Histoire et Patrimoine
Frise chronologique
Révolution française
Réunion des états généraux : les cahiers de doléances
En raison de la désastreuse situation économique et budgétaire du royaume, Louis XVI se résout à convoquer les états généraux au printemps 1789. Un hiver rude et l’augmentation du prix du pain ne font qu’accentuer la crise.
Durant les deux mois qui précèdent l’ouverture des états généraux le 5 en mai 1789, les trois ordres – tiers état, clergé et noblesse – se réunissent et rédigent des cahiers de doléances. Ces écrits ont pour objectif de réunir et de transmettre au roi les plaintes et les demandes du peuple.
Les cahiers de 1789 sont, selon Tocqueville « le testament de l’ancienne société française, l’expression suprême de ses désirs, la manifestation authentique de ses volontés ».
Les archives de l’Assemblée nationale en conservent le témoignage à travers le manuscrit original du cahier de la commune d’Etréchy (Essonne). On peut y lire :
« Cahier des plaintes, doléances et remontrances des habitants de la paroisse d’Etrechy.
1. Lesdits habitants représentent qu’il conviendrait que les voix aux états généraux fussent comptées par tête et non par ordre.
2. Que la taille et capitation soient supprimées pour être remplacées pour un seul impôt qui serait supporté également dans les trois ordres de l’état.
3. Que ces trois ordres soient également sujets à la corvée.
4. Que le sel devint libre et marchand comme le blé suivant l’une et l’autre partie de la subsistance les plus nécessaires de l’homme ; les plus riches n’en consomment pas plus que les plus pauvres de l’Etat, prouvant par là que cet impôt est onéreux à la classe indigente relativement à la grande disproportion des fortunes et que l’on pourrait rejeter le produit de cet impôt sur les denrées de luxe et de pure fantaisie.
5. Qu’il n’y eut pour gouverner la province qu’une seule et unique administration, ce qui simplifierait grandement la dépense et que cette administration fut seule chargée par abonnement de la perception des impôts quelconques de la province et de les vuider [ verser] directement tous les trois mois dans les coffres du roi.
6. Qu’il serait avantageux pour l’Etat de diminuer et de simplifier le nombre des communautés religieuses dont la trop grande quantité est à charge d’Etat qui est obligé de nourrir les plus pauvres, les plus riches ayant accumulé des biens immenses qui sont autant d’appauvrissement sur la classe moyenne de l’Etat surchargée de presque tous les impôts. Cette réforme la […], le surplus des biens des riches communautés servirait à subvenir au besoin pressant de l’Etat.
7. Qu’il conviendrait de pourvoir à la subsistance des curés d’une manière honnête afin de pouvoir supprimer le casuel qui fait rougir la religion ; n’est-il pas honteux qu’un curé qui prêche la charité par état, soit lui-même obligé pour vivre de demander à la veuve et à l’orphelin, dont il doit essuyer les larmes, l’écu qu’il leur reste pour se procurer du grain.
8. Que les formes de la justice fussent grandement abrégées et que les officiers de cette même justice prêtassent leur ministère gratis dans toutes les affaires qui regardent la conservation des biens des mineurs.
9. Que le code des lois tant civiles que criminelles fut refait afin de les simplifier et éclaircir ; la plupart étant si obscures que chacun les interprète différemment et de là s’ensuit la longueur des affaires.
10. Qu’il n’y eut que trois tribunaux pour plaider savoir des baillages royaux qui jugeraient en dernier ressort jusqu’à une certaine somme, des présidiaux dans toutes les capitales de province pour juger aussi en dernier ressort jusqu’à une somme plus considérable que celle des baillages ; enfin un troisième tribunal, que l’on appellera parlement si l’on veut, pour décider définitivement de toutes les affaires qui pourraient y être portées pour appel.
11. Que les présidiaux ressortissent du parlement qui serait le plus près d’eux.
12. Que toutes les affaires d’Etat fussent décidées par les états généraux que Sa Majesté assemblerait tous les dix ans et même plus souvent si les affaires l’exigeaient.
13. Que pour le bon ordre et la justice des paroisses de campagne il y eût dans chacune d’elles un juge de police à demeure, ou une compagnie composée des notables de la paroisse pour y exercer cette même police.
14. Que l’on fît un nouveau tarif de contrôle et intelligible, de manière que celui qui voudrait contracter, [sait] avant que de le faire ce qui lui en pourrait coûter.
15. Qu’il n’y eut plus d’huissiers priseurs qui s’emparent de la fortune des particuliers par les privilèges prétendus de leurs offices et à cause de la lenteur qu’ils mettent dans toutes leurs opérations.
16. Qu’on réunît aux fabriques des bénéfices assez considérables en revenus pour fournir tant à la reconstruction qu’à l’entretien des églises, cimetières et presbytères, ce qui ôterait une charge considérable aux paroisses.
17. Que les rôles des impositions quelconques ne sussent être faits que par les habitants et propriétaires assemblés et non par les collecteurs.
18. Qu’il n’y eut qu’une seule louée par chaque an pour les domestiques de toute espèce et que cette louée fut assignée au jour de saint Jean-Baptiste.
19. D’enfin obliger chaque paroisse à nourrir ses pauvres et de conserver les dépôts pour la tranquillité des campagnes.
Fait et arrêté en assemblée de cette paroisse par nous habitants qui ont déclaré ne savoir signer sauf les signes. Le premier jour du mois de mars mil sept cent quatre-vingt-neuf.
[Signatures]
Le présent cahier contenant dix-neuf articles écrits sur quatre pages de papier ordinaire, après m’avoir été remis par les habitants et signé de ceux desdits habitants qui savent signer, a été collé par première et dernière page par moi, curé. Signé le premier jour du mois de mars mil sept cent quatre-vingt-neuf.
Vadet, curé d’Etrechy »
