Histoire et Patrimoine
Frise chronologique
Troisième République
Premier chef d’État reçu dans l'hémicycle : Woodrow Wilson
À la suite de l’armistice du 11 novembre 1918 et dans le cadre de son voyage transatlantique en Europe, le 28e président des États-Unis d’Amérique, Woodrow Wilson, après une escale à Londres, est reçu à Paris au Quai d’Orsay, le 18 janvier 1919, pour l’ouverture officielle de la conférence de la paix, puis au Sénat, le 20 janvier, pour un grand banquet.
Le lundi 3 février, à 17 heures, le Président Wilson fait son entrée dans l’hémicycle du palais Bourbon. Le règlement de la Chambre des députés interdit qu’un chef d’État étranger ou que toute autre personnalité extérieure s’exprime à la tribune. Le Président de la République française lui-même n’est pas autorisé dans le palais et ne peut communiquer avec l’Assemblée que par message. Le journal L’Illustration rapporte dans son édition du 8 février 1919 : « … Pour que la cérémonie grandiose dont le président des États-Unis fut honoré pût s’accomplir il a fallu recourir à une fiction : la Chambre, ce jour-là, l’a reçu, mais elle n’a pas siégé. »
Des précisions sur l’ambiance qui règne dans les lieux sont fournies dans la plaquette éditée par l’Assemblée nationale pour le 90e anniversaire de la venue du Président américain à Paris, préfacée par l’ancien Président de l’Assemblée nationale, Bernard Accoyer : « Presque tous les députés sont présents, en redingote, partageant l’hémicycle avec quelques collègues sénateurs. Dans les galeries du public se pressent de nombreuses personnalités de marque : les demandes d’invitation ont été si nombreuses qu’il a fallu procéder à un tirage au sort. Devant les bancs du Gouvernement, trois fauteuils dorés ont été disposés à l’intention du président du Sénat, Antonin Dubost, du président du Conseil, Georges Clemenceau, et du président de la République, Raymond Poincaré. Dans une salle des séances pavoisée de drapeaux américains et français, (…) ».
Le président de la Chambre, Paul Deschanel, prononce un discours de bienvenue puis Woodrow Wilson montre à la tribune et s’exprime en anglais. L’interprète, le lieutenant français Paul Mantoux, historien de l'économie en Grande-Bretagne, lui succède, ses notes sténographiques à la main, pour donner la traduction française de son allocution.
Cette réception n’étant pas une séance parlementaire, le compte rendu ne figure pas dans les annales de la Chambre des députés : il paraît néanmoins au Journal officiel du 8 février 1919, mais dans sa « partie non officielle ». Les archives de l’Assemblée nationale en conservent les morasses – la première version imprimée avec les corrections typographiques. Ce document a été avalisé auparavant par les autorités américaines, puisqu’il est restitué le 14 février accompagné d’une lettre à l’en-tête « American Commission to negotiate peace ».
Il faut attendre 1993 et la réception du roi d’Espagne dans l’hémicycle pour qu’un tel événement se reproduise. La pratique s’est depuis institutionnalisée sous l’impulsion du Président Philippe Séguin. À ce jour, 22 personnalités étrangères ont, depuis lors, été conviées à s’exprimer à la tribune de l’Assemblée (privilège réservé aux chefs d’État et de Gouvernement, Secrétaire général des Nations Unies et Président de la Commission européenne).