, sur 1,7 milliard d’euros d’investissement, il ne fournira que 153 millions d’euros, financés par un prélèvement de 0,3 % sur les jeux en dur de la Française des jeux entre 2011 et 2014. Le reste à charge pèsera directement sur les contribuables locaux, qui n’auront même pas la jouissance des équipements en question, car les profits engendrés seront finalement confisqués par les intérêts privés, qu’il s’agisse des clubs sportifs professionnels ou des entreprises dont dépendront la construction et l’exploitation des équipements.

De grandes villes telles que Rennes, Nantes ou Strasbourg ont préféré renoncer à juste titre à ce projet en raison de son coût exorbitant. La Cour des comptes, dans ses recommandations, s’était du reste montrée réservée, conseillant de concevoir avec la plus grande prudence l’économie globale de la construction d’équipements dont la rentabilité n’apparaît pas nécessairement au cours de la durée de vie prévisible de l’investissement.

Il ne tient qu’à nous de ne pas céder à cette facilité. Si les collectivités territoriales sont amenées à participer aux projets de construction ou de rénovation des enceintes sportives destinées à accueillir l’Euro 2016, ce sont autant de crédits qui ne pourront plus être alloués à des projets structurants. Les équipements sportifs de proximité en pâtiront, ces stades, ces salles, ces piscines qui sont porteurs d’un véritable intérêt général et essentiels pour soutenir le mouvement sportif et contribuer à l’aménagement du territoire, en prenant en considération les spécificités du milieu rural, des zones sensibles ou des bassins de vie dépourvus d’infrastructures. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. Michel Ménard.

M. Michel Ménard. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, dans cette proposition de loi relative à l’organisation de championnat d’Europe de football 2016, je vois trois points inacceptables : les exigences tout à fait exorbitantes de l’UEFA ; la très faible participation de l’État à la réussite de ce projet, donc le transfert de charges vers les collectivités locales ; enfin, la dérogation au droit existant dans le seul but de satisfaire des intérêts privés.

Accueillir le championnat d’Europe 2016 est évidemment un grand plaisir. Nous avons tous le souvenir de la Coupe du monde de 1998, de l’enthousiasme, de la fête ; nous avons tous le souvenir de la Coupe du monde de rugby en 2007, qui fut aussi l’occasion d’une grande fête.

La ville de Nantes a accueilli ces deux événements. Pourtant, elle n’accueillera pas l’Euro 2016 : la municipalité a renoncé à poser sa candidature, car les exigences de l’UEFA étaient très excessives.

J’aimerais savoir si, à la suite du rapport sur les grands équipements sportifs, la France a demandé à l’UEFA de revoir à la baisse son cahier des charges. Le groupe socialiste a rappelé, dans une contribution, ses réserves vis-à-vis de ces demandes. Cela étant, je ne critique pas le président de l’UEFA, qui a été brillamment réélu aujourd’hui. Il travaille d’ailleurs pour que les clubs soient plus raisonnables dans le domaine financier, et pour que leurs budgets soient équilibrés.

À Nantes, pour accueillir ce championnat d’Europe, il aurait fallu 80 à 100 millions d’euros de travaux. Il n’y a pas si longtemps, nous avons pourtant accueilli la Coupe du monde de rugby : les sièges mesuraient quarante-sept centimètres ; on demande maintenant cinquante centimètres pour recevoir les spectateurs. Ceux qui assisteront aux matches du championnat d’Europe sont-ils plus gros que ceux qui ont assisté aux matches de la Coupe du monde de rugby ?

On nous demande d’agrandir des vestiaires : il est apparemment nécessaire de disposer d’espaces plus importants pour onze joueurs de football que pour quinze joueurs de rugby. On nous demande des espaces « VIP », des espaces commerciaux. Tout cela est évidemment à la charge du contribuable. C’est d’autant moins acceptable que, comme certains l’ont déjà rappelé, l’aide de l’État ne se monte qu’à environ 7 % du montant.

Le maire de Nantes a renoncé à poser la candidature de sa ville, et j’en suis satisfait. Peu de Nantaises et de Nantais, peu d’habitants de notre département et de notre région, se sont d’ailleurs offusqués de ce choix en apprenant la dépense qu’il aurait fallu engager pour deux ou trois matches de football.

M. Hervé Féron. Bravo ! C’est courageux !

Mme Valérie Rosso-Debord. Saint-Étienne aussi a le droit de renoncer !

M. Régis Juanico. Impossible ! (Sourires.)

M. Michel Ménard. La municipalité choisira d’autres priorités : elle investira dans les quartiers, elle investira pour d’autres sports qui ont besoin de ce soutien financier. C’est, je crois, tout à fait raisonnable.

La participation de l’État, Régis Juanico vient de le rappeler, s’était élevée à 30 % lors de la Coupe du monde de football ; elle ne sera que de 7 % cette fois. C’est donc un véritable transfert de charges en direction des collectivités locales que vous proposez une fois de plus : si elles veulent accueillir l’Euro 2016, celles-ci n’ont d’autre choix que de faire de l’investissement dans le sport professionnel leur unique priorité.

Cette proposition de loi est donc un texte opportuniste, qui prévoit des dérogations au droit existant pour que les collectivités locales, donc le contribuable, puissent financer la construction et la rénovation de stades en faveur d’intérêts privés. Elle privatise les profits ; elle mutualise le risque et la dépense. L’exception deviendra-t-elle la règle ? Cela supposerait un débat et une concertation : une loi votée en urgence ne suffira pas à répondre à ces questions.

Le sport mérite mieux que cela ; il mérite mieux que cette loi opportuniste, rédigée à la va-vite, examinée suivant une procédure accélérée.

M. le président. Il faut conclure.

M. Michel Ménard. Quels moyens l’État entend-il consacrer au développement du sport pour tous ? Quel est son projet global pour l’aménagement du territoire, pour le soutien à la formation – je pense aux CREPS – et au mouvement sportif ? Les questions sont nombreuses.

Nous nous prononcerons donc contre cette proposition de loi, car la réussite de l’Euro 2016 ne doit pas se faire à n’importe quel prix. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Pérat.

M. Jean-Luc Pérat. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, cette proposition de loi relative à l’organisation du championnat d’Europe de l’UEFA en 2016 nous surprend et nous inquiète.

