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Commission des affaires européennes

mardi 12 novembre 2013

16 h 30

Compte rendu n° 95

Présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente

I. Audition de M. Michel Cretin, membre de la Cour des comptes européenne

II. Communication de Mme Marietta Karamanli sur le contrôle parlementaire d’Europol (COM(2013) 173 final – E 8265) 

III. Communication de M. Arnaud Leroy sur la proposition de règlement relative aux espèces exotiques envahissantes (COM (2013) 620 – E 8639) 

IV. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mardi 12 novembre 2013

Présidence de Mme Danielle Auroi,
Présidente de la Commission des affaires européennes

La séance est ouverte à 16 h 30

I. Audition de M. Michel Cretin, membre de la Cour des comptes européenne

La Présidente Danielle Auroi. Nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui pour la première fois devant notre commission, M. Michel Cretin, membre de la Cour des comptes européenne, sur l’excellente suggestion de notre collègue Philip Cordery, dont la parfaite connaissance des arcanes européennes nous est précieuse.

Il me paraît important que notre commission entende régulièrement les membres français des institutions européennes, de façon que se tissent des liens. Nous avons ainsi auditionné le mois dernier M. Henri Malosse, président du Comité économique et social européen, et auditionnerons dans les prochains mois le membre français du directoire de la Banque centrale européenne et les membres français de la Cour de justice de l’Union européenne.

Monsieur Cretin, vous avez été nommé membre de la Cour des comptes européenne le 1er janvier 2008, après avoir effectué une longue carrière dans le contrôle des finances publiques. Vous avez été président de chambre à la Cour des comptes française, dont vous êtes magistrat depuis 1969, et avez exercé des fonctions dans diverses instances, nationales, comme à la Société financière de radiodiffusion (SOFIRAD), et internationales, à l’Organisation des Nations unies, à l’Organisation météorologique mondiale, – la géographe que je suis y est très sensible –, à l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et à la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD).

Vous êtes membre de la chambre « Conservation et gestion des ressources naturelles » de la Cour des comptes européennes, domaine qui nous intéresse tout particulièrement, et suivez plus spécifiquement les sujets liés à la politique agricole commune (PAC).

Nous serons heureux de vous entendre sur le rôle précis de la Cour, institution chargée du contrôle des finances de l’Union et gardienne indépendante des intérêts financiers des citoyens de l’Union. Nous sommes très intéressés par l’appréciation que vous portez sur la gestion de ces finances, dans une période de fortes contraintes budgétaires, y compris au niveau européen. Nous souhaiterions également vous entendre sur les priorités actuelles de travail de la Cour, notamment sur le contrôle des dépenses de la PAC et de celles de la politique régionale, deux sujets majeurs qui intéressent la France et les Français et sont proches de leurs préoccupations, bien que nos concitoyens soient enclins à entonner le leitmotiv « Bruxelles, c’est loin et technocratique. » Quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur la réforme de la PAC, sa portée et ses limites ? Cet éclairage nous sera utile au moment où nous débattons des orientations agricoles nationales. Enfin, nous aimerions connaître l’analyse de la Cour sur le programme Marco Polo, visant à faciliter l’intermodalité des transports et à favoriser le report du transport routier sur le fret ferroviaire.

M. Michel Cretin, membre de la Cour des comptes européenne. Je vous remercie d’abord de l’occasion qui m’est donnée de vous présenter une institution méconnue dans la grande machinerie bruxelloise : la Cour des comptes de l’Union européenne, qui siège à Luxembourg. Je vous ferai ensuite part des principales observations de la Cour sur la gestion de la PAC et des fonds structurels, c’est-à-dire le Fonds de développement régional (FEDER), le Fonds social pour l’emploi (FSE) et les fonds de cohésion. Je terminerai par quelques observations générales sur les propositions législatives relatives à la gestion de ces fonds pour la période 2014-2020, que la Commission a soumises au Parlement.

La Cour des comptes de l’Union européenne a été créée en 1975 par le traité de Bruxelles qui réformait les modalités de contrôle des finances de l’Union en confiant au seul Parlement le pouvoir de donner décharge de sa gestion à la Commission et en créant un nouvel auditeur externe de l’Union, la Cour, placée aux côtés du Parlement et du Conseil, qui sont les deux autorités budgétaires de l’Union. Elle a été installée à Luxembourg le 25 octobre 1977. Le traité de Maastricht en a rehaussé le statut en l’érigeant en institution de l’Union, au même titre que le Parlement, le Conseil, la Cour de justice ou la Commission.

Elle est composée de vingt-huit membres, nommés par le Conseil sur proposition de chacun des États membres et après consultation du Parlement. Les membres de la Cour ne représentent pas les États dont ils sont issus et ne prennent pas instruction auprès d’eux, mais prennent position personnellement et en toute indépendance. Ils prêtent d’ailleurs serment en ce sens devant la Cour de justice lors de leur nomination. La Cour est représentée par un président, élu pour trois ans par ses pairs. Elle est actuellement présidée par le membre portugais, dont le mandat arrive à échéance l’année prochaine. La Cour emploie environ neuf cents personnes, dont quelque cent cinquante traducteurs – nous travaillons dans vingt-trois langues.

Comme la Cour des comptes française, la Cour des comptes européenne est un organe collégial, dont tous les rapports sont adoptés collégialement, et qui arrête lui-même son programme de travail. Elle certifie les comptes de l’Union et dispose, pour ce faire, de très vastes pouvoirs d’investigation.

En revanche, à la différence de la Cour française, elle n’a pas de fonction juridictionnelle. Lorsque qu’elle constate l’irrégularité d’une dépense, elle ne peut pas solliciter le remboursement de la somme indûment versée. C’est la Commission qui procède au recouvrement des fonds.

Une autre différence réside dans le fait qu’elle est placée auprès du Parlement et du Conseil, qu’elle assiste dans leur fonction de contrôle de l’exécution du budget communautaire. L’équidistance vis-à-vis tant du pouvoir exécutif que du pouvoir législatif à laquelle est attachée la Cour française n’existe pas au niveau européen. La Cour des comptes européenne audite la Commission et est l’auxiliaire, dans cette fonction, du Parlement et du Conseil, auxquels elle rend compte. L’assistance qu’elle apporte au Parlement est particulièrement importante dans la procédure de décharge de sa gestion accordée chaque année à la Commission.

La Cour des comptes européenne publie chaque année en novembre de l’année n un rapport annuel sur l’exécution du budget de l’année n-1, dans lequel elle indique si ce budget a été exécuté conformément aux intentions du législateur. Le président de la Cour a ainsi présenté la semaine dernière au Parlement le rapport sur l’exercice 2012. La Cour publie également des rapports spéciaux thématiques, équivalents des rapports particuliers de la Cour des comptes française, portant sur la qualité de la gestion financière dans les domaines qu’elle a choisis d’étudier. Enfin, elle rend des avis, à la demande d’autres institutions de l’Union, ou à sa propre initiative. Elle s’est ainsi autosaisie des nouvelles propositions législatives concernant la politique agricole commune.

Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose que le rapport annuel de la Cour des comptes donne « une déclaration d’assurance » (DAS) sur les comptes de la Commission. Cette DAS porte d’une part sur la fiabilité des comptes, d’autre part sur la légalité et la régularité des opérations sous-jacentes, c’est-à-dire les dizaines de milliers, sinon les millions, de paiements effectués aux bénéficiaires individuels des aides.

Cette déclaration d’assurance à deux versants présente une originalité, à la fois par rapport à l’opinion qu’un commissaire aux comptes formule en assemblée générale sur les états financiers d’une entreprise, dans laquelle il ne se prononce que sur la véracité des comptes, et par rapport à l’opinion que la Cour des comptes française émet sur les comptes de l’État et de la sécurité sociale, dans laquelle elle ne distingue pas entre fiabilité et légalité.

Déclarer fiables les états financiers, c’est assurer que l’ensemble des opérations de l’exercice ainsi que l’ensemble des éléments d’actif et de passif sont correctement enregistrés et évalués. Les déclarer légaux, c’est assurer que les opérations figurant dans les comptes sont conformes à la réglementation générale de l’Union ainsi qu’aux éventuelles dispositions nationales supplémentaires d’application.

