- Texte visé : Texte sur le projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, relatif à la croissance et la transformation des entreprises (n°1088)., n° 1237-A0
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par :
- Code concerné : Code monétaire et financier
I. – Le titre IV du livre V du code monétaire et financier est complété par un chapitre X ainsi rédigé :
« Chapitre X – Prestataires de services sur actifs numériques
« Art. L. 549‑25. – Pour l’application du présent chapitre, les actifs numériques comprennent :
« 1° Les jetons mentionnés à l’article L. 552‑2 du présent code, à l’exclusion de ceux remplissant les caractéristiques des instruments financiers visés à l’article L. 211‑1, et des bons de caisse visés à l’article L. 223‑1 ;
« 2° Toute représentation numérique d’une valeur qui n’est pas émise ou garantie par une banque centrale ou par une autorité publique, qui n’est pas nécessairement attachée à une monnaie ayant cours légal et qui ne possède pas le statut juridique d’une monnaie, mais qui est acceptée par des personnes physiques ou morales comme un moyen d’échange et qui peut être transférée, stockée ou échangée électroniquement.
« Art. L. 549‑26. – Les services sur actifs numériques comprennent les services suivants :
« 1° Le service de conservation pour le compte de tiers d’actifs numériques ou de clés cryptographiques privées, en vue de détenir, stocker et transférer des actifs numériques ;
« 2° Le service d’achat ou de vente d’actifs numériques en monnaie ayant cours légal ;
« 3° Le service d’échange d’actifs numériques contre d’autres actifs numériques ;
« 4° L’exploitation d’une plateforme de négociation d’actifs numériques ;
« 5° Les services suivants :
« a) La réception et la transmission d’ordres sur actifs numériques pour le compte de tiers ;
« b) La gestion de portefeuille d’actifs numériques pour le compte de tiers ;
« c) Le conseil aux souscripteurs d’actifs numériques ;
« d) La prise ferme d’actifs numériques ;
« e) Le placement garanti d’actifs numériques ;
« f) Le placement non garanti d’actifs numériques.
« Un décret précise la définition des services mentionnés au présent article.
« Art. L. 549‑27. – Avant d’exercer leur activité, les prestataires des services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 549‑26 sont enregistrés par l’Autorité des marchés financiers, qui vérifie si leurs dirigeants et leurs bénéficiaires effectifs, au sens de l’article L. 561‑2‑2, possèdent l’honorabilité et la compétence nécessaires à l’exercice de leurs fonctions, dans des conditions définies par décret. À cette fin, l’Autorité des marchés financiers recueille l’avis de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
« Toute modification affectant le respect par un prestataire des services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 549‑26 des obligations mentionnées ci-dessus doit faire l’objet d’une déclaration auprès de l’Autorité des marchés financiers.
« L’Autorité des marchés financiers peut radier le prestataire soit à la demande du prestataire, soit d’office, lorsque le prestataire n’a pas exercé son activité dans un délai de douze mois, soit n’exerce plus son activité depuis au moins six mois, soit lorsqu’il ne respecte plus les obligations mentionnées ci-dessus.
« L’Autorité des marchés financiers publie la liste des prestataires des services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 549‑26. »
« Art. L. 549‑28. – L’exercice de la profession de prestataire des services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 549‑26 est interdit à toute personne n’ayant pas été enregistrée au préalable par l’Autorité des marchés financiers.
« Il est interdit à toute personne qui n’a pas la qualité de prestataire des services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 549‑26 d’utiliser une dénomination, une raison sociale, une publicité ou tout autre procédé laissant croire qu’elle est autorisée en cette qualité ou de créer une confusion à cet égard.
« Art. L. 549‑29. – I. – Pour la fourniture à titre de profession habituelle de l’un ou des services mentionnés à l’article L. 549‑26, les prestataires établis en France peuvent solliciter un agrément auprès de l’Autorité des marchés financiers, dans des conditions prévues par décret.
« Les prestataires agréés disposent en permanence :
« 1° D’une assurance responsabilité civile professionnelle ou de fonds propres, dont le niveau est fixé par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers, ou d’une garantie comparable couvrant les risques de fraude, les risques de sécurité et les risques opérationnels ;
« 2° D’un dispositif de sécurité et de contrôle interne adéquat ;
« 3° D’un système informatique résilient ;
« 4° D’un système de gestion des conflits d’intérêt.
« Ils communiquent à leurs clients des informations claires, exactes et non trompeuses, notamment les informations à caractère promotionnel, qui sont identifiées en tant que telles. Ils avertissent les clients des risques associés aux actifs numériques.
« Ils rendent publiques leurs politiques tarifaires. Ils établissent et mettent en œuvre une politique de gestion des réclamations de leurs clients et en assurent un traitement rapide.