L’Euro 2016 est pour vous l’occasion de prévoir des dérogations au droit existant et, encore plus grave, des transferts de charges vers les collectivités territoriales, au risque de réduire, voire d’annuler, des investissements dans des domaines sportifs moins médiatisés. L’UEFA a mis la barre très haut, avec des exigences techniques particulièrement démesurées. Ainsi, toutes les villes pressenties devront engager des dépenses conséquentes, qui pénaliseront leur développement.

Cette proposition de loi lancée dans l’urgence nous inquiète. Elle confirme encore une fois le retard pris depuis plusieurs années par notre pays en matière de sport en général, et pour l’organisation du championnat d’Europe de football 2016 en particulier. Malgré les nombreuses demandes, malgré les nombreuses relances, malgré les nombreuses mobilisations pour obtenir de l’État un budget spécifique destiné à accompagner un financement conséquent des villes en vue de l’Euro 2016, force est de constater que le Gouvernement est aux abonnés absents.

Que dire, en effet, de ces 153 millions d’euros, rapporté au 1,7 milliard d’investissement nécessaire ? Je vous laisse le soin d’apprécier, mais j’ai un avis personnel et mon sentiment est critique.

Est-il normal que cette manifestation européenne soit soutenue à un tel niveau par les collectivités territoriales ? L’enjeu, je le conçois, est important pour l’image de la France. Nous en sommes conscients. Cependant pourquoi ne pas se donner les moyens de ses ambitions ? La collaboration, la contribution financière sont logiques à mes yeux, et même indispensables ; mais pas à un tel niveau !

Ce qui me préoccupe tout particulièrement, c’est la façon dont vous vous défaussez sur les collectivités. Celles qui s’engageront dans le processus de financement, de construction, de rénovation des stades et des équipements connexes hypothéqueront des projets structurants, qui seront retardés ou ne verront pas le jour. Ces hyper-structures indispensables à la renommée sportive française ne doivent pas handicaper l’aménagement de territoires peu ou pas équipés.

Ces structures seront-elles viables, d’ailleurs, à court et à long terme ?

Plusieurs d’entre nous reprendront les recommandations de la Cour des comptes, car cela nous paraît capital. Cette dernière conseille en effet de « faire preuve de prudence dans l’appréhension de l’économie globale de la construction d’équipements dont la rentabilité n’apparaît pas nécessairement sur la durée de vie prévisible de l’investissement. » Ces recommandations demeurent le socle d’analyse de la prise de risque. Qui, en effet, prend les risques ?

Malheureusement, nous constatons que cette proposition de loi encourage la privatisation des profits tout en maintenant la mutualisation du risque et de la dépense publique.

Aujourd’hui encore, le bail emphytéotique administratif est contraignant pour le partenaire privé, car celui-ci assure seul l’exploitation. Dans le cas d’un stade, le club supporte à la fois le risque d’exploitation et celui lié à la construction, puisqu’il assure la maîtrise d’ouvrage, la commande et le suivi des travaux. L’intérêt d’un tel bail, c’est l’équilibre financier.

Demain, si cette proposition de loi est adoptée, on dérogera à ce principe en supprimant les inconvénients pour le privé d’un tel partenariat, tout en lui en laissant les avantages. Ce sera alors la collectivité publique qui devra supporter le déséquilibre financier du contrat induit par cette modification de la législation. Les profits seront privés ; les pertes seront à la charge de la collectivité.

Cette proposition de loi crée des exceptions qui concernent ce que l’on peut appeler le sport-business. Où est, encore une fois, l’intérêt général ? Elle organise un véritable régime d’exception, avec la possibilité pour un opérateur privé de bénéficier de subventions publiques et de contourner le juge administratif en cas de litige.

Notre débat se tient dans un contexte de réduction des dépenses publiques à destination du sport, et de crise du football. Les clubs professionnels sont dans le rouge ; les principales ressources, venues des transferts, des sponsors, des droits télé, sont en baisse, et les paris sportifs ne sont pas le paradis dont certains rêvaient.

Le Gouvernement organise la privatisation des stades en minimisant sa contribution et en sollicitant les collectivités territoriales. Le stade ne sera plus qu’une usine à fric animée par des agences de marketing, qui iront jusqu’à vendre son nom au plus offrant.

Ce championnat d’Europe 2016 provoquera certainement un engouement national ; nous n’en avons pas moins de grandes réserves vis-à-vis de cette proposition de loi qui prévoit pour le financement de l’Euro 2016 une inquiétante exception, laquelle risque de devenir ensuite une règle générale. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi présentée par notre collègue Bernard Depierre ressemble tellement peu à son auteur, dont j’ai souvent apprécié les positions, qu’il faut suivre les méandres du texte, et même aller piocher dans le contexte, pour en saisir le véritable esprit.

En effet, en raison des problèmes financiers liés à ce très beau chantier, le Gouvernement avait intérêt à ne pas déposer lui-même un projet de loi, car il eût alors été nécessaire de recueillir l’avis du Conseil d’État et de présenter une étude d’impact. Une proposition de loi, c’était tellement plus souple !

Notre pays a donc obtenu l’organisation de l’Euronations 2016 de football. C’est très bien, pour l’impact sportif, économique, social et même moral sur notre territoire qui en a bien besoin. Cependant nos stades présentent des caractéristiques insuffisantes pour une telle organisation ; notre pays est dans l’obligation de présenter des équipements adaptés aux exigences légitimes de l’UEFA ; je salue d’ailleurs moi aussi la réélection de Michel Platini à la présidence de celle-ci.

Cela va permettre de créer des emplois, de rénover des lieux dépassés, de susciter l’émulation et de doter les clubs professionnels résidents de ces gisements financiers et de ces fameux lieux de vie que les patrons de la Ligue 1 envient aux pays voisins. C’est très bien.

Les rapports en ce sens – Besson, Séguin, Augier, Arenas 2015, Douillet – n’ont d’ailleurs pas manqué. Bien que de qualité inégale, ils ont tous déploré un retard de la France en grands équipements sportifs. Dont acte.

On en arrive donc à l’essentiel : qui paye ?

On était en droit de penser qu’allait s’appliquer le proverbe anglais : celui qui commande la musique paye les pipeaux. (Rires.)