Les États membres ont inscrit cette originale déclaration d’assurance dans le traité de Maastricht, bien qu’aucun d’entre eux n’ait confié un tel mandat à sa propre institution de contrôle nationale.

La Cour des comptes européenne a donc développé une méthode de travail qui lui est propre en se fondant sur les normes d’audit généralement reconnues au niveau international. Pour formuler son appréciation sur la légalité et la régularité de la dépense, elle se fonde sur plusieurs éléments. Le principal consiste à contrôler un échantillon représentatif de paiements – elle procède en quelque sorte comme on le fait en matière de sondages d’opinion.

Quelques mots sur la procédure de décharge. Aux termes du Traité, le Parlement, sur recommandation du Conseil, donne chaque année décharge de sa gestion à la Commission. La décharge pour l’exercice 2012 sera examinée en avril 2014. Outre les états financiers de l’Union, qui consolident les comptes de toutes les institutions, le Parlement prend en considération le rapport d’évaluation des finances de l’Union établi par la Commission, le rapport annuel et les rapports spéciaux de la Cour des comptes.

Dans la pratique, l’interlocuteur privilégié de la Cour est la commission du contrôle budgétaire du Parlement, distincte de sa commission du budget. Cette commission du contrôle budgétaire, équivalent du Public Accounts Committee au Parlement britannique, ne s’intéresse qu’à l’exécution du budget. Elle auditionne chacun des membres de la Commission sur son domaine de compétence, en présence et avec la participation du membre de la Cour spécialiste du sujet. Ainsi est-ce moi qui ait été auditionné, avec le commissaire à l’agriculture et au développement rural, sur le sujet de la PAC. Puis elle établit un projet de rapport de décharge, très détaillé – il n’est pas rare que celui-ci compte deux cents pages –, comportant des recommandations à l’intention de la Commission, et qui est adopté en séance plénière par le Parlement.

Le Parlement a toujours donné décharge à la Commission de sa gestion, même si la Cour n’a jamais pu délivrer de déclaration d’assurance positive sur la légalité et la régularité des paiements depuis 1994.

Quelques mots maintenant sur les observations que la Cour a été amenée à formuler sur la gestion de la PAC et des fonds structurels qui représentent, à eux seuls, de 75 % à 80 % du budget annuel de l’Union : ainsi le budget total exécuté en 2012, soit 140 milliards d’euros, comportait 58 milliards pour la PAC et 48 milliards pour les fonds structurels. Sur cet ensemble, 10 milliards ont été attribués à la France au titre de la PAC – elle se taille la part du lion – et 3 milliards au titre du FEDER et du FSE.

À ces dépenses supportées par le budget communautaire, s’ajoutent les dépenses nationales consacrées aux mêmes objets. En effet, la politique régionale, la politique sociale et la politique de développement rural sont cofinancées, c’est-à-dire que les États membres participent obligatoirement, dans des proportions variables selon les actions conduites, au financement des projets – le plus souvent à 50 %.

Les principales constatations de la Cour quant à la gestion de la PAC et des fonds structurels se regroupent en trois grandes catégories.

Première catégorie : les infractions aux règles de passation des marchés publics. En 2012, 30 % des opérations contrôlées par la Cour présentaient des erreurs à ce titre. Les infractions classiques consistent à fractionner artificiellement les marchés, de façon à échapper aux dispositions des codes des marchés publics qui ne s’appliquent qu’à partir d’un certain seuil, ou à passer des marchés par entente directe, dans des cas où cela n’est pas autorisé. Ainsi en France, pour la construction de la ligne ferroviaire à grande vitesse Lyon-Turin, deux marchés de génie civil ont-ils été attribués par entente directe à une société qui avait précédemment fourni des services similaires au gestionnaire d’infrastructure, alors que ces travaux auraient dû faire l’objet d’un appel d’offres.

Deuxième catégorie d’erreurs : le financement de dépenses non éligibles. Le cas-type concerne la TVA, dont le montant ne peut pas être inclus dans les demandes de remboursement adressées à la Commission.

La troisième catégorie concerne plus particulièrement les aides directes de la PAC : l’erreur la plus fréquente consiste à sur-déclarer des surfaces. Il peut s’agir d’une fraude, dans la mesure où les aides directes sont versées à l’hectare. Mais très souvent, la surface a été surévaluée par erreur, par exemple en omettant de déduire la superficie d’un étang situé au milieu d’une parcelle, alors que les pièces d’eau ne sont pas éligibles à l’aide, ou en incluant l’emprise des chemins de desserte d’une parcelle. On s’est ainsi aperçu récemment que, pour des raisons que nous n’avons pas bien comprises et sur lesquelles les autorités françaises ne nous ont pas vraiment aidés à faire la lumière, la somme des aides directes individuelles versées aux exploitants français dépassait l’enveloppe de crédits ouverte pour la France.

Pour l’exercice 2012, le taux d’erreur global s’établit à 4,8 %, contre 3,9 % en 2011. Or, au-delà de 2 %, la Cour estime qu’elle ne peut pas donner de déclaration d’assurance positive. Le plus inquiétant est que ce taux a augmenté deux années de suite. Pour les aides directes de la PAC, dispositif pourtant l’un des mieux contrôlés, le taux d’erreur s’élève tout de même à 3,9 %. Pour le développement rural, dispositif dont la gestion est beaucoup plus complexe, il atteint 7,9 %. Et il est de 7,7 % pour les aides versées au titre du FEDER et du Fonds de cohésion. Pour plus de la moitié des opérations relevant de la politique régionale ou de la PAC, des contrôles plus rigoureux au niveau national auraient pu prévenir certaines des erreurs relevées par la Cour.

Je terminerai par l’avis de la Cour sur les propositions législatives que la Commission a présentées au Parlement, réorganisant la PAC pour la période 2014-2020. Le Parlement et le Conseil sont parvenus en septembre à un accord politique sur la base de ces propositions. Le vote, initialement prévu le 10 novembre, a toutefois été reporté ; il devrait néanmoins avoir lieu avant la fin novembre.

Ces projets de règlements agricoles constituent un volumineux ensemble, dont la discussion a été longue et laborieuse. Il ne m’est pas possible ici d’analyser cette réglementation en détail tant elle est complexe, et même, à certains égards, obscure. En effet, beaucoup de dérogations ont été accordées pour satisfaire les demandes spécifiques de chaque État membre, au risque de faire de la PAC un patchwork. Mais, hormis la correction de certaines anomalies, comme l’extension, devenue excessive, de la notion d’exploitant agricole, et l’accentuation de certaines orientations déjà prises comme le verdissement des aides, la nouvelle PAC est en réalité fort peu nouvelle et reconduit en grande partie celle en vigueur depuis 2005.

Cela importerait peu si la question de savoir à quoi doit servir la PAC n’était pas aujourd’hui posée un peu partout en Europe, et pas seulement en France. À cette question, la nouvelle PAC, dont les objectifs demeurent très flous, ne répond pas – c’est là en substance ce que dit la Cour dans son avis. Contrairement à ce que la Commission avait annoncé et revendique, la nouvelle PAC reste essentiellement une politique de moyens, qui ne vise pas des résultats identifiés. Le législateur européen n’a pas souhaité définir d’objectifs politiques dans le nouveau règlement relatif aux aides directes. Peu ont conscience que la seule condition posée aujourd’hui pour bénéficier de l’aide consiste à respecter une très vague obligation écologique, fort peu discriminante ! En gros, sur une exploitation, faucher l’herbe une fois par an suffit pour être éligible à l’aide !

Après que les aides ont été découplées de la production, l’objectif de la PAC n’est plus que de soutenir le revenu individuel des agriculteurs, objectif louable, qui figure d’ailleurs dans le Traité. Mais de ce point de vue, il est contradictoire qu’environ 80 % de l’aide profitent à 20 % de gros bénéficiaires, tandis que la grande majorité ne perçoit que de faibles montants. Les revenus les plus élevés sont les plus aidés, à l’Est comme à l’Ouest de l’Europe – la concentration de l’aide est même plus forte dans les nouveaux États membres de l’Est. Cette situation découle bien sûr directement d’un dispositif dans lequel les aides sont exclusivement calculées à la surface. Pour autant, les nouvelles propositions législatives ne définissent pas de nouvelles modalités de répartition de l’aide.