« Afin de garantir la gestion saine et prudente des prestataires qui sollicitent l’agrément, l’Autorité des marchés financiers apprécie la qualité de leurs actionnaires ou associés qui détiennent une participation, directe ou indirecte, supérieure à 20 % du capital ou des droits de votes.
« L’Autorité des marchés financiers vérifie la sécurité des systèmes d’information des prestataires agréés conformément au présent article et peut solliciter, à cette fin, l’avis de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information et de la Banque de France.
« II. – Les prestataires agréés au titre de la fourniture du service mentionné au 1° de l’article L. 549‑26 satisfont notamment aux obligations suivantes, dans les conditions et limites prévues par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers.
« 1° Ils concluent avec leurs clients une convention définissant leurs missions et leurs responsabilités ;
« 2° Ils établissent une politique de conservation ;
« 3° Ils s’assurent qu’à tout moment ils sont en mesure de restituer les actifs numériques ou les clés cryptographiques conservés pour le compte de leurs clients ;
« 4° Ils ségréguent les détentions pour le compte de leurs clients de leurs propres détentions ;
« 5° Ils s’abstiennent de faire usage des actifs numériques ou des clés cryptographiques conservés pour le compte de leurs clients, sauf consentement exprès et préalable des clients.
« III. – Les prestataires agréés au titre de la fourniture des services mentionnés aux 2° et 3° de l’article L. 549‑26 satisfont aux obligations suivantes, dans les conditions et limites prévues par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers :
« 1° Ils établissent une politique commerciale non discriminatoire ;
« 2° Ils publient un prix ferme des jetons ou une méthode de détermination du prix des jetons ;
« 3° Ils publient les volumes et les prix des transactions qu’ils ont effectuées ;
« 4° Ils exécutent les ordres de leurs clients aux prix affichés au moment de leur réception.
« Les dirigeants et les bénéficiaires effectifs, au sens de l’article L. 561‑2‑2, des prestataires du service mentionné au 3° de l’article L. 549‑26 justifient qu’ils possèdent l’honorabilité et la compétence nécessaires à l’exercice de leurs fonctions.
« IV. – Les prestataires agréés au titre de la fourniture du service mentionné au 4° de l’article L. 549‑26 satisfont aux obligations suivantes, dans les conditions et limites prévues par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers :
« 1° Leurs dirigeants et leurs bénéficiaires effectifs, au sens de l’article L. 561‑2‑2 justifient qu’ils possèdent l’honorabilité et la compétence nécessaires à l’exercice de leurs fonctions ;
« 2° Ils fixent des règles de fonctionnement ;
« 3° Ils assurent une négociation équitable et ordonnée ;
« 4° Ils n’engagent leurs propres capitaux sur les plateformes qu’ils gèrent que dans les conditions et limites fixées par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers ;
« 5° Ils publient les détails des ordres et des transactions conclues sur leurs plateformes.
« V. – Les prestataires agréés au titre de la fourniture du service mentionné au 5° de l’article L. 549‑26 satisfont aux obligations suivantes, dans les conditions et limites prévues par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers :
« 1° Leurs dirigeants et leurs bénéficiaires effectifs, au sens de l’article L. 561‑2‑2 justifient qu’ils possèdent l’honorabilité et la compétence nécessaires à l’exercice de leurs fonctions ;
« 2° Ils disposent d’un programme d’activité pour chacun des services qu’ils entendent exercer, qui précise les conditions dans lesquelles ils envisagent de fournir les services concernés et indique le type d’opérations envisagées et la structure de leur organisation ;
« 3° Ils disposent des moyens appropriés à la mise en œuvre dudit programme. »
« VI. – L’Autorité des marchés financiers peut solliciter l’avis de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution pour vérifier le respect des obligations visées au présent article, notamment s’agissant de l’honorabilité et de la compétence des dirigeants.
II. – Après la référence : « L. 548-1 », la fin du 2° du I de l'article L. 500-1 du même code est ainsi rédigée : « L. 549‑27 et L. 550‑1 ou être agréé au titre de l’article L. 549‑29. »
III. – L’article L. 561‑2 du même code est ainsi modifié :
1° Le 7° bis est ainsi rédigé : « 7° bis Les prestataires des services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 549‑26 » ;
2° Après le même 7° bis, il est inséré un 7° ter ainsi rédigé : « 7° ter Les prestataires agréés au titre de l’article L. 549‑29, sauf les prestataires mentionnés au 7° bis du présent article ; »
IV. – Le 2° du I de l’article L. 561‑36 est complété par les mots : « ainsi que les prestataires des services enregistrés au titre de l’article L. 549‑27 et les prestataires agréés au titre de l’article L. 549‑29 ; Pour assurer sa mission de contrôle envers les prestataires enregistrés au titre de l’article L. 549‑27, l’Autorité des marchés financiers s’appuie sur les services de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. »
V. – Le chapitre II du titre VII du livre V du même code est ainsi modifié :
1° L'intitulé du chapitre est complété par les mots : « et prestataires de services sur actifs numériques » ;
2° Est ajoutée une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Prestataires de services sur actifs numériques
« Art. L. 572‑23. – Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende le fait, pour toute personne soumise à l’obligation de déclaration mentionnée à l’article L. 549‑27, de ne pas la souscrire ou de communiquer des renseignements inexacts à l’Autorité des marchés financiers.
« Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende le fait, pour toute personne, agissant soit pour son propre compte, soit pour le compte d’une personne morale, de méconnaître l’une des interdictions prévues à l’article L. 549‑28.
« Art. L. 572‑24. – Est puni des peines prévues à l’article L. 571‑4, le fait, pour toute personne, agissant soit pour son propre compte, soit pour le compte d’une personne morale, et exerçant la profession de prestataire des services mentionnés aux 1° et 2° de à l’article L. 549‑26, de ne pas répondre, après mise en demeure, aux demandes d’informations de l’Autorité des marchés financiers, de mettre obstacle de quelque manière que ce soit à l’exercice de sa mission de contrôle ou de lui communiquer des renseignements inexacts.
« Art. L. 572‑25. – Les dispositions de l’article L. 571‑2 sont applicables aux procédures relatives aux infractions prévues aux articles L. 572‑23 et L. 572‑24. »
VI. – La section 4 du chapitre unique du titre II du livre VI du même code est ainsi modifiée :
1° Après le I de l’article L. 621‑7, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Les règles qui s’imposent aux prestataires agréés conformément à l’article L. 549‑29. »;
2° Après le 18 du II de l’article L. 621‑9, il est inséré un 19° ainsi rédigé :
« 19° Les prestataires agréés conformément à l’article L. 549‑26. » ;
3° Au a et b du II, au a et à la première phrase du b du III de l’article L. 621‑15, la référence : « 18° » est remplacée par la référence :« 19 ° » ;
VII. – Les personnes exerçant les activités définies aux 1° et 2° de l’article L. 549‑26 avant l’entrée en vigueur de la présente loi bénéficient d’un délai de douze mois à compter de la publication des textes d’application pour obtenir l’autorisation délivrée par l’Autorité des marchés financiers, dans les conditions définies à l'article L. 549‑27. »
Dans un délai de deux ans au plus à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement, après avoir recueilli les avis de la Banque de France, de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et de l’Autorité des marchés financiers, remet au Parlement un rapport visant à évaluer la mise en œuvre des dispositions du présent article et à étudier l’opportunité d’en adapter les dispositions, notamment de rendre obligatoire l’agrément prévu à l’article L. 549‑29 pour les services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 549‑26, au vu de l’avancement des débats européens et du développement international du marché des actifs numériques.
Le présent amendement vise à mettre en place un régime relatif aux intermédiaires sur les marchés des « actifs numériques », notion visant notamment les « crypto-actifs », et à transposer les dispositions de la directive (UE) 2015/849 révisée en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme s’agissant de ces mêmes acteurs.
Le présent projet vise à permettre la mise en place d’un environnement favorisant l’intégrité, la transparence et la sécurité des services concernés pour les investisseurs en actifs numériques, tout en assurant un cadre réglementaire sécurisant pour le développement d’un écosystème français robuste.
Au-delà de l’application des dispositions européennes qui s’imposent en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, il est proposé pour les prestataires de services d’actifs numériques établis en France de solliciter un agrément optionnel. Cette faculté permet, en cohérence avec le régime proposé en matière d’émission de jetons, d’apporter une réponse pragmatique aux défis posés par ce marché émergent, tout en tenant compte du faible nombre d’acteurs présents, à ce stade, sur le territoire français. Le caractère facultatif permet d’envoyer un signal positif quant à la capacité des autorités publiques à prendre en compte l’évolution rapide de ce marché mais d’attirer, d’ores et déjà, les acteurs sérieux.
La délivrance de l’agrément serait assurée par un guichet unique auprès de l’Autorité des marchés financiers, qui solliciterait l’avis de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution sur certains sujets, en particulier en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.
S’agissant des obligations imposées aux acteurs qui sollicitent le visa, le présent amendement retient des règles spécifiques aux différents métiers visés. Les règles appliquées à chacun des métiers prennent en compte de manière proportionnée les risques et spécificités propres à chaque métier, tout en s’inspirant, lorsque c’est pertinent, des règles préexistantes dans le champ financier. La nomenclature des prestataires de services couvre en outre un champ d’activités large, afin de permettre à un maximum d’acteurs de solliciter un agrément.
Enfin, l’amendement prévoit, sous deux ans, une évaluation du dispositif, qui permettra d’évaluer le dispositif et l’opportunité d’évoluer vers un régime contraignant pour les services de conversion et de conservation.