M. Régis Juanico. Un proverbe gaélique, sans doute. (Sourires.)

M. Henri Nayrou. Celui qui commande, c’est en l’occurrence l’État et le pouvoir sportif, Fédération, Ligue et clubs mêlés.

Première déception : les ministres des sports décident de ponctionner le Centre national pour le développement du sport des 150 millions d’euros promis par le Président de la République. L’affaire tourne court car le mouvement sportif crie au voleur : le CNDS, devenu désormais la variable d’ajustement du budget du sport avec ses prélèvements sur les jeux, les paris en ligne et les droits télé, allait être délesté de cette somme considérable au détriment du sport d’en bas.

Marche arrière ? Pas tout à fait car on nous a bricolé un nouveau prélèvement temporaire de 0,3 % sur les jeux « en dur » – les biens nommés ! – mais en raclant au passage au bout de cinq ans 30 millions d’euros dans les tiroirs du CNDS. J’ai connu des manœuvres plus glorieuses !

Nouvelle question lancinante : qui paye ?

Il y avait deux pistes : les clubs pros de football, évidents bénéficiaires de ces rénovations, et c’était très bien ; ou bien les collectivités territoriales.

Les clubs auraient bien pu provisionner pour devenir propriétaires de leurs stades municipaux, comme en Angleterre – suprême référence pour les présidents et la Ligue –, mais ils ont préféré augmenter leur masse salariale, comme le leur reproche la direction nationale de contrôle de gestion dans la presse de ce matin. Ils auront ainsi 176 millions d’euros de déficit à la fin du mois de juin 2010 ; voilà qui eût représenté un joli pécule pour 1’Euro 2016 !

On ne peut pas non plus passer sous silence les critiques assez dures de la Cour des comptes conseillant de faire « preuve de prudence dans l’appréhension de l’économie globale de la construction d’équipements » de ce type.

Ne restaient donc que les collectivités territoriales, pourtant montrées du doigt par le Gouvernement, lors des réformes de la taxe professionnelle et des territoires pour leur supposée gabegie en matière d’investissements : rappelez-vous la fin des financements croisés, les compétences strictes et l’obligation de filer droit !

C’est alors que sort la fumée blanche, celle de cette proposition de loi de M. Depierre, bien pensante, bien pensée, avec des dérogations plein les poches – aux codes des collectivités territoriales et du sport, aux règles du partenariat public-privé, du droit administratif, aux règlements de la Commission européenne !

Vous avez déclaré, madame la ministre, devant la commission ad hoc de l’Assemblée nationale: « Le texte vise à écarter l’application de plafonds pour les subventions des collectivités territoriales aux clubs sportifs professionnels lorsque ceux-ci investissent pour construire ou moderniser les stades qui accueilleront l’Euro 2016. »

C’est bien, mais c’est drôle : dans la loi portant réforme des collectivités territoriales, le Gouvernement n’en finissait pas de relever le plancher des autofinancements… Voilà que, six mois plus tard, il faut faire sauter tous les plafonds ! En matière de cohérence, on a connu mieux… Il n’est pas nécessaire d’avoir les deux bacs pour comprendre qu’il s’agit tout simplement de faire assumer aux collectivités territoriales le désengagement de l’État qui, faut-il le rappeler, avait participé à hauteur de plus de 30 % à l’organisation de la Coupe du monde 1998 alors que, pour l’Euro 2016, il ne le fera qu’à hauteur de 7 %.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Henri Nayrou. Je vous remercie de votre mansuétude, monsieur le président : c’est certainement la première fois ! (Sourires.)

M. Michel Ménard. C’est le temps additionnel !

M. Henri Nayrou. Premièrement, cette contribution pour l’Euro 2016 est à mettre en regard des 10 millions d’euros du plan de relance pour les pauvres équipements sportifs de l’hexagone et des 53 millions dédiés à quelques dossiers du CNDS ; deuxièmement, le CNDS se trouve pour la première fois en situation de financer le sport professionnel, ce qui crée un précédent extrêmement regrettable.

La proposition de loi Depierre sera votée ; le député Depierre sera content ; le directeur bourguignon le sera un peu moins, mais les stades seront prêts pour 2016.

Nous sommes pour un Euro 2016 réussi avec de belles équipes, du beau jeu, des beaux stades pleins et joyeux, du beau fixe, de la joie et plein de bénéfices. Nous estimons simplement et sportivement que le jour où le football sera revenu à la mesure en toutes choses, on pourra revoir les termes du contrat de confiance entre le respect du contribuable et les besoins du footballeur. Pour l’heure, c’est non ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à Mme Chantal Jouanno, ministre des sports.

Mme Chantal Jouanno, ministre des sports. J’ai bien compris que si vous reveniez un jour au pouvoir, vous renonceriez à l’Euro 2016.

Mme Valérie Rosso-Debord. Eh oui !

M. Henri Nayrou. Non, vous n’avez pas compris !

Mme Valérie Fourneyron. Vous n’avez rien compris du tout !

Mme Chantal Jouanno, ministre. Il me semble très difficile, comme l’a rappelé Éric Berdoati, de se réjouir de se voir confier son organisation et d’en refuser le cahier des charges. Le voudrait-on qu’on ne le pourrait pas, car l’UEFA ne manquerait pas de se tourner vers un autre pays.

La nécessité d’avoir un débat plus global sur l’ensemble des enjeux liés au sport – qu’il s’agisse des équipements, de la formation, de l’emploi, de la pratique du sport pour tous, de la gouvernance – est évidente, et l’occasion nous en sera donnée dans le cadre l’assemblée du sport, qui se réunira à partir du 29 mars et qui a vocation à être une assemblée permanente. Si, à l’issue de ses travaux, le besoin se fait sentir d’un projet de loi plus complet, nous le ferons, même si je ne suis pas très portée sur la multiplication à tous crins des textes.

Je veux à ce propos rassurer Mme Fourneyron : les dispositions concernant les retraites des sportifs de haut niveau seront présentées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale à la fin de l’année.

Mme Buffet s’est interrogée sur la préparation de la candidature, notamment sur les travaux d’évaluation de son impact. Le rapport « Grands stades – Euro 2016 », dit rapport Séguin, avait précisément balisé les éléments sur la préparation de cette candidature.