Sans mettre en doute que la PAC a servi et sert encore globalement le monde agricole, le temps est venu pour les États membres de réfléchir sérieusement aux objectifs qu’il conviendrait de lui assigner.

M. Didier Quentin. Je souhaite vous interroger, monsieur, sur le financement de la politique d’intégration des Roms au sein de l’Union européenne, en particulier en Bulgarie et en Roumanie. D’après les chiffres dont nous disposons, qui sont peut-être à vérifier, de 2007 à 2013, quelque 17,5 milliards d’euros ont été affectés dans 12 États membres à des mesures en faveur des Roms, pour des résultats plus que mitigés au regard de l’effort consenti. Selon une analyse interne de la Commission européenne, la Roumanie n’aurait, pour sa part, budgété que 38 millions d’euros pour des programmes spécifiques en faveur de cette minorité, alors que les montants prévus au titre du FSE y atteignent 2,2 milliards d’euros. De même, la Pologne ne dépenserait que 22 millions d’euros en faveur des Roms, alors qu’elle toucherait 1,7 milliard de crédits européens à ce titre. De tels écarts entre les montants affectés au niveau national et au niveau européen ne peuvent qu’étonner.

Quels contrôles effectue la Cour pour s’assurer de la bonne utilisation de ces fonds et quelles sont ses suggestions pour améliorer l’efficacité de leur emploi ?

La Présidente Danielle Auroi. On pourrait parler aussi de l’utilisation par la France des crédits européens prévus à cette même fin.

M. Joaquim Pueyo. Je suis surpris du taux global d’erreurs relevées – 4,8 %, cela représente près de 7 milliards d’euros. N’est-ce pas du gaspillage ? Quelles sont les recommandations de la Cour pour diminuer ce taux ? Les erreurs constatées dans les aides de la PAC et des fonds structurels sont-elles plus nombreuses dans certains pays, voire certaines régions ? Je ne parle pas spécifiquement de la Corse.

Les aides que touche actuellement le monde agricole au titre de la PAC ne sont pas très justes, avez-vous dit – si je vous ai bien compris. Selon la Cour, quels devraient être les critères de ces aides, de façon que soient aidés les agriculteurs qui en ont le plus besoin, je pense notamment aux éleveurs ?

Mme Marietta Karamanli. La Cour des comptes européenne ne dispose d’aucune compétence juridictionnelle propre. Lorsqu’elle constate une fraude, elle saisit l’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF). Quelles relations entretient-elle avec lui ? Celui-ci lui rend-il compte des résultats de ses investigations ? Existe-t-il un véritable dialogue entre les deux organes ?

La Cour a-t-elle été consultée sur la création du parquet européen, qui aura compétence pour défendre les intérêts financiers de l’Union ? Si oui, quel est son avis sur le sujet ?

Enfin, quel est le montant annuel des dépenses exécutées de l’Union ? Serait-il possible de faire plus et mieux en exécution ?

M. Philip Cordery. En ces temps où l’on glose beaucoup sur l’Union européenne, il est en effet essentiel de contrôler ses dépenses, comme le fait la Cour des comptes européenne.

Je suis moi aussi surpris du taux faramineux d’erreurs, 4,8 % au global, et même 7,7 % pour les aides du FEDER. Bien qu’elle se refuse à distinguer entre fraudes et erreurs, la Cour a-t-elle une idée de la part des fraudes dans ces pourcentages ? De manière générale, les recommandations de la Cour sont-elles suivies ? De quels pouvoirs dispose-t-elle pour y insister ?

Ma deuxième question a trait à l’extrême lourdeur de la réglementation. Cela fait certes la fortune des agences de conseil, mais les procédures à suivre sont si complexes pour obtenir des crédits européens que de petites collectivités, des PME, des associations sont parfois contraintes d’embaucher une personne pour monter leur dossier, ce qui est loin d’être toujours rentable pour ces petites structures. Que recommande la Cour pour alléger ces procédures sans pour autant accroître le risque d’erreurs ?

Mme Estelle Grelier. Lors de la révision triennale du règlement financier de l’Union intervenue en 2011, la détermination du « risque d’erreur tolérable » avait fait l’objet d’intenses discussions. Il avait notamment été suggéré qu’il puisse être modulé en fonction des fonds et de leurs modalités de gestion – financement communautaire seul ou cofinancement. Quel est l’avis de la Cour sur cette éventuelle modulation ? Pour réduire le taux d’erreur, vous suggérez que les autorités nationales procèdent à des contrôles plus stricts. Songez-vous à d’autres pistes ?

Certains petits porteurs de projets, je pense notamment à des associations, qui ont souvent mobilisé beaucoup de moyens pour monter leur dossier, se voient parfois « rattrapés par la patrouille », ce qui les dégoûte à tout jamais de solliciter des crédits au titre des fonds structurels. La Cour tient-elle compte lors de ses contrôles de la taille du bénéficiaire de l’aide, qui a pu commettre une erreur ?

Pour avoir été membre de la commission du budget du Parlement européen, je sais combien d’autorisations d’engagement ne sont pas honorées ensuite en crédits de paiement – l’actuel président de cette commission, M. Lamassoure, parle même de « monnaie de singe ». Les restes à liquider sont évalués à 217 milliards d’euros pour le précédent cadre financier pluriannuel de 980 milliards d’euros. La Cour a-t-elle abordé ce sujet et a-t-elle rappelé chacun à l’ordre ?

Enfin, j’aimerais beaucoup, monsieur Cretin, que nous puissions vous auditionner en même temps que le ministre de l’agriculture, M. Le Foll. Vous soutenez en effet que le futur cadre financier pluriannuel ne va pas beaucoup changer, ce qui n’est pas exactement ce que l’on nous dit en France ! Je trouve votre analyse intéressante, mais assez pessimiste.

M. Philippe-Armand Martin. Il y aurait donc pour quelque 6 milliards d’euros d’erreurs dans les dépenses de l’Union pour l’exercice 2012. C’est dire combien la réglementation européenne est loin d’être toujours respectée ! Certaines de ces erreurs sont d’ailleurs sans doute volontaires. Face à cette situation, la Cour des comptes européenne dispose de moyens limités et ne peut que formuler des recommandations. Qui aujourd’hui pourrait sanctionner les États et comment ? Nos concitoyens, qui ont le droit de savoir ce qu’il en est, ne comprendraient pas qu’il n’y ait pas de sanctions.

Il leur est difficile de comprendre aussi que, comme vous l’avez rappelé, il soit aujourd’hui possible de toucher des aides au titre de la PAC sans rien produire.

Mme Sophie Rohfritsch. Un taux d’erreur de 4,8 %, ce qui représente près de 7 milliards d’euros, m’interpelle moi aussi. J’ose espérer qu’il est inférieur en Alsace, où, depuis maintenant quelques années, c’est la région qui gère directement les fonds structurels.

Et je ne peux m’empêcher de rapprocher ces 7 milliards d’euros des quelque 160 millions d’euros de surcoût qu’occasionne, dit-on, le déplacement des parlementaires européens pour les sessions plénières à Strasbourg, raison invoquée par les lobbyistes anti-Strasbourg pour exiger que le siège du Parlement soit fixé à Bruxelles. Mieux vaudrait faire des économies en cherchant à réduire ces « erreurs » que d’utiliser l’argument du coût pour faire un mauvais procès à Strasbourg. Je profite d’ailleurs de l’occasion pour proposer à la présidente et aux membres de notre commission que nous nous rendions ensemble, avec nos homologues du Sénat, à Strasbourg pour rappeler que de manière unanime, toutes tendances politiques confondues, nous souhaitons que le siège du Parlement européen reste à Strasbourg et que nous sommes attachés à ce que le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif de l’Union siègent en deux lieux différents. Et si on trouve que le bâtiment de Strasbourg est trop peu utilisé, on n’a qu’à y rapatrier l’ensemble des activités, administratives notamment, qui sont peu à peu déplacées à Bruxelles.

La Présidente Danielle Auroi. Permettez-moi de répondre tout de suite à la dernière partie de votre intervention. Nous ne pouvons nous rendre à Strasbourg qu’à l’invitation du Parlement européen. Mais si celui-ci nous invite, nous nous y rendrons avec grand plaisir, avec nos collègues membres de la commission des affaires européennes du Sénat.

