Histoire et Patrimoine


Histoire patrimoniale Histoire de France Histoire parlementaire

Troisième République

1935 - 1936

Adoption et publication du programme du rassemblement populaire – Victoire du front populaire

La dépression économique que connaît la France depuis 1930 frappe de plein fouet le monde du travail. La production industrielle a diminué de 20 %, les salaires horaires sont très bas alors que les prix des denrées alimentaires restent élevés. Les investissements productifs s’arrêtent, la dette publique s’alourdit. Le chômage total est en très forte hausse en 1936, tandis que le chômage partiel n’épargne aucun secteur industriel et particulièrement la métallurgie. Les gouvernements successifs font le choix de l’austérité pour réduire les déficits publics et rétablir la compétitivité des prix. Les décrets-lois du Gouvernement de Pierre Laval imposent à l’été 1935 une réduction de 10 % des dépenses publiques, y compris des salaires des fonctionnaires, des pensions et des rentes. Cette politique s’accompagne de mesures protectionnistes entraînant un repli sur le marché intérieur et colonial.

 

L’incapacité à juguler la crise économique entraîne la chute successive de plusieurs gouvernements d'union nationale : celui de Paul Doumergue, investi le 15 février 1934, obtient des chambres les pleins pouvoirs financiers le 22, mais il démissionne le 8 novembre. Son successeur Pierre-Etienne Flandin demande à son tour l’octroi des pleins pouvoirs pour assainir la situation financière mais les assemblées refusent. Devant l'Union nationale qui se désagrège, il démissionne également.

 

Tandis que les ligues nationalistes s’organisent, Maurice Thorez, député communiste de la Seine, annonce à la tribune de la Chambre des députés, le 13 novembre, la formule du « front populaire du travail, de la liberté et de la paix ».

 

Au printemps 1935, une structure dénommée « Rassemblement populaire » se constitue, regroupant une centaine d’organisations syndicales, politiques et associatives de gauche. Elle se dote d’un programme commun adopté et publié le 11 janvier 1936 en vue des élections législatives d’avril-mai, fixant les grandes orientations économiques et sociales dont la semaine des 40 heures, les congés payés, l’amélioration des assurances sociales et de certaines allocations de chômage, les retraites des mineurs et la suppression des prélèvements de 10 % sur les salaires et les pensions introduits par les décrets-lois du Gouvernement de Pierre Laval.

 

La campagne électorale est prioritairement menée contre la politique gouvernementale de déflation. Le parti communiste revendique « Le pain, la paix, la liberté ». Pour les élections législatives des 26 avril et 3 mai 1936, les socialistes, communistes et radicaux s’entendent sur un programme électoral commun de défense des libertés républicaines et de progrès social. L’accord doit assurer le report des voix des deux autres partis politiques en faveur du candidat de gauche le mieux placé pour le second tour de scrutin.

 

À l’issue des élections et avec un taux très élevé de participation, le Front populaire obtient la majorité absolue à la Chambre des députés avec 386 élus sur 608: 149 socialistes SFIO (129 en 1932), 72 communistes (12 en 1932), 56 divers gauche (socialistes-communistes, Union socialiste-républicaine, Gauche indépendante, ...) et 109 radicaux (157 en 1932).

 

Le succès du Front populaire engendre une espérance de progrès social. Des mouvements de grèves éclatent le 11 mai 1936, en province puis à Paris, qui revêtent une ampleur sans précédent : 12 000 grèves, dont la moitié dans la région parisienne, avec occupation fréquente des lieux de travail. À partir du 25 mai, la métallurgie de la région parisienne bascule dans la grève qui se généralise à d’autres corporations dans l’industrie, mais aussi à des secteurs qui en sont peu coutumiers : commerces, banques, assurances, taxis ou encore cafés. Certains dirigeants de la métallurgie cèdent aux exigences des grévistes devant la force de leur détermination.

 

Le 1er juin 1936, la Chambre des députés tient sa première séance de la nouvelle législature. Le 4 juin, le Gouvernement d'Albert Sarraut donne sa démission. Le président de la République Albert Lebrun désigne officiellement Léon Blum (SFIO) comme président du Conseil. Son Gouvernement est essentiellement composé de parlementaires. Malgré son succès électoral, le parti communiste français (PCF) ne souhaite pas en faire partie mais assure aux socialistes le bénéfice de son soutien.

 

Le 6 juin 1936, Léon Blum présente devant les assemblées le programme pour lequel la majorité de Front populaire a été élue. La Chambre des députés vote la confiance par 384 voix contre 210.