Pour ce qui est du désengagement de l’État dans le domaine du sport, je tiens à votre disposition un graphique qui retrace l’ensemble des crédits de l’État consacrés au sport, ceux du ministère et ceux du CNDS – établissement public administratif, je le rappelle, sous tutelle du ministère : en 2000, ces crédits étaient de 480 millions d’euros ; ils seront de l’ordre de 869 millions en 2011.

Il est vrai que l’État avait mis 175 millions d’euros dans la préparation de la Coupe du monde de 1998. N’oublions pas toutefois que seulement 53 millions étaient consacrés aux stades de province : les deux tiers sont allés au Stade de France. Pour l’Euro 2016, les 150 millions d’euros iront à l’ensemble des dix stades – sachant que le onzième est à 100 % privé.

Quel est l’objectif de la proposition de loi ? C’est précisément d’éviter, monsieur Juanico, que le financement de l’Euro 2016 repose totalement sur le dos du contribuable. Qu’il passe par le biais de l’État ou par celui des collectivités, c’est toujours in fine le contribuable qui paie. Voilà pourquoi la proposition de loi permet un financement privé. En 1998, le financement privé participait à hauteur de 30 % ; pour 2016, il atteindra 60 %. C’est ainsi qu’avait procédé l’Allemagne pour la préparation de son Euro. Ajoutons que si la participation privée permet de financer la rénovation des grands stades, l’argent public peut être dirigé sur le sport amateur.

Mme Marie-George Buffet. Vous ne lui avez accordé que 11 millions cette année !

Mme Chantal Jouanno, ministre. La proposition de loi ne tend pas à supprimer des articles du code du sport ou d’autres, mais à accorder des dérogations précisément ciblées dans le cadre de la préparation de l’Euro 2016, comme l’ont fait d’autre pays en pareille occasion, notamment l’Allemagne.

Enfin, vous avez eu des mots assez durs pour ce texte, allant même jusqu’à le qualifier de loi d’exception.

M. André Gerin. Oui !

Mme Chantal Jouanno, ministre. Je les trouve inappropriés sur un sujet qui devrait nous rassembler. Vous entendre m’accuser de ne pas défendre les valeurs du sport, alors qu’on me reproche plutôt de le faire trop, j’ai trouvé cela, entre nous, un peu brutal !

J’ai dit en effet, madame Fourneyron, qu’accueillir l’Euro dans les meilleures conditions ne voulait pas dire dans n’importe quelle condition, autrement dit en supprimant toute enquête publique ou toute exigence environnementale. Il faut être très clair sur la question de l’arbitrage : l’arbitrage ne peut être utilisé que pour des contrats entre personnes publiques, en aucun cas pour des actes administratifs et particulièrement pour des actes liés à l’urbanisme. Voilà pourquoi cette proposition de loi ne peut pas être un texte d’exception.

Enfin, monsieur Féron, nous avons bien onze projets de stade en cours. Il reste une difficulté sur Lyon, liée à la nécessité de modifier le plan local d’urbanisme, mais nous sommes toujours dans les temps. Vous avez compris au discours de M. Gerin que des problématiques locales ne rendent pas les choses très simples dans cette agglomération. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Discussion des articles

M. le président. J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

Article 1er

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 2 et 5, tendant à supprimer l’article 1er.

La parole est à M. André Gerin, pour soutenir l’amendement n° 2.

M. André Gerin. L’article 1er permet au partenaire privé d’une collectivité territoriale avec laquelle il a conclu un contrat de bail emphytéotique de percevoir les mêmes subventions et redevances qu’un maître d’ouvrage public. Ce faisant, on déroge au régime de la loi de 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée.

Notre amendement a pour but d’empêcher que soit mis en place un dispositif dérogatoire aux règles régissant la dépense publique en France dans le but avoué de maximiser les profits de grands groupes privés durant la préparation et le déroulement du championnat d’Europe de football de l’UEFA en 2016.

M. le président. La parole est à M. Hervé Féron, pour soutenir l’amendement n° 5.

M. Hervé Féron. Il convient de supprimer cet article, car il néglige les recommandations de la Cour des comptes conseillant « la prudence dans l’appréhension de l’économie globale de la construction d’équipements dont la rentabilité n’apparaît pas nécessairement sur la durée de vie prévisible de l’investissement ». Il n’est donc pas souhaitable qu’un projet de rénovation ou de construction destiné à accueillir l’UEFA 2016 ainsi que ses équipements connexes, effectué sous le régime du BEA, bénéficie des mêmes subventions, redevances et autres participations qu’un équipement sportif construit sous le régime de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée.

Par ailleurs, si les collectivités territoriales sont amenées, par des pressions que l’on sent bien arriver, à participer financièrement à ces projets de construction ou de rénovation, ce sera au détriment des petits clubs sportifs et des installations qui doivent bénéficier très largement au public, en particulier des équipements de secteurs fragilisés – milieu rural, zones sensibles ou bassins de vie dépourvus d’infrastructures.

M. le président. La parole est à M. Bernard Depierre, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, pour donner l’avis de la commission sur ces deux amendements.

M. Bernard Depierre, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Étant l’auteur de la proposition de loi, il m’est difficile d’être favorable à des amendements qui tendent à en supprimer les dispositions. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. André Gerin. C’est donc que vous avez un doute !

M. Bernard Depierre, rapporteur. L’article 1er n’a d’autre but que de permettre aux collectivités qui le souhaitent de rénover ou de construire leur stade en vue de leur candidature à l’organisation de l’Euro en ayant à leur disposition la palette d’instruments juridiques la plus complète possible. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, car notre législation comporte un biais qui défavorise le recours au BEA par rapport à d’autres instruments, notamment le contrat de partenariat qui permet le versement de subventions publiques aux projets réalisés sous ce régime.

Cet article ne révolutionne pas le droit de la commande publique. Il permet ponctuellement, dans le cadre de l’Euro 2016, de rétablir une forme de neutralité entre différents instruments juridiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, ministre des sports. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Fourneyron.

Mme Valérie Fourneyron. Le BEA est déjà un système dérogatoire, puisqu’il permet de contourner le principe de l’inaliénabilité du domaine public en mettant à disposition un terrain pour la construction d’un équipement d’intérêt général en échange ensuite d’un loyer. L’article 1er ouvre, qui plus est, la possibilité de faire payer un loyer par l’utilisateur du site durant toute la durée de la construction et au-delà.