M. Yves Fromion. Une partie des fonds structurels transite en France par les régions, dont les réformes en cours visent à renforcer les pouvoirs. La Cour des comptes européenne travaillent-elle d’ores et déjà en lien avec les chambres régionales des comptes ? Comment organiser le travail de façon qu’elle puisse effectuer ses contrôles plus près du terrain ?

Mme Seybah Dagoma. La Cour des comptes européenne ne dispose pas de pouvoirs juridictionnels propres. Lorsqu’elle découvre une fraude ou une irrégularité, elle ne peut qu’en informer l’Office européen de lutte anti-fraude. Comment les avis de la Cour sont-ils suivis ? De manière plus générale, l’Union européenne dispose-t-elle, selon vous, de moyens suffisants pour lutter contre la fraude ?

M. William Dumas. Sept milliards d’euros d’erreurs, c’est considérable. Quels sont les pays les plus concernés ? Sont-ce toujours les mêmes ? Dans quels pays ce taux d’erreurs, dont certaines doivent être volontaires, ce qui n’est rien d’autre que de la fraude, progresse-t-il ? Face à cela, la Cour des comptes européenne ne peut que formuler des recommandations. Quelles sont ses propositions pour résorber ces « erreurs » ? Qui pourrait prononcer des sanctions ? Enfin, ne faudrait-il pas simplifier la réglementation communautaire, de façon aussi à réduire le risque d’erreurs involontaires ?

M. Michel Piron. Pourrait-on avoir connaissance de la géographie, à la fois européenne et française, des erreurs ? Pour la France par exemple, je me demande ce qu’il en est selon qu’on inclut ou non la Corse. On sait certaines cultures plus portées que d’autres sur l’exactitude, dont toutes n’ont d’ailleurs pas la même approche.

De tels taux d’erreurs ne traduiraient-ils pas aussi un formalisme excessif du système d’évaluation ? Vous avez cité comme type d’infraction la reconduction d’un marché avec un prestataire parce qu’il avait donné satisfaction antérieurement. Cette tentation est-elle aberrante ? Au-delà des aspects formels, ne faudrait-il pas s’attacher davantage à l’objectif final vraiment recherché ?

La Présidente Danielle Auroi. Il serait intéressant de connaître aussi l’historique des erreurs. Pourriez-vous nous brosser un tableau de l’évolution de la situation par pays et par régions ?

J’aimerais enfin que vous disiez un mot du programme Marco Polo. Les transferts intermodaux et le développement du fret ferroviaire sont des enjeux importants. De ce point de vue, ce que vous nous avez dit sur la ligne à grande vitesse Lyon-Turin n’est pas spécialement rassurant.

M. Michel Cretin. Il y a quelques années, bien avant que le sujet des Roms ne fasse la une de l’actualité en France, j’avais proposé à mes collègues que nous nous penchions sur l’utilisation des crédits destinés à cette minorité. Cela n’a pas été fait. La Cour n’a pas élaboré de rapport spécifique et n’a donc pas de constatations particulières sur le sujet.

Mais, pour autant que je sache, ce que vous dites, monsieur Quentin, est vrai. Des crédits ont été votés, qui devaient être dépensés essentiellement en Bulgarie, en Roumanie, en Slovaquie et, à un degré moindre, en Hongrie. Et on se demande en effet aujourd’hui s’ils ont bien été utilisés à ce pour quoi ils étaient prévus. Il existe de forts soupçons car il s’agit d’États qui ont été, à plusieurs reprises, rappelés à l’ordre par la Commission s’agissant de la gestion des crédits européens, pas seulement d’ailleurs ceux destinés aux Roms. La Commission a même, à un moment, suspendu ses paiements à la Bulgarie pendant six mois, ou même davantage, jusqu’à ce que les autorités bulgares lui fournissent les explications qu’elle demandait et apportent la preuve que le système bulgare de gestion des crédits européens, qui présentait d’importantes déficiences, avait été remis en ordre. Les paiements à ce pays ont repris mais la menace de suspension reste une arme importante aux mains de la Commission, qu’elle ne peut néanmoins utiliser que dans des cas lourds.

Pour ce qui est des taux d’erreur, je vais vous décevoir. Les audits de la Cour sont conçus pour déterminer un taux à l’échelle de l’Union européenne, et non de chaque État membre, a fortiori de chaque région. Pour obtenir une estimation statistique raisonnable du taux d’erreur entachant par exemple l’utilisation des 58 milliards d’euros de la PAC, on considère qu’il convient d’analyser un échantillon représentatif de 360 opérations, choisies au hasard. Ce serait un travail considérable que de calculer les taux d’erreur par pays car il faudrait dans chaque pays constituer et étudier 360 échantillons. Or, la Cour n’en a absolument pas les moyens et il serait déraisonnable de les augmenter pour ce faire.

Il faut bien voir comment sont effectués les contrôles, pour les aides de la PAC par exemple. Une fois un paiement donné tiré au sort, deux auditeurs sont envoyés durant plusieurs jour sur l’exploitation pour opérer les vérifications nécessaires. La procédure est lourde. Je me souviens d’un contrôle dans un parc naturel en Sardaigne, où il fallait déjà trois jours pour arriver sur place, après avoir emprunté un 4 x 4. Il s’est avéré que les surfaces pour lesquelles une aide avait été versée n’étaient pas éligibles, car boisées.

M. Philippe-Armand Martin. On peut aussi s’appuyer sur les photos satellite.

M. Michel Cretin. On les utilise bien sûr, mais ce n’est pas suffisant.

Pour le reste, certains stéréotypes ne sont pas faux. On relève un peu plus d’erreurs en Grèce, en Italie, en Espagne et en Roumanie qu’en Rhénanie du Nord-Westphalie ou au Danemark, ce qui ne signifie pas qu’on ne trouve aucune erreur dans les subventions versées aux pays nordiques.

Erreurs ou fraudes ? On n’opère pas cette distinction. La Cour des comptes européenne, tout comme la Cour des comptes française, programme ses audits pour détecter des erreurs, pas des fraudes, dans la gestion des fonds. Ce n’est de toute façon qu’à l’issue d’un long processus judiciaire qu’il pourrait être établi qu’une erreur était en réalité une fraude. Jamais nous ne pourrions remettre l’année n le rapport annuel sur les comptes de l’année n-1 si nous devions repérer les fraudes. En cas de soupçon, nous déférons les faits à l’Office européen de lutte anti-fraude, tout comme, dans une situation analogue, la Cour des comptes française déférerait les faits au parquet, après quoi le procureur général engagerait l’action publique.

L’OLAF, qui est une direction de la Commission, ne rend pas compte à la Cour, laquelle n’intervient pas dans la nomination de ses membres.

Pour répondre à la question qui m’a été posée sur le sujet, la Cour n’a pas été consultée sur la création du parquet européen.

Oui, la Cour formule des recommandations, hélas toujours un peu les mêmes. La première d’entre elles serait que les instances de contrôle de l’utilisation des crédits européens, mises en place sous l’égide de la Commission dans chacun des États membres, s’acquittent scrupuleusement de leur tâche. En France, la commission de certification des comptes des organismes payeurs (C3OP) et la commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC) pour ce qui est des fonds régionaux le font de façon tout à fait satisfaisante, mais ce n’est pas le cas dans tous les pays.

La deuxième recommandation de la Cour serait de simplifier la réglementation. Pour autant, pour être pertinente, une réglementation doit être précise, ce qui la rend compliquée à appliquer car il faut prévoir tous les cas. Ainsi, pour être éligible à l’aide au titre de la PAC, une parcelle ne doit pas être boisée, mais au Portugal, on élève des chèvres sur des terrains largement boisés. Comment distinguer une forêt et un bois permettant néanmoins l’élevage des ovins et des caprins ? Il arrive que sur place, nos auditeurs doivent rechercher la présence de déjections d’animaux pour déterminer si une parcelle sert à l’élevage.

La Cour prône donc moins de contrôles, mais des contrôles de meilleure qualité. L’empilement des dispositifs de contrôle européen, national et régional est tel qu’ils finissent par être inefficaces, chaque échelon pensant que le contrôle qu’il devrait effectuer le sera par un autre. La Cour recommande également de simplifier les procédures, tout en étant consciente qu’on se heurtera vite à des limites. Comment par exemple définir, sans entrer dans le détail, « une action favorable à l’environnement », qui ouvre droit à une aide au titre du développement rural, ou évaluer la diversité biologique ?