 

Sans expérience gouvernementale et attentif à la coordination de l'activité des différents ministères, Léon Blum décide de ne pas cumuler la présidence du Conseil avec la charge d'un portefeuille. Il instaure, sous la direction de Jules Moch, un secrétariat général du Gouvernement. Il confie à Léo Lagrange la création d’un sous-secrétariat d'État à l'organisation des loisirs et aux sports qui permet à la masse de la population d’accéder à la culture. Enfin, il fait entrer au Gouvernement pour la première fois sous la Troisième République trois femmes sous-secrétaires d'État alors qu’elles ne sont, à l’époque, ni électrices ni éligibles. Cécile Brunschvicg est nommée sous-secrétaire d'État à l'Éducation nationale, Irène Joliot-Curie, sous-secrétaire d'État à la Recherche scientifique, et Suzanne Lacore, sous-secrétaire d'État à la protection de l'enfance.

 

Le ministère du travail recense presque deux millions de grévistes au mois de juin. La grève devient nationale et interprofessionnelle. Elle est presque générale dans le Nord et en région parisienne. Seuls les services publics sont épargnés.

 

À peine constitué, le Gouvernement Blum doit prendre des mesures pour mettre fin aux grèves et aux revendications sociales considérablement actives. Sous la pression des milieux d'affaires empressés de les circonscrire, il réunit, le 5 juin 1936, à l'hôtel de Matignon les représentants patronaux de la Confédération générale de la production française (CGPF) et ceux de la Confédération générale du travail (CGT) réunifiée (Confédérés et Unitaires). Il préside la négociation, assisté de Roger Salengro, ministre de l'intérieur, de Marx Dormoy, sous-secrétaire d'État à la présidence du Conseil et du secrétaire général du Gouvernement Jules Moch. Les « Accords de Matignon » sont signés dans la nuit du 7 au 8 juin. Ils prévoient une revalorisation des salaires, l'exercice du droit syndical, la liberté d'opinion, l’établissement de conventions collectives, l'élection de délégués ouvriers dans les établissements de plus de dix salariés et aucune sanction pour fait de grève mais exigent, en contrepartie, l'engagement de la "délégation confédérale ouvrière" de décider la reprise du travail.

 

Les lois sociales promulguées les 20 et 21 juin 1936 modifient les conventions collectives de travail et octroient deux mesures non prévues par les Accords de Matignon : quinze jours de congés payés aux salariés et la réduction de leur durée hebdomadaire de travail de 48 à 40 heures. Des réformes de structure sont votées pendant l’été en plus des réformes sociales : la création de l'Office national interprofessionnel du blé qui a pour mission de fixer chaque année le prix du blé, la nationalisation des industries de guerre et la réforme de la Banque de France.

 

Les promesses du Front populaire vont se heurter à d’importantes difficultés financières et monétaires. Dès la fin du mois de septembre 1936, le Gouvernement Blum décide de dévaluer le franc pour favoriser la relance des exportations alimentant ainsi l’inflation et, en conséquence, la baisse du pouvoir d’achat. Les dirigeants de la CGT en acceptent le principe en modérant leurs exigences salariales, en réfrénant les occupations d’usines et en limitant le recours à la grève par la mise en place de la conciliation et de l’arbitrage obligatoires des conflits collectifs du travail. Cette concession des dirigeants syndicaux ébranle la victoire obtenue par les ouvriers. Le 13 février 1937, Léon Blum annonce une « pause sociale » dans une allocution radiodiffusée avec l’ajournement de nouvelles réformes.

 

Les mesures économiques d'austérité engagées, puis la non-intervention du Gouvernement dans la guerre d'Espagne déclenchée le 18 juillet 1936 accentuent son discrédit auprès des ouvriers et d'une partie de la population. Le 21 juin 1937, il présente sa démission. Léon Blum est remplacé à la tête du Gouvernement par le radical-socialiste Camille Chautemps. Ce dernier poursuit la remise en cause des acquis du Front populaire en dénonçant la semaine de 40 heures par l’encouragement des heures supplémentaires. La Confédération générale du patronat français (CGPF – qui remplace la Confédération générale de la production française) publie en juin 1937 un manifeste intitulé « Patrons, soyez des patrons ! » et entame une confrontation avec les organisations syndicales de salariés pour minimiser l’application des lois votées pendant l’été 1936 et renforcer l’appareil de production, au nom d’un effort de guerre qu’il conviendrait de mener.

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