Lors de la discussion générale, j’ai évoqué les marchés d’entreprises de travaux publics, finalement interdits par le Conseil d’État qui s’était inquiété de l’endettement supporté par les collectivités aux lieu et place des acteurs privés, qui les avaient du coup mises dans des situations particulièrement défavorables sur la durée. Les équipements sportifs construits sous cette forme de METP, c’est-à-dire suivant une procédure rigoureusement identique à ce qui nous est proposé ici, auront coûté à l’arrivée fois plus cher : parce qu’ils ont été construits dans l’urgence, mais également parce que le contribuable du territoire s’est retrouvé à devoir payer un loyer sur la durée incluant les coûts financiers et de maintenance. Je pourrais vous citer l’exemple de deux patinoires que je connais fort bien. Il s’agit vraiment d’une double dérogation particulièrement défavorable à la bonne utilisation de l’argent public.

M. le président. La parole est à M. Michel Hunault.

M. Michel Hunault. Je veux réagir aux propos qui viennent d’être tenus. Comme l’a expliqué le rapporteur, il s’agit d’une faculté nouvelle. Mais personne n’oblige les collectivités locales à y recourir.

Mme Valérie Rosso-Debord. Exactement !

M. André Gerin. Autrement dit, cela ne sert à rien !

M. Michel Hunault. Mme Fourneyron dit que cela a parfois créé des problèmes. Mais, et je parle sous le contrôle du rapporteur, le contrôle de légalité est là pour encadrer. Vous le savez puisque vous présidez une agglomération particulièrement importante. Et pour ce qui est de l’endettement, là aussi, il y a des ratios et un contrôle.

Madame la ministre, vous venez de répondre aux intervenants de l’opposition – j’aurais souhaité que vous répondiez également à ceux de la majorité…

M. Michel Ménard. La ministre est modeste : elle ne répond pas aux félicitations !

M. Michel Hunault. Vous auriez pu expliquer, comme l’a fait le rapporteur, que cette proposition de loi vise à donner des outils juridiques et financiers nouveaux ; mais il n’y a rien d’obligatoire.

(Les amendements identiques nos 2 et 5 ne sont pas adoptés.)

(L’article 1er est adopté.)

Article 2

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 3 et 6, tendant à supprimer l’article 2.

La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement n° 3.

Mme Marie-George Buffet. Madame la ministre, je veux réagir à vos propos concernant l’impôt et les équipements sportifs.

Comme je l’ai dit dans mon intervention, chaque citoyen français comprend qu’à travers un impôt juste et efficace, il contribue au financement de la construction des lycées, des collèges, des écoles et d’autres équipements. Tout citoyen français est prêt à participer, à travers ses impôts, s’ils sont justes et bien répartis, à la réalisation d’équipements sportifs dès lors qu’ils ne sont pas réservés à un type d’activité, à un club professionnel, mais bien mis à la disposition de toutes les pratiques sportives et de tous les pratiquants, quel que soit leur niveau.

J’ai parlé, parce que je tenais à mesurer mes mots, d’un texte de circonstance, mais je soutiens que c’est bel et bien une proposition de loi d’exception qui concerne un seul championnat, l’Euro 2016, et qui comprend des mesures dérogatoires. Les articles L. 113-1 à L. 113-3 et L. 122-11 du code du sport, construits au fil des lois sur le sport, permettaient de réguler les rapports entre le sport professionnel et l’ensemble des pratiques sportives dans l’unité fédérale et les rapports entre le sport professionnel et les collectivités territoriales, pour faire en sorte que celles-ci puissent décider des subventions au profit des associations et non au bénéfice des SA des clubs professionnels. En instaurant ces mesures dérogatoires, vous brisez un équilibre patiemment établi.

M. Hunault vient de dire que les collectivités ont le libre choix d’investir ou non. Mais souvenez-vous de ce que l’on a entendu lors de discussion du projet de loi sur les collectivités territoriales : on les a montrés du doigt en les traitant de millefeuilles, on les disait trop dépensières, on les accusait de se mêler de choses dont elles n’avaient pas à s’occuper : on a été jusqu’à soutenir, avant de revenir en arrière, que le sport ne faisait pas partie de leur compétence générale, de même que l’agriculture ou le tourisme.

M. André Gerin. C’est vrai !

M. le président. Il faut conclure, madame la députée !

Mme Marie-George Buffet. Voilà maintenant que vous ouvriez toutes les digues en demandant que les collectivités territoriales financent l’Euro 2016 ! Je trouve cela particulièrement choquant.

M. le président. La parole est à M. Hervé Féron, pour soutenir l’amendement n° 6.

M. Hervé Féron. Il s’agit, là encore, d’un article qui propose de faire exception au code général des collectivités territoriales et au code du sport.

Tout à l’heure, Mme Buffet et Mme Fourneyron ont excellemment démontré pourquoi le code du sport organisait les relations entre les collectivités et le monde sportif, et en particulier les SA sportives. Jusqu’à présent, il n’était pas possible de dépasser un certain plafond de subventions ; dorénavant, cela le sera. Jusqu’à présent, il était interdit aux collectivités locales de garantir des emprunts ; désormais, la brèche est ouverte.

Si cette loi est votée, il sera intéressant de connaître l’avis du Conseil constitutionnel. En particulier, il faudra se pencher sur le droit européen. Rendre possible le financement d’une société privée par une collectivité, c’est une entrave à la concurrence. Les articles 107 et 108 – anciennement articles 87 et 88 – du traité de l’Union européenne, prohibent d’une façon générale les aides de l’État. Cette loi est donc bien contraire à l’article 55 de la Constitution, qui dispose que les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Depierre, rapporteur. L’article 2 vise à diversifier et renforcer les possibilités de financement des équipements sportifs nécessaires à l’organisation de l’Euro 2016. Il consacre le rôle fondamental des villes organisatrices, candidates à l’accueil de ces compétitions en leur permettant de définir et de décider d’octroyer de manière facultative des aides aux projets de construction et de rénovation de ces stades.