D’une manière générale, la Commission prête attention à nos recommandations. Chaque année, la Cour consacre un chapitre de son rapport annuel au suivi de leur mise en œuvre.

Non, les aides actuelles de la PAC ne sont pas justes. Depuis 2005, où elles ont été découplées de la production pour être attribuées à l’hectare, leur montant ne dépend que de la surface des parcelles – que celles-ci, d’ailleurs, soient ou non cultivées. Dès lors, la plus grande part de l’aide va à un petit nombre de gros exploitants, qui ne sont pas nécessairement ceux qui en ont le plus besoin. C’est ainsi que la famille royale britannique et celle de la principauté de Monaco figurent parmi les principaux bénéficiaires de la PAC ! Si l’on voulait aider les exploitations qui le nécessitent vraiment, il faudrait définir des critères précis – sans doute l’éleveur de bovins du Massif central a-t-il davantage besoin d’être soutenu que le céréalier de la Beauce qui exploite des centaines d’hectares. Mais ce serait là renverser totalement les principes actuels de la PAC. Comme je le disais tout à l’heure, l’important serait de savoir pourquoi on souhaite aider les agriculteurs et quels objectifs on assigne à la PAC. Mais cette question n’a toujours pas reçu de réponse.

J’en viens au programme Marco Polo, qui vise à ce que du fret se reporte de la route vers le rail, le transport fluvial ou le cabotage côtier, plus respectueux de l’environnement. La Cour a publié un rapport spécial sur l’utilisation des crédits du programme actuel, dit Marco Polo 2, qui couvre la période 2007-2013 et est doté de 450 millions d’euros. La Commission a proposé de poursuivre ce type de programme sur la période 2014-2020, sans que l’on sache encore quels objectifs exacts lui seront assignés ni quel sera le montant des crédits.

Il faut savoir que c’est la Commission qui gère seule, de manière centralisée, les crédits de Marco Polo, sans partage avec les États comme pour la PAC. C’est elle qui reçoit les projets, les étudie et décide du soutien financier à leur apporter. Cette responsabilité est partagée entre sa direction générale « Mobilité et transports » et l’Agence exécutive pour la compétitivité et l’innovation (EACI).

Les crédits de ce programme ne financent pas d’investissements, mais visent à compenser pour les transporteurs les coûts induits, du moins les premières années, par le transfert d’une part de volume de fret routier vers d’autres modes de transport. Quatre-vingts pour cent des dépenses du programme ont été consacrées à ces transferts modaux. À la suite de l’audit qu’elle a mené en Belgique, en Allemagne, en France, en Italie, au Luxembourg et aux Pays-Bas, la Cour a constaté que seul un quart des volumes de fret escomptés se sont reportés de la route vers d’autres modes de transport. L’objectif d’un transfert de 20 milliards de tonnes/kilomètres par an ne sera pas atteint, faute d’un nombre suffisant de projets.

Il est vrai aussi que le programme a été contrarié par la crise économique qui s’est accompagnée d’une diminution du volume général de trafic et a conduit les transporteurs routiers à baisser leurs prix, ce qui a au contraire encouragé un report du trafic vers le transport routier, devenu plus compétitif.

De son audit, la Cour a également conclu que l’incidence réelle des crédits de ce programme était très difficile à évaluer, faute de données fiables suffisantes, relatives notamment à la congestion routière ou aux accidents. Eurostat ne dispose pas des outils de mesure pour ce faire.

Le faible nombre de projets présentés s’explique aussi par la difficulté de les présenter dans la forme exigée par la Commission. C’est un véritable parcours du combattant, de surcroît coûteux. La Cour a calculé que le prix moyen de présentation d’un projet s’élevait à environ 100 000 euros.

Enfin, la Cour a constaté qu’environ la moitié des projets qu’elle avait audités avait eu une durée de vie limitée. Plusieurs bénéficiaires d’aides ont arrêté leur projet avant même que n’expire le contrat conclu avec la Commission. Et parmi ceux qui ont mené le leur à terme, une grande partie a supprimé les services initialement proposés, ou bien en a sensiblement modifié la teneur après l’arrêt du financement européen. Sur six des seize projets audités, le service subventionné n’était plus opérationnel au moment de l’audit, que les volumes aient été insuffisants ou que l’un des partenaires se soit retiré ou ait fait faillite. Pour deux autres, si l’activité de transfert modal avait été maintenue, sa portée avait été limitée.

Au total, l’appréciation de la Cour n’est pas très positive sur la mise en œuvre du programme Marco Polo.

La Présidente Danielle Auroi. Vous confirmez l’impression que nous avions.

Le temps qui nous était imparti pour cette audition étant écoulé, je propose que vous répondiez par écrit aux questions auxquelles vous n’avez pu encore répondre, notamment celles concernant les restes à liquider et la collaboration avec les chambres régionales des comptes.

M. Michel Cretin. Il est courant que des crédits d’engagement soient votés sans que le Conseil ne vote ensuite les crédits de paiement correspondants. La Cour rappelle chaque année dans son rapport annuel qu’il faudrait tendre à rapprocher le montant des seconds du montant des premiers.

La Présidente Danielle Auroi. Nous vous remercions, monsieur, de cette audition passionnante. Nous rêvions que vous puissiez nous donner la répartition géographique des erreurs et fraudes dans la gestion des crédits européens.

M. Michel Cretin. Vous n’êtes pas les seuls. Cette demande nous est régulièrement faite au Parlement européen.

La Présidente Danielle Auroi. Nous savons maintenant que cela n’est pas possible. Cela nous invite donc à réfléchir autrement.

II. Communication de Mme Marietta Karamanli sur le contrôle parlementaire d’Europol (COM(2013) 173 final – E 8265) 

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Madame la Présidente, mes chers collègues, je vous propose de prendre position sur la proposition de règlement du parlement européen et du conseil relatif à l'Agence de l'Union européenne pour la coopération et la formation des services répressifs (Europol) du 27 mars 2013.

La proposition de règlement vise notamment à intégrer le CEPOL – collège européen de police – dans Europol. Elle apporterait également des modifications importantes au fonctionnement d’Europol : transmission d’informations, communication avec les services répressifs, réforme de la gouvernance. Enfin, elle définirait les modalités du contrôle parlementaire d’Europol prévu par le traité de Lisbonne.

La Commission européenne estime que la fusion du CEPOL et d’Europol permettrait de dégager des synergies et des gains d’efficacité. Des économies de l’ordre de 17,2 millions d’euros sur la période 2015-2020 sont annoncées par la Commission européenne.

La très grande majorité des États membres, dont la France, est très opposée à cette fusion. Les deux agences ont des champs de compétence et des modes de fonctionnement différents. Les formations du CEPOL sont, en très grande majorité, hors du champ de compétence d’Europol. Selon les personnes auditionnées, la dispersion des missions et des moyens d’Europol doit être évitée. Enfin, les économies de 17 millions d’euros avancées seraient très discutables et peu convaincantes. En l’état actuel des négociations au Conseil, il parait très probable que les dispositions sur la fusion des deux agences seront abandonnées.

La proposition vise à accroitre le transfert d’informations des États membres vers Europol. Toutefois, l’unité nationale Europol devrait rester le point de contact privilégié entre Europol et les autorités nationales.

Des données personnelles ne pourraient être transmises par Europol, dans le cadre de ses missions, à des États tiers, organisations internationales ou organes de l’Union qu’avec le consentement de l’État membre ayant fourni ces données à Europol. Toutefois, l’autorisation de l’État membre pourrait être « réputée acquise » si ce dernier n’a pas expressément limité les possibilités de transferts ultérieurs.

Un régime de transfert des données personnelles vers les États tiers ou des organisations internationales – article 31 – serait possible si certaines conditions sont réunies. Toutefois, des exceptions sont prévues. En outre, le conseil d’administration pourrait autoriser une série de transferts pour une période maximale d’un an. Le contrôleur européen de la protection des données devrait donner son accord. Il convient de relever le caractère large des exceptions prévues.

