Histoire et Patrimoine
Frise chronologique
Consulat et Premier Empire
Du Consulat à l'Empire
Le 14 thermidor an X (2 août 1802), après un référendum approuvé par plus de 3 500 000 voix contre 8 000 seulement, un sénatus-consulte est adopté qui déclare aux termes de son titre Ier : « Le Peuple français nomme, et le Sénat proclame Napoléon Bonaparte Premier Consul à vie ». Invoquant la nécessaire adaptation de la Constitution de l’an VIII à cette réforme, le Sénat par le sénatus-consulte du 16 thermidor an X (4 août 1802) va en transformer profondément le texte au point que cette modification est parfois appelée « Constitution de l’an X ».
Le système électoral est modifié : les listes de confiance sont supprimées et remplacées par trois assemblées électorales : cantonales, arrondissement et département. Elles ont le même rôle que les listes de confiance mais elles sont soumises à l’influence de l’exécutif qui peut nommer directement ses membres et désigne ses présidents.
Le Premier Consul dispose de pouvoirs renforcés : il peut nommer les deux autres consuls et émettre un vœu pour la nomination de son successeur. Il a l’autorisation de ratifier les traités de paix et d’alliance, il dispose du droit de grâce. Un conseil privé est constitué sous son autorité.
Le rôle des assemblées législatives est diminué. Le Corps législatif perd la faculté de siéger annuellement. La nouvelle Assemblée est convoquée, ajournée ou prorogée par le Gouvernement et son président est nommé par le Premier Consul. L’article 76 précise que le Tribunat est divisé en sections et qu’à compter de l’an XIII, il sera réduit à cinquante membres dont la moitié de ces « cinquante sortira tous les trois ans. Jusqu'à cette réduction, les membres sortants ne seront pas remplacés ». Ces deux assemblées peuvent être dissoutes par le Sénat, sur proposition du Gouvernement.
Le Sénat se voit de plus reconnaître un large pouvoir constituant sur l’initiative du Gouvernement, ce qui ajoute à son titre de gardien de la Constitution la possibilité de l’interpréter en cas d’obscurité et même de la compléter. Toutefois, le Sénat perd en indépendance ; les sénateurs ne peuvent désormais se coopter qu’à partir d’une liste établie par le Premier Consul. Ils sont désormais éligibles à d’autres fonctions publiques, ce qui permet au Gouvernement d’exercer sur eux une pression par le biais des dotations foncières qui peuvent leur être accordées pour ces nouvelles fonctions.
En mai 1804, conforté par les victoires napoléoniennes remportées en Europe, par la conclusion de la paix avec les puissances étrangères, par le rétablissement de la paix religieuse à l'intérieur des frontières, ainsi que par la mise en application des réformes administratives engagées sous le Directoire, le régime consulaire adopte le sénatus-consulte organique du 28 floréal an XII (18 mai 1804) ou « Constitution de l’an XII » (sénatus-consulte du 28 floréal an XII).
Son titre Ier proclame que « le Gouvernement de la République est confié à un Empereur, qui prend le titre d’Empereur des Français ». Le Premier Consul Bonaparte devient Empereur sous le nom de Napoléon Ier.
L’Empire est établi mais la République n’est pas abolie. Le terme de « République » perdure dans les actes d'état civil jusqu'à fin 1805, dans l'énoncé officiel des lois jusqu'en juillet 1807 et sur les pièces de monnaie – le franc germinal – jusqu'en 1808. Les lois proclamées après le sénatus-consulte du 19 août 1807 qui modifie la Constitution de l'an XII ne le mentionneront plus.
Le choix de l’Empire comme forme de gouvernement souligne une volonté d’alignement sur les formes politiques des régimes européens, aspire à apaiser la défiance des monarchies d’Europe et entend signifier l’achèvement des errements d’une République belliqueuse et expansionniste. L’Empire légitime une nouvelle organisation hiérarchique, centralisée autour d’un pouvoir qui renforce sa sphère d’influence et son contrôle sur un ensemble géographique hétérogène dont l’unité ne repose encore que sur les conquêtes militaires. Napoléon Ier est ainsi placé sur un pied d’égalité avec les deux grandes puissances monarchiques continentales conduites par le Tsar de Russie et l’Empereur germanique devenu le 11 août 1804, Empereur d’Autriche.
La nouvelle Constitution créée des dignités impériales et donne naissance à une noblesse d’Empire. Son titre II fixe les règles de succession : « La dignité impériale est héréditaire dans la descendance directe, naturelle et légitime de Napoléon Bonaparte, de mâle en mâle, par ordre de primogéniture, et à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance ». Le sénatus-consulte du 6 novembre 1804 proclame les résultats définitifs du plébiscite organisé conformément à l’article 142 de la Constitution sur la question de l'hérédité de l'Empire, approuvé par une très large majorité de Français – sur environ sept millions d’électeurs, plus de trois millions ont voté pour, contre environ deux mille cinq cents qui se sont prononcés contre.
La Constitution ajoute 142 articles à celle de l’an VIII mais elle ne modifie pas en profondeur la définition et les fonctions des grandes institutions créées au début du Consulat. Le Corps législatif peut désormais débattre des projets qui lui sont soumis. Le Tribunat est divisé en trois sections et ne connaît plus de séances plénières. Il sera supprimé par un sénatus-consulte en 1807.
Le Conseil d’État et le Sénat sont maintenus. Le Sénat reçoit la nouvelle fonction de gardien des libertés individuelles et de la liberté de la presse. Son influence est toutefois réduite par le renforcement de l’influence de l’Empereur qui peut nommer de nouveaux sénateurs sans limitation de nombre.
Une Haute Cour impériale est instituée avec de larges attributions en matière de sûreté de l’État.
La majorité des nouveaux articles de la Constitution concerne la définition de l'hérédité du trône, le rôle de la famille impériale et les nouvelles dignités de l'Empire.
Napoléon Bonaparte, afin d’asseoir son pouvoir, se fait sacrer empereur par le pape Pie VII le 2 décembre 1804, à Paris – et non à Reims comme les rois d’Ancien régime. Il prête serment : « Je jure de maintenir l'intégrité du territoire de la République ; de respecter et de faire respecter les lois du concordat et la liberté des cultes ; de respecter et faire respecter l'égalité des droits, la liberté politique et civile, l'irrévocabilité des ventes des biens nationaux ; de ne lever aucun impôt, de n'établir aucune taxe qu'en vertu de la loi ; de maintenir l'institution de la légion d'honneur ; de gouverner dans la seule vue de l'intérêt, du bonheur et de la gloire du peuple français. »