Le code du sport comporte des dispositions spécifiques en matière d’aide des collectivités aux sociétés sportives. Cet article prévoit spécifiquement pour les projets conduits dans la perspective de l’Euro 2016 l’application du droit commun. Cela devrait permettre à ces aides d’exercer un véritable effet d’amorçage sur les financements privés.

J’émets un avis défavorable sur ces amendements qui ont été rejetés par la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, ministre. Comme l’a rappelé Michel Hunault, il s’agit bien d’une simple faculté ouverte aux collectivités.

Bien évidemment nous notifierons cette proposition de loi à la Commission. Je rappelle toutefois que ce mode de financement est d’ores et déjà permis pour d’autres types de société, des sociétés de droit commun : on ne peut donc présupposer que ces dispositions seaient contraires au droit européen.

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. À mon tour, j’exprime les plus grandes réserves sur l’article 2. Cette dérogation risque de mettre en danger les collectivités.

La deuxième partie de cet article propose ni plus ni moins que de déroger aux articles L. 113-1 à L. 113-3 et L. 122-11 du code du sport, qui interdisent aux collectivités territoriales d’apporter leur garantie aux associations et aux sociétés sportives. Ce disant, je ne fais qu’emboîter le pas de M. Jacques Thouroude, président de l’ANDES qui, s’il a adoubé cette proposition de loi, n’en a pas moins émis les plus vives réserves sur son article 2. Ajoutons que M. Thouroude, parfait connaisseur non seulement du sport mais aussi de la gestion municipale du sport, mène un combat légitime contre la multiplication des normes sportives à la charge exclusive des collectivités, phénomène à ses yeux particulièrement dangereux.

Madame la ministre, derrière ces mots à l’apparence inoffensive se cache un levier qui permettra d’emprunter sous la pression. Ce n’est qu’une faculté, dites-vous ; reste que ce n’est pas une bonne pratique. La loi ne doit pas se borner à tancer les élus qui dépensent trop ; elle doit aussi les protéger de toutes les dérives possibles. Je ne parle pas de ce soir ou de demain, mais je prends rendez-vous pour l’avenir : cet article est extrêmement dangereux. Voilà pourquoi je demande sa suppression.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Rosso-Debord.

Mme Valérie Rosso-Debord. Finissons-en avec cette antienne ridicule sur la réforme des collectivités territoriales : il faut rétablir la vérité, et rappeler que notre majorité a fait adopter un amendement qui permet aux collectivités territoriales de continuer à financer le sport et la culture. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Hervé Féron. Elle ne comprend rien au texte ! Il faudrait lui expliquer !

M. le président. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Cessez de nous prendre pour des débiles ! On sait très bien qu’on peut continuer à financer le sport et c’est très bien. Nous le faisons tous dans nos collectivités.

M. Sébastien Huyghe. Vous pouvez faire mieux que cela !

M. François Pupponi. L’article 2 organise à l’occasion de la construction de stades pour l’Euro 2016 les financements des collectivités locales en leur permettant de déroger au code général des collectivités territoriales qui confie au conseil régional la définition du régime d’aide à des sociétés privées. C’est la première dérogation. Mais ensuite, on déplafonne les aides aux sociétés sportives : autrement dit, on va financer des stades pour des clubs. Quelques clubs professionnels se verront donc financer des stades neufs à l’occasion de l’Euro 2016. Les clubs qui n’ont pas été retenus ne bénéficieront pas des mêmes financements. Il y a donc bel et bien une distorsion entre les sociétés sportives : certaines vont bénéficier, d’une manière dérogatoire, déplafonnée, de subventions. On voit bien que cet article a été fait sur-mesure. Nous aimerions bien voter cette loi en toute connaissance de cause, et donc savoir quelle ville et quel club en bénéficieront…

Ensuite, permettre la garantie d’emprunt pour rénover des stades qui bénéficieront à des clubs qui risquent de se retrouver en déficit, c’est exposer les collectivités locales à de graves difficultés financières dans l’avenir. Ou alors, c’est méconnaître le financement de ces équipements. Madame la ministre, monsieur le rapporteur, je vous pose la question : pour qui cet article a-t-il été rédigé ?

(Les amendements identiques nos 3 et 6 ne sont pas adoptés.)

(L’article 2 est adopté.)

Article 3

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 4 et 7, tendant à supprimer l’article 3.

La parole est à M. André Gerin, pour soutenir l’amendement n° 4.

M. André Gerin. Je vais contredire Mme la ministre…

M. Philippe Gosselin. Ce n’est pas bien !

M. André Gerin. Ce n’est pas grave !

L’article 3 court-circuite purement et simplement le juge administratif au profit du recours à la pratique de l’arbitrage. Sans la justice administrative, les Lyonnais n’auraient pas pu faire valoir leur argument – fondé – contre le projet de grand stade à Décines de Jean-Michel Aulas.

Cet amendement a pour but d’empêcher le recours à l’arbitrage pour la résolution de litiges afférant aux contrats relatifs à la construction des enceintes sportives et des équipements connexes, ainsi qu’aux contrats relatifs à l’organisation et au déroulement du championnat d’Europe de football en 2016.

M. le président. La parole est à M. Hervé Féron, pour soutenir l’amendement n° 7.

M. Hervé Féron. Ainsi que vient de le dire M. Gerin, l’article 3 vise à déposséder les tribunaux administratifs ou judiciaires du règlement des conflits liés à la rénovation, à la construction des enceintes sportives de l’Euro 2016 et de leurs équipements connexes.

Après avoir ouvert les vannes de l’argent public au bénéfice des intérêts privés, on fait en sorte, avec l’article 3, que la justice s’organise entre amis… Rappelons qu’au début du mois de février 2011, dans l’affaire Bernard Tapie, la Cour des comptes a estimé que la procédure de l’arbitrage n’était pas conforme au droit.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Bernard Depierre, rapporteur. L’article 3 permet aux personnes morales de droit public de recourir à l’arbitrage pour les contrats en lien avec la rénovation et la construction des enceintes sportives pour l’Euro 2016. Cette dérogation au principe d’interdiction de recourir à l’arbitrage pour les personnes publiques reste très limitée. Elle ne crée pas non plus un précédent puisqu’il existe déjà d’autres dispositions législatives qui dérogent à ce principe : l’ordonnance du 17 juin 2004 prévoit que les contrats de partenariat comportent obligatoirement des clauses relatives aux conditions de recours à l’arbitrage.