Le régime de protection des données personnelles serait, selon la Commission européenne, renforcé. Le contrôleur européen recevrait et examinerait les réclamations, contrôlerait l’application du règlement, conseillerait Europol et effectuerait un contrôle préalable des traitements notifiés. Actuellement, le contrôle de la protection des données repose sur les autorités nationales de protection des données s’agissant des données transmises par les États membres et sur l’autorité de contrôle commune (ACC) s’agissant de l’activité d’Europol. Les États membres ont souligné que le régime de contrôle par le contrôleur européen de la protection des données n’était pas nécessairement convaincant.

Le contrôleur européen de la protection des données, dans son avis du 31 mai 2013, souligne la nécessaire coopération entre les autorités européenne et nationales chargées de la protection des données. Il rappelle que les transferts de données personnelles aux États tiers et organisations internationales en dehors du cadre d’un accord international ou d’une décision d’adéquation devraient être plus strictement limités et encadrés et souligne, à cet égard, que le consentement d’un État membre à un transfert vers un tiers ne doit jamais pouvoir être présumé.

Plusieurs modifications relatives aux organes de direction d’Europol ont suscité des critiques. Le directeur exécutif serait nommé par le conseil d’administration pour 5 ans sur la base d’une liste de trois noms fournie par la Commission européenne, au lieu d’une nomination pour 4 ans par le Conseil de l’Union.

Les modifications ayant trait à la procédure de nomination, aux modifications découlant de l’intégration du CEPOL et aux deux voix accordées à la Commission européenne, au lieu d’une actuellement, sont très contestées.

J’en viens maintenant au contrôle parlementaire d’Europol. Bien qu’Europol ne dispose pas d’un pouvoir d’enquête autonome ni de pouvoirs coercitifs propres, les activités de l’agence ont une incidence en termes de droits fondamentaux et plus particulièrement sur la vie privée des citoyens, ne serait-ce que par l’échange de données à caractère personnel. Cela implique nécessairement le renforcement du contrôle démocratique prévu par le traité de Lisbonne.

La réflexion sur les règlements qui définiront la structure et les tâches d’Europol ainsi que les modalités de contrôle a débuté depuis plusieurs années.

Depuis qu’Europol est devenu une agence, en tant qu’autorité budgétaire, le Parlement européen vote le budget d’Europol. Il est par ailleurs en charge du contrôle du budget et donne décharge au directeur sur l’exécution du budget. A l’heure actuelle, les parlements nationaux contrôlent Europol essentiellement par le biais de leurs pouvoirs de contrôle du pouvoir exécutif ainsi que par leur pouvoir d’examen des propositions d’actes législatifs européens.

Le Parlement européen s’est à de nombreuses reprises exprimé sur le contrôle d’Europol et a toujours soutenu l’idée de la création d’une commission mixte composée de représentants des parlements nationaux et du Parlement européen.

L’Assemblée nationale s’est prononcée en 2011 et a adopté la résolution européenne sur le contrôle parlementaire d’Europol, selon laquelle elle :

- « estime que la création d’un nouvel organe de coopération interparlementaire dédié au contrôle politique d’Europol n’est pas souhaitable »

- « soutient l’idée qu’une commission mixte composée de représentants du Parlement européen et des parlements nationaux »

- « juge que les parlements nationaux doivent disposer d’informations plus détaillées sur Europol et recevoir, en tout état de cause, les documents transmis par le Conseil de l’Union européenne au Parlement européen ».

Le Sénat français s’est déclaré favorable à la création d’une commission mixte composée de parlementaires européens et nationaux qui serait chargée d’assurer le contrôle d’Europol.

La proposition de règlement déposée par la Commission européenne prévoit notamment en ses articles 53 et 54 la transmission d’un certain nombre de documents d’Europol. En application d’autres articles du règlement, Europol devrait également transmettre au Parlement européen et aux parlements nationaux plusieurs rapports, notamment ses programmes de travail.

En première analyse, on peut s’interroger sur certaines dispositions :

- les parlements nationaux doivent pouvoir continuer à prendre leurs propres mesures de contrôle ;

- il conviendra de s’assurer que, dans le texte final, les parlements nationaux soient destinataires des mêmes documents que le Parlement européen ;

- par ailleurs, l’accès à des informations classifiées sous certaines conditions n’est prévu que pour le Parlement européen. Cette question nécessite un travail complémentaire afin de trouver une solution qui garantisse la confidentialité nécessaire aux activités d’Europol.

La proposition de règlement prévoit en outre notamment que seul le Parlement européen accomplit les tâches et reçoit les documents liés à sa fonction d’autorité budgétaire, et reçoit le directeur exécutif.

Le projet de rapport du rapporteur M. Agustín Díaz de Mera García Consuegra apporterait plusieurs modifications. Il précise que le contrôle d’Europol par le Parlement européen en association avec les parlements nationaux se ferait par l’intermédiaire d’une cellule de contrôle parlementaire : cette cellule serait une structure spécialisée et de petite taille constituée par la commission LIBE du parlement européen en collaboration avec un représentant de la commission de l’intérieur de chacun des parlements nationaux des États membres. Cette cellule serait toujours reçue au siège du Parlement européen et serait convoquée par le président de la Commission LIBE. Elle serait présidée par ce-dernier et le représentant du parlement national de l’État membre qui assure la présidence du Conseil. Cette cellule – et non le seul Parlement européen – aurait accès aux informations classifiées de l’UE et aux informations sensibles traitées par Europol mais, compte tenu de leur caractère sensible, celles-ci seraient traitées au Parlement européen. L’ensemble du contrôle relèverait de la cellule de contrôle parlementaire, y compris l’accès aux documents de contrôle budgétaire.

Plusieurs points pourraient être amendés. Au sein de la cellule, il faudrait prévoir deux sièges par chambre nationale, afin d’assurer un contrôle véritablement démocratique. Il convient de s’interroger sur le fait que la cellule n’est convoquée que par le président de la Commission LIBE. Elle devrait au contraire être convoquée par ses deux coprésidents. Par ailleurs, le candidat retenu par le conseil d’administration pour le poste de directeur exécutif serait invité à faire une déclaration devant la cellule de contrôle parlementaire. Il serait également invité avant que le conseil d’administration ne prolonge son mandat. Il conviendrait de prévoir un avis de la cellule de contrôle parlementaire avant toute nomination et prolongation de mandat. Enfin, le directeur exécutif ne pourrait être démis que par le conseil d’administration, qui s’expliquerait devant la cellule de contrôle. Un avis pourrait être rendu par la cellule de contrôle avant que le conseil d’administration ne démette le directeur exécutif.

En conséquence de ces observations, je vous propose, mes chers collègues, d’approuver la proposition de résolution que je vous présente, qui reprend les éléments mentionnés.

M. Joaquim Pueyo. Je voulais connaître la position des groupes parlementaires européens, pour déterminer dans quelles conditions notre résolution peut aboutir.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Les échos que j’ai reçus sont plutôt favorables. Par ailleurs, le choix de la ville pour accueillir le siège pose question, le Conseil ayant désigné Budapest à l’issue d’un vote lors du dernier Conseil JAI.

En outre, l’accès des parlements nationaux aux données classifiées et sensibles devra faire l’objet d’une étude précise. La confidentialité nécessaire et l’efficacité interdisent une diffusion trop large de ces informations.

M. Arnaud Leroy. Je voudrais élargir le propos à la thématique des agences européennes, qui sont fréquemment créées pour faire face à un problème ponctuel. J’ai durant longtemps été employé par une de ces agences et j’ai pu constater au fil des ans nombre de dérives. Entendre que le siège serait à Budapest m’effraie car cette ville aura une faible capacité d’attraction sur les fonctionnaires, puisque l’indice des traitements est inférieur de 20 % à celui de Bruxelles, ce qui générera des difficultés de recrutement analogues à celles que nous avons connues à Lisbonne. Le contrôle de la Commission, du fait de la distance, sera également plus difficile. Aussi aimerais-je que nous nous saisissions de la problématique de la gouvernance de ces agences qui concernent 10 000 fonctionnaires pour 21 000 fonctionnaires européens. Je me souviens du commissaire Siims Kallas, vice-président en charge de l’administration, demandant à l’équivalent des comités d’entreprise de l’aide car la Commission européenne n’était pas en mesure de contrôler ce qu’elle avait elle-même créé.

