Histoire et Patrimoine
Frise chronologique
Révolution française
La Constitution montagnarde
Après la chute des Girondins le 2 juin 1793, le Comité de salut public est chargé de préparer un projet d’acte constitutionnel.
Présenté par la Montagne – nom donné au groupe de députés jacobins siégeant à la Convention sur les gradins les plus élevés – le projet reprend largement le texte initialement proposé par les Girondins. Il comprend une déclaration des droits de l’homme et du citoyen fondée, comme celle de 1789, sur la notion des droits naturels de l’Homme reconnaissant comme tels l’égalité et la liberté y compris la liberté d’association, confirmant le droit de pétition et légitimant le droit à l’insurrection (art. 35). Elle établit les droits individuels à recevoir certaines prestations dues par la société (droit au travail, à la subsistance, à l’instruction). Elle renouvelle le respect du droit de propriété.
D’inspiration rousseauiste, le caractère démocratique de l’Acte constitutionnel qui suit la déclaration des droits émane de la conception du droit de suffrage et de l’organisation des pouvoirs publics. La nation est remplacée par le peuple : « Le peuple souverain est l’universalité des citoyens français » (art.7). Le droit de vote est accordé à tous les Français âgés de 21 ans et, sous certaines conditions, aux étrangers domiciliés en France depuis plus d’une année. Les électeurs se réunissent en assemblées primaires, par canton. Chaque assemblée nomme un député à la majorité absolue des suffrages. Chaque député appartient à la nation entière.
L’Acte constitutionnel proclame que « La République française est une et indivisible ». Il subordonne l’exécutif au législatif, lui-même soumis au contrôle populaire. Le pouvoir législatif est confié à une Assemblée nationale unique élue pour un an et qui détient une pleine compétence pour prendre des décrets. Les lois dont le domaine est précisé aux termes de l’article 54 de l’Acte sont soumises à l’approbation populaire, expresse ou tacite. Elles n’entrent en vigueur, après leur communication aux communes que si, passé un délai de quarante jours, dans la moitié des départements plus un, le dixième des assemblées primaires n’a pas réclamé la convocation de l’ensemble des assemblées primaires afin de statuer sur ces lois. Le veto populaire et le referendum sont ainsi combinés.
Un Conseil exécutif composé de 24 membres est « chargé de la direction et de la surveillance de l'administration générale ; il ne peut agir qu'en exécution des lois et des décrets du Corps législatif ». Les conseillers sont choisis pour un mandat de deux ans par le Corps législatif sur une liste générale à raison d’un candidat proposé par chaque assemblée électorale départementale. Les électeurs sont nommés par les citoyens réunis en assemblées primaires et forment l’Assemblée électorale à l’issue de leur nomination. Le Conseil est entendu en tout ou partie lors des séances de l’Assemblée lorsqu’elle le juge opportun ou qu’il a un rapport à communiquer.
La Constitution montagnarde est approuvée par référendum le 24 juin 1793 (1 800 000 de oui contre 11 600 de non mais avec plus de cinq millions d’abstentions sur un total de sept millions d’électeurs. Du fait des défaites militaires sur le champ de bataille européen et des insurrections en province, la Convention, sur un rapport de Louis Antoine Léon Saint-Just, suspend son application par décret du 10 octobre 1793 (19 vendémiaire an II) et proclame que « le Gouvernement provisoire de la France est révolutionnaire jusqu’à la paix ». Un « gouvernement d’exception » concentré entre les mains de la Convention est mis en place d’octobre 1793 à novembre 1795. La Constitution montagnarde n’a donc jamais été appliquée. Elle bénéficie toutefois d’un grand prestige dans l’histoire constitutionnelle et politique française, représentant une sorte de consécration de la mystique révolutionnaire du gouvernement d’assemblée.