Ces amendements ont été rejetés par la commission. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, ministre. L’article 3 n’est pas une innovation juridique : nous avons déjà eu recours à ce type d’arbitrage – ce fut le cas, récemment, pour la rénovation de l’INSEP.

Je rappelle également que le dispositif en question ne concerne que les contrats entre personnes de droit public.

En ce qui concerne l’affaire de Lyon, vous vous êtes opposés à un acte administratif unilatéral qui, par conséquent, n’aurait pu en aucun cas être soumis à l’arbitrage.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

(Les amendements identiques nos 4 et 7 ne sont pas adoptés.)

(L’article 3 est adopté.)

M. le président. J’indique d’ores et déjà que, sur l’ensemble du texte, je suis saisi par le groupe UMP d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée.

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Pascal Deguilhem.

M. Pascal Deguilhem. Au moment où l’on s’apprête à siffler la fin du match, je ne vous imposerai pas les prolongations… Notre équipe, constituée de onze joueurs et d’un remplaçant, sortira de ce débat une nouvelle fois vaincue ; mais c’est aussi l’ensemble des sportifs français qui auront perdu ce soir, au seul profit des sportifs professionnels.

Dans une période où l’argent public devient rare, dans un contexte aussi tendu financièrement, est-il souhaitable de proposer un texte voué à la seule satisfaction des exigences de l’UEFA, de son calendrier, est-il normal que le législateur soit amené à se prononcer sur des dérogations majeures en matière de football professionnel ? Nous pensons que non.

Notre opposition découle tout d’abord des exigences et charges inflationnistes imposées par l’UEFA. On ne pouvait pas revenir sur le cahier des charges de l’UEFA, avez-vous dit, madame la ministre. Les élus, l’ensemble des gouvernements européens – puisqu’il s’agit d’un championnat d’Europe – ne peuvent-ils donc rien faire face aux exigences d’une instance sportive ? Devront-ils se laisser imposer à l’infini des demandes de plus en plus déconnectées de la réalité économique vécue par les Français, par les citoyens européens, alors que ces mêmes contribuables, qui croulent sous les charges, seront amenés à garantir des équipements à l’usage exclusif du monde professionnel ?

Un certain nombre de nos collègues ont évoqué les normes des sièges, des salles, etc. Mais où est le football, où est le jeu là-dedans ? Toutes ces normes n’ont rien à voir avec la pratique sportive.

Il n’est pas illégitime que les acteurs publics, collectivités territoriales, État, financent les infrastructures pour l’organisation de grandes compétitions sportives. Ils le font déjà massivement. Mais doivent-ils pour autant se soumettre au diktat d’autorités sportives, aussi respectables soient-elles, telles que l’UEFA, présidée à nouveau par Michel Platini ? Du reste, pour ne pas subir ce diktat, certaines municipalités, sur le fondement d’une réflexion approfondie, alors qu’elles souhaitaient initialement accueillir des matchs de l’Euro, y ont finalement renoncé – je pense à Rennes, à Nantes ou à Strasbourg.

Faut-il rappeler qu’avant toute chose, les financements publics doivent couvrir l’exercice des missions de service public ? Nous en sommes loin ici, quand bien même nous nous réjouissons autant que vous que la France puisse accueillir de grandes compétitions sportives comme le championnat d’Europe 2016. Il ne serait pas remis en question si, par bonheur, la majorité devait changer en 2012.

M. le président. Je vous remercie.

M. Pascal Deguilhem. Le championnat aurait bien lieu en 2016 dans des enceintes rénovées. Mais l’Euro 2016 ne justifie pas que l’on déroge au droit en vigueur en matière de financement et de droits divers concernant la construction.

M. le président. Il va falloir conclure, mon cher collègue.

M. Pascal Deguilhem. C’est le manque d’argent public, le manque d’investissements de la part de l’État dans ces réalisations qui explique que nous devions examiner ce texte ce soir.

Je soumets à votre réflexion le texte commis par certains philosophes et sociologues…

M. le président. Il va vraiment falloir terminer, mon cher collègue !

M. Pascal Deguilhem. …qui nous interpellent sur la possibilité qui nous sera donnée de construire des équipements. Je souhaite que oui.

M. le président. Monsieur Deguilhem…

M. Pascal Deguilhem. Merci, monsieur le président, de ne pas m’avoir laissé terminer mon propos.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Mauvais joueur !

M. le président. Monsieur Deguilhem, vous êtes mal venu de vous plaindre ! Je vous ai laissé beaucoup plus de temps que ce à quoi vous aviez droit.

M. Pascal Deguilhem. Juste un mot pour donner la position du groupe SRC : il votera contre ce texte.

M. le président. Voilà plus de six minutes que vous auriez dû le dire !

La parole est à M. Éric Berdoati.

M. Éric Berdoati. Cette proposition de loi aurait dû nous réjouir ; malheureusement, cela n’a pas été le cas ce soir dans l’hémicycle. J’observe avec tristesse la réaction de nos collègues sur un sujet qui aurait normalement dû emporter l’adhésion. Nous avons même entendu prétendre avec une certaine gravité voire, et cela m’inquiète davantage, avec une certaine sincérité, que le Président de la République serait responsable des montants exorbitants des transferts des joueurs en Europe. (Sourires sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mme Marie-George Buffet. Ridicule !

M. Éric Berdoati. Il est vrai que nous avons depuis longtemps l’habitude d’être accusés d’être responsables de tout : on a même entendu tout à l’heure des collègues, bien éloignés du thème de cette proposition de loi, lui attribuer quelque incidence sur le vote de dimanche dernier !

Mme Marie-George Buffet. C’est de la politique politicienne !

M. Éric Berdoati. C’est vous dire si, j’y insiste, si nous nous éloignons de l’objet, technique, du texte que nous examinons ce soir.

Mme Marie-George Buffet. C’est vous qui vous en éloignez !

M. Éric Berdoati. Je livrerai seulement à votre sagacité, sans vouloir me montrer provocateur, la réflexion suivante : l’éloignement constant des discours par rapport aux réalités auxquelles nous sommes confrontés, les anathèmes permanents auxquels nous sommes exposés – certes, dans une démocratie, il est légitime que chacun ait un avis, encore doit-il être mesuré –, n’est-ce pas ce genre de postures qui favorisent assez fortement les extrêmes que nos collègues de gauche répudient avec autant de facilité ?