La Présidente Danielle Auroi. Notre commission pourrait effectivement travailler sur la question des agences, mais il est trop tard, en l’espèce, pour remettre en cause le choix de Budapest par le Conseil.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Je partage l’intervention sur les agences. Toutefois, nous nous opposons à une fusion pour ne pas mettre en difficulté Europol, qui est une agence qui fonctionne bien. Je propose sur la résolution deux petites modifications. Au point 4, pour que cela soit clair, de préciser de « de chaque chambre nationale » et, au point 7, de viser les autorités nationales compétentes comme le prévoient les textes.

La Présidente Danielle Auroi. Je vous propose donc d’adopter cette résolution à l’unanimité et d’autoriser la publication de ce rapport.

Puis, la Commission a ensuite adopté la proposition de résolution :

« L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu l’article 12 du traité sur l’Union européenne,

Vu l’article 88 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la décision du Conseil 2009/371/JAI du 6 avril 2009 portant création de l’Office européen de police (Europol),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l'Agence de l'Union européenne pour la coopération et la formation des services répressifs (Europol) et abrogeant les décisions 2009/371/JAI et 2005/681/JAI (COM[2013] 173),

Vu la résolution européenne de l’Assemblée nationale sur le contrôle parlementaire d’Europol no 652 du 25 avril 2011,

1. Rappelle les pouvoirs de contrôle des activités d’Europol conférés au Parlement européen et aux parlements nationaux par le traité sur l’Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne afin d’assurer le contrôle démocratique d’Europol ;

2. Estime que les dispositions de la proposition de règlement précitée relatives au contrôle parlementaire sont très insuffisantes ;

3. Souligne que le règlement ne doit en aucun cas restreindre les pouvoirs de contrôle des activités d’Europol que les parlements nationaux exercent en application des législations des États membres ;

4. Est favorable à la création d’une commission mixte composée de représentants du Parlement européen et des parlements nationaux. Cette commission mixte devrait réunir au Parlement européen les membres de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen et deux membres de la commission compétente en matière de sécurité de chaque chambre nationale, aux fins d’assurer un contrôle véritablement démocratique en permettant la représentation de la majorité et de l’opposition de chaque chambre nationale. Cette commission mixte serait coprésidée par le président de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen et un membre d’un parlement national. Elle serait convoquée par ses deux coprésidents ;

5. Souhaite que, outre la procédure d’audition du candidat au poste de directeur exécutif, l’avis de la commission mixte soit requis avant la nomination du directeur exécutif, la prolongation de son mandat ainsi que, le cas échéant, avant sa révocation ;

6. Juge inopportun le projet de fusion entre le Collège européen de police (CEPOL) et Europol, qui ne permettrait pas de réelles synergies ;

7. Rappelle le rôle central que doivent continuer à exercer les unités nationales Europol en tant qu’organes de liaison entre Europol et les autorités nationales compétentes ;

8. Juge injustifiées les évolutions proposées s’agissant de la nomination du directeur exécutif d’Europol par le conseil d’administration sur la base d’une liste de candidats émise par la Commission européenne et des droits de vote de cette dernière au sein du conseil d’administration ;

9. Souligne certaines insuffisances de la proposition de règlement relatif à Europol précitée en matière de protection des données, s’agissant de la possibilité de présumer de l’accord d’un État membre pour un transfert de données à caractère personnel vers des organes de l’Union, des pays tiers et des organisations internationales ;

10. Attire l’attention sur le risque que le contrôle de la protection des données, n’étant plus confié au niveau européen à une structure dédiée au contrôle d’Europol, puisse être moins spécifique, ainsi que sur la coordination nécessairement étroite entre les autorités nationales et européenne de protection des données qui doit être garantie. »

III. Communication de M. Arnaud Leroy sur la proposition de règlement relative aux espèces exotiques envahissantes (COM (2013) 620 – E 8639) 

M. Arnaud Leroy, rapporteur. L’expression « espèces exotiques envahissantes », ou EEE, désigne les espèces et sous-espèces d’animaux, de végétaux, de champignons ou de micro-organismes dont des spécimens sont introduits par l’action de l’homme en dehors de leur aire de répartition naturelle présente ou passée, et sont susceptibles de survivre puis de se reproduire.

Leur introduction dans une aire géographique où elles ne sont pas présentes à l’origine s’effectue soit intentionnellement, de manière légale ou non, soit involontairement, sous la forme de contaminants présents dans des marchandises ou de « passagers clandestins » accrochés sur des voyageurs à leur insu ou bien transportés via des infrastructures de transport.

On estime que 10 à 15 % des 12 000 espèces exotiques présentes dans l’environnement européen se sont reproduites et propagées, causant des dommages considérables, sur le plan écologique mais aussi socio-économique. À l’échelle de l’Union européenne, ces dommages sont évalués à 12 milliards d’euros par an et le phénomène menace de prendre de l’ampleur avec l’intensification des échanges mondiaux, des transports et du tourisme, mais aussi à cause de l’aggravation du changement climatique.

Dans le cadre d’une stratégie ad hoc, l’Union européenne s’est engagée à enrayer la perte de biodiversité d’ici à 2020, conformément aux engagements internationaux pris à Nagoya en 2010. La présente proposition de règlement, dont l’incidence budgétaire est estimée à 560 000 euros pour 2015-2021, s’inscrit dans cette optique.

Le premier enjeu consiste à empêcher l’introduction de nouvelles EEE dans le marché intérieur.

À cet effet, une liste des EEE dites « préoccupantes pour l’Union européenne » sera adoptée et mise à jour par la Commission européenne au moyen d’actes d’exécution. Les EEE inscrites ne pourront plus être introduites intentionnellement sur le territoire de l’Union européenne, ni y transiter, ni y être détenues, mises sur le marché, cultivées, mises en situation de se reproduire ou libérées dans l’environnement.

Parallèlement, les États membres pourront, d’une part, prendre des mesures d’urgence contre des EEE absentes de la liste communautaires mais susceptibles de remplir les critères requis pour y figurer et, d’autre part, interdire toute libération intentionnelle dans l’environnement d’une EEE absente de la liste communautaire mais jugée préoccupante à l’échelle nationale.

Chaque État membre devra aussi réaliser une analyse exhaustive des voies d’introduction et de propagation non intentionnelles sur son territoire d’EEE préoccupantes, et élaborer et mettre en œuvre un plan d’action adapté à la situation constatée.

Il s’agit ensuite de détecter et d’éradiquer les EEE préoccupantes déjà présentes dans l’Union.

Pour empêcher l’implantation et la propagation d’espèces préoccupantes, le texte prévoit la mise sur pied par les États membres d’un système de surveillance couvrant la totalité de leur territoire national, afin de collecter et d’enregistrer les données sur l’apparition dans l’environnement d’EEE dont la présence était jusqu’alors inconnue, et ainsi de pouvoir prévenir leur propagation dans l’Union européenne.

Il est également prévu de mettre en place des structures pleinement opérationnelles pour exécuter les contrôles officiels sur les animaux et les végétaux pénétrant dans l’Union européenne, afin d’éviter l’introduction intentionnelle d’EEE classées comme préoccupantes.

Après la détection précoce, les États membres appliqueront des mesures d’éradication. Les méthodes employées devront être efficaces, de manière à éliminer totalement et définitivement la population de l’EEE concernée, en tenant dûment compte de la santé humaine et de l’environnement, et en garantissant que toute douleur ou souffrance soit épargnée aux animaux ciblés. Les États membres procéderont ensuite à un suivi, par le biais du système de surveillance, afin de contrôler l’efficacité de l’éradication.

Il convient enfin de gérer les EEE largement répandues. Les EEE inscrites sur la liste communautaire mais déjà largement répandues sur le territoire d’un État membre feront l’objet, de la part de celui-ci, de mesures de gestion, afin que ses effets sur la biodiversité et les services écosystémiques ainsi que sur la santé humaine et l’économie soient réduits au minimum.

Ces mesures de gestion consisteront en des actions physiques, chimiques ou biologiques visant à l’éradication, au contrôle ou au confinement de la population de ladite EEE. Les méthodes utilisées lors de l’application de ces mesures devront tenir compte de la santé humaine et de l’environnement.