Mme Marie-George Buffet. Mais que raconte-t-il ?

M. Éric Berdoati. J’aimerais que, sur un projet de loi aussi proche d’une réalité – celle de l’organisation du championnat d’Europe en 2016 –, nous en revenions aux moyens administratifs, opérationnels, juridiques et financiers grâce auxquels des millions de Français seront heureux d’être dans les stades, grâce auxquels un championnat pourra se dérouler dans de bonnes conditions.

Précisons, à l’attention de notre collègue Deguilhem, que ce sont bien les fédérations qui établissent les réglementations du sport et non l’État. Notre collègue s’étonnait que nous n’évoquions pas le football. Mais, je le répète, c’est le rôle des fédérations de s’occuper des sports…

M. Michel Ménard et M. Henri Nayrou. Par délégation !

M. Éric Berdoati. Ce n’est pas le rôle de l’État, qui ne s’occupe que des infrastructures.

Je ne puis qu’apporter, avec le groupe UMP, un soutien franc et massif au texte, même s’il dérange nos collègues de l’opposition. J’imagine que leur position relève des affaires internes au parti socialiste…

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Zéro !

M. Éric Berdoati. …puisqu’il y a un stade à Lille chez Mme Aubry, un à Lyon chez M. Collomb… Vous devriez régler ce problème entre vous.

M. Philippe Gosselin. Ils se renvoient la balle !

M. Sébastien Huyghe. Ils veulent tous en avoir un !

M. Éric Berdoati. Pour ce qui nous concerne en tout cas, nous voterons ce texte sans réserve. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. André Gerin. Vous oubliez que les gens en ont marre du sport business ! (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Notre collègue vient de nous une belle leçon de politique politicienne en mélangeant les élections et cette proposition de loi… Pour ce qui me concerne, j’en resterai au texte.

Selon vous, madame la ministre, on ne peut pas changer le cahier des charges de l’UEFA. Reste qu’il va bien falloir un jour engager de façon plus offensive la discussion avec les fédérations nationales et les fédérations internationales sur les normes, sur les cahiers des charges, sur leurs modifications constantes et sur le coût que cela représente pour les collectivités, mais aussi pour les États organisateurs de grands événements sportifs.

M. Régis Juanico. Eh oui !

Mme Marie-George Buffet. Au demeurant, que l’on puisse ou non les changer, le fait est que vous connaissiez les stipulations de ce cahier des charges lorsque vous avez présenté la candidature de la France pour l’Euro 2016. Il est donc normal que l’on attende du Gouvernement, dès lors qu’il soutient une candidature – et je me félicite que nous organisions l’Euro 2016 –,…

M. Sébastien Huyghe. Ah, tout de même !

Mme Valérie Rosso-Debord. De quoi étiez-vous ministre, madame Buffet ?

Mme Marie-George Buffet. Ce n’est pas à moi qu’il faut donner des leçons sur la défense du sport dans notre pays !

…qu’il s’y prépare et qu’il s’en donne les moyens financiers. Voilà le point sur lequel nous nous opposons à vous : vous ne vous êtes pas préparés.

Mme Isabelle Vasseur. Mais si !

Mme Marie-George Buffet. Nous devons donc examiner une sorte de loi d’urgence, une loi de circonstance qui, pour parvenir à trouver les financements, pour inciter fortement les collectivités territoriales à investir dans ces grands stades dont la rentabilité profitera au privé, instaure toute une série de dérogations créant des jurisprudences extrêmement dangereuses pour l’avenir du sport et pour la gestion des collectivités territoriales.

Nous ne nous éloignons donc en rien du débat. Si, j’y insiste, nous sommes heureux d’accueillir de grands événements sportifs, encore faut-il que l’État et les collectivités s’en donnent les moyens et que l’on n’en profite pas pour voter des lois dérogatoires qui livrent le sport à la marchandisation.

M. le président. La parole est à M. Michel Hunault.

M. Michel Hunault. J’apporte le soutien de mon groupe parlementaire à cette proposition de loi. Certes, vous l’avez dit, madame Buffet, ce texte est examiné dans l’urgence. Mais peut-on faire autrement ?

Mme Marie-George Buffet et M. André Gerin. Oui !

M. Michel Hunault. Il a au moins le mérite d’adapter un cadre juridique et financier à l’urgence d’une situation qui doit être réglée.

Avant d’accepter d’accueillir cette compétition il aurait fallu résoudre tous les problèmes, avez-vous dit. Mais beaucoup l’ont déjà été par le Gouvernement. Ce texte devrait être un moment de rassemblement.

Beaucoup de choses ont été dites ce soir. Vous avez le droit de ne pas être d’accord avec ce qui est proposé dans ce texte, mais vous avez, les uns et les autres, lancé des accusations qui sont allées bien au-delà de l’objet de notre débat. Il y a de vraies discussions sur les problèmes du sport en général – Mme la ministre s’est engagée à les régler. Cette proposition de loi créerait, à vous entendre, une entorse à des règles. Je le dis très clairement au nom de mon groupe : nous avons un cadre légal, réglementaire, et je n’ai pas l’impression qu’en votant cette proposition de loi, nous dérogions à la légalité. Au demeurant, si tel était le cas, nous avons des institutions de contrôle qui veilleraient à ce qu’il y soit remédié.

Ne faites pas dire à cette proposition de loi ce qu’elle ne dit pas. C’est un élément d’efficacité, qui nous permettra d’avoir des stades pour accueillir la compétition et faire en sorte que 2016 soit la fête du sport. C’est dans cet esprit que je voterai cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Vote sur l’ensemble

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l’ensemble de la proposition de loi.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 47

Nombre de suffrages exprimés 47

Majorité absolue 24

(La proposition de loi est adoptée.)

M. François Pupponi. C’était court !

M. Régis Juanico. De justesse !

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à actualiser l’ordonnance du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs ;

Proposition de loi organique, adoptée par le Sénat, tendant à l’approbation d’accords entre l’État et les collectivités territoriales de Saint-Martin, de Saint-Barthélemy et de Polynésie française.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 23 mars 2011, à zéro heure trente.)