Lorsqu’un État membres constatera l’existence d’un risque important qu’une EEE préoccupante pour l’Union européenne se propage de son territoire vers celui d’un État membre voisin, il devra le lui notifier immédiatement, ainsi qu’à la Commission européenne, afin de permettre la mise en place de mesures de gestion arrêtées d’un commun accord.

Les États membres devront en outre adopter des mesures réparatrices proportionnées contribuant au renforcement de la résilience des écosystèmes face aux invasions d’EEE et au rétablissement des écosystèmes dégradés, endommagés ou détruits par des EEE.

Je tenais à alerter les membres de la Commission européenne sur cet enjeu mais aussi sur les nouvelles charges financières et administratives qui incomberont prochainement aux États membres.

M. Jérôme Lambert. Certaines de ces espèces invasives ont des conséquences pour l’environnement et l’agriculture mais aussi pour la santé humaine, notamment des moustiques susceptibles de porter le germe de la malaria, qui se propagent du fait du changement climatique.

La Présidente Danielle Auroi. De plus en plus d’espèces végétales causent des dommages épouvantables pour les communes rurales : dans ma circonscription, des cours d’eau ont été totalement asphyxiées et ont nécessité un arrachage à la main de plantes invasives.

Cette communication d’Arnaud Leroy est donc très utile et je vous invite à soutenir la proposition de règlement qu’il présente.

La Commission des affaires européennes approuve, à l’unanimité, la proposition de règlement.

IV. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Textes « actés »

Aucune observation n’ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :

Ø Consommation et protection des consommateurs

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un programme "Consommateurs" pour la période 2014-2020 (COM(2011) 707 final – E 6790).

Ø Fiscalité

- Proposition de décision d’exécution du Conseil autorisant la République de Roumanie à continuer à appliquer une mesure particulière dérogeant à l’article 193 de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (COM(2013) 585 final – E 8603) ;

- Proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de l’Union européenne, de l’accord entre l’Union européenne et la République française visant à l’application, en ce qui concerne la collectivité de Saint-Barthélemy, de la législation de l’Union sur la fiscalité de l’épargne et la coopération administrative dans le domaine de la fiscalité (COM(2013) 556 final – E 8628) ;

- Proposition de décision d’exécution du Conseil autorisant le Luxembourg à introduire une mesure particulière dérogatoire à l’article 285 de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (COM(2013) 608 final – E 8633) ;

- Proposition de décision d’exécution du Conseil autorisant la République italienne à continuer d’appliquer une mesure particulière dérogeant à l’article 285 de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (COM(2013) 609 final – E 8634) ;

- Proposition de décision d’exécution du Conseil modifiant la décision 2007/441/CE autorisant la République italienne à appliquer des mesures dérogeant à l’article 26, paragraphe 1, point a), et à l’article 168 de la directive 2006/112/CE du Conseil relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (COM(2013) 610 final – E 8635).

Point B

La Commission a approuvé les textes suivants :

Ø Environnement

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1013/2006 concernant les transferts de déchets (COM(2013) 516 final – E 8558).

Ø Politique agricole commune

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil fixant un taux d’ajustement des paiements directs prévu par le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil en ce qui concerne l’année civile 2013 (COM(2013) 159 final – E 8196) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant certaines dispositions transitoires relatives au soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) et modifiant le règlement (UE) [DR] en ce qui concerne les ressources et leur répartition pour l’exercice 2014 et modifiant le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil ainsi que les règlements (UE) [PD], (UE) [HZ] et (UE) [OCM] en ce qui concerne leur application au cours de l’exercice 2014 (COM(2013) 226 final – E 8251).

Accords tacites de la Commission

En application de la procédure adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), 29 octobre 2008 (virements de crédits), 28 janvier 2009 (certains projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines autres nominations), et 16 octobre 2012 (certaines décisions de mobilisation du fonds européen d’ajustement à la mondialisation), celle-ci a approuvé tacitement les documents suivants :

- Décision du Conseil portant nomination d’un membre danois du Comité économique et social européen (14806/13 – E 8778) ;

- Comité consultatif pour la libre circulation des travailleurs - Nomination de Mme Rosa CRAWFORD, membre pour le Royaume-Uni, en remplacement de M. Ben MOXHAM, membre démissionnaire (15088/13 – E 8779) ;

- Comité consultatif pour la coordination des systèmes de sécurité sociale. Nomination de Mme Rosa CRAWFORD, membre suppléant du Royaume Uni, en remplacement de M. Sean BAMFORD, membre démissionnaire (15094/13 – E 8780) ;

- Comité consultatif pour la coordination des systèmes de sécurité sociale. Nomination de Mme Mary O’SULLIVAN, membre irlandais, en remplacement de Mme Anne McMANUS, membre démissionnaire (15103/13 – E 8781) ;

- Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu du travail. Nomination de Mme Marina GORDON ORTIZ, membre titulaire espagnol, en remplacement de Mme Isabel MAYA RUBIO, membre démissionnaire (15218/13 – E 8782) ;

- Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu du travail. Nomination de Mme Isabel MAYA RUBIO, membre suppléant espagnol, en remplacement de M. José de la CAVADA HOYO, membre démissionnaire (15219/13 – E 8783) ;

- Conseil de direction du Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (CEDEFOP). Nomination de Mme Tanya SAMMUT-BONNICI (MT), membre dans la catégorie des représentants des gouvernements. M. John HUBER (MT), membre dans la catégorie des représentants d’employeurs (15231/13 – E 8784) ;

- Décision du Conseil portant nomination d’un membre allemand et d’un suppléant allemand du Comité des régions (15241/13 – E 8785) ;

- Comité consultatif pour la coordination des systèmes de sécurité sociale. Nomination de Mme Marina GORDON ORTIZ, membre espagnol, en remplacement de M. José de la CAVADA HOYO, membre démissionnaire (15303/13 – E 8786) ;

- Comité consultatif pour la coordination des systèmes de sécurité sociale. Nomination de M. José de la CAVADA HOYO, membre suppléant espagnol, en remplacement de M. Roberto SUÁREZ SANTOS, membre démissionnaire (15310/13 – E 8787) ;

- Virement de crédits no DEC 33/2013 à l’intérieur de la section III - Commission - du budget général pour l’exercice 2013 (DEC 33/2013 – E 8801) ;

- Virement de crédits no DEC 34/2013 à l’intérieur de la section III - Commission - du budget général pour l’exercice 2013 (DEC 34/2013 – E 8802) ;

- Virement de crédits no DEC 35/2013 à l’intérieur de la section III - Commission - du budget général pour l’exercice 2013 (DEC 35/2013 – E 8803) ;

- Décision du Conseil modifiant la décision 2012/389/PESC relative à la mission de l’Union européenne visant au renforcement des capacités maritimes régionales dans la Corne de l’Afrique (EUCAP NESTOR) (SN 3703/13 – E 8804).

Accords tacites de la Commission liés au calendrier d’adoption par le Conseil

La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour les textes suivants :

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux bateaux de plaisance et aux véhicules nautiques à moteur (COM(2011) 0456 final – E 6486) ;

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux responsabilités de l’État du pavillon en ce qui concerne le respect de la directive 2009/13/CE du Conseil du 16 février 2009 portant mise en œuvre de l’accord conclu par les Associations des armateurs de la Communauté européenne (ECSA) et la Fédération européenne des travailleurs des transports (ETF) concernant la convention du travail maritime, 2006, et modifiant la directive 1999/63/CE (COM(2012) 0134 final – E 7229).

La séance est levée à 18 h 30

Membres présents ou excusés

Commission des affaires européennes

Réunion du mardi 12 novembre 2013 à 16 h 30

Présents. - Mme Danielle Auroi, M. Jean-Luc Bleunven, M. Philip Cordery, Mme Seybah Dagoma, M. William Dumas, M. Yves Fromion, Mme Estelle Grelier, M. Laurent Kalinowski, Mme Marietta Karamanli, M. Jérôme Lambert, M. Arnaud Leroy, M. Philippe Armand Martin, M. Michel Piron, M. Joaquim Pueyo, M. Didier Quentin, Mme Sophie Rohfritsch

Excusé. - M. Jean-Claude Mignon